Diagnostic de l`hydrocéphalie à pression normale

Transcription

Diagnostic de l`hydrocéphalie à pression normale
Synthèse
Geriatr Psychol Neuropsychiatr Vieil 2012 ; 10 (4) : 415-25
Diagnostic de l’hydrocéphalie à pression
normale : revue et propositions
chez le sujet âgé
Copyright © 2017 John Libbey Eurotext. Téléchargé par un robot venant de 78.47.27.170 le 07/02/2017.
Diagnosis of normal pressure hydrocephalus in elderly
patients: a review
Marc Verny1
Gilles Berrut2
1 Centre de gériatrie, Groupe hospitalier
Pitié-Salpêtrière Charles Foix,
Paris, France
<[email protected]>
2 Pôle hospitalo-universitaire
de gérontologie clinique,
CHU de Nantes, France
Tirés à part :
M. Verny
Résumé. La définition de l’hydrocéphalie à pression normale (HPN) repose, chez l’adulte,
sur l’association de signes cliniques évocateurs (triade de Hakim et Adams) et d’une imagerie cérébrale dont les caractéristiques sont compatibles avec cette hypothèse. À cela
s’associe une pression intra-crânienne normale ou légèrement augmentée. L’objectif de ce
travail était de préciser les techniques et méthodes facilitant le diagnostic d’HPN. La revue
de la littérature réalisée à partir de la base de données Medline, sans limitation de date, a
inclus les mots clés : « diagnosis » et « normal pressure hydrocephalus ». Ils devaient être
présents dans le titre de l’article : 13 sur 43 ont été sélectionnés initialement. Les techniques
proposées apparaissent très diverses et cherchent plus souvent à prédire une amélioration
après la mise en place d’une dérivation, ce qui est indépendant des critères de diagnostic
proposés en 2005. Cela introduit une ambiguïté dans les études. En pratique, le diagnostic
d’HPN est plus difficile dans la population âgée car les diagnostics différentiels sont plus
nombreux. Surtout les associations pathologiques sont plus fréquentes, notamment avec
les lésions vasculaires (notamment de microangiopathie) et la maladie d’Alzheimer. Ces
données sont à considérer dans la prise de décision quant à une intervention de dérivation
du LCR.
doi:10.1684/pnv.2012.0373
Mots clés : maladie d’Alzheimer, lésions vasculaires cérébrales, ponction lombaire, hydrocéphalie à pression normale idiopathique
Abstract. The definition of normal pressure hydrocephalus (NPH), in adults, associates
clinical signs (Adams and Hakim triad) involving gait disorders, urinary incontinence and
dementia, associated with aspects on brain imaging that are consistent with this hypothesis and also normal or slightly increased intracranial pressure. The aim of this study was to
clarify the techniques and methods facilitating the diagnosis of NPH. The literature review
has been conducted from the Medline database without date limitation including the keywords “normal pressure hydrocephalus” and “diagnosis.” They should appear in the article
title. From the 43 initially sorted, only 13 have been selected using exclusion criteria. The
proposed methods are very sparse and focused on the improvement after surgical shunt.
This focus is independent from the diagnosis criteria proposed in 2005. This introduces an
ambiguity in the interpretation of the results. In practice, the diagnosis of NPH is more difficult in the elderly population where differential diagnoses are frequent, particularly vascular
lesions (notably microangiopathy) and Alzheimer’s disease. The more invasive techniques
as continuous spinal drainage (usually during 3 days) or some features of CSF dynamics
(Rout , compliance) seem to be the best predictors of after shunt improvement. However,
these techniques are difficult to use in routine in the elderly. The combination of Evans
index and corpus callosum angle on MRI is very useful to improve the differential diagnosis
with cerebral atrophy. Spinal tap test (lumbar puncture with the removal of 40 mL of CSF)
can be repeated two or three times for consecutive days to improve the predictive value
before shunting. Gait and balance often improve after shunt, more than cognition and bladder disorders. In the elderly population, the prognosis after 3 years is non conclusive despite
initial improvement. Poor prognosis seems to be due to associated pathologies in particular
neurodegenerative diseases. This should be considered in decision-making of CSF shunt.
Key words: Alzheimer’s disease, cerebrovascular lesions, lumbar puncture, idiopathic normal pressure hydrocephalus
Pour citer cet article : Verny M, Berrut G. Diagnostic de l’hydrocéphalie à pression normale : revue et propositions chez le sujet âgé. Geriatr Psychol
Neuropsychiatr Vieil 2012; 10(4) :415-25 doi:10.1684/pnv.2012.0373
415
M. Verny, G. Berrut
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L
es premières descriptions de l’hydrocéphalie à pression normale [1, 2] rapportent une triade clinique
dite de Hakim et Adams, composée d’un trouble
de la marche (instabilité posturale, pas « glissés », rigidité,
astasie abasie. . .), de troubles cognitifs (profil sous-corticofrontal avec surtout troubles attentionnels, ralentissement,
apathie, syndrome dysexécutif) ou encore émotionnels (irritabilité, instabilité émotionnelle) et de troubles urinaires
(urgence mictionnelle, pollakiurie nocturne), variable en
intensité et dans leurs composantes selon les patients.
