Slimane Azem Accusé de collaboration et contraint de s`installer en

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Slimane Azem Accusé de collaboration et contraint de s`installer en
Slimane Azem
Accusé de collaboration et contraint de s'installer en France après l'indépendance de
l'Algérie, aucun chanteur n'aura mieux que Slimane Azem symbolisé le drame de
l'exil.
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Slimane Azem est né le 19 septembre 1918 à Agouni Gueghrane, un petit village situé
sur les contreforts des monts du Djurdjura. Rien ne prédestinait ce fils d’un modeste
cultivateur à un parcours musical. Ecolier plutôt médiocre, il ne se passionne que pour
les Fables de la Fontaine qui influenceront tous ses écrits et compositions. A l’âge de
11 ans, il devient employé agricole chez un colon de Staoueli, petite station balnéaire
près d’Alger (sur sa plage avait eu lieu le débarquement français en 1830). En 1937, il
débarque à Longwy et trouve un travail de manœuvre dans une aciérie avant d’être
mobilisé, lors de la « drôle de guerre », à Issoudun. En 1940, il est réformé et s’en va à
Paris où il est embauché comme aide électricien dans le Métro. Deux ans après, il subit
la déportation par les troupes allemandes et reste en Rhénanie jusqu'à sa libération, en
1945, par les Américains.
Une rumeur tenace, au cours de la lutte pour l’indépendance, a insinué que le village
natal de Slimane se serait rallié aux forces d’occupation françaises. Accusé de
collaboration, le chanteur est contraint de s’installer en France en 1962. Il devient alors
une voix légendaire que les Algériens de là-bas ne peuvent écouter que sur Radio Paris
dans son quart d’heure kabyle quotidien. Azem est, de fait, interdit d’antenne dans son
propre pays et ses disques ne circulent que sous le manteau ; on ne lira son nom, en
minuscules que dans les brèves, d'un quotidien du bled. En 1970 il obtient, avec la
chanteuse Noura, un disque d’or l’imposant comme une des meilleures ventes
hexagonales. Il devient, en même temps que de grandes vedettes françaises, sociétaire
de la SACEM.
A Paris, il décroche la gérance d'un café dans le 15ème arrondissement. Il en profite
pour y interpréter ses premières compositions. Remarqué et encouragé par Mohamed
El Kamel, ancien de l’ensemble Bachtarzi (du nom de celui qui avait été surnommé le
« Caruso d’Alger »), il persévère dans le chant. Slimane enregistre enfin son premier
disque avec le morceau « Amoh Amoh ". Traitant du mal du pays, ses disques
s’arracheront chez Madame Sauviat, l'unique disquaire qui vend à cette époque des
albums d'artistes maghrébins et orientaux. Cette femme, d’origine auvergnate, dont les
héritiers gardent aujourd'hui la boutique située Boulevard de la Chapelle, le présente à
la compagnie Pathé-Marconi.
Au cours des années 70, il fait des duos comiques avec le fameux Cheikh Norredine et
chante en français « Algérie, mon beau pays » et « Carte de Résidence ». Au fil des
enregistrements, Slimane Azem conquiert un large public communautaire grâce à ses
textes paraboles où il met en scène des animaux et se pose comme un chanteur
engagé politiquement. Puis son inspiration décline.
Il ne renie pas ses racines paysannes et consacre une bonne partie de ses gains dans
l’achat d’une ferme à Moissac, où il passe six mois de l’année à cultiver sa nostalgie
dans ses plantations de figuiers et d’oliviers.
Slimane redoutait la mort dans l’exil. Elle survient un 28 janvier 1982 dans sa ferme.
Aujourd’hui encore, la jeune garde artistique kabyle perpétue sa mémoire à travers des
reprises de ses chants les plus bouleversants.
© Hall de la Chanson

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