Cas pratique N. Levillain

Transcription

Cas pratique N. Levillain
CORRIGÉ D’EXAMEN FAMILLE
SUCCESSION-PARTAGE
1307
Liquidation de la succession, succession
volontaire
Le présent cas pratique propose de liquider le régime matrimonial puis les successions
confondues de deux époux qui avaient consenti une donation-partage conjonctive à leur deux
enfants communs. Une telle liquidation présente des difficultés particulières lorsque, comme
en l’espèce, les deux décès sont survenus à des dates éloignées l’une de l’autre.
Cas pratique rédigé par :
NATHALIE LEVILLAIN, diplôme supérieur de Notariat
➜ ÉNONCÉ DU SUJET
Jean et Lucien Dubois vous consultent après le décès de leur mère,
Mme Martine Héroux veuve de M. Léon Dubois, afin de procéder à la
liquidation et au partage des successions de leurs deux parents. À cet
effet, ils vous exposent ce qui suit.
1. Mariage - Contrat de mariage
M. et Mme Dubois s’étaient mariés sans contrat le 10 juin 1966.
Au jour du mariage, M. Dubois était propriétaire d’un studio à Paris ;
Mme Dubois, qui vivait chez ses parents ne possédait rien. Les époux se
sont installés dans le studio de M. Dubois.
2. Opérations réalisées pendant le mariage
En 1967, à la naissance de leur premier enfant, M. et Mme Dubois ont
décidé de vendre le studio pour acheter un appartement plus grand toujours à Paris. Le coût total d’acquisition - prix et frais - d’un montant de
150 000 F a été financé à concurrence de 80 000 F au moyen du prix de
vente de l’appartement de M. Dubois et pour le surplus au moyen d’un
prêt, rapidement remboursé au cours du mariage. L’acte d’acquisition
contenait une clause de remploi.
À l’occasion de cette acquisition, le notaire avait conseillé à M. et MmeDubois de se consentir une donation entre époux, conseil qu’ils ont suivi.
En 1978, M. et Mme Dubois ont acquis une maison à Deauville au
moyen de leurs économies.
En 1982, M. Dubois a recueilli dans la succession de ses père et mère,
un immeuble de rapport à Boulogne-Billancourt. Le patrimoine recueilli
par succession étant principalement immobilier, M. Dubois a demandé
le paiement différé et fractionné des droits de succession, qu’il a acquittés
progressivement au moyen de ses gains et salaires. Les immeubles reçus
par succession étaient évalués à 1 200 000 F dans la déclaration de succession et le montant des droits de succession s’est élevé à 180 000 F.
LA SEMAINE JURIDIQUE - NOTARIALE ET IMMOBILIÈRE - N° 30-34 - 27 JUILLET 2012
En 1986, M. et Mme Dubois ont acquis un chalet à Avoriaz. Le prix de
vente a été payé pour partie comptant et pour le surplus au moyen d’un
prêt entièrement remboursé au décès de M. Dubois.
En 1992, Mme Dubois a recueilli dans la succession de son père, une maison et un terrain à bâtir sis au Vésinet. Les droits de succession ont été
acquittés au moyen des liquidités de la succession.
En 2003, M. et Mme Dubois ont consenti une donation-partage conjonctive à leurs deux enfants. Chaque donateur a alloti les donataires copartagés à concurrence de moitié.
La masse à partager comprenait les biens suivants :
- la maison du Vésinet, évaluée à 300 000 euros ;
- l’immeuble de rapport à Boulogne-Billancourt, estimé à 500 000 euros ;
- le terrain à bâtir sis au Vésinet, évalué à 200 000 euros.
Jean s’est vu attribuer la maison et le terrain du Vésinet, Lucien a reçu
l’immeuble de rapport.
L’application de l’article 1078 du Code civil n’a pas été écartée dans l’acte
de donation-partage.
En janvier 2012, Mme Dubois a recueilli dans la succession de sa sœur un
appartement à Lyon. Les droits de succession ont été acquittés au moyen
des liquidités de la succession.
