Monographies des onze groupes des industries culturelles
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Monographies des onze groupes des industries culturelles
Monographies des onze groupes des industries culturelles Les annexes qui suivent analysent chacun des groupes des industries culturelles choisis pour la présente étude. On peut y lire l’évolution et la composition actuelle du portefeuille d’activités de chacun de ces groupes comme les stratégies de fusions, d’acquisitions et d’alliances qu’ils mettent en œuvre. Elles s’organisent en deux parties : – la première autour des « sept géants » : AOL Time Warner, Bertelsmann, Disney, News Corp, Sony, Viacom, Vivendi Universal, – et la seconde autour de quatre groupes européens de taille moyenne : EMI, Lagardère, Pearson, Reed Elsevier. Chaque annexe compte une fiche d’identité présentant un groupe en quelques chiffres significatifs (extraits des rapports d’activité), son origine et son évolution, ses différentes activités et leur répartition, les opérations de fusions, d’acquisitions et d’alliances effectuées et enfin une synthèse de ses forces et faiblesses. 115 LES GRANDS GROUPES DES INDUSTRIES CULTURELLES Un premier groupe est ainsi distingué : il s’agit des « sept géants » : – AOL Time Warner, – Bertelsmann, – Disney, – News Corp, – Sony, – Viacom, – Vivendi Universal. 116 Annexes – Les sept géants 1.1. AOL Time Warner Le premier groupe de communication mondial 30,006 milliards d’euros* (Time Warner + AOL) 25,115 milliards d’euros (83,7 %) 2,474 milliards d’euros 8,2 % 80 000 Production audiovisuelle, diffusion télévisuelle, musique, presse magazine, édition, Internet Réseau câblé États-Unis Steve Case Chiffre d’affaires (1999) dont médias Revenu net Taux de marge nette (revenu net/CA) Employés Activités médias Activités hors-médias Pays d’origine P.-D.G . * 1 US dollar = 0,9337 euro (cours moyen 1999). Répartition du chiffre d’affaires en 1999 par activités Activité Production audiovisuelle Diffusion télévisuelle Édition/Presse Musique Internet Total médias Réseau câblé Total par zone géographique % du chiffre d’affaires 24,3 19,5 14,0 11,5 14,4 83,7 16,3 100,0 % du chiffre d’affaires États-Unis Reste du monde Total 75,0 25,0 100,0 Le groupe en 1998 et 1999 en en milliards d’euros Chiffre d’affaires Résultat net Taux de marge nette (résultat net/CA) Capitaux propres Rentabilité (résultat net/capitaux propres) Endettement à moyen/long terme Investissements (y compris croissance externe) 1999 1998 30,006 2,474 8,2 % 11,959 20,7 % 17,224 5,431 27,411 0,082 0,3 % 9,203 0,5 % 16,690 3,160 Source : Les grands groupes des industries culturelles (DEP, Ministère de la culture, 2002). 117 LES GRANDS GROUPES DES INDUSTRIES CULTURELLES Origine et évolution AOL Time Warner est né de la fusion, annoncée en janvier 2000, du premier fournisseur mondial d’accès à Internet (America On Line) et du numéro un des médias au monde (Time Warner). En janvier 2001, cette fusion par échange d’actions (où AOL domine avec la place de président-directeur général pour Steve Case et 55 % des parts de la nouvelle entité pour les actionnaires d’AOL) a été définitivement entérinée par la Federal Communications Commission après l’avoir été par la Federal Trade Commission et par les autorités antitrust européennes. Cette première méga-fusion des médias « purs » et de l’Internet représente un montant de 158 milliards d’euros. Et c’est donc AOL (12 500 employés et moins de 5 milliards de dollars de chiffre d’affaires) qui, dans les faits, a racheté Time Warner (68 000 employés et 27,3 milliards de dollars de chiffre d’affaires). Il est certain que si Time Warner avait attendu plus longtemps, après le krach boursier des valeurs technologiques observé au deuxième semestre 2000, le groupe de communication aurait vraisemblablement emporté le leadership de la fusion. AOL, né en 1985, est exclusivement positionné sur le segment de l’accès à Internet payant. Le parcours de Time Warner est, quant à lui, plus tumultueux. Le groupe est né en 1989 de la fusion des studios de production Warner Bros et du groupe de presse et d’édition Time Inc. (ces deux entités étant, chacune, nées en 1923). En 1996, Time Warner acquiert la compagnie audiovisuelle Turner Broadcasting System (propriétaire de CNN, de divers studios de production…) et devient ainsi le premier groupe de communication du monde présent à tous les stades de l’industrie des médias : production de contenus, distribution, diffusion télévisuelle et en ligne, et ce, pour tous les segments de marché : édition, presse, musique, cinéma, télévision. Les différentes activités médias La fusion entre AOL et Time Warner crée manifestement d’importantes synergies entre les deux groupes. À Time Warner, elle apporte une ouverture sur Internet (et donc un savoir-faire) et des moyens pour diffuser ses contenus (audiovisuels, édition/presse, musique) aux 26 millions d’abonnés d’AOL aux États-Unis et en Europe. De ce point de vue, le fait qu’AOL réussisse à maintenir une forte position, même si elle s’érode quelque peu en Europe, en proposant un service payant alors que d’autres opérateurs proposent des services totalement gratuits est plutôt rassurant pour Time Warner sur les compétences et le savoir-faire d’AOL dans la promotion des services payants. Pour AOL, la fusion représente un accès aux catalogues de contenus de Time Warner et à un réseau câblé (12 millions d’abonnés) compatible avec l’Internet à haut débit (indispensable pour le téléchargement efficient de films par exemple1). 1. AOL Time Warner est en effet le deuxième câblo-opérateur américain et dispose d’un réseau couvrant l’ensemble du pays. Le nombre d’abonnés se monte à 12,6 millions et le groupe est en passe d’achever la conversion de son 118 Annexes – Les sept géants Mais les synergies entre les deux groupes sont également d’ordre commercial : les chaînes de télévision, les journaux et les magazines de Time Warner peuvent promouvoir AOL sous formes de publicité alors qu’AOL peut faire exactement de même sur ses sites Internet et son portail. D’après les deux groupes, ces synergies n’ont même pas attendu la confirmation de la fusion pour se mettre en œuvre : des publicités vantant le magazine Time sur le site d’AOL auraient amené 500 000 nouveaux abonnés à Time au cours de l’année 2000. Production audiovisuelle La fusion de Time Warner et TBS a doté le groupe de plusieurs studios de production réputés, Warner Bros, Hanna Barbera (dessins animés), Castle Rock Entertainment, New Line Cinema, orientés tant sur les films cinématographiques que sur les programmes télévisés. Le catalogue de droits d’AOL Time Warner se monte ainsi à 5 700 films, 32 000 épisodes de séries télévisées et 13 500 dessins animés. Dans un souci de réduction des coûts de production, le groupe a réduit le nombre annuel de films produits à 20-25, au lieu de 25-30 auparavant, et s’appuie de plus en plus souvent sur des cofinancements afin de réduire les risques. Time Warner assure lui-même la diffusion des vidéocassettes et des dévédéroms issus de ses programmes par l’intermédiaire de sa filiale Warner Home Video. Le groupe possède également un parc de salles de cinéma dans sept pays (plus de 1 000 écrans). Enfin, cette division incorpore également les ventes des produits dérivés assurées par les 180 boutiques à l’enseigne Warner Bros Studio disséminées dans 15 pays2. Au total, un peu plus d’un tiers du chiffre d’affaires de cette division est réalisé hors des États-Unis. Diffusion télévisuelle Le réseau de chaînes pour le basic cable proposé par AOL/Time Warner est l’un des plus importants aux États-Unis (20 % de l’audience et 30 % des recettes publicitaires). Il regroupe les chaînes : – TBS Superstation (78 millions d’abonnés, 1re chaîne du câble aux États-Unis pour les plus de 18 ans), – TNT (77 millions d’abonnés), réseau à la fibre optique et au numérique (85 % du réseau était converti fin 1999 et les travaux devaient être achevés à la fin l’année 2000). Le réseau d’AOL Time Warner est maintenant en mesure de soutenir, en termes de performances et de capacités de transmission, les transmissions satellitaires et les services proposés par les opérateurs de télécommunication et donc de proposer l’Internet à haut débit. Le groupe possède avec Road Runner un procédé de transmission en ligne à haut débit (50 fois plus rapide qu’un modem standard). Fin 1999, Road Runner avait 330 000 abonnés sur le réseau câble de Time Warner et espérait en doubler le nombre à fin 2000. Une telle amélioration du réseau était indispensable pour pouvoir proposer aux abonnés, via AOL, des services de distribution électronique de contenus, de télévision interactive, etc. 2. Compte tenu des informations disponibles, il a été impossible de dissocier, comme cela a pu être fait pour Disney, l’activité produits dérivés des activités médias au sens strict. 119 LES GRANDS GROUPES DES INDUSTRIES CULTURELLES – Cartoon Network (60 millions d’abonnés aux États-Unis et 1re chaîne pour enfants en Grande-Bretagne, à Taiwan, en Argentine, en Australie, au Mexique), – Turner Classic Movies (35 millions d’abonnés aux États-Unis et également diffusée en Europe), – CNN (1re chaîne d’information aux États-Unis), – CNN International (touche 151 millions de foyers dans 212 pays et est, maintenant, déclinée en espagnol et en turc). AOL Time Warner est également propriétaire de Home Box Office (HBO), la première chaîne premium (payante) aux États-Unis. Il convient également de noter que, courant 2000, le groupe escomptait lancer à grande échelle un service de vidéo à la demande (téléchargement de films sans ordinateur !) grâce à la conversion de son réseau câblé à fibre optique et au numérique. Édition/Presse Les activités du groupe dans ce domaine sont du ressort de Time, Inc. Le groupe est un des principaux éditeurs de magazines aux États-Unis : il en possède 32, dont Time, People, Fortune, Life, Money, Sports Illustrated ou encore Entertainment Weekly. Time, Inc. perçoit plus de 20 % de toutes les recettes publicitaires de la presse magazine aux États-Unis. En l’an 2000, le groupe a lancé cinq magazines supplémentaires (Real Simple, Sports Illustrated Women, eCompany Now, Time Large Print, In Style Australia). De plus, au deuxième semestre 2000, il a racheté au groupe Tribune l’ensemble des magazines de Times Mirror (coût de l’opération 475 millions de dollars). Time, Inc. édite également des ouvrages sous plusieurs étiquettes : Book-of-theMonth Club, Little Brown, Warner Books, Time Life, Sunset Books, Oxmoor House, Leisure Arts. Musique Warner Music Group (WMG) est la quatrième des cinq majors de l’industrie musicale, derrière Universal, EMI, Sony Music et devant Bertelsmann Music Group. Elle regroupe différents labels, dont Warner Music International, Atlantic, Elektra, Rhino, London-Sire, Warner Bros Records…, et réalise environ la moitié de son chiffre d’affaires hors des États-Unis. Si son catalogue de droits excède le million de titres, Warner Music Group produit également des supports (leader mondial de la production de dévédéroms). En janvier 2000, juste après l’annonce de la fusion avec AOL, Time Warner a annoncé qu’il fusionnait avec EMI, la major britannique, pour constituer le numéro un de la musique mondiale avec environ 27 % du marché. L’objectif clairement annoncé était de pouvoir réaliser des économies d’échelles, notamment dans la distribution (250 millions de livres sterling d’économies annuelles 120 Annexes – Les sept géants sur les coûts de fonctionnement), mais surtout de prendre le contrôle d’un catalogue de droits de deux millions de titres. Grâce au savoir-faire et à la clientèle d’AOL et au réseau câblé de Time Warner, le nouveau groupe se serait trouvé en position de force sur le marché de la distribution en ligne (estimé par Forrester Research à 10 % du marché mondial de la musique à l’horizon 2004). C’est justement ce que les autorités antitrust, tant américaines qu’européennes, s’apprêtaient à reprocher à la nouvelle entité : qu’est-ce qui aurait, par exemple, empêché AOL Time Warner de rendre impossible la lecture des œuvres numérisées de son catalogue par un autre logiciel que celui contrôlé par AOL ? Finalement, en octobre 2000, après avoir envisagé des cessions d’actifs pour mieux faire accepter la fusion (EMI aurait cédé Virgin Records et WMG se serait séparé de Chappel Music), Time Warner a décidé d’abandonner ce projet qui pouvait mettre en danger la fusion en cours avec AOL, qui apparaissait manifestement beaucoup plus stratégique. Internet AOL est le principal fournisseur d’accès à Internet aux États-Unis (55,5 % des utilisateurs américains début 2000). Le groupe contrôle également Compuserve. En Europe, où il doit faire face à de nombreux concurrents proposant des accès à Internet gratuits, AOL n’arrive qu’au sixième rang. Néanmoins, le groupe dispose d’environ 30 millions d’abonnés (si l’on ajoute les 2,2 millions d’abonnés de Compuserve) et constitue l’ensemble de sites le plus visité au monde (le portail AOL.com, le site de diffusion musicale Spinner Networks, ICQ, Movie Phone, etc.). AOL contrôle également Netscape (logiciel de navigation sur Internet, portail) depuis son rachat finalisé en mars 1999 (pour un prix de 4,2 milliards de dollars). Même si Time Warner avait multiplié récemment ses incursions dans les nouveaux médias, il n’était pas parvenu à se doter d’une position solide. Par exemple, le site pathfinder.com, créé pour diffuser en ligne les contenus du groupe, a été un échec. En revanche, ses 50 sites Internet associés aux publications de Time ou à ses chaînes de télévision (CNN a développé onze sites dans le monde) reçoivent environ 15 millions de visiteurs mensuels. Enfin, Time Warner a fourni un effort important en ce qui concerne la numérisation de ses contenus. AOL Time Warner se présente aujourd’hui comme le fournisseur d’accès à Internet et le câblo-opérateur le plus richement doté en contenus éditoriaux, musicaux et audiovisuels. Principales alliances La fusion AOL/Time Warner n’a pas été sans effet sur le réseau d’alliances qu’avaient tissé les deux acteurs avant leur rapprochement, et, plus largement, sur les orientations stratégiques de la politique d’alliances qu’ils avaient eu l’habitude de mener. 121 LES GRANDS GROUPES DES INDUSTRIES CULTURELLES Outre l’abandon du rapprochement d’EMI, Time Warner a été contraint par les autorités antitrust américaines d’ouvrir son réseau câblé à ses concurrents. Ce que Time Warner faisait d’ailleurs déjà avec Disney dans le cadre d’un accord spécifique. Quant à AOL, il a dû rompre, à la demande de la Commission européenne, ses relations avec Bertelsmann qui détenait 50 % d’AOL Europe. La Commission craignait un abus de position dominante dans l’industrie du disque avec une alliance AOL/Time Warner/BMG (de même qu’avec la fusion AOL/Time Warner/EMI). Le recours à l’alliance est un mode privilégié de développement pour Time Warner. L’objectif est parfois de réduire son endettement en ouvrant son capital de certaines de ses filiales. Ainsi, la plupart des intérêts de Time Warner dans la production audiovisuelle, la diffusion télévisuelle et le réseau câblé sont, en réalité, regroupés sous l’entité Time Warner Entertainment (TWE) qui n’est détenue qu’à 74,49 % par Time Warner. Le reste est entre les mains de MediaOne Group. D’autres alliances ont pour vocation d’avoir accès à un savoir-faire ou à des compétences spécifiques. C’est le cas des alliances dans Internet que Time Warner a nouées ces dernières années par l’intermédiaire de sa filiale CNN Interactive avec WebMD/Healtheon, IDG.net, InterVU, Leisureplanet, etc. Il en est de même pour le partenariat avec Toshiba concernant la conception et la production de DVD ainsi que pour l’alliance de Sun et de Netscape (AOL) sur la conception de solutions de commerce électronique clés en main pour tout type de clients. Les alliances conclues par Time Warner assurent également des débouchés à l’étranger pour les contenus audiovisuels : contrats d’approvisionnement de long terme (les plus récents ont été signés avec des chaînes allemandes, polonaises et avec la chaîne britannique Channel 4) ; joint-ventures avec des partenaires locaux pour développer HBO en Amérique latine, en Asie et en Europe centrale. De même, la plupart des filiales étrangères d’AOL sont détenues sous forme de jointventures, le plus souvent avec des partenaires locaux. Enfin, AOL est en pourparlers avec l’opérateur de téléphonie mobile japonais NTT DoCoMo pour faire d’AOL Japon le relais privilégié entre le téléphone mobile et Internet. L’objectif des alliances peut également être de partager des coûts de développement ou des risques financiers : alliance avec Bertelsmann pour produire des séries télévisées et des téléfilms en langue allemande ; joint-venture avec le même groupe pour fusionner leurs deux clubs de livres aux États-Unis (Booksof-the-Month Club et Double Day Club). Il en est vraisemblablement de même pour une joint-venture établie dans l’industrie musicale (Columbia House Company, un important distributeur dans le nord des États-Unis contrôlé à parité avec Sony Music). Enfin, certaines alliances conclues avec des labels mineurs dans l’industrie du disque, mais aussi certaines nouées avec des start-up d’Internet (un fonds de 500 millions de dollars a été créé en ce sens par Time Warner en décembre 1999), visent manifestement à externaliser les efforts de recherche de talents ou 122 Annexes – Les sept géants de recherche et développement, les réussites pouvant toujours être rapatriées dans le giron du groupe une fois le succès assuré. AOL Time Warner apporte alors, en contrepartie, des moyens financiers à ces petites structures. Forces et faiblesses Forces Faiblesses • Le leadership mondial de l’industrie des médias. • Quelles capacités à digérer cette nouvelle fusion, après celle de Time Warner et de TBS en 1996 ? • Une intégration verticale unique avec une place de leader mondial à tous les stades : production de contenus audiovisuels, musicaux et éditoriaux, distribution (réseau câblé de Time Warner), diffusion télévisuelle et Internet. • Les coûts de la réorganisation nécessaire des deux groupes : 5 milliards de dollars en 2001. De plus, les dotations aux amortissements des survaleurs (différence entre le prix payé pour le rachat et la valeur comptable de l’entreprise rachetée) vont se monter à 7,6 milliards de dollars par an pendant 25 ans. • Un potentiel inégalé dans la distribution électronique. • La dette à long terme de Time Warner représentait les 2/3 de son chiffre d’affaires en 1999. 123 LES GRANDS GROUPES DES INDUSTRIES CULTURELLES 1.2. Bertelsmann Numéro un mondial de l’édition/presse Chiffre d’affaires (1999*) dont médias Résultat net Taux de marge nette (résultat net/CA) Employés Activités médias 14,832 milliards d’euros** 12,962 milliards d’euros (87,4 %) 0,910 milliard d’euros 6,1 % 76 000 Édition, presse, production cinéma et télévisuelle, diffusion télévisuelle, musique, multimédia/Internet Imprimerie Allemagne Thomas Middelhoff Activité hors-médias Pays d’origine Président du directoire * Exercice clos le 15 juin 2000. ** 1 deutsche mark = 1,95583 euro. Répartition du chiffre d’affaires en 1999 par activités Activité Production audiovisuelle Édition Presse Presse professionnelle Musique Diffusion télévisuelle* Production audiovisuelle Multimédia Total médias Imprimerie Total par zone géographique % du chiffre d’affaires 24,3 27,7 17,9 3,0 27,1 8,5 1,6 1,6 87,4 12,6 100,0 % du chiffre d’affaires Allemagne Autre, Europe États-Unis Reste du monde Total 30,5 28,6 33,8 7,1 100,0 * Y compris radio Le groupe en 1998 et 1999 en milliards d’euros Chiffre d’affaires Résultat net Taux de marge nette (résultat net / CA) Capitaux propres Rentabilité (résultat net / capitaux propres) Endettement à moyen/long terme Investissements (y compris croissance externe) 1999 1998 14,832 0,465 3,1 % 2,734 17,0 % 1,892 2,398 13,152 0,574 4,4 % 2,352 24,4 % 0,350 0,717 Source : Les grands groupes des industries culturelles (DEP, Ministère de la culture, 2002). 