ANNEXE 1 : Catastrophisme et paléontologie
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ANNEXE 1 : Catastrophisme et paléontologie
ANNEXE 1 : Catastrophisme et paléontologie 1. Sur la disparition des dinosaures. ‘Les dinosaures se sont éteints à la fin du crétacé, il y a environ 65 millions d’années. Ils n’ont toutefois pas été les seuls à disparaître : cette période a été marquée par une énorme vague d’extinction, une crise biologique qui a rayé de la surface de la Terre entre 60 et 75 p. 100 des espèces existantes (animales comme végétales), parmi lesquelles de très nombreux invertébrés marins. Plus de quatre-vingts théories ont été élaborées pour expliquer, dans le cadre de cette crise, la disparition de tous les dinosaures. Jusque dans les années 1980, on pensait généralement que les dinosaures avaient graduellement disparu pendant tout le crétacé supérieur. Mais la découverte au Mexique, dans la péninsule du Yucatán, des traces d'impact d’un grand astéroïde ou d’une comète (10 à 20 km de diamètre), qui serait entré en collision avec la Terre il y a 65 millions d’années, entre le crétacé et le tertiaire, a ravivé les spéculations sur la disparition de ces reptiles. En 1981, le physicien Luis Walter Alvarez a publié avec son fils une théorie selon laquelle cette rencontre serait à l’origine de la disparition des dinosaures. L’explosion d’une violence inouïe qui a suivi la collision aurait eu des conséquences climatiques dramatiques à l’échelle de la planète, notamment parce qu’elle aurait projeté dans l’atmosphère des quantités phénoménales de poussières qui auraient fait écran au soleil, sans parler des probables tremblements de terre et raz-de-marée. Le nuage de poussières, épais de plusieurs kilomètres, aurait fait plusieurs fois le tour de la Terre, privant les plantes de lumière et donc de vie, et privant du même coup les 1 herbivores de nourriture et, par suite, les carnivores de leurs proies. Une seconde hypothèse concerne le développement, au cours de la de la transition entre le crétacé et le tertiaire, d’une intense activité volcanique sur la plaque indienne. Les vestiges de ces gigantesques éruptions sont encore visibles aujourd'hui dans l'ouest de l'est de l'Inde, sous la forme d'énormes empilements de laves, parfois épais de plusieurs kilomètres, les « trapps » du Deccan. Ces événements volcaniques ont pu affecter le climat planétaire de façon tout aussi catastrophique que la collision avec la météorite. Une troisième hypothèse avance les effets biologiques et écologiques qu’aurait provoqués l’importante régression marine (plus de 29 millions de kilomètres carrés se sont asséchés) qui a marqué la transition du crétacé au tertiaire.’ (Encyclopédie Encarta 2004, entrée : dinosaures-extinction). 2 2. La découverte d’Alvarez. ‘Le point d’impact ? Une équipe de géologues conduite par Walter Alvarez a réuni, au cours de ces deux dernières années, des preuves de plus en plus convaincantes de l’impact d’une énorme météorite dans la région de la péninsule du Yucatan (Mexique). Des débris trouvés sur le territoire mexicain, de l’autre côté du golfe du Mexique, comportent des couches allant jusqu’à 39 centimètres d’épaisseur de parcelles de roches et de restes d’arbres fossiles mélangés avec des sédiments du fond de l’océan. Cela indique que d’immenses tsunamis (raz de marée) ont dû balayer la région après l’impact, puis se retirer, déracinant les arbres et les projetant dans la mer.’ ([NOR], p. 153). 