3e colloque Écomédecine

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3e colloque Écomédecine
3e colloque Écomédecine®
26 et 27 octobre 2012
La Maison Internationale – Paris 14e
Le colloque accueillait cette année, sous le haut patronage de Marisol Touraine, Ministre des
Affaires sociales et de la Santé, des conférences plénières et des tables rondes ainsi qu’un
espace exposition. Jean-Pierre Guillaume, ostéopathe et médecin, Danielle Roux,
pharmacienne et chargée d’enseignement en phyto-aromathérapie, Charlotte Mareau,
Docteur en psychologie et Albert-Claude Quemoun, Docteur en pharmacie, homéopathe,
Président de l’Institut Homéopathique Scientifique, en composaient le Comité d’organisation.
Au cours des deux journées, près de 40 intervenants se sont succédés à la tribune.
Pourquoi un nouveau colloque ?
Les précédentes éditions dataient de 2005 et 2007. Visiblement, les démarches et décisions
prises lors de ces deux colloques pour sensibiliser les pouvoirs publics à la reconnaissance
des médecines dites non conventionnelles, sont restées lettre morte. Celui-ci fera t-il mieux à
l’heure où une note (n°290 – www.stratégie.gouv.fr) issue du Centre d’analyse stratégique
(Cabinet du Premier Ministre) pose la question : Quelle réponse des pouvoirs publics à
l’engouement pour les médecines non conventionnelles ?
Pour permettre une meilleure compréhension, voici les thèmes qui étaient proposés.
1re journée
Introduction : écomédecine®, les médecines humanistes : de l’empirisme d’hier à la science
de demain. Jean-Pierre Guillaume, ostéopathe et médecin.
SANTÉ ET ENVIRONNEMENT : ÉTAT DES LIEUX ET ÉTATS DE SANTÉ, LA PLACE DE
L’ÉCOMEDECINE®
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Quels sont les problèmes de santé clés en France ?
Santé au travail : les nouveaux risques et l’évolution de la prévention.
Diagnostic, guérisons : agir dans l’intérêt du patient.
Point sur les principales évolutions réglementaires impactant l’écomédecine®.
Etudes cliniques et retours d’expériences des apports de l’homéopathie en milieu
hospitalier.
Le nécessaire partenariat avec l’écomédecine® pour une reconnaissance des
organismes payeurs.
Écomédecine® et ethnomédecine.
2e journée
- Écomédecine® : de quoi parle t-on ?
- Etudes cliniques et résultats : quels processus de validations de l’écomédecine®.
- Etudes et retours d’expériences sur le thème « pollutions bactériennes, nutrition et
systèmes immunitaires ».
- Les médecines et l’alimentation du futur.
- Etudes et retours d’expériences en ostéopathie
- Allocution de clôture : vers la création d’un label de l’écomédecine®.
La notion d’écomédecine® : que tend-elle à regrouper ? Quid du terme habituellement
usité de médecines non-conventionnelles ou complémentaires ?
À la première question de la journée posée aux six intervenants Que représente pour vous la
notion d’écomédecine® ? voici quelques définitions proposées :
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Daniel Kieffer (naturopathe, directeur du Cenatho) : c’est la médecine du 3e
millénaire, une médecine non toxique, le respect de l’humain dans sa globalité. Il doit
y avoir collaboration entre les différentes écomédecine®.
Charlotte Mareau (psychologue) : une approche globale obligatoire, ne pas réduire le
traitement à son symptôme, suggestion de l’auto-guérison à inculquer.
Eric Kiener (médecin acupuncteur, spécialiste MTC, exerce en Suisse) : replacer
l’homme à sa place, c’est-à-dire entre le ciel et la terre. (A écrit Une médecine pour
l’homme debout).
Danielle Roux (pharmacienne et enseignante en naturothérapie : un individu respecté
dans un environnement respecté. Mais la formation est primordiale pour exercer.
Marie de Beaucorps (médecin, nutritionniste) : l’aliment est le médicament.
JP Guillaume (médecin, ostéopathe) : quête de la santé, du vivant, de l’autoguérison, de la prévention, quand la médecine allopathique est une médecine
d’urgence.
Claude Jousset (médecin allopathe et homéopathe) : d’abord donner une définition
au terme d’ écomédecine®, car on reste dans le flou et vis-à-vis des pouvoirs publics,
cela ne peut pas passer. Sa conception : toutes les disciplines qui se réclament de la
santé doivent passer par le cursus médical, il faut par conséquent être, soit médecin,
soit scientifique, soit pharmacien, ceci pour éviter les dérives.
Autant dire que cette dernière intervention de Claude Jousset, qui marque bien la réticence
toujours vivace des médecins « traditionnels » envers les médecines non conventionnelles,
n’est pas restée sans réponses, ni réflexions, synthétisées ci-après :
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La médecine est affaire de médecin, mais combattre la maladie est différent de
s’occuper de sa santé. Les écomédecine® sont en amont de LA médecine, elles sont
préventives (Kiener).
