Peine, récidive et crise sécuritaire

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Peine, récidive et crise sécuritaire
Philippe Robert1
Peine, récidive et crise sécuritaire2
Participer au colloque qui célèbre le passage à l’éméritat du recteur
van de Kerchove m’est d’autant plus agréable que nous naviguons de
conserve depuis bien longtemps.
D’abord, bien sûr, au comité de Déviance & Société, depuis qu’il l’a
rejoint en 1986, et particulièrement pendant les périodes où il a pris part
à la direction éditoriale, puis à la présidence.
Mais aussi au sein du réseau GERN, particulièrement à travers les
nombreux Interlabos3 organisés aux Facultés universitaires Saint-Louis,
le plus souvent autour des résultats de séminaires qu’il y avait dirigés ou
codirigés.
Notre coopération ne s’est pas limitée à ce volet que l’on pourrait
qualifier d’institutionnel et qui concerne la gestion de la cité savante ; de
manière moins attendue, elle s’est continuée dans le domaine même de la
production scientifique.
A priori, pourtant, les modes de raisonnement respectifs d’une
discipline empirique – la sociologie – et d’une autre plus spéculative – la
théorie et la philosophie du droit – ne présageaient pas d’une
collaboration scientifique naturelle, quel qu’ait pu être notre intérêt
commun pour les matières pénales. Mais, tout au contraire, les
publications de Michel qui touchaient à mon domaine d’étude ont été
pour moi une source féconde de réflexion et, à plusieurs reprises, d’une
sorte de dialogue intellectuel à distance. Il a été l’un de ces quelques
‘interlocuteurs’ dispersés de par le monde dont l’œuvre m’a donné
matière à réflexion.
1
Directeur de recherches émérite au CNRS [Centre de recherches sociologiques sur
le droit et les institutions pénales – CESDIP – CNRS, Université de Versailles
(UVSQ), ministère de la Justice].
2
Je remercie les collègues qui m’ont aidé de leurs suggestions, singulièrement
Renée Zauberman qui a procédé à une lecture attentive d’une première version ;
également Corinne Balmette pour la recherche documentaire et Bessie Leconte
pour la révision éditoriale.
3
Par exemple, sur La pensée juridique de Bentham (1986), Droit et intérêt. Approche
interdisciplinaire (1990), L’accélération du temps juridique (1999), De la pyramide au réseau.
Vers de nouveaux modes de production du droit ? (2003).
Philippe Robert, Peine, récidive et crise sécuritaire
Les trois années pendant lesquelles nous avons dirigé4 un long et
fécond séminaire de recherche sur les sortes de normativités et leurs
frontières5 ont constitué l’acmé de notre collaboration. Au sein de cet
ensemble, nous nous étions ménagé l’espace d’un dialogue autour de la
recherche d’un paradigme pénal et de ses limites6 qui reste l’un des bons
souvenirs de ma carrière.
Ce n’est pourtant pas cette veine que j’ai choisie comme thème de
ma contribution. Compte tenu du thème du colloque, j’ai préféré
poursuivre une réflexion sur le retour en force de la récidive parmi les
déterminants de la peine. Suscitée par l’actualité législative dans mon
propre pays, elle me donnera l’occasion de croiser des préoccupations de
Michel van de Kerchove sur des thèmes voisins ou sécants.
Dans un texte considéré comme princeps pour les études historiques
sur la récidive, Bernard Schnapper (1991a)7 la présentait comme une
obsession créatrice de tout le XIXe siècle. En revanche, pour notre époque, il
voyait ce rôle assuré plutôt par la hantise de la violence.
Pourtant la ‘lutte contre la récidive’ vient de faire une rentrée en
fanfare dans le paysage pénal français en fournissant un leitmotiv à pas
moins de quatre lois entre 2005 et maintenant8 sans compter les projets
qui fleurissent à chaque nouveau fait divers dramatique9. Et il est
frappant de voir resurgir en force tous les poncifs qui avaient fleuri à
propos de la récidive à la fin du XIXe10.
Du coup, je vais essayer de soutenir que l’obsession pour la
récidive est moins liée au XIXe siècle en soi, qu’à une crise sécuritaire
quel qu’en soit le moment.
Bien entendu, il ne s’ensuit pas que les termes de la ‘lutte contre la
récidive’ soient nécessairement toujours les mêmes (bien qu’on relève de
4
De concert avec Francine Soubiran-Paillet.
Dont les actes ont finalement été publiés en deux volumes : Robert, SoubiranPaillet, van de Kerchove, 1997.
6
Robert, 1997 ; van de Kerchove, 1997.
7
On se réfère à l’utile compilation des œuvres de Bernard Schnapper réalisée pour
son passage à l’éméritat, mais ce texte date d’un congrès de 1982 dont les actes sont
beaucoup moins facilement accessibles.
8
Le rapporteur de la plus importante d’entre elles précise explicitement que le
projet dont il traite poursuit un processus engagé par les textes précédents
(Zocchetto, 2006-2007).
9
Voy. p. ex. Le Monde, 3 octobre 2009, 11.
10
Y compris le plus fameux, la castration des délinquants sexuels récidivistes.
5
La peine dans tous ses états ; FUSL, 16-17 octobre 2009.
2
Philippe Robert, Peine, récidive et crise sécuritaire
curieuses résurgences), ni surtout que les crises de la sécurité puissent
toujours être analysées de semblable manière.
Je vais d’abord montrer que cette création de l’époque
‘contemporaine’11 ne joue un rôle de premier plan qu’à la faveur de la
crise de la toute fin du XIXe siècle. Je montrerai ensuite comment sa
résurgence actuelle intervient dans le contexte d’un nouvel accès
sécuritaire.
Par prudence, je travaillerai principalement sur des données
concernant mon propre pays.
I. L’obsession de la récidive et la crise sécuritaire de la fin du XIXe
siècle
La récidive ne joue pas un rôle systématique dans l’économie
pénale d’ancien type. C’est le passage de l’époque ‘moderne’12 à l’époque
‘contemporaine’ qui va signer son émergence. Mais il faudra la crise
sécuritaire de la fin du XIXe siècle et la recomposition de la politique
pénale qui l’accompagne pour qu’elle prenne une place réellement
significative.
1. Les réticences des sociétés européennes d’Ancien Régime
Dans l’Europe ante-révolutionnaire, on peut bien trouver des
textes qui disent l’horreur de la réitération, l’aggravation de la peine à
infliger à certains récidivistes, les procédés propres à les identifier, mais
tout cela, note Schnapper (1991a) reste dispersé, concerne tel ou tel
crime, mais pas la délinquance en général. En 2006, l’ouvrage édité par
Françoise Briegel et Michel Porret13 enfonce le clou encore plus
nettement : la récidive n’est pas une catégorie de la pratique dans les
sociétés européennes d’ancien type même si elle y émerge ça et là en
doctrine.
Certes, la discipline cléricale avait forgé pour les clercs la notion
d’incorrigibilité qui glissera peu à peu, relève Valérie Toureille (2006),
11
Au sens de l’historiographie francophone ; l’anglophone parlerait de période
modern.
