Rapport de séjour University of Pittsburgh 2015

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Rapport de séjour University of Pittsburgh 2015
Rapport de séjour
University of Pittsburgh 2015 – 2016
Nora BEAUVAIS
Pour mon année à l'étranger, je voulais impérativement partir dans un pays anglophone, de
préférence loin de la France. Traverser l'Atlantique m'a paru séduisant, moi qui n'avais jamais mis
un pied aux Etats-Unis. J'ai décidé d'attaquer ce nouveau continent par la côte Est, comme les
premiers colons, et de laisser la conquête de l'Ouest pour plus tard. L'east coast, c'est déjà un sacré
morceau : par où commencer ? J'ai mis Pittsburgh en 3e choix, après Baltimore et Boston, avec
l'idée que tous mes choix me convenaient parfaitement. L'Université de Pittsburgh est une bonne
université, le campus est très agréable, la ville regorge de surprises ; et surtout, comme ce que vous
diront tous mes camarades sciences-pistes aujourd'hui, la 3A se construit au fil des rencontres. J'ai
eu la chance de nouer des amitiés très solides, avec des américains comme avec d'autres
international students. Si mon année est à présent terminée, je sais que je reviendrai très
certainement en Pennsylvanie, à Pittsburgh, puisque c'est une autre vie que je laisse là-bas.
1. Description de mon expérience
J'ai vraiment adoré étudier à Pittsburgh. Comme vous l'avez peut-être lu ailleurs, c'est un
campus intégré à la ville. En fait, Pittsburgh, c'est plusieurs quartiers les uns à côté des autres, avec
chacun une atmosphère qui lui est propre. Il y a le centre ville (downtown), le quartier étudiant
(Oakland), des quartiers plus résidentiels et très jolis (Shadyside, Squirell Hill), et d'autres plus
branchés, voire hipsters (South Side, Bloomfield, Lawrenceville) etc. Je trouve que c'est vraiment
sympa de passer de l'un à l'autre et de varier les ambiances... même si j'ai passé le plus clair de mon
temps à graviter dans Oakland puisque c'est le cœur de la vie étudiante. Une dizaine de bâtiments
où les cours ont lieu y sont disséminés, le saint des saints étant The Cathedral of Learning, ou
Cathy pour les intimes. La cathedral c'est cette espèce de tour blanche dominant Oakland du haut
de ses 42 étages et qui, de l'intérieur, ressemble à s'y méprendre à Poudlard. A Pitt, pas de hibou ni
de baguette magique mais on élève des aigles au sommet de la cathedral, alors on peut quand même
essayer de se croire dans J.K.Rowling quand on les voit passer.
Harry Potter c'est bien mais il ne faut tout de même pas oublier les affaires administratives !
Il vous faudra 12 crédits pour valider votre semestre, ce qui est équivalent à 4 cours (libre à vous de
prendre quelques crédits en plus... peut-être au second semestre, lorsque vous serez davantage
familiarisés avec la langue et le format des cours?). Pour ma part, j'ai pris 12 crédits au premier
semestre et 15 au second (j'ai pris arabe, qui en valait 5). Je considère le niveau de l'enseignement
extrêmement satisfaisant, tant part la qualité des professeurs que par les méthodes de travail. J'ai été
très agréablement surprise. N'oubliez pas que vous disposez d'un choix extrêmement large : si vous
avez toujours voulu prendre des leçons de sculpture sur bois ou une introduction à la culture
bouddhiste, c'est le moment. J'ai personnellement choisi des matières qui m'intéressaient – pas de
sculpture sur bois, même si je suis convaincue que c'est passionnant : je vous raconte tout (et
comme Télérama, je note de 1 à 3 étoiles, sauf que moi c'est des ♥, enjoy!)
