les obligations alimentaires - tribunal de bar-le-duc

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les obligations alimentaires - tribunal de bar-le-duc
LES OBLIGATIONS ALIMENTAIRES
Les articles 205 à 211 du code civil imposent à certaines personnes de fournir à leurs proches des
"aliments".
Les obligations alimentaires reposent sur la solidarité familiale et les réclamations émanent
habituellement d'ascendants âgés se trouvant dans l'incapacité de faire face à leurs frais ; souvent,
c'est l'hôpital ou l'EPHAD dans lequel l’ascendant est hébergé qui met en œuvre l'obligation
alimentaire (l’aide sociale pouvant être apportée par les collectivités publiques étant subsidiaire, et
subordonnée à l'absence ou à l'insuffisance de droits alimentaires contre d'éventuels obligés
alimentaires).
► Quel tribunal compétent?
Le juge compétent est le juge aux affaires familiales (article L. 213-3 du code de l'organisation
judiciaire).
Le créancier peut saisir soit le juge du lieu où il demeure, soit le juge du lieu où demeure le
défendeur.
► Quelle procédure?
Le juge peut être saisi :
 soit par le dépôt au greffe d’une requête
 soit par une assignation en la forme des référés, à faire signifier aux défendeurs par un
huissier de justice.
Quelle que soit sa forme, la requête doit préciser les coordonnées complètes du demandeur (nom,
prénom, date et lieu de naissance, profession, nationalité, domicile) et les coordonnées des
défendeurs (au minimum leurs nom, prénom et domicile).
A réception, le greffe fixe une audience. Le délai entre le dépôt de la requête et l’audience varie
selon les tribunaux, il est de six à huit semaines à Bar-le-Duc, hors périodes de vacances
judiciaires.
La partie demanderesse est convoquée à l’audience par tous moyens, notamment par mail si elle
a
accepté
ce
mode
de
communication.
La partie défenderesse est convoquée par lettre recommandée avec accusé de réception. Si son
adresse est inconnue ou s’il ne retire pas la lettre recommandée, la partie demanderesse devra
s’adresser à un huissier de justice pour lui faire signifier la demande.
Les parties doivent se présenter en personne à l’audience ou se faire représenter par un
avocat ; elles ne peuvent être représentées par une autre personne (article 1139 du code de
procédure civile).
La procédure est orale (article 1140 du code civil). Dès lors, les parties ne peuvent se contenter
d’adresser un courrier et/ou des pièces au tribunal pour assurer leur défense : ce courrier et ces
pièces ne pourront être pris en compte si elles ne se présentent pas ou ne sont pas représentées.
Néanmoins, lorsque l'action alimentaire est déclenchée par un établissement public de
santé ou une collectivité chargée de l'aide sociale, les parties peuvent ne pas se présenter
à l'audience et se contenter d'exposer leurs moyens par lettre adressée au juge (article 1141
du code de procédure civile).
En cas d’indisponibilité, les parties peuvent demander par courrier le renvoi de l’affaire à une
audience ultérieure, en indiquant les motifs de leur indisponibilité et en en justifiant (par la
production d’un certificat médical, d’une convocation à un entretien professionnel etc). Le juge
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conserve cependant son pouvoir d’appréciation sur le caractère sérieux du motif invoqué et peut
refuser de renvoyer l’affaire.
Les débats ont lieu en chambre du conseil, c'est-à-dire en audience non publique.
Le jugement est rendu à une date indiquée aux parties lors de l'audience, et est exécutoire de plein
droit par provision (article 1074-1 du code de procédure civile).
► Qui est tenu à une obligation alimentaire?
L'obligation alimentaire entre parents est un effet du lien de filiation qui les unit; dès lors, elle est
applicable dans les familles légitimes comme dans les familles naturelles ou adoptives, puisque
tous les enfants ont les mêmes droits et devoirs dans leurs rapports avec leur père et mère (article
310 du code civil ).
