Note de synthèse

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Note de synthèse
NOTE DE SYNTHÈSE
______
Rédacteur 2011
Concours externe et interne
À partir du dossier ci-joint, vous rédigerez une note sur les enjeux des délocalisations, en décrivant
notamment le champ et l’importance du phénomène, mais aussi les propositions qui peuvent être
avancées pour mieux faire face à ses conséquences.
LISTE DES DOCUMENTS JOINTS
1
Délocalisations et réductions d’effectifs dans l’industrie française
Document de travail G 2005 / 03 – Patrick AUBERT et Patrick SILLARD
INSEE – Direction des Études et Synthèses Économiques – Avril 2005 – 7 pages
2
Désindustrialisation, délocalisations – Lionel FONTAGNÉ et Jean-Hervé LORENZI
Conseil d’Analyse Économique – Extrait du rapport n°55 – 11/02/2005 – 5 pages
3
Les délocalisations détruisent 36.000 emplois par an – Marie BARTNIK
www.lefigaro.fr – 27/05/2010 – 1 page
4
Mondialisation et délocalisations : états des lieux et stratégies d’action
Les dossiers de la Mondialisation – Dossier n° 2 – CEPII – Centre d’analyse stratégique
mai-juin 2006 – 4 pages
5
Domestic Outsourcing and Imported Inputs in the U.S. Economy : Insights from Integrated Economic
Accounts – Robert E. YUSKAVAGE, Erich H. STRASSNER, Gabriel W. MEDEIROS
U.S. Bureau of Economic Analysis– 15 May 2008 – 3 pages
6
Defining Offshoring – Chapter 1
Offshoring and Employment : Trends and impacts – OECD 2007 – 4 pages
7
Délocalisations : quels effets sur l’emploi ?
Christoph MOSER, Dieter M. URBAN et Béatrice WEDER DI MAURO
www.telos-eu.com – 13/11/2009 – 2 pages
8
Après les délocalisations, les relocalisations – Sébastian SEIBT
www.france24.com – 29/09/2010 – 1 page
9
Les Suisses se font une montagne de soucis à cause des délocalisations – Yann LE HOUELLEUR
www.usinenouvelle.com – 08/09/2010 – 2 pages
10 Questionnez les économistes : Mondialisation – espoir ou menace ?
Débat avec Raymond TORRES, Chef de la division des politiques de l’emploi à l’OCDE
www.oecd.org – 29/06/2007 – 4 pages
1
INSTITUT NATIONAL DE LA STATISTIQUE ET DES ÉTUDES ÉCONOMIQUES
Série des documents de travail
de la Direction des Études et Synthèses Économiques
G 2005 / 03
Délocalisations et réductions d’effectifs
dans l’industrie française
Patrick AUBERT* et Patrick SILLARD**
AVRIL 2005
Ce document a été réalisé dans le cadre
d’un dossier du Rapport sur les Comptes de la Nation 2005-2006.
Nous remercions Didier Blanchet, Dominique Francoz, Hélène Erkel-Rousse,
Jean-François Loué et Sébastien Roux pour leurs nombreux commentaires
et suggestions sur cette étude.
Nous remercions également les Directions Régionales de l’Insee pour leur
collaboration à l’analyse des réductions d’effectifs dans les établissements.
Nous remercions enfin les participants à la réunion de division MSE,
au séminaire D3E, au groupe de travail sur les délocalisations et aux rencontres
« délocalisations et emplois » de l’OFCE pour leurs remarques et suggestions.
_____________________________________________
*
Département des Études Économiques d’Ensemble - Division « Marchés et Stratégies d’Entreprise »
Timbre G210 - 15, bd Gabriel Péri - BP 100 - 92244 MALAKOFF Cedex
** Département des Études Économiques d’Ensemble - Division « Croissance et Politiques Macroéconomiques »
Timbre G220 - 15, bd Gabriel Péri - BP 100 - 92244 MALAKOFF
Département des Études Économiques d'Ensemble - Timbre G201 - 15, bd Gabriel Péri - BP 100 - 92244 MALAKOFF CEDEX France - Tél. : 33 (1) 41 17 60 68 - Fax : 33 (1) 41 17 60 45 - CEDEX - E-mail : [email protected] - Site Web INSEE :
http://www.insee.fr
Ces documents de travail ne reflètent pas la position de l’INSEE et n'engagent que leurs auteurs.
Working papers do not reflect the position of INSEE but only their author's views.
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[…]
Les évaluations disponibles : un bref rappel
Évaluer le nombre d’emplois concernés par les délocalisations industrielles soulève deux problèmes :
un problème de définition, qui est de savoir ce qu’on entend par délocalisation, et le problème du
choix du ou des instruments de mesure mis en œuvre pour appliquer cette définition
Ni l’un ni l’autre de ces problèmes n’a de réponse immédiate. On dispose certes de quelques chiffrages
directs, correspondant à des comptages de cas de délocalisations signalés par la presse. Cet éclairage
est utile mais il n’est qu’indicatif. Ces chiffrages ne constituent pas une « mesure » du phénomène de
délocalisation car aucun contrôle de l’exhaustivité des cas repérés n’est assuré et la définition des
« délocalisations » n’est pas clairement codifiée.
À défaut d’exhaustivité, certaines études tentent d’estimer sur un champ restreint l’ampleur des
délocalisations relativement à un phénomène plus large, par exemple l’ensemble des restructurations
industrielles ou l’ensemble des opérations d’investissement à l’étranger. Elles sont fondées sur des
recensements de restructurations industrielles ou d’investissements à l’étranger, doublés d’analyses
qualitatives visant à déterminer quels cas sont assimilables à des « délocalisations ». Fontagné et
Lorenzi (2005) citent ainsi les travaux de l’institut European Monitoring Center on Change, qui chiffre
l’ampleur des délocalisations et de la sous-traitance internationale à environ 7 % des emplois détruits
lors de restructurations d’entreprises en Europe, entre le 1er janvier 2002 et le15 juillet 2004. De
même, Grignon (2004) cite des évaluations menées en 2002 par les missions économiques de la
DREE2 dans les pays d’Europe centrale et orientale : sur les opérations françaises d’investissement
recensées, environ 10 % seraient assimilables à des délocalisations. Néanmoins, comme dans le cas
des chiffrages de délocalisations signalées par la presse, ces études ne constituent pas des mesures du
phénomène, au sens statistique. La représentativité des cas étudiés n’est pas assurée et les critères
retenus pour qualifier certains cas comme des « délocalisations » restent non précisés.
Il faut donc plutôt se tourner vers d’autres approches, qui sont en général des approches indirectes. On
va tout d’abord rappeler brièvement les résultats et les limites de trois approches déjà mobilisées dans
la littérature, à savoir les approches macroéconomiques fondées sur les données de commerce
international, les approches fondées sur des modèles d’équilibre général et les approches fondées sur le
suivi des flux d’investissement directs étrangers avant de se tourner, à la section suivante, vers la
présentation détaillée de l’approche alternative que discute ce dossier.
Approches macroéconomiques : du contenu en emplois…
Une première approche très large consiste à parler de délocalisation dès lors qu’il y a substitution
d’une production étrangère à une production domestique pour satisfaire une même demande. C’est le
cas, par exemple, lorsqu’un producteur français perd ses clients au profit d’un producteur étranger plus
compétitif. Entendu au sens large, ce critère conduit à considérer que tout flux d’importation cache une
délocalisation puisqu’un tel flux revient bien à consommer en France un bien ou un service produit à
l’étranger et qui pourrait ou aurait pu être produit en France. Les emplois délocalisés correspondraient
à l’ensemble de l’emploi qu’il faudrait mobiliser pour réaliser en France l’ensemble de la production
étrangère importée. Cette approche était celle retenue dans le rapport Arthuis (1993).
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Direction des Relations Économiques Extérieures, appartenant au ministère de l’Économie, des Finances et de l’Industrie.
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Une telle approche a l’avantage de pouvoir être mise en œuvre à partir de données macroéconomiques
et elle s’intègre naturellement dans le cadre de la théorie du commerce international (voir encadré 1).
L’idée est de quantifier le nombre d’emplois « perdus »en répondant à la question suivante : combien
d’emplois devraient être créés dans le pays importateur si l’on voulait produire sur place l’ensemble
des biens qui sont actuellement importés ? La conversion de la valeur importée en emplois de
production s’effectue via le tableau d’entrées-sorties de la comptabilité nationale et le volume
d’emploi par branche. C’est l’algorithme qui sous-tend le calcul du contenu en emplois des
importations.
Encadré 1
Quels enseignements de la théorie économique ?
Les théories du commerce international permettent de
prévoir certaines conséquences de l’ouverture des pays aux
échanges.
Ceci conduit, à technologie donnée, à la mise en place d’un
processus de convergence économique. Durant la phase de
transition, la croissance du pays émergent est supérieure à
celle des pays industrialisés. Elle se traduit par une forte
croissance de sa production industrielle et de ses
exportations. L’ouverture accroît la croissance mondiale ; le
pays développé en bénéficie également. En dehors des
effets directs de la convergence à technologie commune,
des différences technologiques peuvent aussi expliquer des
différentiels de croissance entre pays.
Les théories classiques prévoient que chaque pays se
spécialise dans la production des biens pour lesquels il
dispose d’un avantage relatif en terme de coût de
production. Lorsque les techniques de production sont
identiques et que les facteurs de production sont peu
mobiles, chaque pays se spécialise dans la production des
biens qui emploie le plus intensément les facteurs dont il est
relativement le mieux doté. Ces théories ont permis
d’expliquer le développement des échanges entre pays
développés, où le capital était abondant et le travail rare, et
les pays peu développés, placés dans la situation inverse.
Par ailleurs, une fraction importante du commerce mondial
comporte des échanges bilatéraux de biens de même
nature. La nouvelle théorie du commerce international
s’appuie sur le goût des consommateurs pour la variété, la
qualité et l’innovation des produits ainsi que sur l’existence
de rendements croissants pour formaliser ce
développement.
Si la mobilité des capitaux a été fortement accrue au cours
des dernières décennies, le travail reste peu mobile. De
plus, la diversité des savoir-faire, acquis par l’enseignement
et la formation, par l’expérience ou par la recherche,
demeure. De façon schématique, on peut admettre qu’il
existe deux qualités de travailleurs : des travailleurs qualifiés
et des travailleurs non qualifiés. Les pays développés sont
relativement biens dotés en travailleurs qualifiés et les pays
émergents, bien dotés en travailleurs peu qualifiés. La
concurrence des pays émergents entraîne dans les pays
riches une baisse du prix relatif des biens utilisant
intensément du travail peu qualifié, ce qui pousse à la
délocalisation de cette production, à la hausse du chômage
des moins qualifiés et à la baisse de leur salaire relatif dans
des proportions qui dépendent de la flexibilité des salaires et
des coûts induits par les échanges commerciaux
(transports) et par la mobilité des capitaux (risques). Une
discussion détaillée de cet aspect est développée par
Fagnart et Fleurbaey (2002).
L’ouverture de plus en plus grande des marchés de capitaux
a conduit à remettre en cause l’hypothèse d’immobilité du
facteur de production qu’est le capital. Dans un modèle de
croissance de type Solow (1956), un investissement est
d’autant plus rentable que le niveau de capital initial est
faible. L’ouverture aux échanges d’un pays émergent a donc
pour conséquence d’augmenter le flux de capitaux en
provenance des pays développés et à la recherche de
rendements élevés.
Compte tenu du poids limité des pays émergents dans les échanges des pays industrialisés, il se trouve
que cette méthode conduit à évaluer un impact net sur le marché du travail qui reste assez limité.
Fontagné et Lorenzi (2005) estiment ainsi un solde« comptable » des emplois incorporés aux flux de
commerce avec ces pays inférieur à1 % de l’emploi industriel. Avec une méthodologie similaire,
Boulhol (2004) estime à environ 250 000 le nombre d’emplois industriels perdus en France entre 1970
à 2002 du fait des échanges avec les pays du Sud, soit environ 15 % de la diminution d’emploi
industriel.
Il est notable que ce résultat très limité soit obtenu à partir d’une méthode qui est a priori plutôt
extensive. D’une part, elle capte davantage que l’ampleur des seules « délocalisations», puisqu’elle
capte également d’autres effets de la concurrence internationale, tels que les localisations d’unités
nouvelles et les abandons d’activité par les entreprises quine peuvent faire face à la concurrence
étrangère. Il s’agit en outre d’une approche « en stock » du phénomène : on s’éloigne de l’idée des
délocalisations, qui s’interprètent plutôt comme un « flux » d’emplois.
