Synthèse_Le dispositif des adultes-relais à Paris

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Synthèse_Le dispositif des adultes-relais à Paris
Le dispositif des adultes-relais à Paris
Le Contrat urbain de cohésion sociale de Paris signé en 2007 prévoyait de renforcer le lien social en
soutenant les initiatives des habitants et la vie associative locale notamment en termes d’ « accès au
droit, de médiation, de développement d’animations locales, d’accueil des vieux migrants ».
Le dispositif des adultes-relais, dont les missions sont destinées à améliorer « les rapports sociaux
dans les espaces publics ou entre les habitants et les services publics » des quartiers de la politique
de la ville et à participer au développement du lien social, préexistait au CUCS. Depuis 2007, le
nombre d’adultes-relais à Paris n’a cessé de progresser et, au total à la fin de l’année 2009, 260
postes devraient être conventionnés.
En 2008, le bureau d’études FORS-recherche sociale a été missionné par la préfecture de Paris afin
de mener une enquête exhaustive auprès des bénéficiaires des postes d’adultes-relais et des
partenaires impliqués dans le suivi du dispositif.
Un double objectif était poursuivi. Il s’agissait d’établir un état des lieux précis de l’usage du dispositif
à Paris (profil des associations employeurs et des adultes-relais recrutés, contenu des postes) et
d’évaluer l’impact du dispositif dans les quartiers.
La présente note est une synthèse du rapport final rendu en juillet 2008 par le bureau d’étude FORSrecherche sociale, complétée par des données de la Préfecture de Paris et de la DPVI pour l’année
2009. Elle se compose d’abord d’une description du fonctionnement du dispositif et de son
financement par l’Etat et par la Ville de Paris, puis d’une présentation des associations employeurs,
des adultes relais et de l’impact du dispositif.
Méthodologie
Deux types d’enquête ont été menées, une enquête par questionnaire envoyée à la totalité des
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structures associatives qui emploient des adultes-relais sur Paris et une enquête qualitative par
entretiens auprès d’une quarantaine d’adultes-relais. Des entretiens complémentaires ont également
été conduits auprès des Délégués de l’Etat et d’Equipes de développement local, et des institutions,
en lien direct ou indirect avec les associations, ont été sollicitées (CAF, PMI…).
CONTEXTE
Créé en 1999 par le Comité Interministériel des Villes (CIV), le dispositif adulte-relais à une visée
d’utilité sociale. Il s’agit avant tout d’une mesure de la politique de la ville qui doit répondre aux
besoins des habitants des quartiers prioritaires.
Les associations qui sollicitent un poste d’adulte-relais doivent justifier de leur demande à travers le
dépôt d’un dossier présentant notamment le projet de l’association et le quartier d’intervention. C’est
sur la base de ces éléments que la préfecture accordera ou non le poste d’adulte-relais.
Les instructions ministérielles ont à ce titre pris en compte les spécificités locales, en laissant aux
préfets une marge d’appréciation dans l’instruction des demandes de postes adultes-relais et dans le
pilotage du programme.
La création d’un poste d’adulte-relais doit faire l’objet d’une convention préalable passée entre
l’employeur, qui exerce dans le secteur non lucratif (association ou collectivité), et l’Agence Nationale
pour la Cohésion Sociale et l’Egalité des Chances (ACSE), représentée par le délégué départemental.
A Paris, les premières conventions ont été signées en 2000 par des associations.
La durée de la convention est de trois ans renouvelable deux fois. Elle permet à l’employeur de
bénéficier d’une aide financière annuelle, dont le montant s’élève à 80% du SMIC (charges sociales
incluses), soit 20 572 euros par pour l’Etat. Le versement est effectué par l’ACSE qui en a confié la
gestion à la CNASEA, établissement public national. La Ville de Paris cofinance également une partie
des postes d’adultes relais, à hauteur de 20% du SMIC (charges sociales incluses).
1
112 associations sur les 130 bénéficiant de conventions adultes-relais ont répondu, ce qui représentait, en juin 2008, 191
adultes-relais sur un total de 210 adultes-relais en poste
1
Evolution du financement du dispositif adultes-relais de 2007 à 2009 pour l’Etat et la Ville de Paris
Financement du dispositif adultes relais à Paris
au 20 octobre 2009 (milliers d'euros)
4 856
4 578
5 000
4 500
Nombre de postes d'adultes-relais conventionnés à Paris
au 20 octobre 2009
250
234
229
3 954
200
203
4 000
Etat
3 500
Ville de Paris
3 000
2 500
100
2 000
1 500
542
542
508
1 000
Etat
150
Ville de Paris
124
114
113
50
500
0
0
2007
2008
2009
2007
2008
2009
Avec près de quatre millions d’euros versés en 2007 et près de cinq millions d’euros en 2009, l’Etat a
consacré environ la moitié de son budget annuel au titre de la politique de la ville à Paris au
financement du dispositif adultes-relais (budget annuel constant de 9 683 169 euros de 2007 à 2009).
