Théorie et application de la compensation fréquentielle « multipath
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Théorie et application de la compensation fréquentielle « multipath
Théorie et application de la compensation fréquentielle « multipath » aux amplificateurs opérationnels Pawel FIEDOROW Institut des Nanotechnologies de Lyon STMicroelectronics Grenoble 12, rue Paul Horowitz 38000 Grenoble Thierry Tixier, Nacer Abouchi, Institut des Nanotechnologies de Lyon CPE Lyon 43, bd du 11 novembre 1918 69100 Villeurbanne Email : [email protected] Résumé La conception des circuits analogiques, plus particulièrement celle des amplificateurs opérationnels standards est confrontée aujourd’hui à la diminution des tensions d’alimentation et du budget courant alors que les spécificités du cahier des charges deviennent de plus en plus complexes. Ainsi, la réalisation de circuit fonctionnant en rail à rail en entrée et en sortie, avec des faibles tensions d’offset et une grande bande passante est devenue un défit majeur. Outre les caractéristiques statiques des amplificateurs, la stabilité doit être assurée pour une charge capacitive et une charge résistive données. Dans les exigences liées à la fonction d’amplificateur opérationnel, le gain de la fonction étant supérieur à la centaine de décibel, leurs structures analogiques possèdent au moins trois étages. La diminution des tensions d’alimentations rend impossible l’empilement de transistors pour créer du gain. Ainsi il faut stabiliser la structure par des méthodes de compensation fréquentielle telle que la technique « Multipath » qui est développée dans cet article. 1. Introduction La conception des circuits analogiques intégrés doit prendre en compte de nombreuses contraintes (faible tension d’alimentation, faible consommation) en même temps que les performances visées ne cessent d’être révisées à la hausse (gains statiques élevés). Les structures électroniques candidates présentent plusieurs étages de gain qu’il est nécessaire de stabiliser [1]. En effet, les étages de gain présentent des nœuds hautes impédances qui vont être à l’origine de pôles. Chaque pôle introduit un déphasage de -90° et une perte de gain de 20dB/décade. Par conséquent, les amplificateurs opérationnels réalisés avec plus de trois étages de gain seront instables. La stabilité, à l’image des systèmes automatisés, s’étudie en boucle ouverte. Les marges de phase et de gain permettent de quantifier la qualité du circuit à charge capacitive donnée. La compensation « Miller » destinée à la compensation d’appareil de mesure [2] a été développé durant les dernières décennies [3][4] pour les amplificateurs à deux étages. C’est une méthode qui permet de séparer (dans le domaine fréquentiel) les deux pôles liés aux deux étages de gain à l’aide d’une capacité de compensation. Le pôle dominant reste dans la bande passante de l’amplificateur alors que le second pôle est rejeté en dehors de celle-ci [5]. Cependant, l’introduction de la capacité de compensation implique la création d’un zéro à partie réelle positive. Cela signifie un retournement de phase de +90° et une augmentation de 20dB/décade. Il faut donc compenser cet effet par un tampon ou une résistance. Cela montre que sur une structure à deux étages, la compensation fréquentielle doit être réglée de manière à obtenir un système correctement stabilisé. Par conséquent, les structures à trois étages sont plus complexes à étudier. De nombreuses solutions existent. [6] propose une approche de ces différentes méthodes de compensation fréquentielle. Elles sont aussi bien réalisées à partir d’éléments passifs tels que des capacités et/ou résistances, mais également à partir d’éléments actifs tels que des transistors polarisés en drain commun ou grille commune. Ces éléments se trouvent le plus souvent dans une boucle de rétroaction entre deux nœuds hautes impédances. Dans cet article, nous présentons une méthode de compensation différente et complémentaire à la compensation par rétroaction qui permet au signal d’avoir deux chemins simultanés pour le signal entre l’entrée et la sortie du circuit : le « Multipath ». Ainsi dans la partie deux, nous aborderons le principe théorique de cette compensation fréquentielle. Nous présenterons dans la troisième partie la réalisation d’un amplificateur opérationnel utilisant cette compensation. Chaque bloc fonctionnel sera explicité. Dans la quatrième partie, nous utiliserons le facteur de mérite pour comparer cette compensation fréquentielle par rapport à celles présentes dans la littérature. 