Introduction to Islamic Civilization ♥♥♥ (Jeanette Jouilli)
D'accord la professeure est européenne (elle est allemande, elle parle aussi anglais et français)... Et
alors ? Après une année en Pennsylvanie, vous aurez fait des pas de géants en anglais, alors on peut
bien s'autoriser un cours qui n'est pas donné par une native, excusez-moi ! Le cours de Mrs Jouilli a
le mérite d'être passionnant, complet, interactif et de proposer des lectures on ne peut plus
stimulantes. On commence par les racines : la société pré-islamique de La Mecque, la vie du
Prophète Mohammed, la naissance de l'Islam ; on continue par les fondamentaux : la (difficile)
question de la succession du Prophète et donc les sunnites/chiites, les 5 pilliers, les grandes écoles
de pensée, le soufisme ; et on finit par des débats plus contemporains : le féminisme, la
communauté musulmane aux Etats-unis, la musique etc. Les lectures demandées mélangent histoire,
sociologie et philosophie (on a même le droit de discuter sérieusement des extraits de Tariq
Ramadan sans être traité d'islamistes) et nourrissent activement les débats en classe : j'ai trouvé le
fonctionnement du cours motivant et excitant ! Je peux dire en toute sincérité que ce cours m'a
beaucoup appris : c'est une bonne introduction à la civilisation islamique (et c'était ce qu'on lui
demandait!).
Arabic 3 ♥♥♥ (Anthony Verardi)
Le meilleur cours d'arabe que j'ai suivi depuis le début de ma scolarité. Et pourtant j'ai tout essayé :
le centre culturel syrien, l'institut du monde arabe, les cours particuliers... Et c'est un Américain de
22 ans qui m'a appris le plus de choses ! Anthony est un prof absolument excellent : son cours est
clair, organisé, sérieux... mais il reste drôle, détendu et disponible : c'est vraiment une perle ! Je ne
peux que conseiller à 100% les cours de langues arabe : les supports sont variés (vidéos, textes,
audios, articles etc), on est noté sur tout (compréhension écrite et orale, expression écrite et orale).
Les groupes de niveau ne dépassent pas 15 élèves, ce qui facilite la pratique de l'oral. Le plus : on
apprend à la fois l'arabe classique et dialectal (au choix : chami ou masri). Vous allez a-do-rer.
Politics of Oil and Natural Resources ♥♥♥ (Laura Paler)
Attention, âmes sensibles à la lecture, s'abstenir ! Par contre, pour ceux qui aiment lire et apprendre
en profondeur, ce cours est génial. Vraiment, c'est un sujet pointu, qui demande de prendre les
livres à bras-le-corps et de s'y mettre sérieusement, mais ça vaut le coût. Le cours est divisé en 3
parties : d'abord, un peu d'histoire ! On se plonge dans l'histoire du pétrole qui débute... en
Pennsylvanie ! J'ai trouvé les lectures très prenantes : c'est comme un roman, plein de suspens et de
rebondissements (si, je vous jure!). Vous saurez tout sur les premières découvertes, les sept sœurs,
les chocs pétroliers, l'OPEC etc. Ensuite, on passe à une partie du cours très différente : le resource
curse (la malédiction des ressources – enfin si vous n'aviez pas compris, je doute que vous ayez eu
plus de 7 à l'IELTS). Il s'agit de comprendre pourquoi et comment les ressources naturelles
transforment les institutions et les structures économiques des pays dans lesquelles elles se trouvent.
On examine plusieurs théories : les lectures sont très denses et parfois assez techniques, mais quand
on aime on ne compte pas ! Finalement, la dernière partie se concentre sur l'avenir de l'énergie : le
cours est organisé autour de débats sur des thèmes comme la sécurité énergétique, l'avenir du
nucléaire ou encore le fracking... et nous donne des clés pour comprendre l'actualité brûlante, et
urgente !
Politics & Government in the Middle East ♥(Ross Harisson)
C'est vrai que je préfère parler des choses que j'aime mais voici un cours que j'ai moins aimé. Le
sujet du cours est intéressant mais le manière dont il est traité est décevante. Tout d'abord,
l'entreprise en elle-même est trop ambitieuse : comprendre et comparer les systèmes politiques des
pays moyen-orientaux à travers leurs histoires et leurs cultures. Le professeur Harisson, qui donne
également des cours à Georgetown, maîtrise sans aucun doute son sujet mais les rappels historiques
sont trop longs et trop fouillis ; et les concepts théoriques sont plaqués trop abruptement sur les cas
empiriques. De plus, les critères de sélection des pays traités demeurent obscurs : pourquoi passer
sous silence l'Arabie Saoudite ? Tout comme la plupart des monarchies du golfe arabique ?
