AMNESTY INTERNATIONAL BULLETIN D`INFORMATIONS 113/99

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AMNESTY INTERNATIONAL BULLETIN D`INFORMATIONS 113/99
AMNESTY INTERNATIONAL
BULLETIN D’INFORMATIONS 113/99
BRÉSIL.
« Des êtres humains, pas des bêtes » :
Index AI : AMR 19/15/99
la faillite du système carcéral
Embargo : 23 juin 1999 à 14 H 00 GMT
« Nous avons commis un crime et nous payons notre dette à la société. Mais personne ne mérite d’être traité comme ça, comme une
bête. » (propos d’un prisonnier brésilien)
Un rapport publié aujourd’hui (mercredi 23 juin 1999) par Amnesty International dénonce les violations des droits fondamen-taux
commises à l’encontre des suspects et des prisonniers de droit commun au Brésil. Entassés dans des cellules infestées de vermine, sans
air ni lumière, où ils risquent de contracter des maladies mortelles, ils vivent tous dans un état de terreur permanent, redoutant d’être
agressés par d’autres détenus ou d’être battus ou torturés par les gardiens de prison ou les policiers.
Le rapport intitulé Brésil. Les prisonniers victimes d’homicide, de torture et de mauvais traitements est le fruit de deux ans de recherche
menée par Amnesty International et illustre la faillite du système pénitentiaire brésilien.
« Loin des regards, enfermés derrière les murs des prisons ou des postes de police, ces êtres humains sont également loin de nos
préoccupations ; et le mépris affiché par une bonne partie de la société brésilienne envers ces criminels présumés ou ces prisonniers de
droit commun sert à justifier les pires formes de cruauté à leur égard », a déclaré Javier Zúñiga, directeur du Programme de recherche
sur les Amériques, lors du lancement du document qui a eu lieu aujourd’hui à São Paulo.
De nombreuses garanties en faveur de la protection des droits humains sont prévues par la législation brésilienne, et les droits des
détenus en particulier sont inscrits dans la Constitution. Ce ne sont pas les lacunes des textes de loi qui mettent en péril ces
prisonniers, mais les effets conjugués de plusieurs facteurs qui entretiennent, de fait, l’impunité : corruption, manque de formation
professionnelle des gardiens de prison, absence de principes directeurs officiels et, enfin, absence de véritable contrôle en cas de
violences.
« Les choses pourraient être différentes, a fait observer Fiona Macaulay, chercheuse d’Amnesty International sur le Brésil. Le
fonctionnement d’un certain nombre de petits établissements montre que, même avec des ressources limitées, il est possible
d’administrer des centres de détention en veillant à la réinsertion des délinquants et au respect de leurs droits fondamentaux.
« Nous avons visité plusieurs centres qui s’efforcent de préserver les liens avec la famille, de proposer une activité professionnelle, de
mettre en place un programme de réinsertion et de dispenser des soins médicaux appropriés. Même s’ils sont loin de réunir les
conditions idéales, ces établissements apportent la preuve qu’une bonne gestion aide à réduire les tensions et la violence.
« Assurer la sécurité de tous ceux qui vivent ou travaillent en milieu carcéral est l’une des manières les plus efficaces de garantir le
respect des droits humains en prison. S’il existe une volonté politique, des améliorations sont possibles, même avec des moyens
limités », a-t-elle souligné.
Le contraste entre ces établissements et la plupart des prisons du pays est saisissant. Quelque 170 000 détenus de droit commun sont
aujourd’hui incarcérés au Brésil dans plus de 500 prisons et plusieurs milliers de postes de police et de maisons d’arrêt municipales.