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Mais ces problèmes ne sont pas les seuls. Beaucoup d’autres raisons conduisent en général à
considérer que la méthode est peu rigoureuse (Guimbert et Lévy-Bruhl, 2002). Plus précisément,
l’évolution du contenu en emplois peut s’interpréter comme le résultat d’une pression s’exerçant sur
l’emploi, mais également sur les salaires, et éventuellement de manière distincte sur les différentes
qualifications. La méthode repose également sur trop d’hypothèses pour permettre un chiffrage fiable
et pertinent du nombre des emplois détruits (Wood, 1995) : notamment sur la distinction entre valeur
et volume, les effets sur la demande d’une modification des prix des produits, les effets de
complémentarité capital-travail. Elle ignore en outre la division internationale du travail, qui implique
qu’un bien intermédiaire importé puisse être modifié sur le territoire national puis exporté, et le
développement horizontal des firmes, qui s’opère par implantation de filiales au plus près des marchés
de destination afin d’abaisser les coûts de transport et mieux adapter le produit final à la demande
locale3.
Prenons par exemple le cas d’une croissance des importations de produits faiblement technologiques.
Ces importations proviennent de pays émergents où le coût de la main-d’œuvre est plus faible qu’en
France. Si on fait l’hypothèse que la croissance des importations du produit considéré correspond à la
substitution d’une production étrangère à une production française, le nombre d’emplois en France
diminue toutes choses égales par ailleurs. Le contenu en emplois des importations correspond aux
emplois français nécessaires, dans la branche considérée, pour produire la même valeur que celle
correspondant à l’accroissement des importations. Cela sous-entend que les valorisations des
productions françaises et étrangères sont identiques. Cependant, comme les coûts de main-d’œuvre
sont supérieurs en France, les coûts unitaires des biens français et étrangers sont différents. À
technologie de production identique, le contenu en emplois du surcroît d’importation sous-estime
l’emploi français « perdu ». En outre, si lesbiens importés étaient produits localement, le prix de
marché de ces biens serait plus élevé, ce qui, mécaniquement, se traduirait par une demande plus
faible. Enfin, pour alléger ce surcoût, il y aurait nécessairement une substitution du capital au travail
dans la production nationale des biens concernés et donc une technologie de production différente. Au
total, tout ceci rend très incertain le chiffrage du nombre d’emplois concernés par les substitutions de
production entre pays.
… aux modèles d’équilibre général
Une des principales difficultés de l’approche par le contenu en emplois tient à l’absence d’association
directe entre les déterminants de la localisation d’unité de production et la mesure utilisée. Dans tous
les cas, la mesure utilisée capte d’autres phénomènes que les seules délocalisations motivées par
l’optimisation de coûts de facteurs. Ainsi, un accroissement d’importations n’est pas la signature
directe de la substitution d’une capacité de production étrangère à une capacité française. A contrario,
l’approche par équilibre général calculable a le mérite de formaliser les causes de la redistribution
du. facteur capital. Elle perd en simplicité par rapport à l’approche précédente, mais elle permet de
corriger la mesure des délocalisations des phénomènes extérieurs à la redistribution pure du capital.
À titre d’exemple, Bchir et al. (2002) proposent un modèle simulant le cas de l’Union européenne et
de la zone Maghreb-Turquie. Ils montrent que l’impact d’une ouverture au commerce est bénéfique
aux deux zones, aussi bien en termes de rémunération des facteurs de production, travail qualifié et
non qualifié en particulier, qu’en termes de balance commerciale à long terme. À court terme, le
dernier point est à nuancer puisque l’amélioration des termes de l’échange pour l’Europe est en fait la
conséquence d’une croissance des importations plus forte que celle des exportations en volume. Donc
la compétitivité-prix de la zone industrialisée se dégrade dans cette première phase. Dans une seconde
phase, la croissance de la rémunération des facteurs rééquilibre l’ensemble pour aboutir à un effet
bénéfique de l’ouverture pour les deux zones.
3
Les importations étrangères en provenance de filiales impliquent le plus souvent des échanges de biens entre la maison-mère et la filiale
qui ne correspondent en rien à la substitution d’une production étrangère à une production nationale (Raspiller, Roux et Sillard, 2005).
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Il reste néanmoins que la décomposition des différents éléments qui entrent en jeu dans un modèle
d’équilibre général est relativement malaisée. En outre, les résultats sont très sensibles aux
nombreuses hypothèses constitutives du modèle et à son calibrage (Bchir et al. 2002).
L’approche par les investissements directs à l’étranger (IDE)
Une approche alternative consiste à s’appuyer sur les transferts de capitaux. La « délocalisation» serait
ainsi définie par un déplacement de capacités productives d’un pays vers un autre. En pratique, elle
implique l’existence d’investissements directs à l’étranger(IDE). L’idée est la suivante : lorsqu’une
délocalisation se fait par implantation d’une nouvelle filiale à l’étranger, elle implique un flux de
capital à destination de ce pays étranger. Cette approche peut être mise en œuvre sur données micro ou
macroéconomiques. Au niveau microéconomique, on retiendrait les cas où des groupes ou des
entreprises déplaceraient leurs capacités productives, via un transfert de capitaux. Au niveau
macroéconomique, on retiendrait tous les cas où des capitaux quitteraient la France, alors que d’autres
seraient investis dans un autre pays pour financer une production identique. Le transfert de capitaux se
ferait éventuellement par des mouvements complexes.
Ici encore, la mise en œuvre de la méthode débouche sur des effets limités. Drumetz(2004) montre
ainsi que l’ensemble Chine-Brésil-Inde et les dix nouveaux membres de l’Union européenne ne
représentent que 5,6 % des flux d’IDE français sur la période2001-2003. De manière générale, les flux
d’IDE à destination de pays émergents, conséquence de la convergence et des arbitrages de coûts de
facteurs, sont faibles. Selon les diverses estimations (Grignon, 2004 ; Fontagné-Lorenzi, 2005), ils
représentent au plus10 % du total des IDE français. Cela traduirait un impact limité du phénomène de
délocalisation vers ces pays4.
Deux difficultés se présentent néanmoins. D’une part, cette approche ne saisit pas ou saisit mal les
délocalisations qui s’effectuent par recours à la sous-traitance. Il est certes possible que ces
délocalisations donnent parfois lieu à des transferts de capitaux vers le sous-traitant, mais ceci n’a rien
de garanti. D'autre part, les flux d’IDE peuvent surestimer les délocalisations car le fait qu’un flux
d’IDE s’opère d’un pays A vers un pays B n’implique pas du tout que, en retour, la production de B
sera importée par A. Le phénomène de redistribution des IDE s’opère de manière globale
indépendamment de la production, de sa destination finale et donc des échanges commerciaux. Ainsi,
un IDE peut très bien relever d’une logique de conquête de marché et non d’une logique de
délocalisation.
Pour résumer, l’approche par les IDE est imparfaite, car délocalisation et redistribution du capital
productif ne sont pas synonymes. Il peut y avoir délocalisation sans redistribution du capital et il peut
y avoir transfert de capital sans qu’il s’agisse d’une délocalisation. En outre, l’étude des flux d’IDE
bilatéraux ne permet pas de saisir in extenso la dynamique de redistribution du capital qui s’opère dans
l’économie mondiale. Elle permet tout au plus de constater la redistribution, mais pas réellement de la
chiffrer. En effet, assimiler des flux d’IDE à des transferts de capital peut parfois s’avérer excessif. Par
exemple, un achat d’unité de production étrangère préexistante ne modifie pas les capacités de
production du pays de destination de l’IDE. En d’autres termes, on ne distingue pas les
investissements productifs des investissements purement financiers. Les IDE ne traduisent donc pas à
proprement parler une redistribution du capital. Ce phénomène est fréquent puisqu’on estime que la
création ex nihilo d’unités de production par IDE (investissement greenfield) ne représente que 6,5 %
des flux mondiaux d’IDE (Aussilloux et Cheval, 2002).
4
Drumetz (2004) nuance ce constat en signalant que, si les pays émergents représentent effectivement une part faible des investissements
français à l’étranger (environ 10 %), ils représentent en revanche une part plus élevée des effectifs des filiales de groupes français à
l’étranger (35 %). Cependant, cette dernière approche souffre des mêmes faiblesses que celle par les IDE. Pas plus que les IDE vers les
pays émergents ne peuvent être assimilés à des délocalisations, les effectifs des filiales de groupes français à l’étranger ne peuvent en rien
être assimilés à des emplois délocalisés.
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Une nouvelle approche microéconomique par les importations industrielles
Le choix d’une définition
Les limites des approches que l’on vient de discuter invitent à essayer des méthodes alternatives. Ce
dossier s’inscrit dans cette logique. Il ne vise pas à fournir une estimation définitive de l’ampleur des
délocalisations qui aurait vocation à supplanter totalement les autres approches, mais il explore une
évaluation alternative, dont on essaiera à la fois de faire ressortir l’apport et les limites. Cette
évaluation s’appuie entièrement sur des données microéconomiques. On verra que ceci a l’avantage de
pouvoir la décliner facilement en termes sectoriels ou locaux. Et elle essaie aussi de s’appuyer sur une
définition aussi explicite que possible du phénomène.
Nous partirons en l’occurrence de la définition suivante. On parlera de délocalisation s’il y a
substitution de production étrangère à une production française, résultant de l’arbitrage d’un
producteur qui renonce à produire en France pour produire ou sous-traiter à l’étranger. Cette
délocalisation se définit donc bien au niveau microéconomique : une caractéristique nécessaire est
qu’il s’agisse d’une décision d’un producteur bien défini, groupe ou entreprise indépendante. C’est cet
agent économique qui choisit, pour satisfaire sa demande, de modifier l’organisation de sa production
en fermant ou en limitant les activités d’une unité productrice en France pour lui substituer une
production effectuée à l’étranger.
L’autre condition nécessaire est qu’il existe au préalable une production en France, et que celle-ci soit
bien remplacée par une production à l’étranger. Si une usine ferme en France sans que la production
ne soit reprise par un producteur étranger, il s’agira d’un abandon d’activité, plutôt que d’une
délocalisation. S’il n’y avait pas de production en France préalable à l’apparition d’un producteur à
l’étranger, on parlerait plutôt de localisation d’une unité nouvelle.
En revanche, on ne pose aucune condition d’appartenance de la chaîne de production étrangère au
groupe ayant délocalisé. De même, on ne précise pas non plus si la délocalisation conduit à créer ex
nihilo des capacités de production à l’étranger ou à exploiter des ressources déjà existantes. Il peut
donc y avoir délocalisation sans investissement du groupe à l’étranger : c’est le cas, par exemple, si le
groupe a recours à des sous-traitants étrangers pour remplacer la production qui disparaît en France.
C’est également le cas si le groupe se contente d’augmenter la production d’une filiale déjà existante à
l’étranger. Au sens microéconomique, une délocalisation n’implique pas nécessairement un transfert
direct de capitaux à l’étranger.
Ainsi, à la différence des approches par les données macroéconomiques de commerce international,
cette approche fait la part entre ce qui relève de décisions de délocalisation proprement dites et ce qui
relève d’effets beaucoup plus diffus de concurrence internationale. En ce sens la définition est plus
restrictive que celle retenue dans les calculs de balance en emploi. Par rapport à l’approche par les flux
d’IDE, elle exclut aussi les IDE qui visent à la conquête de nouveaux marchés plutôt qu’à la
réimportation des biens produits vers la France. En revanche, contrairement à l’approche par les IDE,
elle réintègre bien les cas de délocalisations par sous-traitance.
Cette définition rejoint assez bien les définitions proposées dans le rapport Grignon (2004) qui
identifie deux niveaux de délocalisations : le premier repose sur le déplacement physique d’une unité
de production à l’étranger5 et le second, plus large, désigne le recours à la sous-traitance étrangère.
5
Parfois qualifié de « délocalisation au sens strict »
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Précisons enfin que nous aborderons ces délocalisations par une approche « en flux ». Il s’agit en effet
d’un phénomène transitoire puisqu’il correspond à l’arrêt par le producteur d’une production en France
pour une production ou un approvisionnement à l’étranger et à la destruction d’emplois en France qui
en résulte. La « délocalisation » désigne donc l’arbitrage du producteur et non la situation qui en
découle. En conséquence, « l’emploi délocalisé » correspond au nombre d’emplois détruits suite à une
délocalisation sur une période donnée et non au total de tous les emplois détruits dans le passé.
