les hommes et la route
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/ livre blanc / les hommes et la route Livre blanc édité par : MMA IARD Assurances Mutuelles Société d'assurance mutuelle à cotisations fixes - RCS Le Mans 775 652 126 MMA IARD Société anonyme, au capital de 24 387 697 euros - RCS Le Mans 440 048 882 Sièges sociaux : 14 boulevard Marie et Alexandre Oyon - 72030 - Le Mans cedex 9 Entreprises régies par le code des assurances Responsable de publication : Stéphane Daeschner Livre blanc réalisé par l'agence Entre nous soit dit Réalisation et rédaction des interviews : Benoît Quenet-Beauvallet Synthèse : Bernard Pierre Molin Imprimé en France par les Ateliers Réunis Crédits photos : DR - C. Charzat Chiffres clés : Observatoire national interministériel de la sécurité routière (ONISR) Copyright MMA - Juin 2013 - Reproduction autorisée avec citation MMA. 02 | Les hommes et la route 3 645 personnes ont perdu la vie sur les routes de France en 2012. Que de chemin parcouru depuis 1972 où le pic de la mortalité routière avait été atteint avec 18 000 morts ! Plus récemment, entre 2001 et 2008, grâce à une mobilisation nationale sans précédent, le nombre des tués a baissé de 48 %. Pourquoi ce livre blanc ? La vitesse, l’alcool, le téléphone au volant, la somnolence… sont des dangers clairement identifiés par les automobilistes. L’évolution de la loi (radars, permis à points), les opérations de prévention sur le terrain, les campagnes de formation dans les écoles et de communication via les médias, ont permis cette prise de conscience. D’ailleurs certains facteurs de la mortalité au volant – comme le non-port de la ceinture – sont devenus mineurs. Stéphane Daeschner Mais nous savons trop bien qu’en matière de prévention, rien n’est irrémédiable ni acquis. Il faut toujours chercher et agir. Aujourd’hui, l’objectif est de passer sous la barre des 2 000 morts par an d’ici à 2020. Et s’il convient de poursuivre les chantiers existants, il faut aussi pousser la réflexion sur d’autres sujets. Directeur de la marque et de la communication externe MMA En charge de la prévention des risques routiers D’où l’idée d’ouvrir un nouveau débat, en s’appuyant sur un constat : sur la route, 75 % des tués sont des hommes. En deuxroues, ils représentent 92 % des victimes. Ces chiffres n’évoluent pas ou peu depuis dix ans… Alors MMA pose la question aux Français : sur la route 3 morts sur 4 sont des hommes, pourquoi ? Pour lancer le débat nous avons posé cette question à douze experts : psychanalyste, philosophe, psychologue, sociologue, policier, associations… Vous trouverez dans les pages suivantes les conclusions de ces échanges. Un éclairage utile avec des pistes de réflexion et d’action. Le débat continue sur Zérotracas.com avec comme ambition que chacun – conducteur comme piéton – devienne acteur de sa propre prévention et porteparole auprès de ses proches de conseils pratiques. Bonne lecture. Les hommes et la route | 03 Sommaire 03 12 Pourquoi ce livre blanc ? La moto, un univers qui reste masculin ? 05 Chiffres Clés 06 Les hommes plus accidentogènes que les femmes ? par Marc Bertrand 13 Un accident peut changer une vie ? par Bertrand Parent par Jean-Yves Salaün 14 07 Homme/femme, à chacun son véhicule ? l’accident grave en ville, l’homme sur-représenté ? par Yoann Demoli par le Commandant Jean-Pierre Jurkowski 08 15 Les hommes plus à l’aise avec le passage du permis ? Le chauffard… c’est l’autre ? par Jean-Marie Renouard par Sarah Benzaqui 16 09 L’entreprise, un effet amplificateur ? L’automobile, l’homme et la puissance : le trio infernal ? par Jean-Pierre Winter par Philippe Boulleau 17 10 La perte de points, un phénomène masculin ? par Caroline Gastard 11 La jeunesse, période à risque incontournable ? par Jean-Pascal Assailly 04 | Les hommes et la route Hommes/femmes, tous égaux au volant ? par Gilles Vervisch 18 Synthèse 22 MMA et la prévention 3 645 62 % chiffres clés 92 % 92 % tués sur les routes de France en 2012 des personnes blessées sur la route sont des hommes des personnes impliquées dans des accidents mortels avec un taux d’alcool positif sont des hommes 76 % des morts sur la route sont des hommes des morts sur la route en deux-roues sont des hommes 83 % des condamnés pour homicides involontaires sur la route sont des hommes 32 % des femmes victimes d’un accident mortel sont des passagères 75 636 blessés sur les routes de France en 2012 Les hommes et la route | 05 LES HOMMES PLUS ACCIDENTOGÈNES QUE LES FEMMES ? Q uelle que soit la tranche d’âge, et dans la plupart des pays, les hommes sont plus touchés par la mortalité routière. Diverses causes peuvent expliquer cette tendance. JEAN-YVES SALAÜN DÉLÉGUÉ GÉNÉRAL – ASSOCIATION PRÉVENTION ROUTIÈRE Jean-Yves Salaün est titulaire d’un DEA en science politique et lauréat de la Fondation Communication Demain (Fondation Jean Ferniot). Il a d’abord été journaliste avant de rejoindre l’association Prévention Routière où il a occupé successivement les postes de responsable des publications, directeur de la communication et délégué général adjoint en charge de la communication, du marketing et des partenariats. Il en est depuis mai 2011 le délégué général. JeanYves Salaün est également depuis novembre 2011 vice-président de la Prévention Routière Internationale. 06 | Les hommes et la route - Tout d’abord, la conduite, avec certains sports, reste un secteur plus ou moins réservé aux hommes, la femme ayant encore aujourd’hui des réticences à vouloir s’imposer et pensant manquer de légitimité. - Il faut également tenir compte de la surreprésentation des hommes sur certains moyens de locomotion. Dans la catégorie des deux-roues motorisés par exemple, les hommes représentent 75 % des utilisateurs et cette catégorie représente globalement un quart des morts sur la route. - Le type d’usage est également un paramètre important. Alors que les femmes réalisent essentiellement des trajets urbains entraînant peu d’accidents mortels, les hommes sont majoritaires sur les déplacements de longue distance ou de nuit. - Mais l’élément le plus important est sûrement le comportement. La transgression des règles, l’agressivité et la prise de risque sont des facteurs typiquement masculins, ceux-ci dépassant largement le seul comportement routier. À propos des comportements à risques, cette prédominance reste forte chez les hommes. - Pour l’alcool, les hommes sont impliqués dans 92 % des accidents mortels, en général avec des taux dépassant 1,5 g/l. Au-delà de la problématique routière, il s’agit d’un problème de santé publique avec une dépendance plus forte à l’alcool. - Pour la vitesse, les grands excès sont en général réalisés par des hommes, les clichés ayant encore la vie dure, l’homme exprime sa virilité à travers son véhicule et sa puissance. - Pour les jeunes conducteurs hommes, un autre élément entre en ligne de compte : la construction même de son psychisme n’étant pas totalement terminée, il ne réfléchit pas aux conséquences de ses actes. Cependant, depuis plusieurs années, les différences ont tendance à s’estomper. D’une part, l’évolution de la cellule familiale a tendance à réduire les différences de trajets selon les sexes, la