3. Succession de M. Dubois
M. Dubois est décédé le 6 avril 2011, laissant à sa survivance ses deux
enfants et son épouse, donataire de la quotité disponible entre époux.
Mme Dubois a opté pour l’usufruit de la succession, ne souhaitant pas
avoir de droits en propriété.
Au décès de M. Dubois, les époux étaient propriétaires des biens suivants,
évalués au jour de ce décès :
- l’appartement à Paris, dans lequel M. et Mme Dubois vivaient. Ce bien
est estimé à 600 000 euros ;
- la maison de Deauville, d’une valeur de 310 000 euros ;
- le chalet d’Avoriaz, estimé à 280 000 euros ;
- le mobilier garnissant ces différents biens, évalué à 29 000 euros.
Au décès, les époux n’avaient pas de passif. Les frais funéraires se sont
évalués à 8 000 euros.
M. Dubois n’a consenti aucune autre libéralité que la donation-partage
et la donation entre époux.
Une déclaration de succession a été déposée au décès de M. Dubois mais
il n’a été procédé à aucun partage.
Page 41
1307
1307
4. Succession de Mme Dubois
Mme Dubois est décédée le 25 juin 2012, laissant pour recueillir sa succession ses deux fils. On retrouve dans son patrimoine les mêmes biens
que ceux existant au décès de M. Dubois ; toutefois ces biens ont changé
de valeur, à l’exception du mobilier dont la valeur est restée constante :
- l’appartement à Paris est évalué à 660 000 euros ;
- la maison de Deauville a une valeur de 330 000 euros ;
- le chalet d’Avoriaz est estimé à 300 000 euros ;
- l’appartement de Lyon est estimé à 250 000 euros.
Les frais funéraires sont d’un montant de 11 000 euros.
Comme son défunt époux, Mme Dubois n’a consenti de son vivant aucune autre libéralité entre vifs que la donation-partage. Cependant, par
testament authentique en date du 20 février 2012, elle a légué à son fils
Lucien, qui s’est occupé d’elle jusqu’à la fin de ses jours, l’appartement de
Lyon, reçu dans la succession de sa sœur en janvier 2012.
Liquider les successions des époux Dubois et faire des propositions d’attribution, sachant que les valeurs des biens n’ont pas changé entre le
décès de Mme Dubois et le partage.
➜ SOLUTION PROPOSÉE
En présence d’une donation-partage conjonctive faite à des enfants
tous communs, les opérations de liquidation et partage se font après
le décès du survivant des deux parents. On procède alors à la liquidation des deux successions confondues après avoir liquidé le régime
matrimonial des époux donateurs. En raison de sa complexité, cette
liquidation appelle de nombreuses observations.
OBSERVATIONS PRÉALABLES
A. - Liquidation du régime matrimonial
Régime matrimonial des époux Dubois. - Les époux Dubois se sont
mariés sans contrat le 10 juin 1966. Ils sont par conséquent soumis
au régime légal de la communauté réduite aux acquêts régie par les
articles 1401 et suivants du Code civil.
Dates de dissolution et date d’évaluation des biens et des récompenses. - La communauté ayant existé entre les époux Dubois est dissoute à la date du décès de M. Dubois. C’est à cette date qu’est arrêtée
la consistance de la communauté. Le boni de communauté est pris en
compte à trois niveaux :
- lors de la liquidation de la succession de M. Dubois : le partage qui
a pour objet les deux successions confondues n’est fait qu’après le
décès de Mme Dubois. Aussi cette liquidation n’a-t-elle pour but que
de vérifier l’absence d’atteinte à la réserve et se fait-elle à la date du
décès de M. Dubois ;
- lors de la liquidation de la succession de Mme Dubois : le boni de
communauté est également pris en compte pour contrôler l’intégrité de la réserve des héritiers. Il est alors réévalué à la date du décès
de Mme Dubois ;
- lors du partage des deux successions : le patrimoine de la communauté ainsi que les récompenses sont évalués à l’époque du partage.