[…]
Patrick AUBERT et Patrick SILLARD
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Désindustrialisation, délocalisations
Rapport Lionel FONTAGNÉ - Jean-Hervé LORENZI
[…]
8.5. Six domaines d’action
Nous identifions six domaines d’action :
•
tout d’abord, il faut se redonner les éléments de la connaissance de la situation et d’en faire
l’analyse la plus pertinente, cela en quasi-temps réel. Il s’agit ici d’analyser et comprendre
pour pouvoir mieux anticiper et agir ;
•
ensuite, il est urgent de développer des politiques européennes et françaises qui soient
capables d’impulser une véritable stratégie de spécialisation vers les activités à forte valeur
ajoutée. C’est ainsi qu’au niveau européen, nous devons être capables de lancer des grands
programmes dans les secteurs prioritaires et de peser sur les stratégies de spécialisation
souhaitables pour l’Europe. Au niveau national également, nous devons retrouver nos marges
d’action, c’est-à-dire préciser nos éventuels défauts de spécialisation et allouer efficacement
les financements publics existants de manière efficace. Il s’agit d’impulser une politique de
spécialisation vers les industries hautement qualifiées ;
•
mais c’est aussi au niveau local, parce que la croissance est de plus en plus localisée, que
pouvoir disposer de mécanismes permettant l’émergence de clusters regroupant entreprises
universités et écoles est décisif. Il s’agit ici de stimuler l’innovation dans des lieux privilégiés ;
•
en quatrième lieu, l’avenir industriel des pays industrialisés se joue sur les marchés financiers
et les procédures de financement de l’économie. Comment mettre en place les conditions de
financement efficace des grandes entreprises et des PME, notamment en faveur de
l’innovation ? Il s’agit ici de développer les marchés financiers européens et le financement de
l’innovation ;
•
le point suivant est tout aussi important : il s’agit de réhabiliter la culture scientifique et
technologique dans les universités et les écoles françaises ;
•
enfin, parce la nationalité de l’entreprise s’associe étroitement à la culture de ses dirigeants, et
donc de leurs décisions d’implantation, il convient de promouvoir « l’entreprise européenne ».
8.6. Analyser et comprendre pour pouvoir mieux anticiper et agir92
L’État – paradoxalement – a donc vocation à retrouver un rôle décisif car il est le seul à pouvoir
assurer la cohérence des actions long terme/ court terme, dans un contexte de raréfaction budgétaire,
d’attitude défensive par rapport à la mondialisation et de perte de culture industrielle, tant en France
qu’en Europe.
Il peut naturellement infléchir un certain nombre de décisions se prenant au niveau international, et
d’abord européen. Il jouera alors le rôle de garde-fou, au coup par coup. Nous en avons eu quelques
exemples récents.
92
L’un des co-auteurs ayant des responsabilités au CEPII, il n’a pas souhaité, tout en partageant les conclusions de ce
paragraphe, participer à sa rédaction.
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Extrait du rapport n°55 – 11/02/2005
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Mais plus fondamentalement, la responsabilité publique est d’élaborer une stratégie d’ensemble pour
« réduire les incertitudes ». Il s’agit de promouvoir une bonne compréhension des phénomènes à
l’œuvre : l’information et l’animation du débat sur les questions de la mondialisation devraient être
une priorité en France. Les enquêtes d’opinion réalisées sur la perception de la mondialisation sont
édifiantes (Flash Eurobaromètre, nov. 2003) : la France est le pays européen dans lequel les enquêtés
sont le plus hostiles à la mondialisation et à l’ouverture)93, mécanismes sur la base desquels ils se sont
pourtant collectivement enrichis depuis trente ans. Cette « exception française » ne favorise pas les
adaptations nécessaires et suscite des peurs et des réactions défensives, là où seule l’offensive paie.
Comment en est-on arrivé là ? Comment se résigner à ce que 14 % des Français94 n’aient « jamais
entendu parler de mondialisation » ?
La raison en simple : nous n’avons pas su financer en France les instruments et les structures d’analyse
et de suivi des évolutions industrielles mondiales. Nous n’avons pas financé à hauteur de ce que
faisaient nos voisins européens les structures d’animation du débat, de formation des idées, sur les
questions d’économie mondiale. Il y a une multitude de centres d’excellence danois, suédois,
néerlandais… sans même parler de notre voisin allemand, de grande taille, reconnus au niveau
international pour leur capacité scientifique, et qui assurent ce travail de diffusion des idées.
La première piste des propositions vise à remédier à cet état de fait. Mais rappelons-le, il s’agit d’un
préalable à tout. En effet, toute stratégie suppose, au-delà de l’accompagnement légitime des crises :
•
une capacité d’anticipation supposant une analyse prospective ;
•
une adhésion ou à défaut au moins une compréhension par l’opinion publique.
Car le problème de la désindustrialisation, d’une nature et d’une ampleur inconnues à ce jour, est
probablement devant nous si la perte de substance de notre industrie se poursuit. Les missions
affectées à de telles structures d’analyse sont nombreuses :
•
du côté des entreprises : analyse précise des (dés)investissements « greenfields » en France et
de leurs motivations. Observation des stratégies des grandes sociétés internationales. Examen
des stratégies des sociétés ayant des filiales ou succursales en France et conséquences
prévisibles sur l’emploi. Réflexion sur les nouveaux modes de coopération inter et intraentreprises, sur le contenu du nouveau modèle de croissance et sur sa réactivité (capacité
d’adaptation…) ;
•
du côté des marchés et des concurrents. Suivi et prospective des économies émergentes ;
évolution des taux de change et impact sur les spécialisations ; construction et exploitation de
bases de données fines de commerce international permettant d’analyser les dynamiques
concurrentielles au niveau le plus fin. Suivi des barrières tarifaires et non tarifaires aux
échanges ;
•
du côté des technologies : veille sur les risques de certaines ruptures technologiques (et sur les
transferts technologiques) et sur les modifications des conditions de certains marchés
(déplacement géographique des clients d’un métier, glissement d’une filière de l’amont vers
l’aval…) ;
•
du côté des idées : veille sur les concepts, les avancées scientifiques en termes de connaissance
des phénomènes, les systèmes d’information développés, participation aux débats
internationaux et formation d’un corpus ne signifiant pas nécessairement l’alignement sur le
prêt-à-penser international.
93
29 % des Français pensent que l’économie française est trop ouverte. C’est le chiffre le plus élevé d’Europe.
94
Selon le même sondage.
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Extrait du rapport n°55 – 11/02/2005
2
Nous sommes donc favorables à la mise en place d’une structure française renforcée, d’une taille
suffisante pour affronter la compétition internationale dans le domaine de l’expertise de la
globalisation, dotée d’une forte capacité d’analyse, capable d’identifier les secteurs prioritaires et les
stratégies gagnantes, et de remplir les différentes tâches évoquées ci-dessus. Plutôt que de créer une
énième structure, solution privilégiant l’affichage à l’efficacité opérationnelle, nous préconisons un
renforcement de l’existant, quitte à en élargir les missions et à en modifier les statuts pour les mettre
en accord avec ces nouvelles missions.
Ne nous y trompons pas, une telle décision irait à contre-courant du recul des financements, de la
dilution de l’analyse économique dans des problématiques plus larges ; de l’abandon de l’expertise sur
les sujets internationaux aux Think tanks européens ou américains, et au prêt-à-penser d’institutions
internationales ; du départ de certains experts de grande qualité vers les centres d’études étrangers ou
vers les organisations internationales.
Il y a urgence : la France se prépare en ce domaine à très court terme un désert intellectuel propice
au développement des thèses anti-mondialisation. Les bénéfices politiques d’une telle situation sont
immédiats : le vent du large est un coupable tout désigné pour justifier le dessèchement des arbres de
notre jardin. Le coût politique à plus long terme est tout aussi évident : recul du niveau de vie, montée
des frustrations, creusement des inégalités, divorce entre les Français et le monde de l’entreprise,
incompréhension internationale des positions françaises.
Changer de cap serait une décision à la fois nécessaire à toute action mais également forte sur le plan
symbolique. Cette proposition étant déjà présente dans le rapport du Sénat sur l’évaluation des
politiques publiques (Bourdin, André et Plancade, 2004), ne sera pas reprise dans nos dix propositions,
mais elle constitue selon nous un préalable. La mondialisation n’est ni bonne ni mauvaise : elle est
effective, mais pour la maîtriser, il faut la connaître et la comprendre.
8.7. Impulser une politique de spécialisation vers les industries hautement
qualifiées
Le positionnement vers le haut de la chaîne de valeur technologique oblige les entreprises à innover
constamment. Si la maîtrise des nouvelles technologies reste la condition première, il s’agit dans cette
optique de privilégier les activités à haute valeur ajoutée, d’améliorer sans cesse les processus de
production, de défricher les nouvelles applications pour les nouvelles technologies en déposant des
brevets ou encore d’améliorer le design des produits. En matière de marketing, il s’agit de se
positionner comme un véritable intermédiaire dont l’objectif est de fidéliser la clientèle et d’instaurer
une relation de « service » entre l’entreprise et ses clients. Mais pour faire tout cela, les entreprises
ont-elles besoin de l’État ? Peut-on se contenter d’un environnement macroéconomique et
institutionnel favorable à l’investissement et à l’innovation ?
Examinons les équilibres public-privé qui gagnent, à défaut de souhaiter les transposer naïvement. Les
États-Unis nous montrent la voie : celle d’un marché fluide, dans lequel l’impact des décisions
publiques ciblées bénéficie d’un effet multiplicateur du fait de la grande réactivité de l’économie.
Au milieu des années quatre-vingt-dix, les États-Unis ont démontré qu’une politique volontariste
permet à un système productif agressé de réagir. En fait, la notion de politique industrielle – pourquoi
ne pas l’appeler par son nom ? – semble aujourd’hui redevenir d’actualité pour les pays industrialisés,
dans une acception bien sûr assez différente des années soixante-dix et quatre-vingt. La confiance
aveugle dans une puissance publique mieux éclairée dans ses choix que les acteurs privés et disposant
d’instruments puissants n’a plus cours. Ne serait-ce qu’en raison des contraintes financières portant sur
les budgets publics. Il n’empêche : lorsque l’horizon est très long ou très risqué, l’État garde un
avantage dans la mesure où il peut intégrer le temps long dans ses choix. Le marché pour l’envoi de
sondes commerciales sur Mars est assez limité… Il convient pourtant d’y aller si l’on veut garder une
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Conseil d’Analyse Économique
Extrait du rapport n°55 – 11/02/2005
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position forte en termes d’industries spatiales. De même, lorsque des externalités locales fortes
apparaissent, il y a une place pour l’action publique locale (au niveau régional dans notre schéma).
Le développement du secteur des nouvelles technologies aux États-Unis fournit un bon exemple
d’application de la politique volontariste américaine en faveur à la fois de la concurrence (créer
l’environnement garantissant le renouvellement du tissu productif) et de l’innovation (créer les
avantages compétitifs). Contrairement au mythe, le développement du secteur des TIC aux États-Unis
n’est pas dû au hasard. Certes, certains pionniers, devenus célèbres aujourd’hui ont compris très tôt les
possibilités offertes par les TIC ; mais il faut se demander pourquoi ces pionniers ont réussi aux ÉtatsUnis, là où ils ont échoué en France et en Europe plus généralement. Le parallèle avec les débuts de
l’aviation est édifiant à cet égard : les pionniers avaient réussi également de ce côté-ci de l’Atlantique.
Schématiquement, la politique américaine se décline selon le triptyque :
•
des mécanismes incitatifs en faveur de l’innovation dans l’industrie ;
•
une protection forte des droits de propriété ;
•
un soutien massif à la recherche.
Première étape, dès les années quatre-vingt, les États-Unis ont mis en place une vaste politique visant
à introduire de la concurrence dans les domaines des télécommunications où des situations
monopolistiques préexistaient. Cette concurrence a permis de réduire les coûts de raccordement à un
réseau et de favoriser la diffusion des TIC. Dans ce domaine, mais beaucoup plus tardivement qu’aux
États-Unis, l’Europe s’est aussi engagée, durant la présidence Prodi, dans un vaste chantier concernant
les industries de réseau en réintroduisant la concurrence sur les segments où elle était économiquement
justifiée. Le dégroupage de la boucle locale en France est la manifestation du retard pris dans cette
logique déréglementaire de ce côté-ci de l’Atlantique, et partant, du retard pris dans la remise en cause
des positions dominantes.
Par ailleurs, dès les années quatre-vingt, les États-Unis ont mis en place une politique fiscale incitative
permettant de déduire fiscalement les investissements en R&D. Si ce type de mécanisme peut conduire
à des comportements stratégiques de la part des entreprises, il s’agit d’un mécanisme particulièrement
puissant : un crédit d’impôt d’un dollar se traduit par une dépense d’un dollar en R&D de la part des
entreprises (Hall et van Reenan, 1999).
Parallèlement, les États-Unis ont renforcé leur système de dépôt de brevet afin de protéger plus
efficacement les entreprises innovantes. Deux réformes méritent d’être citées : le Bayh-Dole Act de
1980 qui favorise le dépôt de brevets et l’octroi de licences pour les universités américaines et le
Semiconductor Chip Protection Act qui crée pour les semi-conducteurs une catégorie nouvelle de
droits de propriété intellectuelle appelée « Mask Rights ». Dans le domaine des logiciels par exemple,
les États-Unis ont aussi été aussi les instigateurs au début des années quatre-vingt de l’extension de la
brevetabilité des logiciels, en rupture avec la vision antérieure selon laquelle les logiciels comme les
programmes informatiques ne peuvent faire l’objet de protection. En comparaison, l’Europe paraît
bien démunie, même si certaines évolutions sont perceptibles. Alors que les logiciels n’étaient pas
considérés comme brevetables jusqu’à récemment, les dernières décisions de l’OEB (Office européen
des brevets) semblent se rapprocher de la position américaine. Le principe d’un brevet européen a de
plus été récemment adopté : il vise à faciliter le dépôt de brevet en abaissant sensiblement son coût
(actuellement supérieur par rapport à la procédure américaine) et simplifier la procédure
administrative. Ce brevet européen n’entrera toutefois en vigueur qu’à partir de 2007.