Finalement, j'en ai tiré des connaissances factuelles et historiques mais peu de compétences
intellectuelles d'analyse. Ross Harisson a travaillé pour différentes administrations et son parcours
est intéressant, je suis sûre qu'il aurait plus à nous apporter. Dommage...
History of the United States until 1877 ♥♥♥ (Hall Van Beck)
Vous ne pourrez malheureusement plus prendre ce cours avec le professeur Van Beck puisqu'il a
pris sa retraite cette année. Il aura très probablement un remplaçant... mais la qualité de ce cours
tenait essentiellement à ce bon monsieur Van Beck (qui a tout de même fêté ses 70 ans
d'enseignement). History of the United States until 1877 est une initiation complète à l'histoire des
Etats-Unis depuis les native Americans jusqu'à la reconstruction post-guerre civile. En plus d'être
une leçon époustouflante d'histoire (et pas seulement l'histoire avec un grand H mais aussi celle
avec un plus petit « h », celle dont on entend moins souvent parler, celle du quotidien des petits
paysans, des femmes, des pauvres, l'histoire de ceux qui ont vécu l'histoire), c'est aussi une
approche politique et économique permettant une compréhension en profondeur de l'émergence et
de l'essoufflement de tout un système qui a mené à la terrible guerre civile. Prendre un cours sur
l'histoire des Etats-Unis est primordial pour comprendre le contexte dans lequel vous evoluerez, ne
passez pas à côté de cette opportunité. Le cours met l'accent sur les révolutions qui ont transformé
le pays au XIXe siècle (révolutions industrielle, agricole, dans les transports et les
communications). C'est absolument passionnant et on se rend compte que les séquelles de la guerre
sont toujours bien présentes et qu'elles divisent toujours. Si vous avez l'occasion de faire un tour
dans le Sud (Louisiane, Alabama, Mississipi Géorgie etc), vous verrez à coup sûr des drapeaux
confédérés flotter fièrement sur le porche des maisons à colonne... et même quelques stickers
évoquant sombrement le KKK et autres groupes suprématistes. Vous avez dit civil rights ? Une
page de l'histoire américaine encore loin d'être achevée. Un cours que je conseile vivement, avec ou
sans Van Beck.
Modern American Politics ♥♥
C'est un cours qui fonctionne parfaitement en duo avec le cours précédent. Là aussi, vous
commencez par une petite immersion chez les indiens d'Amérique et vous étudiez en profondeur la
fondation des Etats-Unis. La différence est que, tout en restant un cours d'histoire, il se focalise sur
la politique. La principale utilité de ce cours est de vous faire comprendre l'histoire des partis et de
la culture politique américaine, deux choses essentielles pour prétendre comprendre quoi que ce soit
à la crise que traverse aujourd'hui les politiques aux US. Revenir aux moments clés qui ont fondé le
système américain permet de bien mieux aborder l'actualité politique. La démocratie américaine est
pleine de particularités et d'étrangetés, et de travers aussi, plus que jamais mis en évidence par
l'élection qui se déroule en ce moment même. Si vous ne prenez pas ce cours, je vous supplie de lire
l'ouvrage Winner-take-all politics (une des deux lectures obligatoires). Dans la ligne du Capital de
Thomas Piketty et du mouvement Occupy Wall Street, ce livre est une mine d'or. Rédigé à la façon
d'une enquête minitieuse sur la répartition des richesses aux Etats-Unis, les auteurs dressent un
portrait sans retouche de la classe politique de ces 30 dernières années. On comprend comment,
influencés par les puissants lobbys, PACs et autres organisations pleines de bonnes intentions, les
administrations Républicaines comme Démocrates ont tourné le dos aux classes moyennes pour
favoriser les 0.1% les plus riches. Ce livre met en lumière le ras-le-bol général d'une société
profondément clivée par les inégalités. Et Bernie Sanders n'incarne-t-il pas cette puissante vague de
mécontentement social ? Le système politique américain est en train de changer et ce cours est un
bon moyen de ne pas seulement assister à ces changements, mais d'en saisir les raisons, les
modalités et les conséquences.