femme ayant des besoins de déplacement ne se limitant pas à l’urbain. D’autre part, dans la nouvelle génération, il n’est pas rare de voir la femme au volant et son conjoint en place passager, y compris sur des trajets de longue distance. M ême si la tendance actuelle est à la convergence, quelques différences subsistent sur le choix et l’utilisation de l’automobile entre les deux sexes. Ainsi, les femmes roulent 20 % de moins que les hommes en termes de kilométrage annuel, sur des parcours nettement plus urbains et avec une cylindrée plus faible. Sur l’approche du véhicule, les femmes sont deux fois plus nombreuses que les hommes à affirmer qu’elles n’apprécient pas la conduite. Les critères de sélection d’un véhicule restent également fortement sexués. Alors que l’homme va rechercher l’exploit, la femme va privilégier le confort, le caractère utilitaire et l’esthétique. Cependant les recherches de notre sociologue ont réservé une surprise : 30 % des conducteurs de 4x4 sont des femmes. Une tendance qui peut être rapprochée des mères de famille sélectionnant un monospace pour se déplacer avec leurs enfants. La sélection du modèle se fonde sur l’habitabilité et une recherche de sécurité avec une visibilité plus importante. Des différences qui peuvent expliquer, en partie, la surreprésentation des hommes dans la mortalité routière avec des trajets moins urbains (donc à vitesse plus élevée), un kilométrage plus important, mais aussi des trajets de nuit plus nombreux (travail de nuit ou horaires décalés). Mais cela n’explique par tout. Trois morts sur quatre sur les routes sont des hommes, une répartition qui reste identique depuis une trentaine d’années. Yoann Demoli évoque également la question d’un comportement masculin plus à risques dans la vie en général puisque ces proportions hommes/femmes se retrouvent dans les chiffres des suicides. Une piste à considérer avec prudence puisque aucune corrélation n’a été prouvée à ce jour. En termes de comportement face à l’automobile, Yoann Demoli a noté quelques évolutions ces dernières années : - Sur le comportement de la femme : celle-ci a tendance à adopter des comportements à risques, se rapprochant ainsi des hommes. L’écart de l’espérance de vie a d’ailleurs tendance à s’amenuiser. - Sur l’approche du véhicule : le discours sur le développement durable et le budget poussent de plus en plus les nouvelles générations à opter pour des véhicules plus propres et moins coûteux. Une ten- HOMME/FEMME, À CHACUN SON VÉHICULE ? YOANN DEMOLI CHARGÉ DE COURS À SCIENCES PO – DOCTORANT À L’OBSERVATOIRE SOCIOLOGIQUE DU CHANGEMENT Ancien élève du département de sciences sociales de l’Ecole Normale Supérieure de Cachan, Yoann Demoli réalise une thèse consacrée à la sociologie de l’automobile sous la direction de Philippe Coulangeon à l’Observatoire Sociologique du Changement et au Laboratoire de Sociologie Quantitative. A partir de différentes enquêtes de la statistique publique, il étudie les variations de l’équipement automobile et les pratiques de mobilité des ménages, sous l’angle du genre, des générations et des groupes sociaux dans la France contemporaine. Il est également chargé de cours à Sciences Po, à Paris Panthéon Sorbonne et à l’Ecole Nationale de la Statistique et de l’Administration Economique. dance dont se sont emparés les constructeurs allemands pour leur communication, passant de la puissance à la sécurité et au confort. - Enfin le développement du véhicule électrique - qui se veut plus sécuritaire avec une vitesse moins élevée qu’un véhicule classique - pourrait changer la donne. Cependant, notre sociologue rappelle que cet atout de sécurité pourrait disparaître avec les progrès technologiques qui permettront sûrement de rouler à une vitesse plus élevée pour une même durée d’autonomie. La voiture électrique, une idée qui n’est pas neuve. Au début du XXe siècle, les constructeurs pensaient qu’elle serait parfaitement adaptée aux femmes car propre, peu bruyante et ayant peu d’autonomie ! Les hommes et la route | 07 Même s’il n’existe pas véritablement de discours distinct entre garçons et filles pendant l’apprentissage, les formateurs s’appuient sur deux méthodes : - faire partager leurs expériences lors des cours de conduite sur le terrain, l’objectif étant de les faire réfléchir face à une situation qui peut se dégrader très rapidement au volant, - l’autre volet repose sur des animations collectives mixtes en salle afin de provoquer un échange entre jeunes hommes et jeunes femmes, ces dernières jouant souvent un rôle « modérateur » face à l’impulsivité et aux certitudes des jeunes hommes. LES HOMMES PLUS À L’AISE AVEC LE PASSAGE DU PERMIS ? D ès l’apprentissage de la conduite, les jeunes conducteurs montrent plus de facilité et d’aisance au volant que les jeunes conductrices. Pour notre formatrice, cette tendance serait liée à une attirance plus forte des jeunes hommes pour l’objet automobile, mais également à un intérêt plus marqué pour la technique et la manipulation du véhicule. Dès les premiers cours de conduite, cette aisance se traduit parfois par une tendance des apprentis conducteurs à faire moins d’efforts et à porter moins d’attention par rapport aux futures conductrices. Un facteur serait déjà perceptible lors de cet apprentissage : la vitesse non adaptée. Face à cette situation, les formateurs sont régulièrement obligés de rappeler les jeunes hommes à l’ordre pour qu’ils ne soient pas en sur-confiance, nous confie Sarah Benzaqui, leur expliquant que face à une situation à risques, ils risquent de ne pas pouvoir adapter leur conduite, n’ayant pas l’ensemble des connaissances techniques, ni les réflexes nécessaires. 08 | Les hommes et la route SARAH BENZAQUI FORMATRICE ET VICEPRÉSIDENTE DE L’ÉCOLE DE CONDUITE FRANÇAISE (ECF) Ayant suivi une formation universitaire en sciences de l’éducation, Sarah Benzaqui obtient son diplôme d’enseignante de la conduite en 1992. Elle commence à travailler à l’ECF dès 1994 en reprenant l’entreprise de ses parents (ECF Trinité, Paris IXe). Elle est également ingénieur en formation pour le groupe ECF et travaille ainsi au développement de nouveaux produits. Particulièrement investie dans son métier, elle fait également partie d’un syndicat professionnel et s’occupe de la formation des moniteurs. Enfin, elle anime des stages de récupération de points. Cependant Sarah Benzaqui tient à apporter quelques nuances à ce tableau. D’une part, le passage du permis de conduire est, depuis quelques années, désacralisé. La voiture - objet de passion et de désir - devenant plus un objet utilitaire. L’évolution sociétale positionne plus la voiture au rang de sources de pollution, alors que le coût et l’écologie poussent vers un usage plus raisonné et plus posé de ce moyen de locomotion. D’autre part, au sein des grandes agglomérations, l’obtention du permis est moins liée à une liberté de déplacement. D’ailleurs, au sein de son école de conduite à Paris dans le IXe arrondissement, notre formatrice nous explique que l’âge moyen de ses stagiaires se situe aux alentours de 30 ans. Un autre élément marquant est le stage de perfectionnement ou de remise à niveau. Ce passage dans les écoles de