Attention à la responsabilité des médecins qui crient au loup et à l’arnaque lorsqu’on
parle d’autres médecines quand eux-mêmes ne consacrent que 15 minutes pour
recevoir un patient (De Beaufort).
Il faut en effet définir le terme d’écomédecine® pour peut-être mieux se faire
comprendre des pouvoirs publics et des médecins afin de travailler ensemble
(Mareau).
On doit rendre le patient responsable, actif pour sa santé au lieu de l’infantiliser
comme le fait la médecine allopathique. Il faut essayer de repenser sa manière de se
soigner, ne pas toujours vouloir tout gratuit, remboursé car cela soumet à des règles.
Est-ce que l’on veut cela pour les médecines non conventionnelles ? (Kiener)
En revanche, pour tous, le consensus opère concernant le diagnostic. Ce terme fait partie de
la médecine, ne doit pas être employé hors ce domaine, plutôt parler de bilan de santé (point
de vue juridique) et ce diagnostic doit être acquis lorsqu’un « client » vient nous voir (le
terme « patient » étant également réservé aux médecins). Ces différents points ont été
abordés la veille et m'ont été relatés.
Est exposé ensuite le problème de la formation minimale à exiger pour crédibiliser cette
reconnaissance. L'ouverture à d'autres disciplines est seulement évoquée.
La création d’un label unique inspiré du modèle allemand n’est pas souhaité car il formaterait
les spécialités, au lieu d’en garder leur spécificité. Eric Kiener indique qu'il est sûrement
intéressant en terme de droit mais pas en terme de formation. Attention au formatage.
(Rappel synthétisé : le modèle allemand autorise l’exercice de sa discipline aux praticiens de
médecine non conventionnelle, après la délivrance d’un diplôme spécifique qui clôt une
formation tronc commun pour tous ; ce vers quoi tendent les pouvoirs publics français,
pressés qu'ils sont par les médecins).
Le public n'a eu que peu d'occasions pour prendre la parole mais l'une des interventions est
venue d'une praticienne en shiatsu (ancienne élève de Michel Odoul), pour rappeler le
rapport Lannoye et les recommandations de l'OMS sur les médecines complémentaires,
même si cela date, et de demander ce qu'il en était car notre discipline, le shiatsu, en faisait
partie intégrante à l'époque, alors qu'elle semble être tenue à l'écart du présent débat.
A notre grande surprise et désarroi, le mot secte est apparu dans la bouche de JP Guillaume
qui s'est un peu emmêlé dans son explication pour finir par "ce rapport n'a rien donné, si ce
n'est une recommandation de l'OMS, dont nous allons nous inspirer".
Le shiatsu vu comme une ethnomédecine
La Fédération Française de shiatsu traditionnel m’a offert l’opportunité d’être ses yeux et ses
oreilles pendant la deuxième journée, ce qui m’a permis de constater la réelle place
accordée à notre discipline au sein de la notion d’écomédecine® et la reconnaissance à
laquelle elle prétend, puisque le but de ce colloque était de savoir s’il fallait créer un label
écomédecine®, si oui, qu’inclure sous le mot label et comment le faire valider par les
pouvoirs publics.
Les disciplines majoritairement représentées pendant ce colloque et amenées à intégrer
cette notion d’écomedecine® étaient l’ostéopathie, la naturopathie, l’homéopathie, les
psychothérapies, la phytothérapie et l’acupuncture.
Notre discipline a été par conséquent fort peu visible puisque le seul débat qui incluait un
représentant du shiatsu (le très médiatique Michel Odoul) a eu lieu le vendredi en fin
d’après-midi (veille des vacances scolaires) sous le titre Écomédecine® et ethnomédecine.
Thème : les concepts sont ancrés dans notre tradition, focus sur les réponses ancestrales de
cultures significatives. Pour les organisateurs, le shiatsu ferait donc partie des
ethnomédecines.
Je ne pourrais malheureusement pas exposer ici les échanges qui ont eu lieu pendant ce
débat car je n’étais pas présente le vendredi.
Mais force est de constater que la plupart des praticiens débateurs étaient tous issus des
milieux médicaux, pharmaciens et scientifiques, donc approuvés par l’État et que ceux-ci
n’ont à priori aucun risque juridique dans l’exercice de leur pratique. Ce qui est loin d'être le
cas du shiatsu et des autres pratiques dites non conventionnelles, seulement tolérées
(Ayurvédique, chiropractie, etc., non représentées du tout lors de ce colloque). Par
conséquent, il semblerait que le sujet soit quelque peu biaisé dès le départ, voire
complètement à l’arrivée, même si la qualité et les compétences des intervenants ne sont
pas contestables.