Political parties & elections ♥♥ (Matthew Zarrit)
J'ai plusieurs critiques à émettre au sujet de ce cours : j'aurais aimé y trouver un peu plus de droit
constitutionnel, ou au moins un éclairage plus en profondeur sur le processus électoral. Je n'ai
également pas été convaincue par les lectures, souvent trop théoriques et ne présentant pas un
intérêt fondamental. Mais c'est avant tout un cours de vie politique, en prise avec l'actualité. Le
point fort c'est que le cours est principalement une discussion entre les élèves, modérée par
Matthew. On parle des derniers débats du GOP, des apparitions télé d'Obama, du dernier buzz de
Trump, on décortique les stratégies et les clips de campagne. Chacun est libre de contribuer au
débat ou simplement d'écouter. On apprend énormément, surtout en tant qu'étranger. C'est le
meilleur moyen de suivre la politique intérieure et de se faire une idée de la manière dont on fait de
la politique en Amérique du Nord. Le cours n'est pas un must ultime mais si vous avez des cours qui
demandent beaucoup de travail à côté, c'est très agréable d'avoir ce cours 2 fois par semaine.
2. Dimension comparative de mon expérience
J'admets : c'était la première fois que je partais aussi loin de chez moi aussi longtemps... Je
n'avais pas prévu le choc. Et en fait, ça fait énormément de bien ! Aux Etats-Unis, tout est différent.
Quand on arrive, les rues sont plus grandes, on n'en voit pas le bout, elles ressemblent à de grands
quadrillages, la signalisation me semblait confuse, pas de cafés en terrasse, pire, pas de verres en
terrasse (eh oui, pas d'alcool avant 21 ans, la loi est scrupuleusement appliquée... enfin presque
toujours scrupuleusement) et la healthy food ne semblait pas avoir conquis cette partie du monde...
Et puis plein de questions existentielles se bousculent dans notre tête de français qui soudain se sent
très français : pourquoi la clim' est-elle à fond dans tous les bus ? Pourquoi mettent-ils des glaçons
dans tout ? Comment ça le vrai fromage n'existe pas ici ? Mon corps va-t-il réussir à absorber une
telle quantité de gras ? Et puis en fait, après quelques temps, on comprend que ça s'appelle le
dépaysement. Et que c'est parfaitement normal. Une fois la période d'adaptation passée, on profite
pleinement de tout, on apprivoise la ville et le pays, et ce qui nous semblait étranger la veille
devient notre quotidien, notre chez-nous.
Pittsburgh est une ville sûre, et c'est ce qui m'a frappée. Il m'est arrivé de rentrer très tard
toute seule chez moi : je me suis toujours sentie en sécurité. D'autant plus que l'Université de
Pittsburgh propose des services gratuits qui semblent assez incroyables : notamment le safe ride, un
taxi gratuit le week end que l'on peut appeler depuis n'importe où dans la ville (et dont Sciences Po
ferait bien de s'inspirer, au moins pour le jeudi soir !!). Les gens sont vraiment gentils : demandez
de l'aide, votre chemin, des conseils : ils vous aideront. Je trouve que les américains engagent
beaucoup plus facilement la conversation, sont bien plus amicaux et jovials. Et surtout, pendant 10
mois, vous n'aurez pas à subir la tête « spéciale métro » des parisiens, et ça, ça n'a pas de prix ! Au
contraire, croyez-le ou non, à Pittsburgh les gens vous souriront et vous proposeront de l'aide sans
même que vous n'en exprimiez le besoin ! La nourriture est reine : une petite faim à 4 heures du
matin en revenant de soirée ? Pas de problème, le Mac Do est ouvert 24h/24, tout comme le
supermarché... et les pizzerias vous régalent jusque très tard dans la nuit ! Par contre, pour le reste,
il faudra vous plier aux habitudes alimentaires locales : on mange tôt. Ainsi, il n'est pas rare de
déjeuner à 11h et de dîner à 18h (voire 17h!?!) ; c'est une autre vie et un autre rythme. La seule
chose à laquelle je ne me suis pas habituée, c'est l'hyperconsommation. L'hyperconsommation de
tout : d'emballages, de télévision, de sodas et surtout de nourriture. Aux Etats-Unis, la plupart des
cantines dans les universités fonctionnent sur la base du all-you-can-eat, à volonté donc, avec à la
clé une quantité de gâchis astronomique et des habitudes alimentaires désastreuses pour les jeunes.