conduite est plébiscité par les femmes (en moyenne, un homme pour cinq à dix femmes par session). Ces femmes cherchent à reprendre confiance au volant après une période sans conduite, préférant les conseils d’un formateur aux réactions de leurs conjoints ! P remière cause d’accident mortel, la conduite automobile est un enjeu essentiel dans le monde de l’entreprise. Sur les différences homme/femme, Philippe Boulleau constate que, bien que l’exposition au risque soit à peu près similaire, la manière d’aborder ce risque est très différente selon le sexe. En effet, alors que la femme est plus dans la retenue et la prise en compte d’une marge de sécurité, l’homme veut prouver qu’il est courageux et téméraire. Un antagonisme vrai dans le milieu personnel et amplifié dans le monde du travail. Une tendance que notre pilote a remarquée lors de stages de conduite avec des freinages d’urgence ou de conduite sur sol glissant. Techniquement, la femme sera plus dans la retenue. Faute de ne pas pouvoir appréhender exactement la réaction du véhicule, elle n’ira pas jusqu’à la limite du risque mais prendra une décision bien en amont afin de s’accorder une marge de sécurité. De son côté, l’homme voudra démontrer sa capacité de contrôle et sa témérité en essayant de s’approcher de la zone à risque, en la dépassant parfois. Face aux conseils de spécialistes, alors que la femme a un degré d’écoute important, répondant immédiatement à une invective lors d’une mise en situation au volant, l’homme aura généralement un temps de réflexion, contestant parfois la demande ou le conseil de son formateur, affirmant parfois « je fais ça depuis vingt ans… ». L’approche de ces mises en situation est également différente : alors que la femme cherche la mise en œuvre pratique du conseil, l’homme est parfois en attente d’explications techniques ou mécaniques pour comprendre le phénomène. Une problématique reste cependant unisexe : le téléphone et les outils multimédias. Même si les chefs d’entreprises et les responsables ont pris conscience des risques du téléphone au volant, poussés souvent par des décisions de justice, l’apparition de nouveaux équipements embarqués de liaison entre l’employé et son entreprise pourrait devenir une source d’inquiétude selon Philippe Boulleau. En effet, malgré les progrès technologiques, ces accessoires restent des perturbateurs de conduite, détournant l’attention du conducteur de la route. L’ENTREPRISE, UN EFFET AMPLIFICATEUR ? PHILIPPE BOULLEAU FORMATEUR ET PILOTE EXPERT – DRIVETEST Ancien pilote moto de haut niveau (Enduro & Rallye Raid), Philippe Boulleau est devenu au fil du temps un spécialiste reconnu de l’adhérence, analysant et maîtrisant les liaisons au sol des véhicules depuis plus de dix ans. Diplômé BPJEPS, il dirige le département R&D du Skid Concept depuis sa création en 2002. Ses domaines d’intervention sont la mise au point des aides au contrôle du châssis pour les constructeurs et équipementiers automobiles, mais aussi la formation à l’éco sécurité. Co-fondateur de Drive Test, il développe et anime les formations spécifiques pour la maîtrise du risque routier notamment pour les services de secours comme les SDIS, la gendarmerie ou bien la police. Enfin, autre paramètre particulièrement présent dans le monde de l’entreprise : le stress. Un élément qui peut se révéler particulièrement accidentogène. Or, il apparaît, selon son expérience, que les hommes sont globalement plus exposés au stress que les femmes. Les hommes et la route | 09 LA PERTE DE POINTS, UN PHÉNOMÈNE MASCULIN ? S i les stages de récupération de points devaient être le reflet du caractère infractionniste des conducteurs, celui-ci serait essentiellement masculin. En effet, lors de ses sessions en groupe, Caroline Gastard sensibilise un auditoire essentiellement - ou parfois exclusivement - composé d’hommes. Les quelques femmes présentes sont en général peu représentatives des conductrices lambda, celles-ci ayant été contraintes au stage par des comportements assez « masculins » sur la route. Ces stagiaires ont en commun d’être des conducteurs très actifs, voire hyperactifs, de ne pas reconnaître facilement leurs infractions, reportant généralement la faute sur le système : présence trop nombreuse de radars, répression avant tout, forces de l’ordre cherchant à les piéger… Notre animatrice est habituée aux discours bien rodés de ses interlocuteurs, trouvant plus facile de parler des autres que de soi. Parmi les infractions avec perte de points, la vitesse est en général l’élément central de ces stages. Les formateurs doivent faire face à deux problématiques différentes. La vitesse synonyme de plaisir : dans ce cas il est souvent difficile de tirer un trait sur cette « passion », ces conducteurs n’ont pas réussi à adapter leur conduite malgré le développement des radars. La vitesse dans le travail, synonyme d’opérationnel et d’efficacité, un autre objectif est alors en jeu : apprendre aux stagiaires à 10 | Les hommes et la route mieux gérer leurs agendas et leur stress. CAROLINE GASTARD FORMATRICE ET CONSULTANTE SÉCURITÉ ROUTIÈRE CG FORMATION ET CONSEIL – ANIMATRICE STAGES DE RÉCUPÉRATION DE POINTS POUR AUTOMOBILE CLUB ASSOCIATION – AUTEUR DE « POURQUOI ÊTES-VOUS INFRACTIONNISTE ? » Titulaire du BEPECASER (enseignante de la conduite automobile) et du BAFM (formatrice de formateurs en sécurité routière), Caroline Gastard dispense des formations spécifiques à l’animation de stages de sensibilisation à la sécurité routière dans le cadre du permis à points depuis 2004. Elle intervient également en entreprise pour la mise en place de plans de prévention et d’actions de prévention en sécurité routière. Enfin, elle anime des stages de sensibilisation à destination de conducteurs infractionnistes. Sur cette thématique de la vitesse, le processus de perte de points diffère entre hommes et femmes, les femmes étant plus sujettes à l’accumulation de petits excès de vitesse (moins de 20 km/h), souvent liés à l’inattention et à la nature même des déplacements (les femmes réalisant des trajets plus urbains que les hommes). L’intégration des conseils prodigués pendant ces stages diffère également selon le sexe. Alors que les femmes modifient leurs comportements au volant quel que soit le trajet, avec ou sans enfant, en ville ou hors agglomération, les hommes auraient tendance à modifier leurs comportements uniquement lors de trajets familiaux. Cependant, Caroline Gastard nous confie que dans une société qui prône la vitesse, il n’est pas aisé de faire comprendre que celle-ci n’est pas de mise sur la route. Enfin, que dire d’une femme formatrice souvent accompagnée d’une psychologue femme face à un auditoire masculin ? Notre experte nous explique que c’est plutôt un atout, mettant de côté les rivalités et permettant une autre approche de la problématique tout en rappelant qu’il ne s’agit pas de faire la morale, mais d’apporter des pistes de réflexion. M ême si la notion de rite de passage entre l’adolescence et l’âge adulte – très importante chez nos parents et grands parents – est de moins en moins présente, le passage derrière le volant reste une période délicate pour les jeunes hommes. Une des explications