2. Théorie de la compensation « Multipath » Le nom anglais utilisé pour qualifier cette compensation illustre la multiplicité des chemins possibles pour le signal depuis l’entrée vers la sortie. Cependant, l’intérêt de cette méthode réside dans l’utilisation d’une chaine principale à grand gain et d’une chaine secondaire plus rapide. Pour assurer un bon fonctionnement au système, il est indispensable que la chaine principale et la chaine secondaire possèdent le même produit . Par conséquent, la chaine principale présente un gain plus élevé que la chaine secondaire ce qui implique que la chaine secondaire présente une bande passante plus élevée que la chaine principale. Nous allons développer cette théorie sur un modèle dit comportemental. 2.1 Compensation « Nested Miller » (NMC) Le principe de la compensation « Miller » est repris par la NMC [7] dans une structure à trois étages illustrée Figure 1. Cc2 Cc1 Ve gm3 Cp3 rp3 Cp2 gm2 gm1 rp2 CL rL Vs Figure 1. Compensation Nested Miller A la manière de la compensation « Miller », les deux capacités Cc1 et Cc2 ont pour rôle de déplacer les trois pôles liés aux capacités intrinsèques de chaque étage : fp3=1/(rp3.Cp3), fp2=1/(rp2.Cp2) et fp1=1/(rL.CL). Cependant, l’ajout des capacités de compensation implique la création de deux zéros de transmission. Le système est alors composé de trois pôles et deux zéros. Un outil de calcul formel permet, après écriture des lois aux nœuds, l’obtention de la fonction de transfert simplifiée : Où A0=gm3rp3gm2rp2gm1rL est le gain statique de la chaine et pd=1/rp3gm2rp2gm1rLCc2 est le pôle dominant. En fonction de la taille des capacités de compensation choisies, les zéros sont soit rejetés en haute fréquence, soit restent proche de la fréquence de transition [6]. Dans ce dernier cas seulement, les zéros sont pris en considération dans l’étude de la stabilité. Pour illustrer le déplacement des pôles, les gains du diagramme de Bode sont présentés sur les Figure 2 et Figure 3. p2' Cc1 p2 Dans le cas présenté à la Figure 3, nous notons que les pôles p3 et p1 qui rendaient le système instable (déphasage de -90° chacun) sont rejetés au-delà de la fréquence de transition. Cependant, nous pouvons également constater sur la Figure 5 que la bande passante est réduite après l’introduction des deux capacités de compensation. 2.2 Les compensations fréquentielles « multipath » Les compensations traditionnelles telles que la NMC, voient leur bande passante diminuer à chaque ajout de capacité de compensation. Dans l’exemple précédent, nous avons une structure à trois étages, soit deux nœuds hautes impédances au sein du circuit. Deux capacités de compensation sont donc nécessaires. La bande passante initiale est donc réduite d’un facteur quatre au profit de la stabilité. L’idée consiste donc de stabiliser le système en diminuant le moins possible la bande passante initiale de l’amplificateur. [8], [9] et [10] donnent un aperçu des différentes méthodes de compensation utilisant la propriété « multipath ». Sans être exhaustif, les structures « multipath » les plus connues sont Multipath Nested Miller Compensation (MNMC), Multipath Nested gm Nested Miller Compensation (MNGNMC), Multipath Reversed Nested Miller Compensation (MRNMC), Multipath Hybrid Nested Miller Compensation (MHNMC). Après une étude (non détaillée ici) effectuée à l’aide d’outils de calcul formel et de calcul numérique, nous avons choisi d’appliquer la MNMC. Sa représentation sous forme de schéma bloc se trouve décrite dans la figure 4. La transconductance, la résistance et la capacité au nœud sont représentées respectivement par gmi, rpi et cpi pour i=1, 2, 3. CL et RL sont les capacités et résistances de charge. Les capacités de compensation sont référencées par Cc1 et Cc2. La transconductance gm4 constitue un second chemin dans la structure « multipath ». p3 Cc1 Cc2 p1 C Gain c1 Fréquence p 1' Ve gm3 Cp3 rp3 gm2 Cp2 rp2 gm1 CL rL gm4 Figure 2. NMC - Déplacement de pôles après l'ajout de Cc1 Cc2 p2" p2' p3 Gain Cc2 Fréquence p3' p1' p1" Cc2 Figure 3. NMC - Déplacement de pôles après l'ajout de Cc2 Figure 4. MNMC Nous pouvons remarquer sur la figure 4 que les blocs de gain possèdent un signe. Effectivement, les