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PANORAMA DE LA SCÈNE MUSICALE FRANCAISE
ANNÉES 50 À 70
SOLIDAIRE : DONNEUR DE SANG !
Sonoconférence proposée par Bruno Aubin, chroniqueur de Longueur d’Ondes.
L'histoire de la chanson et l'évolution de la musique répond à son époque, accompagnant le contexte socio-politique, mais aussi la technologie du moment.
Avant guerre, les grands succès populaires passent essentiellement par des interprètes, qu'ils soient chanteurs de rue, de bal, d'orchestre, chansonniers, stars du music hall ou de l'opérette. A quelques
rares exceptions près (Charles Trenet), les rôles d'auteur et de compositeur sont distincts, au service de voix et de personnalités (Maurice Chevalier, Joséphine Baker, Piaf, etc.).
ANNÉES 50 : L’ÂGE D’OR DE LA CHANSON
Avec le recul, les années 50 sont ce que l'on peut appeler l'âge d'or de la chanson. Les prémices remontent en fait à l'après guerre. Après six années de guerre, le pays est à reconstruire, la société s'américanise,
les femmes obtiennent le droit de vote, les intellectuels se rapprochent des artistes. L'époque voit l'ouverture de nombreux cabarets et la naissance en 47/48 de la chanson " Rive gauche ", montrant des
auteurs-compositeurs-interprètes (ACI) qui s'accompagnent eux-mêmes. De grands noms apparaissent (Brassens, Brel, Férré, Aznavour, Barbara, Bécaud, etc.) qui tous, à leur manière, posent les bases
d'une chanson moderne qui perdure encore de nos jours.
Durant ces années, différents signes et avancées technologiques sont pourtant annonciateurs des changements à venir et d'une musicalité tenant compte de la culture anglo-saxonne, même si à cette époque,
le jazz accompagne déjà les compositions de Boris Vian, Henri Salvador, Serge Gainsbourg...
Quelques dates sont assez significatives :
- 1951 : les premiers 45T font leur apparition
- 1952 : Elvis Presley enregistre son premier disque
- 1954 : ouverture de l'Olympia
- 1955 : début d'Europe 1 qui consacre la majeure partie de son antenne à la chanson, avec en 59 le lancement de l'émission " Salut les copains "
- 1959 : le Golf Drouot devient le point de rassemblement des mordus du rock
Tout est en place pour accueillir les années 60 et sa déferlante yéyé.
ANNÉES 60 : LES ANNÉES DE L’INSOUCIANCE
Portées par la jeunesse et l'essor démographique, les années 60 se parfument à l'innocence et à la frivolité.
Pour une grande part, les Yéyés (Richard Anthony, Claude François, Sheila, Johnny Hallyday, Eddy Mitchell…) se contentent d'adapter et d'interpréter les titres en tête des charts anglais et américains.
Le disque remplace le spectacle comme moyen de promotion d'un artiste : la notion de tube apparaît. Heureusement, d'autres vont prendre des chemins plus personnels : Jacques Dutronc, Nino Ferrer,
Michel Polnareff, Françoise Hardy… ou à l'image de Claude Nougaro, faire perdurer la tradition des ACI, en mauvaise posture et ringardisée. A défaut de contestation apparaît une pointe de provocation.
L'année 66 est en cela assez symbolique, avec le succès de Et moi et moi et moi de Dutronc, L'amour avec toi de Polnareff qui fait son premier scandale, ou encore l'immense succès Des élucubrations
d'Antoine.
ANNÉES 70 : LE GRAND CHAMBOULEMENT
En ce début 70, Maxime Le Forestier (San Francisco) et Julien Clerc (Hair) symbolisent cette jeunesse communautaire.
Jusqu'en 1972, le mouvement hippie est au top ; et le rock, de psychédélique devient progressif, s'inspirant du jazz, du médiéval, du traditionnel, avec les premières formations françaises vraiment
crédibles, que sont Magma, Tri Yann et Ange (par ailleurs toujours en activité).