124 Annexes – Les sept géants Origine et évolution Fondée en 1835 en Allemagne, la société Bertelsmann était à l’origine un pur éditeur spécialisé dans l’édition religieuse. L’entreprise est restée focalisée sur ce métier de base et sur le marché allemand jusque dans les années 1960, après avoir notamment inventé le concept du « club de livres ». À partir de cette époque, la société a entamé un double mouvement stratégique d’internationalisation et de diversification. En prenant le contrôle de la société allemande UFA en 1964, Bertelsmann a pénétré le marché de la production cinématographique. Puis, en 1969, ce fut au tour du secteur de la presse et, enfin, dans les années 1980, Bertelsmann a pris position sur les marchés de la musique et de l’audiovisuel. Soulignons cependant que, en ce qui concerne ce dernier secteur, même si la première prise de participation de Bertelsmann dans RTL date de 1984, ce n’est que treize ans plus tard, avec la fusion des activités d’UFA et de la CLT (Compagnie Luxembourgeoise de Télévision), que Bertelsmann a acquis une solide position sur le marché télévisuel et radiophonique. Aujourd’hui, Bertelsmann apparaît comme un groupe au portefeuille bien équilibré tant géographiquement (il est présent dans 54 pays et réalise 72 % de son chiffre d’affaires hors d’Allemagne) qu’en termes d’activités. Néanmoins, cet apparent équilibre cache en réalité des situations plus délicates dans certains segments, notamment dans l’audiovisuel (voir supra). . Le contrôle du capital de Bertelsmann reste aujourd’hui essentiellement familial. Il l’était même complètement jusqu’en février 2001 lorsque le groupe a permis à Albert Frère (Groupe Bruxelles Lambert) d’entrer à hauteur de 25,1 % dans son capital (voir supra). Cette absence des marchés boursiers constitue simultanément un atout et un handicap certains. D’une part, cela met Bertelsmann relativement à l’abri de toute prise de contrôle hostile et lui évite d’avoir à gérer sa politique de distribution de dividendes dans une logique de court terme. Mais, d’autre part, la structure du capital de Bertelsmann l’a empêché de 1995 à 2000 de participer aussi activement que les dirigeants du groupe l’auraient souhaité aux manœuvres de fusions et d’acquisitions qui ont souvent été financées par des échanges de titres. Les différentes activités médias Édition C’est le métier de base du groupe. Il en est le numéro un mondial et réalise les trois quarts de son activité à l’international. Bertelsmann dispose notamment d’une position très puissante aux États-Unis, fondée sur une politique de croissance externe soutenue et ambitieuse : Bantam Books (1977), Double Day (1984) et Random House (1998). 125 LES GRANDS GROUPES DES INDUSTRIES CULTURELLES Bertelsmann réalise 53 % de son chiffre d’affaires dans ce secteur, via ses clubs de livres. Il possède par exemple 50 % de France Loisirs3 et son emprise s’étend depuis quelques années sur les marchés asiatiques : la Chine en 1997, la Corée du Sud en 1999. Deux cinquièmes du chiffre d’affaires sont réalisés dans l’édition grand public avec une absence quasi totale du marché du livre scolaire. Enfin, 5 % des ventes du groupe sont fournies par les activités de marketing direct (encyclopédies en cédérom ou en ligne…). Le résultat net de l’activité édition était en 1999 de : + 237 millions de deutsche marks. Presse et presse professionnelle Via sa filiale Gruner + Jahr, Bertelsmann est le numéro un de la presse grand public en Europe. Le groupe possède ou contrôle 78 magazines (Capital, Géo, National Geographic, etc.) et 16 quotidiens (en Allemagne et Europe de l’Est). Le développement des ventes en ligne des magazines et journaux est un axe privilégié par le groupe. D’autre part, en janvier 2000, Bertelsmann s’est allié à Pearson (Royaume-Uni) pour lancer une édition allemande du Financial Times (coût global de l’opération 87 millions d’euros). Le pôle presse professionnelle a été autonomisé à la suite de l’acquisition de l’éditeur scientifique allemand Springer Verlag en 1999. Cette acquisition a permis à Bertelsmann de s’approcher de la taille critique dans ce segment stratégique – car beaucoup moins dépendant de la conjoncture sur le marché publicitaire que la presse grand public (le financement est essentiellement assuré par des abonnements) – et a sans aucun doute contribué à faire échouer le rapprochement envisagé début 1999 avec Havas dans ce domaine (voir supra). Les résultats nets des activités de presse et de presse professionnelle se montaient respectivement en 1999 à + 630 millions et à + 37 millions de deutsche marks. Musique Assurée par la filiale BMG, l’activité musicale de Bertelsmann place le groupe au cinquième rang mondial. Plus précisément BMG, avec ses 200 labels, est considéré comme la dernière des cinq grandes majors qui contrôlent 80 % de l’industrie phonographique mondiale. L’activité du groupe allemand dans le domaine est particulièrement internationalisée puisque plus des trois quarts du chiffre d’affaires sont réalisés à l’étranger, dont 51 % aux États-Unis. Soulignons que Bertelsmann est intégré en amont de la production musicale – il produit, via sa filiale Sonopress, des supports (cédéroms, dévédéroms, etc.) – mais également en aval. Outre le contrôle de RTL Group (plus de 40 stations de radios et chaînes 3. Les 50 % restant étaient détenus jusqu’en mars 2001 par Vivendi Universal Publishing qui a décidé de les céder à Bertelsmann. 126 Annexes – Les sept géants de télévision : Fun Radio, M6, etc.), Bertelsmann apparaît comme un précurseur de la distribution de musique en ligne. Le groupe distribue ses disques compacts et singles par l’intermédiaire de ses filiales de commerce électronique (BOL, Barnesandnoble.com, CDNow). Enfin, pour satisfaire la volonté affichée par le groupe de devenir le leader mondial du marché musical, Bertelsmann était, en février 2001, toujours en négociation pour fusionner BMG avec la société britannique EMI (voir supra). Le résultat net de BMG a été de + 335 millions de deutsche marks en 1999. Audiovisuel Bertelsmann n’est significativement présent dans le domaine de l’audiovisuel que depuis 1997, avec la fusion de sa filiale UFA et de la CLT (il possédait 50 % de la nouvelle entité), mais il est d’ores et déjà le premier groupe européen dans le secteur. En avril 2000, la fusion de CLT-UFA et de Pearson TV a donné naissance à RTL Group dont Bertelsmann possède aujourd’hui 67 %. RTL Group c’est, aujourd’hui, 22 chaînes de télévision (RTL, 42,8 % de M6, Vox, etc.) et 18 stations de radio, le tout dans 11 pays. Son implantation est cependant assez hétérogène, tant d’un point de vue géographique qu’en termes d’activité. L’activité audiovisuelle de Bertelsmann n’a, contrairement aux activités édition ou musique, qu’une dimension européenne (presque deux tiers du chiffre d’affaires sont réalisés en Allemagne, 16 % en France et 12 % aux Pays-Bas). Les trois quarts de son chiffre d’affaires sont dus à son activité télévision, 8 % à la radio et 16 % à l’activité production et gestion des droits. Une fois encore, l’intégration verticale du groupe est assez significative. Outre l’activité de diffusion, Bertelsmann est : – le 1er producteur allemand et le 2e producteur mondial de programmes audiovisuels (environ 1 000 heures/an pour CLT-UFA plus la production de Pearson TV), – un des leaders européens de droits de fiction (17 500 heures de droits en stock pour CLT-UFA plus 10 000 heures pour Pearson TV), – le leader européen des droits sportifs. En revanche, Bertelsmann a abandonné, en se retirant de la chaîne Première en mars 1999 (ses parts ont été revendues à Kirch), le marché de la télévision payante par satellite. Même si, via M6, le groupe possède 25 % du bouquet numérique français TPS, Bertelsmann se focalise aujourd’hui sur le seul segment de la télévision commerciale financée par la publicité. En 1999, le résultat net de la CLT-UFA se montait à + 748 millions de deutsche marks. 127 LES GRANDS GROUPES DES INDUSTRIES CULTURELLES Multimédia Même si elle reste, dans l’absolu, toujours mineure, l’activité Multimédia du groupe connaît une forte croissance (le chiffre d’affaires a augmenté de 57 % en 1999 par rapport à l’exercice précédent). L’objectif affiché par le groupe est d’ailleurs de multiplier par 3,5 ce chiffre d’affaires entre 1999 et 2002. Aujourd’hui Bertelsmann est présent sur Internet au travers de plus de 75 sites. Il a été précurseur de l’implantation d’AOL en Europe, puisqu’il possédait 50 % d’AOL Europe et d’AOL France et 45 % d’AOL Deutschland. Suite à la fusion AOL/Time Warner, le groupe allemand s’est désengagé de ces partenariats en mars 2000. En revanche, il dispose toujours de participation dans Lycos Europe (31,1 %), dans CDNow (acheté en juillet 2000), de 30 % de Barnesandnoble.com (2e distributeur en ligne de produits culturels – essentiellement livres – aux ÉtatsUnis) et a fondé Books On Line (BOL) qui occupe la deuxième place européenne sur le même segment de marché. BOL s’est ouvert récemment aux marchés asiatiques (Japon en 2000, Corée du Sud et Chine fin 2001) et une alliance a été conclue en mai 2000 avec Terra Lycos pour instaurer une joint-venture afin de conquérir les marchés de langues espagnole et portugaise. Enfin, une fusion de Barnesandnoble.com et BOL a été plusieurs fois évoquée au cours de l’année 2001 : elle pourrait conduire à la constitution du premier grand rival pour le leader du marché Amazon.com. Le résultat net de l’activité multimédia se montait à + 415 millions de deutsche marks en 1999. Principales alliances Dans les domaines de l’édition, de la presse grand public et de la presse professionnelle, la croissance de Bertelsmann passe généralement par des acquisitions sélectives, qui, sans représenter des opérations majeures, n’en sont pas moins significatives : Random House (un des premiers éditeurs américains) en 1998, Springer Verlag, un des premiers éditeurs mondiaux de la presse professionnelle en 1999. Soulignons que dans le domaine de la presse professionnelle, la fusion des activités de Bertelsmann et d’Havas (Vivendi), dans une holding détenue à parité, a été envisagée début 1999. Les synergies étaient importantes puisque Bertelsmann avait la maîtrise des techniques de numérisation des fonds éditoriaux (étape préalable à la diffusion en ligne) et Havas apportait, quant à lui, la richesse de ses propres fonds. Cette opération, qui aurait conduit à la formation du troisième groupe européen dans ce domaine (derrière Reed Elsevier et Wolters Kluwer), a échoué principalement en raison du rachat de Springer par Bertelsmann. Cette acquisition a rendu le rapprochement beaucoup moins stratégique (en termes de taille critique) pour le groupe allemand que pour Havas. Dans ces conditions, la volonté d’Havas de garder la mainmise sur le management de la nouvelle entité n’apparaissait plus acceptable aux yeux de Bertelsmann. 128 Annexes – Les sept géants Dans l’audiovisuel, après la fusion entre la CLT et UFA, la filiale de Bertelsmann, le groupe a surtout cherché à consolider sa position par une fusion (d’envergure moyenne), des alliances et un renforcement de son contrôle sur ses filiales. En avril 2000, la filiale à 50 % de Bertelsmann, CLT-UFA, a tout d’abord fusionné avec Pearson TV pour former RTL Group (avec une répartition du capital : Bertelsmann 37 %, Groupe Bruxelles-Lambert 30 %, Pearson 22 %, Public 11 %). Suite à la cession des parts de GBL à Bertelsmann en février 2001, ce dernier en contrôle désormais 67 %. Dans la télévision financée par la publicité, Bertelsmann envisage encore de renforcer sa position. Le groupe ne cache pas son intention de vouloir prendre le contrôle intégral de M6 (même si, légalement, il ne peut en détenir plus de 49,94 %). Il envisage également de renforcer sa coopération avec Canal Plus pour accroître son potentiel de droits cinéma et de droits sportifs. Soulignons que les deux sociétés disposent déjà d’une société commune d’achats de programmes et qu’elles coopèrent au sein de la chaîne allemande Vox, dont Canal Plus possède 24,9 %. Cependant la collaboration entre Canal Plus (et sa maison-mère Vivendi Universal) et Bertelsmann aurait pu être plus intense si ce dernier avait laissé Vivendi racheter les parts du Groupe Bruxelles-Lambert dans RTL Group en février 2001. Bertelsmann cherche également à sécuriser ses approvisionnements en programmes via des accords de long terme avec les majors hollywoodiennes : janvier 1999, accord avec Disney pour fournir des programmes aux chaînes néerlandaises du groupe ; janvier 2000, accord avec News Corp (Twentieth Century Fox) pour approvisionner en programmes les chaînes allemandes du groupe durant 5 ans. Enfin, dans sa logique d’extension de son réseau de diffusion, Bertelsmann est entré, en 2000, à hauteur de 11 % du capital de la chaîne espagnole Antena 3. Dans le secteur musical, Bertelsmann affichait en 2001 la volonté de se rapprocher du groupe britannique EMI afin de constituer le leader mondial dans le domaine. Le projet consistait en la fusion de BMG (5e mondial) et de EMI (3e mondial) dans une nouvelle entité qui serait le numéro un du secteur. Les négociations ont été cependant excessivement compliquées. Ce rapprochement avait tout d’abord été abandonné puisqu’EMI avait finalement choisi de se rapprocher de Time Warner. Cette dernière opération menaçant d’être refusée par les autorités antitrust américaines dans le cadre de la fusion AOL/Time Warner, EMI a retrouvé son indépendance et était à nouveau disponible pour une alliance. Entre temps, le résultat net semestriel d’EMI à fin 2000 s’est avéré négatif, ce qui incita Bertelsmann à revoir le partage du capital dans la nouvelle entité. De plus, la réussite de cette opération nécessite de parvenir à convaincre les autorités antitrust de son bien fondé et de l’absence de risque d’abus de position 4. Une telle opération semble d’ailleurs soulever moins de problèmes que le rapprochement Vivendi-Universal et la place dévolue à Canal Plus dans le nouvel ensemble. Dans le cas de M6, l’acquéreur serait européen et non nordaméricain ! 129 LES GRANDS GROUPES DES INDUSTRIES CULTURELLES dominante. Aussi, face à l’ensemble de ces difficultés, la fusion BertelsmannEMI a été abandonnée. Une telle fusion cependant, aurait été cohérente avec la politique adoptée par Bertelsmann sur le marché de la diffusion en ligne. Le groupe allemand a en effet, l’un des premiers, rompu avec l’hostilité des majors de la musique pour le téléchargement des œuvres musicales sur Internet en concluant un accord avec la société Napster. Dès l’été 2001, il est envisagé que Napster diffuse auprès de ses 64 millions de «fidèles » des propositions d’abonnement permettant de télécharger les œuvres musicales du catalogue BMG (voire BMG + EMI). Cependant, la décision de la justice américaine d’interdire à Napster la distribution musicale gratuite en février 2001 fragilise ce projet : durant la période fermeture de Napster pour mise en conformité avec la loi, ses 64 millions d’utilisateurs se sont tournés vers d’autres fournisseurs (Kazaa, Morpheus, Gnutella, etc.). Malgré les 85 millions de dollars investis par Bertelsmann depuis novembre 2000, Napster est au printemps 2002 au bord du dépôt de bilan. D’autant qu’aujourd’hui, les deux projets de musique en ligne pilotés par les majors du disque entrent progressivement en service : Music Net (EMI, Warner Music et BMG en coopération avec Real Networks) et Press Play, initialement baptisé Duet (Vivendi Universal et Sony alliés à Microsoft). Dans le multimédia, la stratégie de Bertelsmann s’appuie essentiellement, comme l’illustre l’exemple de Napster, sur la constitution d’alliances. Celles-ci permettent de profiter du savoir-faire du partenaire tout en limitant les risques (par rapport à une acquisition) sur un marché au potentiel très incertain et où les facteurs clés de succès sont également très mal connus ex ante. Une alliance réussie peut cependant conduire à une intégration plus poussée par la suite. Bertelsmann était entré sur le marché d’Internet dès 1996 avec une alliance avec America On Line (AOL). Les compétences et le savoir-faire d’AOL – dont ne disposait pas Bertelsmann – ont ensuite permis de lancer avec succès, sous forme de joint-ventures AOL France et AOL Deutschland. Même si, comme nous l’avons souligné, ces partenariats ont été remis en cause par la fusion AOL/Time Warner (les cessions des parts ont néanmoins généré un cash de 7,5 milliards d’euros), cette stratégie a été poursuivie par la suite : – en octobre 1998, Bertelsmann est entré dans le capital de Barnesandnoble.com à hauteur de 50 % (20 % ont ensuite été remis sur le marché boursier pour générer des liquidités) ; – en janvier 1999, Bertelsmann s’est allié à Havas (50/50) pour lancer la filiale française de Books on Line (BOL) ; – en octobre 1999, le groupe a pris le contrôle d’une start-up spécialisée sur la comparaison des prix sur Internet ; – en décembre 1999, alliance de BOL France et de Muze, MCM (Lagardère), RFI Musique et Technikart pour vendre des cédéroms via Internet (et non plus seulement des livres) ; 130 Annexes – Les sept géants – cette même année, une joint-venture, GetMusic, a été créée entre BMG et Universal pour les ventes en ligne de cédéroms. Cette opération était vue, en partie, comme un prélude à un rapprochement plus important (qui n’a pas eu lieu puisque c’est Vivendi qui a racheté Universal5) ; – en juillet 2000, Bertelsmann a pris le contrôle de CDNow (ventes en ligne de disques compacts) pour un montant de 117 millions de dollars. Un élément important qui ressort de cette analyse des opérations de croissance externe réside dans les difficultés rencontrées à nouer des relations d’envergure avec les autres acteurs du secteur. Certes, Bertelsmann a toujours annoncé préférer se développer en toute indépendance. Mais cette volonté d’indépendance semble, aujourd’hui, plus contrainte que désirée par les dirigeants du groupe et tient à la structure particulière du capital de Bertelsmann, qui n’est pas introduit en bourse et dont l’actionnariat est essentiellement familial, à l’exception des parts détenues par Albert Frère (Groupe Bruxelles-Lambert) depuis février 20016. Aujourd’hui, la politique de croissance externe du groupe est fortement contrainte par cet actionnariat familial et l’empêche de participer aussi activement que ses dirigeants semblent le souhaiter au processus de recomposition du paysage mondial des médias. Si la prise de contrôle de RTL Group a été effectivement financée par un échange d’actions (ce qui a été le plus souvent le cas dans les grandes opérations récentes), d’autres occasions semblent avoir été manquées par Bertelsmann : – avant de fusionner avec Time Warner, AOL avait pensé à Bertelsmann (avec lequel il coopérait en Europe) mais l’actionnariat de Bertelsmann était hostile à ce rapprochement (il n’en voyait pas l’intérêt stratégique et n’acceptait pas de ne détenir que 30 % du nouvel ensemble) ; – comme nous l’avons souligné, le rapprochement BMG/Universal a échoué, en partie, parce que Vivendi pouvait offrir une opération plus complète à Seagram ; – même si l’échec des deux rapprochements possibles entre Havas et Bertelsmann (presse professionnelle, audiovisuel) ont plutôt été le fait du groupe allemand, aujourd’hui la taille atteinte par Vivendi Universal semble rendre peu probable un rapprochement d’envergure dans l’avenir. 5. D’ailleurs en mars 2001, Bertelsmann a annoncé qu’il envisageait de revendre ses parts de GetMusic à Vivendi Universal. 6. Lors de la prise de contrôle de RTL Group par Bertelsmann, Albert Frère a cédé ses 30 % détenus dans RTL Group contre des parts dans Bertelsmann. Aujourd’hui, le capital de ce dernier est réparti entre la Fondation Bertelsmann (57,6 %), la famille du fondateur de Bertelsmann (famille Mohn, 17,1 %), et le Groupe Bruxelles-Lambert (25,1 %). 131 LES GRANDS GROUPES DES INDUSTRIES CULTURELLES Forces et faiblesses Forces Faiblesses • Taille critique mondiale dans l’industrie des médias (numéro un européen, numéro trois mondial). • Position trop centrée sur l’Europe, et même l’Allemagne, dans l’audiovisuel. • Position forte dans l’édition, la presse et le multimédia. • Absence de la télévision numérique. • Structure du capital qui représente un handicap pour les opérations de croissance externe d’envergure. • Compétences fortes, notamment via des alliances, en matière de numérisation et de commerce électronique. • Intégration verticale poussée avec des positions moyennes/fortes en amont (catalogues de droits éditoriaux, musicaux et audiovisuels) et en aval (diffusion TV, Internet). • Ressources pour procéder à des acquisitions (trésor de guerre de 4,57 milliards d’euros). 132 Annexes – Les sept géants 1.3. Disney Chiffre d’affaires (1999) dont médias Résultat net Taux de marge nette (résultat net/CA) Employés Activités médias 21,850 milliards d’euros* 16,149 milliards d’euros (73,9 %) 1,277 milliard d’euros 5,8 % 100 000 Production cinéma et télévisuelle, diffusion télévisuelle, musique, édition et produits dérivés, multimédia/Internet Parcs à thèmes, hôtellerie, croisières États-Unis Michael Eisner Activités hors-médias Pays d’origine P.-D.G. * 1 US dollar = 0,9337 euro (cours moyen 1999). Répartition du chiffre d’affaires en 1999 par activités Activité par zone géographique % du chiffre d’affaires Diffusion télévisuelle et radio Production audiovisuelle (et musicale) Produits dérivés (édition, programmes audiovisuels et logiciels informatiques ludiques ou éducatifs*) Internet et marketing direct Total médias Parcs à thèmes et loisirs Total 32,1 28,0 % du chiffre d’affaires États-Unis États-Unis export Europe Reste du monde Total 12,9 0,9 73,9 26,1 100,0 78,8 4,5 9,6 7,1 100,0 * L’activité médias de Disney est surestimée dans notre calcul puisque les produits dérivés incorporent également les ventes de figurines, jouets, etc., dans les boutiques Disney. Le groupe en 1998 et 1999 en milliards d’euros Chiffre d’affaires Résultat net Taux de marge nette (résultat net/CA) Capitaux propres Rentabilité (résultat net/capitaux propres) Endettement à moyen/long terme Investissements (y compris croissance externe) 1999 1998 21,850 1,277 5,8 % 19,584 6,5 % 8,663 4,958 21,453 1,765 8,2 % 18,103 9,7 % 8,928 5,289 Source : Les grands groupes des industries culturelles (DEP, Ministère de la culture, 2002). 