Les femmes sont anxieuses quand leur conjoint conduit

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VIVRE MIEUX
Les femmes sont anxieuses
quand leur conjoint conduit
SECURITE ROUTIERE. Selon une nouvelle étude de la Direction de la sécurité routière,
une femme sur trois a peur quand son mari ou son ami prend le volant. En tête des
reproches, la vitesse excessive et le manque d’écoute du conducteur face aux critiques.
L
E MONDE de l’automobile n’a jamais été celui de
la p ar i t é h o m m e s femmes. Celui de la
conduite encore moins et
le machisme y a encore droit de cité.
Une étude réalisée (*) pour la Direction de la sécurité routière révèle
qu’une femme sur trois a « très souvent » ou « assez souvent » peur
quand elle voyage comme passagère.
avoir « parfois » peur. Ces femmes
angoissées préfèrent adopter des attitudes aussi étranges que révélatrices, plutôt que de confier leur
crainte. Seulement 25 % « osent »
élever la voix de manière systématique, la plupart des autres se
contentant, à leur corps défendant,
d’écraser une pédale de frein imaginaire sous leurs pieds ou d’étrangler
frénétiquement la poignée de leur
accoudoir.
Elles n’osent pas
dire leur peur
Celles qui s’expriment se plaignent d’abord de « dépassement
dangereux » et « d’excès de vitesse »
(84 %), puis de « non-respect des
stops et feux rouges » (76 %) et de
« conduite en état de fatigue » (73 %).
Le chiffre grimpe même à 69 %, une
proportion considérable, quand on
comptabilise celles qui avouent
Plus grave, elles sont 58 % à avoir
déjà fait une remarque à leur
conducteur parce qu’il prenait le volant après avoir consommé trop d’alcool. Cette nouvelle étude fait écho à
une précédente, réalisée dans les
mêmes conditions en mai 1999, qui
pointait de la même manière l’anxiété féminine liée en voiture. La hiérarchie des motifs de crainte n’a pas
évolué mais les femmes sont 14 %
plus nombreuses à manifester leur
peur en cas de vitesse excessive et
8 % de plus quand les conditions climatiques sont mauvaises.
L’enquête 2002 démontre que les
femmes anxieuses ont tout intérêt à
se manifester. Les deux tiers des
conducteurs tiennent compte des remarques faites à leur égard. Reste
qu’un homme sur trois (34 %) persiste à ne rien changer dans son
comportement !
Aymeric Renou
« Les hommes conduisent
plus mal que les femmes »
NICOLAS HENAFF, psychologue, président
de l’Association de la science du comportement appliqué
Les hommes sont-ils plus
dangereux au volant que les
femmes ?
n Nicolas Henaff. Oui, les chiffres
Si près de 33 % des femmes déclarent avoir peur en voiture quand leur conjoint conduit, seules 25 %
osent élever la voix pour signaler un danger. (LP/ANDY LECOQ.)
CLES
r Les conductrices ont
2,6 fois moins de risque
d’être tuées dans un accident
que leurs homologues
masculins, pour le même
nombre de kilomètres
parcourus. Elles sont
également plus respectueuses
des règles du Code de la
route et ont du coup 2,5 fois
moins de points retirés sur
leur permis.
r Les excès de vitesse
sont typiquement
masculins (78 % des
infractions), et la gent
féminine est 6,2 fois moins
condamnée pour des
infractions à la législation
routière.
r 53 % des hommes
confessent être agressifs
au volant, contre 41 % des
femmes, selon la récente
Journée nationale de la
courtoisie au volant,
organisée le 29 mars dernier.
r Le coût d’un accident
automobile causé par un
homme atteint 4 400 G (près
de 29 000 F) selon les
statistiques des compagnies
d’assurances) contre
seulement 2 750 G
(18 000 F) pour une femme.
A.R.
(*) Etude Ipsos les 1er et 2 mars
auprès d’un échantillon de
526 femmes représentatives de la
population française féminine de
15 ans et plus.
le montrent depuis des années, les
hommes conduisent plus mal que
les femmes. Une étude scientifique
québécoise en cours de réalisation
commence même à dégager le profil
type du chauffard : c’est le plus souvent un homme, plutôt jeune et de
niveau social relativement faible. La
courtoisie ne fait pas partie de son
univers et c’est souvent lié à son éducation.
