Futur palais de justice de Paris : la cité des avocats

Transcription

Futur palais de justice de Paris : la cité des avocats
Publié sur Dalloz Actualité (http://www.dalloz-actualite.fr)
Futur palais de justice de Paris : la cité des avocats
prend forme
le 20 avril 2015
AVOCAT | Organisation de la profession
Au pied de la future cité judiciaire de la porte de Clichy – cet immense vaisseau de verre imaginé
par l’architecte italien Renzo Piano livré en principe en juin 2017 -, quelque 20 000m2 devraient
être dédiés aux avocats. Deux bâtiments naitront de l’actuel chantier de la ZAC, l’un pour l’Ordre
parisien, l’autre pour le Conseil national des barreaux.
Ne pas perdre de temps. « On en a déjà suffisamment perdu », explique l’ancien bâtonnier parisien
Jean Castelain, désormais élu au CNB. C’est lui, avec Alexandre Moustardier, qui a présenté à
l’instance les 10 et 11 avril derniers, un rapport d’étape sur le projet de la « Maison des avocats de
France ». Il en sait quelque chose l’ancien bâtonnier, il avait déjà plaidé, en son temps, pour un
regroupement dans un même bâtiment des différentes institutions et des divers organismes de la
profession. En avril 2013, le CNB s’était prononcé pour la création d’une grande Maison de 5 000m2
aux alentours du futur palais de justice de Paris. Et puis, plus rien. Résultat : « la Ville de Paris a, en
raison de l’absence de tout projet suffisamment avancé sur le lot N2 [un bâtiment en face du palais
d’environ 15 000m2, ndlr], choisi ce site, dont la constructibilité a été, à cette occasion, réduite à 13
000m2, parmi les 23 retenus pour l’appel à des projets innovants "Réinventer Paris". Près d’une
centaine de candidats ont déposé des projets pour le 31 janvier 2015, la Ville de Paris devant
retenir 4 projets fin juin 2015 pour retenir ensuite le lauréat du concours », détaille le rapport. Bref,
le train est passé.
Mais à la faveur du changement de président à la tête du Conseil national des barreaux, le projet a
été relancé. Il faut désormais trouver un autre espace pour regrouper le CNB, la Conférence des
bâtonniers, la CNBF et l’UNCA, soit entre « 6 000 et 7 000m2 », précise Alexandre Moustardier. Il
reste trois autres lots. Le « N4 », situé sur le boulevard de Douaumont, donnant sur le périphérique,
d’environ 10 500m2 de surface de plancher, haut de sept étages, doit être livré au 4e trimestre
2017. « Ce bâtiment présente une façade de 60 mètres sur le boulevard périphérique, donnant une
grande visibilité pour les avocats », concèdent les auteurs du rapport. Un autre emplacement, situé
à côté des actuels décors de l’Opéra de Paris, abritera un bâtiment de 10 000m2 dessiné par Odile
Becq. Ce dernier « aura un caractère architectural remarquable, donnant une autre forme de
visibilité pour les avocats ». Enfin, le lot « United » offre 6 900m2 de bureaux, 9 étages, 400m2 de
commerces. Sa livraison est prévue pour la fin 2015 mais il est situé à Clichy. Le « N4 » semble
avoir la préférence de Jean Castelain. Le surplus pourrait être alloué au conseil de l’Ordre de Paris
qui a « perdu » les 1000 m2 qu’il devait obtenir au sein même du palais de justice. Budget estimé :
« Environ 85 millions d’euros », déclare Jean Castelain. « Nous pourrions utiliser le barreau de Paris
pour avoir une masse financière initiale suffisante pour le projet », ajoute-t-il. Ce que tempère
Alexandre Moustardier, « pour l’instant, il n’y a aucune avance de fonds en particulier ». Il est vrai
que le CNB n’a pas encore pris de décision. Ses membres se sont engagés, pour le moment, à «
poursuivre l’étude d’implantation d’une Maison des avocats de France dans la ZAC Paris-Batignolles
» en déléguant à ces deux avocats, notamment, le soin de « mandater un bureau d’études » pour
déterminer les besoins propres de chaque institution, de déterminer les services et les équipements
pouvant faire « l’objet d’une mutualisation » et d’effectuer « une évaluation des actifs immobiliers »
des institutions. Le CNB se prononcera en juin.