En l’espèce, les valeurs n’ont pas changé entre le décès de Mme Dubois
et le partage : la valeur partage est donc la même que celle au décès
de cette dernière.
Détermination des biens communs. - Sont communs, en leur qualité d’acquêts, la maison sise à Deauville et le chalet d’Avoriaz, pour
avoir été acquis à titre onéreux pendant le mariage sans qu’il ait été
fait emploi ou remploi de deniers (C. civ., art. 1401).
Par ailleurs, en vertu de la présomption de communauté (C. civ., art.
1402), il convient d’inscrire à l’actif commun tous les biens dont l’oriPage 42
gine n’est pas précisée, soit, en l’espèce, le mobilier.
Détermination des biens propres. - Sont propres aux époux, en leur
qualité de biens présents, les biens dont ils étaient propriétaires au
jour du mariage et, en qualité de biens à venir, ceux qu’ils ont acquis
pendant le mariage à titre gratuit, par succession ou libéralité (C. civ.,
art. 1405).
s Biens propres de Mme Dubois. - Mme Dubois n’a aucun bien
propre, car les biens qu’elle a recueillis dans la succession de son père
ont été donnés à ses enfants.
L’appartement de Lyon est un bien personnel à Mme Dubois, mais ne
peut recevoir la qualification de bien propre car il a été recueilli par
succession en janvier 2012 c’est-à-dire après la dissolution de la communauté par le décès de M. Dubois (6 avril 2011).
s Biens propres de M. Dubois. - Est propre au défunt, en sa qualité
de bien à venir, l’appartement de Paris pour avoir été acquis en remploi du prix de vente d’un studio à Paris, bien propre en sa qualité de
bien présent, la contribution de la communauté (70 000 F) n’ayant
pas excédé celle du patrimoine propre (80 000 F) (C. civ., art. 1406
et 1436).
Récompenses. - Un compte de récompenses doit être ouvert au nom
de chaque époux ou de sa succession (C. civ., art. 1468).
s Compte de récompenses de Mme Dubois : néant
s Compte de récompenses de M. Dubois :
- récompense due par la communauté à M. Dubois : néant ;
- récompenses dues par M. Dubois à la communauté :
a) M. Dubois doit tout d’abord récompense à la communauté à raison du financement partiel par cette dernière du prix d’acquisition de
l’appartement de Paris.
Le principe de cette récompense résulte de l’article 1437 du Code civil
selon lequel « toutes les fois qu’il est pris sur la communauté une somme
soit pour acquitter les dettes et charges personnelles à l’un des époux,
telles que le prix ou partie du prix d’un bien à lui propre… », l’époux
emprunteur en doit la récompense.
Quant à son montant, la récompense est égale au profit subsistant, la
valeur empruntée ayant servi à l’acquisition un bien qui se retrouve,
au jour de la liquidation, dans le patrimoine emprunteur (C. civ., art.
1469, al. 1er et 3 combinés).
S’agissant d’une dépense d’acquisition, la récompense est égale à la
valeur, au jour de la liquidation, de la fraction de l’appartement de PaLA SEMAINE JURIDIQUE - NOTARIALE ET IMMOBILIÈRE - N° 30-34 - 27 JUILLET 2012
CORRIGÉ D’EXAMEN FAMILLE
ris que les deniers communs ont permis d’acquérir. La communauté
ayant financé 70 000 F sur les 150 000 F du coût global d’acquisition,
elle a droit à une récompense égale à 7/15es de la valeur de l’appartement à l’époque du partage soit 7/15es x 660 000 = 308 000 euros.
Pour le calcul de la quotité disponible au premier décès, il faut calculer cette récompense à la date du décès de M. Dubois. L’appartement
valait alors 600 000 euros, de sorte que la récompense est égale à 7/15es
x 600 000 = 280 000 euros.
b) M. Dubois doit ensuite récompense à la communauté à raison
du paiement des droits relatifs à la succession de ses père et mère au
moyen de ses gains et salaires, c’est-à-dire de deniers communs.
S’agissant d’une dépense d’acquisition, le principe de la récompense
résulte également de l’article 1437 du Code civil.