amplificateurs opérationnels sont utilisés dans des structures de gain ou de buffer, ce qui entraine une contre-réaction du nœud de sortie sur une entrée de l’amplificateur. La chaine interne est alors inverseuse. Nous pouvons constater que le bloc « multipath » ajouté possède le même signe que les blocs indicés 3 et 2. Peu importe le chemin, le signal sera donc en phase à l’entrée du dernier bloc. Enfin, nous pouvons constater que le bloc « multipath » enveloppe les blocs indicés 3 et 2. Il Vs est également possible de le placer autour des blocs indicés 2 et 1 mais dans ce cas il doit être inverseur. De plus, d’un point de vue intégration du circuit électronique, la conception de la gestion de l’étage classe AB de l’étage de sortie et la fonctionnalité rail à rail sont plus délicates dans ce dernier cas. Nous verrons plus en détail la description du circuit réalisé dans la partie trois. 2.3 Caractéristiques fréquentielles MNMC L’outil de calcul formel permet de déterminer l’équation de la fonction de transfert. Où A0 et pd ont la même définition que pour HNMC. Nous pouvons remarquer dans cette équation qu’il existe un moyen de contrôle supplémentaire qui est la transconductance gm4. Une étude partielle faite dans [11] donne les relations nécessaires aux dimensionnements des capacités de compensation : De plus, une relation importante entre la chaine principale à grand gain et la chaine secondaire rapide donne lieu à une nouvelle égalité. Pour correctement compenser les effets pôles zéros, les deux systèmes, à trois étages et à deux étages, doivent avoir la même bande passante. Donc en étudiant séparément les deux parties, on obtient : Par conséquent, GBW3=GBW2 implique : Ces trois équations permettent d’arriver à un système rapidement fonctionnel avec de bonnes propriétés dynamiques. 2.4 Description du schéma électrique Le passage du schéma bloc comportemental à la conception du circuit doit répondre aux exigences du cahier des charges de l’amplificateur opérationnel. Dans notre cas, l’entrée et la sortie sont rail à rail. Cela signifie que le signal peut utiliser toute la plage de fonctionnement entre le rail d’alimentation de tension maximale et le rail d’alimentation de tension minimale. En sortie (figure 5), cela est rendu possible par l’utilisation de transistors PMOS et NMOS polarisés en source commune. Ce sont donc des étages de gain, le gain global de la structure correspondant à la transconductance gm1 (figure 4). Pour réaliser le contrôle de la structure de l’étage de sortie (polarisation en classe AB), celle-ci intègre un étage Monticelli. [12] explique la mise en œuvre de cet étage de sortie dont le principe est fondé sur les boucles translinéaires, en l’occurrence des boucles de Vgs car nous travaillons en technologie CMOS. En entrée, une paire différentielle PMOS assure le fonctionnement pour les tensions de mode commun proche du rail inférieur et une paire différentielle NMOS assure le fonctionnement pour les tensions de mode commun proche du rail supérieur. Le concepteur décide quelle paire va conduire la majorité du temps. Notre architecture possède de plus un système de régulation entre les deux paires qui assure une stabilité de la transconductance globale du premier étage. Cette dernière correspond à la transconductance gm3 du modèle comportemental. Par ailleurs, l’entrée de la transconductance gm4 est également connectée à l’entrée du circuit sur la figure 4. Cela signifie que le schéma électrique possède en double les paires différentielles afin de fonctionner en rail à rail. Il y a donc en tout deux paires différentielles PMOS et deux paires différentielles NMOS. L’étage intermédiaire est dans notre cas un transistor polarisé dans un étage de gain de type source commune. Sa charge active, au même titre que les paires différentielles d’entrées, est une structure de cascode repliée. Elle permet d’avoir une forte impédance à chaque sortie d’un bloc de gain et de relever le niveau tension. Vbias Paires différentielles NMOS secondaire Paires différentielles NMOS principal Vbias Vbias Vplus Contrôle de la transconductance contstante Contrôle de la transconductance contstante Polarisation du transistor source commune Contrôle classe AB Monticelli Transistor en source commune Vmoins Cc1 Cc1 Vbias Vbias Paires différentielles PMOS principal Paires différentielles PMOS secondaire Vbias Gm3 Cc2 Gm4 Gm1 Gm2 Figure 5. Circuit utilisant le "Multipath" Vs Enfin, nous avons les capacités de compensation Cc1 et Cc2 qui sont représentées sur la figure 5. La capacité Cc1 de la modélisation comportementale est intégrée sous forme de deux capacités. Les deux capacités ont la même valeur et cette valeur est égale à la capacité Cc1. 