Pour la Ville de Paris, les financements d’une partie des postes d’adultes-relais – 113 postes en 2007,
114 en 2008 et 124 en 2009 – représentent plus de 500 000 euros par an (541 774 euros en 2009).
Au 20 octobre 2009, sur le contingent de 260 postes dont bénéficient les quartiers prioritaires
parisiens, 234 sont honorés et répartis sur 139 associations. Les projets en cours d'instruction et ceux
proposés par les délégués du préfet d'ici la fin de l'année 2009 permettront d'atteindre l'objectif des
260 postes.
I. LES ASSOCIATIONS EMPLOYANT DES ADULTES-RELAIS
Des structures de petite taille
La majorité des associations sont des structures de petite taille puisque 75 % d’entre elles comptent
moins de dix salariés. Les adultes-relais représentent près de la moitié de l’effectif salarié des
associations (44 % en moyenne) et l’on constate également que plus la structure est petite, plus son
budget est dépendant du dispositif.
Des thématiques d’intervention variées avec une dominante socio-culturelle
Le tissu associatif parisien est assez diversifié, avec des thématiques d’intervention multiples. Les
associations enquêtées déclarent intervenir sur quatre thématiques en moyenne.
Thématiques d’intervention
Activités culturelles (interculturelles)
Formation, insertion, accès à l’emploi
Citoyenneté et accès aux services publics
Accès au Droit
Education
Prévention sociale et sanitaire
Activités sportives, loisirs
Environnement et cadre de vie / Lien social / Vie de quartier
Logement
Tranquillité publique
Activités touristiques
Nombre
d’associations
%
72
71
62
58
58
50
34
30
15
7
2
64%
63%
55%
52%
52%
45%
30%
27%
13%
6%
2%
La majorité des associations intervient dans les champs de la culture et de l’insertion (cités par 64% et
63 % des associations). Les autres domaines d’intervention fréquents des associations concernent
notamment l’accès aux services publics et l’accès au Droit et l’Education (cités par plus de 50 % des
associations).
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II. LES ADULTES- RELAIS
Des critères de recrutement globalement respectés
Trois critères conditionnent le recrutement sur un poste d’adulte-relais. Ces critères sont dans les faits
globalement respectés :
- être âgé de 30 ans au moins > 5 % seulement des adultes-relais ont moins de 30 ans et ont
bénéficié de dérogation de la Préfecture pour leur embauche ;
- être sans emploi ou précédemment employé en contrat aidé > 62 % étaient précédemment au
chômage (35 % depuis plus d’un an et 27 % depuis moins d’un an) et 18 % en contrat aidé ; 14 %
étaient bénéficiaires du RMI ou d’un autre minima social, 4 % étaient inactifs et 3 % étaient
stagiaires de la formation professionnelle ou étudiants ;
- résider en zone urbaine sensible ou dans un autre quartier prioritaire de la politique de la ville
> 81 % habitent dans un quartier politique de la ville, mais cette donnée repose sur des éléments
déclaratifs et certains AR ont pu déménager depuis leur embauche ; parallèlement, certaines
associations ont fait part de leurs difficultés à respecter scrupuleusement ce critère ;
Le profil des adultes-relais
Sur 191 adultes-relais interrogés dans le cadre de l’enquête FORS réalisée entre avril et juin 2008, il
est intéressant de relever les caractéristiques suivantes :
- 70% sont des femmes ;
- plus du quart sont de nationalité étrangère (26,5 %), ce qui est légèrement supérieur à la proportion
d’étrangers dans les quartiers prioritaires parisiens (22 % en 1999) ;
- près de la moitié ont au moins un Bac+3 (49 %) alors qu’en 1999, 20,9 % des habitants des quartiers
inscrits au CUCS étaient sans diplôme ;
La médiation sociale et culturelle, activité principale des adultes-relais
Au sein des associations, les adultes-relais assurent tous types de médiation et d’accompagnement
social (activité interculturelle, sanitaire, aide scolaire…).
On constate que pour une très large majorité des adultes relais (89 %), la médiation reste l’activité
principale (en moyenne 35% de leur temps de travail). Il s’agit de créer ou de rétablir de la
communication, de la compréhension entre les individus, entre les habitants et les institutions dans de
nombreux champs de la politique de la ville.
À Paris, les adultes-relais actuellement en poste se positionnent avant tout comme des médiateurs
sociaux et culturels en tant qu’ « ils facilitent l’accès aux droits, favorisent le dialogue entre les cultures
et les générations par des activités support et font évoluer les relations de sociabilité et des services
publics présents » (Centre de Réalisation et d’Etude pour la Planification, l’Aménagement et l’Habitat
– CREPAH 2004). Ces données confirment ainsi la mission et le rôle dévolus aux adultes-relais lors
du CIV de 1999.
Le rapport réalisé par le bureau FORS souligne la proximité du travail effectué par les adultes relais
avec celui des travailleurs sociaux mais il relève également que « la médiation sociale innove et se
distingue des formes traditionnelles du travail social, en privilégiant la souplesse, la proximité et la
neutralité comme principes d’action ».