Son montant est de même égal au profit subsistant (C. civ., art. 1469,
al. 1er et 3 combinés), c’est-à-dire à la valeur, au jour de la liquidation,
de la fraction des biens acquis au moyen des deniers communs.
Les biens recueillis ayant été reçus par succession, il n’y a lieu de tenir
compte que de la contribution du patrimoine commun compte tenu
de la valeur des biens acquis à titre gratuit. On n’ajoute pas à cette
valeur le montant des frais, comme ce serait le cas si l’acquisition avait
été faite à titre onéreux1.
Comme ces biens ont ensuite été donnés, la récompense se calcule
par rapport à la valeur du bien au jour de la donation, soit 500 000
euros. La communauté ayant acquitté les 180 000 F de droits de succession qui ont permis à M. Dubois de recueillir un immeuble d’une
valeur de 1 200 000 F, la récompense est égale à : 180 000 / 1 200 000
x 500 000 = 75 000 euros.
Passif de communauté. - Néant.
B. - Successions
Dévolution de la succession de M. Dubois. - Sont appelés à la succession de M. Dubois :
- ses deux enfants, Jean et Lucien : héritiers du premier ordre, au premier degré, qui excluent tout autre parent (C. civ., art 734, 1°). Ils
ont vocation à recueillir ensemble la totalité de la succession, sauf les
droits du conjoint survivant ;
- son conjoint survivant, qui dispose d’une option entre l’usufruit de
la succession et un quart en pleine propriété, le défunt ne laissant
à sa survivance que des enfants communs (C. civ., art. 757). Mme
Dubois ne souhaitant pas, d’après le thème, avoir des droits en propriété, on supposera qu’elle a opté pour des droits en usufruit.
Le conjoint survivant bénéficie, d’autre part, du droit temporaire au
logement et du droit viager au logement (C. civ., art. 763 et 764).
Enfin, Mme Dubois est bénéficiaire d’une donation entre époux et
a déclaré opter pour l’usufruit de la succession. Le bénéfice de cette
libéralité se confond avec ses droits légaux, mais présente l’avantage
1 Ndlr : ce cas pratique figure dans un ouvrage à paraître aux éditions LexisNexis,
Cas pratiques droit de la famille : Liquidation de la succession, succession volontaire.
À propos des droits de succession, Cass. 1re civ., 9 déc. 1986 : D. 1987, p. 433, note
G. Morin. - V. aussi (droits de donation), Cass. 1re civ., 4 juill. 1995 : Bull. civ.
1995, I, n° 290 ; Defrénois 1995. p. 1448, note M. Grimaldi ; JCP N 1996, II, 153,
note J.-F. Pillebout ; RTD civ. 1996, p. 975, obs. B. Vareille.
2 Cass. 1re civ., 16 juill. 1997 : Bull. civ. 1997, I, n° 252 ; D. 1997. somm. p. 370, obs.
M. Grimaldi.
LA SEMAINE JURIDIQUE - NOTARIALE ET IMMOBILIÈRE - N° 30-34 - 27 JUILLET 2012
1307
de lui permettre, si elle le souhaite, de cantonner son usufruit (C. civ.,
art.1094-1, dern. al.).
Dévolution de la succession de Mme Dubois. - Mme Dubois est décédée laissant pour seuls héritiers ses deux enfants, Jean et Lucien, héritiers ensemble pour le tout et divisément chacun pour moitié.
Libéralité entre vifs : donation-partage conjonctive. - Les époux
Dubois n’ont consenti qu’une libéralité entre vifs : une donation-partage conjonctive à leurs deux enfants.
Les lots reçus par donation-partage ne sont pas rapportables2, mais
ils doivent être réunis fictivement à la masse de calcul de la quotité
disponible et de la réserve pour vérifier une éventuelle atteinte à la
réserve. Pour ce contrôle, conformément aux dispositions de l’article
1077-1 du Code civil, il faut procéder à la liquidation de ces deux successions confondues.