12
Dans l’historiographie anglophone Early Modern.
13
À l’issue d’un colloque de l’International Association for the History of Crime and
Criminal Justice (IAHCCJ). Voy. ma recension (Robert, 2007).
La peine dans tous ses états ; FUSL, 16-17 octobre 2009.
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Philippe Robert, Peine, récidive et crise sécuritaire
vers la fin de l’énorme Moyen-Âge, dans le vocabulaire laïc pour qualifier
les voleurs endurcis, les larrons accoustumés. Françoise Briegel et Éric
Wenzel (2006) précisent cependant qu’il faudra attendre le Traité de
Serpillon pour voir figurer une entrée ‘récidive, repris de justice’ et que,
même au XVIIIe siècle, c’est loin d’être le cas pour tous les auteurs.
Au cas d’espèce, les catégories de la doctrine rendent (très) mal
compte de celles de la pratique. Les études divergent sur le moment où
celle-ci commence à montrer quelque sensibilité à la création théorique.
En s’appuyant principalement sur les archives de la justice de
Nivelles, Xavier Rousseaux (2006) croit détecter un premier mouvement
à la fin du XVe et au XVIe siècle. Le système pénal lui paraît accueillir
alors la récidive – en fait plutôt la réitération – spécialement pour
assouplir les exigences de la preuve, aussi pour aggraver la peine. Ce sont
surtout des figures de criminels typifiés – le vagabond, la sorcière, le
larron – qui en font les frais. Il explique ce changement par la montée en
puissance des principautés territoriales aux dépens des pouvoirs urbains
et aussi par la rupture du consensus idéologique que représente la Réforme.
En mobilisant des données bourguignonnes et lorraines plus
tardives que celles utilisées par Rousseaux, Benoît Garnot et Hervé Piant
(2006) adoptent un calendrier moins précoce14. Ils montrent combien le
passé délinquant et même judiciaire importe peu tant que l’on bénéficie
d’une suffisante intégration dans la microsociété locale… pour peu que
l’on se borne à ces violences qui témoignent somme toute d’une
participation honorable à une société de conflits15. Alors il s’agit de
prononcer des sanctions assez modérées pour permettre la poursuite de
la vie communautaire après un différend. Et les juridictions royales –
même souveraines – ne se comportent pas, sur cet article, différemment
des juges locaux.
Les choses ne changent que si d’aventure, le crime semble ‘énorme’
ou qu’une réitération ‘excessive’ a fini par lasser les très larges tolérances
de la société locale, surtout quand il s’agit d’auteurs qui ont le malheur de
se situer aux marges de cette microsociété. Alors – et alors seulement –
on voit émerger, dans les témoignages, une multitude de faits anciens,
14
On pourrait aussi imaginer que les raidissements de la première modernité dont
témoigne Rousseaux aient été suivis d’un relâchement de la pression répressive
dans l’atmosphère plus stabilisée de la modernité tardive.
15
De conflits en ce sens qu’une société d’interconnaissance impose à ses membres
d’être sans cesse sur le qui-vive pour défendre leur bonne réputation.
La peine dans tous ses états ; FUSL, 16-17 octobre 2009.
4
Philippe Robert, Peine, récidive et crise sécuritaire
voire très anciens, jusque-là passés sous silence, mais que la mémoire du
voisinage avait soigneusement stockés à toutes fins16. Quant aux
vagabonds et ‘étrangers’, eux sont a priori suspects d’habitude criminelle.
D’ailleurs les juridictions prévôtales dont ils relèvent sont les seules à
s’attacher systématiquement à la récidive, du moins sur le second versant
du XVIIIe siècle17.
À partir d’un matériau genevois du XVIIIe siècle, David Gander
(2006) abonde un point de vue comparable à celui de Garnot et Piant :
les juges cherchent certes systématiquement à connaître le passé
délinquant de leur justiciable18 mais ce n’est pas pour aggraver
nécessairement la peine du récidiviste. La nature du délit est le
déterminant ultime de sorte qu’un réitérant ou un récidiviste peut se voir
puni moins gravement que la fois précédente si sa nouvelle infraction
paraît moins sérieuse que l’autre.
Si le système punitif des sociétés d’Ancien Régime fait finalement
peu de place à la récidive, c’est parce qu’il ignore la notion même de
gestion de la criminalité, notamment celle de sa prévention. Mario
Sbriccoli (2006) montre que le pénaliste ‘moderniste’ se préoccupe assez
peu des causes du crime et des moyens de la contenir. Les notions
mêmes de crime, de criminel, de criminalité n’émergent pas vraiment
comme catégories de la vie sociale : on connaît des meurtres, des vols…
pas de la délinquance19. D’ailleurs le poids de la prévention est surtout
confié à la perspective du châtiment horrible qui attend sur l’autre rive le
pêcheur impénitent promis à la damnation. Quant à la peine, elle n’a
d’autre fin, en ce bas monde, que de châtier la méchanceté et l’impiété.
Sbriccoli va même jusqu’à soutenir que la peur du crime et du
criminel n’existe guère dans cette société pourtant ‘fragile’ (i.e. de
précarité) pour deux raisons. D’abord, l’absence de moyens de
communication réduit l’information à ce qui peut circuler d’homme à
homme dans l’interconnaissance de proximité : d’éventuelles paniques –
qui sont fréquentes – restent locales. Il faudra attendre la fin du XVIIIe
16
C’est l’interconnaissance, écrivent Garnot et Piant (2006), dans une formule
heureuse, qui tient lieu de casier judiciaire.
17
Le trait est d’autant plus remarquable que le siège prévôtal est composé pour
bonne partie de juges royaux ordinaires (des conseillers présidiaux) qui ne se
comportent pas de la même manière à l’égard de la récidive selon qu’il doivent ou
non juger des errants, des sans aveu.
18
Et ils ne sont pas aussi désarmés qu’on l’imagine parfois.
19
Cpr pour l’Angleterre Ramsay, 1979.
La peine dans tous ses états ; FUSL, 16-17 octobre 2009.
5
Philippe Robert, Peine, récidive et crise sécuritaire
siècle pour que la presse et les premières compilations statistiques
commencent à élargir quelque peu l’information sur la criminalité et
fassent même émerger cette dernière comme catégorie (mais aux yeux de
combien de lecteurs ?). Ensuite et surtout, la défense des personnes et de
leurs biens appartient d’abord à la sphère privée (ou plutôt locale) : c’est
sur chacun – au moins sur chaque chef de maison – qu’elle repose… sur
chacun certes, mais dans le cadre et sous le contrôle attentif de la
microsociété locale. Hormis les quelques cas qui relèvent de la rébellion
contre l’ordre souverain ou d’une subversion trop manifeste des
hiérarchies sociales, c’est cette petite société qui procède au tri.
L’ordinaire des conflits entre ses membres relève d’arrangements locaux ;
la justice n’est alors qu’une menace qu’on brandit pour incliner au
compromis. Seuls lui sont vraiment livrés ceux qui dépassent les
capacités de règlement local soit parce que le protagoniste échappe à
l’interconnaissance entre voisins, soit parce qu’il défie trop les arbitrages
locaux. La société locale a, le plus souvent, assez d’emprise sur ses
membres pour mesurer ce qu’elle laisse voir à travers les témoignages.
