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ÇA S'IMPROVISE PAS !
PIÈCE DE
BENJAMIN VAN EFFENTERRE
PERSONNAGES :
THOMAS ROUSSEAU : PERSONNAGE PRINCIPAL
NICOLAS POMMARD : POTE DE THOMAS
CATHY ROUSSEAU : MÈRE DE THOMAS
PATRICK ROUSSEAU : PÈRE DE THOMAS
MARTINE DESCHAMPS : VOISINE DE NICOLAS
RAPHAËL MARTINI : POTE DE NICO
ELODIE BERGER : COPINE DE NICOLAS
JULIETTE SOULARD : PETITE-AMIE DE THOMAS
INGRID LAMARCHE: POLICIÈRE
SANDRINE VARENNE : POLICIÈRE
H
istoire : Thomas Rousseau est un auteur de théâtre qui vient de se faire arnaquer par
son agent. Obligé de retourner vivre chez ses parents car il n'a plus un sou en poche,
il en a marre de cette situation. En entendant parler du retour d'otages dernièrement libérés
en Afrique, il décide de se faire passer pour un otage, afn d'avoir du temps devant lui pour
écrire, et aussi pour pouvoir toucher une rançon. Il entraîne avec lui Nico, son meilleur ami,
chez qui il devra rester caché afn de mener à bien son plan. Seulement, ce n'est pas sûr que
tout se passe comme prévu. Après tout, c'est normal, ce ne sont que des débutants !
Ça s'improvise pas !
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© Benjamin V.E 2014
ACTE 1 :
SCÈNE 1 : LES PRÉSENTATIONS :
T
homas est affalé dans un canapé. Il a une télécommande dans sa main et regarde la télé, tout en se
goinfrant de chips et soda. Ses parents arrivent derrière lui, mais il ne réagit pas.
Cathy : Oh non, me dit pas que tu as encore passé toute ta journée ici à ne rien faire ?
Thomas : Salut, vous avez fait les courses ? Ça tombe bien, j'ai encore faim...
Cathy : Si tu veux continuer à te goinfrer, t'as qu'à les faire toi-même ! Je n'ai aucune envie d'entretenir mon
fils pour qu'il passe ses journées ici, à ne pas lever ses fesses de ce canapé !
Patrick : Ta mère a raison, il est grand temps que tu te reprennes en main ! Nous sommes tes parents,
c'est notre devoir de te pousser à t'en sortir !
Thomas : Vous savez bien que c'est provisoire. Si mon agent ne m'avait pas escroqué, on en serait pas là.
Moi qui croyait que c'était un ami...
Cathy : Et les factures que tu continues de recevoir, tu vas nous laisser les payer à ta place pendant
longtemps ?
Thomas : Je vous rembourserai...
Cathy : Quand ça ? Dans dix ans ? Quand tu auras enfin décidé de quitter ce canapé ?
Thomas : C'est ça, continue de remuer le couteau dans la plaie...
Patrick : Nous avons été suffisamment patients avec toi mais, maintenant, il faut que tu te ressaisisses ! Tu
es encore jeune, tu es tout à fait capable de rebondir et de trouver autre chose !
Thomas : Je ne vois pas ce que je pourrais faire d'autre, il n'y a rien qui me satisfait plus que de mettre un
point final à une pièce. Si je vous dit que j'ai besoin de temps, je n'invente rien !
Cathy : Mais ça fait trois mois que ça dure ! Regarde tes frères et ta sœur, quand ils avaient ton âge, ils
avaient déjà de bonnes situations, et surtout, ils n'habitaient plus chez leurs parents !
Thomas : Je n'habite pas chez mes parents, j'y suis provisoirement, c'est différent...
Cathy : Et Juliette, tu en fais quoi ? Tu penses que ça lui plait de te voir comme ça ?
Thomas : Ce qui se passe entre Juliette et moi ne regarde que nous, à c'que je sache !
Cathy : Oh, mais je n'ai jamais dit le contraire ! Après tout, si ça ne te dérange pas de ne pas avoir de quoi
subvenir aux besoins de ta petite-amie, c'est ton choix !
Thomas : Dis pas n'importe quoi...
Cathy : Maintenant, si tu veux bien m'excuser, je ne vais pas te déranger plus longtemps, je vais ranger les
courses. Des courses que j'ai pu acheter avec mon argent, grâce à mon travail, et que je vais ranger dans
mon frigo, qui se trouve dans ma cuisine...
Patrick : Dans ce cas-là, je vais t'aider...
Cathy : Pas la peine, restez ici tous les deux, vous n'avez qu'à regarder la télé ensemble ! Après tout, c'est
la seule personne qu'il arrive à écouter toute la journée sans broncher ! (elle s'en va)
Ça s'improvise pas !
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Thomas : Qu'est-ce qui lui prend, elle a pété un plomb ou quoi ?
Patrick : Ta mère s'inquiète pour toi, Tom, c'est normal, il faut se mettre à sa place...
Thomas : Que veux tu que je fasse ? J'ai écrit une trentaine de pièces depuis que j'ai douze ans, tu penses
vraiment que je peux faire autre chose que ce métier ?
Patrick : Oui, j'en suis sûr... (après quelques secondes) je sais que ce que tu es en train de vivre est loin
d'être facile, mais ça ne l'est pas non plus pour nous !
Thomas : Je comprends tout à fait...
Patrick : Alors réagit, bon sang ! Plus tu attendras, plus la pente sera difficile à remonter ! (il lui donne un
journal) Regarde les petites annonces et trouve-toi un travail ! Tu verras, tu ne le regretteras pas, et tu nous
en remercieras ! (il s'éloigne et croise Juliette ) Ah, salut Juliette ! (il s'en va)
SCÈNE 2 : LES PETITES ANNONCES :
Juliette s'approche du canapé. Elle s’assoit près de Thomas, et lui fait un bisou mais il ne semble pas très
intéressé par sa présence.
Juliette : Pourquoi tu n'ouvres jamais les volets ?
Thomas : Car j'aime l'obscurité, c'est propice à l'inspiration...
Juliette : Vraiment ? Et tu penses que tes parents aussi aiment bien ?
Thomas : Ils ne s'en sont jamais plaints...
Juliette : Et le fait de ne pas bouger de ce canapé, ça t'aide aussi ?
Thomas : (après quelques secondes) Dis-moi, t'aurais pas parlé avec ma mère avant de venir ici ?
Juliette : Je...non, pas du tout ! Enfin...si, peut-être un peu...
Thomas : Je m'en doutais ! Elle t'a dit quoi ? Elle t'a demandé d'essayer de me convaincre ?
Juliette : Pas du tout, elle s'inquiète pour toi ! Elle sait que cette affaire d'escroquerie t'as fais du mal, et que
tu es persuadé que tu sauras te racheter auprès du public. Seulement, elle a peur que tu te fasses de
fausses idées...
Thomas : Elle se trompe...
Juliette : Ah bon ? Y'a beaucoup de fans qui t'ont soutenu quand cette affaire a éclaté ?
Thomas : Non, mais...
Juliette : Et tes nombreux contacts dans le milieu du théâtre, ils t'ont aidé à clamer ton innocence ?
Thomas : Non plus Juliette, mais si tu...
Juliette : On parle encore de toi dans la presse ? Non ? Tu vois, cette affaire est déjà oubliée, tout comme
toi, donc je ne vois pas comment tu pourrais espérer rebondir...
Thomas : Tu ne crois pas en moi ?
Juliette : Bien sûr que si, mais c'est aussi mon devoir d'essayer de te convaincre ! En plus, ce serait la
seule façon pour que toi et moi, on puisse avoir des projets...
Thomas : Je n'ai pas les moyens de reprendre un appartement, pour l'instant, tu le sais très bien.
Apparition soudaine de Cathy.
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Cathy : Dis surtout que tu n'as plus de meubles vu que les huissiers te les ont saisis !
Thomas : Maman ! Ça te dérangerait de nous laisser un peu d'intimité ?
Cathy : Oh ça va, je m'en vais ! (Elle disparaît à nouveau)
Juliette : (elle lui prend le journal et regarde les petites annonces) tiens, écoute : « dans le cadre de son
expansion... blablabla... recrute vendeur en CDI...blablabla...débutant accepté, formation interne gratuite... »
et dans la région, en plus !
Thomas : Tu crois vraiment que j'ai une tête de vendeur en prêt-à-porter féminin ?
Juliette : Ok... tiens, celle-là te correspond mieux : « pizzeria recherche livreur à domicile, débutant
accepté... »
Thomas : J'ai autant d'équilibre sur un deux-roues que sur des échasses...
Juliette : Et celle-ci ? « recherche employé de restauration polyvalent...débutant accepté...CDI
envisageable... »...
Thomas : « ...pour une enseigne de spécialités asiatiques... » Tu crois que je parle chinois ?
Juliette : Parce que tu crois que dans un restaurant italien, on sert les clients en italien ?