Définitivement, l'heure n'est plus aux adaptations, ni aux tubes. Les 33 tours ne sont plus une addition de titres, mais une oeuvre globale, un album.
Surtout, en une quinzaine d'années, la télévision, présente dans tous les foyers, a supplanté la radio. La musique y a une large place grâce à une multitude d'émissions de variétés qui mélangent les genres
et les personnalités. Moins frileuse et formatée qu'aujourd'hui, elle révèle dès la première moitié de la décennie, toute une nouvelle génération d'ACI, catégorie d'artistes qui fait son retour après son
éclipse par les yéyés. Les Alain Souchon, Louis Chédid, Michel Berger, Daniel Balavoine, Francis Cabrel, Renaud, Véronique Sanson, etc. deviendront de gros vendeurs abonnés au succès.
Plus atypiques, car mêlant blues, rock, reggae ou rythmes cubains à une écriture chanson, suivront vers le succès les Bernard Lavilliers, Jacques Higelin, Hubert-Félix Thiéfaine ou encore Alain Bashung.
On pense le texte et la quête du sens de retour, mais en 1977, deux révolutions musicales vont déferler : la disco et le punk !
Musicalement et culturellement à l'opposé, ces deux courants se complètent pourtant tel le ying et le yang. Ils sont une réponse à contre-courant des années " Peace and Love " perdues avec le choc
pétrolier, l'un s'exprimant par la fête, l'autre par un certain nihilisme.
Au delà, la disco établit la notion de musique faite par des producteurs de studio, qui connaîtra quelques années plus tard une autre consécration via les musiques électroniques. En France, la disco donne
l'opportunité à certains interprètes de connaître le succès international, en se mettant à l'anglais : phénomène qui va perdurer, mais bien plus pour des raisons artistiques que seulement commerciales.
Le mouvement punk voit quant à lui des " musiciens amateurs " monter sur scène et enregistrer des disques, ce qui décomplexe toute une génération, qui se lance plus facilement dans le rock. C'est la
naissance en France de groupes en " St " comme Starshooter (dont on connaît encore aujourd'hui le chanteur Kent), Strychnine (qui vient d'être réédité et dont la jeune formation rochelaise Asyl reprend
un titre), les Stinky Toys qui ont engendré le duo pop Elli (Medeiros) et Jacno, mais aussi Marquis de Sade (Marc Seberg dans les années 80, puis Philippe Pascal en solo), Orchestre Rouge (avant de
muter en Passion Fodder, puis Théo Hakola en solo) ou encore Trust et Téléphone qu'on ne présente plus.
Autres sons nouveaux : l'électronique. Le synthétiseur devient accessible à tous, l'instrument et ses sonorités popularisés par Jean-Michel Jarre en France, Kraftwerk ou le duo Bowie / Eno en Allemagne.
Ces sons synthétiques alliés aux rythmes enlevés du disco et à la noirceur du punk, vont donner naissance à la new-wave qui, au début des années 80, va profondément marquer le son de la production.
La décennie se clôt également par l'explosion sur la scène internationale du reggae, qui fait dans un premier temps peu d'émule en France, à l’exception des premiers grands succès de Gainsbourg et
de Lavilliers. Par la suite ce courant va s'inscrire dans la durée et annoncer l'arrivée dans les années 80 des musiques du monde.
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En l'espace de deux ans, tout va changer. Les évènements des années 67 - 68 (Guerre du Vietnam, Mai 68, lutte pour les droits civiques, etc.) vont durablement révolutionner les mœurs et la culture.
Partout la contestation grandit. L'homme, et surtout la femme, se mettent à rêver de paix et de liberté. Grèves, manifestations et bientôt concerts et festivals se multiplient et la guitare, qu'elle soit
folk ou électrique, est devenue l'instrument roi. En 69, le " Summer of love " accouche du mouvement hippie, tandis que les Beatles se séparent… annonçant les années 70.