Quel jour sommes-nous

Transcription

Quel jour sommes-nous
Quel
jour
sommes-nous?
Stratégies à l’intention
des personnes qui
travaillent par quarts
Guide renfermant idées, histoires et stratégies à
l’intention des personnes qui travaillent part quarts et de ceux
et celles qui partagent leur vie.
Elaboré par le Syndicat des infirmières et infirmiers du
Nouveau-Brunswick et Jon Shearer.
Le titre de cet ouvrage est le reflet d’une réalité qui
est simple à comprendre: lorsque je travaillais par quarts,
je ne savais pratiquement jamais quel jour de la semaine
nous étions et je demandais constamment: Quel jour sommes-nous? Je me souviens m’être précipité au travail un soir
et le travailleur qui faisait les quarts opposés aux miens m’a
demandé: Qu’est-ce que tu fais ici? Je pensais que c’était ton
jour de congé aujourd’hui.
Je tiens à remercier les personnes du Syndicat des
infirmières et infirmiers du Nouveau-Brunswick qui m’ont
demandé de faire partie de ce projet. J’espère vraiment que ce
petit guide pourra aider. Le fait de l’écrire m’a aidé personnellement.
JS
Le masculin ou le féminin est utilisé de façon non
discriminatoire et dans le seul but d’alléger le texte
Introduction
Je m’appelle Jon Shearer et je suis le principal
auteur de ce guide. J’ai été un travailleur de quarts pendant
la majeure partie de ma vie adulte. J’ai travaillé un quart de
nuit permanent de huit (8) heures dans la salle des nouvelles d’un important journal d’Ottawa. J’ai été disc jockey de
nuit, présentateur de musique rock. J’ai été gardien de nuit
d’édifices gouvernementaux. J’ai été chercheur dans un laboratoire de sommeil où les recherches se menaient pendant la
nuit. Et finalement, dans le but de comprendre la nature particulière de différents environnements de travail par quarts,
j’ai accompagné des travailleurs de quarts de trois continents
pendant leur quart de nuit. Depuis plus de 40 ans, je vis et je
respire le travail par quarts et je veux maintenant parler de
cette expérience. En qualité de travailleur de quarts, j’ai toujours été étonné du peu de livres qui réussissent à présenter
le monde du travailleur de quarts sous un angle sain. Voilà ce
que ce guide tente de faire.
Ce texte est divisé en six sections et chaque section
décrit un aspect particulier de la réalité du travail par quarts.
Vous avez sans doute compris que vous êtes en train de lire
l’introduction. Le premier chapitre traite de l’aspect politique
du travail par quarts. Je crois sincèrement que les travailleurs
de quarts constituent la base même de notre société. Sans
eux, l’économie planétaire s’effondrerait. Le deuxième chapitre
traite de la question du stress relié aux travailleurs de quarts.
Dans le troisième chapitre, je parle du rôle joué par le travail
par quarts et l’environnement de travail dans l’orientation de
carrière. Après ces trois chapitres, il devrait être évident à la
plupart d’entre vous qu’il est maintenant nécessaire de parler
du sommeil et dire pourquoi un mauvais sommeil engendre la
fatigue chronique. Tout au long du texte, je vais constamment
parler de la relation entre nos rythmes biologiques – dont le
sommeil – et nos niveaux d’énergie quotidiens. Après le chapitre quatre, il sera facile de faire la transition au chapitre cinq
où je vous parlerai de votre propre sommeil. Voici l’élément
clé dont vous devez vous souvenir et sur lequel j’insiste : la fatigue est un sous-produit du degré de fragmentation du sommeil. Je répéterai constamment la phrase suivante : «Plus le
degré de fragmentation du sommeil est élevé, plus le niveau
de fatigue sera élevé pendant la période où vous êtes éveillé
(période de veille)». Je vous décrirai la structure du sommeil
et comment le travail par quarts change cette structure.
1
Le sixième chapitre passe aux choses sérieuses et
à nos connaissances pour désamorcer le travail par quarts.
Dans ce chapitre, je vais examiner quelques-unes des stratégies pouvant être utilisées. Vous pouvez, si vous voulez,
passer directement à ce chapitre; toutefois, la lecture des
chapitres qui le précèdent vous donnera la logique derrière
ces suggestions.
Quatre choses sont à la base même de ma façon de
voir toute la problématique du travail par quarts.
1. Le travail par quarts ne va pas disparaître.
2. Si vous traitez les gens comme des entités économiques
disposées sur un tableur ou insérées dans un programme
d’établissement des horaires des quarts de travail, vous ne
tenez aucun compte de leur nature humaine et vous n’en
tirerez rien de plus qu’un rendement marginal; vous pouvez
vous y attendre et ne vous plaignez pas quand cela va arriver.
3. Le travail par quarts représente un danger pour la santé du
travailleur et de l’organisation !
4. La formation visant l’adaptation au travail par quarts doit
être une stratégie continue.
Ce que je pense que nous pouvons faire
Nous voici donc au moment crucial et vous verrez
maintenant comment mes partis pris déterminent ce qui,
selon moi, devraient être les points de départ pour aider les
travailleurs de quarts à faire face au travail par quarts. Ces
petites étapes constituent le minimum pour toute organisation, qu’il s’agisse d’un syndicat d’infirmières, un hôpital ou
toute industrie qui désire faire quelque chose de positif pour
ses travailleurs de quarts. Les organisations peuvent faire au
moins cinq choses pour commencer.
1. S’informer pour savoir quel genre d’horaire veulent
les travailleurs de quarts; ils sont les experts dans ce
volet de leur travail.
2. S’engager d’analyser, sur une base continue,
l’établissement des horaires de travail par quarts
et, ainsi, favoriser une meilleure santé générale des
travailleurs.
3. Sensibiliser les personnes au travail par quarts et
faire de cette sensibilisation un volet continu de la vie
quotidienne du personnel.
2
4. Faire de l’organisation un leader en matière de sensibilisation au travail par quarts.
5. Lutter pour créer des environnements conviviaux et
sains pour les travailleurs de quarts.
1
L’aspect
politique du
travail par
quarts
J’ai travaillé avec des infirmières dans tout le
Canada, les États-Unis, la Nouvelle-Zélande, l’Australie et
l’Europe, et, pendant de nombreuses années j’ai pensé que
tout allait bien. Il aura fallu l’éclosion du SRAS à Toronto pour
me présenter une autre image de la situation. J’ai toujours
été conscient du volet «temps partiel» rattaché à certains
secteurs de la profession infirmière. Dans notre société, plusieurs domaines font appel à la sous-traitance qui est devenue une façon de vivre pour de nombreux travailleurs. Il en
coûte bien moins cher à une organisation d’engager quelqu’un
à contrat que de payer les avantages sociaux d’un employé à
temps plein. Je ne m’étais jamais rendu compte de l’ampleur
du phénomène jusqu’au jour où j’ai interviewé des infirmières
de ma propre collectivité. Elles avaient des histoires d’horreur
à raconter au sujet d’infirmières devant travailler des doubles
quarts ou travailler un quart de jour à un endroit, retourner
à la maison, dormir, et puis travailler le quart de minuit à un
autre endroit.
J’ai parlé à des infirmières qui travaillent encore pendant ces quarts machiavéliques de huit heures et qui peuvent
seulement être avec leur famille une fin de semaine aux cinq
semaines. J’ai entendu parler d’horaires qui ont été changés
à deux semaines d’avis et en ne tenant aucun compte des
sorties ou des vacances planifiées. Combien d’études seront
nécessaires pour que nous soyons finalement convaincus que
le fait de travailler de tels quarts se traduit en épuisement,
perte de motivation, démoralisation et colère. Les bénéfices
économiques, et les avantages qui leur sont associés, sont-ils
si importants que les organisations perdent de vue la nature
destructrice de ce genre de travail et que les personnes qui
font ce genre de travail sont les seules à s’en rendre compte ?
Il me semble que si les personnes qui travaillent au pays des
travailleurs de jour passaient quelques années à travailler par
quarts, certaines choses changeraient.
Vivre au pays des «normaux»
Le travail par quarts est la plus vieille profession du
monde. Un des événements ayant transformé l’histoire de
l’évolution de l’homme est l’exploitation du feu. Quelqu’un
3
devait rester éveillé toute la nuit pour conserver la flamme;
voilà donc le premier travailleur de quarts !
À partir de ce moment dans l’histoire de l’humanité,
le travail par quarts était le domaine des marins, des soldats,
et autres créatures de la nuit. Mais lorsque Thomas Elva
Edison a éclairé nos nuits grâce à l’ampoule électrique, tout a
changé.
Selon plusieurs chercheurs, à la fin de la Deuxième Guerre mondiale, près de 9 % de la population active
canadienne est engagée dans une forme quelconque de
travail par quarts. En fait, c’est ce même effort de guerre qui
est responsable de l’augmentation du travail par quarts dans
l’industrie. Il serait important à ce stade-ci de se souvenir que
la majorité des personnes qui étudient le travail par quarts en
tant que phénomène social le définissent de la façon suivante :
«Dimension du travail qui n’est pas comprise dans la tranche
horaire de 7 h à 19 h». En nous basant sur cette définition,
il est facile de comprendre pourquoi nous pouvons dire que
près de 35 % de la population active canadienne est engagée
dans une forme quelconque de travail par quarts.
Le travail par quarts ne signifie pas seulement
travailler la nuit. Toute personne qui a une famille et qui a
travaillé le quart de soir (généralement de 15 h à 23 h), connaît le stress engendré par ce quart sur la vie au foyer. Cette
définition comprend aussi les travailleurs permanents de soir
et de nuit; les personnes qui travaillent ce qu’on appelle le
quart du boulanger et qui doivent se lever à 2 h pour commencer le travail; le travailleur qui a une affectation fractionnée et qui doit se lever tôt et travailler quatre heures, par
exemple de 6 h à 10 h, et qui doit revenir travailler entre 15 h et
19 h; les personnes qui travaillent deux ou trois quarts par
roulement; les jeunes qui travaillent dans l’industrie de la
restauration-minute afin de contrebalancer l’augmentation des
frais de scolarité; les «occasionnels» qui ne savent jamais,
d’une journée à l’autre, quel quart de travail leur sera assigné;
ai-je besoin de continuer ?
Il suffit de peu pour comprendre que les travailleurs de quarts sont la base même de notre système socio-économique. Pensez à ce qui arriverait si les travailleurs
de quarts du monde entier décidaient en masse de ne plus
travailler les fins de semaine ou après 18 h en semaine.
L’économie mondiale s’effondrerait en une nuit. Tous les
services aux particuliers disparaîtraient, notamment services
4
de police, d’incendie, soins de santé, services d’aqueduc,
d’égouts, d’électricité. Toutes les industries de la production
piétineraient et les restaurants, les théâtres et les diverses
formes de divertissement ne seraient accessibles que le jour.
Les centres d’appel ne seraient plus là pour nous aider à
déboguer.
Image intéressante, n’est-ce pas ? Si le travail par
quarts et les travailleurs de quarts sont si importants dans
notre société, pourquoi ne sont-ils pas tenus en plus haute
estime ? Pourquoi doivent-ils lutter pour obtenir des quarts
décents ? Pourquoi les cafétérias ferment-elles leurs portes
après le départ des travailleurs de jour ? Pourquoi les services
administratifs sont-ils seulement offerts pendant le quart
de jour ? Pourquoi les réunions se tiennent-elles généralement de façon à accommoder le personnel de jour ? Pourquoi
demande-t-on, de façon générale, aux travailleurs de quarts
d’assister à ces réunions pendant leurs jours de congé ?
Pourquoi l’horaire des quarts de travail est-il généralement
imposé par des personnes qui n’en font pas ? Chaque travailleur de quarts a sa plainte préférée relativement au travail par
quarts mais il y a une réponse aux questions ci-dessus – et à
plusieurs autres – et elle se résume en deux mots :
LES «NORMAUX».
Les «normaux» sont les personnes qui travaillent de
9 à 5 ou une variation sur ce thème. Elles sont très différentes comparativement aux travailleurs de quarts. Elles disent
comprendre le sort des travailleurs de quarts mais le comprennent-elles vraiment ? Les «normaux» tiennent leurs fins
de semaine pour acquis. Or, les travailleurs de quarts feraient
n’importe quoi pour obtenir une fin de semaine de congé.
Ils feraient les quarts les plus meurtriers seulement pour
obtenir une fin de semaine libre. Ils échangeraient des quarts,
feraient des doubles quarts seulement pour obtenir un de ces
précieux week-end.
Le plus je parle aux travailleurs de quarts, qu’ils
soient infirmières ou travailleurs de l’industrie, le plus je me
rends compte du fossé qui les sépare des «normaux». C’est
d’ailleurs une des raisons principales pourquoi je suggère,
depuis de nombreuses années, que les autres personnes
proches du travailleur de quarts, i.e. celles qui vivent et
travaillent avec lui, doivent faire partie de la formation
visant l’adaptation au travail par quarts. Le travail par quarts
n’affecte pas seulement le travailleur, il a aussi un impact sur
toutes les personnes faisant partie de sa vie.
5
Comme ce fut souvent le cas par le passé, le nouveau champ de bataille sera probablement, encore une fois, le
milieu de travail. Par le passé, en tant que regroupement fort,
nous avons déployé des efforts pour réduire les heures de travail pendant la semaine de travail. Étant donné le capitalisme
à l’américaine basé sur les résultats, peut-être est-il temps de
ramener les heures de travail à la table. Peut-être est-il temps
de faire en sorte que l’adaptation au travail par quarts soit
partie intégrante de l’énoncé de mission de l’organisation.
2
Stress, stress,
merveilleux
stress
De nos jours, qu’importe où je vais, les gens parlent
de stress. Le Syndicat des infirmières et infirmiers du Nouveau-Brunswick a d’ailleurs un petit guide à ce sujet (et un
de qualité je dois dire). À l’origine, la plupart des chercheurs
considéraient le stress comme quelque chose de négatif que
la personne devait «gérer». Tout le monde vit du stress et,
comme le disait Hans Selye il y a plus de cinquante ans : la
mort est la seule chose qui vous délivrera complètement du
stress.
