Mesurable, fair-play, objectif et pragmatique

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Mesurable, fair-play, objectif et pragmatique
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A bâton rompus
international transport journal 11-12 2011
Richer GmbH
«Mesurable, fair-play,
objectif et pragmatique»
Werner Sohn a fondé la société Richer GmbH. C’est de «façon mesurable, fair-play, objective et pragmatique» que ce manager, jusqu’à
récemment au service d’un des leaders du transport & logistique, veut sonder le terrain en matière de durabilité, et ce auprès de ses col-
Monsieur Sohn, vous essayez de vous
attaquer d’une nouvelle façon au thème de la durabilité. Pourriez-vous en
raconter davantage à nos lectrices et
lecteurs?
A l’heure actuelle, le thème de la durabi­
lité est sur toutes les lèvres. Pratiquement
chaque entreprise fait une déclaration
à ce propos. En se penchant davantage
sur ce sujet, on découvre toutefois qu’il
existe pas mal de choses absurdes dans
ce contexte. La durabilité est une affaire
politique et le débat qu’elle engendre est
un débat plutôt «branché» que fondé sur
des faits. J’ai étudié les rapports en ma­
tière de durabilité provenant de grandes
entreprises, en particulier des branches
logistique et transport. J’ai retenu dans ce
contexte les rapports de grosses pointures
et de sociétés de taille moyenne. Résultat:
en prenant les critères de la durabilité que
sont les collaborateurs, l’économie, l’en­
vironnement et l’engagement social pour
se faire une idée de qui travaille effecti­
vement de façon durable, on a vite fait
de se noyer dans un fatras d’informations
individuelles qu’il est presque impossible
de juger et de comparer. Et c’est ce qui
doit changer à tout prix.
«Ma première idée était:
créons un genre de Stiftung Warentest
(association de consommateurs)
de la durabilité›.»
Ma première idée était: créons un genre
de «Stiftung Warentest» (association de
consommateurs) de la durabilité. Appli­
qué à la logistique – une branche de pres­
tations de services qui ne fabrique pas de
produit final physique – il s’agit d’étudier
de quelle façon les sociétés logistiques gè­
Photo: Andreas Haug
lègues de la branche. Il a expliqué à Tim-Oliver Frische, directeur de publication et rédacteur en chef de l’ITJ, comment il compte procéder.
Dans un cadre de verdure pour discuter de la montagne d’informations sur le thème de la durabilité:
Werner Sohn, directeur de Richer GmbH, et Tim-Oliver Frische, directeur de publication de l’ITJ.
rent leurs effectifs, à quel point elles pè­
sent sur l’environnement et quel est leur
engagement social. Un tel bilan aurait dû
être établi depuis longtemps dans la bran­
che logistique.
Mesurer la durabilité? Est-ce que quelqu’un le fait déjà?
Il faudrait citer dans ce contexte les «clas­
siques», par exemple le Dow Jones Sus­
tainability Index. Il s’agit d’agences de
notation qui choisissent les très grands
acteurs mondiaux cotés en Bourse, étu­
dient leurs rapports sur la durabilité, les
évaluent de façon subjective et fournis­
sent des estimations sur l’organisation de
l’entreprise et ses projets d’avenir. Tout
cela semble satisfaisant et raisonnable
jusqu’à un certain point, mais il y a des
désavantages de taille: c’est subjectif, li­
mité aux grands et cela contient des appré­
ciations qui ne s’appuient pas obligatoi­
rement sur des chiffres, données et faits,
mais sur des estimations de rédacteurs ou
collaborateurs de ces instituts. C’est là
que j’ai découvert où le bât blesse: il n’y
a pas que des investisseurs (le groupe cible
du Dow Jones Sustainibility Index), mais
également un public intéressé et des col­
laborateurs qualifiés qui aimeraient s’in­
former simplement et de façon complète
sur les efforts des entreprises (tant petites
que grandes) en matière de durabilité. En
m’appuyant sur ma longue expérience du
secteur benchmarking, je me suis donc
attaqué au sujet.
A bâton rompus
international transport journal 11-12 2011
Quel en a été le résultat?
J’ai mis au point un catalogue de critères
pour ces quatre catégories, en veillant à
fixer des critères échelonnables et mesu­
rables. C’est en effet uniquement en me­
surant qu’il est possible de faire une décla­
ration objective et de comparer le grand
acteur à la société de taille moyenne. Il
faut pouvoir dire: par rapport aux capaci­
tés de l’entreprise, la durabilité est de tant
et tant. Il s’agit donc de déterminer une
valeur par rapport aux capacités. J’évite
d’intégrer dans la procédure des projec­
tions sur l’avenir du genre: «Nous voulons
faire tant de choses. Nous avons lancé 23
nouveaux projets. Tout va s’arranger.» De
telles choses n’apparaissent pas dans mon
indice. Je tiens uniquement compte de ce
qui a vraiment été réalisé pendant l’année
écoulée. C’est simple et dur.
«Le thème de la durabilité
est depuis longtemps à l’ordre du jour,
mais la logique avec laquelle nous nous
y attaquons est relativement neuve.»