L'obligation alimentaire entre parents suppose que la filiation soit légalement établie entre eux. Si
ce lien de filiation venait à disparaître, l'obligation alimentaire disparaîtrait rétroactivement, et les
aliments qui auraient été versés devraient donner lieu à restitution.
● Les obligations des parents
Les enfants doivent des aliments à leurs père et mère et à tous les autres ascendants.
Cette obligation n'existe qu'en ligne directe, et non en ligne collatérale (par exemple, un frère, un
cousin, un oncle, n'est pas tenu à une obligation alimentaire).
Elle existe à l'infini (par exemple, les arrière petit enfants doivent des aliments leurs arrière grands
parents).
Inversement, les ascendants (à l'infini) doivent des aliments à leurs enfants ou autres descendants
(petits-enfants, voire arrière-petits-enfants...) qui sont dans le besoin (cette obligation alimentaire
ne doit pas être confondue avec l'obligation d'entretien des parents à l'égard des enfants (voir
onglet « les demandes hors ou après divorce concernant les enfants »).
● Les obligations des alliés
L’obligation alimentaire existe également entre les alliés au premier degré : les gendres et bellesfilles doivent des aliments à leur beau-père et belle-mère qui sont dans le besoin.
Il n'existe pas d'obligation alimentaire entre un époux et les grands-parents, ou autres ascendants
au-delà du premier degré, de son conjoint. Néanmoins, ses ressources sont prises en compte si
une demande est formée par un ascendant de son conjoint (et ce quel que soit leur régime
matrimonial).
Lorsque le lien matrimonial disparait, l’obligation alimentaire disparaît.
Seul le mariage engendre le lien d'alliance et l’obligation alimentaire, non le concubinage ou le
PACS.
● La situation particulière de l’adoption
Par l'effet de l'adoption plénière, l'adopté cesse d'appartenir à sa famille par le sang. Dès lors,
l’obligation alimentaire entre l'adopté et les membres de sa famille d'origine disparaît, et ce dès le
jour du dépôt de la requête en adoption (sauf, bien entendu, si l'adoption est celle de l'enfant du
conjoint, qui laisse subsister la filiation à l'égard de ce conjoint et de sa famille)
L'adoption simple crée un lien de parenté entre l'adoptant et l'adopté, qui s'étend aux enfants de
l'adopté. Dès lors, il existe une obligation alimentaire réciproque entre l'adoptant et l'adopté qui
s'étend
aux
descendants
de
l'adopté.
En revanche, l'adoption simple ne créant pas de lien de parenté entre l'adopté et la famille de
l'adoptant.
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L'adopté continuant d'appartenir à sa famille d'origine, l'obligation alimentaire réciproque subsiste
entre lui, ses descendants et ses ascendants par le sang. Néanmoins, l’obligation des père et mère
de l'adopté est subsidiaires et ils ne sont tenus de lui fournir des aliments qu’en cas de défaillance
de l'adoptant (article 367 du code civil).
● Les familles recomposées
Il n'existe pas d'obligation alimentaire entre les enfants et le second mari de leur mère ou la
seconde femme de leur père, à défaut de lien de parenté entre eux.
● L’absence de hiérarchie entre les débiteurs
Il n’existe aucune hiérarchie entre les débiteurs d'aliments.
Dès lors, le demandeur peut exercer une action commune contre plusieurs débiteurs ou des
actions successives (sauf adoption simple).
Néanmoins, l'obligation d'entretien de l'enfant qui pèse sur ses parents prime sur l'obligation
alimentaire des autres ascendants, et le devoir de secours entre époux prime sur l’obligation
alimentaire.
● L’absence de solidarité entre les coobligés
Chaque débiteur étant tenu de l'obligation alimentaire proportionnellement à ses propres
ressources, toute solidarité ou indivisibilité entre les débiteurs est exclue.