Mais ce n'est là que la conséquence d'un système de production à refaire : c'est l'excès sans limites !
Pittsburgh est une ville jeune avec plein d'universités (privées et publiques) qui se côtoient :
il est vraiment facile de se faire des amis, de rencontrer de nouveaux gens qui viennent de partout.
Pittsburgh est un vrai petit melting polt à l'américaine ! Il y fait bon vivre. La vie étudiante y est
foisonnante : il y a au moins une centaine d'associations de tous types (sports, arts, musique,
politique, LGBT etc tout y passe). Bien sûr, le sport occupe une place fondamentale dans la vie sur
le campus : les équipes de football américain (Steelers), de baseball (Pirates) et de hockey
(Penguins) sont vénérées et leurs joueurs érigés en demi-dieux. Allez voir quelques matchs, ne
serait-ce que pour l'expérience : l'université propose des places pas chères et on se souvient de son
premier match ! Le deuxième pilier des campus américains sont bien sûr les fraternités et sororités
(la greek life) : rien de bien méchant, du moins à Pitt ! Les bizutages français sont bien plus
violents. Les frat parties n'ont rien de trash ou d'affolant, c'est assez amusant... mais vite lassant. Je
vous conseille de les laisser rapidement de côté et d'aller à d'autres soirées hors fraternités. Le
concept de soirée est un peu différent ici : le weekend, Oakland grouille d'étudiants. Contrairement
à en France, il est très courant de se rendre à une soirée où l'on ne connaît personne. La plupart du
temps, une adresse circule entre les étudiants et tout le monde s'y rend sans que l'hôte ne s'offusque
le moins du monde. Mais un conseil : BYOB (bring your own boose!). Ah oui PS : tradition sexiste
oblige, les frat parties sont gratuites pour les filles (et généralement $5 pour les garçons).
Compte-tenue des rapports précédents, je me vois dans l'obligation d'ouvrir une parenthèse
météo : j'ai sûrement eu la chance assez rare (merci le réchauffement climatique) de connaître une
année très douce à Pittsburgh. Le climat est en principe continental : été chaud, hiver froid. Les
premiers mois ont été radieux ; un peu de neige en décembre, janvier, février (rien
d'extraordinaire) ; et le beau temps est vite revenu avec le printemps. Et en hiver, l'école organise
des weekends au ski juste à côté pour un très bon prix ! Parenthèse refermée.
La 3ème année à Pittsburgh change de Sciences Po, et c'est tant mieux ! On le savait déjà, il
n'y a pas que le « 2 parties / 2 sous-parties » dans la vie. A Pittsburgh, comme dans la plupart des
universités aux US, les étudiants sont libres de structurer leur pensée comme ils l'entendent. Je ne
dis pas que le plan très élaboré à la française est une mauvaise chose mais il est utile, je pense, de
balayer un peu tout ça ne serait-ce que pour un an. Il y a des bons et des mauvais côtés. D'abord, les
étudiants sont beaucoup plus amenés vers le spontané. Et cela se vérifie tant à l'oral qu'à l'écrit. Les
cours ressemblent davantage à un dialogue avec le professeur qu'à un cours magistral auquel nous
sommes habitués. Un élève n'hésitera pas à lever la main pour dire la première chose qui lui passe
par la tête, même si c'est une opinion personnelle sans aucun arguments, même si ça n'a rien à voir
avec le sujet, et même si c'est pour dire... une blague. Cela paraît parfois étrange, voire agaçant
pour quelqu'un qui n'est pas habitué mais on s'y fait. Et finalement, ce mode de fonctionnement
donne un autre rythme au cours, un autre ton d'enseignement, plus décomplexé peut-être. En tout
cas, sachez que dans une salle de classe à Pitt, vous êtes libres de dire ce que vous voulez. Alors
profitez-en, parlez ! (vous êtes quand même là pour ça). L'exercice qui diffère le plus avec nos
habitudes de sciences-pistes est le paper. La principale différence, tout de même de taille, est qu'aux
US, on ne problématise pas. Alors face à notre feuille (ou à notre écran, c'est selon), on se dit : à
quoi bon ? A quoi bon développer toute cette argumentation si l'on n'a même pas posé de question
fondatrice ? Tout ce en quoi je croyais n'a plus de sens ! Etc. Pas de panique : il faut simplement
comprendre que le système éducatif est différent et que le mode de pensée l'est donc aussi. Aux
Etats-Unis, on vous demande de prendre position, de formuler une thèse personnelle et originale,
puis de l'argumenter, paragraphe après paragraphe. Je pense que chacun a beaucoup à apprendre de
ce type d'exercice qui oblige à se concentrer sur la cohérence et la clarté de nos travaux.