repose sur la différence biologique homme/femme et l’agenda neurobiologique qui tombe en pleine période des premiers pas de conducteur. En effet, alors que les jeunes filles voient leur taux d’œstrogène multiplié simplement par 3, chez le garçon entre le passage de l’adolescence à l’âge adulte, le taux de testostérone est multiplié par 14 en moyenne ! Le jeune homme doit faire face à ce que qualifie notre psychologue de « véritable bombardement d’hormones ». Cette testostérone joue naturellement un rôle important dans l’agressivité, la prise de risque et la compétitivité. Cet apport d’hormones « allume » un système de récompense étroitement lié au plaisir, à une période qui coïncide souvent avec le passage du permis de conduire et les premières années au volant. JEAN-PASCAL ASSAILLY PSYCHOLOGUE ET CHERCHEUR À L’IFSTTAR (INSTITUT FRANÇAIS DES SCIENCES ET TECHNOLOGIES DES TRANSPORTS, DE L’AMENAGEMENT ET DES RESEAUX) Psychologue, chercheur à l’IFSTTAR depuis 1988 (anciennement INRETS), Jean-Pascal Assailly a synthétisé et diffusé ses connaissances dans deux ouvrages : Les jeunes et le risque, Vigot (1992) ; Que sais je « la mortalité chez les jeunes », PUF (2001). Il travaille sur les influences de l’environnement familial sur les attitudes et comportements des jeunes. Depuis 2 ans, il travaille au Vietnam pour la Banque mondiale afin de construire le continuum éducatif en sécurité routière. Sur les solutions à apporter, Jean-Pascal Assailly propose deux pistes : - d’une part, avant 15 ans, les parents devraient apporter une éducation moins stéréotypée selon le sexe de leur enfant, en protégeant plus le jeune garçon. - d’autre part, dans le cursus d’apprentissage de l’éducation routière, la formation devrait tendre vers une distinction entre les deux sexes, appuyant plus sur la notion de pilotage pour les jeunes filles alors que la formation, les raisons et la compréhension des règles seraient les éléments centraux pour les jeunes garçons. Cependant cette phase « à risques » n’est souvent que temporaire, la relation avec un conjoint stable ou un enfant joue un rôle indéniable dans la baisse de prise de risques selon notre psychologue. Ce lien rendant le jeune homme plus responsable pour autrui que pour lui-même. Un risque d’autant plus important que, alors que la production de testostérone plonge le jeune directement dans l’âge adulte, les connexions du système de contrôle des récompenses – véritable modérateur de ces pulsions - ne sont pas encore en place. Un système de gestion du risque et du rationnel qui n’est totalement opérationnel qu’à partir de 22, 23 ou 24 ans. Les conséquences sur la conduite des garçons sont révélatrices : ils prennent plus de risques et respectent moins les règles pour tester leurs limites. Les chiffres de l’accidentalité n’en sont que le reflet : sur 10 tués entre 15 et 25 ans, 8 sont des hommes, 1 femme parmi les 2 tuées était passagère d’un véhicule conduit par un homme. Alors que les jeunes conductrices sont plus dans le registre de l’erreur, de la compréhension et de la trajectoire, les jeunes hommes sont dans celui de l’infraction avec la vitesse, l’alcool, le cannabis, le refus de priorité ou le franchissement de lignes blanches… LA JEUNESSE, PÉRIODE À RISQUE INCONTOURNABLE ? Les hommes et la route | 11 sont désormais utilisateurs de plusieurs moyens de déplacements. Sur l’approche de la prise de risque, selon le chargé de mission, ce n’est pas le sexe qui est un facteur déterminant mais plus une approche de l’engin, entre le passionné et l’utilitaire. L’utilitaire, souvent un automobiliste passé au deux-roues pour des questions pratiques, n’a pas conscience des risques routiers spécifiques, malgré la formation obligatoire de 7 heures, lors de ses premiers déplacements. Un sur-risque qui a tendance à diminuer généralement avec la pratique. LA MOTO, UN UNIVERS QUI RESTE MASCULIN ? MARC BERTRAND CHARGÉ DE MISSION SÉCURITÉ ROUTIÈRE FÉDÉRATION FRANÇAISE DES MOTARDS EN COLÈRE Âgé de 48 ans, Marc Bertrand est chargé de mission au secrétariat national de la FFMC depuis janvier 2009. Analyses, synthèses et suivi de l’accidentologie routière, interface avec les pouvoirs publics, coordination des actions de sensibilisation à la sécurité routière sont ses principales activités. Auparavant, il était journaliste au mensuel Moto-Magazine, spécialisé sur le voyage à moto et l’univers de la moto ancienne, domaines qu’il considère comme des vecteurs de lien social par la découverte, le partage et la solidarité. 12 | Les hommes et la route S ’il existe une catégorie d’usagers où la part de l’homme reste prépondérante, c’est celle des deux-roues motorisés. L’image du motard cuir sur une grosse cylindrée est tenace, malgré l’ouverture de l’accès des 125 cm3 aux titulaires du permis A depuis quelques années. En effet, les femmes ne représentent que 25 % des usagers1 et utilisent essentiellement des petites cylindrées (48 % choisissent des 80 cm3 ou moins) pour des déplacements urbains. Pour Marc Bertrand, cette prédominance de l’homme trouve sa source dans plusieurs facteurs. D’une part, les femmes ont une vision nettement plus utilitaire de la moto, l’utilisant en complément de la voiture, car peu adaptée à certaines activités quotidiennes. D’autre part, les femmes se tournent plus volontiers vers des engins de faibles cylindrées en raison du poids et de la maniabilité. Cependant, notre expert du monde de la moto et du scooter, tient à préciser que la plupart des usagers 1- Etude TNS Sofres du 7 mai au 18 mai 2009 pour GEMA Prévention, auprès des conducteurs de deux-roues motorisés (50cc et plus) âgés de 15 ans et plus. 639 interviews ont été menées en ligne. Autre élément prépondérant, c’est l’exposition au risque. Par nature, le scootériste ou le motard est plus exposé, par une protection plus faible que l’automobiliste. L’enjeu est bien sûr la protection vestimentaire : l’homme est en général mieux équipé que la femme au sein de la catégorie des usagers utilitaires en raison d’une contrainte sociétale moins marquée. Il est, en effet, plus simple de passer du costume cravate à une tenue adaptée à la conduite d’un deux-roues motorisé que du tailleur talons aiguilles à un vêtement plus adapté. Sur le portrait type de l’accident mortel en deux-roues motorisé – un homme de la quarantaine, sur une grosse cylindrée, en rase campagne – Marc Bertrand tient à relativiser les données de la Sécurité routière. Certes, la mortalité de cette catégorie est plus présente en milieu rural qu’en milieu urbain, mais c’est en raison du facteur vitesse et de la protection plus faible qu’un automobiliste. Pour la part importante des hommes motards tués sur les routes, celle-ci reste liée, selon notre spécialiste, à la forte proportion d’hommes dans la population des usagers des deuxroues motorisés. Enfin, sur le partage de la route entre automobilistes et deux-roues, les hommes au volant auraient tendance à avoir des comportements plus agressifs et moins soucieux des motards alors que les femmes seraient, certes, plus sensibles de cette coexistence, mais auraient tendance à oublier les distances de sécurité et à « coller » parfois le deux-roues par inattention. A 20 ans, Bertrand