3. Résultats de simulation Afin d’illustrer le fonctionnement de la compensation « Multipath », le diagramme de Bode de la figure 6 met en évidence le fonctionnement des deux chaines seules puis le résultat final. La courbe bleue, celle dont le gain basse fréquence est le plus faible, constitue la chaine qualifiée de secondaire. Effectivement, le passage de la phase au delà des 180° se produit à une fréquence plus élevée que pour la courbe orange qui est la chaine à 3 étages. Finalement, la courbe verte, qui chevauche à la fois la courbe bleue et la courbe orange, prend le meilleur des deux courbes pour conserver une bande passante intéressante après l’ajout des deux capacités de compensation. De plus, par extraction, nous obtenons une fréquence unitaire de 162kHz pour la courbe orange, ce qui correspond à un amplificateur standard à trois étages compensé avec la méthodologie « Nested Miller ». Nous obtenons également une fréquence unitaire de 370kHz avec l’amplificateur complet tel que présenté dans cet article. Le gain de 2 au niveau de la fréquence unitaire est donc justement illustré. Figure 6. Diagramme de Bode "Multipath" Le tracé de la figure 6 a pu être réalisé suite à la conception et au dimensionnent des transistors de l’amplificateur opérationnel dans une technologie 0.25µm standard. Les courbes ont été tracées alternativement en débranchant les différents blocs du système complet. 4. Conclusion La compensation fréquentielle « Multipath » apparait comme une méthode efficace pour la stabilisation des amplificateurs opérationnels. Elle peut s’appliquer à toutes les compensations fréquentielles classiques car c’est la création d’un nouveau chemin physique qui permet d’obtenir une moindre réduction de la bande passante. Sa mise en œuvre est néanmoins plus délicate car elle doit prendre en compte les fonctionnalités déjà acquise dans la chaine principale. Des études complémentaires concernant le temps d’établissement sont en cours. Références [1] Huijsing, J., Hogervorst, R. & de Langen, K.-J., “Lowpower low-voltage VLSI operational amplifier cells”, Circuits and Systems I: Fundamental Theory and Applications, IEEE Transactions on, 1995, Vol. 42(11), pp. 841-852. [2] Miller, J.H., Frequency Compensation of A-C Instruments American Institute of Electrical Engineers, Transactions of the, 1951, 70, 217 -221 [3] Yang H. & Allstot D., Modified modeling of Miller compensation for two-stage operational amplifiers Circuits and Systems, 1991., IEEE International Sympoisum on, 1991, 2557-2560 vol.5 [4] Blakiewicz, G. Frequency compensation for two-stage operational amplifiers with improved power supply rejection ratio characteristic, Circuits, Devices Systems, IET, 2010, 4, 458 -467 [5] Laker, K.R. & Sansen, W.M., “Design of Analog Integrated Circuits and Systems”, McGraw-Hill, Inc, 1994. [6] Leung, K.N. & Mok, P., “Analysis of multistage amplifierfrequency compensation”, Circuits and Systems I: Fundamental Theory and Applications, IEEE Transactions on, 2001, Vol. 48(9), pp. 1041-1056 [7] Leung, K.N. & Mok, P., “Nested Miller compensation in low-power CMOS design”, Circuits and Systems II: Analog and Digital Signal Processing, IEEE Transactions on, 2001, Vol. 48(4), pp. 388-394. [8] Eschauzier,Huising, « Frequency compensation Techniques for low-power operational amplifiers »,Kluwer AcademicPublishers, Delft, 1995 [9] R. G. H. Eschauzier, L. P. T. Kerklaan, and J. H. Huijsing, “A 100MHz 100dB operational amplifier with multipath nested Miller compensation structure,” IEEE J. Solid-State Circuits, vol. 27, pp. 1709–1717, Dec. 1992 [10] Jingjing Hu, Johan H. Huijsing and Kofi A.A. Makinwa, « A Three-Stage Amplifier with Quenched Multipath Frequency Compensation for All Capacitive Loads » IEEE International Symposium on Circuits and Systems, pp. 225 – 228, 2007 [11] Huijsing, J. H., “Operational Amplifiers: Theory and design”, Kluwer Academic Publishers, 2001. [12] Monticelli, D., A quad CMOS single-supply op amp with rail-to-rail output swing, Solid-State Circuits, IEEE Journal of, 1986, 21, 1026-1034