Mon_pere_et_moi - Etunix

Transcription

Mon_pere_et_moi - Etunix
AQφE
Mon père et moi…
Par :
Laure Beaulieu-Marcoux et Alexandra Emond-Lemieux (École secondaire de l’Aubier)
Sous la direction de :
Mathieu Gagnon ; Université du Québec à Chicoutimi (UQAC)
Thèmes : Agression sexuelle / Dénonciation / Culpabilité
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© Association Québécoise de Philosophie pour Enfants, UQAC, 2009
AQφE
Mon père et moi…
Par :
Laure Beaulieu-Marcoux et Alexandra Emond-Lemieux (École secondaire de l’Aubier)
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Chaque soir je repensais à ma vie. Tout était si noir. J’entendais les craquements des
escaliers comme si quelqu’un montait. C’était mon père qui venait me dire : «Bonne nuit
ma fille! Je t’aime ma beauté». Je fermais mes yeux et m’endormais d’un profond
sommeil. Je me réveillais en sursaut, parce que je faisais un mauvais rêve. Avais-je
rêvé… En fait, je n’en étais pas certaine…
J’entendais la porte s’ouvrir et je remarquais que c’était mon père. Il venait s’étendre
près de moi, et commençait à me flatter la tête.
Il disait : «C’est correct, c’est correct mon amour. Je ne fais rien de mal.»
Il commençait à enlever mon haut de pyjama, me touchait les seins et m’embrassait. Il
disait ensuite : «Enlève ton bas» et il faisait de même.
Je me suis demandée : «Est-ce que tous les papas font ça ? Est-ce normal qu’il fasse ça ?»
Je lui ai demandé, et il m’a dit : «Couche-toi sur le dos et ne pose pas de question. Je suis
ton papa et je t’aimerai toujours !».
Est-ce que c’est vrai que mon père m’aime, qu’est-ce que l’amour ? Est-ce que ce qu’il
me fait est une marque d’amour? Je sais que l’amour c’est des gens qui ont une affection
quelconque, mais est-ce que j’ai raison ? Et avoir de l’affection pour quelqu’un, est-ce
suffisant pour dire que c’est de l’amour? Est-ce que ça justifie de faire subir à l’autre
tous nos désirs?
Mon père prenais mes jambes et les ramenait vers mon corps, puis, je sentais une
pénétration. Je me laissais faire pendant une heure jusqu’à se qu’il en ait assez et qu’il
décide de retourner dans sa chambre...
Et mon rêve terminait comme ça !
Un matin, je me préparais pour aller à mon école habituelle, l’école St-Roc. J’ai raconté
mon rêve à ma meilleure amie, Lisa. Elle m’a dit :
«Érika, t’as donc bien fait un drôle de rêve !... Une chance que ce n’est pas vrai… ! »
Lisa m’a demandé ce qu’est une agression. Je ne savais pas trop quoi lui répondre, mais
je lui ai dis que ce devait être une ou plusieurs personnes qui te touchent sexuellement,
sans que tu le veuilles, mais que ça pourrait aussi être d’autres sortes d’agression.
Rendue chez-moi, à l’heure du souper, j’ai raconté mon rêve à mes parents.
‐
Ha ! Voyons ma p’tite fille, jamais je ferais ça !
Tu me le dirais si quelqu’un te touchait ? dit ma mère sur un ton inquiet.
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‐
Bien oui maman, c’est sûr que je te le dirais ! D’ailleurs, je me demande bien
pourquoi certaines personnes n’en parlent pas et gardent le silence.
‐
J’imagine, dit ma mère, que c’est parce qu’elles ont peur de se faire punir ou d’avoir
des représailles, ou encore que la dénonciation ne donne rien…
‐
Mais maman, je me demande si elles ont raison de penser cela? N’est-il pas toujours
mieux de dénoncer?
‐
Ce n’est pas simple mon amour. Ces situations sont très émotives et il est parfois
difficile de comprendre pourquoi certaines personnes agissent de telle ou telle façon
dans ces circonstances.
Le souper s’est terminé en silence. Chacun pensait dans sa tête.
Je me disais : « Est-ce qu’il y a un lien entre mon rêve et la réalité ? J’espère que non! De
toute façon, on peut avoir confiance en nos proches. Mais ai-je bien raison de dire cela?
Qu’est-ce que la confiance au juste? Est-ce que quelqu’un peut être digne de confiance
sans raison ou sans qu’il ait gagné notre confiance?»
Avant d’aller me coucher ce soir-là, je suis allé à la salle de bain pour me laver. Tout à
coup, j’ai remarqué que j’avais des équimoses sur les aines. Je me suis levée et j’ai vu
que j’avais aussi des marques rouges sur la poitrine.
J’ai appelé ma mère en criant. Elle est venue immédiatement et m’a demandé ce que
j’avais!
‐
Maman, maman, j’ai des équimoses sur les aines et des marques rouges sur mon
corps…. !» Dis-je nerveusement.
‐
Mais qu’est-ce qu’il t’est arrivée pour avoir tout ça !
‐
Je n’en ai aucune idée !
‐
T’es sûr que c’était un rêve ce que tu nous as raconté ?!
‐
Bien, bien, bien… Je ne sais pas !
Ma mère descendit pour aller voir mon père et lui a dit : «Qu’as-tu fais à notre fille ? À
quoi ça t’a servi ?».
‐
Je ne sais pas, j’ai fais un erreur ! Je ne voulais pas que ça arrive ! J’étais saoul, je
m’en excuse.
‐
Les excuses, les excuses, ça ne marche pas comme ça ! Et le fait d’être saoul, est-ce
une raison pour justifier ce que tu as fait?
Ma mère prit le téléphone et appela la police qui arriva quelques minutes plus tard. Ils
arrêtèrent mon père.
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Par la suite, je suis allé me coucher. Avant de m’endormir, je pensais : « Est-ce qu’un «Je
t’aime» démontre de l’amour ? Je n’en suis pas certaine… Et malgré ce que mon père a
pu me faire, je me sens coupable de ce qui lui arrive… Ai-je raison de penser cela? Estce normal de me sentir coupable?»
FIN
Si vous avez vécu ou connaissez quelqu’un qui a vécu une situation semblable, vous
pouvez demander de l’aide à l’organisme Tel Jeunes :
www.teljeunes.com
1-800-263-2266 24h/7 jours
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