Thomas : Bah dans un restaurant français, on sert bien les clients en français, non ?
Juliette : (après quelques secondes) Il est vraiment temps que tu ressortes de chez toi...
Thomas : Ça par contre, c'est pas mal, regarde, une formation pour devenir agent de sécurité...
Juliette : Les muscles sont fournis en même temps que l'uniforme ?
Thomas : (après quelques secondes) C'est malin...
Juliette : Allez, y a forcément un travail qui est fait pour toi là-dedans, tu vas finir par trouver !
Apparition de Patrick.
Patrick : Et pourquoi pas critique télé, vu le temps que tu passes devant à longueur de journée ?
Thomas : Ah non, tu vas pas t'y mettre aussi toi !
Patrick : Désolé, c'était trop tentant... (il s'en va)
Juliette : Tu penses que ça me plaît de te voir comme ça, à rien faire de tes journées pendant que moi je
bosse et j'ai une vie sociale ? Si tu refuses de nous écouter, tu risques d'arriver à un point de non retour...
Thomas : Et vous, si vous refusez de croire en moi, vous allez être très surpris au moment où j'aurais écris
ma prochaine pièce et que je ferais un retour fracassant !
Juliette : Commence-là avant de parler déjà de la fin, et on en reparlera ensuite...
Apparition de Cathy et Patrick.
Cathy et Patrick, en même temps : Alors ça, c'est bien envoyé !
Thomas : Oh vous, ça va hein !
Cathy et Patrick disparaissent à nouveau.
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Juliette : Bon, ça suffit ! (elle se lève du canapé) J'ai l'impression de parler à un mur !
Thomas : Mais comprends moi, chérie, je...
Juliette : Y'a pas de « mais » ! Maintenant, voilà ce qui va se passer : ou tu fais des efforts pour te sortir de
cette situation, ou bien tu vas t'en mordre les doigts. Donc je te repose la question pour la dernière fois,
Tom : vas-tu enfin te décider à chercher du travail ?
Thomas : Mais je sais pas, je...
Juliette : Ok, j'en ai assez entendu ! Dorénavant, si tu veux me voir, ça sera à toi de venir chez moi, mais
ce sera inutile de le faire si tu n'as pas changé d'avis... (elle part)
SCÈNE 3 : UN ÉCLAIR DE GÉNIE :
Thomas : J'ai l'impression que tout le monde est contre moi aujourd'hui... (Il se remet à parcourir les petites
annonces) « cherche mécanicien avec, au minimum, deux ans d'expérience... » , « recherche
téléprospecteur expérimenté... », « notre cabinet recherche des conseillers en immobilier...expérience
requise... » Y'a rien pour moi là-dedans ! (il pose son journal et, en voyant un des gros titres à la Une) ah
tiens, je savais pas que...(il se relève sans lâcher le journal des yeux) Putain, je viens d'avoir une idée de
génie...(il saute de joie dans la pièce et, intriguée par le bruit, sa mère arrive)
Cathy : C'est quoi ce bazar ? Tu t'crois où ?
Thomas : C'est rien, je viens d'avoir une idée... désolé, il faut que j'aille m'habiller !
Cathy : T'habiller ? Pour quoi faire ?
Thomas : Je sors, maman ! (il repart)
Cathy : Patrick, viens voir ! (il arrive aussitôt) Thomas vient de se décider à sortir de la maison !
Patrick : Mais comment c'est possible ? Il est tombé sur la tête ?
Cathy : Peut-être qu'il s'est décidé à nous écouter, je t'avais dis qu'on finirait par l'avoir à l'usure !
Patrick : A moins que ça soit Juliette qui ai réussit à le convaincre ?
Cathy : Ça m'étonnerait ! ! (Thomas revient) Ah, te revoilà, tu peux nous dire où tu vas ?
Thomas : Je vais chez Nico, je serais rentré pour le déjeuner...
Patrick : Qu'est-ce que tu vas y faire ? Si tu quittes ton canapé, il doit y avoir une sacrée bonne raison !
Thomas : Il faut que je le vois, c'est tout ! Depuis quand je devrais me justifier pour aller voir mon meilleur
pote ?
Cathy : Depuis que ça fait trois mois que c'est lui qui vient te voir, et pas l'inverse !
Thomas : Oui bah, le changement, c'est maintenant comme dirait l'autre ! (il prend le journal et quitte la
pièce)
Cathy : (voit que Patrick aussi s'apprête à partir) Où tu vas ?
Patrick : Jouer à l'Euromillions ! Si c'est la journée des miracles, ça serait bête de pas en profiter ! (ils s'en
vont)
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SCÈNE 4 : EXPLICATIONS DU PLAN :
Maintenant, cela se passe chez Nico. Ce dernier est devant son ordinateur, en train de dialoguer avec une
fille.
Nico : Connecte-toi, allez, ça fait une heure que je t'attends ! (un bruit de sonnerie informatique) Ah... te
voilà ! (il tape sur le clavier en lisant à voix haute) « Salut, comment ça va depuis hier soir ? » (bruit de bip, il
lit la réponse) « Ça va, tu m'attendais ou quoi ? » (il répond) « Non, pas du tout, je suis pas un mec facile, je
ne m'attache pas aussi rapidement ! » (en attendant qu'elle lui réponde, il fait les cent pas) Qu'est-ce que je
suis con ! (nouveau bip, il lit la réponse à voix haute) « Ça tombe bien, je n'aime pas trop la facilité... » Elle
me fait du rentre-dedans ou quoi ? (il répond) « Alors, quoi de prévu aujourd'hui ? » (quelques secondes,
puis un bip) « Je vais sans doute aller boire un verre avec des amies, et toi ? » (il répond) « Moi je vais à la
salle de sport, comme d'habitude... » (un bip, et Nico lit la réponse à voix haute) « ça tombe bien, j'adore les
sportifs... » Eh bin, tu vas pas être déçue, ma grande... (il s'apprête à lui répondre mais ça sonne à la porte)
Et merde... (ça sonne à nouveau, il va ouvrir, et il est très surpris de tomber sur Thomas)
Thomas : Ah bah t'en as mis d'un temps !
Nico : Thomas, qu'est-ce que tu fais là ? Je croyais que t'avais oublié qu'il y avait une vie en dehors de
chez toi...
Thomas : Très drôle... (il voit l'ordinateur) Oh nan, me dis pas que t'étais encore sur Meetic ?
Nico : Mais non, pas du tout, je...
Thomas : Dans ce cas-là, c'est qui cette (il s'approche de l'ordinateur) « jolieblonde75 » à qui tu parlais ?
Nico : C'est...euh... ma banquière !
Thomas : Tu t'apprêtais à lui dire « j'aime plus particulièrement... le sport de chambre ! »... T'essayes de
négocier un prêt ou quoi ?
Nico : Oh puis merde, oui, je vais toujours sur les sites de rencontre, et alors ? Tu ne sors plus de chez toi,
faut bien que je m'occupe !
Thomas : Si tu veux vraiment te trouver quelqu'un, va dans des bars, ou en boite de nuit ! C'est pas sur
internet que tu vas trouver l'âme soeur...
Nico : Je pense pas que tu sois le mieux placé pour me donner des conseils sur ma vie sociale...
Thomas : (après quelques secondes) C'est pas faux... Bon, c'est qui cette « jolieblonde75 » ?
Nico : Une nana avec qui je discute depuis quelques jours ! Elle habite à quelques stations de métro d'ici...
Thomas : Tu l'as déjà vue ?
Nico : Pour l'instant, seulement en photo, attends...(il pianote sur son pc) Tiens, y'a celle-ci...
Thomas : (s'approche de l'écran) Ah ouais, pas mal...
Nico : J'ai celle-là aussi, un peu plus récente...
Thomas : Hein hein...
Nico : Celle-ci aussi, c'est ma préférée...
Thomas : Jolie, effectivement, nouvelle coiffure ?
Nico : Euh non, ça, c'est sa mère, elle est à gauche...
Thomas : Ah pardon...
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Nico : Enfin bref, toujours est-il que j'ai l'impression qu'on a un bon feeling tous les deux...
Thomas : Tu disais ça aussi avec la précédente, la fameuse Claire qui t'a quitté pour se mettre avec une
femme, comme si tu l'avais dégoûtée des hommes.
Nico : Elle a toujours été à voile et à vapeur, j'y suis pour rien !
Thomas : Et Sophie, celle qui t'a invité à manger chez ses parents dès votre première rencontre, elle était
pas un peu barjot aussi celle-là ?
Nico : Mais non, elle croyait trop aux contes de fées. Et puis à quoi ça sert d'évoquer mes précédentes
conquêtes ?
Thomas : Pour te montrer que tu ne peux pas avoir une histoire sérieuse avec une nana rencontrée sur un
site de rencontre, c'est tout !
Nico : C'est pour me dire ça que t'es venu, après avoir hiberné trois mois chez tes parents ?
Thomas : (après quelques secondes) J'ai eu une idée géniale ! Toi et moi, on va devenir riches !