Concernant le système de notation, je n'ai pas grand chose à dire. Sachez simplement que
vous serez notés sur 100 et qu'à la fin de chaque semestre on vous attribuera une moyenne A, B C,
D etc. L'ensemble de vos moyennes détermine votre GPA : votre moyenne finale, une note sur 4.
Comme à Sciences Po, vous aurez des midterms et des finals. Contrairement à Sciences Po, vous
n'aurez pas à aller jusqu'à Villepinte mais vous passerez tranquillement vous examens à Pitt. En
fonction des professeurs, vous aurez plus ou moins de notes et les formes d'évaluation sont très
variées : quizz, short answers, take-home essays, exposés oraux, examens par internet etc. Comme
partout, la charge de travail varie d'un extrême à l'autre en fonction des professeurs... si vous ne
voulez pas vous ennuyer, n'hésitez pas à prendre des cours qui vous semblent peut-être difficiles,
vous ne le regretterez pas. Ne vous arrêtez SURTOUT PAS à la barrière de la langue : les
professeurs savent que vous êtes un international student, ils en tiennent compte dans la notation.
Personne ne s'attend à ce que vous parliez comme un natif au bout de 6 mois alors ne pensez pas
que c'est un handicap ! Au contraire, cela peut être un atout. Par exemple, j'ai suivi un cours intitutlé
Political parties and elections (aux US) et le professeur a beaucoup valorisé le fait que j'apporte un
avis extérieur : comparer les systèmes électoraux américain et français, les modes de scrutins, la
culture politique etc. Cela rend certaines questions encore plus intéressantes : loin d'être un
challenge, c'est un plaisir !
3) Apport personnel de mon expérience
D'un point de vue général, je suis très satisfaite par l'enseignement dont j'ai bénéficé à Pitt.
La richesse et la variété des cours sont un atout : j'estime que j'ai beaucoup appris, à la fois sur des
sujets larges et d'autres plus précis. Etudier dans une université américaine est certainement un
atout : le fait que la plupart des cours se base sur des lectures permet d'aborder une grande quantité
de textes en un court laps de temps. J'aime l'idée d'aller aux sources plutôt que de laisser les sources
venir à nous, comme c'est le cas dans certains cours. Le professeur ne se contente pas de résumer la
thèse d'un auteur ou de donner un aperçu de différentes théories ; au contraire, l'élève découvre et
juge ces thèses par lui-même. L'apprentissage se fait en deux temps : d'abord un apprentissage plus
personnel, à la maison, qui permet de prendre son temps et qui est fort propice à la réflexion.
Ensuite, un apprentissage davantage interactif, en classe, qui met à l'épreuve nos convictions, basé
sur la confrontation d'idées. Ces deux temps sont complémentaires et indissociables. C'est grâce à
cela que j'ai beaucoup appris à Pitt, grâce à un apprentissage de fond. Par la même occasion, pour
ceux qui comme moi se plaisent à savourer chaque mot, on apprend à vraiment lire rapidement et
efficacement. On n'a pas le choix : il faut lire ces 500 pages pour demain et il faut être capable d'en
débattre ! Alors on s'y met.
