Le recueil de sperme impossible le jour de la FIV

Transcription

Le recueil de sperme impossible le jour de la FIV
Journée FIVATE
Le recueil de sperme
impossible le jour de la FIV
G. Régnier-Vigouroux
AMP St Roch, 5 rue Gerhardt, 34000 Montpellier
Copyright © 2017 John Libbey Eurotext. Téléchargé par un robot venant de 78.47.27.170 le 08/02/2017.
Mots clés : recueil de sperme impossible, FIV
L
e recueil de sperme pour la réalisation d’un spermogramme ou
d’une AMP implique une éjaculation
obtenue le plus souvent par masturbation solitaire au laboratoire. La masturbation est dans beaucoup de civilisations l’objet d’un interdit explicite ou
implicite. La nécessité médicale d’obtenir du sperme dans le but du rétablissement de la fertilité peut donc
provoquer des comportements d’évitement ou d’inhibition de l’éjaculation [1]. Le diagnostic d’infertilité
chez l’homme peut aussi augmenter
l’anxiété jusqu’à entraîner des troubles de l’érection et de la libido [2].
Cependant, l’anxiété n’aurait pas toujours un rôle direct sur la qualité du
sperme [3].
Les échecs de recueil de sperme le
jour de la FIV, sont rares, de l’ordre de
0,1 à 3 % selon la littérature. Cette
fréquence peu élevée dans les centres
pratiquant l’AMP s’explique par une
politique de dépistage précoce, dès la
première consultation du couple infertile, et une prévention de ce risque
essentiellement par cryoconservation
de sperme avant la tentative. Les
causes réelles d’échecs peuvent être
anatomiques (atteintes médullaires,
cancers, diabète, chirurgicales), médi-
camenteuses avec la prise d’antidépresseurs, mais le plus souvent psychogènes comme nous l’avons vu plus
haut avec parfois une prédominance
ethnique [4].
Une enquête dans 6 centres
d’AMP (clinique Urbain V à Avignon,
clinique de la Duys à Bagnolet, clinique Pasteur à Brest, CHU Lyon, CHU
Nîmes et clinique St Roch à Montpellier), permet d’établir quels sont les
signes d’alertes et les conduites à tenir
les plus fréquentes. Tout d’abord, le
taux d’échec de recueil de sperme est
très bas dans tous les centres et seulement un centre ne pratique pas la
cryoconservation préventive (tableau 1).
À Montpellier, sur les 76 congélations préventives effectuées, la présence de l’homme avec nouveau recueil le jour de la FIV a permis
l’obtention d’un éjaculat pour 74
d’entre eux. Il semblerait que ce faible
taux d’échecs ne soit pas lié à la notion d’entraînement mais plutôt au fait
que l’homme est moins anxieux à
l’idée de disposer de ses paillettes
pour la mise en fécondation. En effet,
Jouannet et al [5] ont montré qu’il
existait autant d’échecs au cours d’un
deuxième recueil. De même, Saleh et
Tableau 1.
Ville
Taux d’échecs
Cryoconservation
préventive
Avignon
0,1 %
Non
Bagnolet
0,1 %
Oui
Brest
1%
Oui
mt médecine de la reproduction, vol. 8, n° 1, janvier-février 2006
Lyon
≈ 1%
Oui
Montpellier
0,2%
Oui
Nîmes
0,1%
Oui
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Journée FIVATE
Tableau 2.
Dédramatiser
Vidéo érotique
Préservatif
« Stimulant »
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Injection de papavérine
Vibromassage
Électrostimulation
Congélation d’ovocytes
Ponction testiculaire
38
Avignon
Oui
Non
Non
Non
Bagnolet
Oui
Oui
Oui
Viagra®
Brest
Oui
NC
Oui
Apomorphine
Non
Non
Rarement
Non
Non
Non
Non
Très rarement
al [2] ont pu démontrer que la notion d’entraînement
n’avait aucune influence sur 405 hommes ayant réalisé
avec succès un premier recueil. Ainsi, lorsqu’on annonça
à ces mêmes hommes que leur sperme présentait des
anomalies, 11 % (46/405) ont été dans l’impossibilité de
se prélever une deuxième fois 15 jours après.