Enfin – est-il nécessaire d’insister sur cette dimension essentielle du dynamisme technologique
américain ? – le secteur des TIC a aussi largement bénéficié de la politique de soutien à la recherche
des États-Unis. Elle se manifeste non seulement par des commandes publiques, des partenariats de
recherche avec certaines industries, mais aussi par la création d’un environnement favorable à la
diffusion des connaissances entre la recherche publique et privée par l’intermédiaire notamment de la
National Science Foundation. Elle se traduit aussi par la recherche d’une étroite synergie entre le
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Extrait du rapport n°55 – 11/02/2005
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monde universitaire et politique, permettant la diffusion d’idées : la montée en puissance, ces dernières
années, de think tanks, tels la Brookings Institution, l’American Enterprise Institute ou encore la Rand
Corporation, illustre bien ces préoccupations. Nous retrouvons ici le préalable évoqué plus haut : un
pays comme la France doit se doter à très court terme de tels outils, et le plus rapide et le plus efficace
est de s’appuyer sur les structures existantes et de les renforcer.
Cette redécouverte de la notion de « politique industrielle » est clairement le signe d’une prise en
conscience de l’impact de l’industrie dans la croissance des pays mais aussi de l’urgence de repenser
une politique globale pour l’industrie. Or, que ce soit au niveau français ou européen, cette capacité à
se projeter dans le futur manque cruellement. Et la stratégie de Lisbonne n’est qu’un affichage de
circonstance dont on connaît l’impact jusqu’ici dérisoire. Aujourd’hui, il est pourtant nécessaire de
définir les activités motrices qui doivent être privilégiées au niveau européen. Plus précisément, il est
primordial de se spécialiser dans les activités à forte valeur ajoutée afin de (re)construire des avantages
compétitifs. En revanche, aujourd’hui, il n’est pas nécessaire d’être présent partout, l’essentiel étant de
favoriser les activités à fort contenu technologique et certaines niches industrielles.
Il nous faut donc redéfinir nos pôles d’excellence en nous spécialisant dans les secteurs prometteurs ou
dans des savoir-faire utiles et rares tels que le nucléaire, l’aéronautique, la pharmacie et les
biotechnologies ou encore les nanotechnologies. En dehors de cet effort, nous devons privilégier les
investissements de rupture en identifiant les nouveaux produits et services capables de soutenir la
croissance. Si dans certaines activités comme l’aéronautique ou le luxe, la France possède un savoir
faire technologique et managérial reconnu, ces secteurs sont aujourd’hui trop peu nombreux pour
assurer une croissance soutenue à long terme. Plus grave, la France souffre d’une spécialisation
insuffisante dans les biens fortement demandés par les pays émergents.
[…]
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Extrait du rapport n°55 – 11/02/2005
3
Les délocalisations détruisent 36.000 emplois par an
A l'heure où le taux de chômage n'affiche toujours pas de franche tendance à la baisse, l'Insee
publie une nouvelle évaluation de l'impact du commerce international sur l'emploi.
36.000 : c'est le nombre d'emplois détruits en moyenne par an du fait des délocalisations d'entreprises,
selon une étude publiée ce jeudi par l'Insee. Alors que 12 % des chefs d'entreprises de plus de
20 salariés déclaraient avoir délocalisé au cours de la période 2002-2007, il est intéressant de
quantifier l'impact réel de ces transferts d'activités sur le marché du travail. Une évaluation épineuse à
mener tant les données sont difficiles à obtenir de façon exhaustive. Utilisant une nouvelle méthode de
calcul, des chercheurs de l'Insee aboutissent cependant à un chiffrage sensiblement supérieur des
précédentes études, dont le principal inconvénient consistait à se limiter aux pertes du secteur
industriel.
En moyenne, sur la période 2000-2005 étudiée par l'Insee, les délocalisations à l'étranger ont donc
généré approximativement 36.000 destructions d'emplois par an. Un chiffre qui, sans surprise, varie en
fonction de la conjoncture économique. A la baisse en période de croissance, les destructions d'emploi
tombant autour de 20.000 par an, à la hausse en période de crise, les pertes s'élevant alors à près de
60.000.
41.000 emplois créés par an
Plus surprenant, les délocalisations, qui touchent particulièrement fortement les secteurs du textile et
de l'électroménager, auraient également permis de générer 41.000 emplois supplémentaires par an en
moyenne, soit plus que les emplois détruits. Le mécanisme à l'origine de ce constat est simple :
certaines délocalisations - mais pas toutes, avertit E.M. Mouhoud, professeur à l'université Paris
Dauphine - entraînent une baisse de prix permettant à l'entreprise de gagner des parts de marché, et
donc de créer des emplois qualifiés. En concourant à augmenter le pouvoir d'achat, ces délocalisations
stimulent également la demande, explique Henri Sterdyniak, directeur à l'OFCE.
Il n'est pourtant pas question de souhaiter une intensification des délocalisations. «En France, où le
chômage est important parmi les personnes non qualifiées, les pertes d'emplois dues aux
délocalisations, qui concernent en priorité ces personnes, sont catastrophiques» explique Henri
Sterdyniak. L'Insee indique qu'il n'existe pas à ce jour d'étude retraçant le parcours de ces chômeurs :
contribuent-ils à la désindustrialisation en trouvant un emploi dans un autre secteur ? Restent-ils dans
l'industrie, ou contribuent-ils à accroître le chômage structurel ? La question a peu été étudiée, fait
savoir l'Insee.
Par ailleurs, une partie non négligeable de ces transferts d'activité sont des «délocalisations de marge»,
précise E.M. Mouhoud. Soient des entreprises qui ne produisent pas moins cher à l'étranger pour faire
baisser les prix, mais pour augmenter leurs marges. Autant de délocalisations dont l'impact sur
l'emploi en France demeure essentiellement négatif.
Marie BARTNIK
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27/05/2010
4
Dossier n° 2
Mondialisation et délocalisations :
état des lieux et stratégies d’action
La mondialisation de l’économie s’accompagne d’un déplacement des zones de production entre pays
industrialisés, au sein de chaque zone économique d’une part, et des pays industrialisés vers les pays émergents
d’autre part. Dans certains cas, c’est la production destinée aux marchés extérieurs qui quitte le territoire
national pour s’implanter plus près des zones de débouchés. Dans d’autres, c’est la production destinée au
marché national qui est transférée à l’étranger avant d’être réimportée. Ces mouvements sont désignés sous le
vocable commode et inquiétant de « délocalisations ». La diversité du phénomène explique la difficulté d’en
apprécier l’ampleur et d’en mesurer l’impact en termes d’emploi, d’autant plus qu’il est inégalement réparti
selon les secteurs économiques, les catégories de travailleurs et les territoires. Au total, le bilan global
coût/avantage de l’ouverture internationale des marchés reste sans doute positif pour notre pays, mais au prix
d’ajustements sectoriels et territoriaux que les politiques publiques peinent à accompagner.
2
1. L’IMPACT GLOBAL DES
DÉLOCALISATIONS SUR L’EMPLOI :
LE CAS FRANÇAIS
Mesurer l’impact net des délocalisations sur l’emploi est un
exercice qui nécessite non seulement de prendre en compte les
destructions d’emplois liées au transfert de tout ou partie des
activités productives d’une entreprise à l’étranger, mais
également
les
créations
d’emplois
attachées
aux
investissements directs étrangers. À cet égard, la grande
majorité des études concernant la France concluent à un solde
positif. Il est vrai que ces études s’appuient sur des méthodes
d’évaluation très indirectes et donc discutables.
L’évaluation des destructions d’emplois liées aux
délocalisations suppose de pouvoir isoler les suppressions
d’effectifs imputables directement aux délocalisations de celles
plus largement imputables aux stratégies d’externalisation des
entreprises guidées par la recherche d’une spécialisation plus
rentable face à une concurrence accrue.
Une étude de l’Insee basée sur des données individuelles
d’entreprises propose, dans ce sens, de considérer qu’il y a «
présomption » de délocalisation lorsqu’une entreprise réduit
ses effectifs et augmente, de manière concomitante, ses
importations du type de biens qu’elle produisait en France, soit
par soustraitance, soit par création d’une filiale. Sur cette base,
l’Insee estime que les délocalisations expliquent une perte
annuelle de 0,35 % des emplois industriels, soit en moyenne,
13 500 emplois supprimés en France chaque année sur la
période 1995-2001 .
3
Ce type d’estimations des destructions d’emplois liées aux
délocalisations n’est cependant pas complètement satisfaisant
dans la mesure où il n’est pas tenu compte du fait que
l’entreprise fortement concurrencée, qui choisit de maintenir
son activité sur une base domestique, peut se trouver
contrainte, à terme, de réduire le volume de ses activités et de
sa masse salariale. À l’inverse, les gains de productivité
réalisés grâce à la délocalisation des activités de pure
fabrication par exemple peuvent être alloués à la
1
2
Aubert P. et Sillard P. (2005), Délocalisations et réductions d’effectifs dans
l’industrie française, document de travail G 2005/03, Insee.
Au total, sur l’ensemble de la période considérée, environ 95 000 emplois
industriels auraient été supprimés en France et délocalisés à l’étranger, selon
l’étude de l’Insee (op. cit.).
3
1
L’externalisation consiste à confier à une autre entreprise une tâche
précédemment réalisée en interne (nettoyage, comptabilité…).
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création d’emplois dans les activités amont maintenues sur le
territoire national (R & D, design, etc.).
montre que les choix de délocaliser résultent d’une pression
concurrentielle accrue liée à quatre facteurs :
Pour tenter d’évaluer un effet net des délocalisations sur
l’emploi, d’autres études plus récentes ont recours à des
méthodes d’estimation inspirées des sciences du vivant dites
d’appariement des entreprises. Autrement dit, elles comparent
un échantillon de firmes qui délocalisent tout ou partie de leur
activité hors du territoire national, à un échantillon « jumeau »
de firmes qui ne délocalisent pas. Cet échantillon jumeau est
soit constitué de firmes existantes comparables – on recherche
alors pour chaque entreprise ayant délocalisé son « plus proche
voisin » n’ayant pas délocalisé – soit d’entreprises analogues
virtuelles – on « construit » alors l’entreprise jumelle.
– la montée en compétence extrêmement rapide des pays
émergents, tels que la Chine ou les pays de l’Europe de
l’Est, où la disponibilité de la main-d’œuvre qualifiée
s’accroît, ainsi que la productivité du travail ;
Fondée sur cette méthode d’évaluation, une étude réalisée par
Hijzen, Jean et Mayer conclut que, sur la période 1984-2006,
les investissements français à l’étranger n’ont pas eu,
globalement, d’impact négatif sur l’emploi domestique. Les
délocalisations auraient plutôt permis le maintien de
l’avantage compétitif des firmes concernées moyennant des
coûts d’ajustement concentrés sur les emplois non ou peu
qualifiés.
– la recherche de nouvelles sources d’obtention de gains de
productivité par une « dé-mécanisation » des processus de
production, c’est-à-dire une substitution du travail au
capital en faisant appel massivement au travail peu qualifié.
4
Ce type d’évaluation globale contraste de manière
spectaculaire avec les réalités vécues sur le terrain dans les
entreprises et les bassins d’emplois concernés. Il est vrai que
les emplois créés grâce à la mondialisation ne sont pas les
mêmes que ceux qui sont perdus, en termes de qualifications,
de secteurs et de localisation. Ce décalage renforce les attentes
envers les acteurs publics. Une action efficace suppose de
comprendre les raisons qui poussent les entreprises, prises
individuellement, à revoir leur stratégie de localisation.
– la montée en puissance de firmes des pays émergents, où
l’effort d’investissement est très élevé, de sorte que
d’anciens sous-traitants se transforment en concurrents
directs ;
– les politiques d’achat agressives des donneurs d’ordre qui
exercent des pressions déflationnistes dans les secteurs
d’activité ;
La décision de délocaliser relève, selon l’étude d’Altédia, de
trois types de stratégies :
– la première consiste à suivre la demande. Elle est motivée
par trois raisons essentielles : conquérir un marché en
croissance, suivre des donneurs d’ordre, s’adapter aux
politiques protectionnistes des États qui souhaitent promouvoir l’installation d’entreprises dans leur pays ;
– la seconde est fondée sur une segmentation verticale du
processus de production. Elle vise avant tout la réduction
des coûts de main-d'œuvre ;
– la troisième repose sur une réorganisation de l’ensemble du
processus de production sur une base mondiale et non
strictement verticale. Apanage des très grandes firmes, elle
explique en partie les délocalisations intra européennes.