Quant à la culture, j'ai vraiment découvert des choses qui ne peuvent être découvertes qu'en
vivant aux Etats-Unis. Notamment concernant le système politique, j'ai appris à me débarasser de
tous les schémas que j'avais, à faire table rase, et à accepter que les systèmes partisan et électoral
sont différents de tout ce que je connaissais. J'ai appris à ne plus essayer d'appliquer les modèles et
concepts que je connaissais à ce que je voyais, mais à en créer de nouveaux. Comprendre et
admettre cette diversité est finalement très agréable. Par exemple, saisir pleinement la relativité des
concepts de « gauche » et « droite » en politique, ou encore se plonger dans les (nombreux) travers
de la démocratie américaine et toutes ses étrangetés : les caucus, les superdelegates, le côté reality
show totalement assumé des élections présidentielles etc. Dans un tout autre registre, ma 3A m'a
plongée au cœur de la vie de la white middle classe américaine, l a fameuse middle class. Mon
meilleur ami est un américain de Fox Chapel (banlieue de Pittsburgh) :
catholiques, blancs,
démocrates, avec le sens de l'humour et de l'accueil, le goût des traditions et de la bonne chaire et
une grande curiosité pour les européens. Cette charmante famille m'a adoptée à peine quelques
semaines après mon arrivée. J'ai tout fait : les anniversaires des frères, des oncles, des tantes et des
grand-mères ; Thanksgiving avec son lot de turkey, pecan pie et football à la télévision ; Easter avec
la messe traditionnelle, la chasse aux œufs et la nourriture qu'on ne finit jamais ; le Superbowl avec
Beyonce sur grand écran, les wings et les pubs sans queue ni tête. J'ai rencontré tout le monde et
parlé de tout, j'ai fait comme tout le monde, je me suis fondue dans la masse. Et c'était génial !
Immersion totale et sans corde de rappel dans la vie des suburbs, la vie normale.
Enfin, après deux semestres passés en Pennsylvanie, quel plaisir de parler en anglais. De
parler, et surtout de comprendre. Quel plaisir de se surprendre soi-même par des automatismes et
autres expressions qui jaillissent sans qu'on les ait demandées. Comprendre et se faire comprendre,
c'est cela ma vraie satisfaction. Parce que sans s'en rendre compte, on l'a fait, on a réussi à s'intégrer,
à faire partie de ce tout duquel on s'était senti si étranger au début. On n'est pas si différent qu'en
partant mais on a quelque chose en plus. En tout cas j'imagine qu'on a plus confiance en soi et que
nos horizons se sont élargies. On repart avec des amis aux quatre coins du monde, en Turquie, en
Thaïlande, en Europe et bien sûr aux Etats-Unis : je pense qu'on acquiert une vision plus globale
des choses. Quand je retournerai rue Saint Guillaume, je n'oublierai pas ma vie sur l'autre rive de
l'Atlantique : la 3A nous rend plus complet. Ainsi, on est plus à même de s'orienter, de choisir notre
master. J'hésitais beaucoup entre l'école d'affaires publiques et la PSIA. J'ai finalement choisi la
PSIA, en International Public Management. Je sais que je ne regretterai pas ce choix et même si
partir amène toujours son lot de chagrin, j'attends l'année prochaine avec impatience.
Annexes
Visa
L'université vous enverra un colis avec tous les papiers nécessaires. Munis de ces documents, il faut
prendre rendez-vous à l'ambassade des US où vous devrez répondre à quelques questions. Assurezvous d'aller sur leur site auparavant et d'effectuer toutes les démarches en ligne, sinon vous devrez
prendre à nouveau rendez-vous. Gardez à l'esprit qu'il y a beaucoup, beaucoup de frais : il faut
payer pour prendre rendez-vous, payer pour le visa, payer pour remplir le document de la SEVIS...
Gardez votre carte de crédit à portée de main et... gardez le sourire !
Cours
Pour choisir vos cours, vous recevrez un email de l'université qui vous explique la procédure step
by step. En fait, il vous suffit de choisir vos 4 cours (12 crédits ; 3 par cours) ou plus et d'envoyer
les références à votre référent (la personne de l'International Office qui vous aura contacté). Cette
personne s'occupe de vous inscrire à votre place. Si vous êtes sur liste d'attente pour certains cours,
n'hésitez pas à aller voir le professeur en personne et à lui demander d'intégrer quand même le cours
(surtout que beaucoup d'élèves abandonnent en cours de route...). Vous avez différentes dead lines
pour vous désincrire d'un cours qui ne vous plaît pas mais n'attendez pas, sinon vous perdrez les
crédits. Pour vous faire une idée, la première semaine de cours est une semaine test durant laquelle
vous pouvez assister à tous les cours que vous voulez et garder ceux qui vous plaisent. Toutefois,
étant donné que les places sont limitées, je vous conseille de bien réfléchir pour avoir dès le début
des cours qui vous plaisent (mais on n'est pas à l'abri d'une mauvaise surprise).