On se situe en effet dans un système ‘vicinal’ de sociabilité : les
déplacements et les communications à distance y sont tellement longs et
coûteux que l’ordinaire de la population est contraint d’inscrire toutes ses
relations sociales dans le cercle de ceux qui habitent à proximité, des
voisins, ce qui confère une grande force à la petite société locale20.
Dans une telle situation, la récidive ne peut devenir une dimension
régulière. La logique est différente : à la société locale tout ce qu’elle peut
réguler, à la justice pénale seulement les marges qui échappent. Pourvu
qu’on fasse révérence à leur prééminence, les interventions souveraines
se bornent à tenter de colmater, aux moindres frais, ce qui échappe à la
sociabilité d’interconnaissance, ce qui risque de fuir dans l’anonymat. La
récidive ne peut donc jouer que pour ceux qui ne relèvent d’aucune
microsociété d’interconnaissance ou encore pour ceux que cette dernière
expulse de son sein.
2. Une émergence dix-neuviémiste
La place faite à la récidive va changer avec la sortie de l’Ancien
Régime.
20
Robert, 1999.
La peine dans tous ses états ; FUSL, 16-17 octobre 2009.
6
Philippe Robert, Peine, récidive et crise sécuritaire
Schnapper (1991a) n’est pas loin d’en faire le moteur du pénal tout
au long du XIXe siècle. Sans beaucoup s’attarder aux raisons de cette
promotion, il distingue trois périodes. La première (de l’utopie au réalisme)
part de l’invention (théorique) de la déportation criminelle par la
Constituante et va jusqu’à la création de la surveillance de haute police
napoléonienne ; la deuxième (les récidivistes, les philanthropes et les autorités) va
de la libéralisation louis-philippienne à la transportation criminelle
impériale en passant par l’invention du casier judiciaire avec Bonneville
de Marsangy ; la troisième (pédagogie ou élimination) englobe la relégation
correctionnelle et les lois Bérenger21.
Il est toutefois obligé de reconnaître que toutes ces périodes ne
pèsent pas du même poids et que c’est sur le second versant du siècle
que la hantise de la répression devient obsessionnelle. Des études
récentes plus empiriques ont tenté de resserrer ce calendrier.
Frédéric Chauvaud (2006) estime que les récidivistes ne
commencent vraiment à intéresser en France que sous la monarchie de
Juillet, avec la première industrialisation qui dilate l’univers familier, le
monde de l’interconnaissance22. Jean-Claude Farcy (2006) suggère un
calendrier encore plus tardif. Il utilise les ‘États des récidives’ prescrits
dans chaque tribunal depuis 1828 pour étudier les récidivistes parisiens
sous la monarchie de Juillet et sous la première Troisième République et
les comparer aux condamnés ordinaires. Il montre comment, entre les
deux moments observés, l’urbanisme haussmannien a fait disparaître les
refuges du cœur de Paris et repoussé au-delà des barrières la localisation
de ces récidivistes qui recrutent surtout dans un salariat instable et
précaire. Il lit dans le récidivisme parisien à la fois la marginalisation
d’une fraction de la population ouvrière et la volonté des autorités de ne
pas en perdre le contrôle.
Finalement, c’est dans les années 1880 que la chose tourne à l’idée
fixe avec le point d’orgue de la loi sur la relégation de 1885 qui entérine,
en principe, l’élimination (lente) des incorrigibles par leur transportation
outre-mer.
21
Du nom du sénateur inamovible qui fut leur promoteur et l’un des principaux
auteurs de la recomposition de la législation et de la politique pénales dans la
Troisième République d’avant la Première Guerre mondiale (sur Bérenger, voy.
Schnapper, 1991b).
22
Encore faudrait-il probablement distinguer les épaisses profondeurs rurales de la
mince couche urbaine.
La peine dans tous ses états ; FUSL, 16-17 octobre 2009.
7
Philippe Robert, Peine, récidive et crise sécuritaire
Dans leur Introduction au droit pénal23, Michel van de Kerchove et
Françoise Tulkens donnent à voir un calendrier comparable. Si la section
spécialement consacrée à la récidive (466-478) peut se borner à exposer
la logique du droit positif belge24, c’est parce que l’émergence de la
récidive a déjà été montrée dans le passage qui explique la montée en
puissance de la dangerosité aux dépens de la responsabilité, au cours de
cette période cruciale qui court de la crise économique des années 1880 à
l’aube de la Première Guerre mondiale25. Le débat sur la récidive paraît à
nos auteurs particulièrement lié à un moment typique, celui où… le
‘krach’ de la répression secoue et inquiète l’Europe de la fin du XIXe siècle. Les
caractères du droit pénal, son juridisme, son abstraction, conçus autrefois comme des
garanties de la liberté individuelle, apparaissent comme les raisons de l’inefficacité de
la lutte contre la délinquance (108). C’est à ce moment, où la référence belge
n’est plus Haus mais Prins, que la notion de dangerosité – qui a acquis une place
centrale dans le développement de la criminologie – a rapidement investi le droit pénal
(109).
Malgré les profondes mutations suscitées par la secousse
révolutionnaire, le pénal étatique du premier XIXe siècle n’assurait
vraiment sa prise que sur la grande justice criminelle, celle des Assises,
des drames sanguinaires et des vols qualifiés. Là triomphait vraiment la
dramaturgie de la dissuasion par la loi et par la peine qu’avait mise en
scène la recomposition beccarienne… et encore fallait-il lutter sans cesse
contre des jurés, pourtant sévèrement sélectionnés, mais soucieux
comme tous les notables possessionnés localement de ne pas trop
heurter de front les logiques communautaires26. C’est que, dans cette
société massivement rurale, régnaient encore des relations sociales
d’ancien type : les arbitrages de la microsociété locale demeuraient le
mode ordinaire de règlement des conflits et ces petites sociétés
conservaient assez de force pour s’opposer efficacement aux curiosités
du gendarme ou du juge d’instruction. Certes, dans un système pénal
fonctionnant désormais à la loi et non plus au juristenrecht, la récidive
23
Tulkens, van de Kerchove, 2007.
La combinaison d’une circonstance aggravante personnelle de tendance à la
délinquance et d’une mise à disposition du gouvernement dans le cadre d’une loi de
défense sociale remaniée à différentes reprises.
25
Bien entendu, pareil thème évoquait l’un des premières publications de Michel à
m’avoir fortement intéressé, celle où il mettait habilement en scène la dialectique
des deux théories de la culpabilité et de la dangerosité (van de Kerchove, 1981).
26
Voy. p. ex. Claverie, 1984.
24
La peine dans tous ses états ; FUSL, 16-17 octobre 2009.
8
Philippe Robert, Peine, récidive et crise sécuritaire
irritait davantage : en mettant à l’épreuve la force dissuasive de la loi, elle
paraissait défier le législateur et mettre à l’épreuve la souveraineté
nationale à travers ses représentants. Mais si l’on s’en préoccupait, c’était
le grand récidiviste que l’on avait en tête, le forçat évadé.