133 LES GRANDS GROUPES DES INDUSTRIES CULTURELLES Origine et évolution Fondée en 1923, Disney est l’une des plus anciennes entreprise de médias au monde. À partir de son métier de base, la réalisation de longs métrages de dessins animés, la firme a progressivement opéré une diversification. Tout d’abord dans les loisirs, avec la création de parcs d’attraction dans les années 1960 aux États-Unis (puis en Asie vingt ans plus tard et enfin en Europe dans les années 1990). En 1983, Disney s’est intégré en aval de son métier de base en créant sa propre chaîne de télévision Disney Channel (aux États-Unis puis en GrandeBretagne, en Allemagne, à Taiwan, en France…). Une étape supplémentaire a été franchie en 1995 avec le rachat de Capital Cities/ABC, le premier network (réseau hertzien) américain pour un coût de 19 milliards de dollars, ce qui à l’époque était considéré comme une opération de très grande envergure ! Aujourd’hui, Disney réalise environ 60 % de son chiffre d’affaires avec ses activités audiovisuelle (télévision + cinéma) et musicale (mais sa présence y est beaucoup moins prononcée que pour la plupart des sept géants) ; un peu plus de 10 % avec ses produits dérivés (parmi lesquels le chiffre d’affaires lié à l’édition et aux ventes de programmes audiovisuels et logiciels informatiques ludiques ou éducatifs est difficile à isoler), et moins de 1 % avec ses activités Internet (qui ont d’ailleurs été interrompues au début de l’année 2001). Le solde, soit un peu plus d’un quart de ses ventes, provient de ses activités de loisirs (7 parcs à thèmes plus 3 prévus d’ici 2003, 27 hôtels, deux bateaux de croisières…). Si la marque Disney a une réputation mondiale, le faible degré d’internationalisation du groupe (seuls 21,2 % du chiffre d’affaires sont réalisés hors des ÉtatsUnis) est assez étonnant… et dénote en comparaison de ses principaux concurrents. Parmi les sept leaders mondiaux, Disney est le seul, avec Viacom, a ne pas avoir réellement pris le virage de l’internationalisation. Les différentes activités médias Diffusion télévisuelle et radio Regroupée dans la division Media Networks, cette activité couvre : – la diffusion hertzienne aux États-Unis : ABC (un des principaux network américain), 10 stations de télévision régionales, le réseau radiophonique ABC ainsi que 42 stations de radio régionales ; – la diffusion sur le réseau câblé aux États-Unis et à l’international : 80 % de EPSN (chaîne dédiée au sport qui touche 77 millions de foyers aux États-Unis, et, dans sa version EPSN International, disponible dans 165 pays en 21 langues), Disney Channel (59 millions d’abonnés aux États-Unis et diffusée dans neuf pays), Toon Disney, SoapNet, 50 % de Lifetime Television et des positions minoritaires dans plusieurs autres chaînes (E! Entertainment Television, A&E, The History Channel). 134 Annexes – Les sept géants Depuis son rachat, le network ABC pèse sur les finances du groupe et l’exercice 2000 devrait être le premier à être bénéficiaire depuis cinq ans. On peut en outre se demander si le portefeuille télévision de Disney n’est pas trop déséquilibré vers la diffusion hertzienne (dont la rentabilité est très tributaire de l’état du marché publicitaire) au détriment de la télévision numérique (Disney Channel et EPSN sont parmi les rares chaînes de télévision du groupe à être diffusées en Europe). Production cinématographique, télévisuelle et musicale La division Studio Entertainment inclut : – les activités de production cinématographique et télévisuelle (Walt Disney Pictures, Touchstone Pictures, Hollywood Pictures, Miramax) : au cours des années 1990, le catalogue de droits détenus par Disney a été augmenté de 17 longs métrages de dessins animés, de 265 films, de 1 252 épisodes de dessins animés et de 6 505 épisodes de fictions télévisées. Au total, avec plus de 5 000 longs métrages, une production annuelle de 20 à 30 films, et plus de 15 000 épisodes d’émissions télévisées, le catalogue de droits audiovisuels de Disney est l’un des plus importants du monde. En outre, le groupe possède des participations dans des studios de production européens (Hamster en France par exemple) ; – la fourniture de programmes pour le circuit vidéo (numéro un aux États-Unis) ; – la distribution nationale et internationale (Buena Vista International est aujourd’hui le numéro un mondial de la distribution cinématographique) ; – la production théâtrale à Broadway et à l’étranger ; – la production musicale (via Buena Vista Music Group) qui regroupe des labels (d’importance moyenne) comme Hollywood Records, Mammoth Records et Lyric Records. Dans ce domaine, où il reste un acteur plus que mineur, Disney semble prêt à croître par acquisition. Après l’échec du rapprochement Time Warner/EMI, Disney a étudié les possibilités de procéder au rachat du groupe musical britannique mais n’a pas donné suite. Il est probable que les pertes subies dans l’activité Internet (voir supra) ne créent pas un climat propice à une opération financière d’envergure. Les produits dérivés Les revenus de cette activité proviennent : – des ventes de licence pour l’utilisation des personnages Disney ou des contenus de ABC, EPSN… ; – des ventes en propres dans les boutiques Disney ; – de l’édition de livres et de magazines pour les publics américains et européens (Disney Publishing) ; – de la réalisation de produits multimédias (ludiques ou éducatifs) par le département Disney Interactive. 135 LES GRANDS GROUPES DES INDUSTRIES CULTURELLES Le développement de cette activité est considéré comme stratégique chez Disney. L’objectif annoncé est de multiplier par six dans les années qui viennent le chiffre d’affaires réalisé dans ces produits dérivés. Internet et marketing direct En 1996, Disney avait eu l’opportunité de racheter AOL pour se lancer sur le marché d’Internet mais ne l’avait pas saisie. Finalement, le groupe a décidé de se lancer seul et a créé son propre portail GO.com offrant notamment des connections vers des sites détenus par Disney : Disney.com, EPSN.com, ABC.com, ABCNews.com. Suite à l’acquisition d’Infoseek, un moteur de recherche, en juillet 1999, et à son intégration dans Disney Internet Group, les activités Internet du groupe ont été encore développées. Cependant, cette acquisition s’est révélée être un fiasco, notamment parce que lorsqu’Infoseek a été totalement intégré à Disney, nombre des collaborateurs qui en faisaient la valeur (le capital humain) ont démissionné. Finalement, à la fin de l’année 2000, les pertes cumulées de Disney dans sa diversification vers Internet se montaient à 1,5 milliard de dollars et le groupe s’est résolu à fermer GO.com (qui stagnait au 6e rang des portails américains). Les coûts de restructuration qui s’en suivent, notamment l’échange des actions de Disney Internet Group contre des actions Disney, coûtent un supplément de 790 millions de dollars. De plus, le site de commerce électronique acheté par Disney en août 1999 pour 40 millions de dollars, Toysmart.com, spécialisé sur le segment des jouets éducatifs et créatifs, censé assurer le développement des ventes des produits Disney, a fait faillite en juin 2000 ! Si Disney se dit toujours persuadé de l’avenir de la distribution en ligne de ses contenus (Disney était considéré en mars 2001 comme susceptible de lancer un service de films téléchargeables à la demande sur Internet avant 2002), cette expérience ratée risque d’obérer significativement les marges de développement futur du groupe sur ce marché. Principales alliances Hormis l’acquisition d’ABC, Disney est un groupe qui a toujours favorisé la croissance interne. L’échec retentissant essuyé sur Internet, avec les rachats en 1999 de Toysmart.com et surtout d’Infoseek, risque de renforcer cette tendance (voir infra). Dans le domaine de l’audiovisuel, Disney mène une stratégie d’alliances que l’on pourrait qualifier de classique : – accord pour diffuser les chaînes de Disney (ABC, Disney Channel, Soap Channel et Toon Disney) sur le réseau câblé de Time Warner. Ce contrat a été récemment révisé et Time Warner serait prêt à payer plus d’1 milliard de dollars pour pouvoir proposer les chaînes de Disney à ses abonnés ; 136 Annexes – Les sept géants – contrats d’approvisionnement de long terme conclus avec des chaînes ou des opérateurs européens (Kirch et Canal Plus entre autres) ; – participation à des bouquets numériques, notamment en Europe, afin de faciliter la diffusion de ses propres chaînes thématiques (Disney Channel, ESPN captable dans 165 pays et en 21 langues) ; – participation de ESPN, avec TF1 et Canal Plus, dans Eurosport. Dans la production de contenus, Disney s’appuie désormais également sur des alliances. Ainsi, Toy Story et A Bug’s Life, dessins animés avec conception assistée par ordinateur, qui comptent parmi les plus beaux scores au Box office de ces dernières années, ont été réalisés en collaboration avec la société américaine Pixar. Dans le domaine d’Internet, Disney avait développé depuis le milieu des années 1990 des partenariats avec des opérateurs de télécommunications américains pour développer des services interactifs (notamment du pay-per-view en ligne). L’avenir de ce mode de diffusion, s’il apparaît aussi stratégique pour ses concurrents que pour Disney, semble plus obscurci pour ce dernier suite à l’échec de GO.com. D’autre part, Disney se désengage de l’édition, branche dans laquelle sa position est trop précaire. Ainsi, en août 1999, Disney a vendu sa filiale spécialisée dans l’édition de magazines grand public Fairchild Publications (héritée d’ABC). Les quelques magazines ne suffisaient pas à assurer la taille critique pour une activité éloignée du métier de base de Disney et nécessitant des compétences distinctes de son savoir-faire. Forces et faiblesses Forces Faiblesses • Un des catalogues de droits audiovisuels les plus importants du monde. • Échec (temporaire ?) de sa diversification dans Internet. • Possède l’un des plus grands networks américains (ABC). • Son degré d’internationalisation reste faible malgré un objectif fixé à 50 % pour l’an 2000 (environ 20 % en 1999). • Intégration verticale poussée (contenus – distribution – diffusion) avec une bonne diversification avale (salles, télévision, produits dérivés, parcs à thèmes). • Faible rentabilité d’ABC et de l’activité de production audiovisuelle*. • Important turn-over à la direction générale du groupe (travailler avec Michael Eisner semble problématique). • Image de marque mondiale * ABC n’est devenu rentable qu’en 2000 et le résultat d’exploitation de l’activité de production audiovisuelle (Studio Entertainment) est en baisse depuis 1997. En 1999, le ratio Résultat d’exploitation/CA n’était que de 2 % pour cette activité contre 24 % pour l’activité loisirs. 137 LES GRANDS GROUPES DES INDUSTRIES CULTURELLES 1.4. News Corporation Chiffre d’affaires (1999) dont médias Résultat net Taux de marge nette (résultat net/CA) Employés : Activités médias 12,684 milliards d’euros 100 % 0,633 milliard d’euros 5% 50 000 Production cinématographique et télévisuelle, diffusion télévisuelle, presse quotidienne et magazine, édition, Internet Sports Australie Rupert Murdoch Activités hors-médias Pays d’origine P.-D.G. Répartition du chiffre d’affaires en 1999 par activités Activité par zone géographique % du chiffre d’affaires Production cinématographique et télévisuelle Diffusion télévisuelle Presse magazine Presse quotidienne Édition Autres (Internet, Sports) Total % du chiffre d’affaires 32,5 28,3 10,2 19,0 5,6 4,4 100,0 Australie-Asie Europe États-Unis Total 9,0 17,0 74,0 100,0 Le groupe en 1998 et 1999 en milliards d’euros Chiffre d’affaires Résultat net Taux de marge nette (résultat net/CA) Capitaux propres Rentabilité (résultat net/capitaux propres) Endettement à moyen/long terme Investissements (y compris croissance externe) 1999 1998 12,684 0,633 5,0 % 15,793 4,0 % 8,131 1,250 11,990 1,064 8,9 % 17,216 6,2 % 8,159 1,967 Source : Les grands groupes des industries culturelles (DEP, Ministère de la culture, 2002). 138 Annexes – Les sept géants Origine et évolution Même si les géants mondiaux de la communication ont souvent de fortes personnalités à leur tête (Michael Eisner chez Disney, Sumner Redstone chez Viacom), News Corporation (News Corp) ne peut être dissociée de son président-directeur général Rupert Murdoch. Mégalomaniaque pour Sumner Redstone, dictatorial pour Ted Turner, Rupert Murdoch illustre parfaitement le rôle que peut avoir une personnalité particulière sur l’histoire d’une entreprise (et plus largement sur la dynamique des systèmes économiques7). Le groupe News Corp est né en Australie en 1923 et a pour métier de base la presse. Dès les années 1960, le groupe s’internationalise (essentiellement dans les pays anglophones) et, à partir des années 1980, l’ambition de Rupert Murdoch de construire un groupe de communication global s’est affirmée. En 1981, News Corp entre dans le paysage audiovisuel britannique en prenant le contrôle de Sky Channel qui deviendra neuf années plus tard BSkyB (après sa fusion avec BSB). Simultanément, Rupert Murdoch investit également le paysage audiovisuel américain. Pour approvisionner son empire télévisuel naissant, le groupe australien rachète, en 1985, les studios cinéma et télévision américains de la Twentieth Century Fox pour 575 millions de dollars. Un an plus tard, News Corp acquiert six stations de télévision majeures aux États-Unis, pour 1,9 milliard de dollars et, surtout, crée FOX, le quatrième network américain (à la suite d’ABC, NBC et CBS). Aujourd’hui, News Corp présente une solide position dans tous les métiers des médias, à l’exception de la musique. Les trois pôles majeurs que constituent la production de contenus, la diffusion télévisuelle, et la presse (magazine et quotidienne) sont d’importance équivalente. Compte tenu de l’étroitesse de son marché d’origine, l’Australie, le groupe de Rupert Murdoch est nécessairement fortement internationalisé. Il convient néanmoins de souligner que son implantation est, en réalité, essentiellement (aux trois quarts) américaine. Ceci ne constitue évidemment pas une surprise – eu égard à la politique d’acquisitions menée par Rupert Murdoch – mais doit conduire à relativiser l’image d’internationalisation du groupe. Les différentes activités médias Presse quotidienne Métier de base du groupe, la presse quotidienne voit bien évidemment son poids décroître au fur et à mesure de l’implantation de News Corp dans l’audiovisuel. Néanmoins, le groupe reste le numéro un mondial de la presse en langue anglaise, et les fortes positions occupées par le groupe en Australie, en Grande- 7. Ce rôle est d’ailleurs totalement négligé par la théorie de l’organisation industrielle, et largement ignoré par les théories managériales. 139 LES GRANDS GROUPES DES INDUSTRIES CULTURELLES Bretagne et, dans une moindre mesure, aux États-Unis lui assurent une forte rentabilité comparativement aux autres segments8. En Grande-Bretagne, News Corp contrôle The Times, The Sunday Times, The Sun et News of the World. Les éditions en ligne des deux premiers génèrent une activité de 12 millions de pages consultées par jour. En Australie, Rupert Murdoch possède 128 journaux nationaux, régionaux ou locaux. Aux États-Unis, News Corp ne possède plus que le New York Post. Sur le site Internet de celuici, 9 millions de pages sont consultées par jour et le site a même été rentable en 1999 ! Presse magazine Activité également génératrice de profits, la presse magazine de News Corp, essentiellement implantée en Australie et en Grande-Bretagne, est représentée aux États-Unis par quelques magazines dont le TV Guide Magazine qui est le premier magazine américain en termes de diffusion payante (11,8 millions d’exemplaires chaque semaine). Le virage numérique a été pris par News Corp en 1999 avec la fusion de TV Guide et de United Video Satellite Group pour former TV Guide International dont News Corp possédait 44 %. Depuis, au gré d’un nouveau rapprochement (Gemstar International a pris le contrôle de TV Guide International pour 14,6 milliards de dollars), cette société est devenue GemStar-TV Guide (spécialisée dans les guides de programmes pour les télévisions interactives) dont News Corp contrôle 43 % à la suite de son alliance avec Liberty Media (voir supra). Édition Les activités éditoriales de News Corp sont assurées par HarperCollins, un des premiers éditeurs mondiaux. Cette activité est en voie de marginalisation au sein du groupe (14 % du chiffre d’affaires en 1993 contre 6,3 % aujourd’hui) et présente la plus faible rentabilité de toutes les divisions. Il est probable que le groupe cherche à se défaire de son activité éditoriale dans les années qui viennent. Production cinématographique et télévisuelle La Twentieth Century Fox reste l’une des plus importantes majors hollywoodiennes, et a même été la première d’entre elles en 1998 et 1999 (pour le nombre d’entrées en salles). Elle dispose à son catalogue de plus de 2 000 longs métrages (dont six des meilleurs scores au Box office de tous les temps) et, avec les autres studios du groupe Fox 2000, Fox Animation Studios et Fox Searchlight Pictures, produit une vingtaine de films par an. 8. Le ratio Résultat d’exploitation/CA est de 7,8 % pour la production audiovisuelle, 14,3 % pour la diffusion télévisuelle, 6,3 % pour l’édition, contre 24,4 % pour les magazines et 16,6 % pour les quotidiens. 140 Annexes – Les sept géants News Corp assure en propre la diffusion en vidéocassettes des films produits en interne tant aux États-Unis (Twentieth Century Fox Home Entertainment) qu’à l’étranger (Twentieth Century Fox Home Entertainment International) de même que la vente de licences et de produits dérivés. La production télévisuelle, assurée par la Twentieth Century Fox Television, est en plein développement. Pour la première fois de son histoire, la filiale de News Corp a été, en l’an 2000, le premier fournisseur de programmes pour l’ensemble des networks (elle l’était bien sûr déjà le principal fournisseur de FOX). Diffusion télévisuelle News Corp est sans doute le plus important diffuseur télévisuel au monde. Aux États-Unis, le network de News Corp, FOX, arrive en deuxième position derrière NBC. L’acquisition de droits sportifs exclusifs (football américain avec le Super Bowl, base-ball avec les World Series) a contribué à ce succès. Le groupe possède en outre 22 stations de télévision régionales et compte en ajouter dix autres avec l’acquisition de Chris Craft Industries en août 2000 (coût de l’opération : 5,35 milliards de dollars). Il n’était cependant pas certain, en février 2001, que la FCC donnerait son accord final à cette acquisition. Sur le réseau câblé américain, News Corp possède ou contrôle : – FOX Sports Net (65 millions d’abonnés). Le groupe fonde son développement sur la filiale Fox Sports Networks qui s’occupe de l’acquisition des droits sportifs et qui possède également des intérêts dans des lieux sportifs mythiques (Madison Square Garden) et dans des équipes professionnelles de Base Ball ou de Basket Ball ; – FOX News Channel (41 millions d’abonnés) qui cherche à concurrencer CNN ; – FX (chaîne généraliste) ; – FOX Family Channel (74,5 millions d’abonnés) par l’intermédiaire de FOX Kids Worldwide dont News Corp possède 50 %. FOX Kids International est diffusée également dans une cinquantaine de pays en Europe et en Amérique latine et cela en 14 langues (15 à 20 millions de foyers touchés fin 1999, soit cinq à six fois moins que le Nickelodeon de Viacom). Cet empire télévisuel comporte également BSkyB en Grande-Bretagne, dont News Corp possède 37,5 %. La première société de télévision payante au monde compte 5,25 millions d’abonnés et propose des chaînes propres et des chaînes d’autres opérateurs comme MTV, Nickelodeon… Si BSkyB voit son chiffre d’affaires progresser sensiblement chaque année, la société n’est toujours pas rentable (le déficit pour le dernier trimestre 2000 se montait à 112 millions de livres sterling) et son capital est instable puisque Vivendi Universal est en train de céder sa participation de 23 %. En Asie, le réseau satellite de News Corp, Star TV, touche 300 millions de personnes (Japon, Chine, Inde, Taiwan, Moyen-Orient, Pakistan…) et 80 % des chaînes sont désormais diffusées en numérique. Le groupe est également présent 141 LES GRANDS GROUPES DES INDUSTRIES CULTURELLES via des réseaux satellitaires ou câblés en Amérique latine (Sky Latin America), en Australie et en Nouvelle-Zélande (Foxtel). Dans le domaine de la télévision payante (par câble ou satellite), plusieurs opérations d’envergure ont été annoncées début 2001 : – News Corp envisage de rapprocher Sky Global Networks d’Hugues Electronic et ainsi de prendre le contrôle de DirecTV (le plus important bouquet satellitaire américain comptant 10 millions d’abonnés) pour un montant de 70 milliards de dollars ; – le groupe australien envisage également de prendre le contrôle de Premiere World (bouquet numérique allemand, né de la fusion de la chaîne payante Premiere et de l’éphémère bouquet numérique DF1). BSkyB possède déjà, depuis 1999, 24,9 % de KirchPayTV (qui possède Premiere World à 95 %) mais le bouquet reste jusqu’à présent contrôlé par Kirch. News Corp souhaite augmenter sa participation dans KirchPayTV à 50 % ; – en avril 2000, News Corp a augmenté sa