La principale difficulté d’une telle liquidation est de déterminer à
quelle date il faut évaluer les biens pour le contrôle de l’intégrité de
la réserve : à chaque décès ? Au second décès ? La question divise la
doctrine3.
Un arrêt récent a écarté l’évaluation à la date de chaque décès pour
adopter la deuxième solution (date du second décès)4.
Or cette méthode n’est pas non plus tout à fait satisfaisante. En effet,
lorsque l’un des donateurs a consenti des libéralités hors part, elle
peut aboutir à leur réductibilité, alors qu’en calculant la quotité disponible et la réserve à chaque décès, il n’apparaitrait aucune atteinte
à la réserve5.
Une troisième méthode a été proposée par la doctrine6. Elle permet
d’éviter les inconvénients de chacune des deux autres méthodes mais
les tribunaux n’ont pas encore eu à se prononcer sur son application.
Cette méthode consiste à calculer la quotité disponible et la réserve
au décès de chaque donateur, sans tenir compte de l’origine des biens
reçus par chaque donataire. Ainsi en l’espèce, chacun des enfants
ayant reçu des biens d’une valeur de 500 000 euros, la réunion fictive
portera sur un lot évalué à 250 000 euros pour chaque enfant à la
succession de chacun des parents. L’acte n’écartant pas l’application
de l’article 1078 du Code civil, les biens donnés sont en effet évalués
au jour de l’acte et non au décès. C’est cette dernière méthode qui a
été retenue dans la liquidation à suivre.
Legs particulier consenti par Mme Dubois. - Mme Dubois a consenti
à l’un de ses fils un legs particulier. Ce legs est présumé hors part
(C. civ., art. 843, al. 2). Il ne pourra pleinement s’exécuter que si les
deux enfants ont reçu leur part de réserve dans les deux successions
confondues ou, à défaut s’il existe des biens existants non légués suffisants pour parfaire leur part de réserve (C. civ., art. 1077-1).
Méthode liquidative. - Préalablement au partage des deux successions confondues, il faut vérifier que chaque héritier a bien reçu sa
3 Sur les discussions doctrinales, V. N. Levillain et M.-C. Forgeard, Liquidation de
successions, coll Dalloz référence, n° 331.52 et s. : Dalloz, 2012-2013.
4 Cass. 1re civ., 16 juin. 2011, n° 10-17.499 : JurisData n° 2011-011613 ; JCP N
2011, n° 36, 1237, obs. V. Zalewski ; AJ famille 2011, p. 443, obs. Ch. Vernières.
5 Pour une comparaison en présence d’un legs particulier consenti par le conjoint
survivant, comme en l’espèce, V. N. Levillain et M.-C. Forgeard, op. cit. note (3),
n° 331.54-1 et 331.54-2.
6 M. Grimaldi (dir.) : Dalloz Action Droit patrimonial de la famille, n° 413.73.
Pour une mise en œuvre de cette troisième méthode : N. Levillain et M.-C.
Forgeard, op. cit. note (3), n° 331.55-1.
Page 43
1307
part de réserve. Pour cela, il faut tout d’abord calculer la part de réserve des enfants dans chacune des successions. Cette part de réserve
doit ensuite être comparée à l’allotissement de l’enfant dans la donation-partage.
S’agissant de cette comparaison, deux méthodes sont proposées7.
La première consiste à comparer à la part de réserve de chaque héritier, le lot reçu par ce dernier dans la donation-partage.
La seconde compare à la part de réserve toutes les avances de parts reçues. - le lot dans la donation-partage et aussi les autres libéralités en
avancement de part successorale - augmentées de la part de chaque
héritier réservataire dans les biens existants au décès de chacun des
donataires set non légués.
En présence d’une donation-partage égalitaire, comme en l’espèce,
les deux méthodes aboutissent à des résultats identiques8. Dans la
liquidation à suivre, il sera fait application de la seconde méthode,
plus facile à mettre en œuvre.
