Les comptes courants d`associés
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Les comptes courants d`associés
18 JAN 10 Hebdomadaire Paris Surface approx. (cm²) : 686 N° de page : 27-28 91 BIS RUE DU CHERCHE MIDI 75006 PARIS - 01 53 63 55 55 Page 1/2 Juridique Entreprise et expertise Les comptes courants d'associés Retour sur quèlques aspects juridiques des comptes courants d'associés, source de financement non négligeable des entreprises, des PME aux grands groupes. Par Olivier de Precigout, avocat directeur associe, droit des sociétes - fusions acquisitions. Fidal es associes d'une societe apportent a celle-ci des fonds en pleine propriété qui contribuent a la formation de son capital a k creation ou au cours de l'existence de la societe Maîs ils peuvent également mettre temporairement a la dis position de la societe des fonds dont Js restent propriétaires Ces fonds sont comptabilises en «comptes courants», d'où leur appellation de surveillance ou gerants, d'apporter ou de laisser des fonds en compte à la societe En outre, l'article L 511-7 autorise toute entreprise a effectuer des operations de ùesorene avec des societes de son groupe En dehors du versement en compte courant par une societe du même groupe, un associe ou actionnaire détenant moins de 5 % du capital d'une societe de capitaux et n'occupant aucun des mandats vises ci-dessus ne pourrait pas apporter ou laisser a la disposition de la sociéte des fonds en compte courant a moins de deux ans Rs pourront detenir un compte courant si les fonds sont bloques a plus de deux ans Un apport ou un abandon en compte courant ne doit pas nécessairement être constate par un cent* Maîs une convention ecrite entre l'assoae et U societe aura le mente de fixer les principales modalités de fonctionnement du compte courant (interêt, duree ou conditions éventuelles a son remboursement) On ne saurait trop conseiller dc soumettre un apport ou un abandon en compte courant a la procedure régissant les conventions dites «réglementées» applicable a la forme dc la societe, surtout si le principe et le regime des comptes courant ne sont pas précises dans les statuts et s'il s'agit d'une operation inhabituelle pour la societe C'est d'autant plus vrai si l'assoae qui met des fonds a la disposition de la societe en nre un avantage particulier (par exemple un taux d'intérêt eleve) ou si la convention a des caractéristiques spécifiques (par exemple le blocage des fonds pendant 10 ans3) La jurisprudence considère que l'octroi d'intérêts sur les sommes versées en compte courant est soumis a l'autorisation préalable du conseil d'administration d'une société anonyme* L Un apport ou un abandon en compte courant ne do it pas nécessairement être constaté par un écrit. Mais une convention écrite entre l'associé et la société aura le mérite de fixer les principales modalités de fonctionnement du compte courant (intérêt, durée ou conditions éventuelles à son remboursement) I. La nature juridique du compte courant Un compte courant cst constitue et alimenté pendant la vie de Pentrepnse par des versements effectifs dans la caisse sociale, on parle alors d'apports, de versements ou d'avances en compte courant Maîs un associe peut également laisser a k disposition de la societe des sommes qui auraient dû lui revenir maîs qu il renonce temporairement a percevoir, comme par exemple, des dividendes Ce sont des abandons en compte courant La Cour de cassation1 a clairement affirme que les sommes ainsi apportées ou abandonnées en compte courant étaient des prête. L'assoae titulaire d'un compte courant a donc k qualite de créancier de la societe 1 Cass com 24 juin 1997 2 Cass com 24 juin 1997 3 CA Paris 6 juillet 1993 4 CA Paris 6/uillet 1993 FIDAL 6254462200506/GST/AMR/2 2. La liceité du compte courant Si l'article L 511-5 du Code monetaire et financier interdit a toute personne autre qu'un etablissement de credit d'effectuer des operations de banque a titre habituel ou de recevoir des fonds à vue ou a moins de deux ans, l'article L 312-2 du même Code permet néanmoins - aux associes des societes en nom collectif et des societes en commandite simple aux associes ou actionnaires {des societes a responsabilite limitee, societes anonymes, societes par actions simplifiées ou societes en commandite par actions) détenant au moins 5 % du capital de k societe , et aux administrateurs, membres du directoire et du conseil 3. Un compte courant peut-il être débiteur ? Le compte courant de certains associes ne peut pas présenter de solde débiteur En effet, un associe personne physique qui serait egalement administrateur, directeur general, directeur general délègue, membre du directoire ou du conseil de surveillance, representant permanent d'une personne morale administrateur ou membre du conseil de surveillance d'une societe anonyme, conjoint de I une de ces personnes ou «per sonne interposée» ne pourrait pas, notamment, «contracter sous quelque forme que ce soit, des emprunts auprès de la societe ou se faire consentir par elle un decouvert, en compte Eléments de recherche : FIDAL : cabinet d'avocats, toutes citations 18 JAN 10 Hebdomadaire Paris Surface approx. (cm²) : 686 N° de page : 27-28 91 BIS RUE DU CHERCHE MIDI 75006 PARIS - 01 53 63 55 55 Page 2/2 Les statuts de la société ou une convention entre la société et l'associé titulaire d'un compte courant peuvent imposer des conditions au remboursement. Ces conditions ne doivent pas être potestatives, c'est-àdire que leur réalisation ne doit pas dépendre de la seule volonté de la société. 