Il ne fait aucun doute que notre monde d’aujourd’hui
est significativement plus stressant qu’il y a vingt ans
mais il me semble que la plupart des gens s’adaptent. Or,
l’adaptation semble constituer un des problèmes. J’observe
les gens dans l’autobus en me rendant au Collège et je vois
rarement un visage souriant. Ces personnes sont fatiguées et,
de toute évidence, elles ne sont pas ravies à l’idée d’une autre
journée au travail.
Un des grands problèmes auquel j’ai eu à faire face
par le passé est celui de trouver une définition du stress
avec laquelle je pouvais travailler. Le schéma ci-dessous vous
aidera à conceptualiser le chemin que j’ai choisi. Tout d’abord,
je dois affirmer clairement que je suis tout à fait conscient
que les «normaux» et les travailleurs de quarts rencontrent
des stress similaires. Toutefois, la différence est la suivante :
on doit tenir compte de la fatigue chronique dans le cas des
travailleurs de quarts.
Quelques éléments dignes de mention :
6
La clé est de comprendre que la plupart des
stresseurs ont à la fois un potentiel négatif et positif. Le truc
est de trouver comment utiliser le stress à votre avantage
et non pas à votre désavantage. Examinons d’abord quatre
catégories de stresseurs, communs à la plupart des gens. Au
moment de les lire, demandez-vous comment le travail par
quarts a influencé le rôle qu’ils ont joué dans votre vie.
Le stress physique
Je travaille présentement dans un milieu scolaire et,
après avoir enseigné pendant six heures, corrigé des travaux
et parlé avec les étudiants, je suis fatigué physiquement.
Je trouve l’énergie pour faire des choses le soir, que ce soit
de la lecture, une promenade ou écouter les disques de ma
collection. Mon milieu de travail est très différent de celui de
plusieurs personnes qui font un travail physique, comme par
exemple, le travailleur de la construction. La seule ressemblance est – ou était – le travail de jour.
Lorsque je travaillais par quarts, le scénario était
complètement différent. Je n’avais pas seulement quelques
douleurs occasionnelles, c’était tout mon corps qui faisait mal
et j’avais l’habitude de faire des blagues et dire que j’avais
la douleur du mois. Parfois c’était mon épaule, parfois c’était
mon dos, et ainsi de suite. J’étais fatigué de façon chronique
et mes intestins portaient le poids du quart de nuit. Chaque
personne du laboratoire de sommeil avait quelque chose à
dire au sujet de ses boyaux. Certains avaient la diarrhée,
d’autres étaient constipés et d’autres se plaignaient de gaz
intestinaux ! Lorsque nous travaillons et dormons à l’encontre
de nos rythmes biologiques naturels, notre corps doit
s’adapter et, en général, l’adaptation ne se fait pas très bien.
Le résultat final est le stress et plusieurs savent qu’il s’agit
d’une conséquence de leur travail. Or, trop peu de personnes
comprennent le rôle joué par le travail par quarts dans cette
équation.
Le stress psychologique
Voilà un stress dont la plupart des gens ne veulent
pas parler. À mes yeux, cela fait tellement partie de la vie. Il
m’est arrivé à maintes occasions dans ma vie de me poser la
7
question : «Qu’est-ce qui ne va pas avec moi ?» Comme il
nous arrive tous de le faire à un moment ou l’autre de notre
vie. La plupart du temps nous sortons de cet état et passons
à autre chose; parfois, nous avons besoin d’aide professionnelle. Or, avez-vous remarqué que nous nous interrogeons
rarement sur ce qui va bien avec nous. Je me suis rendu
compte que lorsque je travaillais par quarts, ma partenaire
me posait souvent la question et de différentes façons, par
exemple :
«Comment ! Tu es encore fatigué ? Tu viens de
dormir six heures et tu es encore fatigué, qu’est-ce qui ne va
pas avec toi ?»
«Comment ! Tu travailles ce soir ? Tu savais pourtant
que c’était le soir du concert des enfants. Qu’est-ce qui ne va
pas avec toi ?»
«Ça fait un mois que tu promets de faire cela et ce
n’est pas encore fait. Qu’est-ce qui ne va pas avec toi ?»
«Tout ce que tu fais c’est t’asseoir devant la télé et
jouer avec la télécommande. Qu’est-ce qui ne va pas avec toi ?»
Tout ce que cela m’a permis de comprendre était
que peut-être quelque chose n’allait pas avec moi. Après tout,
si vous vous faites dire suffisamment de fois que quelque
chose ne va pas avec vous, vous commencez à le croire. Il ne
fait aucun doute dans mon esprit que ce que nous pensons
à notre sujet affecte notre qualité de vie. Or, lorsque nous
n’avons pas assez d’énergie pour voir notre potentiel positif,
alors notre stress psychologique est décuplé.
Le stress social
Chaque personne vit un stress social. Si vous avez
un emploi, vous vivez un stress social. Lorsque je parlerai
d’orientation de carrière et de travail par quarts, cet élément
deviendra plus clair. Les amitiés et les relations interpersonnelles se transforment en stress lorsque vous travaillez par
quarts. Élever une famille peut représenter un des événements sociaux des plus stressants.
J’ai trouvé un petit outil que j’aurais aimé avoir par
le passé. Il a été conçu pour aider les familles qui traversent
une période où la communication est difficile. Il s’agit du
«Thermomètre de stress familial». Je n’ai aucune idée où je
l’ai trouvé mais, au cours des quinze dernières années, je l’ai
modifié et je l’ai utilisé pour aborder les aspects familiaux qui
entrent en jeu dans le stress social du travailleur de quarts et
transformer leur potentiel négatif en potentiel positif. Je sais
que les familles traversent des périodes difficiles et, parfois,
lâcher prise est la seule chose que vous pouvez faire.
8
Si vous avez le temps et si vous en avez envie, consultez le «Questionnaire pour toute la famille» à l’Annexe 1.
Demandez à chaque membre de la famille de le lire, de répondre aux questions individuellement et, par la suite, parlez de
vos résultats. Si vous êtes dans une relation de couple en ce
moment et n’avez pas encore fondé une famille, veuillez simplement substituer le mot «relation» au mot «famille» dans le
questionnaire.
Le stress spirituel
Je ne consacrerai pas beaucoup de temps à ce stress
particulier. La littérature renferme très peu d’ouvrages traitant
du «stress spirituel». Lorsque je parle de spiritualité, il ne s’agit
pas de religion. Je parle de faire quelque chose qui entraîne une
meilleure connaissance de soi. Cela peut comprendre tellement
de choses mais, en fin de compte, elles visent toutes le même
but, soit de se consacrer du temps. Ce que vous faites importe
peu car, à vrai dire, lorsque nous nous accordons du temps et
nous donnons la chance de respirer un peu, nous rendons service au monde entier.
Lorsque nous prenons soin de nous, toutes les
personnes autour de nous en bénéficient. Dans le monde
d’aujourd’hui, s’accorder du temps est un impératif des plus
précieux et qui s’avère deux fois plus difficile pour le travailleur
de quarts. Or, tout expert dans le domaine du travail par quarts
vous dira la même chose : cela est nécessaire à la santé sociale,
psychologique, physique et spirituelle.
3
J’ai toujours été fasciné de voir comment la
dynamique d’un emploi peut influencer l’orientation de carrière d’un individu. Lorsque je parle d’orientation de carrière,
je ne parle pas de la façon de choisir sa carrière mais plutôt de
la façon d’aborder celle que nous avons déjà. J’ai effectué de
nombreuses études qui m’ont amené à certaines conclusions
par rapport au changement que subi cette orientation au cours
des ans et de la relation avec le travail par quarts. Le schéma
ci-dessous est la façon la plus simple que je conaisse pour vous
expliquer ces données.
Le travail
par quarts et
l’orientation de
carrière
.
9
Tout feu tout flamme
Nous commençons tous notre carrière avec une attitude des plus enthousiaste et passionnée. Peut-être étionsnous tout simplement contents de trouver un emploi. Peutêtre s’agissait-il de la réalisation du rêve de toute une vie.
Qu’importe la raison, la plupart d’entre nous étions excités de
trouver un emploi axé sur la carrière. Je parie que la plupart
d’entre vous n’avez pas commencé votre carrière d’infirmières
en disant : «Je vais être la pire employée, ils n’auront jamais
rien vu de pareil. » C’est peut-être le cas maintenant, mais
vous n’avez pas commencé de cette façon. En me basant
sur mon expérience, qu’importe combien la personne aime
son travail, la période «tout feu tout flamme» ne dure qu’un
certain temps et toute personne va envisager une nouvelle
orientation de carrière si elle reçoit peu de considération et de
respect par rapport à son emploi actuel et si ce dernier n’est
plus une source de défis.
Confrontation à la dure réalité
Plusieurs chercheurs ont démontré que, deux à six
ans après le début, les personnes sont confrontées à la réalité
de leur carrière. Lorsque cela se produit, les personnes commencent alors à se demander pourquoi elles font ce qu’elles
sont en train de faire. Elles deviennent désabusées par rapport à leurs collègues de travail et ont tendance à percevoir le
personnel cadre comme «l’ennemi». Or, rendus à ce point, la
plupart des gens se sont engagés et ont déjà d’importantes
responsabilités et voilà le problème. Il y a des conjoints
ou des personnes chères qui entrent en jeu, des enfants à
supporter, des gérants de banques qui doivent être payés et
des maisons à entretenir. À ce moment-là, la plupart d’entre
nous regardons autour, vérifions le taux de chômage et les
factures empilées sur la table de la cuisine et disons simplement : «Je suis chanceux d’avoir un emploi !». Alors, nous
serrons les dents, prenons notre mal en patience et rejoignons les rangs de ceux et celles qui font leur travail dans un
état d’inconscience – non pas littéralement mais certainement
symboliquement.
J’ai mentionné déjà que la plupart des «normaux»
prennent deux à six ans avant d’être confrontés à la réalité
de leur travail. Mes travaux de recherche démontrent que les
travailleurs de quarts atteignent cette étape plus rapidement
et se sentent «tout feu tout flamme» seulement six à dix-huit
10
mois. Je ne veux pas que vous pensiez que c’est ainsi pour
tous les travailleurs de quarts. Ce ne l’est pas ! Certaines personnes demeurent passionnées et enthousiastes par rapport
à leur travail qu’importe la dynamique du milieu de travail.
Toutefois, c’est en se traînant que la grande majorité arrive à
la prochaine étape du processus.
Le point de transformation
Je n’ai lu aucun rapport de recherche traitant du
temps nécessaire pour passer de la confrontation à la réalité
au point de transformation. Ma propre recherche n’est pas
arrivée à déterminer cette période de temps. Tout ce que je
sais, c’est que cela peut arriver dix secondes ou dix années
après la confrontation à la réalité. Toutefois, la plupart des
gens passent par cette étape à un moment donné dans leur
carrière. C’est à ce moment que nous prenons la décision
éclairée d’aborder notre carrière d’une de ces trois façons :
qualité (professionnelle), fonctionnalité ou apathie.
Qualité
Je suis convaincu que la plupart des gens décident
d’être axés sur la qualité par rapport à ce qu’ils font. Je crois
que cette forme de professionnalisme de la qualité n’a rien à
voir avec le nombre de lettres à la suite de votre nom ou avec
le genre de travail que vous faites. Je crois que le professionnalisme dépend de l’état d’esprit avec lequel vous abordez
votre travail. Et cela, je crois, est un choix conscient.
Nous avons tous déjà travaillé avec ce genre de
personnes. Nous nous sentons bien après les avoir côtoyées.
Leurs principales qualités se résument à deux choses : elles
savent quand dire «non» et elles sont axées sur les solutions.
Elles savent quand il est temps de faire une pause et se faire
du bien. Devant un problème, elles ont tendance à rechercher
une solution positive. Elles ont tendance à être l’armature de
leur milieu de travail et tout le monde le sait.
Fonctionnalité
Nous avons aussi travaillé avec des personnes qui
ont décidé d’aborder leur travail sous un angle «fonctionnel».
Ce que je veux dire ici c’est que ces personnes sont fonctionnelles et c’est à peu près tout ! Elles font le strict nécessaire,
soit juste ce qu’il faut pour ne pas être congédiées. Elles ont
peu de choses positives à dire au sujet de quoi que ce soit.
11
Elles vous laissent des tâches à accomplir. Elles peuvent vous
dire tout ce qui va mal dans le milieu de travail mais ont très
peu de positif à exprimer. Elles proclament leur antipathie
envers les personnes et ont généralement un effet toxique sur
la plupart des personnes dans le milieu de travail.
Apathie
Nous pouvons parler des gens apathiques de plusieurs façons. J’ai entendu plusieurs façons d’y faire référence
: blessés ambulants, personnes aux yeux morts, automates,
personnes qui ont de la difficulté à faire les choses machinalement, sous-fifres Microsoft et ainsi de suite. Vous pouvez aussi
lire une tonne d’écrits sur les personnes qui ont choisi l’apathie
comme sentier de vie et la plupart disent la même chose. Être
apathique au travail est une chose, être apathique avec son
conjoint et ses enfants en est une autre. Le plus triste c’est
quand les gens sont apathiques envers eux-mêmes (style de
vie malsain, par exemple : fumer, ne pas faire d’exercice, faire
de l’embonpoint). Si les trois se produisent en même temps,
tous les experts vous le diront : vous êtes épuisé !
La personnalité du
travailleur de quarts
Je ne dis pas que le sort du travailleur de quarts
est de devenir totalement apathique. Ce ne l’est pas. Les
«normaux» deviennent tout autant apathiques. Selon mon
expérience, les travailleurs de quarts le deviennent plus rapidement. Cela n’est pas surprenant lorsque vous vous rendez
à l’évidence que la fatigue chronique est la principale variable
qui entre en jeu dans la vie du travailleur de quarts. Certains
ont suggéré que la fatigue chronique serait à la source du
développement de la personnalité du travailleur de quarts.