participation dans le bouquet numérique italien Stream pour atteindre 50 % (contre 1,4 milliard de dollars et des parts de BSkyB). Stream concurrence sur le marché transalpin de Telepiù (contrôlé par Canal Plus) mais n’a aujourd’hui que 400 000 abonnés contre 1,5 million pour son rival. News Corp pourrait ainsi rassembler toutes ses participations dans des télévisions payantes sous une même structure, Sky Global, qui présenterait un portefeuille équilibré avec une composante américaine (News Corp n’était pas présent dans la télévision par satellite aux États-Unis), une composante asiatique (notamment Star TV et Sky PerfecTV) et une composante européenne renforcée (BSkyB, Premiere World, Stream), mais aussi sud-américaine (Sky Latin America) et australienne (FOXTEL). Internet La majeure partie des activités qualifiées de « autres » dans les comptes annuels du groupe concerne les nouveaux médias. News Corp possède plusieurs sites Internet (outre ceux déjà mentionnés, Fox News Online, Fox Sports Online…) et a pris des participations dans des sociétés de la nouvelle économie. Néanmoins, le début de l’année 2001 a vu la fermeture de sa division de production de contenus pour les sites Internet du groupe et l’abandon d’un projet de jointventure dans le domaine de la santé en ligne qui se voulait pourtant un projet novateur et représentatif d’une future stratégie Internet. Principales alliances News Corp préfère manifestement contrôler totalement ses filiales. Les alliances conclues par le groupe sont souvent considérées comme des têtes de pont pour une future prise de contrôle intégrale ou comme le seul moyen de pénétrer certains marchés (notamment européens ou asiatiques). L’alliance est alors un mode 142 Annexes – Les sept géants de contournement des réglementations locales ou d’apaisement de l’opposition de l’opinion publique et/ou des concurrents locaux relayés par les pouvoirs publics. C’est dans le secteur de la diffusion télévisuelle que News Corp a été le plus actif en matière d’alliance. Toute participation, même minoritaire, au capital d’une chaîne ou d’un bouquet numérique permet en effet d’assurer des débouchés à la production cinématographique ou télévisuelle des studios du groupe. Au Japon, le groupe détient 11 % de bouquet satellitaire Sky PerfecTV (issu de la fusion de JSkyB et de PerfecTV en mai 1998) qui compte plus d’un million d’abonnés. En Asie, News Corp a également développé une chaîne thématique sportive en joint-venture avec Disney : ESPN/Star Sports. Nous avons déjà évoqué les alliances envisagées, ou concrétisées, par News Corp pour finaliser son projet de groupement de bouquets numériques dans le monde entier (augmentation de ses participations dans les bouquets numériques italien, Stream, et allemand, Premiere World). Construit autour de son fer de lance BSkyB, ce groupement se fera sous l’égide de la société Sky Global. Compte tenu de l’ampleur du projet, l’objectif serait de détenir 60 % de cette nouvelle entité et d’en ouvrir le capital à d’autres partenaires, notamment européens (TF1, Vivendi Universal, Kirch). De tels partenaires ne pourraient que renforcer l’implantation de News Corp en Europe, implantation qui a rencontré beaucoup d’obstacles depuis 10 ans. La prise de contrôle de Stream, par exemple, avait été déjà envisagée en 1999 (avec TF1) mais n’avait pu se concrétiser. Ainsi, News Corp multiplie depuis début 2001 les alliances avec Kirch : prise de contrôle de KirchPayTV (voir infra) ; vente en janvier 2001 de la chaîne italienne Tm3 à Kirch Média en échange d’une entrée au capital de cette dernière à hauteur de 2,48 %. Ainsi, par l’intermédiaire d’une ouverture croissante vers des partenaires européens, il semble que News Corp soit en train de réussir son projet d’une forte implantation en Europe continentale (la faiblesse de celle-ci était jusqu’à présent un handicap certain pour le groupe). En revanche, News Corp maintient fermement son contrôle sur BSkyB malgré le rapprochement envisagé avec Canal Plus début 19999 et les velléités expansionnistes exprimées par Vivendi au cours de l’été de cette même année. Aujourd’hui BskyB, qui vient d’achever sa transition de l’analogique au numérique, est détenue à 37,5 % par News Corp. Ce dernier se verrait bien en prendre le contrôle à 100 % dans un proche avenir, mais le coût d’une telle opération semble incompatible avec le rachat de DirecTV évoqué précédemment. 9. La fusion a été mise en échec tant par une opposition politique – spécificité culturelle de Canal Plus face au groupe anglophone – que par la volonté de Rupert Murdoch de garder la mainmise sur la nouvelle entité, ce que Canal Plus n’acceptait pas. 143 LES GRANDS GROUPES DES INDUSTRIES CULTURELLES En revanche, pour faciliter cette dernière opération, notamment en rassurant les marchés financiers, News Corp a renforcé, en septembre 2000, ses liens avec Liberty Media (filiale de TCI avant 1998 et depuis d’AT&T, détenant des participations dans une centaine de chaînes câblées américaines). En échange des 21 % détenus par Liberty Media dans GemStar-TV Guide (qui, ajoutés aux 22 % détenus en propre par News Corp lui permettaient d’en prendre le contrôle), News Corp a permis à Liberty Media de prendre 4,76 % du futur Sky Global Network et surtout d’augmenter sa participation dans News Corp de 8 % à 18 %. Les alliances dans la diffusion télévisuelle, et notamment dans la télévision numérique, semblent donc bien apparaître pour News Corp comme un moyen de partager les risques et les coûts d’opérations d’envergure avec l’objectif de reprendre le contrôle total des filiales communes créées une fois la position solidifiée. News Corp ne limite cependant pas ses alliances au seul segment de la télévision. Il conclut des accords avec d’autres groupes pour assurer des débouchés croisés de la production des uns sur le réseau de télévision – par câble ou satellite – des autres (par exemple FOX News est diffusée sur le réseau câblé d’AOL Time Warner en échange de la diffusion de CNN et d’autres chaînes de la Warner par les bouquets numériques BSkyB et Star TV). Il conclut également des contrats d’approvisionnement de long terme (par exemple pour approvisionner les chaînes allemandes de Bertelsmann en programmes produits par la Twentieth Century Fox). News Corp s’appuie également sur des alliances pour investir le métier des nouveaux médias. Ainsi, le groupe cherche à renforcer son potentiel dans la production de contenus télévisuels interactifs. Pour cela, l’entrée à hauteur de 75 % dans le capital d’Open TV, le leader mondial du secteur, est envisagée depuis l’été 2000. Cependant, comme cela est signalé précédemment, l’alliance d’envergure envisagée dans la santé en ligne s’est soldée par un échec. Qu’en sera-t-il des autres projets de News Corp dans ce domaine ? D’autant que Rupert Murdoch mise à l’évidence sur le satellite, et non sur le câble, pour se positionner sur les marchés que va ouvrir le passage à l’Internet à haut débit. Or, il ne dispose pas d’une alliance solide dans la téléphonie mobile qui constitue pourtant un actif complémentaire important dans une stratégie Internet orientée sur le satellite. 144 Annexes – Les sept géants Forces et faiblesses Forces Faiblesses • Numéro un mondial de la télévision par satellite avec une présence sur tous les continents grâce à Sky Global. • Présence internationale essentiellement américaine même si l’implantation en Europe continentale semble enfin se concrétiser. • Position forte dans les contenus (Twentieth Century Fox est devenu le premier studio hollywoodien). • Capacité à « digérer » (financièrement et managérialement) le projet Sky Global avec des marchés financiers beaucoup moins favorables aux valeurs des nouvelles technologies et des médias qui reste encore à prouver. • Forte position dans la télévision hertzienne aux États-Unis. • Numéro un mondial dans la presse quotidienne et magazine. • Faible position sur la distribution électronique des contenus (pour les programmes audiovisuels). • Faible rentabilité de la branche édition. 145 LES GRANDS GROUPES DES INDUSTRIES CULTURELLES 1.5. Sony Chiffre d’affaires (1999*) dont médias Résultat net Taux de marge nette (résultat net/CA) Employés : Activités médias Activités hors-médias Pays d’origine P.-D.G. 58,900 milliards d’euros 15,779 milliards d’euros (26,8 %) 1,073 milliard d’euros 1,8 % 189 700 Audiovisuel, musique, multimédia/Internet, jeux vidéo Électronique grand public, assurance et services financiers Japon Nobuyoshi Idei * Exercice clos le 31 mars 2000. Répartition du chiffre d’affaires en 1999 par activités Activité par zone géographique % du chiffre d’affaires Musique Audiovisuel Jeux Total médias Électronique Assurance Autres Total 10,0 7,4 9,4 26,8 65,7 5,7 1,8 100,0 % du chiffre d’affaires Japon Europe États-Unis Reste du monde Total * Exercice clos au 31 mars 2000. 31,7 22,0 30,3 16,0 100,0 * Exercice clos au 31 mars 2000. Le groupe en 1998 et 1999 en milliards d’euros Chiffre d’affaires Résultat net Taux de marge nette (résultat net/CA) Capitaux propres Rentabilité (résultat net/capitaux propres) Endettement à moyen/long terme Investissements (y compris croissance externe) 1999* 1998* 58,900 1,073 1,8 % 19,564 5,5 % 7,169 3,839 59,918 1,575 2,6 % 16,093 9,8 % 9,139 3,116 * Exercice clos le 31 mars 2000. Source : Les grands groupes des industries culturelles (DEP, Ministère de la culture, 2002). 146 Annexes – Les sept géants Origine et évolution Fondée en 1946 comme entreprise de réparation de radios, puis fabricant du premier magnétophone made in Japan, Sony est aujourd’hui le numéro un mondial de l’électronique grand public. Son développement a toujours été fondé sur une politique résolument innovatrice qui l’a conduit à être le (ou l’un des) précurseur(s) dans le magnétoscope, le baladeur, le caméscope, la console de jeux vidéo… À la fin des années 1980, Sony a entamé sa diversification vers les médias. En 1988, le groupe a racheté CBS records, pour 2 milliards de dollars, et les studios de production Columbia Picture-Tristar, en 1989, pour 3,4 milliards de dollars. Cette diversification reste néanmoins mineure si l’on s’en tient à une définition stricte des médias (environ un quart du chiffre d’affaires total de Sony). En effet, même en adjoignant aux activités médias proprement dites (audiovisuel, musique, édition/presse), les jeux vidéos, avec lesquels des synergies existent, notamment avec l’activité software qui peut utiliser des droits audiovisuels et/ou musicaux détenus par le groupe, l’activité médias de Sony en fait l’un des plus petits des sept géants du secteur. Il semble en effet que la volonté du groupe de se diversifier vers les industries de contenus doive être reliée à l’échec rencontré avec le magnétoscope Betamax. En effet, ce dernier a été éliminé du marché par le standard VHS et Sony a pu mesurer à cette occasion l’importance de la maîtrise des softwares dans les industries de hardwares. Si Sony avait pu proposer un catalogue complet de films au standard Betacam dès la sortie de son appareil, l’avenir de son standard aurait pu en être tout autre. Les différentes activités médias Parmi les sept géants, Sony est le seul à allier simultanément l’aval extrême des médias (l’électronique grand public) et l’amont de la filière (les contenus). En effet, par l’intermédiaire de sa division Sony Electronics, le groupe japonais réalise près des deux tiers de son chiffre d’affaires avec la vente de lecteurs de cédéroms, de baladeurs, de magnétoscopes, de lecteur de dévédéroms, de téléviseurs… De plus, les consoles de jeux (Playstation 2) produites par la firme constituent également des supports qu’il convient d’approvisionner en contenus. C’est le rôle qui est assigné aux deux divisions Sony Music et Sony Pictures. Enfin, aujourd’hui Sony voit le commerce électronique, et notamment les ventes avec téléchargement en ligne, comme l’axe privilégié de son développement. La firme compte se focaliser sur quatre services proposés par Internet : la banque, le téléchargement de musique et de films, les télécommunications et les jeux10. 10. Sony envisage même que ses consoles de jeux Playstation 2 puissent faire office de relais et permettre de jouer en ligne, de télécharger des films et de la musique et d’établir des télécommunications. 147 LES GRANDS GROUPES DES INDUSTRIES CULTURELLES Musique Avec le rachat de CBS en 1988, Sony a pris le contrôle de Columbia Records, d’Epic Records et de nombreux autres labels qui en font aujourd’hui le numéro deux mondial de l’industrie du disque. Sony dispose notamment des catalogues de Michael Jackson, Céline Dion ou Mariah Carey. Sony a très tôt pris le virage du commerce électronique. Dès le milieu des années 1990, les clients de Sony pouvaient se connecter sur son site Internet et commander un disque qui leur était envoyé par voie postale. En décembre 1999, Sony a lancé, au Japon, un service payant de distribution en ligne des œuvres musicales dont le groupe détient les droits (téléchargement par titre et non pas par album). L’internaute pouvant alors enregistrer le(s) titre(s) sur le support de son choix, par exemple sur une « mémoire flash » (très grande capacité de stockage) pour laquelle Sony a sorti, fin 1999, un baladeur spécifique. Le même service a été lancé aux États-Unis en avril 2000. L’année 2001 a commencé avec une nouvelle innovation commerciale. Pour la première fois, un album (d’un groupe de rock japonais inconnu en Europe) a été vendu par téléchargement titre par titre sur Internet, avant même d’être disponible dans les bacs des disquaires. Avec un prix légèrement supérieur à 3 euros par titre, ce mode de distribution s’avère très compétitif au regard du prix d’un single. Ainsi, pour le président de Sony, Nobuyoshi Idei, « il y a 65 millions d’années, une météorite a heurté la terre et tué d’un coup les dinosaures. L’Internet est comme cette météorite pour l’industrie du disque11 ». Audiovisuel Sony Pictures regroupe les activités des studios de production hollywoodiens Columbia Tristar, tant la branche cinéma que la branche télévision, une vingtaine de chaînes de télévision par câble ou par satellite en Asie (Animax, AXN au Japon, SET en Inde…) et en Europe, et un réseau de distribution en salles (le réseau Loews Theatres aux États-Unis). Depuis leur reprise en 1989, Sony a toujours connu des problèmes de rentabilité avec les studios de production cinéma. L’exercice 1999/2000 n’a pas failli à la règle et certains échecs commerciaux importants n’ont pu être compensés que par la bonne tenue des activités de ventes de vidéos et de dévédéroms. Depuis plusieurs années, les dirigeants de Sony réfutent régulièrement des rumeurs annonçant leur intention de se dessaisir de leur activité de production cinématographique au profit d’un groupe qui saurait mieux en exploiter le potentiel (notamment grâce à un réseau télévisé plus développé). Si les synergies entre les supports et les contenus dans le domaine de l’audiovisuel se sont révélées beaucoup plus faibles qu’il n’était prévu, Sony fonde beau- 11. Extrait d’un article paru dans La Tribune, 18 janvier 2001. 148 Annexes – Les sept géants coup d’espoirs sur la diffusion numérique pour valoriser son portefeuille de programmes audiovisuels (Sony était considéré, en mars 2001, avec Disney, comme susceptible de lancer un service de films à la demande téléchargeables sur Internet avant 2002). Comme cela a été souligné, les ventes de dévédéroms contribuent déjà largement à équilibrer les comptes de Sony Pictures, mais c’est l’avènement de la large bande sur Internet (en réduisant les temps de téléchargement) qui devrait permettre à la distribution de films en ligne de franchir un palier. D’autant qu’à l’ère du numérique, les jeux peuvent également être proposés sous la forme d’une chaîne spécifique dans un bouquet numérique. Principales alliances L’orientation de Sony vers le commerce électronique et la distribution en ligne, tout en maintenant les activités initiales de l’électronique grand public, a contraint le groupe a modifier singulièrement sa stratégie industrielle. Sony s’appuie de plus en plus sur des alliances et non plus seulement sur des filiales contrôlées à 100 %. Sony a longtemps été caractérisé par une forme de complexe de supériorité qui dissuadait le groupe de nouer des alliances dont il ne percevait pas l’intérêt stratégique12. Il semble que, de ce point de vue, le groupe ait fait sa révolution culturelle. Ainsi en avril 2000, Sony annonçait officiellement qu’il était à la recherche d’alliances dans l’industrie des réseaux câblés aux ÉtatsUnis afin de renforcer sa distribution de contenus. La plupart des alliances passées par Sony ont désormais trait avec sa stratégie Internet : – en octobre 1999, accord avec six groupes électroniques et informatiques japonais pour utiliser ou fabriquer sous licence sa mémoire flash Memory Stick. La volonté de Sony est clairement d’instaurer sa propre mémoire flash comme un futur standard dans le secteur électronique ; – en janvier 2000, alliance entre les groupes Seven-Eleven (grande distribution), NEC, Nomura et Sony pour créer un site de commerce électronique ; – en février 2000, annonce d’un partenariat avec Intel pour développer les connexions entre les appareils électroniques numériques (magnétoscopes, lecteurs de dévédéroms, etc.) et Internet ; – en juin 2000, Sony, Toshiba et Matsushita s’entendent sur une norme unique de décodeurs pour télévision numérique ; – en février 2001, deux alliances sont conclues avec Vodafone (GrandeBretagne), d’une part, et NTT DoComo (Japon), d’autre part, pour proposer des jeux vidéos sur les téléphones mobiles. En ce qui concerne les accords plus spécifiques aux industries des médias, on notera pour les alliances les plus récentes : – en janvier 2000, conclusion d’un accord d’approvisionnement de long terme avec Starz Encore, spécialisé dans la distribution de films en première exclu12. Comme le souligne le rapport d’Eurostaf, Les grands groupes de communication, Paris, Eurostaf, 1998. 149 LES GRANDS GROUPES DES INDUSTRIES CULTURELLES sivité pour les chaînes américaines sur le câble ou le satellite. Débutant en 2005, cet accord garantira à Starz Encore, pour 6 ans, l’exclusivité de la première diffusion télévisée de tous les films sortis en salles par Sony aux ÉtatsUnis. Mais Sony se réserve, durant cette période, le droit de distribuer ses films via Internet ; – en avril 2000, annonce de la prise de participation de 10 % dans Fuji TV avec pour objectif le développement de services via Internet et de la télévision interactive. Depuis 1998, Sony a également pris des parts dans le bouquet numérique japonais Sky-PerfecTV (avec notamment News Corp, l’américain DirecTV et le japonais SoftBank). Sony entend fournir les décodeurs numériques utilisés par ce bouquet ; – en août 2000, signature d’un contrat à l’amiable avec MP3.com pour régler les différents concernant le téléchargement gratuit des œuvres musicales ; – en février 2001, alliance avec Vivendi Universal pour créer en commun un site de téléchargement de musique par abonnement sous la forme d’une joint-venture baptisée Duet, aujourd’hui nommée Press Play (voir annexe Vivendi Universal). Il convient cependant de souligner le caractère assez restreint de ces coopérations. Sony ne semble pas encore prêt à s’engager dans les rapprochements de grande envergure qui caractérisent aujourd’hui le secteur des médias. Bertelsmann avait un moment envisagé de fusionner ses activités musicales avec Sony Music, lorsque Time Warner annonçait la reprise d’EMI, mais le projet a été vite abandonné. Forces et faiblesses Forces Faiblesses • Leader mondial de l’électronique grand public. • Difficultés récurrentes de l’activité cinématographique. • Degré d’intégration verticale unique : contenus, distribution (participation dans bouquets numériques), diffusion (chaînes de télévision), supports, permettant notamment d’influer sur la dynamique de standardisation dans le numérique. • Une rentabilité globale assez faible au regard de ses concurrents. • Forte position dans le commerce électronique et la distribution numérique. 150 Annexes – Les sept géants 1.6. Viacom Chiffre d’affaires (1999*) dont médias Résultat net Taux de marge nette (résultat net/CA) Employés Activités médias Activités hors-médias Pays d’origine P.-D.G. 18,892 milliards d’euros 18,526 milliards d’euros (98 %) 1,077 milliard d’euros 5,7 % nd Production cinéma et télévisuelle, diffusion télévisuelle, location jeux et vidéo, musique, édition, multimédia/Internet Parcs à thèmes États-Unis Sumner Redstone * Le chiffre d’affaires de Viacom pour 1999 figurant ici est la somme du chiffre d’affaires de Viacom (12,860 milliards de dollars) et de CBS (7,373 milliards de dollars). Le calcul ne tient pas compte des cessions que devra réaliser Viacom pour rester en concordance avec la réglementation américaine. Répartition du chiffre d’affaires en 1999 par activités (Viacom + CBS*) Activité par zone géographique % du chiffre d’affaires Diffusion télévisuelle et radiophonique 50,6 Production audiovisuelle 22,5 Location vidéo 21,8 Édition 3,0 Internet 0,1 Total médias 98,0 Parcs à thèmes 2,0 Total 100,0 % du chiffre d’affaires États-Unis Reste du monde Total 76,0 24,0 100,0 * L’ensemble du chiffre d’affaires 1999 de CBS a été affecté à l’activité « Diffusion télévisuelle et radiophonique ». En réalité, les activités de CBS comprennent celle de sa filiale Infinity qui est le numéro un aux États-Unis dans la radio et l’affichage. Le groupe en 1998 et 1999 en milliards d’euros Chiffre d’affaires Résultat net Taux de marge nette (résultat net/CA) Capitaux propres Rentabilité (résultat net/capitaux propres) Endettement à moyen/long terme Investissements (y compris croissance externe) 1999 1998 12,006 0,312 2,6 % 10,394 3,0 % 5,320 1,102* 11,924 – 0,114 ns 11,251 ns 3,561 0,775 * Investissement financier de 12,7 milliards de dollars en novembre 2000 pour monter sa participation à 100 % dans Infinity. Source : Les grands groupes des industries culturelles (DEP, Ministère de la culture, 2002). 