Nico : C'est à dire ?
Thomas sort le journal de son sac et le tend à Nico.
Thomas : Qu'est-ce que tu vois en première page ?
Nico : Les résultats footballistiques du jour, des faits divers sordides, des nouvelles du monde...
Thomas : Et le gros titre tout en haut de la page, il dit quoi ?
Nico : Il parle de la libération des deux otages qui étaient retenus en Afrique depuis des mois...
Thomas : Voilà, ! Maintenant, va voir l'article page quatre et lis le dernier paragraphe à voix haute..
Nico : D'accord : « Selon nos informations, un accord a été conclu il y a quelques jours entre les terroristes
et les autorités française et, grâce à une contrepartie financière estimée entre 10 et 15 millions d'euros,
deux prisonniers retenus en captivité depuis plus de quatorze mois ont enfin été libérés... » je ne sais
toujours pas ce que j'ai à voir là-dedans...
Thomas : Je vais me faire passer pour un otage...
Nico : T'as craqué ou quoi ? Qu'est-ce que c'est que cette idée à la con ?
Thomas : Tu connais ma situation actuelle : je suis retourné habiter chez mes parents, je suis ruiné, bref,
ça ne peut pas continuer comme ça : il faut que j'écrive une nouvelle pièce, afin de renaître de mes
cendres ! Seulement, pour ça, il me faut de la tranquillité et, comme pas un jour ne se passe sans que mes
parents me gonflent, ma concentration n'est pas au top de sa forme...
Nico : Donc tu veux partir en Afrique et te faire capturer là-bas ?
Thomas : Mais non, je vais leur faire croire que je pars, en leur disant que j'ai besoin... de me ressourcer !
Et toi, tu seras le faux terroriste qui fera semblant de me kidnapper et de négocier ma libération !
Nico : (après quelques secondes) Mais t'es complètement taré, tu le sais ça ? Je suis qu'un simple
webmaster, rien de plus !
Thomas : Qui dit « négociation » dit aussi « rançon »...
Nico : Mais je m'en fous de ta rançon, je ne veux pas être mêlé à tout ça !
Thomas : Allez, Nico, s'il-te-plaît, ce ne sera que l'histoire d'un mois ou deux, grand max !
Nico : Et tu seras où en fait, pendant que tu feras croire à tout le monde que t'es en Afrique ?
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Thomas : Bah c'est à dire que...(il regarde autour de lui)
Nico : (il comprend) Même pas en rêve, Tom ! Je refuse d'héberger un faux otage !
Thomas : Tu auras une contrepartie financière : la moitié de la rançon, ça te va ?
Nico : Tu sais où tu peux te les mettre ?
Thomas : D'accord, les deux tiers de la rançon alors...
Nico : J'hallucine ou t'essayes de négocier ?
Thomas : Les deux tiers de la rançon et en plus, je t'aiderais à draguer ta jolieblonde75 !
Nico : Dégage de chez moi ou je... (il s'arrête) Tu quoi ?
Thomas : La nana que tu viens de rencontrer, je t'aiderais à faire en sorte que cette relation ne tombe pas à
l'eau...
Nico : C'est la meilleure ça ! Depuis quand t'es mieux placé que moi en matière de séduction ?
Thomas : Je suis auteur de théâtre, Nico, j'ai déjà écrit plusieurs comédies romantiques, je m'y connais
dans ce domaine ! Et plus, si Juliette et moi on est ensemble depuis trois ans, ce n'est pas pour rien !
Nico : Ah oui, et à Juliette aussi tu vas lui mentir, c'est vrai que ça fera de toi le parfait petit copain !
Thomas : Je te le répète : si on fait ça bien, personne n'en saura jamais rien !
Nico : Et tes parents, tu y as pensé ? Ils vont être morts d'inquiétude !
Thomas : Comme je reviendras en un seul morceau, ils s'en remettront, t'en fais pas pour ce détail !
Nico : T'appelles ça un détail toi, sympa pour eux ! (après quelques secondes) Tu crois vraiment être prêt
pour pouvoir mettre en place un tel plan ?
Thomas : Mais oui, on aura juste à faire croire aux autorités que j'ai été capturé, leur envoyer une vidéo
pour leur prouver, les appeler pour négocier la rançon, que des trucs que n'importe qui pourrait faire !
Nico : Tu parles, c'est un coup à se faire griller d'entrée de jeu, on a pas les compétences pour ça !
Thomas : Pour le moment, pas la peine de penser à comment on va s'y prendre, tout ce que je veux, c'est
que tu sois avec moi...
Nico : (s'assoit sur le canapé) Les temps sont durs, tu sais. Je viens de me faire piquer deux de mes plus
gros clients par un nouveau concurrent et, du coup, mon compte en banque a du mal à suivre...
Thomas : Ce qui veut dire qu'une part de la rançon ne serait pas négligeable...
Nico : Ce qui veut dire, surtout, qu'il faudrait être complètement cinglé pour te suivre ! Et pourtant...
Thomas : Tu acceptes ?
Nico : Pas si vite, il y a d'abord certaines conditions qu'il faut que tu me promettes d'accepter, d'accord ?
Thomas : Dans la mesure du possible, dis toujours !
Nico : Tout d'abord, si à un moment donné, je te dis qu'il faut qu'on arrête tout car ça sent le roussi, tu le
feras sans discuter, d'accord ?
Thomas : Très bien...
Nico : Ensuite, pas question que tu passes tes journées à squatter ce canapé et regarder la télé. Si cela
devait arriver, cette escroquerie prendra aussitôt fin.
Thomas : Tu n'as pas l'air de comprendre que si je fais tout ça, c'est avant tout pour pouvoir travailler !
Nico : Troisième condition : si on se fait griller, tu diras bien à tout le monde que je n'ai jamais cautionné ton
plan, d'accord ? Si j'accepte de t'aider, c'est surtout pour que tu m'aides avec Elodie...
Thomas : Elodie ?
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Nico : jolieblonde75, son prénom, c'est Elodie. Et enfin, quatrième condition : tu ne prendras aucune
décision sans m'en avoir parlé avant, ok ?
Thomas : Très bien, tu as ma parole !
Nico : T'es complètement taré, t'en as conscience j'espère ?
Thomas : Ça fait au moins trois fois que tu me le dis, donc je vais finir par le croire oui...
Nico : Même si je ne cautionne pas ce que tu envisages de faire, je suis quand même à deux doigts de faire
la plus grosse connerie de ma vie...
Thomas : Tu acceptes de m'aider ?
Nico : (après quelques secondes) J'en ai bien peur oui...
Thomas : Excellent ! Je suis sûr qu'on va faire de grandes choses, toi et moi !
Nico : T'emballes pas trop vite, ce ne sera pas si facile que ça, j'en suis sûr !
Thomas : Je sais, mais on a tout le temps pour y réfléchir... Bon, il faut que j'y aille, j'ai dit à mes parents
que je rentrais pour déjeuner ! On se tient au jus, d'accord ?
Nico : Ouais, et si tu changes d'avis, hésite pas à me prévenir, je te jure que je t'en voudrais pas...
Thomas : Ça risque pas ! (il s'en va)
Nico : Et merde, dans quoi je me suis encore embarqué ?
SCÈNE 5 : UNE ARRIVÉE EN FANFARE :
La scène se passe toujours chez Nico, une dizaine de jours après. Le concerné est en train de faire les cent
pas dans son appartement en regardant régulièrement sa montre. Il a l'air inquiet.
Nico : Il devrait déjà être là, qu'est-ce qu'il fout ? (il regarde à nouveau sa montre) J'aurais jamais dû le
laisser faire ! (il regarde à nouveau sa montre) Peut-être qu'on parle de lui à la télé... (il attrape sa
télécommande et, au moment où il s'apprête à allumer la télé, ça sonne) Ah bah quand même ! (il va ouvrir
à Thomas qui est grimé avec une casquette et des lunettes de soleil) Te v'là enfin ! Où sont tes bagages ?
Thomas : Je viens de passer la moitié de ma journée dans les transports, j'ai cru que j'allais jamais y
arriver !
Nico : Comment ça ? T'étais juste censé faire semblant de prendre l'avion !
Thomas : C'était bien ce que je comptais faire, sauf que mes parents ont décidé de m'accompagner à
l'aéroport pour me dire au revoir ! Ma mère était dans tous ses états, je te raconte pas...
Nico : Et merde, comment t'as fait du coup ?
Thomas : Bah j'ai pas eu le choix ! Si je voulais être sûr qu'ils tombent bien dans le panneau, je l'ai pris cet
avion ! Après tout, j'avais payé le billet donc c'était bien la moindre des choses !
Nico : Tu as payé le billet ?
Thomas : Oui, enfin, tu m'as avancé les sous. Coup de bol, l'avion faisait une escale à Marseille donc j'suis
descendu là...
Nico : Et tes bagages...