J’aimerais pouvoir m’attribuer le mérite d’avoir pensé
à cela mais plusieurs chercheurs y sont arrivés avant moi.
Voici ma façon de comprendre les quatre caractéristiques de la
personnalité du travailleur de quarts.
12
1. Aliénation
Les travailleurs de quarts, y compris moi-même, pensons
vraiment que les personnes qui ne font pas de quarts de
travail («normaux») ne comprennent pas nos problèmes,
particulièrement lorsqu’il s’agit de notre manque de sommeil
et de la fatigue qui en résulte. En vérité, si vous n’avez jamais
travaillé par quarts pendant une période substantielle, vous ne
pouvez vraiment pas savoir ce que c’est.
2. Cynisme
Il est très difficile de demeurer positif par rapport à la façon
dont se déroule votre vie lorsque celle-ci est dirigée par des
personnes qui savent très peu comment une personne peut
se sentir mentalement et physiquement lorsqu’elle travaille
par quarts. C’est très frustrant de voir que l’environnement de
travail semble conçu comme s’il y avait seulement un quart de
travail, soit le quart de jour. C’est frustrant aussi de voir que
les gens, qui sont responsables de la gestion des travailleurs
de quarts, ne travaillent pas pendant les quarts qui sont à
l’horaire qu’ils ont établi. J’ai arrêté de me demander pourquoi
la plupart des travailleurs de quarts sont cyniques.
3. Soupe au lait
Ce qui est entendu ici c’est le fait de s’emporter pour des
riens ou de simplement être de mauvaise humeur la plupart
du temps. Selon moi, c’est vraiment simple à comprendre;
lorsque que vous souffrez de fatigue chronique, il est de plus
en plus difficile d’être patient.
4. Résistance au changement
Si jamais vous voulez contrarier un travailleur de quarts,
dites-lui que son horaire va être changé. Les travailleurs de
quarts ont une vielle philosophie qui a résisté au passage des
années : inutile de réparer ce qui n’est pas endommagé !
Lorsque je regarde ces quatre caractéristiques, je me
rends compte que les «normaux» les possèdent aussi, plus
particulièrement de nos jours, alors que les heures de travail
prolongées est la norme plutôt que l’exception. Or, si vous les
observez aux yeux du chercheur sur le sommeil, vous risquez
de voir quelque chose de différent. Selon moi, ces caractéristiques appartiennent à une personne qui est vraiment
fatiguée. Lorsqu’une personne est vraiment fatiguée, elle a
tendance à penser que les gens ne comprennent pas (aliénation). Lorsqu’une personne est vraiment fatiguée, elle a tendance à voir le côté négatif des choses (cynisme). Lorsqu’une
personne est vraiment fatiguée elle a tendance à être de
mauvaise humeur et à s’emporter facilement (soupe au lait).
Et, finalement, lorsqu’une personne est vraiment fatiguée, elle
n’est vraiment pas disposée à faire des changements.
Il m’est de plus en plus évident que la façon dont le
travail par quarts affecte les travailleurs détermine, en grande
partie, leur façon d’envisager leur carrière. Dans le chapitre
précédent, nous avons parlé du stress et du fait que les travailleurs de jour et les travailleurs de quarts doivent composer
13
avec les mêmes stresseurs. J’ai aussi affirmé que la qualité
des stresseurs était significativement différente en raison de
l’ajout d’un autre stresseur, soit la fatigue chronique. Je crois
que la même chose s’applique à ce niveau-ci de l’analyse.
Je ne dis pas que, dans leur carrière, les travailleurs de jour
ne passent pas par une confrontation à la réalité et un point
de transformation. Ce que je dis c’est que les travailleurs
de quarts passent par ces étapes dans cet état de fatigue
mentale et physique qui accompagne le fait de travailler à
l’encontre de ses rythmes biologiques. Cette relation devient
encore plus évidente lorsque nous comprenons le rôle des
rythmes biologiques, du sommeil et du travail par quarts.
4
Les rythmes
biologiques et
le travail par
quarts
Pratiquement toutes les dimensions de notre être
sont contrôlées par des rythmes biologiques prévisibles qui
suivent un pattern particulier. Nous sommes des animaux
soumis à des rythmes de la même façon que tout ce qui
compose l’univers est soumis à des rythmes. L’étude des
rythmes corporels est relativement récente. Notre compréhension des mécanismes sous-jacents à ces rythmes a grandement changé au cours des vingt dernières années. La plupart
des gens sont intéressés par l’étude de l’horloge biologique.
Lorsque nous travaillons par quarts, plus particulièrement un
quart de soir (15 h à 23 h) ou un quart de nuit de huit, dix
ou douze heures, nous travaillons à l’opposé de nos rythmes
biologiques (en réalité, nous vivons une vie qui va à l’encontre
de ces rythmes). L’animal humain est diurne de nature. Nous
avons été conçus pour nous lever avec le soleil et dormir la
nuit. Nous ne sommes pas nocturnes. Cela ne veut pas dire
qu’il n’y a pas de personnes de type soir ou «couche-tard»
mais la majorité d’entre nous sommes des créatures de jour.
Essentiellement, nous sommes des animaux circadiens, i.e. que nos rythmes biologiques ont un cycle d’environ
24 heures. D’où le terme «circadien» qui vient de circa
(environ) et de dia (jour). Nous avons d’autres rythmes dont
le cycle est inférieur à 24 heures. Le sommeil en est un. Nous
appelons ces rythmes plus courts «ultradiens». Nous avons
aussi des rythmes dont le cycle dépasse 24 heures. Il s’agit
des rythmes «infradiens» et le cycle menstruel de la femme
en constitue l’exemple parfait.
Au cours des ans, la question d’une horloge maîtresse contrôlant tous les cycles du corps humain a fait l’objet de
nombreux débats. Les recherches récentes ont clairement démontré que nous avons plusieurs systèmes oscillatoires avec
leurs propres horloges situées à tous les niveaux, y compris
14
le niveau cellulaire. Les chercheurs s’entendent pour dire que
le noyau suprachiasmatique de l’hypothalamus est l’endroit
physique où se situe l’horloge qui régit les cycles circadiens.
La température centrale du corps est intimement
liée à notre capacité de travailler et de dormir. Cette température se mesure généralement à l’intérieur de l’oreille (cavité
tympanique) et elle est loin d’être stable. Elle varie de 0,5
à 2 degrés Celsius sur une période de vingt-quatre heures.
Le tableau ci-dessous donne un aperçu de la variation de la
température centrale sur une période de 24 heures.
Aux alentours de 22 h, la température centrale
commence à baisser et nous commençons à avoir sommeil.
Au moment où la température diminue et que nous allons
nous coucher pour la nuit, la tension artérielle diminue, les
fréquences respiratoire et cardiaque diminuent également,
la digestion et le débit urinaire ralentissent. Maintenant que
toutes ces fonctions sont ralenties à un minimum, le corps
peut s’attarder à son travail de réparation par le biais du sommeil profond à ondes lentes (Je parlerai davantage de cela
au chapitre suivant) et faire la synthèse des informations de
la journée et les mettre en mémoire par le biais du sommeil
paradoxal. Notre température centrale atteint son point le plus
bas vers 4 h du matin. C’est ce qu’on appelle le nadir circadien ou creux circadien.
Vers 5 h du matin, la température centrale commence à augmenter et c’est le signal qui dit au corps de se
réveiller et commencer sa journée. La température continue
d’augmenter jusqu’à 12 h (midi) environ, moment où elle
atteint un sommet. À un moment donné dans l’après-midi, la
température subit une chute et on fait souvent référence à
cela en parlant du «coup de pompe d’après dîner». Il est important de noter qu’il n’est pas nécessaire d’avoir mangé pour
le ressentir et la plupart des gens sentent quand cette chute
se produit. Si vous êtes déjà revenu à la maison dans l’après-
15
midi en vous disant : Je vais aller au lit de bonne heure, vous
savez ce que c’est que de ressentir le coup de pompe de
l’après-midi. Mais qu’arrive-t-il vers 20 h ? La plupart d’entre
nous ressentons ce qui est appelé un second souffle. En fait,
notre température centrale remonte à nouveau. Toutefois,
cela ne dure pas longtemps. Vers 22 h, la température recommence à baisser et nous voyons de nouveau apparaître la
courbe. Ce qui devrait vous sembler l’évidence même, c’est
que les activités normales de la journée sont en harmonie
avec les rythmes de la température centrale.
La température centrale détermine aussi comment
le travailleur va répondre aux quarts de jour et de nuit. Les
personnes du type jour, les «lève-tôt, oiseaux du matin ou
alouettes», ressentent le nadir ou creux circadien plus tôt que
la plupart des gens, soit généralement vers 2 h 30 du matin.
C’est la raison pour laquelle les personnes du type jour ont
tendance à avoir beaucoup plus de difficulté avec le quart de
nuit. D’un autre côté, les personnes du type nuit, les «oiseaux
de nuit ou les hiboux» ont tendance à ressentir le nadir plus
tard le matin, soit vers 5 h 30, ce qui les rend plus aptes pour
le quart de nuit. Un test a été conçu par Horne et Ostberg
pour évaluer les types de jour ou de nuit. Vous voudrez peutêtre consulter mon site Web et y jeter un coup d’œil pour voir
où vous vous situez.
Lorsque nous travaillons la nuit et essayons de
dormir le jour, nous sommes littéralement désynchronisés
par rapport à nos rythmes corporels. Nous travaillons lorsque
notre température centrale diminue et que notre corps ne
demande qu’à dormir. La plupart des travailleurs de quarts
vivent une «heure d’enfer» quelque part entre 2 h et 5 h du
matin, moment où ils feraient n’importe quoi pour dormir
un peu. De nombreux rapports font état de choses étranges
qui arrivent aux travailleurs de quarts pendant cette «heure
d’enfer». Leur habilité à penser clairement et à prendre des
décisions est grandement diminuée. La mémoire à court
terme est affectée; les travailleurs oublient ce qu’ils ont fait
ou ce qu’ils doivent faire. Un des rapports suggère que, durant cette période, notre acuité visuelle est en grande partie
diminuée. En termes plus simples : nous devenons maladroits.
Les travailleurs de nuit font aussi l’expérience de ce que
j’appelle les «hallucinations périphériques», soit le fait de voir
des choses à partir du coin des yeux et se demander de quoi
il s’agit. Tout ce divertissement nous est offert parce que nous
sommes désynchronisés par rapport à nos rythmes corporels
normaux.
16
Plusieurs ont des nausées pendant cette «heure
d’enfer». Pas à un point tel qu’ils vomissent, bien que certains le fassent, mais un sentiment de malaise en général.
Vous ne serez pas étonné si vous digérez mal un lourd repas
consommé vers cette heure. Tout à fait par accident, j’ai
découvert que si je consommais des aliments riches en potassium à ce moment, mon malaise disparaissait et mes envies
de manger des aliments sucrés diminuaient significativement
aussi.
C’est lors du retour à la maison que les travailleurs
de quarts ressentent tout l’impact d’être demeurés éveillés
pendant toute la durée d’un nadir ou creux circadien. Tous ont
connu, à un moment ou l’autre, l’excitation de retourner à la
maison après le quart de nuit. Lorsque nous arrivons à la maison et nous mettons au lit, notre température centrale a commencé son ascension vers son point culminant qui sera atteint
vers 12 h (midi). Il n’est donc pas étonnant de constater que
la plupart des travailleurs de quarts ont des troubles du maintien du sommeil ou de la difficulté à rester endormis.
Étant donné que nos rythmes continuent leurs cycles
indépendamment du fait que nous dormions ou pas, il est facile de conclure que des quarts de nuit permanents pourraient
représenter ce qu’il y a de mieux en matière de travail par
quarts et adaptation biologique. Or, ma recherche et celles de
d’autres chercheurs ont démontré que près de 97 % de ceux
qui travaillent la nuit sur une base permanente vont au lit le
soir lors de leurs jours de congé. Ainsi, leurs jours de congé
deviennent leurs quarts de jour. En vérité, ils sont donc des
travailleurs de quarts rotatifs autant que ceux qui font deux
ou trois quarts rotatifs.
Dormir à l’encontre de nos rythmes biologiques se
traduit en un sommeil fragmenté et la fatigue à l’état de veille
est le résultat du sommeil fragmenté. C’est probablement le
bon moment de traiter du sommeil et du travailleur de quarts.
5
Le sommeil et
le travailleur de
quarts
Le sommeil est un mystère pour la plupart des gens,
il est voilé de rêves et nous présente un univers où le temps
n’existe pas. Aux yeux des chercheurs, le sommeil est non
seulement un mystère mais une dimension fascinante remplie
d’aspects inconnus de la condition humaine. Du côté des infirmières, le sommeil est un précurseur reconnu de la guérison
du patient. Toutefois, pour l’infirmière qui travaille par quarts,
le sommeil est souvent illusoire, court et frustrant, et elle en
sort souvent plus fatiguée qu’avant de se mettre au lit.
17
Le sommeil n’est pas un état végétatif; et ce n’est
certainement pas une chose que nous devons percevoir comme une caractéristique négative de la vie. C’est un processus
actif sans lequel nous ne pourrions vivre. Pourtant, la plupart
d’entre nous trichons par rapport à notre sommeil. Je n’ai
jamais entendu qui que ce soit dire : «J’ai un rapport vraiment
très important à terminer avant demain matin, je crois que
je vais aller dormir.» Certaines personnes proclament que le
sommeil est une perte de temps et qu’elles auront amplement
de temps pour dormir lorsqu’elles seront mortes !