Depuis, on admet que la définition de l’hydrocéphalie à
pression normale repose, chez l’adulte, sur l’association
de signes cliniques évocateurs et d’une imagerie cérébrale
dont les caractéristiques sont compatibles avec cette hypothèse (dilatation ventriculaire plus importante que ne le
voudrait l’atrophie corticale). À cela s’associe une pression
intra-crânienne normale ou légèrement augmentée [3].
Selon une étude épidémiologique norvégienne [4],
fondée sur les critères cliniques d’hydrocéphalie à pression normale probable, l’incidence serait de 5,5 pour
100 000 habitants et la prévalence de 21,9 pour 100 000.
La prévalence augmente avec l’âge passant de 3,3 pour
100 000 entre 50 et 59 ans à 181,7 pour 100 000 chez les
sujets âgés de 70 à 79 ans. Selon une étude effectuée à
partir des données de la Mayo Clinic entre 1990 et 1994,
parmi 60 démences, 5 avaient une suspicion d’HPN, mais
seulement 3 relevaient d’un traitement chirurgical (dérivation ventriculaire) [5].
Dans ce travail, nous limiterons notre propos aux hydrocéphalies chroniques de l’adulte répondant à la définition
proposée ci-dessus. Nous exclurons les hydrocéphalies
secondaires à un obstacle morphologique macroscopique
sur les voies d’écoulement du liquide céphalo-rachidien
(LCR) telles qu’une pathologie tumorale ou encore une sténose de l’aqueduc de Sylvius. En dehors de ces causes, les
hydrocéphalies chroniques de l’adulte (que l’on appellera ici
HPN secondaires) peuvent être soit liées à une pathologie
responsable d’un ralentissement de l’écoulement ou de la
résorption du LCR, soit idiopathique (HPNi). Les causes les
plus habituelles d’HPN secondaires sont les antécédents
d’hémorragie méningée, de méningite ou de traumatisme crânien sévère. La distinction entre hydrocéphalie
chronique idiopathique et secondaire serait justifiée par
l’existence d’un meilleur pronostic évolutif post-dérivation
de ces dernières, même si cela ne fait pas consensus chez
les auteurs, les données récentes ne montrant pas de différence entre ces deux formes d’hydrocéphalie [6, 7]. La
principale différence serait un âge de début plus précoce
dans les cas d’HPN secondaires.
Les difficultés diagnostiques et pronostiques prédominent chez les patients âgés car les pathologies pouvant
Tableau 1. Diagnostics différentiels de l’HPNi ou secondaire et/ou
diagnostics associés (adapté de Relkin et al. [3]).
Table 1. Differential diagnosis of idiopathic or secondary hydrocephalus and/or related disorders (adapted from Relkin et al. [3]).
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Geriatr Psychol Neuropsychiatr Vieil, vol. 10, n ◦ 4, décembre 2012
Les maladies neurodégénératives
La maladie d’Alzheimer
La maladie de Parkinson
Démence à corps de Lewy
Maladie de Huntington
Démence frontotemporale
Dégénérescence cortico-basale
Paralysie supranucléaire progressive
Sclérose latérale amyotrophique
Atrophie multisystématisée
Encéphalopathie spongiforme (maladie de Creutzfeldt-Jakob)
Les démences vasculaires
Démence multi-infarctus
Maladie de Binswanger
Cadasil
Infarctus sous-corticaux (état lacunaire)
Angiopathie amyloïde
Les maladies infectieuses
Maladie de Lyme
Syphilis
VIH
Pathologies urologiques
Hypertrophie bénigne de la prostate
Cancer de la prostate
Divers
Carence en vitamine B12 (sclérose combinée de la moelle)
Dépression sévère (dans certaines formes cliniques)
Lésions post-traumatiques cérébrales
Myélopathie cervicarthrosique et/ou canal lombaire étroit
Méningite carcinomateuse
Encéphalopathie de Wernicke
Pathologie tumorale de la moelle épinière (méningiome. . .)
être responsables d’une sémiologie évoquant une « triade
de Hakim et Adams » y sont nombreuses. Elles sont
importantes à identifier car elles ne répondent pas à une
intervention chirurgicale de dérivation du LCR. C’est le
cas des lésions vasculaires sous-corticales (état lacunaire,
maladie de Binswanger. . .), des troubles neurologiques
secondaires à un éthylisme chronique, de certaines lésions
tumorales (méningiome frontal par exemple), mais aussi
de maladies neurodégénératives dont la présentation
peut partager des traits similaires à ceux de l’HPN en
fonction de la sémiologie prédominante (paralysie supranucléaire progressive, atrophie multisystématisée, maladie
d’Alzheimer. . .) (tableau 1). Dans tous ces cas, l’apport de
l’imagerie morphologique (scanner cérébral ou au mieux
IRM cérébrale) est déterminant.