Logement
Deux possibilités s'offrent à vous : on campus o u off campus. On campus signifie que vous êtes
logés dans un des dorms de l'université. Vous pouvez formuler des choix sur le type de chambre
que vous voulez mais c'est surtout du hazard : j'ai eu la chance d'avoir une chambre single, sans
collocataires. Par contre, pas de cuisine... Mais que vous logiez ou non off campus, vous êtes
obligés d'acheter un forfait pour le self (et comme je ne sais pas cuisiner ce n'est pas plus mal!). La
demande pour le logement on campus se fait en ligne. Si vous choisissez d'être off campus, vous
vous débrouillez pour trouver un logement. Les quarties South et North Oakland (à deux pas de
l'université) regorgent de maisons occupées par des étudiants. A condition de trouver des collocs,
c'est tout à fait viable !
Transports
Le réseau de transports est très performant à Pittsburgh et surtout à Oakland. Grâce à votre carte
étudiante, tout est gratuit. Oui, totalement gratuit et ça change de Paris... En fait, votre carte
étudiante vous offre plein de services gratuits : transports, musées, réductions dans des magasins de
vêtements etc. Gardez-la toujours avec vous !
Voyages
Pittsburgh est à la croisée des chemins. Grâce aux autobus (Megabus, Greyhound sont les
principales companies), avions, location de voiture etc, il vous est possible de vous déplacer assez
facilement, faites-le ! Les voyages font partie de la 3A, voici ce que j'ai fait, si cela peut vous
inspirer :
–
New York
→ Un weekend de 4 jours en septembre + 1 semaine à Noël (passer Xmas là-bas est super,
l'ambiance vaut le détour)
→ Aller/retour en bus
–
Bryce National Park + Flowerpot Island (Canada) + Niagara Falls
→ Magnifique en septembre, faites-y un tour avec des amis... et passez par les chutes du
Niagara, c'est sur le chemin !
→ Voiture de location
–
Washington DC
→ A voir parce que c'est Washington. Mais je n'ai pas trouvé cela renversant.
→ 5 Jours, bus depuis New York
–
Philadelphie
→ Quelques jours suffisent... J'ai adoré cette ville, bien plus intéressante que Washington.
Le centre historique recelle de surprises, les galeries d'art, la nourriture... je suis tombée sous
le charme.
→ 4 jours, bus depuis Washington
–
Miami
→ Spring Break oblige, direction Miami. Super pour vous relaxer sur la plage avec un
mojito, danser dans des clubs assez dingues, faire le plein de palmiers et de coups de soleil.
Je détesterai y vivre, c'est beaucoup trop superficiel et on a parfois l'impression d'être dans
un flipper géant. Mais the place to be pour passer la semaine de vacances début mars.
→ avion
–
Nouvelle Orléans + bayous de Louisiane (Houma, Lafayette etc)
Faites cap vers le Sud. C'est génial, surtout après avoir passé un an dans le nord-est. En plus
d'être magnifique, vous plongez au cœur de l'ambiance si particulière du Sud, où le GOP est
roi. La Louisiane est particulière avec son mélange d'ambiance cajun et créole. Allez-y pour
la beauté des bayous, les gens d'une gentillesse sans pareil, les alligators, les écrevisses et la
jambalaya, le jazz, la folie de la Nouvelle Orléans, et le parlé cajun auquel vous ne
comprendrez rien. J'y retournerai, c'est sûr !
→ une voiture est nécessaire... sauf si vous décidez de rester à la Nouvelle Orléans mais ce
serait dommage de se priver de la beauté des bayous... et allez voir les anciennes plantations
de canne-à-sucre !
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Les parcs nationaux
Je suis actuellement à Yellowstone, sûrement le plus bel endroit sur terre. Je ne peux que
vous conseiller de finir en beauté par un road trip. Le programme est le suivant : faire tous
les parcs du Montana à Washington (l'état, pas la ville!) et finir par Portland, Seattle et
remonter jusqu'à Vancouver. Et puis retour à Paris...