En vérité, nous avons tous besoin d’un sommeil
de qualité. Cela ne signifie pas nécessairement que nous
avons besoin davantage d’heures de sommeil. Oui, il est vrai
que nous avons besoin d’une certaine quantité de sommeil
pendant une période de 24 heures. Il est vrai aussi qu’il y a
de petits et de gros dormeurs. Le facteur crucial ici n’est pas
le nombre d’heures que vous dormez mais plutôt la qualité
de votre sommeil. Contrairement aux histoires si souvent
racontées dans les tabloïdes achetés au supermarché, tous les
mammifères, y compris les dauphins, ont besoin de sommeil.
Ce besoin biologique est remarquablement stable en quantité
et en qualité. Or, le travail par quarts affecte ces deux aspects
du sommeil et cela se traduit en problèmes importants pendant l’état de veille.
Afin de bien comprendre l’impact du travail par
quarts sur le sommeil et les périodes de veille subséquentes, nous devons comprendre la structure du sommeil. Dans
un sens général, le sommeil peut être observé sous l’angle
de deux grands stades, soit le sommeil rapide ou paradoxal
(mouvements oculaires rapides) et sommeil lent ou profond
(absence de mouvements oculaires rapides). Le sommeil
rapide ou paradoxal se caractérise par d’importants changements physiologiques accompagnés d’une accélération des
fonctions corporelles : les fréquences cardiaque et respiratoire
augmentent, les ondes cérébrales sont plus rapides et les
mouvements oculaires sont plus prononcés. C’est le schéma
classique du sommeil paradoxal (période où l’on rêve).
Le sommeil lent ou profond (absence de mouvements oculaires rapides) se divise en quatre étapes et chacune se caractérise par des ondes cérébrales différentes qui
peuvent être mesurées grâce à un électroencéphalogramme.
Généralement, la polysomnographie standard (enregistrement
des variables physiologiques du sommeil) comprend aussi
l’électrooculographie (EOG – enregistrement des mouvements
18
oculaires) et l’électromyographie (EMG – activité électrique
du muscle). Grâce à ces trois mesures seulement (poly, EOG,
EMG), il est possible d’observer que la qualité du sommeil
change à chaque stade. Jusqu’à maintenant, les mécanismes
sous-jacents à ces changements demeurent un mystère.
Mais il est très clair que chaque étape est indépendante et
présente des changements subtils relativement aux fonctions
corporelles et chacune fait partie d’un cycle prévisible. Le
schéma ci-dessous illustre comment ces cycles interagissent.
État de veille :
La plupart d’entre nous savons quand nous sommes
éveillés. Toutefois, à mesure que nos fonctions circadiennes
commencent à ralentir selon le moment de la journée, l’envie
de dormir se fait sentir. Nous commençons à nous étirer, à
bailler, à penser à se mettre au lit. La plupart des gens suivent un rituel avant d’aller au lit. Lorsque nos enfants étaient
jeunes, nous aurions pu régler nos montres selon l’étape de
notre rituel avant la mise au lit. Il y avait d’abord le bain aux
enfants suivi des petites histoires, après quoi nous prenions
une petite collation. Nous nous rendions ensuite à la salle de
bains pour nous laver les dents et finalement (si tout allait
bien) nous nous mettions au lit. Venait ensuite un deuxième
rituel, celui de dire «bonsoir». Tout cela faisait partie du rituel.
Il est intéressant de remarquer que les études suggèrent
que plus une personne est ritualisée (i.e. elle fait toujours les
mêmes choses avant d’aller au lit), le mieux elle dort. Cela
laisse une grande partie des travailleurs de quarts en plan
lorsqu’ils finissent leur quart de nuit. Il n’y a pas de rituel !
L’hypnagogique :
Il y a plusieurs différences entre les études sur
le sommeil des Européens et celles des Nord-Américains
(particulièrement des Américains). La principale différence
est dans la façon utilisée par les chercheurs pour parler du
processus d’endormissement. La plupart des chercheurs,
qu’importe d’où ils viennent, reconnaissent que, au moment
où la personne entre dans le sommeil, il y a déjà une diminution constante de l’activité relativement aux fonctions corpo-
19
relles. Selon certains, cela peut représenter jusqu’à 50 %. En
d’autres mots, le corps commence à ralentir : les muscles se
détendent, les fréquences cardiaque et respiratoire diminuent, les yeux se ferment. Bien que les chercheurs américains
n’aient pas tendance à inclure cette étape dans leur évaluation générale du sommeil, les Européens et plusieurs chercheurs canadiens y réfèrent depuis longtemps en parlant d’état
hypnagogique.
En ce qui me concerne, et c’est aussi le cas
de plusieurs des travailleurs de quarts que j’ai formés,
l’hypnagogique est essentiel pour comprendre la bonne
hygiène du sommeil. Plusieurs cliniciens du sommeil pensent
que l’acte de s’endormir est semblable à celui d’accéder à un
programme d’ordinateur; ainsi, le «look» de votre sommeil va
dépendre du programme auquel vous accédez. Il y a vraisemblablement assez d’articles démontrant les effets adverses
d’apporter au lit les éléments stressants en non résolus de
la journée. Ne pas s’occuper de ces stresseurs se traduit en
sommeil fragmenté (la structure naturelle du sommeil est
morcelée). Il y a aussi suffisamment de données pour démontrer que plus le degré de fragmentation du sommeil est élevé,
plus le degré de fatigue sera élevé pendant l’état de veille.
Par ailleurs, il y a des études qui suggèrent clairement que
l’apprentissage d’une bonne technique de relaxation – et s’en
servir comme rituel d’endormissement – augmente la qualité
du sommeil et freine la fragmentation.
Stade 1 du sommeil :
Le stade 1 du sommeil est la première d’une
séquence d’étapes. Chacune dure de 90 à 100 minutes.
Contrairement à nos cycles circadiens, le sommeil est un cycle
ultradien, ce qui signifie qu’il est d’une durée inférieure à
vingt-quatre heures. Le stade 1 présente un EEG particulier
et se caractérise par une diminution des fréquences cardiaque
et respiratoire ainsi que par des mouvements oculaires lents.
La durée de cette étape varie entre cinq et dix minutes et
représente environ 5 % de la durée totale du sommeil.
Stade 2 :
20
Nous faisons souvent référence au stade 2 du sommeil en parlant de sommeil «penseur». Si vous réveillez un
sujet au moment où il a atteint cette étape et lui demandez
ce qu’il ressentait avant d’entendre son nom, il répondra
invariablement qu’il ne dormait pas mais qu’il était en train de
penser à quelque chose. Pendant les premiers moments de
ce stade, il arrive que les individus entendent des voix, voient
des éclairs de couleur ou ont la sensation de tomber, un peu
comme dans un rêve. La dernière expérience est généralement accompagnée d’un mouvement réflexe (sursaut).
C’est une étape où le sommeil est léger et où il est
facile de réveiller le dormeur. Si vous avez déjà eu la sensation de ne pas avoir dormi de la nuit et n’avez fait que penser,
penser, penser, alors votre nuit de sommeil a été dominée
par la conscience d’avoir été au stade 2. Très souvent, les
personnes qui sont en service de garde ou celles qui dorment mais pourraient être appelées au travail à tout moment
(ambulanciers ou pompiers) présentent ce que l’on appelle un
sommeil «anticipatoire». Plusieurs parents qui attentent que
leur adolescent rentre à la maison le soir ou qui ont un bébé
dans la chambre voisine connaissent très bien cet état.
Lorsque je travaillais le quart de nuit, cette étape
du sommeil était ma némésis. Lorsque j’arrivais à la maison
au petit matin et que je sautais au lit, le sommeil était alors
profond et délicieux. Toutefois, vers 11 h 30, ma vessie faisait
sentir sa présence et je me levais pour ce que j’appelais
«l’appel de mi-journée de la nature». Je ne sais pas ce qui
exactement me réveillait mais lorsque je revenais au lit, je
commençais à bouger et à tourner, ce qui est si souvent associé au stade 2. Généralement, après une heure environ à
gigoter, je disais au diable avec tout cela et je me levais.
Stades 3 et 4 ou sommeil lent :
Selon plusieurs chercheurs, c’est pendant le sommeil
lent (caractérisé par des ondes lentes) que le corps se répare.
On fait souvent référence à ce stade en parlant de sommeil
delta car l’activité cérébrale se caractérise alors par des ondes
delta. C’est pendant le sommeil lent que plusieurs cycles
biochimiques sont initiés ou stabilisés. Je tiens à souligner
l’importance de ce stade de façon très simple. Un chercheur
britannique a jugé ce stade suffisamment important pour
dire que tout cycle de sommeil qui comprend les stades 3 et
4 peut être considéré comme sommeil fondamental. Il existe
des données étonnantes relativement à ce stade du sommeil
et toutes pointent vers une conclusion très claire : lorsque ce
stade est perturbé (fragmenté), l’animal humain en paie le
prix physiquement et ressent un degré de fatigue débilitant.
Sommeil rapide ou paradoxal
Plusieurs personnes font référence au sommeil
paradoxal en l’appelant le stade des rêves. Or, cela se révèle
être une fausse appellation car certaines études ont prouvé
que nous rêvons pendant toute la nuit; il semble toutefois
plus facile de se remémorer les rêves qui surviennent pendant
21
le sommeil paradoxal qui est accompagné de mouvements
oculaires rapides. Le sommeil paradoxal semble être très
important à notre bien-être psychologique. Ainsi, lorsque la
durée du sommeil paradoxal est suffisante pendant la nuit
de sommeil, la plupart des gens mentionnent se sentir revigorés au réveil. Cependant, lorsque le sommeil paradoxal est
fragmenté ou écourté, les gens mentionnent se sentir plus
irritables, de mauvaise humeur, et soupe au lait (est-ce que
cela vous rappelle quelque chose ? Pensez à la personnalité
du travailleur de quarts).
Avant de passer à la prochaine section, je veux me
devancer et dire que, de façon générale, les travailleurs de
quarts n’ont pas assez de sommeil lent et de sommeil paradoxal. Une partie de l’explication se trouve dans la relation
entre le sommeil et la température centrale. Lorsque nous
dormons le jour, nous sommes littéralement désynchronisés
par rapport à nos rythmes circadiens. Il en résulte un sommeil
plus court ou un sommeil très fragmenté. Laissez-moi, encore
une fois, décrire un cycle normal de sommeil.
Sommeil pendant la nuit
Comme je l’ai affirmé ci-dessus, le cycle du sommeil
humain est une interaction de sommeil où il y a présence
de mouvements oculaires rapides (sommeil paradoxal) et
sommeil sans mouvements oculaires rapides (sommeil lent).
Examinez, encore une fois, le schéma ci-dessous. Vous
remarquerez que la personne passe graduellement par les
stades du sommeil sans mouvements oculaires rapides
jusqu’à ce qu’elle atteigne le stade de sommeil lent (stade 4).
La première étape du stade 4 dure environ 30 minutes. Le
dormeur repasse ensuite par les stades 4, 3 et 2 du sommeil
sans mouvements oculaires rapides pour revenir au stade 1
du sommeil paradoxal.
Souvenez-vous que, lorsqu’une personne dort la nuit,
presque tout le sommeil caractérisé par des ondes deltas survient dans les premières heures de la période de sommeil. En
d’autres mots, le sommeil delta survient habituellement dans
22
les trois ou quatre premières heures de sommeil. Mais voici
le hic ! Pour parvenir au stade 4, vous devez passer par les
stades 1 et 2 et, si vous êtes dérangé, vous devez tout recommencer. Si vous êtes dérangé plusieurs fois pendant la nuit, il
devient alors problématique d’arriver au stade 4.
Le sommeil durant le jour
Très peu de travailleurs de quarts peuvent
s’enorgueillir de dormir aussi bien le jour que la nuit. La
qualité du sommeil n’est pas la même pour la plupart. La
fragmentation du sommeil est causée en grande partie par
l’élévation continue de la courbe de température centrale.
Très peu d’études dirigent notre attention à la topologie du
sommeil pendant le jour. Pour une raison quelconque, il est
présumé que la structure du sommeil pendant le jour est la
même que pendant la nuit. Toutefois, si vous faites référence
aux recherches de quelques chercheurs européens qui suggèrent que le sommeil delta (ondes lentes – stades 3 et 4) est
tributaire du fait que la personne a un cerveau chaud et une
température centrale à la baisse, nous pouvons alors présumer que le cycle du sommeil pendant le jour aurait un «look»
différent.
Si nous considérons le fait que la température
centrale continue sa montée le matin, le «look» différent
paraît alors raisonnable. Pensez aussi à ceci : la plupart des
travailleurs de quarts (pas tous) vous diront qu’ils ont de la
difficulté à dormir après 12 h (midi). Ils se lèvent pour aller
aux toilettes, reviennent au lit et commencent à bouger et
tourner pendant que toutes sortes d’idées leur trottent en
tête. Qu’est-ce qui se passe ? La température centrale a alors
atteint un sommet et il n’est pas étonnant de voir que les
personnes ont de la difficulté à dormir à ce moment. Quel est
le résultat final de cette combinaison : température centrale,
moment de la journée, et sommeil ? Si notre logique est
juste, un sommeil fragmenté est la seule réponse à cette
question. N’oubliez pas ce que nous avons déjà déterminé :
plus le degré de fragmentation du sommeil est élevé, plus le
degré de fatigue est élevé pendant l’état de veille.
La fragmentation du sommeil est aussi une conséquence du fait de vivre dans le monde des «normaux». En
guise de tentative pour empêcher les visiteurs de sonner à
ma porte, il m’a fallu mettre une affiche aux portes de devant
et de côté de ma maison et sur lesquelles on pouvait lire
qu’un travailleur de quarts était en train de dormir. Toutefois,
je ne pouvais pas arrêter l’inclination de mon voisin à tondre
23
son gazon pendant le jour. Voici la réalité : toutes ces choses
laissent le dormeur avec très peu, parfois pas du tout, de
sommeil lent (stade 4). Même si le sommeil a une durée
«normale», la personne sent généralement qu’elle n’a pas
récupéré et se sent épuisée physiquement.
Nous devons tenir compte d’un autre facteur.