2. POURQUOI LES ENTREPRISES
DÉLOCALISENT-ELLES ?
La délocalisation de tout ou partie de la production s’inscrit le
plus souvent dans d’une stratégie plus globale de
réorganisation du processus de production, motivée par une
intensification de la concurrence. Transférer une partie de ses
activités à l’étranger relève, pour l’entreprise, d’un arbitrage
qui n’est pas uniquement lié à des considérations de coûts,
mais qui s’inscrit plus largement dans une problématique
d’attractivité des territoires et d’évolution de la division
internationale du travail.
5
Une étude d’Altedia menée pour le ministère du Travail
auprès de dirigeants d’entreprises implantés en France et
ayant eu recours à de tels processus,
6
4
Hijzen A., Jean S. et Mayer T. (2006), The Effects at Home of Relocation
Abroad : Evidence from Matched French Firms, document de travail réalisé
pour le séminaire du GAM du 16 mai 2006.
Altédia (2005), Étude auprès des entreprises sur les déterminants microéconomiques et sociaux des délocalisations récentes et à venir, janvier,
commandée par la Direction de l’Animation de la Recherche, des Études et des
Statistiques du ministère français de l’Emploi, du Travail et de la Cohésion
sociale.
Dont 37 ont pris récemment la décision de délocaliser.
5
Ainsi, bien que s’inscrivant dans des contextes variés, les
choix de délocalisation étudiés sont le produit d’un très petit
nombre de facteurs déterminants, qui apparaissent comme des
conditions nécessaires mais pas toujours suffisantes à la
décision de délocaliser. Celle-ci résulte bien souvent de la
conjonction de ces facteurs et d’autres encore qu’Altédia
qualifie d’« aggravants ».
Sur ce registre, ni la fiscalité ni la règlementation sociale en
France ne sont perçues comme des causes de la délocalisation,
mais plutôt comme des contraintes auxquelles les entreprises
doivent s’adapter. En revanche, la dévalorisation de l’image de
l’industrie, la complexité des circuits administratifs jugées
bureaucratiques, la judiciarisation des conflits sociaux ainsi que
les rigidités de l’organisation du temps de travail jouent le rôle
de facteurs aggravants dans l’esprit des dirigeants d’entreprise.
À ces éléments, il faut ajouter les critiques émises à l’encontre
d’une part des politiques européennes en matière monétaire et
commerciale, et d’autre part du faible soutien à l’innovation
apporté par les pouvoirs publics français.
6
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4
À la lumière de cette étude de cas, deux « portraits-types »
de délocalisations émergeraient :
- les délocalisations par filialisation dans les pays dits
développés qui sont le fait de grands groupes opérant dans
des secteurs très concentrés (automobile, aéronautique,
pharmacie) et répondent à des stratégies de division
internationale du travail intra firme ;
- les délocalisations par sous-traitance dans les pays dits à bas
salaires qui sont le fait d’entreprises opérant dans des
secteurs matures sur des produits à fort contenu en maind'oeuvre peu qualifiée (textile-habillement, électronique,
biens de consommation durable) et répondent à des
stratégies de réduction des coûts.
En proportion, les délocalisations vers les pays limitrophes de
la France et les États-Unis représentent environ la moitié du
total des emplois délocalisés, tels qu’évalués par l’Insee, à
égalité avec celles en direction des pays dits à bas salaires,
Chine en tête (15 % des emplois délocalisés) loin devant
l’Europe de l’Est et l’Afrique du Nord.
3. LA RÉPONSE DES POLITIQUES
PUBLIQUES : FAVORISER L’ÉMERGENCE
D’EMPLOIS NOUVEAUX ET AIDER À LA
RECONVERSION
Le premier volet de l’action publique – que l’on pourrait
qualifier d’offensif – consiste à accompagner la polarisation
des activités engendrée par la mondialisation, en concentrant
les moyens de la politique industrielle et technologique sur
des grands pôles de compétitivité.
Ces derniers reposent sur un principe simple : des entreprises,
des laboratoires de recherche et des établissements de
formation supérieure conjuguent leurs ressources et leurs
compétences pour, dans un secteur d'activité et un territoire
donnés, développer ensemble des projets de recherchedéveloppement et d'innovation industrielle, en vue de
renforcer leur position commune dans la concurrence
mondiale, tout en misant sur les effets bénéfiques liés à une
certaine proximité géographique.
Le principal mérite du « modèle français » des pôles de
compétitivité , qui ont commencé à voir le jour en juillet 2005,
réside sans doute dans son caractère systématique et dans le
choix de la procédure de l'appel à projets, car les synergies
locales et partenariales ne se décrètent pas d’en haut.
7
Ceci étant, des interrogations demeurent sur plusieurs points :
– l’effet de saupoudrage : l’engouement et l’émulation
suscités auprès des collectivités territoriales ont
7
Jacquet N. et Darmon D. (2005), Les pôles de compétitivité, un modèle
français, Paris, La Documentation française.
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conduit à la labellisation de plus de 60 pôles. Certains
considèrent que ceux-ci sont trop nombreux par rapport
aux moyens mis en œuvre. De fait, ils pourraient se révéler
incapables de constituer les masses critiques nécessaires
pour jouer dans la concurrence mondiale ;
–
la cohérence d’ensemble : dans quelle mesure et de quelle
manière ces pôles s’articulent-ils avec l’Agence pour
l’innovation industrielle (AII) ? Font-ils double emploi
avec les pôles de recherche et d’enseignement supérieur
(PRES) ?
Au total, le dispositif devra faire ses preuves en termes
d’ouverture à l’international, de souplesse, de capacité
d’adaptation et éviter les écueils d’une bureaucratisation
progressive, d’une spécialisation excessive des bassins
d’emploi ou encore de la création ex nihilo, fondée sur un effet
d’aubaine, d’activités indépendamment des conditions de
demande.
Cette politique de pôles de compétitivité gagnerait à s’appuyer
sur une politique d’innovation et de compétitivité à l’échelon
européen plus dynamique. La mutualisation des ressources
nationales au niveau communautaire permettrait alors de tirer
parti des économies d’échelle et d’optimiser ainsi les chances
de succès d'une démarche offensive fondée sur les pôles.
Cette orientation ne nécessite pas forcément un cadre
institutionnel fédéral. Elle peut, en effet, se décliner au niveau
national dans le cadre de coopérations renforcées entre les
grandes métropoles européennes pour mettre en réseaux leurs
systèmes régionaux d’innovation.
Une stratégie de renforcement de la compétitivité doit surtout
s’accompagner d’une politique en direction des territoires en
difficulté, afin d’éviter que se développent des poches de
chômage persistant.
En France, les zones d’emplois les plus fragiles sont
relativement peu nombreuses : 40 zones (moins de 7 % de
l’emploi national), mais 13 d'entre elles sont particulièrement
vulnérables, du fait de leur forte exposition à la concurrence
internationale et d’un cumul de handicaps structurels
(spécialisation sectorielle marquée, faible niveau technologique
des activités, abondance de main-d’œuvre peu qualifiée) .
8
La politique de redistribution à destination des territoires en
difficulté ne suffit pas. L’aide à la mobilité des ménages doit
aussi être encouragée par un dispositif combinant politiques
du marché du travail, de formation, du logement et
d’investissement public dans les infrastructures de transport.
Le 1er mars 2006, la Commission européenne a proposé de
créer un Fonds d’ajustement à la mondialisation (FAM) , dont
le règlement est en débat devant le Parlement européen.
Conçu comme un instrument de solidarité à l’échelle
communautaire, ce Fonds est destiné à offrir une aide
ponctuelle et ciblée sur les travailleurs « personnellement et
sévèrement touchés par des licenciements résultant des
9
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mai-juin 2006
4
transformations profondes dans les échanges commerciaux
internationaux ».
–
une cohérence incertaine : la complémentarité du FAM
avec les instruments financiers déjà existants, destinés à la
cohésion tels que le Fonds social européen, le Fonds
européen de développement régional n’est pas démontrée.
Le FAM allie des mesures actives comme une aide à la
recherche d’un emploi avec des compléments de revenu
d’activité à caractère temporaire. En ce sens, il manifeste le
souci de lier reconversions productives et mobilités
professionnelles.
Pour dépasser certaines de ces limites, deux pistes peuvent
être suggérées :
Mais, en l’état, ce dispositif reste limité :
–
améliorer
le
dispositif
restructurations ;
–
faire également du FAM un outil d’incitation à la
responsabilité sociale des entreprises en matière de
traitement des restructurations et des délocalisations .
–
–
des moyens peu importants : la dotation financière
maximale de 500 millions d’euros par an dépend de la sousutilisation des crédits disponibles sur d’autres postes
budgétaires ;
un champ d’application restreint : selon les chiffres de la
Fondation européenne pour l’amélioration des conditions de
vie et de travail , les restructurations en Europe ont
représenté des pertes brutes d'emploi de l'ordre de 400 000
par an sur la période 2002 à 2005. Soit environ 10 fois plus
que le nombre de travailleurs qui pourraient bénéficier, en
fonction des critères proposés, de l'accès au fonds. Les trois
quarts de ces suppressions d'emploi relèvent de «
restructurations internes », alors que les délocalisations au
sens strict ont un impact beaucoup plus limité . Pour autant,
nombre de ces restructurations internes ont partie liée avec
les stratégies internationales des entreprises concernées,
même s'il peut être difficile de démontrer la responsabilité
directe de la mondialisation. Ce qui réserve des débats de
frontière, sur les cas qui relèveront du FAM et ceux qui n'en
relèveront pas ;
d’information
sur
les
12
10
Une combinaison de ces différentes stratégies permettrait ainsi
de répondre aux exigences que l'action publique doit concilier
pour faire face aux impacts de la mondialisation: efficacité
économique, équité sociale et aménagement du territoire.
11
–
une visée essentiellement curative : il s’agit d’un dispositif
de crise – très éloigné de l'anticipation des restructurations
puisqu'il vise à réagir à des licenciements annoncés ;
8
Mouhoud E. M. (dir) (2005), Localisation des activités économiques et
stratégies de l’État, rapport du groupe Perroux, Commissariat général du Plan.
Pour consulter la proposition de règlement :
9
http://europa.eu.int/comm/employment_social/news/2006/mar/com0
6091_final_fr.pdf
10
European Restructuring Monitor, European Foundation for the Improvement
of Living and Working Conditions.
Sur la période (2002-2005), ces cas représentent, en effet, moins de 6 % des
restructurations recensées et moins de 5 % des emplois supprimés lors de ces
opérations.
Cf. Fayolle J. (2006), « Responsabilité sociale des entreprises, restructurations
et délocalisations », document de travail, n° 06/01, IRES.
11
12
Centre d’études prospectives et
d’informations internationales
9, rue Georges Pitard 75015
Paris Téléphone 01 53 68 55
00 Site Internet : www.cepii.fr
RED 2011
Centre d’analyse stratégique
18, rue de Martignac 75700
Paris cedex 07 Téléphone
01 42 75 61 00 Site Internet
: www.strategie.gouv.fr
4/4
www.rdv-mondialisation.fr
mai-juin 2006
5
Domestic Outsourcing and Imported Inputs in the U.S. Economy:
Insights from Integrated Economic Accounts
Robert E. YUSKAVAGE, Erich H. STRASSNER, and Gabriel W. MEDEIROS1
U.S. Bureau of Economic Analysis
I. Introduction
One of the interesting features of the dynamic U.S. economy over the past 25 years has been continued
growth in the outsourcing of intermediate inputs, primarily services but also goods, as firms seek to
reduce costs, improve productivity, and increase profits. Clearly the outsourcing of services, especially
business, professional, and support services, has contributed to the growth of the service sector, but
outsourcing has also triggered changes in the goods-producing sector as firms seek lower-cost
suppliers of material inputs from home and abroad. Volatile prices for energy inputs, especially
imported petroleum, have significantly affected the costs and profits of many U.S. industries in recent
years. The growth of imported material and services inputs has raised concerns about the effects of
import substitution on the domestic industries that supply the outsourced inputs. However, the
National Academy of Public Administration recently concluded that a better understanding of
domestic outsourcing could help improve our understanding of offshore outsourcing.
Unfortunately, no apparent consensus exists in the economics profession on how to define outsourcing
and international standards provide little guidance on how to treat outsourcing in national economic
accounts. Partly as a result of this void, the data that are available for studying outsourcing-related
issues are quite limited. A recent study (Dey, Houseman, and Polivka) concluded that despite evidence
pointing towards significant growth in outsourcing, available data are not adequate for understanding
its implications for changes in employment structure and labor policy. In a recent review of problems
associated with using the current System of National Accounts (SNA) for measuring productivity,
Diewert (2007) described data enhancements that are needed for understanding the implications of
outsourcing for particular industries. While Diewert’s main concern was the measurement of
multifactor productivity (MFP), several of the improvements that he suggested would also enhance the
data available for outsourcing.