Parent, rentrait chez lui sur une petite départementale de province qu’il connaissait parfaitement. Il a voulu doubler un véhicule. À ce moment, un automobiliste est arrivé en face. Bertrand Parent a perdu le contrôle de sa voiture et a percuté le véhicule provoquant, sur le coup, la mort du conducteur. Les jours et les semaines suivants sont terribles pour Bertrand Parent qui a honte de parler de sa souffrance, alors que celle de la famille du jeune qu’il a tué est infiniment plus grande. « Une situation qui pousse au silence et au tabou, j’ai mis 25 ans à pouvoir en parler comme j’en parle aujourd’hui » nous confie-t-il. « Quand à 20 ans on tue quelqu’un, il y a quelque chose qui se casse », explique Bertrand Parent. Pour autant, il n’a pas mis la voiture de côté, reprenant la route après sa suspension de permis. Simplement, le regard sur la conduite est différent, plus attentif aux transgressions et aux libertés que prennent certains avec le code de la route. Circulant aujourd’hui en scooter dans Paris, il a toujours un regard sur le rétroviseur du conducteur afin de voir ce que fait l’automobiliste. De cet événement, Bertrand Parent ne conserve pas de réelles séquelles psychologiques, hormis - peut être - des difficultés à se faire conduire par une autre personne, tout en affirmant, qu’au regard des statistiques, il remettrait plus facilement sa vie entre les mains d’une femme que d’un homme ! Cet homme est devenu un militant de la sécurité routière, à travers son livre, mais aussi lors de tables rondes. Lors de ses passages dans les lycées ou les centres de formation, il est toujours étonné de l’orgueil des jeunes hommes, du refus d’accepter leurs limites et de la peur des jeunes filles de dire non pour rentrer de discothèque avec un copain qui n’est pas en état de conduire. UN ACCIDENT PEUT CHANGER UNE VIE ? BERTRAND PARENT JOURNALISTE – AUTEUR DE « UN JOUR, SUR LA ROUTE, J’AI TUÉ UN HOMME » Bertrand Parent, 48 ans, journaliste, ancien rédacteur en chef du Parisien / Aujourd’hui en France est l’auteur du livre Un jour sur la route j’ai tué un homme, Editions Max Milo. Jugé et condamné pour homicide involontaire, Bertrand Parent a vécu pendant 26 ans avec un mort sur la conscience, sans jamais parler de cette tragédie qui a bouleversé sa vie. Il a enquêté sur son propre passé, interrogé des victimes de la violence routière ainsi que celles et ceux qui luttent contre les excès au volant. Il milite désormais au grand jour contre la violence routière notamment dans les lycées. Sur le monde du travail, notre témoin a remarqué une nette amélioration comportementale, certaines sociétés interdisant même l’usage du kit mains libres au volant. Cependant, d’autres restent sur des pratiques plus douteuses, payant les amendes et/ou les stages de récupération de point de leurs salariés. Plus globalement, Bertrand Parent regrette qu’il n’y ait pas de continuité dans la politique de sécurité routière à l’image d’autres pays. Selon lui, la politique sécuritaire, souvent mal vécue, est là pour le bien commun. Les hommes et la route | 13 L’ACCIDENT GRAVE en ville, L’HOMME SUR-REPRÉSENTÉ ? L COMMANDANT JEAN-PIERRE JURKOWSKI CHEF DE SERVICE – SERVICE DU TRAITEMENT JUDICIAIRE DES ACCIDENTS – PRÉFECTURE DE POLICE DE PARIS Né en 1956 à Paris, Jean-Pierre Jurkowski est Commandant à l’échelon Fonctionnel, chef du Service de Traitement Judiciaire des Accidents depuis 7 ans. Il a débuté sa carrière par 5 ans d’expérience dans le privé avant d’intégrer la police comme gardien de la paix en 1980. En sortie de scolarité, il rejoint la Préfecture de Police, passe le concours d’officier de Paix en 1991 et intègre l’école supérieure des Officiers de Police de Nice pour une scolarité de 2 ans. A la sortie, il est affecté comme Lieutenant de Police à la Police de l’Air et Frontières, Brigades des chemins de fer de la Gare du Nord. 14 | Les hommes et la route e STJA est un service particulier de la Préfecture de Paris, en charge, entre autres, des accidents graves ou mortels de l’agglomération parisienne et présent dès les premières minutes suivant l’accident jusqu’au transfert du dossier à la justice. Sur un peu moins de 7 000 accidents de la circulation, ce service en prend en charge environ 8 %. À ce titre, il constitue un observatoire privilégié du risque routier en ville. Premier élément notable, les équipes du commandant Jurkowski ont à faire essentiellement à des hommes. Un constat qu’explique l’officier de police par la nature même des accidents selon les sexes : les femmes ayant en général des accidents matériels de faible gravité, hors du champ d’activité du service. Sur les principales causes d’accidents graves, la proportion homme/femme est de 75 %/25 % dans le cadre de vitesses excessives et de 85 %/15 % pour les alcoolémies à Paris. Suite à un accident grave ou mortel, ces spécialistes de la Préfecture de Police doivent souvent faire face dans les premières minutes à des auteurs perturbés, ayant des difficultés à avoir une appréciation objective des faits et du déroulé de l’accident, cherchant souvent à se défausser, en estimant que « ce n’est pas moi, c’est l’autre ». Manque d’attention ou infraction, l’enquête permet d’obtenir rapidement, sur le terrain ou lors d’investigations, des indices et des faits afin de comprendre les causes de l’accident. C’est à ce stade que, généralement, les auteurs des accidents reviennent sur leurs premières déclarations. Seule une part marginale, souvent habituée à d’autres délits, campe sur ses positions, n’ayant souvent aucune empathie pour les victimes. Le commandant tient à préciser que les rares femmes interrogées par son service sont des cas atypiques de conductrices ayant voulu se comporter comme des hommes ! Ou des situations exceptionnelles, telle que cette femme de 80 ans roulant à vive allure dans un couloir de bus, ayant renversé un piéton aveugle et rejetant la faute sur ce dernier. Cependant ces femmes montrent généralement plus de retenue et, face aux faits, contestent très peu. Le commandant Jurowski rappelle que l’accident trouve sa source à 95 % dans le comportement du conducteur, et qu’en tant qu’usager de la route, il voit peu de femmes prendre sciemment des risques sur Paris ! L a notion de bon conducteur est bien souvent subjective. Qui n’a pas entendu dans un dîner un convive louer sa manière de conduire et la phrase « moi ça fait 20 ans que je conduis et je n’ai jamais eu un seul accrochage… ». Jean-Marie Renouard a planché sur le sujet en interrogeant des automobilistes Le chauffard pousse parfois les autres conducteurs à transgresser également la règle, obligés, par exemple, d’augmenter leurs vitesses si le chauffard arrive à vive allure. Le chauffard, un rôle purement masculin ? Pour Jean-Marie Renouard, l’homme reste conditionné par l’éducation et l’idée de JEAN-MARIE RENOUARD LE CHAUFFARD… C’EST L’AUTRE ? infractionnistes dans un tribunal au cours d’enquêtes sociologiques. Il apparaît que seuls 10 % des interrogés estiment être de mauvais conducteurs. L’idée reste fortement ancrée dans l’esprit des automobilistes « le mauvais conducteur ce n’est pas moi, c’est l’autre ». Notre sociologue rappelle que la conduite