Prenez un moment pour retourner au schéma sur les cycles
du sommeil. Vous observerez que le sommeil se divise en
deux stades précis. Le sommeil paradoxal et le sommeil lent
constituent une phase (aussi appelée sommeil fondamental)
et le sommeil paradoxal et le stade 2 forment l’autre phase
(aussi appelée sommeil optionnel). Si nous présumons que
l’architecture du sommeil pendant le jour est la même que
pendant la nuit (j’en doute) alors cela signifie que la deuxième
partie du sommeil pendant le jour serait dominée par le stade
2 et le sommeil paradoxal. Si nous tenons compte du fait que
la plupart des gens qui dorment le jour ont entre deux (2) et
trois (3) heures de moins de sommeil que ceux qui dorment la
nuit, ils perdraient ainsi la moitié de leur sommeil paradoxal.
Le résultat final est quelqu’un qui se sent faible, de mauvaise
humeur, irritable, enclin à se sentir déprimé et qui se sent
désynchronisé par rapport au monde. Est-ce que cela sonne
familier ?
Voici maintenant le temps de rassembler tous les
morceaux. Dans la prochaine section, je vais revenir sur certains points et je vais vous présenter quelques idées que vous
pourrez mettre en pratique. Traitez-vous comme si vous étiez
une expérience scientifique et découvrez ce qui vous convient.
Qu’importe la stratégie que vous choisissez, laissez assez de
temps pour qu’elle fasse ses preuves. L’utiliser pendant deux
jours ou trois ne donnera pas grand chose. Souvenez-vous
que vous êtes l’ossature du système de soins de santé et vous
méritez de bien vous traiter.
6
Désamorcer
le travail par
quarts
24
Nous avons parlé d’une grande quantité de choses
et il s’avère maintenant opportun de revenir sur certaines.
J’ai vous ai déjà suggéré que, en qualité de travailleur de
quarts, nous devons comprendre que nous sommes soumis
aux mêmes stresseurs que tout autre personne. La grande
différence est que le travailleur de quarts ressent une fatigue
chronique engendrée par un sommeil grandement fragmenté.
Veuillez examiner la liste ci-dessous de conseils pour contrer
le stress; en bout de ligne, vous êtes la personne qui décide
lesquels vous allez mettre en pratique.
Conseils pour contrer le stress
1. Ne pas remettre la relaxation à plus tard. Utiliser quotidiennement des techniques de relaxation que ce soit faire une
promenade avec votre chien, jouer à la balle, aller prendre un
café décaféiné avec un ami.
2. Bien organiser son temps et déléguer les tâches. Prévoir du
temps pour les urgences et pour vous.
3. Évacuer le stress en faisant de l’activité physique. L’exercice
ne tue pas, au contraire votre sommeil sera meilleur et le
sommeil est un des meilleurs remèdes sur terre.
4. Négocier lorsque que c’est possible, sinon accepter que
certaines choses ne puissent être changées. Mettre cela en
pratique au travail et à la maison mais s’assurer de mettre
en œuvre toutes les stratégies nécessaires pour vous aider à
gérer un style de vie très stressant.
5. Le sommeil est essentiel pour surmonter le stress.
S’assurer de dormir au moins six heures et demie ou sept
heures quotidiennement. Si cela est impossible, veuillez consulter votre médecin.
6. La fatigue peut passer inaperçue, particulièrement si vous
êtes sous pression. Porter attention et observer si la fatigue
affecte votre humeur.
7. Limiter sa consommation d’alcool, de nicotine et de café,
particulièrement dans les cinq (5) heures qui précèdent
l’heure d’aller au lit.
8. Prendre des repas réguliers. Se fixer un horaire de repas
qui est constant pour chaque journée de travail.
9. Dire non maintenant. Ne pas accepter de faire des travaux
additionnels non pertinents pendant les heures de la journée.
10. Ne pas ignorer la maladie ou la fatigue ou travailler
même si vous vous sentez malade ou fatigué. Aller chercher
de l’aide. Parler de vos problèmes avec des membres de la
famille, des professionnels ou des amis.
Le deuxième facteur important dont nous avons
parlé est le fait que, en raison des rythmes biologiques, le
travailleur de quarts fonctionne selon un horaire différent de
25
celui du reste du monde. Nous avons ensuite parlé du rôle
joué par ces variables dans le sommeil. Je veux maintenant
faire ressortir certaines choses que je considère cruciales pour
stabiliser votre sommeil et, ainsi, vous redonner un peu de
l’énergie que le travail par quarts vous a grugé.
Alimentation et le monde
du travailleur de quarts
La société est presque schizophrène par rapport à
ce que nous mangeons i.e. elle se promène d’un extrême à
l’autre (les gras sont bons pour vous – les gras vont vous tuer
– les glucides sont bons pour vous – les glucides entraînent la
prise de poids ou l’obésité et vont vous tuer ) Voici la réalité :
nous ne pouvons plus compter sur la société ou les organisations pour lesquelles nous travaillons pour nous aider. Pendant
des années, j’ai suggéré aux industries de la production et
des services d’examiner la possibilité d’offrir des solutions de
rechange en matière d’alimentation saine à leurs travailleurs
de quarts et de leur offrir une formation sur les éléments de
base de la bonne alimentation. Cette idée a été tuée par la
mentalité capitaliste des organisations. Laissez-moi donc vous
parlez de ce que j’ai appris au sujet de l’alimentation humaine.
Obésité et surpoids :
l’épidémie est réelle
Au cours des quatre dernières années, j’ai observé
une tendance qui me dérange. Le nombre de personnes ayant
un surplus de poids est supérieur à celui des personnes ayant
un poids-santé selon leur taille et leur type. Ce n’était pas le
cas il y a 15 ans, alors que j’enseignais à l’université. Une personne ayant un surplus de poids était l’exception plutôt que la
règle. Qu’est-ce qui se passe ?
Suis-je hystérique ? Peut-être me suis-je retrouvé à
croire tout ce que chaque publication semble dire, notamment
que les Nord-Américains deviennent de plus en plus gros.
Peut-être devrais-je écouter Paul Campos, auteur controversé
du livre : The Obesity Myth: Why America’s obsession
with weight is bad for your health. Dans ce livre, il s’en
prend à la sur-utilisation de l’indice de masse corporelle, basé
sur le ratio poids-taille, pour déterminer le poids-santé. Je
peux comprendre pourquoi il est si fâché, c’est qu’il y a très
peu de données et la fiabilité de cette mesure, comme indicateur de santé, n’a pas été établie.
26
Je ne suis pas un fanatique de l’alimentation santé
et je ne veux pas que vous pensiez que j’ai un corps svelte,
mince et ferme. Ce n’est pas le cas. J’ai dû lutter avec mon
poids toute ma vie.
Fin des années 70 et début des années 80 est la
période où j’ai été le plus mince. C’est alors que j’ai découvert
que c’était «cool» de faire du jogging. Tous les soirs, je chaussais mes Nike Waffles, j’enfilais mes shorts rouges en rayonne
et j’endommageais les articulations de mes genoux au rythme
de mes lourdes foulées sur l’asphalte de mon quartier. Les
genoux me faisaient mal, mais j’étais mince comme jamais
dans ma vie adulte et, d’ailleurs, c’était la chose «cool» du
moment. Les durs à cuire s’y adonnent encore et tant mieux
pour eux ! Je remercie le ciel de n’avoir jamais eu à me battre
avec mes fils pour les convaincre d’aller jouer dehors et je
suis aussi reconnaissant et content d’avoir pris conscience de
l’importance de l’environnement à la fin des années 80.
Ce sont mes allergies, quelque chose dont
j’attribuais le blâme au travail par quarts, qui m’ont démontré
l’importance de manger des aliments biologiques produits localement. Il y a quelques années, j’ai rencontré une personne
qui a changé ma vie de plusieurs façons. Grâce à ses suggestions, j’ai commencé à manger des aliments biologiques
produits localement et j’ai arrêté de manger des aliments contenant des colorants et des agents de conservation. J’ai arrêté
d’utiliser des produits contenant toute combinaison de dérivés
de pétrole, propulseur d’aérosol ou produits dont l’odeur est
forte. J’ai commencé à marcher pendant 40 minutes, cinq
fois par semaine. Les allergies et les éruptions cutanées qui
m’avaient fait souffrir pendant la majeure partie de ma vie,
ont disparu comme par magie. J’ai commencé à mieux dormir
et mon énergie pendant l’état de veille a augmenté. Plus
important encore, la fréquence et l’intensité de mes migraines
ont été réduites de moitié et c’est ainsi depuis plusieurs
années. Toutefois, ce n’était pas la première fois que je me
rendais compte du pouvoir d’une alimentation appropriée sur
la santé. Il y a trente ans, j’ai fait la même découverte et c’est
grâce au fait que je travaillais la nuit.
Tenir compte du
travail par quarts
La transition entre être un travailleur de quarts et
étudier les travailleurs de quarts s’est faite lentement. Au
cours des dix dernières années, j’ai effectué trois études
27
importantes mettant en jeu les travailleurs de quarts de trois
industries différentes. Dans chacune de ces études, il y avait
une série de questions au sujet de l’alimentation et de la santé. Dans les trois études, 76, 71 et 82 % respectivement des
répondants ont mentionné avoir senti leur santé se détériorer
significativement depuis qu’ils avaient commencé à travailler
par quarts. De façon similaire, 77, 69 et 73 % des répondants
ont mentionné avoir pris ou perdu une quantité importante de
poids et la majorité de ces pourcentages reflètent les personnes qui ont pris du poids. Il n’est pas étonnant d’observer
que 86, 77 et 72 % des sujets mentionnent que la qualité de
leurs habitudes alimentaires s’est détériorée significativement.
La statistique la plus intéressante à mes yeux est le nombre
de répondants (38, 31 et 27 %) ayant indiqué que leurs allergies se sont aggravées significativement depuis qu’ils ont
commencé à travailler par quarts.
Les données que je viens de présenter ne devraient
pas surprendre personne, particulièrement ceux et celles qui
travaillent par quarts. Je me souviens ce que c’était pour moi
de travailler par roulement. Lors du quart de nuit, vers quatre
heures du matin environ, j’avais des maux d’estomac. J’avais
la nausée, non pas au point de vomir, mais presque. La seule
façon d’arrêter cette sensation était de manger. Une fois
après avoir découvert ce truc, il ne m’a pas fallu longtemps
avant que je me prépare un buffet. Le quart de nuit devint
une période rallongée de grignotage excessif. S’il m’arrivait
de manquer de nourriture, il y avait toujours les machines
distributrices pour me fournir un vaste assortiment de chips et
de tablettes de chocolat.
Pendant mes jours de congé, et en raison de la
fatigue abrutissante, la seule chose que je voulais faire était
de m’asseoir quelque part, regarder la télé et grignoter. La
nourriture satisfaisait le besoin d’avoir quelque chose dans la
bouche plutôt qu’une faim véritable. Je savais qu’il fallait que
je me lève et fasse une activité quelconque mais la volonté
n’y était pas. Lorsque, effectivement, je me levais et que je
sortais, c’était généralement pour aller à l’épicerie me chercher d’autres choses à grignoter. Manger sainement ne faisait
pas partie de mon horizon.
Dans ma tête, le travail par quarts était à blâmer.
Mon humeur changeante, un sommeil non réparateur et la fatigue chronique étaient devenus des constantes dans ma vie.
J’acceptais cela tout simplement en me disant qu’il s’agissait
de sous-produits associés à ce genre de travail. Un soir, alors
28
que je travaillais dans le laboratoire du sommeil, j’ai lu un article rédigé par Charles Ehret. J’ai appris, peu de temps après,
qu’il était chercheur scientifique aux laboratoires Argonne en
Illinois et qu’il s’intéressait principalement à la biologie de
l’adaptation. Une partie de son travail consistait à faire des
recommandations aux travailleurs de quarts de l’industrie
électronucléaire après le désastre évité à l’installation de
Three Mile Island. Dans une série d’articles, il compare
l’expérience du travail par quarts à celle des voyageurs qui
traversent plusieurs fuseaux horaires. Dans tout ce que j’avais
lu jusqu’à présent, il était le premier à parler de décalage par
rapport aux quarts et de le comparer au décalage horaire des
voyageurs.
La partie la plus excitante de son travail est lorsqu’il
affirme que la combinaison d’une exposition à la lumière et
d’une alimentation saine pourrait probablement être utilisée
pour aider les travailleurs à s’adapter aux quarts de nuit tout
comme cette combinaison aide les gens à s’adapter rapidement à un nouveau fuseau horaire. Avant de décrire cette
théorie alimentaire, j’aimerais que vous gardiez en mémoire
que, selon la plupart des gens, il faut compter au moins un
mois (c’est aussi mon expérience) pour vraiment observer
une différence. Toutefois, qu’importe le résultat, vous devez
vous traiter comme si vous étiez une expérience scientifique.
Découvrez ce qui donne des résultats pour vous. Rédigez un
journal personnel relatif à votre alimentation et à votre sommeil. Afin de vous aider, j’en ai élaboré un et vous le trouverez
à l’Annexe 2. Il est suffisamment explicite. Si votre médecin
vous a demandé de suivre un régime alimentaire particulier,
n’y changez rien.
Théories alimentaires de Ehret
Ehret base son concept sur plusieurs hypothèses.
Premièrement, les protéines se métabolisent lentement
(fournissent ainsi de l’énergie plus tard). Deuxièmement, les
protéines ont tendance à fragmenter le sommeil et, finalement, les glucides stabilisent le sommeil. La plupart de ses
hypothèses trouvent appui, de façon générale, dans la littérature sur le sommeil mais souvenez-vous qu’il combine la diète
avec l’utilisation de la lumière (photothérapie). J’en parlerai
plus en détails plus loin dans ce chapitre.
29
Ehret répond à trois questions : 1) Quels sont les
besoins nutritionnels à la suite d’une période de sommeil ?
2) Quels sont les besoins vers le milieu de la période de
veille? et 3) Quels aliments favorisent un meilleur sommeil ?