151 LES GRANDS GROUPES DES INDUSTRIES CULTURELLES Origine et évolution Initialement Viacom n’était qu’un câblo-opérateur qui n’apparaissait même pas parmi les dix premières firmes américaines du secteur au début des années 1990. Tout au long de la décennie écoulée, Viacom a développé son portefeuille d’activités en se construisant comme un groupe de médias diversifié et intégré verticalement. En 1994, le groupe acquiert, coup sur coup, les studios de production hollywoodiens Paramount (pour 10 milliards de dollars) et un des premiers groupes de distribution vidéo outre-Atlantique Blockbuster Vidéo (pour 7,6 milliards de dollars). Pour alléger la charge financière de cette croissance externe, l’endettement du groupe a été multiplié par quatre en un exercice. Viacom s’est ensuite engagé dans une politique de cession sélective. Les opérations les plus significatives sont les suivantes : – en 1996, cession de son réseau câblé Cablevision Systems à TCI, le premier câblo-opérateur américain (dénommé désormais Liberty Media depuis son rachat en 1998 par AT&T), pour 2,3 milliards de dollars. Viacom est désormais totalement désengagé de son métier d’origine ; – en 1997, vente de 10 stations de radio pour 1,1 milliard de dollars ; – en 1998, cession des activités d’édition scolaire et professionnelle de la filiale Simon & Shuster à Pearson pour 4,6 milliards de dollars. Cette même année, Viacom a cédé un éditeur de jeux électroniques (Westwood Entertainment), et un réseau de détaillants-disquaires. Ainsi, entre 1994 et 1998, l’endettement du groupe est passé de 8 à 2 milliards de dollars. L’année 1999 marque le retour des acquisitions d’envergure pour Viacom. Profitant de l’entrée en vigueur, en août, d’un assouplissement des règles édictées par la Federal Communications Commission concernant la concentration dans la télévision13, Viacom a racheté CBS, le premier network américain. L’opération a été financée par un échange d’actions d’un montant de 35 milliards de dollars. Cette opération a été définitivement approuvée par la FCC au printemps 2000. Mais là encore, cette fusion devrait être suivie d’une série de cessions : Viacom devra probablement se séparer de quelques stations de radio et de télévision (selon la FCC un seul et même groupe de télévision ne peut couvrir plus de 35 % des foyers américains). En novembre 2000, Viacom a été repris d’une frénésie d’acquisitions. Le groupe a procédé au rachat des parts qu’il ne détenait pas encore de la filiale de CBS Infinity (radio et affichage) pour 12,7 milliards de dollars, et a pris le contrôle, au moyen d’un échange d’actions d’un montant de 3,4 milliards d’euros, de Black Entertainment Television. 13. L’exploitation de deux stations sur les différents marchés régionaux est désormais autorisée pour un même groupe sous la condition que subsistent au moins huit opérateurs différents et que l’acquisition soit motivée par les difficultés financières de la cible. 152 Annexes – Les sept géants Le nouvel ensemble Viacom/CBS se présente donc comme l’un des quatre premiers groupes de communication au monde, doté d’un portefeuille bien diversifié et d’une intégration verticale poussée. Il est présent dans la production audiovisuelle, la diffusion radiophonique et télévisuelle, et plus discrètement dans l’édition, la musique et Internet, et même dans l’affichage. Les différentes activités médias Diffusion télévisuelle et radiophonique Avec le rachat de CBS, la diffusion télévisuelle et radiophonique représente maintenant environ la moitié du chiffre d’affaires du groupe. Il est incontestablement le numéro un de la télévision aux États-Unis. Avant la fusion avec CBS, Viacom possédait ou contrôlait en propre : – 50 % du network United Paramount Network (UPN) créé en 1995 en partenariat (50/50) avec Chris Craft Industries14 ; – la chaîne câblée MTV focalisée sur la musique et diffusée également, avec adaptation aux spécificités locales, en Europe (depuis 1987), en Asie et en Océanie depuis les années 1990. MTV compte plus de 70 millions d’abonnés américains et touche plus de 270 millions de foyers dans le monde ; – la chaîne câblée Nickelodeon (chaîne pour enfants) diffusée également en Europe, en Asie et en Amérique latine. Elle compte également plus de 70 millions d’abonnés américains ; – d’autres chaînes câblées thématiques : VH1, Showtime… – 19 stations de télévision régionales15. Grâce à CBS, Viacom possède en outre le network CBS, 10 stations régionales, et quelques chaînes câblées thématiques (Nashville Network, Country Music). Suite à l’acquisition de la société Black Entertainment Television (BET) en novembre 2000, Viacom prend le contrôle de la chaîne câblée BET destinée au public afro-américain (plus de 62 millions d’abonnés) et de plusieurs chaînes thématiques musicales (BET on Jazz, The Cable Jazz Channel, BET International). En matière de télévision, la position de Viacom est donc particulièrement forte sur les segments de la musique et des émissions pour enfants, et également sur celui des émissions destinées au public afro-américain (la chaîne UPN vise également ce public). Enfin, CBS, notamment via sa filiale Infinity (numéro un de la radio et de l’affichage aux États-Unis), possède plusieurs dizaines de stations de radio disséminées dans l’ensemble du territoire américain. 14. UPN émet 24h/24h depuis le 31 décembre 1999. Au niveau comptable, l’activité de UPN est enregistrée avec les activités de production audiovisuelle (Entertainment). 15. Au niveau comptable, l’activité de ces 19 stations est enregistrée avec les activités de production audiovisuelle (Entertainment). 153 LES GRANDS GROUPES DES INDUSTRIES CULTURELLES Soulignons que CBS est redevenu bénéficiaire en 1999, après avoir connu, comme d’autres networks américains, plusieurs exercices difficiles. Production cinématographique et télévisuelle Ce segment d’activités regroupe : – la production cinématographique et télévisuelle des studios Paramount et de Spelling. Viacom possède les droits d’environ 2500 films et les studios Paramount en réalisent une quinzaine par an. Bien évidemment, l’exclusivité télévisuelle de ces productions est réservée aux chaînes du groupe, et notamment à Showtime ; – la production musicale (essentiellement les droits des bandes originales des films produits par Paramount ou acquis via MTV) ; – la gestion de salles de cinéma au Canada (Famous Players, 800 écrans) ainsi qu’en Europe (Allemagne, Grande-Bretagne, Irlande, Italie, Espagne…) et Amérique latine (868 écrans) par l’intermédiaire d’une des trois plus grandes firmes de diffusion en salles, UCI, détenue à 50 %. Vidéo Blockbuster est le premier réseau de location de vidéocassettes et de dévédéroms aux États-Unis. Il possède ou a franchisé plus de 7000 boutiques aux États-Unis et dans 26 autres pays. Cependant, l’activité vidéo semble davantage peser sur le groupe que lui apporter de véritables synergies. Ainsi, son résultat d’exploitation a été négatif en 1997 et 1998, et positif, mais faible, comparativement aux autres divisions, en 1999. Il est donc probable que Viacom cherche à se désengager de cette activité. Blockbuster Video, dont environ 20 % du capital a déjà été introduit en bourse en 1999 (ce qui a généré environ 5 milliards de dollars de liquidités), devrait voir son capital s’ouvrir de manière encore plus large. Les fonds ainsi levés pourraient notamment permettre le développement vers les ventes en ligne de films qui constitueront à terme un concurrent frontal pour les système de location de vidéocassettes ou de dévédéroms. En mars 2001, Blockbuster annonçait se préparer à lancer un service de livraison de films par ligne téléphonique à haut débit. Édition Simon & Schuster a en charge l’activité édition de Viacom. Différents labels sont utilisés par Viacom : Simon & Schuster, bien entendu, mais aussi Pocket Books, The Free Press, Scribner. Après avoir cédé les segments éducatif et professionnel à Pearson, Viacom se recentre, en grande partie, sur l’édition classique et multimédias (livre, cassette, cédéroms…) présentant des synergies avec ses activités dans l’audiovisuel. Le contenu éditorial est de plus en plus lié aux films réalisés par les studios Paramount et/ou aux personnages des émissions de MTV et Nickelodeon (comme « Beavis and Butthead » par exemple). Viacom semble chercher à générer un effet marque « à la Disney » avec MTV et Nickelodeon. Il 154 Annexes – Les sept géants est vrai que MTV touche 250 millions de foyers dans le monde entier et Nickelodeon 90 millions de foyers dans 70 pays. Internet Par l’intermédiaire de MTVi et de Nickelodeon online, Viacom possède plusieurs dizaines de sites Internet destinés au même public que ses émissions télévisées ou ses ouvrages (amateurs de musique et enfants). En mars 2000, l’ensemble des sites de Viacom drainait 8 millions de visiteurs réguliers (soit le 23e rang américain selon Mediametrix). Jusqu’à aujourd’hui, ces sites étaient financés par la publicité et par la vente de produits dérivés en ligne. Pour Viacom, le problème qui se posera avec le développement du téléchargement en ligne est la minceur de son catalogue de droits musicaux possédés en propre. Jusqu’en 2000, les sites de MTVi diffusaient de la musique sans en payer les droits ou alors en s’acquittant de droits réduits. Le respect croissant des droits des auteurs et des compositeurs sur Internet (voir les déboires de Napster début 2001) va probablement beaucoup fragiliser la stratégie Internet de Viacom. L’intégration de CBS apporte également des actifs en termes de sites : CBS contrôle ou a pris des participations dans une douzaine de sites (sportsline.com…). Principales alliances Dans le secteur de la diffusion télévisuelle, Viacom a annoncé au début de l’année 2000 son intention de racheter, au groupe Chris Craft Industries, les 50 % qu’il ne détient pas encore du network UPN ainsi que dix stations de télévision régionales. Viacom était prêt à offrir 3,5 milliards de dollars pour l’ensemble. Finalement, c’est News Corp qui a racheté Chris Craft Industries. Aux États-Unis, Viacom a conclu des joint-ventures pour lancer les chaînes Comedy Central (avec Time Warner) et Sundance Channel (avec Universal). Viacom internationalise son activité en cherchant à étendre le succès de ses chaînes musicales et pour enfants sur les marchés étrangers, notamment européens et asiatiques. Pour lancer ses chaînes vedettes, MTV et Nickelodeon, hors des États-Unis, le groupe s’est appuyé à peu près aussi souvent sur la création de filiales détenues à 100 % que sur des joint-ventures ou des cessions de licence. Dans la première catégorie on trouve MTV Europe (1987), MTV et Nickelodeon Amérique latine (1990 et 1996), Nickelodeon Europe du Nord (1997), Nickelodeon Global Network (vers l’Asie, l’Europe de l’Est et le Moyen-Orient et l’Afrique en 1998), Nickelodeon Espagne (1999), VH1 (1994 au Royaume-Uni, 1995 en Allemagne) ; et dans la seconde : MTV Brésil, MTV Asie (avec Polygram), MTV Australie (en 1997), MTV Russie (1998), Nickelodeon UK (avec BSkyB en 1993)… 155 LES GRANDS GROUPES DES INDUSTRIES CULTURELLES Enfin, Viacom a conclu des accords d’approvisionnements de long terme avec des firmes européennes. Leo Kirch avait acheté, en 1996, l’exclusivité durant cinq ans pour les télévisions financées par la publicité et payantes en langue allemande des droits des catalogues de Paramount (cinéma) et de Spelling (séries télévisées). De même, en 1999, Paramount a conclu un accord avec la RAI conférant à cette dernière l’exclusivité des droits du catalogue passé et à venir de films cinématographiques pour une diffusion sur une télévision financée par la publicité en Italie. Forces et faiblesses Forces Faiblesses • Numéro un américain dans la diffusion télévisuelle. • Tant Viacom (avant la fusion) que CBS ont été déficitaires jusqu’à l’exercice 1998. La rentabilité affichée en 1999 reste assez moyenne (résultat net/CA de l’ensemble Viacom + CBS = 5,7 %). • Intégration verticale et diversification sélective dans la filière (les secteurs édition et musique s’appuient surtout sur les contenus développés par les studios Paramount). • Les cessions ont toujours eu pour objectif de réduire l’endettement. Peut-être n’étaient-elles pas toutes souhaitables : réseau de télévisions câblées ? Éditions scolaires et professionnelles qui auraient pu être diffusées en ligne ? • Catalogue de droits des studios Paramount. • Effort d’internationalisation et notoriété mondiale de MTV et Nickelodeon. • Bien-fondé de la stratégie Internet en questions (position faible dans la distribution en ligne pour la musique). 156 Annexes – Les sept géants 1.7. Vivendi Universal Le 2e groupe de communication mondial16 Chiffre d’affaires (2000*) dont médias Résultat net Employés Activités médias 50,701 milliards d’euros 19,013 milliards d’euros (37,5 %) nd 64 000 (hors Vivendi Environnement) Production audiovisuelle, diffusion télévisuelle, musique, multimédia, télécommunications Télécommunications, services pour l’environnement (eau, énergie, transport) France Jean-Marie Messier Activités hors-médias Pays d’origine P.-D.G. * Voir le retraitement des données présenté à la note 16. Répartition du chiffre d’affaires en 1999 par zone géographique* par activités* Activité Production audiovisuelle** Diffusion télévisuelle*** Édition Musique Internet Total médias Télécommunications Vivendi Environnement Total % du chiffre d’affaires 10,2 7,2 7,0 13,0 0,1 37,5 10,4 52,1 100,0 % du chiffre d’affaires France Europe (hors France) États-Unis Japon Reste du monde Total * Calculée à partir du chiffre d’affaires 1999 de Vivendi Communication (Télécommunications + édition/multimédia – audiovisuel), de Canal Plus et de Seagram (hors vins et spiritueux). ** Universal Studios (4,8 milliards d’euros) et Studio Canal (production et gestion de droits, 387 millions d’euros). *** Canal Plus (hors Studio Canal). 50,7 21,0 22,8 4,7 0,8 100,0 * Calculée à partir du chiffre d’affaires 1999 de Vivendi Communication (Télécommunications, édition/multimédia – audiovisuel), de Canal Plus et de Seagram (hors vins et spiritueux). Source : Les grands groupes des industries culturelles (DEP, Ministère de la culture, 2002). 16. Les données concernant Vivendi Universal ont été retraitées pour rendre compte des activités du groupe dans son périmètre du début 2001. Autrement dit, sont comptabilisées les activités de Vivendi (uniquement Médias et Communication et Environnement), de Canal Plus et de Seagram (hors Vins et spiritueux). Le chiffre d’affaires officiel de Vivendi Universal pour 2000 ne comptabilise, par exemple, les activités d’Universal Studio et Universal Music que sur trois semaines. En 1999, le chiffre d’affaires de Vivendi (uniquement Médias et Communication et hors Canal Plus) se montait à 7,52 milliards d’euros, celui de Canal Plus à 3,3 milliards d’euros et celui de Seagram (hors Vins et spiritueux) à 10,5 milliards de dollars. 157 LES GRANDS GROUPES DES INDUSTRIES CULTURELLES Le groupe en 1998 et 1999 en milliards d’euros Chiffre d’affaires Chiffre d’affaires Résultat net Taux de marge nette (résultat net/CA) Capitaux propres Rentabilité (résultat net/capitaux propres) Endettement à moyen/long terme Investissements (y compris croissance externe) 1999* 1998* 12,006 56,405 1,142 2,0 % 25,238 4,5 % 28,469 31,284 11,924 42,836 1,809 4,2 % 18,822 9,6 % 13,501 11,001 * Vivendi + Seagram + Canal Plus. Source : Les grands groupes des industries culturelles (DEP, Ministère de la culture, 2002). Origine et évolution Le 8 décembre 2000, les groupes français Vivendi (ex-Compagnie générale des eaux), Canal Plus et le groupe canadien Seagram ont officiellement fusionné pour donner naissance au second groupe de communication au monde. Fondée en 1853, la Compagnie générale des eaux (CGE) est restée plus d’un siècle focalisée sur son métier de base avant de se diversifier dans la gestion des déchets (1980), l’énergie (1981), la construction et l’immobilier (1988), les télécommunications : création de l’opérateur de téléphonie mobile SFR (1987) et, à la suite de la dérégulation des télécommunications françaises et européennes, de Cégétel (1998). À partir de 1984, le groupe se diversifie vers l’audiovisuel et la communication en participant à la création de Canal Plus. En 1998, la CGE absorbe le groupe Havas (via cette absorption, le groupe augmente sa participation dans Canal Plus à 49 %). Havas était alors le numéro un de la communication en France et le cinquième au monde. Il était notamment présent dans l’audiovisuel (via sa participation dans Canal Plus, dont il fut également à l’origine, et dans une participation dans la CLT-UFA, dont il se défait en 1999) et dans l’édition (via CEP Communication et ses 80 magazines grand public et professionnels) et venait d’acheter en 1998 le groupe américain Cendant Softwares (numéro un du jeu sur ordinateur et numéro deux du logiciel éducatif aux États-Unis) pour 800 millions de dollars. À la suite de l’absorption de Havas, la CGE a été rebaptisée Vivendi. Canal Plus, née en 1984, est devenue en quinze ans le numéro un européen de la télévision à péage. Dès 1989, la chaîne a été déclinée à l’étranger (Belgique, puis Espagne, Afrique francophone, Pologne, Pays Nordiques, Italie et Pays-Bas), un an plus tard elle lançait des chaînes thématiques, initialement destinées au réseau câblé. En 1996, le groupe lance le premier bouquet numérique européen CanalSatellite Numérique (étendu à l’Espagne un an plus tard). En 1997, il fait 158 Annexes – Les sept géants l’acquisition du groupe néerlandais Nethold, troisième opérateur européen de télévision à péage, ce qui lui donne le contrôle du bouquet numérique italien Telepiù et de FilmNet, qui regroupe des chaînes à péage en Scandinavie et au Benelux. En revanche, Canal Plus s’est défait de sa participation dans la chaîne à péage allemande, Premiere, cédée au groupe Kirch. Parallèlement, le groupe s’est intégré en amont dans la production et la distribution cinématographique et audiovisuelle et a acquis, en 1996, le catalogue de droits français UGC DA (4 000 films, 1 200 heures de programmes télévisés). En aval, il s’est diversifié, généralement en partenariats, vers la maîtrise des technologies de diffusion (décodeurs, logiciels pour la télévision numérique) et dans le contrôle de (petits) réseaux câblés. Né en 1928, le métier de base de Seagram réside dans les vins et spiritueux. Après être devenu un des premiers groupes agro-alimentaires mondiaux, Seagram s’est orienté vers les médias en procédant, coup sur coup, à deux acquisitions majeures : en 1995, les studios cinématographiques MCA-Universal (plus Universal Music), une des majors hollywoodiennes, qu’il rebaptise Universal Studio (coût 5,7 milliards de dollars), et, en 1998, Polygram (le leader mondial de l’industrie du disque, coût 10,4 milliards de dollars17). Compte tenu de l’endettement de Seagram (7,5 milliards de dollars), et de la volonté de Vivendi de se recentrer sur les métiers des médias et de la communication, la fusion Vivendi/Seagram/Canal Plus a entraîné, ou va entraîner, de nombreuses cessions : Vivendi s’est séparé de ses derniers actifs dans la construction et dans l’immobilier (Vinci) en début d’année 2000, les activités dans l’énergie, les transports, la gestion de l’eau et la propreté ont été regroupées dans une filiale, Vivendi Environnement, dont 40 % ont été introduits en bourse en juillet 2000. Le groupe a vocation à se séparer des 60 % restant mais ne peut le faire, pour des raisons légales, avant 2003. Parmi les actifs qui appartenaient à Havas, Havas Voyages, Avenir (publicité) et une partie de la presse grand public (dont Le Point) ont également été cédés. De même que, en novembre 1999, les 18,7 % qu’Havas détenait dans Audiofina (qui contrôlait à 50 % la CLT-UFA). Au total, ces cessions ont représenté les deux tiers du chiffre d’affaires que réalisait Havas en 1997. Enfin, chez Seagram, c’est la division Vins et spiritueux qui a été vendue à Pernod-Diageo, fin 2000, pour 8,2 milliards de dollars. Au total, le chiffre d’affaires 2000 de Vivendi Universal, ne comprendra plus, en dehors de Vivendi Environnement, que 1,7 milliard d’euros correspondant à des activités hors des médias et communication. Compte tenu des autres cessions, ou abandons de participation, requises par les autorités antitrust européennes (voir supra), c’est un groupe quasiment désendetté qui émerge de cette fusion. 