Dès lors, les codébiteurs d’aliments ne seront pas condamnés solidairement ou in solidum : si l’un
des débiteurs n règle pas spontanément sa contribution, les autres débiteurs ne sont pas tenus de
régler sa contribution sa place.
● Le recours entre coobligés
Toute personne ayant payé (en argent ou en nature) des aliments à un proche dispose d’un recours
contre les autres obligés alimentaires qui n’auraient pas été poursuivis par le créancier d’aliments.
Ce recours suppose un versement préalable et effectif d'aliments.
La part contributive de chacun est calculée en tenant compte des facultés respectives de
l’ensemble des coobligés.
Ce recours disparaît cependant si l‘ensemble des coobligés ont convenu que l’un d’eux supportera
seul la charge des aliments.
► L'état de besoin du créancier d’aliments
Pour avoir droit à de aliments, il faut être en état de besoin.
L’état de besoin se caractérise par l'impossibilité de pourvoir par ses propres ressources à sa
subsistance, la charge de la preuve de cet état reposant sur celui qui réclame des aliments, les
aliments étant entendus comme tout ce qui est nécessaire à la vie, à savoir la nourriture, mais
aussi le logement, les vêtements, les soins médicaux, etc (et également les frais d’obsèques).
L’état de besoin doit être apprécié par le juge au moment où il statue.
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Les ressources prises en compte sont les revenus des biens (revenus fonciers etc), les revenus
du travail (seule une personne ne pouvant travailler du fait de son âge, son état de santé voire de
l’absence d’offre d’emploi est en droit de réclamer des aliments), ou toute autre ressource.
Il importe peu que le dénuement actuel du créancier d’aliments résulte d’un comportement fautif
(débauche, gaspillage, jeu...) ou de causes qui ne lui sont pas imputables (infirmité, longue
maladie, impossibilité de trouver un travail...).
►les ressources du débiteur d'aliments
Nul ne peut être condamné à verser des aliments s’ils n’en a pas les moyens.
Les ressources de l’obligé alimentaire prises en compte sont les revenus des biens et les revenus
du travail, outre toutes autres ressources. Les charges, relatives aux besoins personnels de l’obligé
et de sa famille, sont déduites.
En outre, les ressources du conjoint ou concubin de l‘obligé sont indirectement prises en compte
pour évaluer sa capacité financière, dans la mesure où il en résulte un partage de charges.
►L'incidence des torts du créancier envers le débiteur
Dans certaines circonstances, l’obligé alimentaire peut évoquer le comportement du créancier
d’aliments à son égard.
Sont dispensés d’obligation alimentaire :
- les pupilles de l'État qui auront été élevés par le service de l'aide sociale à l'enfance jusqu'à la fin
de la scolarité obligatoire, à moins que les frais d'entretien occasionnés par le pupille remis
ultérieurement à ses parents n'aient été remboursés au département (article L. 228-1 du code de
l'action
sociale
et
des
familles)
- les enfants qui ont été retirés de leur milieu familial par décision judiciaire durant une période
d'au moins trente-six mois cumulés au cours des douze premières années de leur vie, sauf décision
contraire du juge aux affaires familiales (article L. 132-6 du code de l'action sociale et des familles)
- l'adopté simple à l'égard de ses père et mère par le sang, dès lors qu'il a été admis en qualité de
pupille de l'État ou pris en charge dans les délais prescrits à l'article L. 132-6 du Code de l'action
sociale
et
des
familles
(article
367
du
code
civil)
- le retrait total de l'autorité parentale, prononcé en raison de l'un des faits visés par
les articles 378 et 378-1 (crime ou délit sur la personne de l'enfant, mise de l'enfant en danger par
de mauvais traitements ou exemples, etc.), emporte pour l'enfant dispense des obligations
alimentaires, sauf disposition contraire dans le jugement de retrait ( article 379, alinéa 2 du code
civil)
- en cas de manquement grave du créancier à ses propres obligations envers le débiteur (article
207 alinéa 2 du code civil).