Passif successoral. - Le passif successoral ne comprend qu’un élément pour chacune des successions : les frais funéraires, d’un montant de 9 000 euros dans la succession de M. Dubois et de 11 000 euros
dans celle de son épouse. Il s’y ajoute dans la succession de M. Dubois,
le solde de son compte de récompenses. Ce solde n’apparaît toutefois
pas au niveau de la masse à partager des deux successions confondues, car on procède alors au partage des biens sans tenir compte des
mouvements de valeur entre les patrimoines.
2° Communauté
a) Actif
Valeur
décès
฀ ฀
Valeur
partage
310 000
330 000
280 000
300 000
29 000
29 000
Solde du compte de récompenses
de la succession
355 000
383 000
Ensemble
974 000
1 042 000
974 000
1 042 000
฀
b) Passif (néant)
Actif net de communauté
฀
฀
฀
฀
Est de
1/2
1/2
487 000
521 000
B. - Successions de M. Dubois et de Mme Dubois
1° Contrôle de l’absence d’atteinte à la réserve
a) Calcul de la quotité disponible et de la réserve dans la succession
de M. Dubois
1) Biens existant (évalués à la date du décès de M. Dubois) :
1/2 du boni de communauté
APERÇU LIQUIDATIF
487 000
฀ ฀
600 000
Actif brut existant
A. - Régime matrimonial
1 087 000
2) Passif :
1° Reprises et récompenses
Solde du compte de récompenses en faveur de la
communauté
a) De Mme Dubois
- Reprise : néant.
- Compte de récompenses : néant.
b) De la succession de M. Dubois
- Reprise : Appartement de Paris ;
- Compte de récompenses : Récompenses dues à la communauté par
la succession :9
Valeur
décès
À raison du financement partiel de l'appartement
฀
À raison du paiement des droits de succession
Ensemble
฀
฀
฀ ฀
Solde en faveur de la communauté
355 000
Frais funéraires
฀฀
฀ ฀
363 000
308 000
75 000
75 000
355 000
383 000
0
0
355 000
383 000
363 000
Actif net existant
724 000
3) Réunion fictive :
Valeur
partage9
280 000
8 000
฀฀
฀
฀฀
250 000
฀฀
฀
฀฀
250 000
Total
500 000
4) Masse de calcul :
Actif net existant au décès
724 000
฀
500 000
Total
1 224 000
฀ ฀
฀
฀ ฀
฀
1/3
408 000
Est de
7 Exposé des deux méthodes : M. Grimaldi, Libéralités, Partage d’ascendants :
LexisNexis, 2001, n° 1823. - V. également, M. Grimaldi, op. cit., n° 413.21 et s. ;
JCl. Civil Code, art. 1075 à 1080, fasc. 40, par M. Grimaldi. - V. également, N.
Levillain et M.-C. Forgeard, op. cit. note (3), n° 331.22.
8 N. Levillain et M.-C. Forgeard, op. cit., n° 331.91 s., spéc. l’exemple donné au
n° 331.91-1.
9 C’est également la valeur au décès de Mme Dubois.
Page 44
Et les 2/3 restant, formant la réserve globale
2/3
Sont de
฀ ฀
฀
des deux enfants
Est de
816 000
฀ ฀
฀
฀ ฀
฀
1/2
408 000
LA SEMAINE JURIDIQUE - NOTARIALE ET IMMOBILIÈRE - N° 30-34 - 27 JUILLET 2012
CORRIGÉ D’EXAMEN FAMILLE
b) Calcul de la quotité disponible et de la réserve dans la succession
de Mme Dubois
1) Biens existants (évalués au décès de Mme Dubois) :
฀ ฀
฀
1) Biens existant (évalués au décès de Mme Dubois10) :
521 000
฀ ฀
250 000
Actif brut existant
771 000
2) Passif :
Frais funéraires
11 000
฀ ฀
11 000
Actif net existant
Actif brut existant
Solde du compte de récompenses en faveur de la
communauté
฀฀ ฀
฀฀
250 000
฀฀ ฀
฀฀
250 000
4) Masse de calcul :
760 000
฀
500 000
1 260 000
฀
฀ ฀
฀
1/3
Est de
420 000
Et les 2/3 restant, formant la réserve globale
2/3
Sont de
840 000
฀ ฀
฀
des deux enfants
฀ ฀
฀
฀ ฀
฀
1/2
Est de
420 000
402 000
฀
RI dans la succession
de la mère
฀
฀
1/2
650 000
3) Droits théoriques de chacun des réservataires :
Avances de part
Droits dans les biens existants des deux successions
500 000
650 000
1 150 000
Lucien
500 000
650 000
1 150 000
e) Comparaison entre les droits théoriques et les parts de réserve individuelle
Chaque héritier réservataire a des droits théoriques de 1 150 000
euros soit bien plus que sa part de réserve individuelle dans les deux
successions confondues (828 000 euros). Les libéralités consenties par
les deux époux ne sont pas réductibles. En particulier, le legs fait par
Mme Dubois à Lucien peut pleinement s’exécuter.