Comment interprétez-vous les
résultats de cette enquête ?
Son mérite est de s’appuyer, chose
assez rare, sur des données liées aux
comportements et en donnant la parole à un témoin privilégié à l’intérieur même du véhicule. D’un premier abord, les chiffres semblent
rassurants puisque les deux tiers des
femmes disent ne pas avoir peur en
voiture. On imagine donc qu’une
majorité d’entre elles font confiance
au conducteur. Mais c’est aussi à
double tranchant car cette confiance
peut aussi être la preuve qu’elles ont
une perception des risques identique à celle du conducteur, c’est-àdire qu’elles ne s’étonnent même
plus des écarts de « conduite » de
leur conjoint. Le plus inquiétant est
de voir que des passagères reconnaissent monter en voiture avec des
conducteurs qui ont bu.
Quelle attitude doit adopter
une femme assise à côté d’un
chauffard ?
Il est impératif qu’elle se manifeste et
exprime ses angoisses au lieu de rester la main crispée sur la poignée de
la portière. Tout est ensuite affaire de
diplomatie mais elle a deux chances
sur trois de réussir à se faire entendre
et changer le comportement du
conducteur. C’est important même
si l’effet est de très courte durée, le
même que lorsqu’un automobiliste
se fait contrôler pour excès de vitesse. Les statistiques démontrent
qu’un chauffard reprend sa vitesse
de croisière seulement 6 kilomètres
après avoir été pris au radar…
Propos recueillis par A. R .
VOIX EXPRESS /Que pensez-vous de la conduite de votre conjoint ?
Maria Fernandes
Zarha Wahbi
Valérie Bitton
Stéphanie Deshais
Juliette Crété
25 ANS
ENSEIGNANTE
ROYAN (17)
37 ANS
PUERICULTRICE
PARIS XVIIIe
32 ANS
STYLISTE
PARIS IXe
20 ANS
ETUDIANTE EN DROIT
PARIS XVIIIe
19 ANS
ETUDIANTE EN CINEMA
SAINT-OUEN (93)
« Je préfère quand c’est
moi qui conduis, j’ai
davantage confiance ! En
ville ou sur le
périphérique, il roule
toujours trop vite et j’ai
souvent le réflexe de
freiner à sa place. On n’a
jamais eu d’accident, donc
je pense qu’il maîtrise,
mais ça me stresse quand
même. Mon ami est
macho : quand je lui dis :
C’est par là et que j’ai le
malheur d’avoir raison, il
ne me parle plus. »
« Il conduit très mal,
d’ailleurs il a déjà eu
plusieurs accidents.
Quand il va trop vite, je le
menace de descendre ou
de m’asseoir à l’arrière,
pour ne plus être à la
place du mort. Je préfère
conduire même si je vais
peut-être trop doucement.
D’ailleurs, je viens de
m’acheter une voiture
pour être autonome, parce
qu’il ne me laisse le volant
que quand il se sent trop
fatigué. »
« Je me sens en totale
confiance, mon mari
conduit très prudemment.
Heureusement parce que,
sinon, ça serait plutôt
crispant, avec nos trois
enfants à l’arrière ! Je
pense que d’avoir toute sa
famille avec lui le rend
plus responsable.
Moi-même, je n’ai pas le
permis. J’aurais peut-être
plus le sentiment du
danger si c’était le cas,
mais je sais qu’il maîtrise
bien la voiture. »
« Il ne connaît pas ses
limites. Il conduit trop vite
et souvent il prend le
volant après avoir bu de
l’alcool. Il a d’ailleurs déjà
eu un accident. Il croit
que, parce qu’il est un
homme, il conduit mieux
que moi et connaît bien
sa voiture. Il ne supporte
pas mes remarques, mais
je crois que ce qui
l’énerve, c’est le fait que
j’aie mon permis depuis
plus longtemps que lui, et
donc plus d’expérience. »
« Nous avons tous les
deux notre permis depuis
deux semaines seulement,
alors nous sommes encore
débutants. Avec lui, je suis
complètement rassurée, je
sais qu’il est prudent.
Parfois même plus que
moi ! Il s’énerve de temps
en temps, mais j’attends
que ça passe. En fait, je
préfère quand c’est lui qui
conduit. Par contre, quand
il a bu, je lui demande de
me laisser les clés. »
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LUNDI 29 AVRIL 2002
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