Dans ce dernier cas, appelé exception d’indignité, le juge peut décharger totalement ou
partiellement l’obligé alimentaire de son obligation.
Le manquement allégué doit être prouvé avec certitude et concerner le débiteur lui-même : il ne
peut invoquer des fautes commises par le créancier au préjudice d’autres proches.
Dans la pratique, ce sont surtout des manquements aux obligations d'honneur et de respect des
descendants
envers
leurs
ascendants
qui
sont
invoqués.
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►La durée de l'obligation alimentaire
Le jugement qui accorde une pension alimentaire peut ordonner son versement à compter du jour
de la demande (si les conditions de l'obligation alimentaire étaient réunies audit jour)
L'obligation peut exister tant que vivent les parties.
Elle subsiste après le décès du créancier pour couvrir les frais de ses obsèques (et ce même en
cas de renonciation à la succession).
Cependant, à tout moment, en cas de disparition de l’état de besoin du créancier d’aliments et en
cas de dégradation de la situation financière d’un débiteur d’aliments, il est possible de saisir à
nouveau le juge afin qu’il modifie ou supprime la pension alimentaire.
Concernant le cas particulier de l'obligation alimentaire entre alliés, elle cesse en principe, avec les
événements qui font disparaître le mariage (cette disparition devant être constatée par le juge si
l’obligé alimentaire allié a été condamné par un jugement antérieur à verser une pension
alimentaire) :
- en cas de décès (ou de jugement déclaratif d’absence) de l’époux qui produisait l'affinité :
l’obligation ne disparaît avec le décès de cet époux qu’à la condition supplémentaire que les époux
n’aient pas eu d’enfant ou que leurs enfants communs soient également décédés, ces deux
conditions étant cumulatives
- en cas de divorce : l'obligation alimentaire entre alliés cesse
- en cas de séparation de corps : l'obligation alimentaire subsiste puisque le mariage subsiste
►Les sanctions en cas d’inexécution
Si l‘obligé alimentaire, condamné par jugement exécutoire, ne règle pas la pension alimentaire, le
créancier peut recourir aux voies d'exécution normales, notamment aux saisies (voir l’onglet
tribunal d’instance- saisie des rémunérations).
En outre, s’agissant d’une créance alimentaire :
- aucun délai de grâce ne peut être accordé par le juge (article 1244-1 du code civil)
- les biens normalement insaisissables, notamment la portion insaisissable des rémunérations,
peuvent être saisis
- la procédure de paiement direct des pensions alimentaires permet de se faire payer le montant
de la pension par l’employeur du débiteur, sans frais et par préférence à tous les autres créanciers
- une avance sur pension peut être demandée aux caisses d'allocations familiales (article L581-9
du code de la sécurité sociale), ou l'allocation de soutien familial (article L581-2 du code de la
sécurité sociale). Subrogés dans les droits du créancier, les organismes sociaux ou les comptables
publics
procèdent
alors
eux-mêmes
au
recouvrement
contre
le
débiteur.
Par ailleurs, le débiteur s’expose à diverses sanctions pénales :
- le délit d'abandon de famille (article 227-3 du code pénal) est constitué lorsque le débiteur est
resté volontairement plus de deux mois sans s'acquitter intégralement du montant de son obligation
(la régularisation ultérieure laissant subsister le délit) ; les peines encourues sont deux ans
d’emprisonnement et 15 000 € d’amende, l’interdiction d'exercer certains droits civiques, civils et
de famille et autres peines complémentaires prévues à l'article 227-29 du code pénal
- l’absence de notification au créancier d’aliment son changement de domicile dans le mois est
punissable de six mois d'emprisonnement et 7 500 euros d'amende (article 227-4 du code pénal)
- le fait pour tout débiteur d'organiser ou d'aggraver son insolvabilité en vue de se soustraire à
l'exécution d'une condamnation pécuniaire en matière d'aliments est punissable de trois ans
d’emprisonnement et 45 000 € d’amende (article 314-7 du code pénal)
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