Thomas : Vu que j'étais censé atterrir à Bamako, je ne pouvais pas les récupérer avant. Du coup,je n'ai
plus aucun vêtement, donc il va falloir que tu ailles m'en acheter ou que tu m'en prêtes d'autres...
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Nico : Super, compte pas sur moi pour te prêter ma brosse à dents en tout cas ! Ensuite ?
Thomas : J'ai réussi à quitter l'aéroport, et j'ai pris un taxi qui m'a ramené vers la gare de Marseille...
Nico : Tu l'as payé avec quoi ce taxi ?
Thomas : Je l'ai pas payé, je suis parti en courant à un feu rouge. Ensuite, y'avait un train qui partait pour
Paris, donc je me suis glissé dedans, et j'ai passé le trajet enfermé dans les toilettes pour échapper aux
contrôleurs. Ensuite, j'ai mis deux heures pour venir de la gare de Lyon à chez toi à pieds...
Nico : Bah dis donc, quelle journée...
Thomas : C'est clair ! Bon, en tout cas, à partir d'aujourd'hui, je ne vais plus pouvoir quitter ton appartement
pendant un bon moment ! (un « bip » retentit et, en voyant Nico se diriger vers son ordinateur) Tiens,
comment elle va la petite Élodie ?
Nico : Ça suit son cours, elle me plaît de plus en plus...
Thomas : Ça fait combien de temps que vous vous parlez ?
Nico : Une quinzaine de jours...
Thomas : Et elle ne t'a jamais proposé d'aller boire un verre ?
Nico : Pas pour le moment, non.
Thomas : Et toi, tu ne lui as jamais proposé non plus ?
Nico : Non plus...
Thomas : Si vous habitez pas loin l'un de l'autre, c'est bizarre que vous ne vous soyez pas encore vus...
Nico : Tu ferais quoi si t'étais à ma place ? Je te rappelle que t'es censé m'aider, Casanova !
Thomas : Je viens d'arriver, laisse-moi un peu de temps avant de juger, d'accord ?
Nico : Mouais, t'as intérêt à m'aider, parce que sinon, je te renvoie chez papa maman, illico presto ! Bon,
revenons-en à ton plan : j'ai noté quelques trucs qu'on pourrait faire... (il tend une feuille à Thomas)
Thomas : (après quelques secondes de lecture) C'est une blague j'espère ?
Nico : Non, pourquoi ?
Thomas : Si je devais t'écouter, je devrais me couper un doigt, perdre plus de dix kilos, avoir le visage rué
de coups, et j'en passe et des meilleurs...
Nico : Le doigt, c'est pour l'envoyer à la police pour qu'elle nous prenne au sérieux, les dix kilos à perdre,
c'est pour pousser les autorités à agir rapidement et, le visage rué de coups, c'est pour qu'ils pensent que tu
es maltraité. Si je dois me faire passer pour un terroriste, faut faire ça bien, ça s'improvise pas !
Thomas : (il se remet à lire) « se convertir à la religion du pays... apprendre quelques mots du vocabulaire
local... procéder à une circoncision... » Nan mais ça va pas, pourquoi je me... (fait le signe des ciseaux)
Nico : C'est au cas où tu accepterais de te convertir, ça doit faire partie des sacrifices à faire...
Thomas : J'ai pas envie de finir en pièces détachées, y'a pas marqué Ikéa ! A la limite, connaître quelques
expressions des dialectes locaux, ça rendrait mon personnage plus crédible mais à part ça...
Nico : Ton personnage ?
Thomas : Oui, je vais jouer le rôle du touriste français et toi, celui du terroriste, on en a déjà parlé, non ?
Nico : Oui, mais je voyais pas ça comme ça. Bon, t'as dit à tes parents que c'était quoi, ton itinéraire ?
Thomas : Je leur ai dit que j'atterrissais à Bamako, et que j'allais me promener dans les pays voisins :
Sénégal, Côté d'Ivoire, Burkina Faso...
Nico : Ça va en faire des mots à apprendre ! On regardera sur Internet, peut-être que...
Ça s'improvise pas !
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SCÈNE 6 : MENSONGES ET COUP DE TÉLÉPHONE :
Soudain, ça sonne à la porte. Nico va aussitôt voir dans le judas.
Nico : Ah, c'est Martine, ma voisine de palier !
Thomas : Ne lui ouvre surtout pas, si jamais elle...
Nico : Pourquoi je ferais ça ? Elle a peut-être besoin de moi...
Nico lui ouvre la porte. Thomas remet sa casquette et ses lunettes avant qu'elle arrive.
Nico : Bonjour Martine, que puis-je faire pour vous ?
Martine : Bonjour monsieur Pommard, je viens vous voir pour vos poubelles. Je sais pas ce que vous avez
mis dedans mais, si à l'avenir, vous pouviez faire attention, ça serait bien, car ça risque d'attirer toutes les
bestioles du quartier.
Nico : Qu'est-ce qui vous dit que ça vient de mes poubelles ? On est trois locataires dans cet immeuble, ça
peut très bien venir des Camelli...
Martine : C'est des Corses, j'oserais jamais leur dire une chose pareille, ça serait un coup à ce qu'ils me
fassent disparaître en moins de deux ! (elle s'arrête en voyant Thomas) Vous ne m'aviez pas dit que vous
n'étiez pas seul, je peux repasser plus tard si vous voulez...
Nico : Non, c'est inutile, je vous présente... mon nouveau colocataire !
Martine : Un colocataire ? Vous nous en aviez pas parlé, le propriétaire est au courant ?
Nico : C'est à dire que...
Thomas : Ce n'est que provisoire, juste le temps de trouver un nouveau logement...
Martine : D'accord, je me présente quand même : moi c'est Martine, je suis la voisine de monsieur
Pommard au cas où vous ne l'auriez pas encore compris...
Thomas : Enchanté, moi c'est Thomas... (il se rend compte de son erreur) Euh... Jean...Thomas-Jean, c'est
un prénom composé.
Martine : C'est pas banal comme prénom ! Pourquoi cet accoutrement ? Vous revenez de vacances ?
Thomas : Non, pas du tout, je...
Nico : Thomas-Jean a des problèmes de vue, c'est pour ça qu'il est obligé de porter ses lunettes...
Martine : Ah d'accord. En tout cas, vous ressemblez étrangement à un ami de monsieur Pommard.
Comment il s'appelle déjà ? Vous savez, l'has-been, celui qui écrivait des pièces de théâtre et dont la
presse a beaucoup parlé il y a quelques temps...
Nico : Bon, et si vous nous laissiez maintenant, Martine ? Thomas-Jean et moi, on s'apprêtait à...
Martine : Oui, bien sûr. Surtout, n'oubliez pas de vous occuper de vos poubelles ! Et faîtes attention tous
les deux, je vous ai à l'oeil ! Vous comprenez ? Je dis ça par rapport aux problèmes de vue de...
Nico : Oui, très marrant ! Allez, au revoir Martine, et merci d'être passée.
Martine : Au revoir monsieur Pommard. Au revoir monsieur Thomas-Jean. Au cas où vous ne le verriez
pas, je vous fais au revoir avec la main !
Ça s'improvise pas !
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Thomas lui répond en souriant faussement puis, dès qu'elle a le dos tourné et qu'elle a quitté l'appartement,
son salut de la main se transforme en un doigt d'honneur.
Thomas : C'est bien elle la commère qui sait tout ce qui se passe dans cet immeuble et dans le quartier ?
Nico : C'est elle ouais. Depuis qu'elle a perdu son mari, elle passe ses journées à espionner les alentours
par la fenêtre de son salon.
Thomas : Super, et tu penses que c'était une bonne idée de la faire rentrer et de me la présenter ?
Nico : Hého, c'est pas parce que tu dois rester enfermé ici pendant x temps que je dois ouvrir la porte à
personne ! J'ai une vie je te signale, Thomas-Jean !
Thomas : Et plutôt que de dire que je suis ton coloc, tu pouvais pas juste lui dire que je suis un ami venu te
rendre visite ?
Nico : Si vous devez être amenés à vous revoir ici, je ne vois pas quelle autre excuse je pouvais trouver...
Thomas : Avec tes conneries, on va l'avoir sur le dos pendant un moment, c'est pas malin ! En tout cas,
cette première journée commence bien ! À ce rythme là, je crains le pire pour la suite... (soudain, il panique)
Et merde, quelle heure il est ?
Nico : Dix sept heures trente, pourquoi ?
Thomas : J'ai promis à mes parents que je les appellerais dès que j'arrivais à Bamako, et c'est censé être
le cas depuis quinze minutes. T'as acheté un téléphone ?
Nico : Ouais (il va le chercher) Tiens, avec carte prépayée, et réglé en liquide pour pas qu'on me retrouve.
Thomas : Parfait, il est donc intraçable ?
Nico : J'en sais rien moi, j'suis webmaster, pas James Bond !