À Paris, un projet et un recours
Quant à la future Maison de l’Ordre des avocats de Paris, la « MOdA », les choses sont nettement
plus avancées. Là, encore, c’est Jean Castelain, du temps de son bâtonnat, qui avait initié le projet
(V. Dalloz actualité, 28 novembre 2013, M. Babonneau ). Son successeur, Christiane Féral-Schuhl,
Dalloz actualité © Éditions Dalloz 2017
Publié sur Dalloz Actualité (http://www.dalloz-actualite.fr)
avait obtenu que le terrain convoité – devant le palais – puisse passer de 3 500m2 à 6 000m2. Pour
cela, il avait fallu convaincre Renzo Piano qui craignait que son œuvre soit dénaturée. Pari gagné,
l’architecte s’en chargerait lui-même. Un coût estimé alors de l’ordre de 35 à 40 millions d’euros.
En 2013, « ce chiffrage était une esquisse », prévient Alexandre Moustardier, également en charge
de ce dossier immobilier. Et il ajoute : « les 35-40 millions d’euros visaient la construction du
bâtiment. Mais il y a l’achat du terrain, les droits à construire, les bureaux d’études, les
assurances… bref, tout ce qui se greffe à un projet immobilier ». Et l’incertitude quant au maintien
ou pas dans l’actuel palais des locaux ordinaux. La nouvelle estimation s’avoisine désormais autour
des 100 millions d’euros pour 10 000m2. « Nous nous sommes aperçus que 6 000m2 n’étaient pas
suffisants. Il y aura une bibliothèque – aussi majestueuse et symbolique que celle située dans le
vieux palais de justice de Paris -, un amphithéâtre… Un étage entier sera dédié à la Carpa, véritable
salle de marché. Et puis, les bureaux actuels de l’Ile de la cité sont trop exigus. Il faut bien
également de la place pour les salles de la place Dauphine, les services de taxation de la Maison du
barreau. Il y a 27 000 avocats à Paris et 280 personnes à caser. N’oublions pas que 1 800 élèves
sortent chaque année de l’EFB et qu’il faudra peut-être un jour intégrer les juristes d’entreprises.
Quoiqu’il arrive, il faudra accroître le nombre de personnes qui travaillent pour l’Ordre. Si nous sous
dimensionnons, on nous traitera d’imbéciles. Il n’est pas question de faire du bricolage. C’est un
placement immobilier, on fait du capital », tranche Me Moustardier.
Mais « un projet dispendieux » selon certains membres du conseil de l’Ordre qui ont attaqué la
délibération du 16 juillet 2013 autorisant le bâtonnier de l’époque – Christiane Féral-Schuhl – à
retenir l’architecte Renzo Piano pour la réalisation du la future MOdA. La requérante, Elisabeth
Cauly, membre du conseil de l’Ordre à l’époque et réélue depuis, estime que « Mme le bâtonnier
n’a pas donné d’informations préalables, a demandé un vote sans documents qui auraient précisé
les surfaces à acquérir ou le prix proposé et a elle-même pris part au vote, ce qui n’est pas régulier.
Ce n’est pas le montant qui choque mais la procédure ». L’avocate demande l’annulation de la
délibération. « Le conseil de l’Ordre n’est pas une armée de béni-oui-oui, rétorque Alexandre
Moustardier. Ce sont 34 membres du conseil de l’Ordre qui ont voté en faveur du projet. Seuls trois
membres, dont Mme Cauly, ont dit non sans poser de questions ». En attendant que la cour d’appel
de Paris se prononce, le 25 juin prochain, le sujet sera à nouveau traité avec les membres du
conseil de l’Ordre.
par Marine Babonneau
Dalloz actualité © Éditions Dalloz 2017