(tableaux récapitulatifs page 26 et 36 du rapport)
De l’accompagnement professionnel à la sortie du dispositif
L’accompagnement professionnel des adultes relais se fait principalement en interne, par un
responsable hiérarchique ou lors de réunions d’équipe. Selon le rapport FORS, 73% des associations
ont mis en place une évaluation de l’activité des adultes relais.
La validation des acquis de l’expérience (VAE) est également une possibilité de formation, mais elle
reste compliquée et les adultes relais manquent de temps à y consacrer.
La sortie du dispositif s’avère difficile à la fois pour l’adulte relais mais aussi pour l’employeur. Les
adultes relais s’inquiètent de leur avenir professionnel compte tenu de la précarité de leur statut. Ils
connaissent la difficulté de valoriser leur expérience auprès des professionnels. Les employeurs,
quant à eux, sont contraints à se séparer d’un médiateur expérimenté et compétent, qu’il faudra
remplacer et former parfois pendant plusieurs années.
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III. L’IMPACT DU DISPOSITIF DES ADULTES-RELAIS SUR LES QUARTIERS
La difficile mesure de l‘impact d’une action d’utilité sociale
Les associations interrogées pointent les difficultés à évaluer l’impact d’une action d’utilité sociale et le
travail de médiation des adultes-relais qui se révèle généralement immatériel. Pour autant, 88 %
d’entre elles effectuent un bilan d’activité avec des indicateurs qui concernent le plus souvent la
fréquentation mais également le type ou les motifs de médiation (renseignés respectivement par 45 %
et 36 % des associations). Selon FORS, le bon taux de retour des questionnaires illustre toutefois la
volonté des associations de rendre compte et de démontrer l’utilité de leur action sur le terrain.
Une amélioration de la lisibilité et de la compréhension des dispositifs pour le public
Les adultes-relais font un travail important de décodage et d’explication qui s’effectue le plus
fréquemment en amont. Cette préparation facilite le travail des institutions en leur permettant de se
recentrer sur leur cœur d’activité et la relation services / usagers s’en trouve apaisée.
Ainsi, 70 % des associations interrogées pensent contribuer fortement à la responsabilisation et à
l’autonomie des usagers, grâce à l’activité des adultes-relais :
« On améliore la lisibilité des dispositifs pour le public et on facilite leur accès aux droits »
« On arrive à être identifié par les professionnels pour apporter des réponses qu’ils n’ont pas »
Un maillage du territoire important qui renforce la cohésion sociale
Le tableau ci-dessous montre la répartition des adultes-relais sur le territoire parisien au 20 octobre 2009.
Arrondissements
Nombre
d’adultes-relais en poste
10
11
13
14
17
18
19
20
Paris (non territorialisé)
Total
19
23
23
10
10
56
33
40
20
234
Il présente des données plus récentes que
celles fournies par les associations lors de
la réalisation de l’enquête au printemps
2008 (tableaux page 43 du rapport).
Deux facteurs permettent d’expliquer les
créations et la répartition des postes
d’adultes-relais. Il s’agit
notamment de
l’histoire de la politique de la ville, avec des
quartiers entrés plus ou moins tôt dans les
différents dispositifs, et du dynamisme du
tissu associatif local.
La proximité géographique et la disponibilité des adultes-relais sur les territoires prioritaires
contribuent à rendre visibles certaines populations comme les personnes âgées isolées ou certaines
communautés repliées sur elles-mêmes. Ils jouent en cela un rôle de veille et de mobilisation des
autres professionnels. « On a un impact direct sur les habitants. On renoue le lien social. On les sort
de leur isolement. En participant à l’animation du quartier, lors d’évènements notamment, on crée du
lien, du contact, de l’échange. »
Une Equipe de développement local précise aussi leur rôle et leur reconnaissance parmi les acteurs
locaux : « Les AR sont bien insérés dans le réseau d’acteurs locaux. Ils sont présents, visibles voire
incontournables. Ils sont devenus un rouage essentiel. »
CONCLUSION
Si le rapport du bureau d’études FORS conclut sur l’ « utilité sociale » et l’efficacité de la fonction de
médiation opérée par les adultes-relais, de par son soutien à la vie associative et son rôle dans
l’implication citoyenne des habitants, il souligne également la nécessité de renforcer
l’accompagnement professionnel pour faciliter la sortie du dispositif des adultes-relais et des
associations.
La mise en œuvre en 2010, par l'ACSÉ, d'un dispositif local d'accompagnement (DLA) afin
d'accompagner les employeurs volontaires pour s'engager dans une démarche de consolidation
économique de leurs activités et d'un plan d'accompagnement professionnel (préparation à la
médiation, bilan de compétence et accompagnement à la validation des acquis de l’expérience)
devrait notamment permettre de faciliter l'insertion professionnelle des adultes-relais.
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