Thomas : Bon, ça fera quand même l'affaire... (il compose un numéro Salut maman, c'est moi ! Je suis en
appelant inconnu ? Bizarre, ça doit être le réseau... Oui, je suis arrivé, ça y est... Comment s'est passé le
vol ? Très bien, j'ai pas vu le temps passer... Je suis à l'aéroport là... La température ? Il fait très chaud ! Tu
vas pas recommencer : il fallait que je fasse ce voyage, je pouvais pas passer à côté d'une telle occasion !
Mais je te l'ai déjà dit : je l'ai payé avec mes dernières économies...
Nico : Tu manques pas d'air toi...
Thomas : (couvre le téléphone) Ta gueule ! (à sa mère) Hein ? Oui, je vais faire attention, et je vous
donnerais des nouvelles très régulièrement... Oui, passe moi papa... Je t'embrasse maman... Salut p'pa...
oui oui, je suis bien arrivé... Est-ce que je suis dépaysé ? Pour l'instant... pas trop !
SCÈNE 7 : PRÉPARATION :
Quelques jours après, on voit Thomas et Nico, tous les deux affalés dans le canapé, télécommande à la
main.
Nico : Tu peux me rappeler à quoi ça va nous servir d'avoir regardé tous ces films ?
Thomas : Je te le répète : ça va nous servir pour nous préparer !
Nico : Sauf que tout ce qu'on a vu en deux jours, c'était de la fiction alors que nous, on est dans la réalité !
Ça s'improvise pas !
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Thomas : Je dis pas qu'on devrait faire exactement comme dans les films, faut juste s'en inspirer pour
savoir par quoi commencer, quelles sont les erreurs à ne pas faire, comment négocier, comment goupiller
notre plan pour que tout se passe bien...
Nico : Tu parles, je suis sûr que c'est une perte de temps !
Thomas : Si tu n'y mets pas du tien, autant abandonner tout de suite ! Si j'avais su, je me serais débrouillé
tout seul !
Nico : Tu n'y serais jamais arrivé sans moi, mon appartement et surtout, sans mon argent !
Thomas : (après quelques secondes) C'est pas faux...
Nico : Bon, c'est quoi les prochains films ?
Thomas : « Le Négociateur », ensuite « La Rançon », « Ocean's Eleven », « Heat », et « Mesrine », donc
on en a encore pour un bon moment...
Nico : Et ce DVD de la « La Grande Vadrouille », pourquoi on l'a loué ?
Thomas : Bah parce que c'est un film culte, quelle question !
Nico : (après quelques secondes) Ouais remarque, t'as bien raison ! (ils rigolent tous les deux)
SCÈNE 8 : DES AVANCES INATTENDUES :
Quelques jours après, Thomas est tout seul dans la pièce, assis devant une table, en train d'essayer
d'écrire mais il n'arrête pas de griffonner des feuilles. Nico revient avec des sacs de courses dans les bras.
Thomas : Ah, tu tombes bien, je commençais à avoir faim...
Nico : Ça ne fait qu'une semaine que t'es chez moi, et j'ai déjà hâte que tu t'en ailles ! Tiens, commence
par ça (il lance à Thomas une brosse à dents) j'en avais marre qu'on partage la même brosse à dents...
Thomas : Pas faux ouais, merci !
Nico : Bon, ça avance ta pièce ?
Thomas : J'ai quelques idées mais rien de bien concret...
Nico : Vas-y, je t'écoute...
Thomas : D'accord, ma première idée, c'était...
Nico : La première idée n'est jamais la bonne, commence directement par la deuxième !
Thomas : Ok, c'est l'histoire de deux colocataires qui se rendent compte qu'ils sont amoureux l'un de l'autre
alors qu'ils ont tous les deux quelqu'un dans leurs vies et...
Nico : Encore une comédie romantique ? Si tu veux surprendre tes fans, il faut changer de registre !
Thomas : C'est ce que je me suis dit, d'où ma troisième idée : l'histoire d'une famille qui se dispute un
héritage et, au fil de l'histoire, ils vont être obligés de sortir des cadavres du placard pour se dire leurs
quatre vérités...
Nico : Ç'a l'air super gai ton truc. Oublie celle-là. Ensuite ?
Thomas : Une comédie policière ! C'est l'histoire de dix personnes qui se retrouvent sur une île et, petit à
petit, ils se font tuer les uns après les autres, jusqu'au dénouement final où...
Nico : Ça existe déjà, et ça s'appelle « Les dix petits nègres »...
Ça s'improvise pas !
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Thomas : Je me disais aussi, ça me rappellait quelque chose cette histoire...
Nico : Bon, pendant que tu te creuses les méninges, je vais chercher les autres courses dans la voiture... (il
quitte la pièce)
Thomas : Je vais jamais y arriver, c'est pas possible... (un bip retentit dans l'appartement, Thomas
s'approche de l'ordinateur) Tiens, c'est Élodie, qu'est-ce qu'elle raconte de beau ? « salut ça va ? »
(Thomas hésite puis, finalement, il se met à taper sur le clavier) « Ça va et toi ? » (quelques secondes puis
un bip) « ça va, tu fais quoi aujourd'hui ? Tu retournes à la salle de muscu ?» Elle va pas être déçue le jour
où elle va voir Nico en vrai ! Ça me donne une idée, tiens... (il répond) « Je reste chez moi, j'ai du boulot, et
toi ? » (nouveau bip) « Moi je sais pas encore... » (Thomas hésite avant de répondre) « Si tu t'ennuies, tu
peux passer à la maison un de ces quatre, j'habite au numéro seize de la rue Metayer, dans le onzième.
Désolé, je me sauve ! » (il ferme le pc) Désolé mon pote mais c'est pour toi que je fais ça...(il retourne
s'asseoir et Nico revient avec de nouveaux sacs)
Nico : Me donne pas de coup de main surtout...
Thomas : Pas de problème !
Nico : Pourquoi j'ai l'impression que tu fais tout pour que je te mette dehors ?
Thomas : Je sais très bien que tu feras jamais ça, donc j'ai pas peur de prendre des risques !
Nico : Un conseil : me tente pas trop ! (l'interphone sonne, il va répondre) Oui ? Ah, euh...d'accord, je
t'ouvre...(il raccroche) C'est Juliette !
Thomas : Juliette ? Ma Juliette ?
Nico : Ta Juliette ouais !
Thomas : Mais pourquoi tu lui as ouvert, espèce d'imbécile ? Faut pas qu'elle me voie ici !
Nico : T'es marrant toi, je pouvais pas savoir que c'était elle en décrochant l'interphone !
Thomas : Tu sais quoi ? Tu fais chier ! (ça frappe à la porte)
Nico : Va te cacher, je te dirais quand elle sera partie !
Thomas sort de la pièce et, aussitôt, Nico ouvre la porte à Juliette.
Nico : Salut Juliette !
Juliette : Salut, je te dérange ? J'ai cru entendre une autre voix...
Nico : Non, pas du tout, c'était la télé. Alors, qu'est-ce qui t'amène ?
Juliette : Rien, j'étais dans le coin, j'ai eu envie de passer te faire un coucou, c'est tout !
Nico : Ah, quelle... super idée !
Juliette : En fait, depuis que Thomas est parti, je m'ennuie pas mal ! Quelle drôle d'idée il a eu, le mec a
pas un rond en poche et pourtant, il décide de partir à l'autre bout de la planète pour se « ressourcer ».
Nico : Il en avait grand besoin ! Quand il rentrera, ça sera un homme...nouveau !
Juliette : J'espère surtout que ça va lui permettre de se faire à l'idée que sa carrière d'auteur, c'est du
passé, il faut qu'il passe à autre chose maintenant, t'es pas d'accord ?
Nico : Je...si si, t'as sans doute raison, il faut... qu'il ouvre les yeux !
Juliette : Ouais, parce que je suis pas sûre de pouvoir supporter cette situation pendant très longtemps...
Nico : Tu veux dire que tu envisagerais de le quitter si jamais...
Ça s'improvise pas !
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Juliette : Mets toi à ma place : tu crois que c'est agréable d'être obligée d'aller chez les parents de son
petit-ami pour pouvoir passer du temps avec lui ? J'ai l'impression d'être une collégienne qui va voir son
amoureux entre les cours...
Nico : C'est juste un mauvais moment à passer, tu dis ça car il te manque. Dès qu'il rentrera, il se mettra à
la recherche d'un travail, j'en suis sûr !
Juliette : Même s'il décidait de le faire, je ne suis pas certaine d'être prête à le pardonner...
Nico : Tu dis ça car t'es en colère, c'est tout...
Juliette : Ah bon ? Depuis qu'il est parti, pour avoir de ses nouvelles, je suis obligée d'en demander à ses
parents ! Tu penses pas que, s'il tenait un minimum à moi, il m'appellerait de temps en temps ?
Nico : Ça doit coûter cher les communications là-bas, peut-être qu'il donne des nouvelles uniquement à ses
parents pour qu'ils te les transmettent également à toi. Moi non plus j'en ai pas eu, tu sais...