Ce système exige d’oublier les appellations traditionnelles des
repas. Oubliez le petit déjeuner, le dîner ou lunch et le souper.
J’ai toujours trouvé difficile de parler de petit déjeuner à
16 h ou de sortir du lit alors qu’un dîner au rosbif est sur la
table. Pour que ce système réussisse, vous devez apprendre
à diviser la période où vous êtes éveillé (période de veille) en
tiers. Ainsi, qu’importe l’heure où vous vous levez, vous êtes
dans le premier tiers de votre période de veille. Essayez de
déterminer l’heure approximative où vous irez au lit. Votre
période de veille se situe entre l’heure où vous vous levez et
l’heure où vous vous couchez. Divisez maintenant cette période de temps en tiers.
Le premier tiers. Selon les travaux d’Ehret et ceux
de plusieurs nutritionnistes, pendant le premier tiers de la
période de veille nous avons besoin à la fois de protéines et de glucides. Des études récentes ont démontré que
tous les glucides ne sont pas métabolisés de la même façon.
Des recherches préliminaires suggèrent qu’il est plus avantageux de consommer des glucides à faible indice glycémique
(absorbés lentement). Cela me semble une bonne suggestion
considérant l’abondance des recherches démontrant que, en
tant que société, nous avons développé une dépendance aux
glucides à index glycémique élevé (absorbés rapidement).
Le deuxième repas de la période de veille
devrait être riche en protéines et faible en glucides. Il
est important de remarquer que cela ne signifie pas qu’il faille
vous asseoir et prendre un gros repas, cela signifie seulement
que le repas renferme plus de protéines que de glucides. J’ai
toujours utilisé un ratio de 70/30.
Le dernier repas de la période de veille est
littéralement le repas qui vous accompagnera au lit. Ce repas
doit être riche en glucides (indice glycémique faible)
et faible en protéines. De nombreuses études démontrent
que les glucides augmentent la durée du sommeil lent (ondes
lentes) et si nous croyons l’hypothèse de James Horne selon
laquelle le sommeil lent (fondamental) est celui qui permet au
corps de se restaurer, alors il semble pertinent de s’assurer
d’en avoir le plus possible. Le tableau ci-dessous vous permettra de comprendre plus facilement le facteur temps.
30
Temps
Composition du
repas
Premier tiers de la
période de veille
(1er repas)
Équilibre entre
protéines et glucides
Deuxième tiers de la période
de veille (2e repas)
Riche en protéines
Faible en glucides
Dernier tiers de la période
de veille (3e repas)
Riche en glucides
Faible en protéine
De toute évidence, ce scénario convient mieux à la
personne qui prend trois repas par jour. Or, les personnes qui
grignotent peuvent aussi bénéficier du système. J’ai récemment commencé à prendre des repas plus légers et de façon
plus fréquente pendant ma période de veille. Tout ce dont je
dois me souvenir c’est où j’en suis dans ma période de veille
et manger en conséquence. Si ce petit manuel rejoint autant
de travailleurs de quarts que je le souhaite, nous pourrons
probablement recueillir assez de données pour affirmer que
ce programme est avantageux pour la plupart des gens.
Caféine
Je ne suis pas ici pour vous dire d’arrêter de consommer des boissons contenant de la caféine. J’aimerais toutefois
vous donner de simples informations sur la caféine. Dans le
contexte culturel nord-américain, la caféine est quelque chose
que nous utilisons pour nous donner un nouvel élan (nous
stimuler). Combien de fois avez-vous entendu une personne
dire qu’elle ne peut rien faire le matin avant d’avoir pris son
café ou son thé ? Effectivement, la caféine vous donne un
relent d’énergie mais jusqu’à un certain point.
La caféine est partout autour de nous. Il ne fait
aucun doute qu’il s’agit de la substance psychoactive préférée. Après le pétrole, c’est la denrée la plus importante du
commerce mondial. Les boissons gazeuses sont maintenant
au premier rang des boissons les plus populaires en Amérique
du Nord et la plupart contiennent de la caféine. Les groupes
faisant le commerce des boissons évaluent à environ 56 gallons la consommation annuelle (par personne) de boissons
gazeuses. Généralement, on pense que la caféine se retrouve
dans le café, le thé, les boissons gazeuses et le chocolat.
Or, elle se retrouve aussi dans plusieurs ordonnances, les
31
médicaments antidouleur sans ordonnance, les médicaments
pour le rhume et les pilules pour maigrir. Tout comme le sucre,
la caféine vous donne une poussée d’énergie initiale. C’est un
dérivé de la xanthine qui stimule chimiquement le système
nerveux central, le cœur, les muscles volontaires et la sécrétion
d’acide gastrique. La caféine est absorbée rapidement et les
concentrations plasmiques atteignent un sommet environ 90
minutes après la consommation. La caféine stimule la sécrétion d’adrénaline et lorsque cette sécrétion est terminée, la
personne ressent une chute d’énergie importante. C’est alors
que nous commençons à regarder autour pour une autre tasse
de Java.
Certaines personnes sont moins affectées par la
caféine. Toutefois, il est important que le travailleur de quarts
apprenne à bien utiliser la caféine et évite d’en abuser. En
général, il faut huit à dix heures pour éliminer 85 milligrammes
de caféine de son corps. Or, il suffit de 230 milligrammes de
caféine dans votre corps pour que la qualité de votre sommeil
en souffre significativement.
Je suis sûre que certains parmi vous êtes assis en
train de vous dire : «Le café ne me dérange pas, je peux en
boire juste avant d’aller me coucher et je n’ai aucune difficulté
à m’endormir». J’ai entendu cela maintes fois. Or, la plupart
des gens ne se rendent pas compte que ces commentaires
visent l’endormissement et non pas le maintien du sommeil. En
deux mots, la caféine entraîne un sommeil plus fragmenté. Et,
comme nous l’avons déjà souligné : plus le degré de fragmentation du sommeil est élevé, plus le degré de fatigue est élevé
pendant la période de veille. La raison est relativement simple
à comprendre. La recherche a démontré l’effet inhibiteur de
la caféine sur l’adénosine, une substance neurochimique qui
entraîne la venue du sommeil. Lorsque nous consommons de
la caféine, nous ne pouvons pas sentir notre fatigue et nous
avons de la difficulté à nous endormir. Boire de la caféine six à
huit heures avant d’aller au lit augmente nos chances de bouger et tourner pendant la nuit, diminue la durée du sommeil lent
(ondes lentes), augmente le temps nécessaire pour tomber
endormi, diminue la durée totale du sommeil et augmente le
nombre de réveils pendant la nuit.
32
Substance
Nombre par
jour
Café instantané ou
au percolateur (en
moyenne 100mg
pour 8 oz ou
225ml)
Thé glacé ou régulier (en moyenne
60mg pour 8 oz ou
225ml)
Boissons gazeuses
avec caféine (en
moyenne 55mg
pour 6 oz ou
180ml, petite cannette de Coke)
Tablettes de chocolat (en moyenne
20mg par tablette,
format normal)
Chocolat chaud
ou lait au chocolat (en moyenne
6mg pour 8 oz ou
225ml)
Consommation totale
100x_____=_______
60x_____=_______
55x_____=________
20x_____=________
6x_____=________
Total pour une journée normale =
Alors, combien consommez-vous de caféine en une
journée ? Soyez honnête…!
Les gras et les fibres
Avec la fascination actuelle pour les régimes faibles
en glucides, il est étonnant de voir que certaines personnes
accordent encore de l’importance au rôle des fibres et des gras
dans leur alimentation. Dans ce guide, j’ai essayé de me tenir
éloigné de tout ce qui semble une folie passagère. On sait peu
de choses au sujet de l’effet direct des gras et des fibres sur la
qualité du sommeil. Presque tous les experts dans le domaine
du sommeil et de la santé soulignent l’importance de diminuer
le taux de cholestérol sanguin. Or, les études sont peu abondantes et celles qui existent sont source de confusion.
Des données préliminaires suggèrent qu’un niveau
élevé de cholestérol et de sucre dans le sang diminue la qualité
de la période de sommeil. Cela s’applique aussi à la consommation d’alcool avant d’aller au lit. L’alcool a le même effet que
la caféine dans le sens qu’il entraîne aussi un sommeil plus
33
fragmenté. Je crois que nous avons passé suffisamment de
temps à parler d’alimentation. J’aimerais maintenant parler de
l’environnement de la chambre à coucher.
La chambre «chronohygiénique»
Lorsque je parle de «chronohygiène» (chrono =
temps + hygiène = santé) je me réfère à ce qu’une personne
peut faire pour que ses cycles de sommeil demeurent stables.
Plusieurs choses peuvent être faites.
Le rituel d’endormissement
Revenez au stade hypnagogique qui précède le sommeil et souvenez-vous qu’à ce moment, j’ai mentionné que plus
une personne est ritualisée mieux elle dort. À titre d’exemple,
j’ai parlé des rituels de la mise au lit des enfants et combien
ils réagissaient bien à cela. Voilà donc une façon de programmer votre cerveau et votre corps au sommeil. Un bain chaud
favorise le sommeil pour un très grand nombre de personnes.
Bien que ce soit encore spéculatif, un chercheur suggère que
le réchauffement passif du système suivi d’un refroidissement en serait la raison. Est-ce que cela sonne familier ? Je
ne soulignerai jamais assez l’importance de ces rituels avant la
mise au lit. Faites toujours les mêmes choses avant d’aller au
lit, qu’importe l’heure où vous vous couchez. Qu’importe ce que
vous faites, il s’agit d’un rituel et c’est la clé.
J’ai observé ma partenaire pendant des années
et, de façon constante, elle a tiré avantage d’un rituel
d’endormissement. Elle commence par une petite collation
de glucides à faible indice glycémique, généralement un fruit.
Environ 20 minutes plus tard j’entends l’eau du bain. Très peu
de temps après son bain j’entends la porte de la chambre se
refermer et elle est endormie. Qu’importe l’heure où nous revenons à la maison après une sortie, le rituel demeure le même.
Je suggère de continuer le rituel au lit. Prenez le
temps d’apprendre une technique de relaxation et utilisez-la
pour vous endormir. Vous pouvez trouvez, en anglais sur mon
site Web, la variation St. Jean de la technique de Jacobson.
Vous n’avez rien à perde!
34
Le lit
Quelques règles s’imposent lorsque vous choisissez la surface sur laquelle vous allez dormir. Premièrement,
les études ont démontré que les matelas excessivement durs
perturbent le sommeil de la plupart des gens. Deuxièmement,
et probablement le plus important, votre lit devrait être ce que
vous avez de meilleur en fait de mobilier dans votre maison.
Je suis toujours étonné d’observer que les gens n’hésitent pas
à payer 2 000 $ pour un ensemble de salon, ils le recouvrent
d’un plastique ou d’une jetée et ne laissent personne s’asseoir
dessus. Or, ils s’achètent un matelas qu’ils paient 150 $, dorment dessus pendant 15 ans puis, ils n’arrivent pas à comprendre pourquoi ils se sentent si fatigués au réveil.
Il n’y a pas de règle simple pour déterminer le type
particulier de lit pouvant convenir à tout le monde. Vous devez
faire des essais. Il y a plusieurs magasins qui vendent des lits
qui, une fois le contrat d’achat signé, vous laisseront essayé un
matelas pendant un mois avant de choisir un modèle particulier. Toutefois, pour la plupart des couples, le même matelas
ne convient pas nécessairement à chacun. Je connais de
plus en plus de couples qui choisissent des matelas munis de
mécanismes pour régler la fermeté de chaque moitié et ainsi
ils peuvent avoir le degré de fermeté qui convient à chacun.
Je ne peux pas dire que je suis un grand amateur des matelas contenant de l’air ou de l’eau parce qu’il n’existe pas de
données scientifiques claires prouvant qu’ils sont meilleurs que
nos traditionnels matelas à ressorts de bonne qualité. Je connais d’autres couples qui ont simplement acheté deux matelas
séparés et les ont placés côte à côte.
Je me suis fait poser des questions très souvent au
sujet des nouvelles tendances en matière de matelas. Les
nouveaux matelas de mousse (qui, selon le fabricant, viennent
de la NASA) semble, en effet, de plus en plus populaires mais,
encore une fois, la recherche est plutôt rudimentaire dans ce
domaine et il est fort probable que vous devrez faire votre
propre essai avec celui-là aussi.
Le bruit
Nous ne devenons jamais totalement inconscient de
l’environnement externe. En raison de cette «troisième oreille»
bien ancrée, le bruit devient l’ennemi du sommeil du travailleur
de quarts. Il est possible d’empêcher les bruits inopportuns
de parvenir à votre conscience pendant votre sommeil. Dans
35
ma chambre, j’ai utilisé, avec succès, un appareil générant un
bruit blanc. Ce petit appareil électrique est vendu dans tous les
magasins d’électronique. Si leur stock est épuisé, ils peuvent
en commander un ou vous pouvez m’envoyer un courriel et je
vous donnerai une adresse où vous pourrez vous en procurer
un. L’appareil émet ce qui s’appelle un «bruit blanc» qui est un
son continu à large bande et qui masque les autres sons. Si
vous êtes éveillé et qu’un bruit survient pendant que l’appareil
générant le bruit blanc est en marche, vous allez entendre le
bruit; par contre, si vous dormez, vous n’entendrez pas le bruit.
J’ai parlé à des travailleurs de quarts qui ont recouvert les murs et le plancher de leur chambre de carreaux
acoustiques. J’ai toujours voulu essayer cela mais, comme tout
travailleur de quarts qui se respecte, je n’ai jamais eu le temps
de le faire. J’ai suspendu des rideaux aux murs et recouvert
l’arrière de la porte de la chambre de boîtes à œufs plates afin
de diminuer le bruit. J’ai toujours été étonné de constater que
c’était rarement mes enfants qui me réveillaient mais plutôt les
cris de ma femme leur disant de se taire !