2. Crise sécuritaire de la fin du siècle et obsession de la récidive
Sur le second versant du siècle, ce n’est plus le même récidiviste qui
retiendra l’attention : on s’enrage désormais en pensant au mendiant, au
vagabond, au voleur de poules endurci… que le casier judiciaire permet
maintenant de repérer. C’est que cette montée en puissance de
l’obsession pour la récidive prend place dans une réorganisation de
l’économie classique de la peine : on se convainc que certains restent
insensibles à sa force dissuasive car ils échappent à la rationalité qui
caractérise le bon citoyen. Le petit récidiviste impénitent fournit par son
obstination l’exemple même de ces ‘dégénérés’27 qui menacent l’état
moral de la nation. Puisqu’il paraît décidément inamendable, on rêve plus
ou moins ouvertement de l’éliminer ; cependant, la modestie de ses
méfaits ne facilite pas l’adoption de mesures radicales qui paraissent
disproportionnées ; heureusement, sa récidive ouvre une issue si on en
fait une preuve de dégénérescence. Les voies sont diverses selon les
pays : les lois de stérilisation auxquelles recourent plusieurs états
américains ou certains pays nordiques ne font guère recette en GrandeBretagne ou en Europe occidentale, même dans les milieux les plus
eugénistes ; on songe plutôt à un enfermement de sûreté plus ou moins
indéfini comme la preventive detention anglaise de 190828 ou à la
transportation ultramarine comme la relégation française de 188529 ;
toujours, en tous cas, il s’agit de mettre hors circuit.
27
Sur la panique de la dégénérescence dans la France de la première Troisième
République, Nye (1984) reste un classique. Sa conclusion rappelle que les autres
grands pays européens sont, sous une forme ou une autre, saisis de la même crainte
et que la Grande Guerre apparaît, de quelque manière, comme une façon
(suicidaire) d’exorciser cette peur en montrant que la virilité nationale reste intacte.
28
En Belgique, la loi de défense sociale semble étonnamment tardive, mais elle
prend en réalité sa source dans un projet Lejeune de 1890, redéposé en 1897, puis
en 1909 et finalement en 1923 pour aboutir en 1930.
29
On s’est souvent étonné de voir cette déportation adoptée en France au moment
où la Grande-Bretagne y renonce : dans le cas anglais, la mesure finit, après un long
La peine dans tous ses états ; FUSL, 16-17 octobre 2009.
9
Philippe Robert, Peine, récidive et crise sécuritaire
D’un côté, ces dispositions éliminatrices semblent avoir eu la vie
dure : en France, elles ne cèderont complètement qu’après la Seconde
Guerre mondiale : la transportation n’a été suspendue qu’à l’aube de la
guerre et il a fallu attendre une loi du 3 juillet 1954 pour rendre la
relégation facultative et une autre du 17 juillet 1970 pour lui substituer la
tutelle pénale qui sera supprimée en 198130.
Mais d’un autre côté, la relégation n’aura connu que quelques
années d’application résolue, quoique déjà bien en-dessous des attentes
de ses promoteurs. Dès 1888 et surtout après 1900 cette vigueur
faiblira31 : les tribunaux oublieront volontiers de relever la récidive32. En
Grande-Bretagne, Radzinowicz & Hood (1990, 231-287) tout comme
Emsley (2006) s’accordent à montrer comment, lors de son passage au
Home Office sous le ministère Asquith, Churchill s’est ingénié à vider de sa
substance la loi de 1908 sur la preventive detention33. La loi belge de 1930 a
été remise sur le métier sitôt adoptée ; en 1967, elle a été remplacée par
une ‘mise à la disposition du gouvernement’ qui doit, elle-même, faire
place, lors de la mise en œuvre d’une réforme intervenue en 2007, à une
‘mise à la disposition du tribunal de l’application des peines’34.
Même si la relégation a mis longtemps à disparaître, sa médiocre
application contraste avec la frénésie qui a présidé à sa création. En fait,
l’adjonction à la politique criminelle ‘classique’ d’un volet ‘éliminateur’
constitue l’aspect visible mais pas le plus important de la recomposition
qui s’opère entre les années 1880 et l’aube de la Première Guerre
mondiale.
Nye s’est attaché à montrer comment la loi sur la relégation
s’inscrit dans une conjoncture politique précise. Un gouvernement de
centre gauche, dit ‘opportuniste’, a récupéré une préconisation du
programme (dit de Belleville) des ‘radicaux' pour souder sa majorité
usage, par susciter les réticences des colons australiens ; dans le cas français, elle est
contemporaine de la construction d’un nouvel empire colonial.
30
Les centres spécialisés de Besançon et de Lure avaient été fermés en 1979.
31
D’autant que Bérenger fait créer en 1892 une ‘petite récidive correctionnelle’ qui
renoue avec la solution classique de la récidive : l’aggravation de peine sous
l’arbitrage du juge. En outre, une loi du 19 juillet 1907 avait, pour les mineurs, les
femmes et les seniors, substitué à la relégation la vieille solution de l’interdiction de
séjour.
32
Nye, 1984.
33
Cpr Garland, 1985.
34
van de Kerchove, sp.
La peine dans tous ses états ; FUSL, 16-17 octobre 2009.
10
Philippe Robert, Peine, récidive et crise sécuritaire
malgré les - ou grâce aux - protestations des oppositions de gauche et de
droite35. Mais sitôt cette loi votée, la même majorité vote sans broncher
les projets sur la libération conditionnelle puis sur le sursis. Ce
programme piloté par le sénateur René Bérenger est finalement
beaucoup plus typique de la recomposition en cours que la loi sur la
relégation. Il allège la dissuasion par la peine en permettant de la réduire
à la simple menace du sursis. Avec la libération conditionnelle et le
patronage, il jette les bases d’un volet ‘rééducatif’ appelé à prendre une
grande ampleur.
Parmi ceux qui paraissent insensibles à la rationalité de la
dissuasion pénale, certains, à la réflexion, ne sont peut-être pas
inamendables mais seulement inéduqués, notamment parmi la jeunesse
populaire urbaine. Il est donc possible d’envisager leur rééducation –
spécialement par la justice des mineurs – voire même la prévention de
leurs frasques.
Derrière cette agitation législative prend tournure une mutation de
première importance des relations sociales. On commence à sortir d’une
société de l’interconnaissance et de la vicinalité où les relations de tout un
chacun étaient, pour l’essentiel, enfermées dans la proximité
géographique des sociétés locales ; le moindre coût des transports et des
communications va progressivement autoriser l’émergence d’une
sociabilité où chacun pourra entretenir une pluralité de réseaux de
relations qui ne se superposent pas parfaitement et qui ne sont pas
nécessairement enfermées dans le carcan de la vicinalité. Mais, du coup,
les sociétés locales vont perdre de leurs capacités à gérer les conflits de
leurs membres. Pour la première fois, l’État national va se trouver
vraiment en première ligne pour assurer la sécurité des personnes et de
leurs biens.