Offshore outsourcing has received considerable attention recently, but economists and policymakers
have sought for some time to understand how outsourcing overall--both onshore and offshore--affects
the U.S. economy. Some researchers are concerned that difficulties in the measurement of
outsourcing-related activities may lead to faulty assessments about the economy’s performance and
about productivity growth at the industry level. For many economists, outsourcing is fundamentally
about industry production processes and how firms acquire the mix of inputs needed to produce their
output. Because outsourcing often involves the substitution of purchased services and materials for
labor inputs, it can have important implications for labor productivity measurement. Outsourcing also
affects industry shares of gross domestic product (GDP), contributions to real economic growth, and
the location of domestic production.
Despite the growth of outsourcing over the past 25 years, official international guidelines such as the
SNA have offered little guidance for identifying, measuring, and presenting outsourcing-related
activities in national, industry, and regional economic accounts. Such guidance could be very useful
for statistical agencies and policymakers grappling with the implications of the growth of offshore
outsourcing or concerned about the regional effects of increased domestic outsourcing. While the 1993
SNA does not directly address outsourcing, it at least points out the importance of properly measuring
1
The authors thank Ruth Bramblett, George Smith, and Mary Streitwieser of BEA for helpful comments. We also thank Jennifer Lee of BEA for assistance in
preparing the estimates presented in the paper
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industry inputs in the context of industry production accounts and supply-use tables. The proposed
2008 revision of the SNA provides a basis for addressing outsourcing measurement issues by
recommending the preparation of MFP measures at the industry level in a capital-labor-energymaterials-services (KLEMS) framework, similar to Diewert’s suggestions2.
Lack of guidance in the 1993 SNA for measuring outsourcing and industry-level productivity may
partly reflect that the rapid growth of business services for intermediate use, especially outside of
manufacturing, did not occur until the 1980’s, and that consistent and reliable data were not readily
available for recognizing the effects of this growth on all sectors of the economy. Growth in the use of
purchased business services in several U.S. industrial sectors was not widely noticed until a full set of
industry production accounts were introduced in 2000 by the U.S. Bureau of Economic Analysis
(BEA). Studies of outsourcing before then were mostly based on data that were limited to
manufacturing, provided little reliable detail on services inputs, and did not distinguish between
imported and domestically-produced intermediate inputs.
Outsourcing by U.S. firms continues to grow and has become an important factor affecting domestic
industry output and employment, industry contributions to growth, the use of imports, and the location
of production. Recent data for 2006 show that the share of U.S. GDP accounted for by domestic
providers of outsourcing services increased to nearly 12 percent from 7 percent in 1982. Outsourcing
became more prevalent as part of the restructuring that accompanied recovery from the recessions of
the early 1980’s and it further accelerated during the latter half of the 1990’s with the growth of
information and communications technology services. Imports for intermediate use by industries have
continued to grow and now account for about 50 percent of all U.S. imports. Because U.S. firms
outsource some services offshore to foreign entities, imports of business, professional, and technical
services have steadily increased.
In this paper, published and unpublished data from BEA’s annual industry accounts are used to shed
additional light on the growth of outsourcing and imported inputs in the U.S. economy. These
integrated industry accounts provide insights that cannot be obtained solely from aggregate national
accounts data. The integrated industry accounts, which were first released in June 2004, are wellsuited for studying important developments in the economy, such as outsourcing, because the rich
industry-level data on production, employment, and prices are tightly integrated with the national
economic accounts data for final uses and imports. BEA further enhanced the usefulness of the
accounts for such studies in 2005 by expanding them to include the KLEMS framework for measuring
and presenting data on industry intermediate inputs.
In an earlier paper, using data through 2004, we explained how offshore outsourced activities are
classified in BEA’s international, national, and industry accounts, highlighted some of the issues
associated with using data from the industry accounts for studying off-shoring, and provided estimates
of the magnitude of services offshore outsourcing by U.S. industries (Yuskavage, Strassner, and
Medeiros). One of the main conclusions of that paper was that despite recent strong growth in the use
of imported services by several industries, its overall magnitude was still very small. Although the use
of imported goods by U.S. industries is much greater than imported services, that paper did not
address imported goods because its focus was on services offshoring. The earlier paper also just
scratched the surface of the issue of domestic outsourcing, leaving further exploration as an area for
future research.
This paper extends the results of the earlier study using revised published data and newly developed
unpublished data that include two more years of recovery from the downturn of 2001 to determine if
the industry-specific trends have continued and to look more closely into domestic outsourcing. This
paper also expands the scope of the analysis by developing unpublished industry estimates for
imported goods, such as energy and materials, to better understand how industry use of these goods
2
The proposed SNA chapter on the production account includes a paragraph related to outsourcing. It acknowledges that it is increasingly common for producers
to change the way in which a production activity is completed and that contracting out activities to other producers changes the pattern of intermediate inputs.
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has changed during a period of tremendous growth in both petroleum and non-petroleum merchandise
imports. Finally, the paper demonstrates how the KLEMS framework that was recently adopted by
BEA and that is recommended for the revised SNA can be used to improve the measurement of
outsourcing and imported inputs.
Overview of Findings
In BEA’s annual industry accounts, gross output represents the market value of an industry’s
production and it is measured in both nominal and real terms. Intermediate inputs represent the energy,
materials, and purchased services used in combination with labor and capital inputs to produce gross
output. From 1997-2006, the intermediate input intensity of gross output--defined as real intermediate
input per unit of real gross output--increased slightly for all private industries in the U.S. economy as
the labor intensity of gross output declined sharply. Intermediate input intensity declined in the private
goods-producing sector, mostly because of durable goods manufacturing, but it increased sharply in
the private services-producing sector. After 2002, as the recovery from the 2001 downturn gained
strength, intermediate input intensity increased in both the goods- and services-producing sectors. This
growth reflected strong contributions from purchased services, including outsourcing-related services,
and imported materials.
Outsourcing is an important part of the production process in both the goods and services-producing
sectors. For this paper, outsourcing is defined as a subset of purchased services for functions that an
establishment could perform for itself using its own resources. Examples include maintenance and
repair, warehousing, accounting, computer services, advertising, and research and development. In
2006, outsourcing accounted for about 24 percent of all intermediate inputs and about 44 percent of
purchased services inputs. Outsourcing relative to intermediate inputs was much higher in the services
sector, where it accounted for about 30 percent of intermediate inputs, than in the goods sector where
it accounted for about 15 percent. Although these nominal shares have remained stable since 1997,
real (price-adjusted) purchased services and real outsourcing have both increased significantly faster
than real materials and energy inputs. Real purchased services that are not defined as outsourcing,
however, such as telecommunications and financial services, have grown even faster than outsourcingrelated services.
Imported inputs also play an increasingly important role in the U.S. economy. The share of
intermediate inputs accounted for by imports increased significantly for all private industries, rising
from 8.3 percent in 1997 to 10.6 percent in 2006. Import shares in 2006 were 17.3 percent in the
goods-producing sector and 5.8 percent in the services-producing sector. For manufacturing, the
import share was 20.0 percent. Most of the growth in the import share for private industries occurred
after 2002. The import share of outsourcing--an indicator of offshore outsourcing--increased steadily
but was still very low at 2.3 percent in 2006. Import shares increased for purchased services, energy,
and materials. Nearly all of the growth in the intermediate input intensity of gross output was due to
imports, as real imported inputs grew much faster than real domestic inputs.
[…]
Paper prepared for the 2008 World Congress on National Accounts and Economic Performance Measures for Nations
May 15, 2008
Arlington, VA
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Chapter 1
DEFINING OFFSHORING
Defining offshoring is a difficult but essential task in the present context where public debate is often
muddled and refers to excessively broad notions which distort understanding of the phenomenon and
prevent a proper evaluation of its consequences.
First of all, the term outsourcing is used to designate the use of goods and services produced outside
the enterprise. Outsourcing can occur within the country where the enterprise is located (domestic
outsourcing) or abroad (outsourcing abroad)
The term offshoring is used to designate outsourcing abroad. This term covers two situations :
•
Production of goods or services effected or partially or totally transferred abroad within the
same group of enterprises (offshore in-house sourcing). This means where an enterprise
transfers some of its activities to its foreign affiliates. These affiliates may already exist or
have been created from scratch (greenfield affiliates).
•
The second form involves the partial or total transfer of the production of goods or services
abroad to a non-affiliated enterprise (offshore outsourcing). This operation consists of
subcontracting abroad. The non-affiliated foreign enterprise could be either i) a firm controlled
by residents of the country, or ii) a foreign affiliate controlled by a third party, or iii) an
affiliate of the outsourcing country controlled by another group. The following table
summarises the different situations in which a good or service is produced within an enterprise
(or a group of enterprises) in the same country or abroad.
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Offshoring and Employment : Trends and impacts
OECD 2007
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In other words, production abroad of an enterprise’s activities could be carried on internally (offshore
in-house sourcing), or externally (offshore outsourcing), which corresponds to subcontracting abroad.
The case of transfer of production abroad to its own affiliates will be called “offshoring in the strict
sense” and transfer of production abroad to non-affiliated firms will be called “offshoring in the broad
sense”.
1.1. Offshoring in the strict sense (offshore in-house sourcing)
This document concerns exclusively cases where there is a partial or total cessation of an activity
within an enterprise in the compiling country involving the transfer of that activity to one of its
existing foreign affiliates or one specially formed for the purpose (relocation abroad). This operation
comprises three characteristics which are summarised in Box 1.
In the case of offshoring in the strict sense (offshore in-house sourcing), the three preceding conditions
are necessary and exclusively concern multinational firms to the extent that they involve direct
investment. The multinational firms involved in this category of offshoring may be either (a) parent
companies controlled in principle by residents of the compiling country, or (b) affiliates under foreign
control. It will be seen later in the report whether foreign affiliates in a compiling country tend to
offshore more than parent companies.
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Offshoring and Employment : Trends and impacts
OECD 2007
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1.2. Offshoring in the broad sense (offshore outsourcing or subcontracting abroad)
Offshoring in the broad sense involves resort to international subcontracting without direct investment.
While subcontracting essentially concerns multinational firms, it may also concern SME which do not
have activities abroad. Depending on the nature of the subcontracting, prime contractors may abolish
jobs in the compiling country and only create jobs abroad, or else create jobs abroad without
abolishing jobs in the compiling country. Subcontracting takes place between non-affiliated firms but
often in a relationship of cooperation or partnership. When the production subcontracted abroad was
previously undertaken within the enterprise in the compiling country, it implies a reduction in the
number of employees responsible for that production. This project is exclusively concerned with
subcontracting of a permanent and regular character. Ad hoc subcontracting can be justified either by
a temporary lack of capacity to meet additional demand within the deadlines imposed by the order, or
to accomplish an occasional task which requires skills not available within the enterprise and the
compiling country.
An important distinction concerns the difference between subcontracting and cooperation or
partnership. To grasp the difference, it is useful to distinguish two categories of subcontracting. The
first concerns relatively commonplace goods and services with a low technological content (e.g. call
centres, accounting, spare parts, etc.). Goods and services in the second category have a high
technological content and are generally the subject of constant innovation.
Relations between prime contractors and suppliers are not the same in the two categories. Prime
contractors in the first category, having a wide choice, very often exert very strong pressure on prices
and delivery times and can replace their subcontractors relatively easily.
On the other hand, suppliers in the second category are more closely associated with the design of the
products and thus assume a partnership role. This type of subcontracting could be called partnership
subcontracting.
As a typical example of this type of subcontracting, relations between automobile or aircraft
manufactures and their respective parts suppliers might be mentioned, (providing landing gear,
instrument panels, etc.).
Both these cases generally involve high tech goods for which the suppliers cannot be mere executing
agents. They must also participate in the design of products and monitoring technological
developments, sometimes even imposing certain innovations on the prime contractors. The latter are
much more dependent on their subcontractors than prime contractors in the first category. It would be
difficult, however, to liken these arrangements generally to cooperation agreements.
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Offshoring and Employment : Trends and impacts
OECD 2007
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In cooperation agreements, the partners often establish financial links between them (mutual capital
investment) and seek through their cooperation to share costs and risks, notably in research and
development, or they undertake to jointly develop a new technology.
Figure 1 presents a classification of the different forms of international subcontracting
The presentation in Figure 1 makes a distinction not only between ad hoc and permanent
subcontracting, but also between goods and services. However, in the context of this document, it
must be emphasised that both for goods and services, it is the permanent as opposed to the ad hoc
character of subcontracting which is of interest. Furthermore, it must be considered even more
restrictively to the extent that it must be associated with a reduction on production capacity in the
compiling country. In other words, subcontracting in this report means the outsourcing abroad of an
activity which previously was partially or totally integrated in the enterprise in the compiling country.
As in the case of relocation in the strict sense (Box 1), Box 3 summarises the three conditions which
characterise relocation in the broad sense.