Après fair-play (échelonnable) et objectif
(basé sur les chiffres, données et faits, pas
d’appréciations subjectives d’agences de
notation), le troisième point important est
pragmatique. Cela signifie qu’il existe un
catalogue de critères clairement définis à
l’aune desquels doivent se laisser mesurer
les entreprises si elles souhaitent participer
au bilan. Ce questionnaire demande des
renseignements que toute entreprise bien
gérée devrait de toute façon avoir à dis­
position. Mon plan est donc on ne peut
plus clair.
Dans ce contexte, qu’en est-il d’allégations mensongères? Par exemple une
société dont le rapport sur la durabilité
est vague ou rédigé de façon ambiguë,
Werner Sohn
Werner Sohn a assumé pendant plus de 20
ans des fonctions de manager dans le secteur transport & logistique, notamment pour
Lufthansa Cargo, Danzas et DHL. Ses points
forts ont été et demeurent l’optimisation des
processus, le management de la performance
et le benchmarking. Il les a appliqués dans la
pratique dans des projets à l’échelle globale.
Ces dernières années, il a notamment dirigé
la mise en place de «shared-service-centers»
efficaces en Asie et aux USA.
une société qui essaie de donner subjectivement une meilleure image qu’elle
n’a objectivement. Avez-vous fait des
constatations lors de vos recherches?
Je préfère ne rien dire à ce sujet. C’est
précisément ça: je veux être ni subjectif
ni donner une appréciation subjective.
L’idée de l’indice est de laisser parler les
chiffres. Celui qui les consultera et regar­
dera la performance relative de l’entrepri­
se pourra déterminer lui-même qui est le
bon ou le moins bon élève et dans quelle
mesure cela colle avec la stratégie de mar­
keting de l’entreprise en question.
Dans quelle mesure les portes vont
sont-elles ouvertes lorsque vous vous
présentez avec votre questionnaire?
C’est une bonne question. Regardez tout
d’abord combien d’entreprises évoquent
la durabilité de leur propre initiative. Le
Fraunhofer-Institut a réalisé récemment
une enquête via Internet afin de détermi­
ner quelles sociétés de la branche trans­
port et logistique publient un volume
appréciable d’informations sur la dura­
bilité. Sur les 150 sociétés retenues pour
l’enquête, une cinquantaine le faisait. Un
tiers prend donc l’offensive et fournit au
public des informations sur la durabilité.
Les autres ne font rien ou se contentent
de déclarations «vaseuses» du genre: «Les
collaborateurs sont notre bien le plus
précieux» ou «Nous respectons l’environ­
nement en ménageant les ressources». Ce
sont là des déclarations générales et bana­
les qui reflètent plus une attitude que des
faits concrets.
«L’idée de l’indice est de laisser parler
les chiffres. Celui qui les consultera
et regardera la performance relative
de l’entreprise pourra déterminer
lui-même qui est le bon
ou le moins bon élève.»
Quelle est l’importance de votre questionnaire?
Il contient environ 70 points. Dans la ca­
tégorie collaborateurs par exemple, nous
prenons en considération les secteurs
formation, perfectionnement, quota de
femmes, diversité des classes d’âge, mais
également le rapport entre salaires des
managers et salaires des employés. L’in­
dice colle par conséquent également à
l’actualité. La rubrique «collaborateurs»
est celle de l’indice ayant le plus grand
poids. Ce qui explique d’ailleurs notre
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coopération avec Personalunion (voir
encadré ci-dessous). Dans le domaine
de l’environnement, nous nous intéres­
sons aux émissions et aux efforts visant
à compenser les émissions inévitables par
des mesures adéquates. Dans ce contexte,
l’échelonnage est également important:
combien de pourcent du chiffre d’affaires
la société consacre-t-elle à ce point? C’est
là que nous retrouvons la logique.
Quels sont vos projets? Comment voulez-vous faire avancer l’indice?
Le thème de la durabilité est depuis long­
temps à l’ordre du jour, mais la logique
avec laquelle nous nous y attaquons, c’està-dire nos exigences en matière de mesu­
rabilité, fair-play, objectivité et pragmatis­
me, est relativement neuve. Nous allons
donc contacter directement les entreprises
afin de remplir au mieux le questionnaire.
Cela nous fournira alors un classement et
donnera aux sociétés un bilan correct. J’ai
l’intention de lancer le tout dans la bran­
che que je connais le mieux: c’est-à-dire
celle du transport et de la logistique.
Monsieur Sohn, je vous remercie pour
cet entretien.
www.richer-world.com
Personalunion
Personalunion est une société de recrutement
et de conseils aux entreprises créée en 1997
par Uwe Borowy (ci-dessus). Ses compétences-clés sont le recrutement professionnel
de cadres dirigeants et de jeunes hautement
qualifiés capables de prendre la relève dans
des entreprises de transport et de logistique.
Parmi les clients à l’échelle mondiale figurent
tant des sociétés de taille moyenne que des
groupes internationaux. Personalunion propose également ses services pour l’achat et la
vente de sociétés, les prises de participation,
les problèmes de succession et la réalisation
de reclassements externes. Cette société
soutient Richer GmbH en ouvrant les portes
des entreprises à l’introduction de l’indice de
durabilité.
www.personalunion.com