L’accélération des migrations suscitée par la crise des années 1880 a
joué un rôle important dans cette mutation : en purgeant la ruralité de
son trop-plein démographique, elle désarticule ses microsociétés et ruine
leurs capacités de contrôle. Que le vagabondage et la mendicité aient
réémergé alors comme des thèmes sensibles se comprend parfaitement :
on y lit l’inquiétude engendrée par la montée en puissance des migrations
35
Et encore l’opposition de droite n’est que faiblement hostile à un projet que
certains de ses membres voteront, tandis que d’autres se réfugient dans une
prudente abstention ou évitent, encore plus prudemment, de prendre part au vote
(Tanguy, 2006).
La peine dans tous ses états ; FUSL, 16-17 octobre 2009.
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Philippe Robert, Peine, récidive et crise sécuritaire
de la campagne vers la ville. Et la peur des ‘Apaches’ témoigne de la
panique suscitée par les concentrations urbaines de population flottante.
Le modèle de l’État libéral du XIXe siècle armé seulement d’une
inlassable répression et d’un inépuisable discours moralisateur paraît
alors bien insuffisant pour faire face aux défis nouveaux de contrôle
social générés par l’affaissement de la sociabilité vicinale.
Vouloir éliminer les petits récidivistes traduisait un premier temps
de crispation et d’affolement. Puis viendra la construction d’un nouveau
modèle plus complexe où prévention et rééducation prendront une place
croissante. Cette recomposition s’inscrit dans la lente transition d’un État
libéral à un État social où ceux qui n’accèdent pas à la propriété peuvent
cependant accéder à la sécurité grâce au trio représenté par la
mutualisation des grands risques, les services publics et la mise en place
d’un statut du salariat.
La récidive cessera alors de s’afficher à la une des problèmes de
politique criminelle. Schnapper semble avoir raison : ce thème sent son
XIXe siècle. Et il semble avoir une seconde fois raison : quand
l’économie de la peine mise en place juste avant la Première Guerre
mondiale paraît remise en cause par une nouvelle crise sécuritaire, c’est
bien la violence qui fait figure de proue des nouvelles controverses.
Quand il essaie de s’inspirer des grandes commissions présidentielles
américaines, M. Giscard d’Estaing charge Alain Peyrefitte36 d’étudier la
violence, la criminalité et la délinquance. Et la loi du 2 février 1981 sur la
sécurité et les libertés organisera une sorte de bifurcation : on donne la
priorité à la répression des infractions violentes plutôt qu’à la lutte contre
la délinquance rusée ou contre la petite délinquance, comme on dit, de
prédation. Le mouvement législatif de plus en plus compulsif qui va
suivre se traduit d’abord dans les débats sénatoriaux sur le nouveau code
pénal par une augmentation de l’échelle des peines au-delà du projet
gouvernemental et au-delà même de l’ancien code37. Il se caractérise aussi
par des élargissements itératifs du délit de ‘coups et blessures volontaires’
à l’effet d’y inclure des violences sans grande conséquence physique mais
dont les auteurs et circonstances paraissent particulièrement blâmables
ou dont les victimes semblent particulièrement vulnérables ou, plus
souvent, appartiennent à des professions – policiers, gardiens de prison,
36
Peyrefitte, 1977.
Lascoumes (2009, 472) explique que le gouvernement d’alors avale la couleuvre
pour éviter la remise en cause de l’abolition de la peine capitale.
37
La peine dans tous ses états ; FUSL, 16-17 octobre 2009.
12
Philippe Robert, Peine, récidive et crise sécuritaire
conducteurs de bus… - qui bénéficient d’une particulière sollicitude du
législateur38. Pendant la dernière décennie du XXe siècle, c’est une sorte
particulière de violent, le délinquant sexuel, qui fera figure d’ennemi
public absolu39.
Mais au cours des dernières années la récidive revient au premier
plan des controverses pénales. Le délinquant sexuel lui a d’ailleurs ouvert
la porte puisque c’est bien sa récidive qui suscite l’exaspération.
II. Nouvelle crise sécuritaire et retour de la récidive
Une première loi du 12 décembre 2005 avait notamment étendu les
définitions de la récidive légale, limité le nombre de sursis, permis
l’incarcération du récidiviste dès sa condamnation, limité les réductions
de peines des récidivistes, autorisé – rétroactivement - à placer sous
surveillance judiciaire les sortants de prison que l’on estimerait
susceptibles de récidive, et tenté de donner un statut juridique à la simple
réitération en s’attaquant à la confusion des peines.
Une très curieuse40 deuxième loi du 5 mars 2007 avait permis
d’écarter l’atténuation de responsabilité des mineurs en cas de récidive de
certaines infractions.
Surtout une loi du 10 août 2007 votée dans la foulée des dernières
élections présidentielle et législative impose aux récidivistes des peinesplancher (que le juge peut écarter plus ou moins facilement selon qu’il
s’agit d’une primo ou d’une multirécidive), en prévoit également (de
moindres) pour les mineurs, permet ou impose d’écarter l’atténuation de
responsabilité pour ceux de 16 à 18 ans au temps de l’action41, enfin
38
On trouvera dans Robert, Zauberman, 2006 ; Zauberman, Robert, Névanen,
Didier, 2009 la liste de ces textes avec l’analyse de leurs effets inflationnistes sur la
statistique policière.
39
L’exaspération de ce fantasme conduira au désastre de l’affaire d’Outreau (une
affaire de mœurs qui s’est avérée imaginée de toutes pièces) sans susciter d’ailleurs
aucun remords ni du personnel politique, ni des journalistes qui avaient cependant,
pendant des années, chauffé à blanc la phobie du criminel sexuel.
40
Curieuse en cela qu’elle est dite de prévention mais ne contient que des mesures
répressives ou de contrainte, probablement parce que ses promoteurs ne
conçoivent d’autre prévention que la dissuasion.
41
Analyse juridique p. ex. in Bonfils, 2007. On revient ainsi à l’idée d’un statut
spécial pour les 16-18 ans qui ne serait pas pleinement celui de minorité : QuincyLa peine dans tous ses états ; FUSL, 16-17 octobre 2009.
13
Philippe Robert, Peine, récidive et crise sécuritaire
généralise la possibilité d’injonction de soins en cas de suivi
sociojudiciaire, de sursis avec mise à l’épreuve, de mise sous surveillance
judiciaire, de libération conditionnelle. Cette loi sanctionne également le
détenu qui refuse ces soins42.
Par ailleurs la prévention du risque de récidive de condamnés
estimés dangereux a été organisée par une loi du 25 février 2008 sur la
rétention de sûreté43. Un projet44 entreprend de la compléter à la suite de
sa censure partielle par le Conseil constitutionnel.
D’autres sont mieux placés que moi pour entrer dans l’analyse
juridique de ces dispositions ; je me bornerai à dégager leur philosophie
globale dans une perspective de sociologie législative.
La première mesure-phare de cette vague législative rétablit donc,
en matière de récidive, des planchers de peine. Le mécanisme figurait
dans la loi ‘sécurité et libertés’ du 2 février 198145 qui, promptement
modifiée au début du premier septennat Mitterrand, constitue cependant
le texte fondateur de la politique pénale de droite des trois dernières
décennies et la référence de la droite et de l’extrême-droite judiciaires.