En matière de dépistage, les 6 centres s’attachent à
dépister les échecs de recueil dès le premier rendez-vous
au laboratoire. Ainsi, les signes les plus révélateurs qui
conduisent souvent à une congélation préventive sont la
présence de la femme dans la salle de prélèvement, une
durée de prélèvement supérieure à 45 minutes, une hypovolémie à moins de 1 ml, et la prise d’antidépresseurs ou
d’alpha-bloquants. Des reports successifs de rendez-vous
de spermogramme ou la demande de pratiquer l’examen à
domicile doivent aussi alerter.
Les conditions matérielles et psychologiques du recueil dépendent aussi de l’accueil. Les six centres disposent d’au moins une salle de prélèvement dont l’insonorisation, le confort et la chaleur de la décoration ont été
étudiés pour atténuer l’impression d’environnement hospitalier. Quatre vingt-sept hommes sur 480 interrogés dans
une enquête de Jouannet et David [5] expriment comme
souhait principal, de pouvoir disposer dans la salle de
revues érotiques (28 % des réponses) et d’un cadre plus
chaleureux ou mieux insonorisé (25 % des réponses).
Lorsque malgré tout, l’échec se produit, la conduite à
tenir ne varie guère selon les centres d’AMP et les méthodes lourdes restent exceptionnelles (tableau 2).
La dédramatisation est une constante dans tous les
centres. Cela se traduit souvent par une simple « pausecafé », un nouveau recueil en présence de la conjointe ou
Montpellier
Oui
Non
Non
Placebo
Non
Non
Lyon
Oui
Non
Oui
Rarement
Viagra®
Oui
Oui
Non
Non
Nîmes
Oui
Non
Rarement
Placebo
Spasfon®
Non
Non
Oui
Non
Oui
Très rarement
Non
Non
Non
Non
parfois une vidéo érotique. Bagnolet et Brest préconisent
d’emblée l’emploi du « stimulant » au moment de dédramatiser. Le recours au préservatif n’est pas proposé systématiquement si la conjointe est présente dans la salle de
prélèvement.
Pour 39 « pannes » sur 3 000 FIV à Brest, 9 ont été
résolues par la prise d’apomorphine et 28 ont subi une
congélation d’ovocytes. Soixante-huit ovocytes ont été
décongelés avec l’obtention de 13 embryons. Jusqu’à
présent, les 2 centres qui pratiquent la congélation d’ovocytes n’ont obtenu aucune grossesse.
Enfin, les ponctions épididymo-testiculaires sont très
rares car elles nécessitent une organisation lourde à mettre
en œuvre dans l’urgence.
En conclusion, on peut considérer l’échec de recueil
de sperme comme un événement rare, le plus souvent
d’origine psychogène, mais ne devant pas faire oublier
qu’il peut exister des causes anatomiques potentiellement
sévères. Certains signes d’alertes conduisent à proposer
une congélation de sperme préventive. La prévention
passe aussi par les conditions d’accueil et si l’échec se
produit, dédramatiser est pour certains centres la seule
méthode employée.
Références
1. Czyba J-C. Andrologie 1997 ; 7 : 407-11.
2. Saleh RA, et al. Fertil Steril 2003 ; 79 : 909-12.
3. Hammond KR, et al. Fertil Steril 1990 ; 53 : 337-40.
4. Kirsch-Noir F, et al. 98e Congrès Français d’Urologie, nov. 2004.
5. Jouannet P, et al. J Gyn Obst Biol Repr 1977 ; 6 : 55-64.
mt médecine de la reproduction, vol. 8, n° 1, janvier-février 2006