La température de la chambre
La recherche dans ce domaine est aussi quelque peu
rudimentaire mais les experts semblent s’entendre pour dire
qu’une personne dort mieux dans une chambre fraîche. Frais
signifie que la température varie entre 65° et 68°F ou 17° et
19°C. Selon les études, si la température de la chambre est
supérieure à 24°C ou 80°F ou inférieure à 16°C ou 64°F, le
sommeil de la plupart des gens aura tendance à être perturbé.
Mais, encore une fois, c’est une question de préférence personnelle. J’ai fait ma propre expérience et essayé différentes températures et je dois dire que je dors mieux dans une chambre
fraîche, tellement que, même en hiver, j’ai tendance à laisser la
fenêtre ouverte afin de refroidir la chambre.
La lumière
Le dernier élément dont je désire parler est le rôle
de la lumière dans l’adaptation du travailleur de quarts. La
lumière est une des plus puissantes minuteries de la physiologie humaine. Lorsque nous ne recevons pas assez de lumière,
nos rythmes biologiques sont déphasés. Passer trop de temps
dans l’obscurité et nous commençons à nous sentir déprimés.
Les travailleurs connaissent cela, particulièrement en hiver
lorsqu’ils doivent se lever à la noirceur, aller travailler à la noirceur, revenir à la maison à la noirceur, dormir dans le noir et
36
se lever pour recommencer le même processus jour après jour.
Pas étonnant qu’ils deviennent déprimés. La mélatonine est
la coupable. La mélatonine est secrétée par la glande pinéale
lorsque le corps est dans le noir. C’est une des raisons pour
laquelle presque tous les chercheurs dans le domaine du travail
par quarts recommandent de dormir dans la chambre la plus
noire possible.
Or, la recherche d’obscurité devrait se faire avant
d’arriver à la maison. Pendant l’été, portez des verres fumés
afin de diminuer l’exposition des yeux à la lumière. Une fois
à la maison, n’allumez pas les lumières. Si votre partenaire
quitte la maison avant votre arrivée, demandez-lui de fermer
tous les rideaux ou stores avant son départ. Si vous vivez seul,
préparez votre environnement avant de quitter la maison pour
vous rendre à votre quart de travail. Finalement, si vous devez
vous rendre dans d’autres chambres de la maison, autres
que votre chambre à coucher, assurez-vous d’avoir masqué la
lumière dans ces chambres aussi.
Idéalement, vous devriez dormir dans une chambre
sans fenêtres. J’ai parlé à des travailleurs de quarts qui ont
aménagé une chambre et salle de bains au sous-sol et ils sont
enthousiastes lorsqu’ils parlent du résultat. Si vous n’avez pas
la chance d’en faire autant, éliminer toute lumière du jour en
installant des stores foncés masquant la lumière ou des rideaux
épais et doublés. Dans ma jeunesse, je recouvrais les fenêtres
de papier aluminium ! Ce n’est pas ce qu’il y a de mieux en
matière de décoration intérieure mais c’est remarquablement
efficace. J’ai parlé à des travailleurs de quarts qui ont utilisé
des panneaux de styromousse pour bloquer le soleil. Soyez
créatif et arrangez-vous pour dormir dans la chambre la plus
noire possible.
Maintenant que je vous ai convaincu de dormir dans
la chambre la plus noire possible, voici un autre petit truc.
Réveillez-vous à la lumière. Pourquoi ? La lumière inhibe la
production de mélatonine et ainsi, vous vous réveillez plus
revigoré. Comment pouvez-vous faire cela ? Si vous voulez
être vraiment sophistiqué, vous pouvez installer une minuterie sur une tringle motorisée pour que les rideaux s’ouvrent
automatiquement avant votre réveil. Ne vous en faites pas, ce
n’était-là qu’une des mes fantaisies pour la chambre idéale du
travailleur de quarts ! La façon la plus simple de se réveiller à
la lumière est d’installer une minuterie à la lampe de chevet.
Régler la minuterie pour que la lampe s’allume une demi-heure
avant votre réveil et voilà, le tour est joué. Si vous voulez vrai-
37
ment être sophistiqué, achetez un rhéostat qui fera entrer la
lumière graduellement. Vous n’avez pas besoin d’acheter un
feu de piste à halogène pour appliquer cette technique, une
ampoule 40 W fera l’affaire. Essayez les ampoules donnant un
éclairage en spectre continu pour votre lampe de chevet. Ces
ampoules sont ce qui se rapproche le plus de la lumière du
soleil et elles sont vraiment extraordinaires. Il y a trois ans, ma
partenaire et moi avons aménagé dans une nouvelle maison
et nous avons mis ce genre d’ampoules dans plusieurs de nos
luminaires. Nous n’avons pas eu à en remplacer une seule
jusqu’à maintenant. Donc, si le coût d’achat vous surprend,
souvenez-vous de leur longévité.
Une dernière stratégie :
Ce document est une version abrégée d’un ouvrage
plus long que j’ai rédigé. Vous trouverez, sur mon site Web
(www.jonshearer.com) le matériel complémentaire cité dans
cet ouvrage (en anglais seulement). Il s’agit des différents tableaux d’aliments (Food tables), de l’échelle relative aux oiseaux
de nuits et aux lève-tôt (Owls and Larks Scale ), la variation St-Jean de la technique de Jacobson (une technique de
relaxation), d’illustrations de tracés polysomnographiques des
stades du sommeil, et autres documents pouvant intéresser le
travailleur de quarts. Veuillez visiter le site et téléchargez tout
ce dont vous avez besoin. N’oubliez surtout pas de vous traitez
comme si vous étiez une expérience scientifique et découvrez
ce qui vous convient le mieux. Par la suite, j’aimerais bien
recevoir vos commentaires afin que je puisse partager avec
d’autres personnes ce que vous m’aurez appris.
Annexe 1
Questionnaire pour toute la famille
Il ne fait aucun doute que les familles vivent de plus
en plus de stress. Alors, pourquoi ne pas prendre un moment
pour répondre aux questions suivantes. Je trouve qu’il est très
utile de mettre en lumière les aspects qui révèlent nos forces
ainsi que ceux qui révèlent nos faiblesses.
VOICI CE QUE VOUS DEVEZ FAIRE :
Dans l’espace à gauche de chaque énoncé, et en vous
basant sur l’échelle qui suit, indiquer dans quelle mesure :
Vous êtes en ACCORD ou en DÉSACCORD avec
chaque énoncé relativement à votre famille
38
Fortement
EN
DÉSACCORD
1
2
3
4
5
6
7
8
Fortement
EN
ACCORD
9
10
Inscrire un CHIFFRE dans l’espace à gauche de chaque
énoncé. Assurez-vous d’inscrire les plus BAS chiffres pour les
énoncés qui ne décrivent pas bien votre famille et les chiffres
plus HAUT pour les énoncés qui décrivent bien votre famille.
LE QUESTIONNAIRE
_____ 1. Il y a pas mal de choses dont nous ne parlons pas
dans ma famille.
_____ 2. Ma famille prend beaucoup de temps à s’adapter
lorsque des problèmes ou de grands changements surviennent.
_____ 3. Dans ma famille, il y a parfois des disputes sans
raison valable.
_____ 4. Lorsqu’une personne de ma famille se fâche, cela
semble durer longtemps.
_____ 5. Il est parfois difficile de régler les conflits de famille parce que personne ne veut faire de compromis.
_____ 6. Ma famille irait mieux si on faisait une consommation
plus sage d’alcool.
_____ 7. Lorsqu’il s’agit de loisirs en famille, il est difficile de
trouver quelque chose quI plaît à tout le monde.
_____ 8. Les personnes de ma famille peuvent se mettre en
colère très facilement.
_____ 9. Parfois, dans ma famille, les personnes acceptent de
faire quelque chose puis, après, elles agissent comme si elles
ne voulaient pas vraiment le faire.
_____ 10. Lorsqu’il y a des disputes dans la famille, quelqu’un
essaie à tout prix de gagner.
_____ 11. Beaucoup de temps est nécessaire avant que les
personnes de ma famille arrivent à passer par-dessus les chicanes et les disputes.
39
_____ 12. Très souvent, dans ma famille, l’enfant (les enfants)
semble(nt) avoir plus d’influence sur ce qui se passe que leurs
parents.
_____ 13. Mon (mes) enfant(s) ne me démontre(nt) pas le
respect approprié et c’est la même chose à l’égard de mon
conjoint.
_____ 14. Dans ma famille, il y a beaucoup de règles strictes
par rapport à la façon de faire les choses.
_____ 15. Mon (mes) enfant(s) abuse(nt) souvent lorsqu’on
leur donne un peu plus de corde (être plus permissifs).
_____ 16. À moins de leur dire souvent, les membres de ma
famille ne semblent pas capables de faire leur part des tâches
ménagères.
_____ 17. Nous ne démontrons pas ouvertement notre affection les uns envers les autres très souvent dans ma famille.
_____ 18. Dans le temps de le dire, une petite dispute peut
s’enflammer hors de toute proportion dans ma famille.
_____ 19. Parfois, dans ma famille, le simple fait de parler d’un
problème semble l’envenimer.
_____ 20. Parfois les membres de ma famille écoutent, mais
n’entendent pas vraiment, ce qu’un autre membre essaie de
dire.
_____ 21. Si on mettait un peu plus d’effort pour se comprendre, on serait plus heureux dans ma famille.
_____ 22. Il est parfois difficile de savoir ce que les autres
membres pensent ou ressentent par rapport à des problèmes
familiaux importants.
_____ 23. Parfois, lorsque nous prenons une décision en
famille, le résultat final est une décision que personne n’appuie
particulièrement.
_____ 24. Les personnes de ma famille deviennent à bout de
nerfs sans raison valable.
__________ TOTAL
40
Faites le total des chiffres que vous avez inscrits à
gauche de chaque énoncé. Utilisez le THERMOMÈTRE DE
STRESS FAMILIAL pour interpréter votre total.
THERMOMÈTRE DE STRESS FAMILIAL
LA ZONE FROIDE (24 à 72)
Si votre famille se retrouve dans la zone «froide», cela
signifie que votre famille démontre moins de signaux de stress
que la plupart des familles. Le truc maintenant c’est de mettre
vos forces à profit (soit les énoncés où votre score est de 1
à 3). Si vous avez indiqué 5 ou plus à gauche d’un énoncé,
essayer de trouver une chose ou deux que vous pourriez faire
pour améliorer la situation et diminué le score.
LA ZONE TIÈDE (73 à 108)
Si votre famille se retrouve dans la zone «tiède», cela
signifie que le stress à la maison est le même que dans toute
famille canadienne moyenne. Un certain stress est inévitable
et il ne faut pas vous faire du souci outre mesure. À la place,
mettez vos forces à profit (soit les énoncés où vous avez
indiqué 1 à 3). Choisissez aussi un énoncé à gauche duquel
vous avez indiqué 5 ou plus, et essayer de trouver une chose
ou deux que vous pourriez faire pour améliorer la situation et
diminuer le score.
LA ZONE CHAUDE (109 à 240)
Si votre famille se retrouve dans la zone «chaude»,
cela signifie qu’elle démontre plus de signaux de stress que la
famille canadienne moyenne. Si votre total est «chaud» maintenant – mais serait habituellement moins élevé – concentrez
vos efforts pour revenir à des périodes plus «fraîches» dès que
possible. Mettez les forces de votre famille à profit et déterminez ce qu’il est possible de faire pour diminuer un ou deux des
scores les plus élevés.
41
Journal personnel (sommeil)
Date du début :____________
Complétez cette partie à la fin de votre période de veille
Je me
suis
couché
à:
Jour 1
Quart:
______
Jour 2
Quart:
______
Jour 3
Quart:
______
Jour 4
Quart:
______
Jour 5
Quart:
______
Jour 6
Quart:
______
Jour 7
Quart:
______
42
____h
____h
____h
____h
____h
____h
____h
Je me
suis levé
à:
_____h
_____h
_____h
_____h
_____h
_____h
_____h
Temps
pour
tomber
endormi :
___min.
___min.
___min.
___min.
___min.
___min.
___min.
Je me
suis levé
pendant
la nuit :
À mon
réveil,
je me
sentais :
____fois
_ Revigoré
_ Plutôt
revigoré
_ Fatigué
____fois
_ Revigoré
_ Plutôt
revigoré
_ Fatigué
____fois
_ Revigoré
_ Plutôt
revigoré
_ Fatigué
____fois
_ Revigoré
_ Plutôt
revigoré
_ Fatigué
____fois
_ Revigoré
_ Plutôt
revigoré
_ Fatigué
____fois
_ Revigoré
_ Plutôt
revigoré
_ Fatigué
____fois
_ Revigoré
_ Plutôt
revigoré
_ Fatigué
Nombre
d’heures
que j’ai
dormi :
Mon
sommeil
a été
dérangé
par :
______
______
____h
______
______
______
____h
______
______
______
____h
______
______
______
____h
______
______
______
____h
______
______
______
____h
______
______
______
____h
______
Annexe 2
Journal personnel (sommeil)
Date du début : _________
Complétez cette partie à la fin de votre période de veille
Jour 1
Quart:
_____
Jour 2
Quart:
_____
Jour 3
Quart:
_____
Jour 4
Quart:
_____
Jour 5
Quart:
_____
Jour 6
Quart:
_____
Jour 7
Quart:
_____
J’ai consommé des
boissons
contenant de la
caféine
J’ai fait au
moins 20
minutes
d’exercice
_ 1er tiers
_ 2e tiers
_ 2-3
heures
avant le
coucher
_ S/O
_ 1er tiers
_ 2e tiers
_ 2-3
heures
avant le
coucher
_ S/O
_ 1er tiers
_ 2e tiers
_ 2-3
heures
avant le
coucher
_ S/O
_ 1er tiers
_ 2e tiers
_ 2-3
heures
avant le
coucher
_ S/O
_ 1er tiers
_ 2e tiers
_ 2-3
heures
avant le
coucher
_ S/O
_ 1er tiers
_ 2e tiers
_ 2-3
heures
avant le
coucher
_ S/O
_ 1er tiers
_ 2e tiers
_ 2-3
heures
avant le
coucher
_ S/O
_ 1er tiers
_ 2e tiers
_ 2-3
heures
avant le
coucher
_ S/O
_ 1er tiers
_ 2e tiers
_ 2-3
heures
avant le
coucher
_ S/O
_ 1er tiers
_ 2e tiers
_ 2-3
heures
avant le
coucher
_ S/O
_ 1er tiers
_ 2e tiers
_ 2-3
heures
avant le
coucher
_ S/O
_ 1er tiers
_ 2e tiers
_ 2-3
heures
avant le
coucher
_ S/O
_ 1er tiers
_ 2e tiers
_ 2-3
heures
avant le
coucher
_ S/O
_ 1er tiers
_ 2e tiers
_ 2-3
heures
avant le
coucher
_ S/O
J’ai suivi
le régime
alimentaire
Ehret
J’ai utilisé
ou je vais
utiliser une
techn. de
relaxation
Oui _____
Oui _____
Non _____
Non _____
Oui _____
Oui _____
Non _____
Non _____
Oui _____
Oui _____
Non _____
Non _____
Oui _____
Oui _____
Non _____
Non _____
Oui _____
Oui _____
Non _____
Non _____
Oui _____
Oui _____
Non _____
Non _____
Oui _____
Oui _____
Non _____
Non _____
Ce que j’ai fait une
(1) heure avant
d’aller au lit.