Juliette : C'est sympa d'essayer de me rassurer mais ma décision est prise. En plus, il se peut que je sois
attirée par quelqu'un d'autre...
Nico : Donc non seulement tu veux le quitter mais en plus, quand il reviendra, tu seras déjà recasée avec
un autre ? Bah dis-donc, j'aimerais pas être à la place de cette personne...
Juliette : Et pourtant...
Nico : Et pourtant quoi ?
Juliette : Rien, je te laisse y réfléchir. Bon, je me sauve, j'ai une tonne de travail qui m'attend au bureau. Je
repasserais te voir un de ces quatre...
Nico : D'accord oui... (Juliette lui fait un bisou sur la joue et s'en va) Elle parlait de moi ou quoi ? Ça sent
pas bon cette histoire, faut surtout pas que Thomas l'apprenne ! (il ouvre la porte de sa chambre) C'est bon,
elle est partie...
Thomas : (sort de la chambre) Qu'est-ce qu'elle voulait ?
Nico : Elle venait juste me demander si j'avais de tes nouvelles car tu ne lui en a pas encore donné depuis
ton « départ » ! A ta place, je l'appellerais ce soir...
Thomas : Je vais y réfléchir...
Nico : Un conseil : décide toi rapidement !
Thomas : Pourquoi ça ?
Nico : Pour ne pas qu'elle se fasse du tourment pour rien...
Thomas : Ok, ok. En tout cas, ces quelques minutes passées à être caché m'ont permis de prendre une
décision...
Nico : Laquelle ?
Thomas : Je crois qu'il est temps pour moi... de me faire enlever !
Ça s'improvise pas !
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ACTE 2 :
SCÈNE 1 : PREMIÈRES PRÉPARATIONS :
T
homas fait les cent pas dans le salon et a l'air très stressé, alors que Nico, lui, est tranquillement
installé dans le canapé.
Thomas : T'es sûr de ton coup hein ? Il est réglo ce type ?
Nico : Mais oui, c'est l'homme qu'il nous faut ! Quand on était à l'université, il piratait le réseau du campus
pour modifier ses notes de partiels, c'est comme ça qu'il a fait ses premiers pas dans ce domaine...
Thomas : Mais là, c'est beaucoup plus compliqué que ça, on lui demande de nous aider à mentir à la terre
entière !
Nico : Il en est tout à fait capable. Après ses études, il a été pendant des mois militant auprès d'O.N.G
mondiales, il a piraté je ne sais combien de sites internet de grandes entreprises sans jamais se faire
attraper par les flics !
Thomas : Il risque quand même de s'attirer des ennuis à cause de nous...
Nico : Ça ne lui fera pas peur, c'est le genre de défi qu'il va être ravi de réaliser ! (interrompu par un bruit de
sonnerie) Ah, ça doit être lui ! (il va à l'interphone) Ouais ? Ok, je t'ouvre...
Thomas : Si je le sens pas, on se passera de ses services, ok ?
Nico : Tu me soules, fais-moi confiance, pour une fois !
Thomas : Oui bah s'il fout tout en l'air, je te le ferais payer !
Nico : La seule chose que t'auras à faire, ça sera de me remercier...(ça frappe à la porte, Nico va ouvrir à
Raphaël. Il a les bras chargés de matériel informatique) Salut vieux, ça faisait un bail !
Raphaël : Je sais ouais, j'ai été pas mal prit, ces derniers temps...
Nico : Toujours autant investi dans l'écologie ?
Raphaël : Pas seulement ! Si tu savais le nombre de choses que nous cache notre gouvernement et les
médias en matière de nucléaire, de pollution, etc, tu saurais à quel point ma vie n'est pas de tout repos !
Thomas : Hum hum...
Nico : Ah pardon, Rapha, je te présente Thomas...
Raphaël : Le fameux mec qui veut faire semblant de se faire enlever, c'est ça ? Salut, enchanté.
Thomas : De même, j'espère que tu es d'accord pour nous donner un coup de main ?
Raphaël : Évidemment ! Duper et manipuler les médias et toute la planète comme tu envisages de faire,
c'est LA blague du siècle donc c'est avec plaisir ouais !
Thomas : Nico t'a dit ce que nous attendons de toi ?
Raphaël : Il veut que je te filme en étant « prisonnier » et que je l'envoie anonymement à l'AFP, c'est ça ?
Thomas : Exactement, c'est dans tes cordes ?
Raphaël : Oui, j'ai déjà fait ça des dizaines et des dizaines de fois ! Je milite contre plusieurs causes et je
me suis déjà attaqué à plusieurs grands patrons, donc je sais exactement comment je dois faire !
Thomas : Bon, alors c'est parfait...
Ça s'improvise pas !
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Raphaël : Par contre, y'a un truc dont on a pas encore parlé...
Thomas : C'est à dire ?
Raphaël : Tout travail mérite salaire, alors combien vous me proposez ?
Nico : Une partie de la rançon qu'on envisage de négocier, ça te va ?
Raphaël : Ça dépend, on parle de combien ?
Nico : On parle de...
Thomas : (interrompt brutalement Nico) Tu nous excuses un moment ? (il emmène Nico un peu à l'écart)
Tu lui proposes une partie de la rançon ?
Nico : Bah c'est normal non ?
Thomas : On en avait pas parlé ! Tu veux lui donner combien ? Les un tiers des un quart de la rançon ?
Nico : Par exemple, oui ! Ou même la moitié des un tiers des un quart, ça sera suffisant !
Thomas : Et pourquoi pas les un quart de la moitié des un tiers des un quart ?
Nico : Tu comprends ce que tu dis au moins ?
Thomas : A vrai dire, nan... (à Raphaël) Ton prix sera le notre, ça te va ?
Raphaël : Ça me va ! Bon, on se met au boulot ?
SCÈNE 2 : C'EST DANS LA BOITE :
On diffuse la vidéo faîte par Thomas, Raphaël et Nico, tournée dans la chambre de ce dernier. Ensuite, la
lumière se rallume et les trois garçons ressortent de la pièce. Nico et Rapha sont habillés en noir, et
Thomas est torse nu.
Thomas : Bon, cette fois, c'est dans la boite !
Nico : Tu ne comptes pas les dix autres prises qui ont été nécessaires pour réussir à en faire une bonne ?
Thomas : Excuse-moi, y'a pas marqué Spielberg !
Raphaël : Si vous vouliez que ça fasse crédible du début à la fin, c'était vraiment nécessaire !
Nico : Y'a un autre truc qui aurait pu rendre ça encore plus crédible... (il regarde Thomas)
Thomas : Non, je ne me couperais pas un doigt, on en a déjà suffisamment parlé comme ça !
Nico : Comme tu veux, mais tu viendras pas te plaindre après si ça marche pas...
Thomas : Ça risque pas. Bon, tu pourras envoyer ça quand à l'AFP ?
Raphaël : Le temps que je fasse le traitement vidéo et quelques retouches, que j'enlève le bruit autour, que
je convertisse le format, que je crypte sa source, que je fasse en sorte que le signal soit caché pour qu'on
ne sache pas que ça vient de chez moi, que j'arrive à l'envoyer d'un serveur étranger...
Thomas : Ok, ça va prendre trois plombes...
Raphaël : Demain matin, au plus tard !
Nico : Donc dès demain midi, tout le monde saura que Thomas a été enlevé ?
Raphaël : L'AFP le saura. Après, pour que ça fasse le tour de la planète, il faudra attendre une demijournée supplémentaire, grand max !
Thomas : Donc à partir de demain soir, je serais officiellement un otage ?
Ça s'improvise pas !
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Raphaël : C'est ça. Par contre, comme tes proches vont se faire un sang d'encre, on pourra communiquer
de temps en temps des informations à ton sujet disant que tu es en bonne santé et que...
Thomas : Non, si on veut une rançon rapidement, il faut leur faire croire que le temps joue contre moi !
Raphaël : Bon, comme tu veux. En tout cas, c'est la première fois que je vois quelqu'un qui est content de
se faire enlever...
Ça sonne à la porte. Nico va aussitôt voir dans le judas.
Nico : C'est encore la voisine !
Thomas : Ne lui ouvre pas ! Si elle me voit ici, elle va...
Nico : Je suis chez moi, j'ouvre à qui je veux ! Bon, met ça sur ta tête ! (il lui tend torchon que Thomas met
sur sa tête et va ouvrir) Bonjour Martine, ça va et vous ? Quel bon vent vous amène ?
Martine : Bonjour, monsieur Pommard, j'aurais besoin de vos services. Je voulais attraper une boite de
chocolats mais ils sont rangés sur l'étagère du haut, et je suis trop petite pour les atteindre...
Nico : Si vous avez réussi à les mettre si haut, vous devriez bien être capable de les reprendre, non ?
Martine : C'est mon mari qui les avait mis là...
Nico : Donc si je comprends bien, vous voulez manger des chocolats qui doivent être rangés à la même
place depuis près de quinze ans, c'est ça ?
