les partis politiques

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les partis politiques
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LES PARTIS POLITIQUES
Les partis politiques sont, aujourd’hui, au cœur de la réflexion sur le politique.
Les interrogations sont multiples, notamment sur l’utilité de ces partis. Mais
ces questions semblent confondre réalité de la situation des partis, en France
plus particulièrement, et idéal.
COMMENT ANALYSER LES PARTIS POLITIQUES ?
Longtemps tenus pour illégitimes parce
que facteurs de division, les partis politiques sont aujourd’hui le plus souvent seulement soumis à des études critiques, car
on les juge désormais indispensables au
bon fonctionnement de la démocratie.
q L’analyse organisationnelle
L’étude du contexte social
L’analyse de Maurice Duverger à laquelle nous nous référons a pour principal
inconvénient de rester dans un cadre
purement politique. Or Georges Lavau,
dans un ouvrage daté de 1953 (Partis
politiques et réalités sociales, Armand
Colin) montre qu’il faut replacer les partis dans leur contexte social. Ainsi, on
peut mettre en évidence des différences
fondamentales entre un parti communiste dans une société de type agricole
et un parti communiste dans une société de type industriel.
Dans une étude considérée comme un
classique, Maurice Duverger (Les Partis
politiques, 1951) oppose les partis de
cadres et les partis de masse. Les premiers sont plutôt situés à droite de l’échiquier politique et cherchent à rassembler
des notables. Leur fonctionnement est
décentralisé et leurs dirigeants restent
sous le contrôle des élus. Quant aux partis de masse, comme les partis socialistes européens, ils cherchent à fédérer des militants. Les élus sont sous le contrôle étroit des dirigeants, dont la politique est la profession. Très marqués idéologiquement, ces partis se
dotent d’un programme politique qui a pour vocation de grossir le rang des militants. Les
élus de ces partis ont peu d’autonomie, car ils restent soumis aux choix de la direction de
leur parti. Comme toute classification, celle de Duverger a des limites car elle ne réussit pas
à inclure tous les partis, mais elle reste un modèle simple d’étude des partis politiques.
q L’ancrage social des partis politiques
On peut également définir les partis par rapport aux grands débats qui traversent la
société. On peut ainsi distinguer quatre grandes oppositions permettant de classer les
partis : État/Église, centre/périphérie, urbain/rural, possédants/travailleurs. À partir de
ces clivages, on peut distinguer des partis bourgeois et ouvriers, des partis centralistes et
régionalistes, des partis démocrates-chrétiens et anticléricaux, des partis agrariens. De
plus, l’étude des électorats et des adhérents permet de mettre en relation ces clivages
avec la composition sociale des partis. Dans les partis de gauche, les salariés, et plus particulièrement ceux du secteur public, sont surreprésentés. Les catholiques pratiquants
sont plus nombreux dans les partis de la droite traditionnelle.
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LA FIN DES PARTIS POLITIQUES ?
La mort des partis politiques peut prendre des formes très différentes : changement
de sigle, dissolution pure et simple, fusion, scission…
q Pourquoi les partis politiques meurent-ils ?
La réponse est difficile, car un parti peut se perpétuer en conservant ou en modifiant
son nom. Outre la création de l’UMP (Union pour un mouvement populaire en 2002),
c’est le cas du Parti socialiste qui trouve son origine dans la SFIO, créée en 1905, et qui
devient Parti socialiste en 1969.
Pourtant peut-on dire que le parti dirigé par Jean Jaurès au début du siècle est le
même que celui repris par François Mitterrand au début des années 1970, et celui-ci estil le même que celui que représenta
Ségolène Royal en 2007? Autre exemple,
Les adhésions à 20 euros
le Mouvement démocratique ou MoDem,
crée en 2007 par François Bayrou, par
du Parti socialiste
démembrement de l’ancienne UDF, dans
l’élan de son score au premier tour de
Le Parti socialiste, soucieux de renouveler ses adhérents en vue de l’élection
l’élection présidentielle de 2007. En fait,
présidentielle de 2007 s’est lancé au
même s’il ne change pas de sigle, un parti
cours de l’année 2006 dans une camne cesse de se transformer.
pagne d’adhésions à « prix coûtant » ;
q La crise des partis politiques
en tout cas avec un coût plus faible que
l’adhésion standard calculée sur la base
des revenus de l’adhérent. Il semble que
cette stratégie ait permis l’entrée
d’adhérents plus jeunes, plus diplômés
et où les femmes sont plus nombreuses. Dans beaucoup de sections, le
nombre d’adhérents a ainsi presque
doublé, l’afflux ayant généré des difficultés matérielles pour approvisionner ces
adhérents en publications, les convoquer aux assemblées générales, et tout
simplement les accueillir en section. La
désignation de Ségolène Royal comme
candidate du PS leur est en large partie
imputable. L’issue de l’élection présidentielle risque donc de peser lourd pour
transformer ces nouveaux adhérents en
nouveaux militants…
La crise de la représentation politique
qui marquerait la fin des partis politiques doit certainement être relativisée
après l’élection présidentielle et les
législatives de 2007.
Le peuple voulait un autre langage
que la langue de bois. L’élection présidentielle était porteuse d’enjeux, d’où
une participation record au vote et une
adhésion massive aux trois formations
que sont le Parti socialiste (voir encadré),
l’UMP et le MoDem. La vitalité retrouvée
du militantisme a cependant souffert de
la forte abstention aux législatives qui
sont apparues sans enjeu.
Il est vrai que les années 1990 à 2006 ont été marquées par une crise du militantisme qui caractérisait l’évolution des valeurs de la société et marquait la fin de l’adhésion aux grandes idéologies qui donnaient, clés en main, les solutions pour construire
une société meilleure. Le militantisme est aujourd’hui plus diversifié et plus sélectif. Les
relations entre les individus et les partis censés les représenter n’ont cessé d’évoluer. La
crise des partis politiques n’était, sans doute, que le signe d’une profonde mutation des
relations entre le peuple et la politique.
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