n’est en aucun cas une activité individuelle. Dans le flux de circulation, le conducteur est toujours observé par les autres, jugé et jaugé. Il doit interpréter la situation et la prise de décision est collective. Une norme collective qui régit la bonne marche du trafic. De son côté, le chauffard est un individualiste, incapable de s’adapter aux autres et d’interpréter la situation qu’il traverse. Pour cette catégorie de conducteur, le code de la route n’est qu’une information parmi d’autres, le critère le plus important est la présence ou non de l’autre. virilité et de puissance, la voiture étant un territoire sur lequel il ne faut pas empiéter. Par ailleurs, lors des interviews qu’il a pu effectuer auprès de 40 conducteurs infractionnistes, force était de constater que la majorité d’entre eux étaient des hommes (36 pour 4 femmes). Toutefois, ce type de comportement reste extrême et ne doit pas qualifier l’homme. L’évolution du regard sur le monde automobile et sur l’objet en lui-même apportera peut-être une tendance plus pacifiée. Aujourd’hui, la voiture n’est plus le signe de puissance, mais a intégré des notions plus féminines telles que la rondeur des formes ou la sécurité. SOCIOLOGUE – MAÎTRE DE CONFÉRENCE À BORDEAUX II – AUTEUR DE « AS DU VOLANT ET CHAUFFARDS » Jean-Marie Renouard est maître de conférences en sociologie à l’Université de Bordeaux et chercheur au Centre de Recherches Sociologiques sur le Droit et les Institutions Pénales (CESDIP-CNRS). Après avoir étudié la délinquance juvénile, il a consacré des travaux à la circulation routière : Les effets de la répression sur les comportements d’infraction routière, L’Harmattan (2006) ; La délinquance routière, Robert Ph. (Ed.) ; Crime et sécurité : l’état des savoirs, La Découverte (2002) ; As du volant et chauffards, Sociologie de la circulation routière, L’Harmattan (2000) ; Les représentations de la circulation et des interactions chez les automobilistes, L’Harmattan (1997). Les hommes et la route | 15 L a relation entre l’homme et sa voiture reste un vecteur de croyances et d’images encore très fort aujourd’hui. Pour notre psychanalyste, aucun homme n’est indifférent au fait de pénétrer dans son véhicule, surtout lors des premières années de sa vie d’automobiliste, l’engin Cependant, il n’existerait pas d’amplification du caractère, ni de révélation du caractère caché lorsque l’homme passe derrière son volant. Selon Jean-Pierre Winter, être au volant change tout de même notre regard sur les autres, sur le monde et sur soi-même. Une L’AUTOMOBILE, L’HOMME ET LA PUISSANCE : LE TRIO INFERNAL ? JEAN-PIERRE WINTER PSYCHANALYSTE De formation philosophique et juridique, diplômé de psychologie clinique, Jean-Pierre Winter est spécialiste des pathologies contemporaines. Il est le co-fondateur et actuel Président du Mouvement du Coût freudien. Il est l’auteur de nombreux ouvrages et essais portant notamment sur les problèmes de société : Les hommes politiques sur le divan, Calmann-Lévy ; Stupeur dans la civilisation, Pauvert ; Dieu l’amour et la psychanalyse, Bayard ; Choisir la psychanalyse, Point-Seuil ; Transmettre (ou pas), Albin-Michel. 16 | Les hommes et la route lui permettant d’obtenir l’autonomie et la puissance. Cette puissance, qui est une constante dans les discours sur l’automobile, peut être assimilée au pouvoir, à la force et à la possibilité potentielle de pouvoir tuer. Un désir de toute puissance qui concerne plus les hommes que les femmes. Bien que l’image véhiculée par les publicités change depuis quelques années (avec le désir d’autonomie, la joie de vivre, le confort et l’absence d’obstacle), cette notion de puissance est toujours sous-jacente. Pour l’homme, la voiture est un nouveau moyen de faire la guerre. La route devient alors, selon Jean-Pierre Winter, un champ de bataille, un lieu du « tous contre tous » et du « chacun pour soi ». Dans ce schéma, la femme reste la garante de la vie et de la transmission alors que l’homme part à la guerre. des manifestations est la confiance que l’on doit accorder aux autres lorsqu’on prend le volant, avec le code de la route en guise de lien social. En effet, que serait le partage de la route si personne ne respectait, par exemple, un feu tricolore ?! Tout en partageant la route, le simple fait d’être dans son véhicule, à l’écart physique des autres, protégé et transporté, peut assimiler, pour certains hommes, l’habitacle du véhicule au ventre maternel, apportant réconfort et sécurité. Cette relation entre l’homme et la voiture reste un rapport complexe. Comme tout objet utilitaire, il peut devenir un objet fétiche : certains donnent un petit nom à leur voiture, leur parlent et la nettoient tous les jours, d’autres deviennent des collectionneurs ou adeptes de leur esthétique. Concernant l’approche homme/femme, Gilles Vervisch est prudent, en se posant une question beaucoup plus large : existe-til un naturel masculin et un naturel féminin ? Certes, on a longtemps fait la différence par la force physique, un rapport homme/ femme qui reproduit une certaine forme d’inégalité dans l’ensemble de la société. Par habitude, l’homme est propriétaire, pourquoi ne le serait-il pas du véhicule familial ? Il n’y a pas de raison que le monde de l’automobile soit si différent. HOMMES/ FEMMES, TOUS ÉGAUX AU VOLANT ? I l est toujours étonnant de voir la symbolique que placent les hommes dans le choix de leurs véhicules. Au-delà du caractère utilitaire de ce moyen de locomotion, certains y voient le reflet d’une réussite sociale, de liberté ou d’autonomie, explique Gilles Vervisch. Mais que dire de cette liberté lorsque, pour aller d’un point A à un point B, un homme préférera passer plus de temps à bord de son véhicule que d’emprunter les transports en commun ? s’interroge-t-il. L’automobile reste, encore aujourd’hui, un moyen d’identifier l’autre. Chacun, enfermé dans son habitacle, identifie l’autre par la marque de la voiture, le modèle ou la plaque minéralogique. L’autre n’étant, d’après notre philosophe, qu’un modèle ou un obstacle sur sa route. GILLES VERVISCH AGRÉGÉ DE PHILOSOPHIE – AUTEUR DE « TAIS-TOI ET DOUBLE » Né en 1974 à Rouen, Gilles Vervisch est agrégé de philosophie, enseignant dans un lycée de la région parisienne, et animateur radio sur le Mouv’ (Radio France). Il est l’auteur d’une série de livres chez Max Milo qui tentent de donner une approche accessible et humoristique à la philosophie : Comment ai-je pu croire au Père Noël ? (2009), Quelques grammes de philo dans un monde de pub (2012). C’est ainsi qu’en 2011 est sorti Tais-toi et double, une « philosophie du Code de la route ». Le monde de la publicité reste d’ailleurs sur ces clichés : la femme roule dans une petite citadine colorée pour des virées entre copines alors que l’homme est au volant d’un 4x4 blanc, haut de gamme, sur des routes au sein de grands espaces. Le caractère sexiste étant parfois poussé à son paroxysme. Ainsi, en 1993 par exemple, Audi lançait une campagne avec le slogan « il a la voiture, il aura la femme ». De nouveaux rapports entre homme et voiture semblent être de plus en plus présents. D’une part, il est maintenant possible de personnaliser son véhicule au-delà des séries