A01 - Grosse jambe aiguë
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A01 - Grosse jambe aiguë
A01 - 1 A 0 1 - Grosse jambe aiguë L’augmentation rapide de volume d' un ou des deux membres inférieurs pose un problème diagnostique fréquent au clinicien. Dans la majorité des cas, il s' agit d' un syndrome œdémateux dont il convient d’analyser le mécanisme pour en connaître la cause. Quelques notions de base : • • • • l' œdème est dû à une inflation hydrique du secteur interstitiel, toute augmentation de volume n' est pas forcément un œdème, tous les œdèmes n' ont pas forcément une cause vasculaire, la cause d' un œdème n' est pas toujours unique. 1 . A u g m e n t a t i o n a i g u ë UNILATÉRALE Cette situation est la plus fréquente, et le plus souvent de cause vasculaire. 1. Causes vasculaires Thrombose veineuse profonde Dans la plupart des cas, elle se développe dans une situation à risque : chirurgie, cancer, antécédents thromboemboliques, d' où l' importance de l’interrogatoire. D’autres signes cliniques associés à la grosse jambe, inconstants et peu spécifiques, gardent une valeur d' orientation : douleur, dilatation du réseau veineux superficiel, augmentation de la chaleur locale, et perte du ballottement du mollet qui témoigne de l’œdème musculaire. L' association d’une cyanose majeure, et a fortiori de signes d' ischémie (froideur des téguments, marbrures, abolition des pouls), doit faire craindre une phlegmatia cærulea (phlébite bleue qui témoigne d’une compression artérielle). Le traitement anticoagulant peut être débuté en cas de forte suspicion clinique, mais le diagnostic doit être confirmé dans les 36 heures. Œdème après chirurgie de revascularisation artérielle Il peut s’agir d’un œdème lymphatique lié au geste chirurgical ou d’un œdème de revascularisation au lever d’une ischémie sévère. L’œdème de revascularisation peut se compliquer de paralysie du nerf fibulaire ou de rhabdomyolyse et doit faire discuter l’aponévrotomie en urgence (cf chap D03 Syndrome des loges). © Valmi 2007 A01 - 2 2. Causes infectieuses Lymphangite Il s' agit d' une inflammation localisée des canaux lymphatiques superficiels. Elle s' accompagne de fièvre et d' une adénopathie satellite (inguinale). Elle est particulièrement fréquente chez le sujet porteur d' un lymphœdème. Érysipèle La localisation du streptocoque à la zone dermo-hypodermique définit l' érysipèle. L' aspect est celui d' une plaque érythémateuse à bord surélevé. La fièvre est élevée (3940°C), avec des frissons. L' examen met en évidence une adénopathie inguinale et parfois une porte d' entrée cutanée (pieds). L' évolution est marquée par une desquamation caractéristique. Le staphylocoque peut être responsable de lésions érysipélatoïdes. Contrairement à une idée reçue, la TVP n’est pas plus fréquente en cas d’érysipèle. Dermo-hypodermite aiguë Sur insuffisance veineuse chronique sévère Cf chap B 13 Cellulite nécrosante Le tableau clinique est sévère. La température est à 40°C, il y a une altération de l' état général, de vives douleurs, un œdème avec bulles à évolution nécrotique. Il existe le plus souvent un terrain favorisant comme le diabète sucré ou l' utilisation prolongée d' anti-inflammatoires. C’est une urgence thérapeutique dont le diagnostic doit être fait avant la nécrose extensive. 3. Autres causes Hématome C’est un épanchement de sang dans les tissus sous-cutanés ou musculaires, secondaire à un traumatisme direct, une déchirure musculaire ou un acte chirurgical (hanche, genou). L’ecchymose d’accompagnement est retardée et inconstante. Elle vient attester de l' origine hématique de l' augmentation de volume. L’importance de l’épanchement, notamment à la cuisse, peut se manifester par un choc hémorragique. Un hématome rétropéritonéal peut engendrer une grosse jambe par compression veineuse. L’échographie doit être l’examen de première intention. La notion d' un traumatisme ou d' un traitement anticoagulant est un argument important en faveur du diagnostic. Rupture de kyste poplité Donnant un tableau de pseudo-phlébite, surtout dans la population âgée. © Valmi 2007 A01 - 3 Lésions ligamentaires La constitution d' une entorse de la cheville ou du genou, induit un état inflammatoire lui-même générateur d' œdème. Algodystrophie Elle pose des problèmes plus difficiles : une augmentation de volume du pied ou de la jambe, associée à une érythrocyanose, une hypersudation, un refroidissement cutané et une impotence douloureuse sont assez caractéristiques. À une phase chaude de courte durée, succède une phase froide longue et invalidante (cf chap A02). La notion d’un traumatisme récent et les données scintigraphiques contribuent au diagnostic. 2. A u g m e n t a t i o n a i g u ë BILATÉRALE Cette situation est plus rare. Parallèlement aux causes classiques générales de survenue aiguë (insuffisance cardiaque, syndrome néphrotique, ...), il faut penser à la thrombose cave inférieure et à l’hyperperméabilité capillaire paroxystique. 1. Thrombose cave inférieure La thrombose cave inférieure est marquée par une augmentation de volume souvent rapide des membres inférieurs. Le diagnostic est aidé par l' analyse du contexte (thrombose veineuse profonde à bascule, filtre cave, antécédents de chirurgie ou de néoplasie, et présence d' une circulation collatérale abdominale). La recherche d' une insuffisance rénale ou de son aggravation doit être systématique. L' examen ultrasonique doit être complété par une tomodensitométrie. 2. Hyperperméabilité capillaire paroxystique Tableau clinique beaucoup plus sévère, mais heureusement plus rare. Il associe un état de choc avec des œdèmes diffus et une hémoconcentration. Il s' agit d' un trouble de la perméabilité capillaire associé à une hypocomplémentémie. C’est une urgence de réanimation. 3. Conclusion Diagnostiquer une augmentation aiguë de volume des membres inférieurs est facile, une mesure centimétrique de la circonférence est suffisante. Les difficultés surviennent dans l’enquête étiologique d’autant que coexistent souvent plusieurs causes. © Valmi 2007