Cette solution s’écarte du droit commun européen en matière de récidive
et s’inspire de législations américaines, notamment du mécanisme
californien three strikes and you’re out46, mais sans pouvoir aller jusqu’à son
automatisme en raison de la nécessité de ne pas trop rudoyer le principe
constitutionnel d’individualisation de la peine47.
La deuxième mesure phare consiste à s’attaquer une nouvelle fois
au régime pénal des mineurs. C’est un assaut que le ministère de
l’Intérieur et la police mènent avec constance depuis quinze ans au motif
de l’aggravation de la délinquance juvénile. De cette aggravation, une
seule ‘preuve’ est fournie : l’augmentation de la part des mineurs dans les
mis en cause figurant dans la statistique policière ; très curieusement, nul
n’en discute la pertinence même si la faiblesse des taux d’élucidation lui
Lefebvre (2009) a entrepris récemment de montrer que c’était en réalité la
perspective adoptée par la loi de 1906 élevant la majorité pénale de 16 à 18 ans.
42
Analyse juridique p. ex. in Verges, Ribeyre, Robert, 2007.
43
Bonfils & al., 2008, notamment 396.
44
Garraud, 2009.
45
Voy. p. ex. Pradel, 1982.
46
P. ex. Blanc, 2007 ; à propos de Three strikes and you’re out, on verra notamment
Tyler & Bockmann, 1997.
47
Certains commentateurs (ainsi Herzog-Evans, 2007) estiment que le Conseil
constitutionnel s’est montré peu exigeant lors de son examen de cette loi.
La peine dans tous ses états ; FUSL, 16-17 octobre 2009.
14
Philippe Robert, Peine, récidive et crise sécuritaire
ôte toute crédibilité48 et nul49 ne cherche non plus à développer le seul
instrument qui pourrait fournir des données crédibles, des enquêtes –
répétées - de délinquance autoreportée50. Là encore cependant, le coup
ne peut pas être final dans la mesure où il faut respecter des principes à
valeur constitutionnelle (atténuation de responsabilité, primauté de
l’éducatif, juridiction spécialisée).
La troisième mesure-phare tient dans la généralisation de la
possibilité d’injonction de soins qui traduit une conviction sous-jacente
que la récidive a une causalité psycho-psychiatrique51, qu’elle manifeste
une ‘anormalité mentale’. Tout au contraire, la réforme belge de 2007
s’attache à défaire le rapprochement voire la confusion entre récidivistes
et ‘défectueux’ rompant avec la pensée de Prins ou de Vandervelde qui
voyaient la masse des premiers composée d’anormaux’, de ‘déficients’, de
‘déséquilibrés’52. L’état d’esprit qui sous-tend la loi française manifeste
beaucoup plus de fidélité à la mentalité de la fin du XIXe siècle.
Toutefois, ce ‘cadeau’ ne ravit pas nécessairement psychiatres et
psychologues qui ont parfois du mal à croire que la prévention de la
récidive puisse se borner à leur seule intervention. À étendre tellement
leur domaine d’intervention, ne risque-t-on pas tout simplement de
déboucher sur un abandon de la prise en charge des véritables
psychotiques chroniques ? Leurs réticences ont amené le législateur à
faire dépendre la possibilité d’une injonction de soins d’une expertise
préalable. Cette précaution ne semble pas avoir désarmé les praticiens :
ils prévoient que les experts, peu nombreux et souvent peu formés,
préfèreront conclure à l’injonction de soins pour ouvrir le parapluie. Et
48
Devenus insignifiants (Zauberman, Robert, Névanen, Didier, 2009) en cas de
plaintes par des tiers, ils ne prospèrent que pour les affaires sans victime directe où
ils n’ont pas de sens puisqu’il est alors facile de ne faire une procédure qu’au cas
d’identification préalable d’un suspect.
49
L’enquête de délinquance autoreportée est employée dans des domaines
particuliers comme la consommation de produits prohibés (voy. les travaux de
l’Observatoire français sur les drogues et les toxicomanies ; p. ex. Peretti-Watel &
al., 2004) ou la violence scolaire (p. ex. Carra, 2009). Mais pour ce qui concerne
l’étude de la délinquance juvénile en général, on note seulement la tentative isolée
de Sébastian Roché (2001)..
50
Pour un bilan européen, voy. Zauberman, 2009.
51
Herzog-Evans, 2007.
52
van de Kerchove, sp.
La peine dans tous ses états ; FUSL, 16-17 octobre 2009.
15
Philippe Robert, Peine, récidive et crise sécuritaire
que la loi sanctionne le refus de soins en détention redouble les critiques
de la pratique médicale53.
De plus en plus, la mesure-type pour les récidivistes sexuels est la
‘castration chimique’ qui rappelle certains débats eugénistes de la fin du
XIXe siècle, mais qui donne aussi un bon exemple de la charge
d’exaspération que charrient ces affaires54.
Enfin la dernière mesure phare consiste dans une série de
dispositions55 qui – en dehors même de toute récidive – permettent
d’enfermer (rétention de sureté) ou de placer sous surveillance (bracelet
électronique, suivi socio-judiciaire, surveillance de sureté) d’anciens
condamnés considérés comme dangereux en raison de leur potentiel de
récidive56. Un classique de la pensée ‘criminologique’ traditionnelle fait ici
une irruption remarquable dans le champ ‘opérationnel’ du droit français
positif : la substitution de l’évaluation de dangerosité au constat de
culpabilité. Avec lui émergent tous les problèmes de validité de la
prédiction coincée entre faux positifs et faux négatifs57.
53
P. ex. Senon, Manzanera, 2007.
La loi de 2007 l’a autorisée (Zocchetto, 2006-2007). Un fait divers a permis
d’introduire un nouveau projet qui prévoit d’en durcir le régime. Ce fait divers avait
même amené l’actuelle Garde des Sceaux à évoquer la possibilité d’un recours à la
castration physique (Le Monde, 3 octobre 2009, 11) avant de faire volte-face devant
la perspective d’une violation de l’art. 3 de la Convention européenne des droits de
l’homme.
55
Avant même la loi sur la rétention de sûreté, Poncela (2007, 894) terminait une
chronique sur la fin de peine par l’appréciation suivante : Médicaments et électronique
forment un couple idéal. À l’éducation et à la parole se substitueront des moyens plus économiques
en temps et en argent… le portrait du condamné libéré qui se dessine… est celui d’une personne
endettée à vie, évoluant le plus souvent dans un milieu ouvert ; ce qui ne signifie pas liberté d’aller
et de venir, mais milieu ouvert sur tous ses faits et gestes… Sur lui pèsera toujours la menace d’un
enfermement pour une durée indéterminée moins pour ce qu’il fera que pour ce qu’il risquera de
faire, c'est-à-dire pour ce que l’on considèrera qu’il est.