avec un élément plus marquant : la couleur. Plusieurs marques ont joué cette carte dans leurs campagnes publicitaires. C’est le cas de Citroën avec Hitchcock et, plus récemment, de la dernière campagne de Renault. D’autre part, la problématique écologique et budgétaire est en train de modifier notre perception de l’automobile. Cependant, ces nouveaux discours ne sont-ils pas tout simplement liés à une évolution du discours général ? Le monde de l’automobile ne serait-il pas le reflet naturel d’une société avec ses luttes de pouvoir et ses différences entre les sexes ? Les hommes et la route | 17 SYNTHÈSE A CAUSE DE QUOI ? C haque conséquence possède une ou plusieurs causes. Ainsi, si 75 % des morts sur la route sont des hommes, les experts qui ont répondu à nos questions ont chacun évoqué quelques raisons que nous allons ici résumer. À cause de la nature masculine « La conduite reste un secteur plus ou moins réservé aux hommes » débute JeanYves Salaün, de l’association Prévention Routière. La formatrice Sarah Benzaqui va plus loin : l’attirance des jeunes hommes pour l’objet automobile les incite à se sentir surconfiants. Ils prennent plus de risques et portent moins d’attention aux autres. Sentiment partagé par un autre formateur, Philippe Boulleau. La femme serait plus dans la retenue : au volant, elle écoute les explications et prend une marge de sécurité. Au contraire de l’homme, qui veut prouver qu’il est courageux et capable de tout contrôler, allant jusqu’à contester les conseils prodigués. Un antagonisme qui se retrouve souvent dans les vies privées ou professionnelles, et qui pourrait expliquer que les hommes soient plus exposés au stress, un élément particulièrement accidentogène. Pour expliquer la surmortalité des hommes, beaucoup d’intervenants évoquent les comportements typiquement virils : transgression, agressivité, témérité, égoïsme, orgueil, désir de puissance. Pour Yoann Demoli, enseignant à Sciences Po, 18 | Les hommes et la route la dichotomie va jusqu’aux critères de sélection d’un véhicule : performances pour les hommes, sécurité et confort pour les femmes. À cause des hormones Si, pour le psychanalyste Jean-Pierre Winter, l’automobile permet à l’homme – plus qu’à la femme – d’obtenir la puissance et le pouvoir, « jusqu’à la possibilité potentielle de tuer », le psychologue Jean-Pascal Assailly l’explique par « le bombardement d’hormones » que subissent les jeunes hommes. À l’âge où ils abordent la conduite, le taux de testostérone des garçons est multiplié par 14 ! Alors que le taux d’œstrogène des jeunes filles n’est « que » triplé. Ces hormones allument un système de récompense lié au plaisir, donc lié aux prises de risques et à la compétitivité, naturellement plus fort chez les mâles. Alors qu’une jeune conductrice est dans le registre de l’erreur et de la compréhension, les conducteurs sont dans celui de l’infraction : vitesse, alcool ou cannabis. D’ailleurs, les garçons de 15-25 ans payent un lourd tribut en testant leurs limites sur la route. Puis ils s’assagissent (un peu) avec le temps. Si vieillir demeure donc la meilleure solution pour se calmer au volant ou au guidon, le psychologue invite aussi les parents à ne pas stéréotyper l’éducation des enfants et à plus protéger les petits garçons. Autre piste selon lui, différencier la formation à la conduite selon les sexes : pilotage et maîtrise de l’outil pour les filles ; appel à la raison et à la compréhension des règles pour les garçons. Car il faut plus de temps aux garçons qu’aux filles pour réfléchir aux conséquences de leurs actes. À cause des motos Jean-Yves Salaün remarque que les hommes sont surreprésentés parmi les conducteurs de deux-roues motorisés. 75 % des personnes enfourchant une moto ou un scooter sont des hommes, et cette catégorie d’usagers représente 25 % des tués de la route. Les femmes qui roulent en deux-roues optent le plus souvent pour de petites cylindrées, qu’elles utilisent pour des déplacements urbains. Comme le note Marc Bertrand, de la FFMC, on retrouve ici la différence entre la passion masculine et l’approche utilitaire féminine. Bertrand pointe évidemment la fragilité de ses congénères, plus exposés aux risques. Avec un avantage en terme d’équipement pour les hommes : il est plus simple d’adopter une tenue protectrice pour un homme en costume et chaussures de ville que pour une femme en tailleur et stilettos. Marc tempère aussi le portrait-robot du mort en moto : un homme sur une grosse cylindrée en rase campagne. En milieu rural, les femmes pilotes sont rarissimes. En revanche, il alerte les automobilistes multimodaux qui passent à la 125cc pour des raisons pratiques. Malgré la formation de 7 heures, ils n’ont souvent pas conscience des risques et il leur faut quelques mois de conduite pour maîtriser l’engin et l’environnement. À cause des trajets Yoann Demoli observe que les femmes parcourent annuellement 20 % de kilomètres de moins que les hommes, sont souvent au volant d’une petite cylindrée et pour des trajets urbains, où les accidents mortels sont rares. Ce que confirme le commandant Jean-Pierre Jurkowski, de la préfecture de Police de Paris : « les femmes ont en général des accidents matériels de faible gravi- té. » Pour compléter ces premières raisons de la surmortalité masculine, Jean-Yves Salaün précise que les hommes sont majoritaires sur les déplacements de longue distance et de nuit. Les plus dangereux donc. Toutefois, il perçoit une évolution des habitudes. Les hommes trentenaires laissent plus facilement le volant à leur conjointe, acceptant sans rechigner la place du passager. Par ailleurs, l’éclatement des familles conduit les dames à faire de plus longs trajets. La formatrice Caroline Gastard note que les comportements après les stages de récupération de points qu’elle supervise diffèrent selon le sexe des participants. Les conductrices changent leur façon de faire, quel que soit le trajet, en ville ou en campagne, avec ou sans enfants. Alors que les hommes n’adoucissent leur conduite que lors des déplacements en famille. À cause de la vitesse Les clichés ont la vie dure : les grands excès de vitesse sont l’apanage des hommes, soucieux d’exprimer leur virilité en explosant le compteur. Les chiffres du commandant Jurkowski le confirment encore : lors d’un accident grave où la vitesse est en cause, le responsable est un homme dans 75 % des cas. Le chauffard est un individualiste, incapable de s’adapter, ni aux autres ni à la situation, pour qui le code de la route n’est qu’une information parmi d’autres, juge le sociologue JeanMarie Renouard. Pire, le chauffard, en roulant trop vite, pousse parfois les autres conducteurs à accélérer. Souvent, c’est un homme, conditionné par l’éducation, l’idée de virilité et de puissance. Même s’il demeure prudent et refuse de stigmatiser les hommes, le sociologue constate que sur les 40 conducteurs infractionnistes qu’il a rencontrés, il n’y avait que 4 femmes. La Les hommes et la route | 19 vitesse demeure l’élément central des infractions avec pertes de points, note la formatrice Caroline Gastard. De façon empirique, elle remarque que les femmes sont sujettes à l’accumulation de petits excès de