Chaque année, de très nombreuses personnes meurent en détention après avoir été victimes de la violence des policiers ou des gardiens
de prison, privées de soins médicaux ou encore victimes de la négligence des autorités, qui s’abstiennent d’empêcher les actes de
La version originale a été publiée par Amnesty International, Secrétariat international, 1 Easton Street, Londres WC1X 8DJ, Royaume-Uni.
fait foi. La version française a été traduite et diffusée par les Éditions francophones d’Amnesty International - ÉFAI 1
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violence entre détenus. La plupart de ces décès en détention ne font l’objet d’aucune enquête pour établir les faits et rechercher les
coupables et ne sont consignés nulle part.
Les policiers ont fréquemment recours à la torture pour arracher des aveux. Les coups et les menaces servent également, dans les
prisons et les postes de police, à dominer une population carcérale de plus en plus nombreuse. Les mutineries qui éclatent chaque
semaine, les graves agressions commises presque quotidiennement révèlent que les autorités ont perdu tout contrôle dans certains
établissements.
Dans beaucoup de prisons et de postes de police du pays, les cellules sont surpeuplées, infestées de vermine, et il n’existe aucun lieu où
les prisonniers peuvent prendre de l’exercice. Les installations sanitaires sont dans un état déplorable et constituent un risque pour la
santé des détenus, avec des toilettes bouchées et des canalisations cassées. Au poste de police de Cariacica, dans l'État de l'Espírito
Santo, 92 hommes étaient entassés dans une seule pièce, équipée en tout et pour tout de deux W.-C. et 16 couchettes.
En raison de la surpopulation dans ces prisons qui menacent ruine, des milliers de détenus et de prisonniers sont incarcérés dans les
cellules de la police civile, où sont recensés certains des cas les plus graves de passage à tabac et de torture. « Les prisons sont le
purgatoire, mais les postes de police sont l’enfer », a déclaré un représentant du gouvernement brésilien.
Pour les prisonniers détenus au poste de la police civile de Belo Horizonte, dans l’État du Minas Gerais, les humiliations et la torture font
partie de la routine quotidienne. Ils sont régulièrement rassemblés tout nus dans la cour pendant que leurs cellules sont fouillées.
Ensuite, des policiers postés sur le toit les arrosent au jet d’eau. Une pièce spéciale est réservée aux séances de torture.
Pour faire face à cette crise, le gouvernement brésilien s’est lancé dans un vaste programme de construction de prisons, en vue de
réduire la surpopulation carcérale. Néanmoins, les nouveaux établissements ont hérité des mêmes carences structurelles et du même
mépris systématique pour les droits fondamentaux des prisonniers ; ils sont à leur tour le théâtre d’émeutes et de violences aujourd’hui.
Le rapport d’Amnesty International préconise un certain nombre de réformes dans huit domaines essentiels qui permettraient de rendre
le système pénitentiaire brésilien conforme aux normes internationales. Ces recommandations - dont certaines pourraient être mises en
œuvre facilement à peu de frais, voire aucun - comprennent l’instauration de procédures de plaintes et de surveillance efficaces, ainsi
qu’une formation idoine et des principes directeurs clairement formulés.
« Un prisonnier perd sa liberté, mais pas ses droits fondamentaux. Il incombe aux autorités brésiliennes de s’assurer que les droits des
détenus sont pleinement respectés », a conclu Javier Zúñiga. l
Si vous désirez des informations complémentaires, des exemplaires du rapport ou un entretien avec les délégués d’Amnesty
International au Brésil - en portugais, en espagnol, en anglais, en français ou en allemand -, merci de contacter Soraya Bermejo, attachée
de presse, qui sera au Brésil entre le 20 et le 25 juin, au 55 11 542 9819 (bureau d’Amnesty International à São Paulo) ou au 55 11 258
0255, à l’hôtel Hores Belgrano. Si vous désirez simplement recevoir des exemplaires du rapport, vous pouvez aussi contacter le service
de presse du Secrétariat international à Londres au 44 171 413 5566.
La version originale a été publiée par Amnesty International, Secrétariat international, 1 Easton Street, Londres WC1X 8DJ, Royaume-Uni.
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