56
Estimé par une Commission pluridisciplinaire des mesures de sûreté (CPMS)
sous le contrôle d’une juridiction régionale de la rétention de sûreté (JRRS), ellemême soumise à l’appel devant une juridiction nationale de la rétention de sûreté
(JNRS) dont les décisions sont susceptibles de pourvoi devant la Chambre
criminelle de la Cour de Cassation (voy. Garraud, 2009).
57
Le rapporteur du projet de loi en discussion à la fin 2009 (Garraud, 2009, 30-35)
a déployé beaucoup d’efforts pour persuader ses collègues parlementaires que la
prédiction de dangerosité était possible, quoique difficile ; il a même proposé de
s’attacher à une dangerosité ‘criminologique’ distincte de la dangerosité
psychiatrique. Dans un contexte étatsunien, Bernard Harcourt (2007) a produit un
54
La peine dans tous ses états ; FUSL, 16-17 octobre 2009.
16
Philippe Robert, Peine, récidive et crise sécuritaire
Quel sera l’impact de ces mesures législatives58 ? Difficile à prévoir,
évidemment. Tout en prenant note de la différence entre réitération et
récidive légale, le législateur s’attend à une amplification du recours à
l’emprisonnement surtout correctionnel59 sauf quand il prétend que
l’effet dissuasif des peines-plancher sera tellement dissuasif qu’il évitera la
récidive. Plus sérieusement, un spécialiste de démographie pénitentiaire,
P. Tournier (2007), a envisagé trois hypothèses sans trancher entre elles :
un effet déflationniste si la dissuasion marchait à plein, une absence
d’effet s’il n’y avait pas dissuasion ou que les juges appliquaient
mollement les nouvelles mesures, par exemple en oubliant de relever la
récidive légale60, enfin un effet inflationniste si la loi s’appliquait
pleinement mais sans effet dissuasif. Peut-être pourrait-il y avoir aussi un
effet de contagion si ce raidissement législatif entraînait les juges à durcir
leur pratique répressive au-delà même des cas de récidive. Et il est encore
possible que ces mesures soient, comme après 1885, appliquées avec
enthousiasme pendant quelques années, puis avec mollesse, enfin
perdues de vue. Certains commentateurs ont été sensibles aux
échappatoires comme la nécessité de relever la circonstance de récidive
légale, la difficulté de la constituer de peine à peine pendant la minorité61,
la possibilité d’opter pour le sursis ou celle de déroger par des
motivations spéciales aux prescriptions nouvelles pour voir dans la loi de
2007 une mesure surtout ‘symbolique’, voire ‘d’apparat’62.
À l’appui de cette interprétation, on a relevé que le recours à des
peines-plancher avait été souhaité par l’actuel président de la République
remarquable démontage des difficultés et des illusions de la prédiction à l’intérieur
du système pénal.
58
Et de celles qui s’annoncent puisqu’il est question d’exclure les récidivistes des
mesures de la loi pénitentiaire en gestation et d’étendre le recours à la ‘castration
chimique’ pour les récidivistes en matière sexuelle.
59
Ainsi le rapporteur Zocchetto (2006-2007).
60
Malgré une circulaire du 16 juin 2006 enjoignant au parquet - qui est très puissant
en France et étroitement soumis à l’exécutif - de la relever systématiquement.
61
Donc en en tenant pas compte des mesures ou sanctions éducatives.
62
Ainsi Vergès, Ribeyre, Robert, 2007. La Garde des Sceaux de l’époque s’était
défendue par avance contre cette interprétation lors d’une audition au Sénat en
utilisant une formule dont le sens laisse quelque peu perplexe : la lutte contre la récidive
n’est pas un affichage sauf à considérer comme tels l’ensemble des textes applicables en matière
pénale (Dati in Geoffroy, 2006-2007, 61).
La peine dans tous ses états ; FUSL, 16-17 octobre 2009.
17
Philippe Robert, Peine, récidive et crise sécuritaire
alors qu’il était ministre de l’Intérieur et présenté alors sous forme de
proposition de loi par un de ses proches, mais qu’elle avait été écartée en
2004 par un rapport de la Commission des lois de l’Assemblée
nationale63. Il n’est donc pas exclu qu’une première visée de la loi de
2007 sur la récidive ait consisté à souder la majorité de droite en
censurant par avance les velléités pour s’écarter de la volonté
présidentielle. Une autre catégorie d’acteurs semble également visée : les
juges bridés dans leur pouvoir d’individualisation64. On peut rapprocher
cette mesure de l’appesantissement de la tutelle politique sur un parquet
qui cumule curieusement l’appartenance à la magistrature et une
soumission étroite à l’exécutif ; également du projet de conférer à ce
ministère public dépendant les fonctions exercées par un juge
d’instruction qui s’est attiré lors de la décennie précédente l’hostilité du
personnel politique en instruisant des affaires de corruption65.
Cette forte dépendance de la loi sur la récidive envers une
conjoncture politique particulière rappelle, mutatis mutandis, le contexte de
la loi sur la relégation… à une différence près toutefois : sitôt votée la loi
de 1885, les députés passent aux choses sérieuses et créent la libération
conditionnelle, le sursis et le patronage. Autrement dit, la solution de la
crise sécuritaire n’est pas cherchée seulement dans un durcissement
répressif, mais dans la mise en place politique d’une politique qui
combine répression, prévention et les ébauches d’une politique sociale.
Du policy mix qui se met alors en place sortira une économie de la peine
suffisamment stable pour durer un grand siècle. Dans la conjoncture
actuelle, au contraire, seul le levier répressif semble actionné.
C’est que l’actuelle ‘lutte contre la récidive’ s’inscrit dans un
contexte bien particulier. Au premier tour des présidentielles de 2002, le
candidat de droite n’avait même pas obtenu 20% des voix tandis que
celui de l’extrême-droite parvenait à enlever la seconde place à un
candidat de gauche lâché par ses propres extrêmes. De la sorte, le
candidat de droite n’avait dû son succès au second tour qu’au ralliement
forcé de tous ceux qui refusaient l’extrême-droite. Pour éviter de se
retrouver dans une telle situation, la droite a poursuivi, entre 2002 et
2007, une politique de sécurité reposant sur l’entassement incessant de
63
Au motif qu’on ne voyait guère l’intérêt de rétablir une notion à laquelle avait
renoncé le nouveau code pénal de 1992.
64
En ce sens, p. ex., Herzog-Evans, 2007.
65
Voy. Bancaud, Robert, 2001.
La peine dans tous ses états ; FUSL, 16-17 octobre 2009.
18
Philippe Robert, Peine, récidive et crise sécuritaire
mesures de deux ordres, les unes contre l’immigration irrégulière, les
autres de répression pénale. La ‘lutte contre la récidive’ s’inscrit dans ce
volet-ci. L’opération a été couronnée de succès : aux présidentielles de
2007, le candidat de droite a récupéré les voix qui allaient précédemment
vers l’extrême-droite. Du coup, on a conservé la recette en vue de
préparer l’échéance électorale de 2012.
***
En conclusion, l’analyse doit probablement distinguer deux
éléments dans cette affaire.