3 3. Catastrophisme et évolutionnisme en biologie Deux théories incompatibles ? Les hypothèses des paléontologistes sur le déclin des dinosaures et des nombreuses autres familles disparues il y a environ 66 millions d’années sont, pour le moment, réparties en deux groupes : d’une part la thèse catastrophiste, de l’autre la théorie gradualiste. Mais il n’est pas impossible de les réconcilier. Certains chercheurs, qui penchent en faveur de la seconde, assurent que les gisements de fossiles montrent de nombreux groupes ‘animaux – dont les dinosaures – déclinant régulièrement, en abondance et en diversité, vers la fin du Crétacé. Cependant, devant les témoignages impressionnants rassemblés par Alvarez et ses collègues, ils sont assez disposés à accepter l’idée de l’impact d’une météorite survenu à la même époque, qui peut-être accéléra la fin inévitable d’au moins certains de ces groupes. Il n’empêche que tout récemment, certaines publications ont remis en cause cette interprétation. La datation des échantillons proches du site d’impact donnant des résultats antérieurs de 300 000 ans à celle de l’extinction massive ayant emporté avec elle les dinosaures. C’est du moins ce qu’il faut conclure des publications de Gerta Keller de Princeton et de son équipe1. Suivant une même perspective, le géologue 1 ‘Depuis le début des années 1990 le cratère Chicxulub au Yutacan, Mexique, a été salué comme la preuve vivante pour l’hypothèse selon laquelle un astéroïde a tué les dinosaures et causé l’extinction de masse de beaucoup d’autres organismes à la frontière du Crétacé-Tertiaire (K-T), il y a 65 million d’années…’ (‘Since the early l990s the Chicxulub crater on Yucatan, Mexico, has been hailed as the smoking gun that proves the hypothesis that an asteroid killed the dinosaurs and caused the mass extinction of many other organisms at the Cretaceous-Tertiary (K-T) boundary 65 million years ago. Here, we report evidence from a previously uninvestigated core, Yaxcopoil-1, drilled within the Chicxulub crater, indicating that this impact predated the K-T boundary by 300,000 years and thus did not cause the end-Cretaceous mass extinction as 4 Vincent Courtillot penche pour les conséquences d’une période d’activité volcanique particulièrement importante, qui survient périodiquement sur Terre2. On peut donc affirmer que le débat est loin d’être clos et qu’il faut s’attendre à d’autres rebondissements. Darwin avait-il tort ? La querelle entre les deux écoles de paléontologistes, l’une qui envisage des événements catastrophiques soudains et l’autre qui penche pour des transformations plus progressives, reflète deux attitudes philosophiques différentes envers la nature et l’histoire de la vie. Deux hommes dont nous avons déjà parlé représentent ces tendances : Charles Darwin, qui prônait une évolution lente et presque imperceptible, et Thomas Henry Huxley, curieusement un des ardents défenseurs de Darwin dans la bataille sur sa théorie de l’évolution, et cependant convaincu que cette dernière avait pu se faire de façon beaucoup moins régulière. commonly believed. The evidence supporting a pre-K-T age was obtained from Yaxcopoil-1 based on five independent proxies, each with characteristic signals across the K-T transition: sedimentology, biostratigraphy, magnetostratigraphy, stable isotopes, and iridium. These data are consistent with earlier evidence for a late Maastrichtian age of the microtektite deposits in northeastern Mexico.’) (Proceedings of the National Academy of Sciences, 101, 11, 16 mars 2004, p. 3753-3758). 2 Cf. par exemple le chapitre IV de [COUR], en particulier pp. 125-6. S’il n’y conteste pas directement la théorie météoritique, il y est fortement suggéré, comme l’écrit D. Yee dans son compte-rendu de la traduction anglaise, que celleci n’est qu’une coïncidence, la cause se trouvant, comme pour G. Keller, dans une augmentation très forte de l’activité volcanique terrestre qui se serait étalée sur environ un demi-million d’années. 5 4. L’évolution par bonds. ‘Extinctions périodiques : l’histoire de la vie se répartie en périodes d’abondance ponctuées de phases de déclin rapide (extinction). On connaît l’existence d’autres creux semblables à celui qui marque la fin du Crétacé.’ ([NOR], p. 157-158). 6