17. Polygram possédait également des actifs dans le cinéma qui ont été revendus par Seagram à la Metro Goldwin Mayer et à USA network. 159 LES GRANDS GROUPES DES INDUSTRIES CULTURELLES Vivendi Universal présente une répartition internationale de ses activités plus équilibrée qu’AOL Time Warner, même si son taux d’internationalisation reste plus faible que celui de Bertelsmann par exemple, et dispose sur le papier, tout comme son rival américain, d’une complémentarité d’activités exemplaire : production de contenus (éditoriaux, audiovisuels, musicaux) et circuits de distribution classique et électronique (réseau de télévisions câblées, téléphonie mobile, bouquet satellitaire, portail Internet Vizzavi). Le groupe est en droit d’attendre d’un tel degré d’intégration verticale, une plus grande réactivité face aux modifications des conditions du marché (innovations technologiques, évolution des attentes des consommateurs, évolution de l’intensité concurrentielle…) et la capacité de capter toutes les marges créées tout au long de la chaîne de valeur. Vivendi Universal escompte, en outre, d’importantes synergies de coûts mais aussi de revenus (source d’augmentation du chiffre d’affaires). Les synergies de coûts devraient permettre de dégager un supplément de 420 millions d’euros pour l’excédent brut d’exploitation de 2002 (frais généraux fonctionnels, économies d’échelle de distribution, possibilités de réaliser des achats groupés, partage des dépenses consacrées aux technologies de l’information18). Les synergies de revenus pourraient représenter 220 millions d’euros en 2002 et dépasser les 400 millions d’euros en 2003. Ces synergies seront réalisées grâce à une série d’initiatives croisées entre les différentes activités : – les combinaisons de contenus (tous les contenus appartenant au groupe seront systématiquement déclinés sur l’ensemble des actifs de distribution : films, magazines, jeux vidéos, parcs à thèmes…) ; – synergies entre le portail Internet, Vizzavi, et les contenus d’Universal (films, musique) dans une perspective de distribution électronique ; – coopérations possibles entre Canal Plus et Universal Studios (coproductions, exclusivité pour les chaînes de Canal Plus de la production d’Universal Studios…) ; – possibilité de vendre des abonnements regroupant un bouquet numérique de chaînes de télévision, une ligne de téléphone mobile, un accès à Internet, un crédit de téléchargement de musique, de films… Cependant, le potentiel de ces synergies est sans doute surestimé par le groupe (voir supra) et, en tout état de cause, les conditions mises par la Commission européenne à l’autorisation de cette fusion en ont déjà fragilisé certaines. 18. Voir texte de la conférence pour les investisseurs et analystes financiers du 12 octobre 2000 à Paris (www.vivendi.com). 160 Annexes – Les sept géants Les différentes activités médias (hors télécommunications19) Production audiovisuelle Cette activité constitue certainement celle qui pose le plus de problèmes au sein de la nouvelle organisation du groupe. L’indépendance de Canal Plus20, et plus particulièrement de Studio Canal (qui regroupe les activités production, distribution et gestion de droits et qui aspire à devenir une major européenne), vis-àvis d’Universal Studio a fait couler beaucoup d’encre et a focalisé les réticences de la profession face à la fusion. Finalement, Studio Canal devrait garder son indépendance par rapport à la major américaine, mais aura sans doute à renoncer à ses coproductions américaines pour produire européen, au risque, d’ailleurs, de déséquilibrer un catalogue jusqu’ici harmonieusement réparti entre films américains, européens et français. Ellipse Programme assure la production télévisée du groupe Canal Plus (plus de 500 heures produites en 1999). La somme du catalogue de droits audiovisuels de Canal Plus, qui est le numéro deux européen suite, notamment, aux rachats des catalogues de Carolco et d’UGCDA, avec 6 000 heures de programmes de télévision et 5 600 films (dont un tiers de films français) et de celui d’Universal Studio (4 000 films et 24 000 épisodes de séries télévisées) en fait sans doute le plus important au monde. Vivendi contrôle à 39 % UGC. UGC est le leader européen de l’exploitation en salles suite à l’acquisition des 300 cinémas britanniques du réseau Virgin. UGC assure également une activité de régie publicitaire cinématographique et produit et distribue des films (1er distributeur français grâce à la filiale UGC FOX Distribution). Studio Canal est également présent dans la distribution, dans ce domaine le groupe a procédé à trois acquisitions récentes (Tobis en Allemagne, Bac Films en France, et Studio Canal Espagne avec Sogepaq). Universal Studio, quant à lui, est présent à tous les stades de la filière du cinéma (notamment dans la distribution en vidéocassettes et de dévédéroms) et possède également des parcs à thèmes. Universal est en outre producteur de jeux vidéos. Diffusion télévisuelle Canal Plus est le premier opérateur européen de télévision à péage (14 millions d’abonnements aux chaînes à péage dans 11 pays européens), de télévision 19. Par l’intermédiaire de sa filiale Cegetel (détenue à 51,5 %), Vivendi Universal est le premier opérateur privé de télécommunications en France (15 % de part du marché global des télécommunications en France en 2000). Le groupe possède SFR, le deuxième réseau français de téléphonie mobile qui comptait 10 millions de clients à fin 2000, et le « 7 » (téléphonie fixe longue distance) qui enregistrait 2 millions de clients. En outre Vivendi Universal est présent à l’international sur le marché des télécommunications dans une dizaine de pays avec Vivendi Telecom International (en Espagne Xfera a été retenu pour la 1re licence de téléphonie mobile UMTS). 20. Pour se conformer à la loi française, qui interdit à un même actionnaire de détenir plus de 49 % d’une chaîne hertzienne, Canal Plus a été scindé en deux. D’une part, Canal SA qui exploite la chaîne française (détenue à 49 % par le nouvel ensemble) et, d’autre part, Canal Plus Groupe, détenu à 100 % par Vivendi Universal qui rassemble tous les autres actifs, dans le satellite, le câble, Internet, la technologie, la production et les filiales étrangères. 161 LES GRANDS GROUPES DES INDUSTRIES CULTURELLES numérique avec les bouquets CanalSatellite Numérique (France, détenu à 66 %), Telepiù (Italie) et CanalSatellite Digital (Espagne, 40 % d’abonnements des abonnements précités sont numériques). Il est également le premier producteur européen de chaînes thématiques (25 chaînes thématiques présentes dans 14 pays, dont Planète, CanalJimmy, CinéClassic, CinéCinéma…) avec une part minoritaire (27,42 % + 9 % détenus par Vivendi Images) dans la société d’édition de chaînes Multithématiques. Cependant, début mars 2001, Vivendi Universal, via Canal Plus, envisageait d’échanger ses parts dans BSkyB contre les 27,42 % détenus par Liberty Media dans Multithématiques. Vivendi Universal détient depuis lors 63,93 % de Multithématiques. Universal possède également de nombreuses chaînes thématiques : 13th Street (Allemagne), 13e rue (France), Calle 13 (Espagne), Studio Universal (Italie, Allemagne), Sci.Fi (Royaume-Uni, Afrique du Sud), USA Network Latin America, USA Network Brazil… Enfin, le groupe Canal Plus est l’un des leaders mondiaux pour la technologie de contrôle d’accès et d’interactivité (7 millions de terminaux numériques utilisent ainsi la technologie Canal Plus). Édition Le pôle édition du groupe est constitué des actifs d’Havas qui sont maintenant regroupés sous le nom de Vivendi Universal Publishing (VUP). Du livre au cédérom, Havas est un des leaders mondiaux dans les secteurs de l’édition (60 maisons d’édition, 80 millions de livres vendus par an), de l’information (80 titres de presse, 5 millions d’exemplaires) et du multimédia (40 millions de cédéroms vendus par an). Havas est présent sur 5 grands marchés : – Jeux (deuxième acteur mondial des jeux sur PC) et notamment jeux en ligne. Flipside.com est un des dix sites les plus fréquentés aux États-Unis. De plus, le groupe a racheté, en 2000, Prizecentral, une des plus importantes sociétés du jeu en ligne outre-Atlantique, et, en 2001, Uproar (6 millions de joueurs hebdomadaires) pour un prix de 140 millions de dollars21. – Éducation et référence. Vivendi Universal Publishing occupe une position de leader mondial pour les contenus éducatifs sur PC (Adi – Adibou…) grâce notamment au rachat en 1998 de Cendant Softwares le producteur américain de logiciels de jeux et éducatifs. Le groupe possède un important portefeuille d’éditeurs scolaires : Nathan, Bordas, Anaya (2e éditeur éducation et multimédias en Espagne), Atica Scipione… Il possède également des maisons d’édition de réputation internationale : Larousse, Harrap, Chambers… Enfin, début 2001, VUP a lancé son portail Internet Éducation.com. Lancé simultanément en français, en allemand et en 21. Grâce à la chute du NASDAQ, Vivendi Universal, via sa filiale Flipside.com, n’a payé que l’équivalent de 3 dollars par action alors que le titre côtait 27 dollars lors de son introduction. 162 Annexes – Les sept géants anglais, bientôt espagnol et en portugais, Éducation.com s’adresse aux parents, aux enseignants et aux enfants. Selon le public, il propose des contenus axés sur le travail scolaire, le jeu, des conseils éducatifs, des modules de révision, ainsi que des services communautaires comme des salles de classe ou des professeurs virtuels22. – Littérature. Vivendi Universal Publishing est le numéro un français dans ce domaine : Laffont, Plon-Perrin, les Presses de la Cité23, Solar-Belfond, Havas Poche… Jusqu’en mars 2001, Vivendi détenait également 50 % de France Loisirs. – Santé. VUP occupe la troisième place mondiale pour l’information médicale avec des journaux (Medical Observer, Le Quotidien du Médecin, Staywell) et les publications du Vidal, Masson, MIMS… Début 2001, VUP a fait l’acquisition de du groupe britannique Medecine Publishing. – Information générale et spécialisée. Le groupe est numéro deux en Europe pour l’information professionnelle. Il possède des magazines (L’Express, Building, L’Expansion, Property Week, 01 Informatique, L’Étudiant…), des maisons d’édition (Dalloz, Dunod,…) ainsi que des sites Internet spécialisés. En 2001, VUP a annoncé qu’il entendait rapprocher les titres L’Express, L’Expansion et L’Étudiant24. Il n’est pas aisé de savoir si VUP cherche à conforter ces titres pour les garder dans le giron du groupe ou, au contraire, pour mieux les céder. Musique Numéro un mondial de la musique avec environ 22 % du marché mondial en 1999, Universal Music Group (UMG) est implanté dans 63 pays. Leader en Amérique du Nord (28 % du marché), en Amérique latine et en Europe (33 % du marché français), UMG compte des dizaines de labels (MCA Records, Deutsche Grammophon, Universal Records, Philips, Polydor, A&M Records…) et dispose, en outre, d’un catalogue de droits de 800 000 titres. UMG occupe des positions fortes dans les nouvelles technologies, le commerce électronique et la convergence multimédia (voir supra, l’alliance avec Sony dans la musique en ligne). Par exemple, à l’été 2000, Universal Music a lancé des versions tests de Bluematter aux États-Unis. Ce service en ligne propose de télécharger des titres de musique (déjà plus de 300) enrichis de contenu éditorial (photos, biographie des artistes, paroles des chansons…). D’autre part, Universal Music teste actuellement une formule d’abonnement en ligne à travers 22. Éducation.com offre un bon exemple des possibilités de promotion croisée qu’offre un groupe diversifié et verticalement intégré : les 40 millions de cédéroms Adibou vendus dans le monde chaque année mentionneront cette adresse, ainsi que toutes les collections d’ouvrages parascolaires de Nathan, de même que le Journal des instituteurs (qui appartient à VUP). 23. Racheté en 1996 par CEP Communication, la filiale de Havas. 24. Avec pour objectif, comme tout groupe éditorial, d’atteindre une taille critique suffisante sur un segment de marché pour être jugé attractif par les annonceurs. 163 LES GRANDS GROUPES DES INDUSTRIES CULTURELLES Farmclub.com. Dans sa version test, ce programme propose à l’écoute en ligne plus de 30 000 titres du catalogue Universal. Internet Par l’intermédiaire de sa filiale VivendiNet, Vivendi Universal apparaît comme un groupe particulièrement actif sur l’Internet, activité qui est cependant loin d’avoir rencontré, pour l’année 2000, le succès commercial escompté. Le portail multi-accès Vizzavi, créé en juin 2000, connaît un démarrage extrêmement lent. Vizzavi propose, à partir de tout type d’interface (téléphone mobile, ordinateur, et bientôt télévision interactive et agenda électronique), d’accéder à des informations en continu, à des services personnalisés et localisés et de consulter des sites Internet. Créé en partenariat avec Vodafone, leader mondial du téléphone mobile, Vizzavi, qui ambitionne de devenir le premier portail Internet européen multi-accès, s’appuie notamment sur les contenus de Vivendi Universal : la presse, l’édition et les jeux de VUP, les sites Internet de Canal Plus (sports, cinéma…), les films et la musique d’Universal… (voir infra, la création du portail education.com). Si Vizzavi dispose de 80 millions de clients potentiels en Europe (les abonnés des deux groupes en téléphonie mobile, télévision payante…), il a généré moins de 50 millions d’euros de chiffre d’affaires en 2000. Il est vrai que le portail n’était qu’accessible qu’en français. D’ici la fin 2001, Vizzavi sera disponible dans neuf pays européens dans des versions adaptées à chaque pays. Canal Plus dispose, quant à lui, d’un savoir-faire dans le domaine numérique via ses filiales Canal Plus Technologies (solutions logicielles pour la TV numérique) et NC Numéricâble, la filiale gérant son réseau câblé qui a lancé, conjointement avec AOL France, une offre d’Internet à haut débit sur le câble en octobre 1999. Principales alliances Vivendi Universal met en œuvre toute une série d’alliances standards compte tenu des métiers du groupe : accords d’approvisionnement de long terme entre Universal Studio et des chaînes de télévision européennes ou entre les chaînes du groupe (notamment Canal Plus) et d’autres studios de production, coproductions dans le cinéma et l’audiovisuel, partage de chaînes de télévision étrangères avec des partenaires locaux ou non… Ce sont ici les alliances majeures conclues par les diverses entités du groupe, celles conclues dans l’Internet et le devenir de ces alliances suite à la fusion Vivendi Universal qui retiennent l’attention de cette étude. Depuis 1998, Vivendi était à la recherche de partenariats pour s’imposer comme un géant des médias ou des télécoms, car sa stratégie n’était pas très claire. Par exemple, en 1998, un rapprochement envisagé avec Bertelsmann dans la presse professionnelle n’a finalement pu se faire (voir annexe Bertelsmann). Début 2000, l’alliance avec l’opérateur des télécommunications britannique Vodafone 164 Annexes – Les sept géants (déjà actionnaire de Cegetel à hauteur de 15 %), pour lancer le portail Internet Vizzavi reposait sur un avantage mutuel : Vodafone amenait ses 48 millions d’abonnés au téléphone mobile dans le monde, Vivendi les contenus éditoriaux de Havas et les programmes audiovisuels de Canal Plus à leur vendre. Cette alliance s’inscrivait tout à fait dans la logique de la fusion ultérieure avec Universal. Pourtant, elle était en balance avec la fusion de Vivendi et de l’allemand Mannesmann. Pour ce dernier, cette fusion aurait permis de contrer la prise de contrôle hostile par offre publique d’échanges (OPE) lancée par Vodafone25. Pour Vivendi, cela aurait représenté une orientation vers les télécoms plutôt que les médias. La création de Vizzavi a eu pour conséquence la sortie de Vivendi du capital d’AOL France (dont il détenait 55 % via Canal Plus). D’une part, Vizzavi se posait comme un rival direct d’AOL (une clause de non concurrence a ainsi empêché Vizzavi de proposer un accès direct à Internet), de plus les performances d’AOL France sont assez décevantes (croissance bien moins rapide que Wanadoo). Avant la fusion avec Universal, Vivendi avait entrepris une montée en puissance dans BSkyB, initialement sans l’assentiment de Rupert Murdoch. En janvier 1999, Vivendi se rapproche de Pathé (pour en détenir, avec Canal Plus, 24,6 %), ce qui lui permet de reprendre les 17 % détenus par Pathé dans BSkyB. Puis, en juillet de la même année, Vivendi rachète les 7,7 % détenus par Pearson et Granada. Avec 24,7 % du capital de l’entreprise britannique (soit une minorité de blocage), contre près de 40 % à News Corp, des interrogations sont vites apparues sur le futur leadership de BSkyB. Prendre le contrôle de BSkyB aurait donné à Vivendi une position hégémonique sur la télévision payante européenne. Cependant, des discussions entre Vivendi et News Corp sur une éventuelle fusion Canal Plus/BSkyB avaient déjà échoué courant 1999 (voir annexe News Corp). Il était également possible d’envisager un renforcement de la coopération entre Vivendi et News Corp. Par exemple, Vivendi était prêt à échanger ses 24,7 % dans BSkyB contre une participation dans Sky Global26 (suffisamment importante pour en être le deuxième actionnaire) et un rôle actif dans la définition de la stratégie de Sky Global. Autrement dit, Vivendi désirait ne pas être un simple investisseur, mais un véritable partenaire. Rupert Murdoch est prêt à accepter la première condition, mais pas la seconde. Dans le domaine d’Internet et notamment de la diffusion en ligne de contenus, les diverses entités du groupe se sont, comme tous leurs concurrents à l’exception de Disney, appuyés sur des alliances : Vivendi avec Vodafone pour créer Vizzavi (voir infra), Universal Music avec Bertelsmann Music Group pour créer la joint-venture GetMusic (vente en ligne d’œuvres musicales27), etc. De plus, 25. Cette fusion, d’un montant de 186 milliards d’euros contre 158 milliards d’euros pour AOL/Time Warner, a finalement eu lieu en février 2000 et a engendré le leader mondial de la téléphonie mobile. 26. La société regroupant tous les actifs de News Corp dans la télévision numérique, voir annexe News Corp. 27. Vivendi a annoncé en mars 2001 vouloir racheter la part de Bertelsmann. 165 LES GRANDS GROUPES DES INDUSTRIES CULTURELLES en février 2001 Vivendi Universal a annoncé la conclusion d’un accord avec Sony Music pour créer une joint-venture, baptisée Press Play (ex-Duet), pour l’exploitation de la musique en ligne. L’objectif est de proposer simultanément les catalogues des deux groupes (quasiment 50 % de la musique mondiale) à des internautes via un système qui ne sera pas nécessairement dans le format MP3. En ne cherchant pas à s’allier avec Napster28, ou avec d’autres sites gratuits, mais au contraire en construisant un site propre, Vivendi Universal adopte donc une stratégie radicalement différente de celle initialement adoptée par Bertelsmann. De plus, Vivendi Universal travaille avec Sony à rendre compatibles les appareils de Sony (baladeurs, lecteurs de dévédéroms, Playstation, etc.) et un décodeur de Canal Plus « intelligent » (avec un disque dur incorporé). Tout ce qui serait téléchargé ou enregistré sur ce décodeur, moyennant paiement, pourrait alors être facilement transféré sur n’importe quel appareil et/ou reproduit sur tout type de support. Le groupe dispose également de Viventures, fonds de capital-risque doté de 700 millions d’euros qui a pris des participations dans 54 entreprises Internet (dont 20 aux Etats-Unis et 15 en France). En juillet 1999, Vivendi avait créé une joint-venture à parité avec le groupe japonais Softbank, @viso, dont l’objectif est de contribuer au développement en Europe continentale des start-up Internet américaines (Softbank a des participations dans Yahoo !, E*Trade…). Enfin, signalons que la Commission européenne n’a autorisé la fusion Vivendi/Universal/Canal Plus que sous trois conditions qui auront des conséquences sur la stratégie d’alliances suivie par le groupe : – la cession de la participation détenue dans BSkyB dans les deux ans ; – l’engagement de ne pas restreindre l’utilisation du catalogue d’Universal Music pour le commerce en ligne au seul portail Vizzavi ; – l’obligation de réserver 50 % des droits des productions de Universal Studio aux concurrents de Canal Plus dans tous les pays européens où cette chaîne est présente. Le groupe en 1998 et 1999 Il convient de souligner que la fusion Vivendi Universal conduit à réunir les activités peu bénéficiaires ou déficitaires en 1999 et à céder, ou à envisager de céder, les activités les plus rentables (division vins et spiritueux de Seagram, Vivendi Environnement). En effet, en 1999, le résultat d’exploitation de Canal Plus était négatif (– 23 millions d’euros), de même que celui d’Universal Music et d’Universal Studio (respectivement – 126 et – 206 millions de dollars). Celui de Vivendi Communication (hors Canal Plus) atteignait + 248 millions d’euros. La situation semblait s’améliorer chez Universal puisqu’en mars 2000, sur neuf 28. Selon Jean-Marie Messier, Napster exige dans le cadre d’un tel accord le reversement de 40 % des recettes engendrées par la distribution en ligne. Ce que le président-directeur général de Vivendi Universal estime être prohibitif. 