2° Masse à partager
a) Actif
฀ ฀
330 000
300 000
RI totale
408 000
420 000
828 000
Lucien
408 000
420 000
828 000
d) Calcul des droits théoriques des réservataires
Les droits théoriques sont la somme des avances de parts reçues par
chaque héritier réservataire, à laquelle s’ajoutent leurs droits dans les
biens existants au décès et non légués.
s Jean et Lucien n’ont reçu en avancement de part que la donationpartage. Le total de leurs avances de parts dans les deux successions
est donc égal au total reçu par donation-partage de leurs deux parents
soit 500 000 euros chacun.
s Il faut ensuite déterminer les droits de chacun dans les biens existants non légués des deux successions. Cet actif comprend l’actif net
de communauté et les biens propres des époux, à l’exclusion de l’appartement de Lyon, légué à titre particulier. Doivent en être déduites
les dettes et charges des deux successions.
Total
Jean
฀
Jean
402 000
1 300 000
Est de
c) Réserve individuelle (RI) dans les deux successions confondues
RI dans la succession
du père
19 000
฀ ฀
500 000
Total
383 000
Actif net existant
฀
Actif net existant au décès
1 702 000
2) Passif :
11 000
760 000
Total
660 000
Frais funéraires des deux successions
3) Réunion fictive :
฀ ฀
1 042 000
฀ ฀
1/2 du boni de communauté
1307
29 000
฀ ฀
660 000
฀ ฀
250 000
Ensemble
1 569 000
b) Passif
Frais funéraires des deux successions
฀ ฀
19 000
19 000
Actif net existant
À déduire le legs particulier à Lucien
฀฀
฀
19 000
1 550 000
250 000
1 300 000
฀
Est de
฀
฀
1/2
650 000
C. - Droits des parties et passif restant à acquitter
Jean :
10 Cette valeur est la même que la valeur partage, car, d’après le thème, les biens
n’ont pas changé de valeur entre le décès et le partage.
LA SEMAINE JURIDIQUE - NOTARIALE ET IMMOBILIÈRE - N° 30-34 - 27 JUILLET 2012
Ses droits légaux
650 000
Page 45
1307
D. - Attributions
Lucien :
Ses droits légaux
650 000
Jean :
฀ ฀
Passif restant à acquitter :
Frais funéraires des deux successions
Total
19 000
฀
฀
1 319 000
฀฀
฀
฀
฀
฀
฀
10 000
฀
650 000
฀ ฀
330 000
฀
660 000
฀
Lucien :
Égal à l'actif brut à partager non légué :
฀ ฀
฀ ฀
330 000
฀
300 000
฀
300 000
29 000
29 000
฀ ฀
Ensemble
660 000
1 319 000
Ensemble
฀
659 000
฀ ฀
฀
฀฀
฀
฀
฀
฀
฀
฀
฀
9 000
650 000
Lucien reçoit par ailleurs son legs particulier portant sur l'appartement de Lyon, lequel est évalué à 250 000 euros à l'époque du partage.
Page 46
LA SEMAINE JURIDIQUE - NOTARIALE ET IMMOBILIÈRE - N° 30-34 - 27 JUILLET 2012