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Offshoring and Employment : Trends and impacts
OECD 2007
7
Délocalisations : quels effets sur l’emploi ?
Depuis quelques décennies, les entreprises des pays industrialisés se sont
engagées dans une politique de délocalisation, soit en confiant des
activités peu qualifiées ou intensives en travail à des filiales étrangères,
soit en achetant des biens intermédiaires à des sous-traitants étrangers.
On a beaucoup débattu des effets sur l’emploi. Une étude récente sur des
données allemandes permet d’affiner le regard : à l’échelle de l’entreprise, des effets négatifs sur
l’emploi seraient d'abord le symptôme d’un retard technologique et donc d’un management
défaillant.
On ne sait pas encore décrire précisément les effets sur les marchés du travail de la fragmentation
internationale des chaînes de production.
La théorie économique prévoit que le processus de délocalisation peut avoir des effets positifs ou
négatifs sur l’emploi dans l’entreprise donneuse d’ordres. Les effets positifs peuvent se manifester si
les économies réalisées rendent les entreprises plus compétitives et qu’elles augmentent leurs parts de
marché dans le monde. Les effets négatifs peuvent résulter de la réduction des effectifs et de la
relocalisation de la production à l'étranger.
Savoir de quel côté penche la balance, en fin de compte, est une question empirique.
Malheureusement, les résultats des études empiriques menées jusqu’ici ne permettent guère de
conclure. Les études fondées sur des macro-données ont tendance à trouver des effets sur l’emploi
insignifiants, ou faiblement négatifs. Les études fondées sur des micro-données trouvent des effets
positifs et négatifs sur emploi. Par exemple, Becker et Muendler (2008) ont examiné les effets de la
création de filiales étrangères sur l'emploi ; ils trouvent que les multinationales allemandes qui se
développent à l’étranger ont tendance à moins réduire l’emploi dans leur pays d’origine. Cependant, la
plupart des études actuelles ne permettent pas de distinguer précisément les effets positifs des gains de
productivité et les effectifs négatifs.
Dans une analyse récente d'un échantillon représentatif d'entreprises allemandes, nous avons tenté
d’identifier les logiques qui déterminent l'effet emploi des délocalisations, en raisonnant à l'échelle de
l'entreprise. Nous trouvons qu’en général une firme qui délocalise a également une meilleure
performance en matière d’emploi, de gain de productivité, de gain de parts de marché sur son marché
national et à l’international, que si elle ne s’est pas engagée dans cette stratégie. En outre, la part de sa
production qu’elle réalise elle-même reste inchangée, ce qui indique que la délocalisation signifie
surtout le remplacement d’un sous-traitant national par un sous-traitant étranger, plus qu’une réduction
de la production réalisée en interne.
Ce résultat nous permet d'isoler un effet positif de la productivité sur l'emploi, si l’on raisonne à
l’échelle de l’entreprise. Cependant, l'emploi peut décroître (relativement) quand cette entreprise
s’engage à la fois dans une restructuration et dans des délocalisations. Dans ce cas, on peut isoler un
effet négatif sur l’emploi.
Nous concluons qu’en moyenne, c’est l'effet positif sur l’emploi, dû principalement au gain de
productivité, qui domine. Il faut bien sûr noter que ces résultats valent à l’échelle d’une entreprise et
qu’on ne peut les extrapoler à l’échelle d’une économie nationale, puisque l’effet sur les sous-traitants
peut être négatif, notamment s’ils sont dans une situation de dépendance vis-à-vis du donneur
d’ordres. De même, notre étude ne permet pas de décrire les évolutions internes de l’emploi au sein de
l’entreprise, les métiers qui émergent et ceux qui déclinent, par exemple.
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Notre travail permet en revanche de pointer un effet qu’il convient de souligner : la combinaison entre
la délocalisation et la restructuration affecte davantage les « traînards technologiques ». On peut
imaginer en effet qu’une entreprise qui perd du terrain dans ce domaine sera plus susceptible de
procéder à des ajustements accélérés, et que la combinaison de fermetures d’établissements, de
délocalisations et de filialisation correspond alors à une tentative de rattraper ce retard. Une intuition
qu’il faudra confirmer serait alors que les effets positifs sur l’emploi affectent principalement les
entreprises qui sont compétitives et innovantes chez elles, et que les effets négatifs correspondent en
fait à une stratégie de survie pour des entreprises qui auraient pris, faute d'investissement ou d'une
stratégie appropriée par exemple, du retard technologique. C'est alors ce retard qu'il faudrait
incriminer, plus que les délocalisations proprement dites.
Christoph MOSER, Dieter M. URBAN & Béatrice WEDER DI MAURO
Références
Becker, S. & M.-A. Muendler (2008), “The Effect of FDI on Job Security,” The B.E. Journal of Economic Analysis and Policy, Vol. 8, p. 1-44.
Moser, C., Urban, D. & B. Weder di Mauro (2009), “Offshoring, Firm Performance and Establishment-level Employment: Identifying
Productivity and Downsizing Effects,” CEPR Discussion Paper Series, No. 7455.
Une version anglaise de cet article est publiée sur le site de notre partenaire VoxEU
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www.telos-eu.com
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Après les délocalisations, les relocalisations
Les marques Rossignol et Le Coq Sportif viennent de décider d'une relocalisation partielle de leur
production dans l'Hexagone. Un phénomène encore marginal, mais qui pourrait prendre de l'ampleur à
moyen terme.
C’est la mondialisation à l’envers ! Le Coq Sportif et Rossignol, deux marques hexagonales réputées,
viennent de décider de "relocaliser" une partie de leur production en France, après une escapade de
plusieurs années dans des pays à bas coûts en termes de salaires. De simples coups de pub isolés dans
un monde économique qui délocalise à tour de bras ? Pas si sûr.
Dans les deux cas, ce retour "aux sources" est fondé sur des considérations économiques avérées. Le
Coq Sportif a ainsi décidé d’installer dans son berceau historique de Romilly-sur-Seine (Aube) un
centre de recherche de pointe nécessitant "le savoir-faire français". Un petit plus pour l’emploi,
puisque treize personnes ont déjà été embauchées. Le groupe textile avait pourtant fait partie de la
première vague de délocalisations en quittant le territoire français, il y a de cela vingt-deux ans.
Du "made in China" au "fabriqué en France"
Le géant du ski Rossignol rapatrie, pour sa part, la production des skis junior au pied des Alpes - en
Haute-Savoie, plus précisément -, alors qu'il les faisait fabriquer depuis 2007 à Taïwan. "La maind’œuvre ne représente que 20 % du coût des skis, ce n’est pas ce qui va nous permettre d’être
compétitifs", explique un porte-parole du groupe. "On réfléchit à rapatrier d’autres productions",
poursuit-il. Il invoque la proximité du marché national comme raison principale à ce "retour" : cela
permettrait de réagir plus vite aux variations de la demande. Et puis les matières premières pour
fabriquer des skis sont produites en Europe.
"Quand il s’agit essentiellement de servir le marché national ou européen, la relocalisation devient
plus intéressante", confirme Patrick Vincent, responsable du pôle industrie à l’Assemblée des
chambres de commerce et de l’industrie. Car le Coq Sportif et Rossignol ne sont pas les seules
entreprises à avoir pris le chemin du "grand retour". En 2010, d’autres enseignes historiques sont
revenues. C'est ainsi qu'en février dernier, le constructeur de jouet Meccano a ramené une partie de ses
activités à Calais (Nord). Quant à la fonderie Loiselet, qui fonctionnait avec du "made in China"
depuis 2001, elle a décidé de se reconvertir dans le "fabriqué en France" en juin.
Des aides à la relocalisation
"Il y a d’autres cas, mais ils se comptabilisent sur les doigts de la main", nuance Patrick Vincent.
Cependant, le mouvement pourrait prendre de l’ampleur. Car l’Extrême-Orient, le Maghreb et les pays
d’Europe de l’Est perdent actuellement un peu de leur superbe. "C’est surtout vrai pour l’ExtrêmeOrient, où les entreprises se rendent compte que les lourdeurs administratives contrebalancent
l’avantage d’une main-d’œuvre bon marché", confirme Patrick Vincent. Les autorités françaises ont
d’ailleurs bien saisi cette opportunité. En mars, lors des états généraux de l’industrie, il a été décidé de
mettre en place des "aides aux relocalisations" pour un montant de 200 millions d’euros sur trois ans.
Suffisant ?
Sébastian SEIBT
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www.france24.com
29/09/2010
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Les Suisses se font une montagne de soucis à cause
des délocalisations
Plusieurs journaux, dans ce pays de 7 millions d’habitants, évoquent de nombreux cas
d’industriels transférant leurs activités à l’étranger (dont l’Allemagne et dans une moindre
mesure la France) à cause de l’envolée du franc. Celui-ci aggrave les coûts de production, déjà
très élevés en raison notamment de l’importance des salaires. Malgré tout, la Suisse affiche une
bonne santé économique, avec une prévision de 3 % de hausse de son PIB cette année.
Dans la Suisse réputée paisible, en principe protégée des turpitudes du monde par ses hautes
montagnes, quelques annonces récentes ont suscité certains frissons. Annonces de transfert à l’étranger
de leur production faite par des industries devenues le symbole d’un fléau guettant l’Helvétie : les
délocalisations dues à un franc suisse désormais perché trop haut...
La vigueur du franc suisse, qui ne cesse de s’apprécier, a
fragilisé nombre d’entreprises, renchérissant leurs coûts de
production dans un pays où la main d’œuvre est en général
fort copieusement rémunérée. (Un ouvrier non qualifié
perçoit environ 4.000 euros mensuels.) Selon un économiste lié à l’Union Syndicale Suisse à Berne, Daniel
Lampart, cette envolée de la monnaie nationale pourrait
causer une hémorragie sur le front de l’emploi: 35.000 postes de travail menacés. Pendant la période 2003-2008,
l’emploi dans l’industrie en Suisse avait progressé de
1,2 %. Or, en 2009, une rechute de 2,4 % a soudain été
constatée. Sans doute faut-il imputer en partie cette perte de
compétitivité de la production au franc trop fort.
«L’ALLEMAGNE JOUIT D’UN EURO BON MARCHÉ»
LA SUISSE, EN UN CLIN D’ŒIL
(chiffres datant de 2009 et 2010)
• Population résidente : 7.785.800
(dont 2,2 millions d’étrangers)
• Population active : 2,5 millions
• Nombre de postes de travail dans
l’industrie : 700.000 (A titre de
comparaison, le secteur bancaire
emploie 105.000 personnes)
• Évolution du PIB en 2009 : - 1,9 %
• Croissance du PIB prévue en 2010 :
+3%
• PIB par habitant : 68.638 francs
(53.468 euros)
(source : portail de la Confédération
Les craintes liées au spectre des délocalisations sont
Suisse www.bfs.admin.ch)
maintenant exacerbées par des rumeurs dont un journal
alémanique, Zonntags Zeitung, s’est fait l’écho tout récemment. Un important équipementier, dont il n’a pas cité le nom, envisage de se redéployer en
Allemagne. Curieusement, c’est le puissant voisin germanique qui absorbe une grande partie des
délocalisations suisses, ainsi que le relate, de son côté, le journal francophone Le Temps. Citant les
propos d’un économiste ; Beat Kappeler, Le Temps relève : «Ce pays jouit de l’euro bon marché et
d’une structure industrielle de premier plan.»
Parmi les symboles du malaise qui monte : Voumard Machines, à Neuchâtel, spécialisé dans les
machines-outils de précision. Son propriétaire, le groupe Wolters, lui-même détenu par un fond
d’investissements américain (Novellus Systems) a mis sur le carreau une centaine d’employés. Raison
invoquée par la direction : «Produire (en Suisse) représente des coûts extrêmement élevés». Les
activités sur les rives du lac de Neuchâtel seront déménagées à Rendsburg, ville allemande au bord du
canal de la Mer du Nord.
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GIVAUDAN MET UN PIED EN HONGRIE
Autre société connue, en Suisse, appelée à rationnaliser ses activités : Givaudan, dédié à la conception
d’arômes pour les industriels de l’agroalimentaire et pour les parfumeurs. Cent-vingt emplois, à
Zurich, vont s’évaporer pour réapparaître en Hongrie.
Le Temps cite aussi le cas, emblématique, de l’usine Süd-Chimie AG à Romont, dans le canton de
Fribourg, vouée à la fabrication de tubes plastiques destinés essentiellement à l’industrie
pharmaceutique. En fait, cette entreprise constitue une joint-venture entre l’allemand Süd-Chimie,
ancré dans les spécialités chimiques, et le suisse PQH Holding SA (lequel est minoritaire, avec 49 %
des parts).