Martine : C'est pas de ma faute, j'ai toujours été gourmande ! L'autre jour par exemple, j'ai mangé une boite
de cassoulet qui... (elle s'arrête en voyant Thomas, torse nu, le visage caché par un torchon) Qu'est-ce que
vous fabriquez ici ?
Nico : C'est à dire que...
Raphaël : Nous étions en train de tourner un film...
Martine : Un film, ? Pour le cinéma ?
Raphaël : Non, disons plutôt un film un peu... (il sort de son sac la caméra, les menottes et la cagoule) olé
olé, si vous voyez ce que je veux dire...
Martine : Mon Dieu... Et celui qui a le torchon sur la tête, c'est monsieur Thomas-Jean ?
Raphaël : Thomas-Jean ? (il voit Nico lui faire des signes de tête) Oui oui, c'est lui, on s'apprêtait à passer à
l'action juste avant votre arrivée...
Martine : Le pauvre ! Vous croyez pas que c'est déjà assez dur pour lui d'avoir des problèmes de vue ?
Vous voulez en rajouter ?
Raphaël : Ça fait partie du scénario, tout simplement. Vous voulez vous joindre à nous ?
Martine : Oh que non, j'ai pas envie de voir ça !
Nico : Et pour les chocolats ? Vous voulez que...
Martine : Nan, je vais me débrouiller finalement ! (elle quitte l'appartement, un peu dégoutée)
Thomas : (en enlevant le torchon) Un film olé olé, t'avais pas une meilleure idée ?
Raphaël : Bah si vous l'aviez sur le dos, elle va vous foutre la paix pendant un bon petit moment je pense !
Nico : Ah ouais ? Et imagine qu'elle en parle à mon proprio ? Tu crois pas que ça m'attirerait des ennuis ?
Raphaël : Il n'y a aucune raison pour que cela arrive, stresse pas ! Bon, j'ai du boulot moi, donc on se
rappelle dans la semaine. Salut les gars ! (il quitte la pièce)
Ça s'improvise pas !
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Thomas : Il a l'air un peu taré comme mec...
Nico : C'est le moins qu'on puisse dire !
Thomas : Bon, maintenant y'a plus qu'à croiser les doigts pour que notre plan fonctionne...
Nico : T'as pas confiance en lui ?
Thomas : Si si, mais un imprévu est si vite arrivé qu'on peut s'attendre à tout...
SCÈNE 3 : UNE DRÔLE DE SURPRISE :
Deux jours plus tard, Thomas est en train d'écrire, et Nico arrive avec les journaux.
Nico : Bon, c'est officiel : on parle de toi dans les journaux, y'a même ta photo !
Thomas : Fais voir ça ! (il attrape un journal et lit l'article à haute voix) « Thomas Rousseau, jeune auteur
connu du public français pour ses nombreuses pièces à succès, a été enlevé cette semaine en Afrique, par
un groupuscule de terroristes nommé « Les Hommes de l'Ombre » (il s'arrête dans sa lecture) Bah dis donc,
il s'est pas foulé pour nous trouver un nom Rapha !
Nico : Continue plutôt que de te plaindre !
Thomas : « Hier midi, une vidéo de ces terroristes a été envoyée à l'AFP. Dessus, on y aperçoit le français
de vingt neuf ans, entouré de deux silhouettes masquées. Interrogé par l'AFP, le Ministère des Affaires
Étrangères a annoncé que le nécessaire serait fait...blablabla... » Y'a même ma biographie !
Nico : Elle tient sur deux lignes, nan ?
Thomas : Très drôle ! Bon, en tout cas, Rapha a fait du bon boulot et, à partir d'aujourd'hui, à part lui, tu ne
peux plus accueillir de personnes ici !
Nico : Ça, on verra ! En tout cas, je n'ose pas imaginer dans quel état doivent se trouver tes parents à
cause de nous...
Thomas : T'en fais pas pour eux. C'est mon idée, donc tu n'as rien à te reprocher, ok ? (interrompu par la
sonnerie de l'interphone)
Nico : Ah, j'y vais ! C'est sûrement Rapha, il m'avait dit qu'il passerait peut-être en fin de matinée. (il
décroche l'interphone) Oui ? Pardon ? Elodie ? Je ne connais pas de... Ah ? Comment tu... Ok, deuxième
étage, appartement numéro trois...(il raccroche) Désolé Tom, c'est Elodie...
Thomas : Oh merde, j'avais oublié que je lui avais donné ton adresse...
Nico : Mais pourquoi t'as fait ça ? Je t'ai rien demandé, j'te signale !
Thomas : Je t'ai promis que je t'aiderais avec elle, c'était pour faire avancer les choses entre vous ! Bon, je
vais me changer, faut pas qu'elle me reconnaisse !
Nico : Mais j'ai pas forcément envie que tu la voies !
Thomas : T'auras pas le choix... (ça frappe à la porte) Allez, à toi de jouer, Don Juan, tu me remercieras
plus tard ! (il s'en va)
Nico : (à lui-même) Allez, respire Nico, tu peux le faire ! Sois naturel et tout devrait bien se passer...
Ça frappe encore. Cette fois-ci, Nico va ouvrir. Aussitôt, une femme un peu âgée rentre dans l'appart'.
Ça s'improvise pas !
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Élodie : Bah dis-donc, je commençais à croire que t'allais pas m'ouvrir !
Nico : Bonjour, si vous voulez me vendre quelque chose, faudra repasser plus tard, j'attends quelqu'un...
Élodie : Bah je sais, c'est moi que tu attends !
Nico : Mais bien sûr ! Allez, si vous voulez pas que je vous mette dehors, il faut...
Élodie : Jolieblonde75, c'est moi !
Nico : (après quelques secondes) Quoi ? Vous êtes... vous êtes Elodie ?
Élodie : Mais oui, puisque je te le dis !
Nico : (en la faisant entrer) Je vous voyait... enfin, je te voyais pas si...
Élodie : Si belle ? Si grande ? Si souriante ?
Nico : Mais nan, si âgée, ça ne correspond pas aux photos que tu m'as montré !
Élodie : T'es sûr ?
Nico : Bah oui, regarde ! (il tapote sur son ordinateur et lui montre) Tu m'as envoyé ces trois-là, y a erreur
sur la marchandise !
Élodie : Mais nan, c'est bien moi, mais avec quarante ans de moins, c'est tout !
Nico : Tu m'as dit que tu avais vingt sept ans. T'en as combien en vrai ?
Élodie : Bah sur cette photo, j'en ai bien vingt sept, comme sur les deux autres, je ne t'ai pas menti !
Nico : Mais tu ne m'avais pas dit que c'était à l'époque de la photo que tu avais cet âge-là ! Moi, c'était ton
âge d'aujourd'hui que je voulais !
Élodie : Et alors ? Nous les seniors, on a pas le droit de chercher l'amour aussi sur internet ?
Nico : Je n'ai pas dit ça, c'est juste que je cherchais quelqu'un qui avait dans mes âges, c'est tout !
Élodie : Vous les hommes, qu'est-ce que vous pouvez être compliqués ! Et quand tu dis qu'il y a erreur sur
la marchandise, je pourrais t'en dire autant ! Tu as peut-être fait de la musculation mais, si c'est bien le cas,
ça devait être y'a longtemps !
Arrivée de Thomas, « déguisé » avec une casquette, des lunettes de soleil et une écharpe.
Thomas : Excuse-moi Nico, tu pourrais... oh pardon, je savais pas que tu n'étais pas seul !
Nico : Thomas-Jean, je te présente Elodie. Elodie, je te présente Thomas-Jean, mon colocataire...
Thomas : Elodie ? LA Elodie ?
Nico : Oui, Elodie, la femme dont je t'ai déjà parlé...
Thomas : (à Élodie) Vous êtes Elodie ?
Élodie : Bah dis donc, c'est qu'il a l'air d'être long à la détente le pauvre !
Thomas : Excusez-moi, je m'attendais juste à quelqu'un de plus...
Élodie : Vous allez pas vous y mettre aussi ? (à Nico) Tu ne m'avais pas dit que tu avais un colocataire !
Nico : Et toi, tu ne m'avais pas dit que tu avais quarante ans de plus que prévu, comme quoi hein, la vie est
faite de surprises !
Thomas : Elodie, je peux vous emprunter Nico quelques secondes ?
Élodie : Allez-y oui...
Thomas : (s'éloigne un peu avec Nico) Bah dis-donc, t'es encore tombé sur du lourd...
Nico : C'est de ta faute, j'te signale ! Si tu lui avais pas donné mon adresse, on en serait pas là !
Ça s'improvise pas !
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Thomas : Ça aurait changé quelque chose à son âge ? Je t'avais promis de t'aider mais là, ça va peut-être
être compliqué...
Nico : Je suis aussi surpris que toi, je te signale ! En plus, elle a l'air d'être complètement illuminée !