166 Annexes – Les sept géants mois d’exercice, les résultats d’exploitation des branches musique et cinéma étaient respectivement de + 265 et – 140 millions de dollars. Forces et faiblesses Forces Faiblesses • Numéro deux mondial de l’industrie des médias (derrière AOL/Time Warner), numéro un européen (devant Bertelsmann). • Canal Plus et Universal Studio en déficit en 1999. Croissance des abonnements de Canal Plus de 9 % en 2000 contre 16 % les années précédentes. • Une richesse de contenus : numéro un mondial dans la musique, le catalogue de droits audiovisuels le plus important du monde, leader européen de la télévision payante, un des plus grands éditeurs européens. • Très lent démarrage du portail Vizzavi (moins de 50 millions d’euros de chiffre d’affaires en 2000). • Les difficultés rencontrées par l’UMTS, notamment en France, peuvent fragiliser le développement de la diffusion de contenus en ligne. Boucle local radio peut être un substitut mais Vivendi n’a pas obtenu de licence en France en juillet 2000. • Exceptionnelle intégration verticale : contenus, diffusion classique, téléphonie mobile, Internet (Vizzavi). • Bonne maîtrise des technologies de télévision numérique (Canal Plus Technologies) et d’Internet à haut débit par le câble (NC Numéricâble*), fort potentiel dans Internet via la téléphonie mobile (SFR, alliance Vodafone). • Obstacles culturels à la fusion : réaction d’Universal Music mais surtout d’Universal Studio à une prise de contrôle par une entreprise française : Canal Plus a déjà connu des déboires à Hollywood, le Crédit lyonnais et les groupes japonais comme Sony (Columbia Tristar) et Matsushita (qui a revendu Universal à Seagram) également. De plus, Universal Studio a changé quatre fois de mains en 10 ans ! • Très faible endettement suite aux diverses cessions. * Il semble cependant que, compte tenu des difficultés financières de Canal Plus (pertes d’1 milliard de francs en 2000), la cession de NC Numéricâble soit décidée. 167 LES GRANDS GROUPES DES INDUSTRIES CULTURELLES Le second ensemble de groupes réunit les firmes européennes de taille moyenne : – EMI – Lagardère – Pearson – Reed Elsevier 168 Annexe – Les firmes européennes de taille moyenne 2.1. EMI Group 3e groupe mondial de l’industrie musicale – Dernière major indépendante Chiffre d’affaires (2000*) dont médias Résultat net Taux de marge nette (résultat net/CA) Employés Activités médias Activités hors-médias Pays d’origine P.-D.G. 3,637 milliards d’euros 100 % 0,241 milliard d’euros 6,6 % non communiqué Production musicale, édition – gestion de droits néant Grande-Bretagne Eric Nicoli * Exercice clos le 31 mars 2000. Répartition du chiffre d’affaires en 1999 par activités par zone géographique % du chiffre d’affaires Activité Production musicale Édition – gestion de droits Total États-Unis Royaume-Uni Europe (hors R.-U.) Amérique du Nord Asie Reste du monde Total % du chiffre d’affaires 85,1 14,9 100,0 76,0 12,2 30,4 30,4 19,2 7,8 100,0 Le groupe en 1998 et 1999 en milliards d’euros Chiffre d’affaires Résultat net Taux de marge nette (résultat net/CA) Capitaux propres Rentabilité (résultat net/capitaux propres) Endettement à moyen/long terme Investissements (y compris croissance externe) 1999* 1998* 3,637 0,241 6,6 % 4,588 5,2 % 1,404 0,346 3,617 0,187 5,2 % 3,651 5,1 % 1,105 0,125 * Exercice clos le 31 mars de l’année n + 1. Source : Les grands groupes des industries culturelles (DEP, Ministère de la culture, 2002). 169 LES GRANDS GROUPES DES INDUSTRIES CULTURELLES Origine et évolution du groupe Producteur musical depuis un siècle, EMI était, jusqu’en 1996, associé avec Thorn au sein du groupe Thorn-EMI. Vaste conglomérat jusqu’au milieu des années 1980, Thorn-Emi s’était progressivement recentré sur quelques métiers, dont l’industrie musicale, avant d’être scindé en deux entités séparées, dont EMI Group, en août 1996. Tout au long des années 1990, EMI s’est renforcé sur ses deux métiers, la production musicale et l’édition musicale (la gestion des droits), notamment par croissance externe. Parmi les acquisitions les plus significatives se trouvent Crysalis Records (1990) et Virgin Records (1992) pour 1,1 milliard d’euros. En 1998, le groupe s’est en revanche désengagé de la distribution en revendant ses deux réseaux de détaillants, HMV et Dillons. Aujourd’hui, EMI Group est donc totalement centré sur les métiers de la musique et réalise environ 13 % des ventes de l’industrie musicale, ce qui le situe au troisième rang mondial. Ces deux caractéristiques, focalisation dans l’industrie musicale et place parmi les cinq majors mondiales, en font d’ailleurs un groupe particulièrement convoité par les géants de l’industrie des médias désirant renforcer leur secteur musical. Une fusion avait été annoncée en janvier 2000 avec Time Warner (qui aurait alors formé AOL/Time Warner/EMI), mais a été abandonnée suite aux réactions négatives des autorités antitrust. En janvier 2001, Bertelsmann se trouvait en phase de négociation avancée pour fusionner BMG et EMI, projet finalement abandonné. Dans les deux cas, ces fusions auraient conduit à la création du numéro un mondial de l’industrie musicale. Les différentes activités dans les médias Production musicale – musique enregistrée EMI produit annuellement plus de 1 000 albums, avec environ 1 500 groupes ou artistes, sur 70 labels (EMI, Virgin, Capitol, Chrysalis, Blue Note…). Il produit également ses propres supports cédéroms et, depuis 1998, des supports dévédéroms. Dans le multimédia, la stratégie d’EMI consiste à digitaliser l’ensemble de son catalogue, et à mener des partenariats pour développer des systèmes de diffusion en ligne payants avec paiement sécurisé (voir supra). Édition musicale – gestion de droits Par croissance externe, EMI s’est construit l’un des plus importants catalogues de droits musicaux au monde. Le catalogue qu’il gère contient en effet plus d’un million de titres. Les principales acquisitions, ces dernières années, ont été celle de Jobete Music Publishing (1997), Windswept Pacific Catalogue (1999) et Hit&Run Music Publishing (51 % en 1999). 170 Annexe – Les firmes européennes de taille moyenne Principales alliances Longtemps, EMI est resté en retrait du mouvement d’alliances globales nouées dans le monde de la communication et des médias. Il était, et entendait rester, un groupe indépendant (ou presque, durant la période Thorn-EMI) centré sur les métiers de la musique. Les alliances étaient alors exceptionnelles et relevaient de logiques bien précises, comme la pénétration de marchés culturellement éloignés. C’est, par exemple, la raison d’être de la joint-venture Toemi créée au Japon avec Toshiba en 1996. Mais depuis 1998, EMI suscite énormément de convoitise. D’une part, la scission entre Thorn et EMI a rendu toute acquisition plus abordable. D’autre part, certains groupes souhaitaient et souhaitent compléter leurs portefeuilles d’activités médias en se renforçant ou en se positionnant dans la musique. Enfin, face au développement attendu de la distribution électronique de musique, le catalogue d’EMI est devenu un actif des plus stratégiques. En effet, l’intérêt de tout site de téléchargement en ligne résidera dans la richesse de son catalogue. Ainsi, en 1998, c’est Seagram, et donc Universal Music, qui était pressenti pour se rapprocher d’EMI et former le premier groupe mondial du secteur. Finalement, jugeant EMI trop cher, Seagram avait fait l’acquisition de Polygram. Un an plus tard, en février 1999, la rumeur courait que News Corp, absent de l’industrie du disque, était prêt à racheter EMI pour 6,1 milliards d’euros. En janvier 2000, est annoncée la fusion Time Warner/EMI, opération dont le montant était évalué à 20 milliards de dollars. Cette fusion aurait donné naissance à un groupe contrôlant de 50 à 60 % du marché des droits musicaux (catalogue de plus de 2 500 titres) et plus de 25 % du marché de la production musicale. De plus, les majors seraient alors passées de cinq à quatre pour 80 % du marché. Face au risque d’abus de position dominante, la Commission européenne s’est montrée extrêmement réticente, et, en octobre 2000, malgré d’ultimes concessions (cession de Virgin Records et de Chapell Music), les deux groupes ont préféré abandonner le projet de fusion. Un mois plus tard, Bertelsmann annonçait qu’il avait repris les négociations avec EMI, toujours dans le même but : la fusion avec BMG29. Ce projet semble, pour l’instant, abandonné (voir fiche Bertelsmann). Comme tous les groupes présents dans le secteur musical, EMI a multiplié les alliances avec des firmes maîtrisant les technologies numériques afin de se positionner sur le marché de la musique en ligne, face aux sites gratuits d’une part, et face, surtout, aux autres majors musicales. En juin 1999, EMI avait pris 50 % du capital de musicmaker.com, une société spécialisée dans la vente de compilations, composées sur Internet par les clients, 29. L’évolution des indices des places boursières, et du titre EMI en particulier, faisait qu’EMI semblait plus abordable à Bertelsmann en 2001 qu’il y a deux ans. 171 LES GRANDS GROUPES DES INDUSTRIES CULTURELLES et envoyées par la poste à ceux-ci. Depuis, le groupe a conclu près d’une dizaine d’autres alliances du même type visant à diffuser en ligne de la musique via des partenaires (sanity.com, listen.com, RadioWave.com, etc.). La plus récente remonte à fin janvier 2001 (Virtuebroadcasting). En décembre 2000, EMI a signé un accord avec MusicBank, un concurrent de MP3.com, qui propose comme ce dernier d’héberger des catalogues de musique pour Internautes sur son site. Pour éviter les déboires de MP3.com30, MusicBank a négocié la rémunération d’EMI avant même l’ouverture du site. En août 2000, un accord a été conclu avec Nokia pour diffuser des œuvres musicales via téléphone mobile. En novembre 2000, EMI a annoncé, en coopération avec la société américaine Streamwaves, le lancement début 2001 d’un site de téléchargement de musique en ligne financé par abonnement. Enfin, EMI a également multiplié les alliances plus technologiques visant notamment à : – sécuriser les transactions en ligne : alliances avec Liquid Audio, Microsoft, Preview Systems, SuperTracks ; – régler la question de la gestion des droits lors de la distribution en ligne : alliances avec DX3 (Digital Distribution Domain), OD2 (On Demand Distribution). Forces et faiblesses Faiblesses Forces • Numéro musique. trois mondial de • Disney ou News Corp pourraient également être intéressés, voire un opérateur télécom ou Internet désirant acquérir des contenus. la • Richesse du catalogue de droits. • Bonne implantation internationale • Parmi les trois premiers, avec Sony et Vivendi Universal, à lancer son propre site de ventes en ligne. • Seule major musicale à être indépendante d’un grand groupe. 30. MP3.com ayant finalement mis un terme au procès engagé par les majors du disque en payant au total près de 160 millions de dollars de dommages et intérêts. 172 Annexe – Les firmes européennes de taille moyenne 2.2. Lagardère Numéro un mondial de la presse magazine Chiffre d’affaires (1999) dont médias Résultat net Taux de marge nette (résultat net/CA) Employés : Activités médias Activités hors-médias Pays d’origine P.-D.G. 12,285 milliards d’euros 6,884 milliards d’euros (56 %) 0,241 milliard d’euros 2,0 % 49 285 (dont 28 500 Lagardère Médias uniquement) Édition, presse, audiovisuel, multimédia Aéronautique-Défense, automobile France Jean-Luc Lagardère Répartition du chiffre d’affaires en 1999 par activités Activité Presse Distribution service Livre Audiovisuel Multimédia Total médias Aéronautique-Défense Automobile Total par zone géographique % du chiffre d’affaires 18,5 24,1 6,7 2,7 4,0 56,0 34,7 9,3 100,0 % du chiffre d’affaires France Europe (hors France) Amérique du Nord Reste du monde Total 40,0 32,0 24,0 4,0 100,0 Le groupe en 1998 et 1999 en milliards d’euros Chiffre d’affaires Résultat net Taux de marge nette (résultat net/CA) Capitaux propres Rentabilité (résultat net/capitaux propres) Endettement à moyen/long terme Investissements (y compris croissance externe) 1999* 1998* 12,285 0,241 2,0 % 2,322 10,4 % 1,668 1,269 10,692 0,280 2,6 % 1,947 14,4 % 1,163 0,688 Source : Les grands groupes des industries culturelles (DEP, Ministère de la culture, 2002). 173 LES GRANDS GROUPES DES INDUSTRIES CULTURELLES Origine et évolution En 1992, la fusion entre les sociétés Matra (hautes technologies, née en 1946) et Hachette (édition, née en 1828) a donné naissance au groupe Lagardère. À l’époque, cependant, Lagardère ne contrôlait que 37,6 % du capital de MatraHachette. En 1994, Lagardère a monté sa participation (par échanges d’actions) à 93,3 % et a lancé, en 1996, une opération de fusion-absorption de sa filiale (jusque-là maison-mère et filiale étaient toutes deux cotées en bourse). En 1999, la décision de créer un pôle aérospatial européen (EADS) a entraîné des modifications dans l’activité Hautes technologies de Lagardère. Suite à l’absorption de Matra Hautes Technologies par l’aérospatiale, Lagardère détient 33 % de ce dernier. En revanche, le groupe contrôle toujours à 100 % sa filiale Matra Automobile (qui coproduit la Renault Espace). Aujourd’hui, Lagardère est donc présent, à parts égales, dans deux domaines bien distincts, Médias et Hautes technologies, et, malgré les résistances internes que cela pourrait susciter, il est probable que ces deux activités soient totalement séparées dans un proche avenir. Il semble en revanche difficile d’assurer que c’est vers les médias que le groupe Lagardère choisira de se focaliser, même si la création d’EADS, et donc la marginalisation de Lagardère comme acteur indépendant dans ce domaine, tend à le faire croire. Dans les médias, Lagardère apparaît comme un groupe tout à la fois relativement internationalisé, 60 % de son chiffre d’affaires sont réalisés hors de France, mais très européen (28 % seulement des ventes proviennent des activités non européennes). Les différentes activités médias Presse Magazine Par l’intermédiaire de sa filiale Hachette Filipacchi Médias (HFM), Lagardère est le numéro un mondial de la presse magazine. Le groupe publie plus de 200 titres (Elle, Paris-Match, etc.) dans 33 pays et en diffuse plus d’un milliard d’exemplaires par an. Il est le premier groupe de presse magazine en France (plus de 50 titres) et le premier éditeur non américain de magazines aux États-Unis. Un tiers du chiffre d’affaires est réalisé hors de France en 2000 : le groupe espère pouvoir atteindre à terme le seuil de 80 %. Il est également présent avec quelques titres dans la presse quotidienne régionale. Depuis 1999, Lagardère a affirmé sa stratégie de recentrage sur la presse : – cession de ses activités dans l’imprimerie, le produit de ces cessions pourrait atteindre 0,23 milliard d’euros, avec la contrainte de ne pas vendre à des concurrents sur le marché aval de la presse magazine (Bertelsmann par exemple) ; – cession des activités affichage (Publiprox) ; – cession de la radio SkyRock (héritée de Filipacchi) ; 174 Annexe – Les firmes européennes de taille moyenne – prise de participation de 50 % dans trois titres français du suédois Publications Bonnier en mai 2000 (coût 7,62 millions d’euros) ; – renforcement du réseau à l’international grâce aux acquisitions en 1999 de Rusconi (3e éditeur italien), de Fujin Gaho (4e éditeur de presse féminine au Japon) et à l’alliance, début 2001, avec le groupe Marie-Claire. L’objectif est de profiter des synergies à l’international, notamment sur le marché publicitaire, avec Elle, qui réalise 34 éditions internationales alors que Marie-Claire en compte 26. Lagardère est entré à hauteur de 42 % dans le capital de MarieClaire. Le coût de l’opération, 0,23 milliard d’euros, est financé par les cessions dans l’imprimerie ; – acquisition d’agences photographiques (Gamma en 1999, Keystone en 2000) : l’objectif de Lagardère est de disposer en propre d’un fonds photographique de 40 millions de clichés considéré comme indispensable dans la logique de gestion des contenus pour l’Internet. – rachat par OPE des 34 % que Lagardère ne détenait pas encore dans sa filiale HFM. Aujourd’hui, Lagardère contrôle HFM à 100 %. Distribution Services Lagardère est le leader mondial de la distribution et ventes au détail de presse (Hachette distribution services ou HDS). HDS est présent dans quinze pays d’Europe et d’Amérique du Nord et réalise 75 % de son chiffre d’affaires hors de l’hexagone. Les principales enseignes sont Relay (anciennement Relais H en France), et les magasins Extrapole (qui se positionnent sur le créneau de la FNAC). Il a notamment acquis UGS (250 boutiques au Canada) en 1998. Le groupe possède également 49 % des NMPP. En février 2001, HDS a créé la société Zendis pour la distribution de vente à distance (VPC, e-commerce) dans des points de ventes en France, en Belgique, en Suisse et bientôt en Espagne. Livres Derrière Havas (Vivendi Universal Publishing), Lagardère, grâce à sa filiale Hachette Livre, occupe la seconde position des éditeurs français. Il est même le numéro un en ce qui concerne le segment « Éducation ». La croissance de cette activité s’appuie sur des marques renommées dans l’édition grand public (Lattès, Stock, Calmann-Lévy, Le Guide du Routard), dans l’édition pour la jeunesse (50 % de Disney Hachette Édition) et/ou sur des opérations d’acquisition en France (le groupe Hatier en 1996) ou en Europe (Orion et Cassell en 1999 en Grande-Bretagne). Audiovisuel Par l’intermédiaire de sa filiale Europe 1 Communication, qu’il contrôle depuis avril 1999 à 98,3 % contre 45,1 % auparavant, Lagardère est présent tant dans 175 LES GRANDS GROUPES DES INDUSTRIES CULTURELLES la radio (numéro deux en France avec Europe 1, Europe 2, RFM et Europe Développement International) que dans la télévision et le cinéma. En 1999, Lagardère s’est renforcé dans les chaînes thématiques en rachetant le pôle MCM-Muzzik-Canal J et la chaîne Météo (via une participation à 65 % dans Comdev Images). De plus, en janvier 2000, Lagardère et Canal Plus ont conclu une alliance dans la télévision numérique permettant à Lagardère d’entrer dans le capital de CanalSatellite (34 %) et de Multithématiques (27,42 %) (voir supra). La société Europe Images, créée en 1994 en partenariat avec UGC, est une des principales sociétés françaises de distribution de programmes de télévision. Elle dispose d’un catalogue de plus de 7 000 heures. La filiale GMT Productions produit des programmes télévisés et Hachette Première des films cinématographiques. En revanche, Lagardère s’est désengagé de l’activité affichage en cédant, en mars 1999, sa participation de 97,5 % dans Giraudy (numéro deux européen de l’affichage en extérieur). Multimédia Lagardère.net fédère les activités du groupe dans le multimédia. Le groupe est présent dans les portails Internet : – généralistes avec Club Internet, 3e fournisseur d’accès payant en France derrière Wanadoo et AOL (Club-Internet a été cédé en février 2000, voir supra) ; – thématiques avec Mcity.fr (premier portail musical français composé de douze chaînes), elle.fr, pariscope.fr, paris-match.com, etc. La filiale « Le Studio » est le leader français du conseil en stratégie Internet pour les grandes entreprises. La filiale Hachette Multimédia regroupe l’édition de contenus de référence (encyclopédies, atlas, dictionnaires), d’éducation et de jeunesse (Teletubbies, etc.) et vie pratique (fiches cuisine Elle, etc.) sur cédéroms et en ligne. L’Encyclopédie Hachette Multimédia est le numéro deux des ventes en France. Cependant, face à l’essoufflement des ventes (fin 1999 les ventes de cédéroms se sont effondrées), et à la concurrence des encyclopédies en ligne gratuites, Hachette Multimédia a annoncé à l’été 2000 qu’il lancerait prochainement une encyclopédie gratuite sur Internet (financement assuré par des reversements des portails). En revanche, il semble que le groupe ait pris du retard sur Havas (Vivendi Universal Publishing), par exemple dans la numérisation des contenus éditoriaux. Afin de renforcer ses positions dans le multimédia, le groupe a procédé en 1999 et 2000 à des acquisitions : – SAT&CLIC : bouquet satellitaire de services interactifs destiné à 250 établissements scolaires ; – France Contact Distribution : vente par correspondance de produits multimédia, sur papier ou en ligne (marque digitall.fr) ; – Plurimédia : base de données sur le cinéma, la musique et les spectacles. 