D’une part, le passage d’un droit coutumier à un droit légiféré
s’accompagne de la promotion de la récidive – qui se distingue alors de la
réitération – comme facteur aggravant dans la mesure où l’inefficacité
d’un jugement antérieur apparaît désormais comme un mépris de la force
dissuasive attribuée à la loi, donc comme une offense à la souveraineté
du législateur ; mais ce mécanisme demeure généralement modéré et
soumis à l’arbitrage du juge.
D’autre part, on assiste, à certains moments, à une tétanisation
obsessionnelle sur le récidiviste qui s’accompagne d’envies d’élimination
de ces rebelles et de velléités de supprimer la marge d’appréciation
judiciaire. La focalisation sur la récidive est probablement facilitée par la
charge d’exaspération qu’elle suscite66.
On peut faire l’hypothèse que ces moments se caractérisent par la
conjonction de deux éléments : une angoisse sociale – comme la peur de
la dégénérescence67 qui balaie les grands pays européens entre la crise des
années 1880 et la Première Guerre mondiale68 - et une panique des
politiques qui craignent de se voir reprocher l’inefficacité de leurs
66
Tulkens & van de Kerchove (2007, 467) l’ont bien pointé : Il est un non-dit dans la
question pénale de la récidive qui domine son approche sur le plan juridique, celui de l’impuissance
ou de l’échec du droit pénal que la récidive entend rencontrer alors qu’elle en est la marque visible
et irritante. Un bon exemple de l’exaspération que suscite la récidive est fourni par la
faveur du thème de la ‘castration chimique’ qui rappelle certains débats eugénistes
de la fin du XIXe siècle : la loi de 2007 l’a permise (Zocchetto, 2006-2007) ; un fait
divers a conduit des députés de la majorité relayés par la garde des Sceaux à en
souhaiter bruyamment l’extension (Le Monde, 3 octobre 2009, 11).
67
Voy. p.ex. Nye (1984) ou encore Garland (1985).
68
Que certains analysent alors comme une fuite suicidaire pour échapper à cette
névrose collective.
La peine dans tous ses états ; FUSL, 16-17 octobre 2009.
19
Philippe Robert, Peine, récidive et crise sécuritaire
politiques de contrôle social – témoin l’expression alors utilisée de krach
de la répression. Il est possible que nous traversions une conjoncture un
peu analogue avec, d’un côté, la préoccupation sécuritaire entée sur
l’angoisse de la précarisation, de l’autre, des politiques publiques qui
s’acharnent sur le maintien de l’ordre faute de parvenir à cibler les
délinquances qui menacent réellement la sécurité ordinaire des citoyens69.
C’est que le sentiment d’insécurité a deux facettes. L’une concerne
l’appréhension d’être soi-même (ou par ses proches) atteint
concrètement par la délinquance ; elle procède d’une anticipation du
risque modulé par la vulnérabilité que l’on ressent70. Mais l’autre consiste
dans une préoccupation pour la délinquance comme problème social
abstrait (et non comme menace personnelle). Elle procède surtout d’une
réaction au risque de précarité ou de précarisation ; elle atteint ceux qui
se sentent peu armés face aux changements sociaux et économiques
qu’ils soient ou non personnellement exposés à la délinquance71.
Seulement le premier aspect, l’appréhension, varie selon les personnes,
les lieux et les situations ; parce qu’elle est concrète, elle est donc difficile
à mesurer. L’autre, au contraire, la préoccupation abstraite est plus facile
à saisir au moyen de sondages généraux.
Le résultat, c’est qu’on prétend lutter contre l’insécurité concrète,
alors qu’on répond seulement à la demande des préoccupés. Ainsi
accorde-t-on un poids démesuré aux quelques 15% d’acharnés de la
préoccupation sécuritaire72, d’autant qu’ils sont insatiables puisque leur
panique devant la délinquance, ou d’ailleurs toute forme de désordre,
tient surtout à la précarité qui les menace (et auxquelles les mesures
sécuritaires ne peuvent rien). Comme cette préoccupation fait couple
avec la punitivité et la xénophobie, il ne faut pas s’étonner que les
politiques qui y sacrifient ciblent l’augmentation des peines et la lutte
contre les immigrants plutôt que de lutter efficacement pour diminuer
l’exposition des citoyens au risque délinquant.
Depuis trois décennies, la remise en cause du compromis de l’État
social chahute la légitimité des partis de gouvernement européens. Leur
affaiblissement les rend sensibles au risque d’une sécession, qui par
69
Robert, 2002, 2005.
Ainsi une personne fragile craindra plus d’être prise dans une rixe qu’un solide
gaillard.
71
Pour la France, voy. notamment Robert, Pottier, 1997, 2004.
72
Données françaises in Robert, Pottier, 1997, 2004.
70
La peine dans tous ses états ; FUSL, 16-17 octobre 2009.
20
Philippe Robert, Peine, récidive et crise sécuritaire
l’extrême-gauche reprochant à la gauche de trahir ses traditions, qui par
l’extrême-droite
brandissant
le
trio
préoccupation
sécuritaire/xénophobie/punitivité. Ainsi en France, au cours de la
décennie 1980, la gauche a pu contrôler son extrême-gauche tandis que
la droite ne parvenait pas à juguler la sécession son extrême-droite. Dans
la présente décennie, au contraire, les jeux sont inversés : la gauche ne
parvient plus à empêcher la sécession de l’extrême-gauche, tandis que la
droite est parvenue à récupérer l’électorat parti depuis deux décennies à
l’extrême-droite. Mais ce succès a demandé de développer une politique
plus vraie que nature sur les thèmes qui constituaient son fonds de
commerce.
Que la politique de sécurité soit peu efficace pour la sécurité des
citoyens comme Waller (2006, 2009) entreprend de le démontrer, ce n’est
peut-être pas la considération la plus déterminante dans la mesure où elle
s’avèrerait efficace pour détourner les préoccupés de la sécurité
d’apporter leurs voix aux partis extrêmes plutôt qu’à ceux de
gouvernement.
Derrière ce jeu politique, il y a peut-être autre chose de plus
profond encore : conscient qu’il n’a plus, avec l’affaiblissement de l’État
social, grand’chose à offrir pour s’attirer la loyauté des citoyens, le
personnel politique et administratif se ressent, malgré ses rodomontades,
comme décalé par rapport à la société. Au-delà des bandes de banlieue,
c’est toute la jeunesse, peut-être toute la société qui lui paraît
potentiellement menaçante, en tous cas insaisissable. Du coup, ses
politiques de sécurité cherchent moins à cibler les causes de la
délinquance, qu’à déterminer des groupes à risque de moins en moins
précis, de plus en plus larges73. Et le travail policier sombre dans une
boulimie de saisie de données74 qui a peu à faire avec une politique
raisonnée de diminution du risque de vol ou d’agression pour le citoyen,
mais beaucoup avec la peur secrète ressentie par des responsables qui
n’ont plus beaucoup de confiance dans leur légitimité auprès de leurs
concitoyens.
73
74
Voy. p. ex. Gautron, 2006.
Voy. p. ex. Dubey, 2008.
La peine dans tous ses états ; FUSL, 16-17 octobre 2009.
21
Philippe Robert, Peine, récidive et crise sécuritaire
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