Thomas : Allez, fais un effort, c'est dans les vieux pots qu'on fait les meilleures soupes, comme on dit ! Et
puis, elle est peut-être âgée en apparence mais jeune dans sa tête !
Nico : Rassure-moi, tu serais pas en train de te foutre de ma gueule ?
Thomas : Moi ? Ah nan, ça serait mal me connaître !
Élodie : (les interrompant) Bon, tu m'offres un verre Nico ou faut que j'aille me servir ?
SCÈNE 4 : DES AVANCES, ENCORE DES AVANCES :
Ça sonne à nouveau mais cette fois-ci, directement à la porte. Nico va voir dans le judas.
Nico : Oh nan, c'est Juliette ! Il manquait plus qu'elle...
Thomas : Mais c'est quoi cet immeuble, on y rentre comme dans un moulin ou quoi ?
Élodie : C'est qui cette Juliette ? Encore une de tes prétendantes ?
Thomas : Suivez moi, Elodie, je vais, euh... vous faire visiter l'appartement !
Élodie : Vous êtes gentil mais c'est pas vous que je suis venue voir !
Nico : Vas-y Elodie, je t'offrirais un verre ensuite et on pourra discuter, promis !
Élodie : Bon bon, puisque j'ai pas le choix...
Elodie et Thomas quittent la pièce. Aussitôt, Nico ouvre à Juliette qui rentre dans la pièce avec un journal à
la main.
Nico : Juliette, quelle surprise !
Juliette : T'as vu les infos ? T'es au courant pour Tom ?
Nico : Ah mais oui, bien sûr, quelle tragédie...
Juliette : Je te le fais pas dire ! J'aurais jamais dû le laisser partir, tout est entièrement de ma faute !
Nico : Faut pas dire ça, c'est de la faute à pas d'chance, c'est tout ! Je suis sûr qu'il ne lui arrivera rien !
Juliette : Il s'est fait enlever par des terroristes dont on ne sait absolument rien, et dans on ne sait quel pays
africain ! Tu penses vraiment qu'il peut s'en sortir ?
Nico : Bien sûr que oui, les autorités le sortiront de ce pétrin, il reviendra ici sain et sauf, j'en suis persuadé !
Juliette : T'as bu ou quoi ?
Nico : Non, pourquoi ?
Juliette : J'sais pas, je te trouve un peu trop zen...
Nico : Mais non, je suis inquiet, évidemment, comme tout le monde ! Tu as vu ses parents ?
Juliette : Oui, je suis passée les voir ce matin, ils venaient de l'apprendre, ils étaient entourés de policiers et
il y en a deux qui m'ont posé des questions. Il se peut qu'on t'interroge toi aussi...
Nico : Pourquoi ça ? J'ai rien à voir là-dedans...
Ça s'improvise pas !
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Juliette : Apparemment, c'est la procédure... (après quelques secondes) Bon, tu as repensé à ce que je t'ai
dit l'autre jour ? Que j'envisageais de le quitter à son retour...
Nico : C'est toujours d'actualité, même en sachant ce qu'il est en train de vivre ?
Juliette : Bah oui, ça ne change en aucun cas mes sentiments, ni son comportement de ces derniers mois !
Nico : Tu crois vraiment qu'il a besoin de ça ? Ça lui mettra un coup supplémentaire au moral quand il
reviendra et qu'il te verra avec un autre...
Juliette : Et alors ? S'il reste prisonnier là-bas, combien de temps ça va durer ? Un mois ? Deux mois ? Six
mois ? Six ans ? Je suis une femme, tu sais, j'ai... des besoins !
Nico : Et lui aussi il en aura en rentrant. Revoir ses proches par exemple, profiter de sa petite-amie qui lui
aura beaucoup manqué...
Juliette : Il a eu sa chance avec moi, il a pas su comment s'y prendre, il s'en mordra les doigts, c'est tout !
Nico : Et du coup, si je comprends bien, tu veux rompre avec lui pour te mettre avec moi, c'est ça ?
Juliette : T'as tout compris...
Nico : Tu me prends pour qui ? Tu crois vraiment que je vais faire ça à Thomas ? Me taper sa copine
pendant que lui est retenu prisonnier par des terroristes à des milliers de kilomètres d'ici ?
Juliette : Allez, essaye au moins une fois et, si ça te convient pas, il n'en saura rien !
Nico : Je n'oserais plus jamais me regarder dans un miroir si je faisais une chose pareille...
Juliette : Laisse-toi tenter, tu ne le regretteras pas...
SCÈNE 5 : CHANGEMENT DE PROGRAMME :
Retour d'Elodie qui arrive dans la pièce au moment où Juliette se rapprochait de Nico.
Élodie : Pas mal ton appartement, Nico, tu m'avais pas dis que... (elle s'arrête en voyant Juliette) Bonjour.
Je suis Elodie, une copine de Nico.
Juliette : Une copine ?
Élodie : Oui, pour l'instant, on est seulement amis, on prend notre temps. On s'est rencontré sur un site de
rencontre...
Juliette : Sur quelle site ? Sur « Adopte-une-vieille.com » ?
Élodie : Dis-donc ma jolie, pourquoi tu me parles comme ça ? T'as peur que je te le pique ou quoi ?
Juliette : Elle se prend pour qui, Miss Monde ? Je connais Nico depuis plus longtemps que vous, je vous
signale !
Nico : On se calme, les filles, et je vous rappelle que je ne suis pas un objet !
Élodie : J'ai été jeune bien avant toi, ma grande, je sais exactement comment m'y prendre pour séduire un
homme...
Nico : Et pourtant, mentir sur son âge n'est pas une solution, Elodie ! Maintenant, va t'en, s'il-te-plaît...
Élodie : Non, pas tant que tu ne m'aura pas offert un verre, comme tu me l'a promis !
Juliette : T'as proposé de boire un verre à cette.... à cette dégénérée ?
Nico : Ouais, mais en tout bien tout honneur, uniquement...
Ça s'improvise pas !
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Juliette : (après quelques secondes) J'ai compris : t'as toujours voulu essayer avec une femme mûre, c'est
ça ? C'est ton choix, seulement, quand tu verras que tu as fais une erreur, je sais qui tu viendras voir
ensuite...
Nico : Juliette...
Juliette : Bon, je vous laisse, amusez-vous bien surtout ! (elle quitte l'appartement, un peu énervée)
Élodie : Bah dis-donc, elle t'a dans ton collimateur celle-là ! En tout cas, quand je vais dire à ton coloc que
tu m'as préféré moi plutôt que cette pimbêche, il ne va pas en revenir !
Nico : Oh que non, il ne faut surtout pas lui dire ça !
Élodie : Pourquoi ? Tu as peur que... (elle s'arrête en voyant le journal qu'a laissé Juliette) Mais dis-moi, il
me dit quelque chose ce type...
Nico : Qui ça ?
Élodie : Bah le français qui a été enlevé en Afrique là... (elle s'assoit sur le canapé pour regarder le journal)
Nico : Oh merde... (après quelques secondes) Je vais te chercher à boire, ok ?
Élodie : Ok... (Nico s'en va) Il me fait penser à quelqu'un...(pendant qu'elle lit l'article, Nico revient avec un
verre qu'il donne à Élodie) Merci ! (elle boit une gorgée et regarde à nouveau l'article) Il ne te rappelle
personne, toi ?
Nico : Non, pas spécialement, continue de boire...
Élodie : Ok... (elle boit une nouvelle gorgée) Ah si, il ressemble à... (elle ne finit pas sa phrase car, tout d'un
coup, elle s'effondre sur le canapé)
Nico : Mon dieu, qu'est-ce que je viens de faire...
Retour de Thomas qui passe sa tête par l’entrebâillement d'une porte.
Thomas : C'est bon, elle est partie ? (il voit Elodie étendue sur le canapé) Qu'est-ce qui lui arrive ?
Nico : Je l'ai droguée...
Thomas : Pardon ?
Nico : J'ai mis un somnifère dans son verre ! Elle t'a vu dans le journal et t'a reconnu, j'ai pas eu le choix !
Thomas : Tu te rends compte de ce que tu as fait ?
Nico : Désolé, j'ai été pris de court et j'ai dû... improviser !
Thomas : T'as déconné, c'était pas prévu dans le plan ! Tu devais jouer le faux kidnappeur, pas le faire
pour de vrai !
Nico : Je sais... (après quelques secondes) On fait quoi ?
Thomas : On s'occupera d'elle plus tard. Maintenant, je crois qu'il est temps de passer à la phase deux du
plan : la négociation !
A SUIVRE...
Si vous souhaitez obtenir l'intégralité de la pièce afin de savoir si Nico et Thomas vont
réussir leur coup, n'hésitez pas à me demander la fin de la pièce par email :
Ça s'improvise pas !
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[email protected] !
Si je mets un peu de temps à répondre, n'hésitez pas à insister car cela ne me ressemble
pas ! Et si vous avez des questions, je suis aussi là pour y répondre ;-)
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