176 Annexe – Les firmes européennes de taille moyenne En revanche, Lagardère a annoncé, en avril 2000, la cession de sa filiale américaine Grolier, Inc. pour 400 millions de dollars (au groupe Scholastic). Grolier, Inc. est spécialisé dans les encyclopédies et les publications pour enfants en format multimédia, tant dans la publication proprement dite que dans la vente directe (par catalogue) ou en ligne. Principales alliances Outre des alliances d’importance moyenne (avec Dorling Kindersley, filiale de Pearson, pour développer Atout Clic, un outil d’entraînement scolaire, en Grande-Bretagne par exemple), Lagardère s’est lancé, début 2000, dans deux coopérations majeures. En janvier 2000, Lagardère s’est positionné sur le marché de la télévision numérique par une alliance avec Canal Plus, et donc Vivendi Universal. Il a en effet pris : – pour un montant de 1,07 milliard de francs, une participation de 34 % (rachetée pour 10 % à Time Warner et pour 20 % à Vivendi) dans le bouquet numérique Canal Satellite (dont les 66 % restant sont détenus par Canal Plus). Lagardère obtient ainsi minorité de blocage ; – une participation de 27,42 % dans la société d’édition de chaînes thématiques Multithématiques (dans laquelle sont également présentes à parts égales Canal Plus et Liberty Media31, et Vivendi Images à hauteur de 9 %). Cependant, en décembre 2001, Vivendi Universal, via Canal Plus, a vendu ses parts dans BSkyB et acheté 27,42 % détenus par Liberty Media dans Multithématiques. Lagardère est devenu alors largement minoritaire. Dans les deux cas, l’objectif de Lagardère est d’offrir de nouveaux débouchés à ses contenus. Par exemple, la création d’une chaîne thématique destinée au public féminin, basée sur les contenus et la notoriété internationale de Elle, et déclinée en version différente selon les pays, est envisagée. L’accord prévoyait ainsi la création de nouvelles chaînes autour des marques Lagardère par une société créée à 50/50 par Lagardère et Multithématiques, la création d’une société d’édition de chaînes thématiques (51 % Lagardère et 49 % Canal Plus) et d’une société d’édition de services interactifs (51 % Lagardère et 49 % Canal Plus). En mars 2001, Lagardère a annoncé la conclusion d’une alliance entre Extrapole et alapage.com (filiale de Wanadoo et donc de France Télécom) pour vendre des livres en ligne. En février 2000, Lagardère a cédé Club-Internet à la filiale de Deustch Telekom, T-Online, contre une participation de 6,5 % dans cette dernière. T-Online est le premier fournisseur européen d’accès à Internet. Cette cession, qui signifie la 31. Liberty Media est issue du câblo-opérateur américain TCI (racheté par AT&T en 1998). 177 LES GRANDS GROUPES DES INDUSTRIES CULTURELLES sortie de Lagardère du métier de la fourniture d’accès Internet, est agrémentée d’un accord susceptible d’assurer les débouchés des contenus de Lagardère.net. D’une part, durant 3 ans au moins, Lagardère.net approvisionnera en contenus Club-Internet et, d’autre part, T-Online n’aura pas l’exclusivité de ces contenus. Reste à savoir si une simple participation, très minoritaire dans un portail d’accès, peut suffire à assurer un débouché satisfaisant aux contenus de Lagardère.net. Forces et faiblesses Forces Faiblesses • 1er groupe mondial de presse magazine, 1er groupe de distribution de la presse, 2e éditeur français. • Activité multimédia en déficit chronique (résultat net = – 6,71 millions de francs en 1999). • Forte notoriété des contenus du groupe (Elle, Hachette, Gamma) • Absence de complémentarité entre les activités médias et hors médias. • Alliance avec T-Online dans l’Internet (cela suffira-t-il à assurer des débouchés aux contenus du groupe ?). • Relative faiblesse des activités audiovisuelles (même si des investissements récents ont été réalisés : CanaSatellite, Multithématiques, MCM). 178 Annexe – Les firmes européennes de taille moyenne 2.3. Pearson Chiffre d’affaires (1999) 5,079 milliards d’euros 4,538 milliards d’euros (hors Pearson TV) 100 % 0,448 milliard d’euros (avec Pearson TV) 8,8 % 24 000 Édition, presse, Internet néant Grande-Bretagne Lord Stevenson dont médias Résultat net Taux de marge nette (résultat net/CA) Employés Activités médias Activités hors-médias Pays d’origine P.-D.G. Répartition du chiffre d’affaires en 1999 (hors Pearson TV) par zone géographique par activités % du chiffre d’affaires Activité Édition éducation Édition grand public Presse Total % du chiffre d’affaires France Royaume-Uni Europe (hors R.-U.) Amérique du Nord Asie Reste du monde Total 57,9 19,0 23,1 100,0 40,0 13,0 13,5 64,9 6,7 1,9 100,0 Le groupe en 1998 et 1999 en milliards d’euros Chiffre d’affaires Chiffre d’affaires Résultat net Taux de marge nette (résultat net/CA) Capitaux propres Rentabilité (résultat net/capitaux propres) Endettement à moyen/long terme Investissements (y compris croissance externe) 1999 1998 12,285 5,079 0,448 8,8 % 2,014 22,2 % 3,469 0,658 10,692 3,651 0,666 18,2 % 1,598 41,7 % 3,423 4,796 Source : Les grands groupes des industries culturelles (DEP, Ministère de la culture, 2002). 179 LES GRANDS GROUPES DES INDUSTRIES CULTURELLES Origine et évolution du groupe Née en 1844, Pearson était à l’origine une société du bâtiment qui s’est tournée vers les médias en 1920. La société est ainsi devenue une des plus anciennes maisons d’édition de Grande-Bretagne et détient aujourd’hui des marques de réputation internationale : Penguin, Addison Wesley Longman, Prentice Hall. Dans le courant des années 1990, le groupe s’est diversifié dans l’audiovisuel (participation à la création de BSkyB en 1990 ; lancement, en partenariat avec la CLT, de Channel 5 en 1997…), dans la banque d’affaires (50 % de Lazard), dans le multimédia (rachat de Mindscape en 1994). Depuis, le groupe a entrepris de se recentrer (par exemple Mindscape a été cédé en 1998 ; la participation dans Lazard a été revendue en mars 2000) et n’était, en 1999, plus présent que sur quatre métiers : l’édition scolaire et universitaire, l’édition grand public, la presse et la télévision. En avril 2000, la CLT-UFA (détenue à 50 % par Bertelsmann) et Pearson TV, la filiale télévision du groupe, ont fusionné pour former RTL Group. La nouvelle répartition du capital devenait alors : 37 % pour Bertelsmann, 30 % pour Audiofina (Groupe Bruxelles Lambert) et 22 % pour Pearson. Cependant, début 2001, Bertelsmann a porté sa part à 67 %, suite à la sortie d’Audiofina, marginalisant ainsi complètement Pearson au sein de RTL Group. Le rapport de force entre Bertelsmann et Pearson laisse penser que, dans les faits, Pearson est sorti du secteur de la télévision et s’est recentré uniquement sur les activités de Presse/édition. Les différentes activités médias Édition éducative Ces activités sont regroupées dans la division Pearson Education. Depuis le rachat, en 1998, des actifs de l’éditeur américain Simon & Schuster (à Viacom pour 4,6 milliards de dollars), Pearson est devenu le numéro un de l’édition éducative outre-Atlantique et dans le monde. Et ce, tant sur le segment des livres scolaires que sur celui des ouvrages universitaires (Addison Wesley, Prentice Hall, etc.). Le groupe a fait l’acquisition, en août 2000, de la société américaine de services éducatifs National Computer Systems, pour un coût de 2,5 milliards de dollars. Cette acquisition devrait permettre d’offrir simultanément aux établissements scolaires les contenus et les moyens de transmission. Outre une forte présence sur Internet via des évaluations en ligne et des cours électroniques (par l’intermédiaire de NCSLearn), en septembre 2000, le groupe a lancé un projet plus ambitieux, le Learning Network, un service éducatif global sur Internet (contenus éducatifs, enseignement à distance, etc.). Plusieurs versions sont proposées : formations scolaires, universitaires, formation professionnelle et formation continue. Le Learning Network comprend également une « boutique en ligne » et une base de données. En juin 2000, le groupe Pearson a 180 Annexe – Les firmes européennes de taille moyenne fait l’acquisition de Family Education Network, le leader mondial de l’information et des contenus de niveau scolaire sur Internet. Enfin FT Knowledge est l’un des leaders mondiaux de la formation en business & management à destination des professionnels (individuels ou sociétés). Cette position vient d’être renforcée par le rachat, en juillet 2000, de Forum Corporation (pour 90 millions de dollars). Ce dernier est spécialisé sur le marché américain de la formation en entreprises alors que FT Knowledge est plutôt positionné sur le marché européen. Les deux entités réalisent une bonne part de leurs activités sur des prestations en ligne et la création de cours sur Internet. Édition grand public La filiale Penguin Book représente le plus grand éditeur en langue anglaise dans le monde. De plus, Pearson a racheté Dorling Kindersley en mai 2000, éditeur d’envergure mondiale spécialisé dans le livre illustré et de référence. Le prix de cette acquisition s’est monté à 518 millions d’euros. Presse Regroupées sous la bannière Financial Times Group, les activités de Pearson sont focalisées dans la presse économique : en Grande-Bretagne, le Financial Times et The Economist (50 %) qui a une diffusion hebdomadaire de plus de 700 000 exemplaires, en France, Les Échos, en Allemagne, le Financial Times Deutschland (lancé l’année 2000 en collaboration avec Grune + Jahr, filiale de Bertelsmann). Enfin, par l’intermédiaire de sa filiale espagnole Recoletos (L’Expansion, El País et le quotidien sportif Marca), le groupe diffuse à 900 000 exemplaires pour les quotidiens et à 500 000 exemplaires pour les magazines. Le groupe est également très présent sur le marché des sites Internet destinés aux informations financières et boursières. Par l’intermédiaire d’une participation à 60 % dans la fusion de Financial Times Interactive Data (qui venait d’acquérir pour 150 millions de dollars Thomson Financial Securities Management) et DBC, le groupe possède des parts dans eSignal, dans MarketWatch.com, etc. Enfin, les sites associés aux diverses publications du groupe rencontrent beaucoup de succès : FT.com attire environ un million de visiteurs par mois. En 1999, la commercialisation de services en ligne et les ventes de livres, dont les commandes passées sur Internet, ont représenté un chiffre d’affaires global de 140 millions de livres sterling (soit moins de 5 % des ventes du groupe Pearson). Principales alliances La marginalisation de Pearson dans l’audiovisuel ôte au groupe une de ses dernières alliances avec les principales firmes du secteur des médias et de la communication. Il ne reste plus guère aujourd’hui que l’alliance avec Bertelsmann pour lancer le FT Deutschland et une alliance avec AOL pour favoriser l’acces- 181 LES GRANDS GROUPES DES INDUSTRIES CULTURELLES sibilité du Learning Network. D’ailleurs, le Learning Network concentre la majeure partie des alliances conclues aujourd’hui par le groupe. Ces alliances concernent le plus souvent des sociétés des technologies de l’information et de la communication : Classroom Connect développe des sites Internet destinés au public scolaire, Edgate.com fournit des portails éducatifs régionaux aux ÉtatsUnis, Blackboard.com propose des cours de niveau universitaire en ligne et eScore.com fournit du contenu éducatif en ligne pour les enfants. Forces et faiblesses Forces Faiblesses • Leadership mondial dans l’édition éducative. • Pas d’alliés parmi les grands groupes des médias et de la communication. • Très forte position dans la presse économique en Europe. • Les ambitions dans la télévision semblent plus que compromises. • Stratégie Internet cohérente avec des contenus éditoriaux recherchés (Financial Times, Les Échos, Prentice Hall, Addison Wesley, etc.) et des moyens de diffusion et de promotion (Learning Network, alliances, etc.). • Forte dépendance vis-à-vis de la conjoncture dans l’édition éducative et du succès de la stratégie Internet. • Bonne diversification géographique des activités. 182 Annexe – Les firmes européennes de taille moyenne 2.4. Reed Elsevier Premier groupe mondial de l’édition scientifique Chiffre d’affaires (1999) dont médias Résultat net Taux de marge nette (résultat net/CA) Employés Activités médias Activités hors-médias Pays d’origine P.-D.G. 5,153 milliards d’euros (100 %) 0,801 milliards d’euros 15,5 % du chiffre d’affaires 25 000 Édition, Multimédia néant Grande-Bretagne/Pays-Bas Crispin Davis Répartition du chiffre d’affaires par activités (après le rachat d’Harcourt en octobre 2000*) Activité Répartition géographique du chiffre d’affaires (avant le rachat d’Harcourt en octobre 2000) % du chiffre d’affaires % du chiffre d’affaires Revues professionnelles 33,0 Scientifique, technique et médicale 24,0 Juridique 25,0 Éducation 18,0 Total 100,0 France Royaume-Uni Pays-Bas Autre Europe Amérique du Nord Reste du monde Total * Avant ce rachat, la part des trois premiers pôles était respectivement de : 43 %, 19 % et 38 %. 40,0 14,0 7,0 12,0 56,0 11,0 100,0 Le groupe en 1998 et 1999 en milliards d’euros Chiffre d’affaires Résultat net Taux de marge nette (résultat net/CA) Capitaux propres Rentabilité (résultat net/capitaux propres) Endettement à moyen/long terme Investissements (y compris croissance externe) 1999 1998 5,153 0,801 15,5 % 2,987 26,8 % 1,717 0,434 4,749 0,850 17,9 % 3,025 28,1 % 1,366 0,711 Source : Les grands groupes des industries culturelles (DEP, Ministère de la culture, 2002). 183 LES GRANDS GROUPES DES INDUSTRIES CULTURELLES Origine et évolution du groupe Le groupe Reed Elsevier est né, en 1993, du rapprochement de la société britannique Reed et du néerlandais Elsevier (toutes deux fondées à la fin du XIXe siècle). Depuis cette date, le groupe a entrepris une stratégie de recentrage/mutation consistant à élaguer la plupart des activités n’appartenant pas à son core business (éditions scientifique, juridique et professionnelle), tout en se renforçant dans ces métiers de base (acquisition de plusieurs titres chaque année et jusqu’à une cinquantaine en 2000) et en se diversifiant vers l’édition électronique. Ainsi, dès 1994, le groupe a racheté pour 7,5 milliards de francs la société américaine Lexis-Nexis (spécialisée dans l’édition juridique et, surtout, dotée d’une forte expérience en édition électronique et en gestion des bases de données). Le groupe a prévu d’ici fin 2002 d’investir annuellement 400 millions d’euros dans sa stratégie de développement des activités Internet. Un tel développement, conjugué aux opérations de consolidation des trois pôles majeurs et à une diversification vers les éditions scolaires, a été partiellement financé par les désinvestissements liés au recentrage. Depuis le milieu des années 1990, le groupe se désengage des activités d’édition grand public. Plusieurs cessions importantes ont été réalisées : – division presse grand public (1995), – activité d’édition de livres de fiction (1997), – édition de livres pour enfants (1998), – filiale britannique IPC (1998), qui possède 70 magazines en Grande-Bretagne (plus de 50 % de parts de marché pour la presse télévisée et féminine), pour 860 millions de livres sterling, – la filiale américaine Springhouse Corporation (2000) qui publie des revues médicales considérées comme non stratégiques, – la filiale OAG qui occupe le leadership mondial des produits et services d’information sur les voyages a été également mise en vente au cours de l’année 2000. La cession d’IPC devait être le prélude à une fusion avec le groupe néerlandais Wolters Kluwer, donnant naissance au numéro un mondial de l’édition. Ce projet de fusion a finalement échoué (voir supra). En revanche, l’année 2000, qui avait déjà commencé sur un rythme élevé d’acquisitions (1,4 milliard d’euros au premier semestre), s’est achevée sur une opération majeure : le rachat d’un des principaux éditeurs américains, Harcourt, pour un coût de 5,35 milliards d’euros. Cette opération, financée par un emprunt de 7,7 milliards d’euros, a été menée en coopération avec un autre leader de l’industrie de l’édition, le canadien Thomson. Il est en effet prévu que Reed Elsevier rétrocède à ce dernier la partie « enseignement supérieur » des activités d’Harcourt (pour 2,4 milliards d’euros). Grâce à cette acquisition, Reed Elsevier renforce son activité dans l’édition scientifique, technique et médicale et ajoute un quatrième pôle à son portefeuille d’activités, les manuels scolaires sur lequel il s’estimait trop faible, et améliore sa pénétration du marché américain. 184 Annexe – Les firmes européennes de taille moyenne Les différentes activités médias Édition scientifique Reed Elsevier est le numéro un mondial de l’édition scientifique. L’activité de ce pôle est répartie entre trois filiales. Elsevier Science (82 % du chiffre d’affaires du pôle scientifique en 1999) édite des revues et des ouvrages scientifiques, des cédéroms et propose aussi un accès en ligne à ses revues (via le service ScienceDirect). Deux autres filiales, Excerpta Medica Communications et Editions Scientifiques et Médicales Elsevier, publient des informations ciblées pour les professionnels de la santé et les sociétés pharmaceutiques ainsi que des revues scientifiques médicales. Édition juridique L’activité de cette division est en majeure partie (au deux-tiers) assurée par la filiale Lexis-Nexis, qui opère principalement aux États-Unis et est une des plus importantes banques de données au monde. Elle diffuse de l’information principalement via cédéroms et en ligne. L’activité dans l’édition juridique s’est essentiellement construite sur la base d’opérations de croissance externe : Éditions Techniques en 1993, Lexis-Nexis en 1994, Shepards en 1996, publications juridiques américaines de Thomson en 1997, Matthew Brender & Co en 1998. Ces deux dernières opérations ont permis à Reed Elsevier de devenir le numéro un américain de l’édition juridique. Édition professionnelle Les activités de cette division se répartissent entre l’édition de revues professionnelles par l’intermédiaire des filiales Cahners Business Information (numéro un aux États-Unis), Reed Business Information (numéro un en Grande-Bretagne) et Elsevier Business Information (numéro un en Europe), et l’organisation de salons internationaux. Dans ce domaine, la récente acquisition de la société Miller Freeman Europe lui permet désormais d’occuper la première place mondiale. En 2000, le groupe a également racheté la société américaine CMD Group, le leader américain de l’information destinée aux professionnels du bâtiment. Édition scolaire Ce pôle n’est réellement développé que depuis l’acquisition d’Harcourt, en octobre 2000, mais représente désormais près d’un cinquième des activités du groupe. Soulignons que le développement des nouvelles technologies est un souci qui apparaît de manière transversale dans tous les segments d’activité du groupe : numérisation des fonds éditoriaux, consultation en ligne, etc. En 2000, ce souci s’est traduit par l’acquisition de plusieurs sociétés spécialisées dans le multimédia : Endeavor Information Systems (science), eLogic (professionnelle), 185 LES GRANDS GROUPES DES INDUSTRIES CULTURELLES Riskwise (juridique). En 2002, le groupe compte investir 1,1 milliard d’euros dans la développement de ses activités Internet avec l’objectif d’atteindre un chiffre d’affaires dans ce domaine d’1,6 milliard d’euros, contre 195,3 millions d’euros en 1999. Principales alliances Depuis une quinzaine d’années, deux tentatives de rapprochement entre Reed Elsevier et, l’un des principaux éditeurs professionnels européens, la société néerlandaise Wolters Kluwer, se sont soldées par un échec. La deuxième tentative, annoncée en octobre 1998, a notamment échoué en raison des « sérieux doutes » qu’avait émis la Commission européenne sur la compatibilité de cette fusion avec les règles de concurrence. La trop grande similitude des activités des deux éditeurs aurait notamment mis le nouveau groupe en situation de position dominante sur la plupart de ses marchés. Suite à cet échec, Reed Elsevier a néanmoins continué sa politique de croissance par acquisitions (près de 3 milliards d’euros pour une cinquantaine de rachats en 2000, hors Harcourt). L’acquisition d’Harcourt (pour plus de 5 milliards d’euros) a été réalisée grâce à une alliance avec Thomson (Canada), les deux groupes s’étant entendus sur une rétrocession post-acquisition d’une partie des actifs d’Harcourt. Cette coopération a notamment permis à Reed Elsevier d’éviter que son principal concurrent, Wolters Kluwer, ne parvienne à profiter de la cession d’Harcourt pour croître. Compte tenu du domaine d’activité de Reed Elsevier, l’ampleur de la politique d’alliances stratégiques est, sans surprise, assez limitée. Citons néanmoins des alliances dans le domaine des nouvelles technologies, destinées le plus souvent à compléter son portefeuille de compétences, avec, parmi les plus récentes, les sociétés i2/Aspect et Siebel. En outre, le groupe a établi un fond d’investissement de 100 millions de dollars destiné à financer des start-up de l’Internet développant des applications potentiellement utiles au groupe. 186 Annexe – Les firmes européennes de taille moyenne Forces et faiblesses Forces Faiblesses • Leadership mondial ou européen sur ses différents métiers = taille critique sur le marché de l’édition. • La fusion Reed et Elsevier n’est toujours pas réellement digérée après presque dix années (il existe toujours deux conseils d’administration, etc.) • Stratégie Internet volontariste et cohérente : richesse du fonds éditorial, taux d’équipement du public visé (notamment les universitaires). • Avant l’acquisition d’Harcourt (emprunt de 7,7 milliards d’euros), l’endettement net du groupe se montait à 1,7 milliard d’euros (56 % des capitaux propres). • Bonne diversification géographique des activités. • Compte tenu du lent démarrage des activités Internet, le groupe pourra-til amortir dans des délais raisonnables les investissements consentis ? 187