5 Articles L 22543 et L 225-91 du Code de commerce 6 Article L 227-12 du Code de commerce 7 Article L 223-21 du Code de Commerce 8 Cass com 24 juin 1997 9 Cass com 24 juin 1997 10 Cass civ 25 janvier 1982, CA Pa ris 5 mai 1995, 11 CA Versailles 19 mai 2009 12 CA Versailles 2 avril 1999 13 Cass com 9 octobre 2007 14 CA Paris 12 décembre 2007 15 CA Paris 12 février courant ou autrement», sauf si la société exploite un établissement bancaire ou financier et qu'il s'agit alors d'une opération courante de ce commerce conclue à des conditions normales5. Les mêmes interdictions s'appliquent à l'associé président ou dirigeant d'une société par actions simplifiée6 ou encore aux gérants et associés personnes physiques et aux représentants légaux des personnes morales associées des sociétés à responsabilité limitée'. 4. Le droit au remboursement du compte courant «Les comptes d'associés ont pour caractéristique essentielle, en l'absence de convention particulière ou statutaire les régissant, d'être remboursables à tout moment8.» Une décision collective de la société ne pourrait imposer le blocage des comptes courants, sauf si elle est prise à l'unanimité, car elle augmenterait les engagements des associés''. Une délibération limitant le remboursement postérieurement à la demande de l'associé pourrait même être constitutive d'un abus de droit10. C'est à l'associé titulaire du compte courant d'en demander le remboursement. Son conjoint ne le pourrait pas, même si le compte courant fait partie de l'actif de leur communauté1 '. 1999 5. Le droit de pouvoir demander le remboursement de son compte courant à tout moment n'est néanmoins pas absolu W Cass com W novembre 1964 17 Cass com 1" juillet 2008 18 Article L 632-2 du Code de commerce 19 Articles 1289 et suivants du Code civil 20 CA Paris 19 septembre 2007 21 Pour une compensation lors de la période suspecte d'une société en liquidation judiciaire, voir Cass com 19 janvier 1999 22 CA Versailles 25 septembre 2007 23 Cass com 22 mars 2005 24 CA Versailles 19 novembre 1998 25 Cass com 30 novembre 2004 Les statuts de la société ou une convention entre la société et l'associé titulaire d'un compte courant peuvent imposer des conditions au remboursement. Ces conditions ne doivent pas être potestatives, c'est-à-dire que leur réalisation ne doit pas dépendre de la seule volonté de la société. Ainsi, le remboursement ne pourrait pas être laissé au seul arbitrage d'un gérant12. A l'inverse, une clause soumettant le remboursement à la condition que la trésorerie de la société le permette13 ou que les fonds propres aient été reconstitués à un certain niveau14 serait valable. S'il s'est engagé à mettre les sommes à la disposition de la société pendant une durée déterminée ou jusqu'à une date précise, un associé ne pourrait pas exiger le remboursement de son compte courant avant l'arrivée du terme convenu. L'associé doit être de bonne foi. La société pourrait rejeter une demande abusive. Les tribunaux ont ainsi sanctionné la demande ou le comportement de l'associé qui savait que la FIDAL 6254462200506/GST/AMR/2 créance d'un tiers n'avait pas été prise en compte dans le cadre de la liquidation de la société", qui a fait payer par la société des dettes qui lui étaient personnelles, même si leur montant était inférieur aux sommes abandonnées en compte courant16 ou qui avait prélevé des fonds pour acquérir en propre un bien immobilier sans qu'il y ait à pendre en considération l'argument selon lequel il s'agissait du remboursement d'un compte courant'7. Le remboursement de son compte courant à un associé à compter de la date de cessation des paiements de la société encourrait la nullité si l'associé connaissait cet état de cessation des paiements18. L'associé également débiteur de la société pourrait se voir opposer la compensation légale à la date où sa créance et sa dette vis-à-vis de la société existent à la fois et ce à hauteur de leurs quotités respectives19, à condition que les conditions de la compensation soient réunies (ce qui ne serait pas le cas pour une compensation entre un compte courant et l'obligation de participer à des pertes sociales non constatées20) ou que d'autres considérations ne l'empêchent pas21. L'article 1244-1 du Code civil permettrait à la société de demander au juge le report ou l'échelonnement du remboursement du compte courant, dans la limite de deux années. Attention enfin au délai de prescription de cinq ans prévu par l'article L. 110-4 du Code de commerce. 6. Le sort du compte courant en cas de transfert des titres de l'associé Lorsqu'un associé transfère ses parts ou actions, son compte courant ne suit pas le sort des titres à défaut de convention le stipulant. L'associé cédant reste donc fondé à exiger le remboursement de son compte courant par la société22. A l'inverse, si la convention entre le cédant et le cessionnaire, des déclarations, des engagements ou des actes de ce dernier manifestaient son intention de prendre en charge le passif de la société constitué par le compte courant du cédant, c'est bien vers son acheteur que celui-ci devrait se retourner pour en réclamer le remboursement23. Si l'acquéreur se porte fort du remboursement par la société du compte courant de l'associé qui lui a vendu ses actions, il contracte une obligation de résultat qui l'obligera à rembourser l'associé cédant en cas de défaillance de la société24. La solution vaut également si le compte courant est débiteur. L'associé d'une société en nom collectif dont les pertes avaient été affectées aux comptes courants des associés reste débiteur de ces pertes dès lors que l'acte de cession de ses parts ne se référait pas à ses dettes vis-à-vis de la SNC ou à l'affectation des pertes de celle-ci au débit du compte de Eléments de recherche : FIDAL : cabinet d'avocats, toutes citations