J'indique ici un échange personnel avec la praticienne de shiatsu qui m'a relatée sa
désagréable mésaventure avec la DCRI (les actuels renseignements généraux) qui sont
venus, à l'improviste, la questionner sur son activité, sur son lieu d'exercice, deux heures
durant, mandatés par les pouvoirs publics du département (51) dont elle dépend. (La
Miviludes reste très active dans son combat contre les sectes et pratiques sectaires.)
Il est donc impératif de rappeler le devoir de respect strict de notre code de déontologie lors
de l'exercice de notre pratique, d'éviter les mélanges d'activités sans explication (les
pouvoirs publics aiment à tout ranger dans des tiroirs) et rester humble pour restaurer, voire
créer la confiance auprès des autorités, ce qui facilitera notre reconnaissance juridique.
Les processus d'évaluation des écomédecines®
Les retours d'expérience réalisées et en cours, des différents intervenants, notamment en
ostéopathie, montrent les difficultés à faire valider les résultats car la preuve scientifique
prévaut toujours. Les ostéopathes indiquent utiliser le questionnaire MOS SF-36,
questionnaire généraliste destiné à permettre le recueil du point de vue des patients sur leur
propre état de santé dans les études de recherche clinique ou d'évaluation des traitements et
des services médicaux. Mais ce questionnaire peut-être utilisé dans un grand nombre de
discipline au moment de l'accueil du patient.
Les essais d'évaluation en cours mettent en place des groupes de comparaison avec tirage
au sort, et essais en double, voire triple aveugle avec résultats à intégrer dans des grilles de
lecture. Mais ce ne sont encore que des balbutiements.
Les problèmes majeurs rencontrés sont :
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la peur d'être évaluer, (certaines disciplines ne le souhaitent pas),
la méconnaissance des techniques d'évaluation,
la formation à l'évaluation,
pas de financement alors que le coût d'une évaluation digne de ce nom, se chiffre en
millions d'euros (les ostéopathes présents indiquent se financer en fonds propres),
difficulté à publier, domaine réservé des scientifiques, chercheurs, médecins.
Il faudrait donc développer des partenariats de recherche avec des organismes référencés
(cliniques, etc.) tout en préservant l'originalité des écomédecine®.
Conclusion du colloque : la charte écomédecine®
Des interventions plus techniques et d'intérêt inégal se sont succédées à la tribune avant
d'en venir à l'exposé du projet de charte, (ce terme ayant été préféré au mot label) avec la
création d'une Association. La synthèse a été élaborée pendant le colloque.
Il en résulte qu'il faut définir des critères à proposer aux pouvoirs publics, critères qui ont
pour but la restauration et/ou le maintien de l'état de santé du patient (s'appuyer sur le
définition de l'OMS), avec comme concepts que, chaque "patient" est unique, on le traite
plutôt lui que son symptôme avec une vision holistique en faisant appel à son pouvoir d'autoguérison. Les écomédecines® ne doivent présenter aucun lien financier qui pourrait évoquer
une secte et chaque écomédecine® doit revendiquer son concept.
Le niveau de formation proposé serait de 5 ans minimum avec un niveau Master II ou
équivalent et un RNCP de niveau 1, ceci avec une démarche scientifique comprenant des
études cliniques et fondamentales. (soit l'équivalent de la pratique des "psychothérapies").
Le projet du Comité :
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S'attacher des personnalités compétentes dans les différents domaines concernés.
Intégrer les concepts de médecine environnementales et nutritionnelles.
S'intéresser à la place des médecines traditionnelles, des ethnomédecines et aux
différentes pratiques qui se réclament de l'écomédecine®.
Finir d'élaborer la charte écomédecine®.
Le but : se protéger juridiquement.
Le rôle de la Fédération française de shiatsu traditionnel
Le sentiment final est que les concepteurs du terme écomédecine® ont montré peu
d'ouverture, voire des réticences à l'égard de certaines disciplines, même si la conclusion de
ce colloque a été un appel général au regroupement des forces vives de toutes ces
disciplines existantes et à venir.
Le terme écomédecine® est un terme neuf, créé pour se substituer à ce qui est couramment
employé, à savoir médecines non conventionnelles (utilisé dans la note 290 mentionnée plus
haut) ou médecines complémentaires.
La fédération pourrait s'immiscer dans le débat, au moins pour garder un oeil sur
l'avancement des travaux et éventuellement y participer pour ne pas risquer une mise à
l'écart prématurée et revendiquer notre discipline comme étant à part entière dans le
paysage des écomédecine® ou médecines complémentaires, traditionnelles, etc., ce que
l'on voudra. Il en va également de notre crédibilité face aux pouvoirs publics.
Céline Le Graciet
Élève praticienne - 5e année - Ecole Ayame de Danielle Chevillon