vitesse, souvent liés à l’inattention ou à la nature urbaine des trajets. Pour certains hommes en revanche, la vitesse est « une passion ». Beaucoup ne parviennent pas à modifier leur comportement, et ce malgré les radars. La vitesse, sur la route comme au travail, est pour eux synonyme d’efficacité. Caroline doit alors trouver des biais, mieux gérer leur agenda et leur stress, pour espérer les voir ralentir. Mais, conclut-elle, cette idée n’est pas facile à faire passer dans une société qui prône la vitesse. À cause de l’alcool C’est un autre cliché et une autre raison de la surmortalité des hommes au volant. L’association Prévention Routière constate que les hommes sont impliqués dans 92 % des accidents mortels où l’alcool est en cause, en général avec un taux dépassant 1,5 g/l. Des chiffres concordant avec ceux relevés sur le terrain par le commandant Jurkowski : quand l’alcool a joué un rôle dans un accident, dans 85 % des cas, c’était un homme qui conduisait. Au-delà du problème routier, qui est dans le collimateur des forces de l’ordre, l’alcool pose un problème de santé publique. D’autant que, dans la nouvelle génération, les jeunes filles ont tendance à rattraper leurs camarades masculins dans la consommation d’alcool. Souhaitons qu’elles soient alors plus raisonnables avant de prendre la route. Un espoir modéré par le journaliste Bertrand Parent. Certaines d’entre elles lui ont confié qu’en sortant de discothèque, elles avaient peur de refuser de monter en voiture avec un garçon qui n’était pas en état de conduire. 20 | Les hommes et la route À cause des autres « L’enfer, c’est les autres », écrivait Jean‑Paul Sartre. Un autre philosophe, Gilles Vervisch, le voit d’ailleurs comme « un obstacle sur notre route ». Le sociologue Jean-Marie Renouard s’appuie sur un constat : seuls 10 % des personnes qu’il a rencontrées s’estiment mauvais conducteur. Globalement « le mauvais conducteur, ce n’est pas moi, c’est l’autre ». Le psychanalyste Jean-Pierre Winter va plus loin et stigmatise l’homme, pour qui la voiture serait un moyen de « faire la guerre », et la route, « un champ de bataille » où règne le « chacun pour soi ». Plus factuel, le commandant Jurkowski rappelle que 95 % des accidents trouvent leur source dans le comportement du conducteur. Il se remémore le cas exceptionnel d’une dame de 80 ans qui, roulant à vive allure dans un couloir de bus, rejetait la responsabilité de l’accident sur le piéton aveugle qu’elle avait renversé ! Si ce n’était si dramatique, on en rirait. Heureusement, rares sont les femmes qui se comportent ainsi. Le cas typique est un homme qui, bien que fautif, va d’abord nier l’évidence, rejeter les faits, se défausser sur « l’autre ». Les policiers ont l’habitude de ces réactions. La plupart du temps, hormis une part marginale de contrevenants récidivistes qui n’ont aucune empathie pour leurs victimes, les responsables reconnaissent vite leurs torts. Marc Bertrand de la FFMC note une autre différence homme-femme sur le partage de la route. Vis-à-vis des motards, les automobilistes mâles ont tendance à avoir un comportement agressif, alors que les conductrices sont plus sensibles à cette coexistence. Mais elles oublient parfois les distances de sécurité et « collent » aux deux-roues. Dans les deux cas, c’est l’autre qui est en danger. Pourtant Jean-Pierre Winter est convaincu que lorsqu’on prend le volant, on doit accorder de la confiance aux autres, avec le code de la route comme lien social. Une idée partagée avec le so- ciologue Jean-Marie Renouard pour qui « la conduite n’est en aucun cas une activité individuelle ». À cause de la connexion Les moyens de communication modernes – téléphones, tablettes – sont souvent désignés, à juste titre, comme des perturbateurs de conduite. Pour le formateur Philippe Boulleau, le problème est unisexe. Hommes et femmes abusent également des équipements connectés qui détournent l’attention du conducteur. Les chefs d’entreprise ont pris conscience de la dangerosité du téléphone, mais ils ont du mal à y renoncer pour joindre leurs salariés. Le journaliste Bertrand Parent note toutefois une amélioration de la situation. Mais il dénonce aussi les pratiques douteuses de certains patrons qui, en couvrant leurs salariés, favorisent l’usage du téléphone au volant. Mais là n’est pas le sujet. Match nul – à tous les sens du terme – entre les femmes et les hommes sur ce chapitre. À cause de toutes ces causes Sans avoir la prétention d’être exhaustifs – nous attendons vos avis – nous avons résumé certaines causes qui pourraient expliquer que, sur quatre tués de la route, trois soient des hommes. Il existe donc des causes physiologiques (les hormones), psychologiques (la volonté de puissance), culturelles (le rôle de l’homme), statutaires (l’envie de pouvoir), quotidiennes (les hommes roulent plus), ou pratiques (ils font plus de moto). Cela fait beaucoup de causes. Après les causes, les solutions Restent à trouver des solutions pour que les hommes arrêtent de mourir bêtement sur la route. La formation ? Sans doute. L’éducation ? Aussi. L’évolution des mœurs ? Elle est en cours. L’égalité homme-femme ? Elle doit encore progresser. Le code de la route ? Il évolue. La fin du machisme ? Il est à craindre que ça ne soit pas pour tout de suite. Les voitures plus sûres et plus douces ? Les constructeurs y travaillent. Des routes moins dangereuses ? Les pouvoirs publics interviennent. Plus de répression ? Malheureusement, ça passe aussi par là. L’écologie ? Comme la crise, elle va limiter les déplacements individuels. Toutes ces solutions, et bien d’autres encore, peuvent contribuer à faire baisser la mortalité routière. Celle des hommes comme celle des femmes. Car le but n’est pas juste d’inverser la courbe entre les deux sexes, mais de faire en sorte que la route ne soit pas un théâtre de drames, mais un lieu de vie partagé. Et cela passe par le respect des règles, et surtout le respect de l’autre. L’autre. Vous savez bien ; celui dont c’est toujours la faute… Bonne route, aux hommes comme aux femmes, et prudence ! Les hommes et la route | 21 MMA ET LA PRÉVENTION un assureur engagé dans la prévention des risques routiers MMA est engagé activement dans la lutte contre l’insécurité routière depuis plus de quinze ans. Cet engagement passe par : • des campagnes de prévention dans les médias pour sensibiliser les automobilistes, scootéristes, piétons ; • des actions sur le terrain, par exemple via des crash tests pédagogiques ; • Zérotracas.tv, la première web TV de prévention des risques routiers (plus de 150 vidéos) ; 22 | Les hommes et la route • Zérotracas.com, le site de prévention des risques routiers (plus de 800 articles de fonds, des jeux, des vidéos…) ; • des applications de prévention disponibles sur iPhone et Android. L’ambition de Zérotracas : que chacun – conducteur comme piéton – devienne acteur de sa propre prévention et porteparole auprès de ses proches de conseils pratiques. L’originalité : un ton direct, convivial, interactif, ludique. MMA soutient également les actions collectives de la FFSA (Fédération française des sociétés d’assurances) ou d’associations telles que la Prévention Routière ou SoSam. avec