_________________
_________________
_________________
_________________
_________________
_________________
_________________
_________________
_________________
_________________
_________________
_________________
_________________
_________________
_________________
_________________
_________________
_________________
_________________
_________________
_________________
Notes personnelles :__________________________________
___________________________________________________
___________________________________________________
43
RÉFÉRENCES
Certains des livres cités ci-dessous sont aussi disponibles en français.
Il s’agit de :
Carse, J.P. (1986), Jeux finis, jeux infinis. Paris : éditions du Seuil.
Hauri P. et Linde S. (1996) Plus jamais de nuits blanches. New
York: John Wiley & Sons.
Lambert-Lagacé, L. (1988) Le défi alimentaire de la femme. Montréal : Les éditions de l’Homme.
Åkerstedt, T., (1991) Shiftwork and sleep disturbances. In Peter, J.H.,
&. al., (eds.) Sleep and Health Risk. Berlin: Springer-Verlag.
Adami GE. Meneghelli A. Scopinaro N. (1997) Night eating syndrome in
individuals with Mediterranean eating-style. Eating & Weight Disorders: EWD. 2(4):203-6, Dec.
American Medical Association, (1984) Better Sleep. New York: Random House.
Anch, A.M., Browman, C.P., Mitler, M.M., and Walsh, J.K., (1988)
Sleep: A Scientific Perspective. Englewood Cliffs: Prentice Hall.
Arnulf I. Quintin P. Alvarez JC. Vigil L. Touitou Y. Lebre AS. Bellenger A.
Varoquaux O. Derenne JP. Allilaire JF. Benkelfat C. Leboyer M. (2002)
Mid-morning tryptophan depletion delays REM sleep onset in healthy
subjects. Neuropsychopharmacology. 27(5):843-51, Nov.
Baldwin, D.C. Jr. Daugherty, S.R. Tsai, R. Scotti, M.J Jr. (2003) A
national survey of residents’ self-reported work hours: thinking beyond
specialty. Academic Medicine. 78(11):1154-63, Nov.
Bates JE. Viken RJ. Alexander DB. Beyers J. Stockton L. (2002) Sleep
and adjustment in preschool children: sleep diary reports by mothers relate to behavior reports by teachers. Child Development.
73(1):62-74, Jan-Feb.
Bader GG. Engdal S. (2000) The influence of bed firmness on sleep
quality. Applied Ergonomics. 31(5):487-97, Oct.
Ballard K. (1997) Pressure-relief mattresses and patient comfort.
Professional Nurse. 13(1):27-32, Oct
Berger M. van Calker D. Riemann D. (2003) Sleep and manipulations
of the sleep-wake rhythm in depression. Acta Psychiatrica Scandinavica, Supplementum. (418):83-91.
Becker, H., (1961) The Boys In White. Chicago: University of Chicago
Press.
44
Bell, D.S., (1993) Curing Fatigue. Emmaus: Rodale Press.
Binkley, S., (1990) The Clockwork Sparrow: Time, Clocks and
Calendars in Biological Organisms. Englewood Cliffs: Prentice Hall.
Booth CK. Coad RA. Forbes-Ewan CH. Thomson GF. Niro PJ. (2003)
The physiological and psychological effects of combat ration feeding
during a 12-day training exercise in the tropics. Military Medicine.
168(1):63-70, Jan.
Bunnell, D.E., Phillips, N.H., and Burger, R.J., (1991) Effects of carbohydrate ingestion on tympanic temperature and slow wave sleep. Sleep
Research, 20:40.
Burazeri G. Gofin J. Kark JD. (2003) Siesta and mortality in a Mediterranean population: a community study in Jerusalem. Sleep.
26(5):578-84, Aug 1.
Burke, R.J., Shearer, J.C., and Deszca, E., (1984) Career orientation
among police officers. Canadian Journal of Administrative
Science, 1(1): 179-194.
Campbell, S.S., and Dawson, W., (1990) Light effects on night shift
alertness. Physiology and Behaviour. 48:317-320.
Carrington M. Walsh M. Stambas T. Kleiman J. Trinder J. (2003) The
influence of sleep onset on the diurnal variation in cardiac activity and
cardiac control. Journal of Sleep Research. 12(3):213-21, Sep.
Carse, J.P., (1986) Finite and Infinite Games. New York: Ballantine
Books.
Carskadon, M., and Dement, W., (1981) Nocturnal determinants of
daytime sleepiness. Sleep, 5: S73-S81.
Caswell LW. Vitaliano PP. Croyle KL. Scanlan JM. Zhang J. Daruwala
A. (2003) Negative associations of chronic stress and cognitive
performance in older adult spouse caregivers. Experimental Aging
Research. 29(3):303-18, Jul-Sep.
Chow P. Nagendra G. Abisheganaden J. Wang YT. (2000) Respiratory
monitoring using an air-mattress system. Physiological
Measurement. 21(3):345-54, Aug.
Coleman, R., (1986) Wide Awake At 3 A.M. New York: W.H. Freeman and Company.
Colligan, M.J., and Rosa, R., Shiftwork effects on social and family life.
Occupational Medicine: State of the Art Reviews, 5(2):315-322.
45
Coyne KS. Zhou Z. Thompson C. Versi E. (2003) The impact on healthrelated quality of life of stress, urge and mixed urinary incontinence.
BJU International. 92(7):731-5, 2003 Nov.
Curran, D., (1983) Traits of a Healthy Family. San Francisco:
Harper.
Danilenko KV. Cajochen C. Wirz-Justice A. (2003) Is sleep per se a zeitgeber in humans? Journal of Biological Rhythms. 18(2):170-8, Apr.
Davidson AJ. Menaker M. (2003) Birds of a feather clock together-sometimes: social synchronization of circadian rhythms. Current
Opinion in Neurobiology. 13(6):765-9, Dec.
Dotto, L., (1990) Asleep In The Fast Lane: The Impact of Sleep
on Work. Toronto: Stoddart.
Ehret, C.F., (1981) New approaches to chronohygiene for shiftworkers in the nuclear power industry. pp. 263-270, In Reinberg, A., Vieux,
N., and Andlauer, P., (eds.), Night and Shiftwork, Biological and
Social Aspects. Oxford: Pergammon Press.
Folkard, S., and Monk, T.H., (1983) Circadian rhythms and shiftwork .
In R. Hockey (ed.), Stress and Fatigue in Human Performance,
New York: John Wiley and Sons.
Forger DB. Peskin CS. (2003) A detailed predictive model of the mammalian circadian clock. Proceedings of the National Academy of
Sciences of the United States of America. 100(25):14806-11,
Dec 9.
Fritz, R., (1993) Sleep Disorders: America’s Hidden Nightmare.
Naperville: NSA Inc..
George CF. Kab V. Kab P. Villa JJ. Levy AM. (2003) Sleep and breathing
in professional football players. Sleep Medicine. 4(4):317-25, Jul.
Gitanjali B. Ananth R. (2003) Effect of acute exposure to loud occupational noise during daytime on the nocturnal sleep architecture, heart
rate, and cortisol secretion in healthy volunteers. Journal of Occupational Health. 45(3):146-52, May.
Gore RB. Hadi EA. Craven M. Smillie FI. O’Meara TJ. Tovey ER. Woodcock A. Custovic A. (2002) Personal exposure to house dust mite allergen in bed: nasal air sampling and reservoir allergen levels. Clinical
& Experimental Allergy. 32(6):856-9, Jun.
Greenwald, J., (1975) Creative Intimacy. New York: Jove.
Guilleminault C. Powell NB. Martinez S. Kushida C. Raffray T. Palombini
L. Philip P.(2003) Preliminary observations on the effects of sleep time
in a sleep restriction paradigm. Sleep Medicine. 4(3):177-84, May.
46
Gupta NK. Mueller WH. Chan W. Meininger JC. (2002) Is obesity associated with poor sleep quality in adolescents? American Journal of
Human Biology. 14(6):762-8, Nov-Dec
Grindley A. Acres J. (1996) Alternating pressure mattresses: comfort
and quality of sleep. British Journal of Nursing. 5(21):1303-10,
Nov 28-Dec 11.
Hanson, P.G., (1986) The Joy of Stress. Islington: Hanson Stress
Management Organization.
Hastings MH. (2003) Circadian clocks: self-assembling oscillators?
Current Biology. 13(17):R681-2, Sep 2.
Hauri, P., and Linde, S., (1990) No More Sleepless Nights. New
York: John Wiley and Sons.
Hilton MF. Umali MU. Czeisler CA. Wyatt JK. Shea SA. (2000) Endogenous circadian control of the human autonomic nervous system.
Computers in Cardiology. 27:197-200.
Hockey, R., (1983) Stress and Fatigue in Human Performance.
New York: John Wiley and Sons.
Holmback U. Lowden A. Akerfeldt T. Lennernas M. Hambraeus L.
Forslund J. Akerstedt T. Stridsberg M. Forslund A. (2003) The human
body may buffer small differences in meal size and timing during a
24-h wake period provided energy balance is maintained. Journal of
Nutrition. 133(9):2748-55, Sep.
Honma K. Hashimoto S. Nakao M. Honma S. (2003) Period and phase
adjustments of human circadian rhythms in the real world. Journal of
Biological Rhythms. 18(3):261-70, Jun.
Honma S. Honma K. (2003) The biological clock: Ca2+ links the pendulum to the hands. Trends in Neurosciences. 26(12):650-3, Dec.
Horne, J.A., (1990) Why We Sleep. London: Oxford.
Hughes, M., (1989) Body Clock: The Effects of Time on Human
Health. New York: Facts On File.
Jurysta F. van de Borne P. Migeotte PF. Dumont M. Lanquart JP.
Degaute JP. Linkowski P. (2003) A study of the dynamic interactions
between sleep EEG and heart rate variability in healthy young men.
Clinical Neurophysiology. 114(11):2146-55, Nov.
Koul PA. Bhat MH. Lone AA. Koul AN. Wahid A. (2000) The foam mattress-back syndrome. Journal of the Association of Physicians of
India. 48(9):901-2, Sep.
47
Kramer M. Kinney L. (2003) Vigilance and avoidance during sleep in US
Vietnam War veterans with posttraumatic stress disorder. Journal of
Nervous & Mental Disease. 191(10):685-7, Oct.
Lahm R. Iaizzo PA. (2002) Physiologic responses during rest on a sleep
system at varied degrees of firmness in a normal population.
Ergonomics. 45(11):798-815, Sep 15.
Lambert-Lagacé, L., (1989) The Nutritional Challenge For Women.
Toronto: Stoddart.
Lavie, P., (1991) Association between sleep disturbances and blood
pressure in shiftworkers. In Peter, J.H.,& al., (eds.), Sleep and Health
Risk. Berlin: Springer-Verlag.
Lieberman HR. (2003) Nutrition, brain function and cognitive performance. [Review] [77 refs] Appetite. 40(3):245-54, Jun.
Leyton, E., (1975) Dying Hard. Toronto: McMillian.
Liu GF. Han S. Liang DH. Wang FZ. Shi XZ. Yu J. Wu ZL. (2003) Driver
sleepiness and risk of car crashes in Shenyang, a Chinese northeastern
city: population-based case-control study. Biomedical &
Environmental Sciences. 16(3):219-26, Sep.
McCall WV. D’Agostino R Jr. Dunn A. (2003) A meta-analysis of sleep
changes associated with placebo in hypnotic clinical trials. Sleep
Medicine. 4(1):57-62, Jan.
Means MK. Edinger JD. Glenn DM. Fins AI. (2003) Accuracy of sleep
perceptions among insomnia sufferers and normal sleepers. Sleep
Medicine. 4(4):285-96, Jul.
Meijer JH. Schwartz WJ. (2003) In search of the pathways for lightinduced pacemaker resetting in the suprachiasmatic nucleus. Journal
of Biological Rhythms. 18(3):235-49, Jun.
Metz HS. Light and the circadian clock. (2003) Journal American Association for Pediatric Ophthalmology & Strabismus. 7(4):22930, 2003 Aug.
Michalsen A. Schlegel F. Rodenbeck A. Ludtke R. Huether G. Teschler
H. Dobos GJ. (2003) Effects of short-term modified fasting on sleep
patterns and daytime vigilance in non-obese subjects: results of a pilot
study. Annals of Nutrition & Metabolism. 47(5):194-200.
Minors, D.S., and Waterhouse, J.M., (1990) Circadian Rhythms in General. Occupational Medicine: State of the Art Reviews, 5(2):165182.
48