Petite histoire du théâtre au Maroc

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Petite histoire du théâtre au Maroc
Petite histoire du théâtre au Maroc
Le choix du thème de Molière pour cette 4ème édition du festival « Art et cultures » n'est pas
fortuit. Dramaturge et comédien indétrônable, Molière a réussi à faire de la comédie une
peinture des mœurs adaptée à tous les lieux et à tous les temps. Jusqu'au bout de sa vie, il a
eu le courage d'attaquer les hypocrites, les faux dévots, les séducteurs éhontés, les médecins
incultes, les esprits à la mode, les femmes incultes et les bourgeoises. Selon les organisateurs
du festival, en tant qu' «
auteur, acteur et metteur en scène, Molière a marqué l'histoire du théâtre universel
». Le théâtre marocain n'a pas été en reste. Bon nombre de dramaturges ont été inspirés par
l'œuvre de Molière dont les deux grandes figures du théâtre populaire national, Tayeb El Alj et
Tayeb Saddiki à qui il est rendu hommage au cours de cette édition.
De « la Baraque » à « Masrah Annas »
Tayeb Seddiki et Tayeb Laalaej, comme l'autre grand que fut Larbi Doghmi, ont appris les
ficelles du métier au centre d'expression et de théâtre « la Baraque », créé en 1952 sous la
direction d'André Voisin. Le Maroc d'alors est sous protectorat français et ne possède pas de
tradition théâtrale. Pendant plusieurs années, ce centre assure la formation de dizaines
d'aspirants comédiens. Des répétitions quotidiennes et des stages dans la forêt de la
Maamora, près de Rabat, permettent de monter un certain nombre de spectacles. Ces stages
ponctuels accueillent des Marocains de tous bords et contribuent à former une génération de
comédiens et de metteurs en scène auxquels il est revenu la lourde tâche de créer un théâtre
marocain. Montée en 1956, une troupe s'est même transportée à Paris et à Bruxelles pour jouer
deux comédies, «
les
Balayeurs
» et «
les Fourberies de Joha
». Après l'indépendance, et dans les années 60, plusieurs troupes se forment mais sans donner
naissance à un théâtre digne de ce nom. Le rejet, car étant celles de l'ancien colonisation, de la
langue et de la culture françaises, n'en facilitent pas l'émergence. Tayeb Seddiki, qui appartient
à cette première génération, s'illustre toutefois dans les années 60-70 avec son «
Masrah Annas
» (Théâtre des gens). Celui-ci a tenté d'exploiter la seule forme qui s'apparente au genre
théâtral dans la culture marocaine, à savoir la «
halqa
», ce lieu de paroles où des conteurs traditionnels haranguent la foule attroupée, rappelant en
cela les troubadours du Moyen Age. L'œuvre la plus marquante de Tayeb Seddiki reste
cependant «
Diwan Sidi Abderrahmane El Mejdoub
» (1967), chronique d'un mystique du 16ème siècle marocain.
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Petite histoire du théâtre au Maroc
Une évolution en dents de scie
Les années 60-70 sont également marquées par le développement d'un théâtre amateur et
engagé, nourri des idées d'extrême gauche. Dans une atmosphère générale de contestation
politique, en l'absence de tout encadrement et de toute formation aux techniques de la scène,
des troupes d'amateurs ont fleuri un peu partout dans les villes. Malgré sa dimension épique, ce
théâtre laissa, pour l'essentiel, le public marocain indifférent.
Dans les années 80, une nouvelle expérience, similaire à celle des années 50, est lancée par
les centres culturels français en collaboration avec les facultés. Des troupes franco-marocaines
se forment dans quelques grandes villes, encadrées par des animateurs de théâtre français,
formés à l'école du TNP (Théâtre national populaire de Jean Vilar). L'expérience rencontre du
succès auprès des étudiants et du public francophone. Mais les années 90 connaissent le
déclin de cette coopération, découragée par le manque de soutien étatique.
Durant sa courte histoire, le théâtre marocain n'a jamais fonctionné dans le cadre d'une
continuité programmée, qu'il s'agisse d'une politique théâtrale ou d'animation culturelle. Malgré
la création de l'Institut d'art dramatique et de l'animation culturelle (ISADAC) au milieu des
années 80, cinquante ans après ses premiers pas, le théâtre national peine à s'ancrer en tant
qu'activité artistique à part entière, Ces dernières années toutefois ont connu l'émergence d'une
nouvelle génération de créateurs qui œuvrent sans relâche aux côtés des pionniers pour
présenter des œuvres dramatiques qui parlent au public marocain.
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