L’usine de Romont est en train de fermer ses portes, ce qui occasionne le licenciement de 36
personnes. Ses activités seront transférées sur un site de production que l’actionnaire allemand possède
déjà en Gironde, à Romorantin. Président de PQH Holding, Maurice Pasquier avait déclaré en août
dernier aux journalistes de La Gruyère (un quotidien) : «Nous avons consenti d’énormes
investissements dans notre site conjoint à Romont. Il s’agissait de doubler la production, avec un
objectif de chiffre d’affaires de 15 millions de francs (7,7 millions d’euros). Mais le marché n’est plus
tenable, d’autant plus que nous exportons 95 % de notre production.» Et cet homme d’affaires de
mettre en cause la perte de compétitivité liée à un franc suisse toujours plus musclé...
MULTINATIONALES : 1,3 MILLION D’EMPLOIS À L’ÉTRANGER
Malgré tout, les inquiétudes que les Helvètes nourrissent par rapport aux délocalisations risquent
d’apparaître exagérées, si l’on en croit l’économiste chef de la Banque Pictet à Genève, Jean-Pierre
Béguelin. «La Suisse est par tradition exportatrice de main d’œuvre. Les fleurons de l’industrie
helvétiques emploient à l’étranger 1,3 millions de personnes, alors que dans notre propre pays
l’industrie donne du travail à 2,5 millions de personnes.»
Yann LE HOUELLEUR
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Questionnez les économistes :
Mondialisation - espoir ou menace?
Vous trouverez ci-dessous les questions et réponses de ce débat en ligne qui a eu lieu vendredi 29 juin
avec Raymond Torres, Chef de la division des politiques de l’emploi à l’OCDE :
Question
Vous avez écrit que le fait d’encourager davantage d’immigrants à venir pour remédier aux
pénuries de compétences peut aussi avoir son utilité. Voulez-vous dire que ce n’est qu’une
mesure à prendre parmi d’autres mais que ce n’est pas celle qui s’impose le plus ? D’après
les propos des médias allemands, on pourrait penser que l’immigration est la seule solution
aux problèmes de l’Allemagne…
Corinne Schindlbeck, Markt & Technik
Réponse
A mon avis, Corinne, ce qu’il faut c’est que les politiques intérieures soient judicieuses. Les
immigrés vont vieillir eux aussi et si on les force à partir tôt à la retraite, ils n’apporteront
qu’un répit temporaire face au problème plus vaste du faible taux d’activité. Il est crucial
également de doter les jeunes des compétences appropriées. Les systèmes éducatifs devraient
s’adapter sans attendre et ne pas compter sur le fait qu’on peut faire venir davantage
d’immigrés pour remédier aux pénuries de compétences. Cela dit, il faudra effectivement
recourir davantage à l’immigration.
Question
Quelle est la proportion de pertes d’emploi dans l’UE que l’on peut imputer aux échanges
avec les économies émergentes ou aux délocalisations dans ces économies ?
Philip Whyte, Londres
Réponse
A cette question, il n’y a pas de réponse tranchée. Mais la plupart des analystes estiment que
la proportion d’emplois perdus pour cause de délocalisation est très faible. Elle représenterait
5 % du nombre total des pertes d’emploi.
Question
Autre question concernant la pénurie de « professionnels des hautes technologies » et les
dépenses des entreprises en matière de formation et d’éducation. Ces budgets sont-ils
suffisamment élevés pour faire face aux problèmes de démographie et de déficit de capital
humain ?
Corinne Schindlbeck, Markt & Technik
Réponse
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Les dépenses publiques dans ce domaine pourraient avoir pour premier objectif de veiller à
ce que le système éducatif fournisse les compétences nécessaires au marché du travail. A cet
égard, il semble qu’il existe un grave problème d’inadéquation dans nombre de pays : les
étudiants qui sortent de certaines filières se retrouvent au chômage ou occupent des emplois
peu qualifiés alors que d’autres filières comme les études d’ingénieur ont du mal à recruter
des candidats. Concernant les adultes, la politique publique devrait se focaliser tout
particulièrement sur les personnes à bas niveau d’instruction : ce sont elles qui ont le plus
besoin de formation mais elles en reçoivent très peu. Bref, ce n’est pas nécessairement une
question d’augmentation des dépenses ; il faudrait plutôt repenser les schémas actuels de
dépenses.
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29/06/2007
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Question
Qu’est-ce qui explique le recul de la part du travail dans le revenu national dans tous les pays
de l’OCDE ? Cela tient-il à l’affaiblissement du pouvoir de négociation des syndicats parce
que les entreprises s’internationalisent, et quelle devrait être la réponse des pouvoirs publics
pour remédier à cette situation ?
John Evans, Commission syndicale consultative auprès de l’OCDE
Réponse
La délocalisation (ou la menace de délocaliser) donne aux employeurs les moyens
techniques d’éclater le processus de production et d’en sous-traiter une partie, dans le pays
ou à l’étranger. Cela a probablement fait réfléchir à deux fois les travailleurs avant de
réclamer des hausses de salaires, phénomène qui, lui-même, a contribué à la modération
salariale et à la baisse de la part des salaires. Et, de fait, les Perspectives de l’emploi de
l’OCDE montrent que l’emploi est de plus en plus sensible aux chocs économiques. Mais
jusqu’à présent, la portée réelle des délocalisations demeure limitée. Par conséquent, il n’est
pas possible d’affirmer qu’en elle réside la principale explication de la baisse des parts des
salaires observée dans presque tous les pays de l’OCDE. Les choses pourraient changer dans
l’avenir et, dès lors, on peut se poser la question : que faire ? Avec des solutions
protectionnistes, la situation empirerait. Aussi, les politiques devraient plutôt mettre à profit
le fait que les délocalisations, et la mondialisation en général, créent de nombreuses
opportunités. Il faudrait soutenir la mobilité des travailleurs et supprimer les obstacles à la
création ou au développement des entreprises dans les secteurs de pointe naissants. Il
conviendrait aussi que les travailleurs puissent bénéficier d’une aide sociale adéquate,
comme nous l’avons vu précédemment. Les politiques de redistribution axées sur l’emploi
ont un rôle à jouer. Enfin, dans une économie qui se mondialise, il est essentiel de veiller à
ce que les gens puissent valoriser leurs compétences.
Question
En Allemagne comme dans d’autres pays, le secteur des hautes technologies s’inquiète du
manque de travailleurs hautement qualifiés. Mais ne sont-ce pas les entreprises elles-mêmes
qui sont responsables de cette pénurie, elles qui ont licencié leurs salariés trop rapidement
ces dernières années ? Une nouvelle « carte verte » destinée aux professionnels des hautes
technologies est actuellement à l’étude. Quelles suggestions souhaiteriez-vous formuler à
l’adresse du gouvernement allemand ?
Corinne Schindlbeck, directrice de publication, Markt & Technik
Réponse
Vous avez parfaitement raison ! Les entreprises européennes ont eu tendance à licencier
leurs « salariés âgés » qui sont souvent partis en préretraite. C’était gaspiller des talents à une
époque où des pénuries de main-d’œuvre qualifiée commençaient à apparaître. Il est
indispensable d’inverser cette tendance au départ précoce à la retraite et de donner aux
travailleurs âgés la possibilité de continuer leur activité. Ce devrait être la première mesure à
prendre car c’est la meilleure solution. Il peut aussi être utile d’encourager la venue
d’immigrants plus nombreux pour remédier aux pénuries mais cette solution ne saurait
remplacer des politiques de qualité axées sur les travailleurs déjà présents dans le pays
[travailleurs âgés (pour éviter les départs en préretraite), demandeurs d’emploi (qui
pourraient recevoir une formation), jeunes (qui devraient bénéficier d’un meilleur niveau
d’instruction), etc.].
Question
Diminuer le niveau des prestations sociales est-il la meilleure méthode pour s’adapter à la
mondialisation ?
Tim Brookes, Royaume-Uni
Réponse
RED 2011
Non ! Voyez ce qui a été fait aux Pays-Bas et au Danemark. Dans ces pays, les prestations
sont généreuses et pourtant, ils affichent de bons résultats dans l’économie mondialisée. En
effet, tout est mis en œuvre pour aider les bénéficiaires de prestations à retrouver le chemin
de l’emploi.
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Question
Vous parlez d’aider les travailleurs prisonniers d’emplois sans avenir. Mais comment ?
Michael Jordan, Irlande
Réponse
Premièrement, il faudrait accorder des prestations sociales adéquates aux personnes qui
perdent leur emploi. Cette solution devrait se conjuguer avec une aide à la recherche
d’emploi et des obligations en ce sens, comme on le fait au Danemark, par exemple.
Deuxièmement, il faudrait repenser la procédure de protection contre les licenciements. Ce
sont les travailleurs qu’il faut protéger, pas les emplois sans avenir. C’est ce qu’a fait
l’Autriche avec ses comptes d’épargne individuels : les travailleurs accumulent des droits à
compensation en cas de licenciement, et ces droits sont transférables d’un employeur à
l’autre. En revanche, dans les régimes classiques, vous perdez ces droits si vous quittez un
emploi pour en prendre un autre.
Question
Des études ont montré que, dans les pays de l’OCDE, le creusement des écarts de salaires
s’explique en grande partie par des facteurs autres que le commerce international. Il semble
pourtant que l’on rende les échanges responsables de cette situation ainsi que d’autres maux
économiques et sociaux, ce qui fait que la question a pris une dimension politique. Comment
mieux appréhender les causes des écarts de salaires et la manière dont les pouvoirs publics
doivent s’y prendre pour réduire ces écarts, et montrer que les échanges globaux font
augmenter les niveaux de vie ?
Harvey Bronstein, Économiste international principal US Small Business Administration
Réponse
C’est un défi majeur et, comme votre question l’indique clairement, il faudrait plus d’études
et plus de communication pour faciliter et éclairer davantage le débat sur les échanges, les
inégalités et les politiques publiques. De nombreuses études de bonne qualité portant sur ces
questions sont en cours mais elles sont très complexes et il ne serait pas réaliste, pour les
tenants des politiques de libéralisation des échanges et de l’investissement, de compter
disposer, dans un avenir proche, d’une preuve scientifique indiscutable de l’importance des
avantages procurés par l’absence de restrictions aux échanges. Il appartient donc aux
pouvoirs publics de trouver de meilleurs arguments pour établir le bien-fondé de la
libéralisation des échanges sans attendre les résultats définitifs des études pour prouver qu’ils
ont raison. Il leur faut aussi adopter des politiques intérieures adéquates pour accroître les
avantages de cette libéralisation, alléger les coûts d’ajustement et s’attaquer aux problèmes
d’équité.
Comment mieux faire passer le message en faveur des échanges ? Premièrement, et c’est
important, les préoccupations du public selon lesquelles de nombreux travailleurs
rencontrent des difficultés à cause (du moins en partie) du resserrement des liens dans le
domaine du commerce et de l’investissement dans l’économie mondialisée méritent d’être
prises au sérieux. La « mondialisation » avance dans un contexte d’inégalités croissantes sur
le marché du travail des économies les plus avancées, mais aussi du ressenti d’un
accroissement de l’insécurité dans certains de ces pays. Il sera difficile d’inscrire dans la
durée le soutien politique en faveur de la libéralisation des échanges si les pouvoirs publics
ne parviennent pas à démontrer qu’ils mettent en œuvre les mesures adéquates pour répondre
aux inquiétudes suscitées par les inégalités et l’insécurité et, partant, que les actifs peuvent
s’attendre à recevoir leur juste part des gains provenant de l’intégration économique
internationale. Fort heureusement, on peut constater que, dans un certain nombre de pays de
l’OCDE, les marchés du travail se sont bien comportés ces dernières années en dépit de leur
intégration toujours plus grande dans l’économie mondiale. Ces exemples de réussite sont
utiles pour illustrer la façon dont des politiques intérieures idoines peuvent, en fait, limiter
les inégalités et l’insécurité alors même que l’intensification des échanges accroît l’efficience
globale de l’économie nationale.
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Question
Les effets négatifs de la mondialisation (mutations économiques, chômage, délocalisation
etc...) occupent le devant de la scène médias. Or ses effets positifs sont réels, profonds et
déterminants pour notre futur (innovation, croissance, développement durable, recherche
fondamentale et appliquée etc...) L’école ne pourrait-elle pas être le premier maillon de cette
culture économique qu’il est indispensable d’inculquer aux nouvelles générations? Qu’en
pensez-vous?
Bernard Bonnamour, France
Réponse
RED 2011
Les pertes d’emploi liées à la mondialisation sont souvent concentrées dans le temps aussi
bien que dans l’espace. Tandis que les effets positifs (par exemple en termes de produits
meilleur marché pour les consommateurs) sont plus diffus, s’étalent dans le temps et sont
moins « médiatisables ». Je crois cependant que les gens le savent : qui ne se rend pas
compte que l’ouverture du marché aérien a permis de réduire le prix des billets d’avion ?
Mais vous avez raison que la culture économique y aiderait également. Par ailleurs il est
essentiel de ne pas négliger les coûts d’ajustement liés à la mondialisation, même si celle-ci
est globalement favorable à la croissance. On a trop tendance à oublier cela.
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