Ainsi, les signes cliniques de la triade de Hakim et
Adams, même associés aux signes de neuro-imagerie, ne
sont pas suffisamment spécifiques pour distinguer l’HPN
des autres causes de troubles de la marche, d’incontinence
urinaire et/ou de syndrome démentiel, et surtout pour
prédire l’évolution post-dérivation. C’est pourquoi des
Diagnostic de l’hydrocéphalie à pression normale
examens complémentaires ont rapidement été proposés
après la publication initiale [1]. On peut citer ainsi la pneumoencéphalographie, la cisternographie isotopique ou les tests
de perfusion de LCR. Ces tests s’avèrent de faible performance diagnostique [8-11] et de mauvaise tolérance.
L’objectif dans cet article sera, à partir d’une revue de
la littérature structurée, de préciser l’apport des techniques
visant à améliorer le diagnostic d’HPNi.
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Méthodes
La recherche bibliographique (figure 1) a été réalisée à
partir de la base de données Medline sans limitation de
date. Les mots clés suivants ont été recherchés lorsqu’ils
étaient présents dans le titre de l’article : diagnosis et normal pressure hydrocephalus. Les options suivantes ont été
exigées : articles en langue anglaise, à l’exclusion des travaux de type review et litterature review. Ainsi 43 articles
ont été présélectionnés. Ont été exclus secondairement,
les cas cliniques (n = 1), les articles traitant uniquement du
diagnostic différentiel (n = 6), ceux dont le diagnostic était
fondé seulement sur la valeur prédictive de l’efficacité de la
dérivation ventriculaire (n = 2), les descriptions de démarche
clinique (n = 1) et les revues de la littérature sans données
originales (n = 13). Au total 13 articles correspondaient aux
critères sélectionnés [12-24].
Résultats
Les résultats sont résumés dans les tableaux 2 et 3.
Les examens et tests proposés pour améliorer le diagnostic
de l’HPN visaient souvent à préciser la prédiction d’une
amélioration clinique (jugée de manière différente selon
les études) après la mise en place d’une dérivation (shunt
ventriculo-péritonéal le plus souvent). Ils apparaissent très
divers : 2 études morphologiques (une en scanner-X, l’autre
en IRM), 2 techniques de cisternographie (une en scanner,
l’autre en IRM), 2 études en IRM sur les flux du LCR (dont
une étudiant aussi les flux veineux dans le sinus longitudinal
supérieur), 3 études sur la perfusion cérébrale (1 par inhalation du Xe133, 1 en tomographie par émission de positons
(TEMP) pour identifier des profils de type Alzheimer, 1 utilisant la TEMP et/ou l’IRM pour mesurer la perfusion avec
modification post-PL), 2 études sur le drainage externe prolongé de LCR dont une couplée avec l’enregistrement de
la pression intra-crânienne, 1 travail avec un dosage biologique de la lipocalin-type prostaglandin D synthase (PGDS)
dans le LCR et une étude sur une procédure globale de diagnostic s’intéressant au devenir à long terme des patients.
Ces études concernaient dans 70 % des cas des HPNi. Les
éléments de définition de l’HPN apparaissent quant à eux
homogènes.
Toutes les études étaient prospectives sauf une [24].
Les effectifs de patients présentant une HPN étaient
Recherche dans la base Medline
Mots clés du titre : « diagnosis » et « normal pressure hydrocephalus »
Langue anglaise
Article de tout type sauf « review » et « litterature review »
43 articles
- Diagnostic différentiel (n = 6)
- Revue de bibliographie (n = 13)
- Efficacité prédictive de la
dérivation ventriculaire (n = 2)
- Démarche clinique (n = 1)
- Cas clinique (n = 1)
13 articles
Figure 1. Plan de la recherche bibliographique des études.
Figure 1. Flow chart for the selection of studies.
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M. Verny, G. Berrut
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Tableau 2. Caractéristiques principales des 13 études sélectionnées.
Table 2. Main characteristics of the 13 selected studies.
Études (réf)
Test ou
technique
Nombre
de patients
Ostertag 1978 [12]
Cisternographie
avec
metrizamide
par scanner
55 dont
36 suspects
d’HPN
Kushner 1984 [13]
Débit sanguin
par inhalation
de Xe 133
19 HPN
27 démences
18 SA normaux
Wikkelsö 1989 [14]
Paramètres
du scanner
prédictifs
Granado 1991 [15]
HPNi
et/ou HPN
secondaire
Prospectif
ou
rétrospectif
Groupe
contrôle
Suivi ?
Durée ?
Évaluation
postdérivation
P
+
NP
NP
11i
8s
P
+
NP
Examen
refait
post-PL
+
38 HPN
8i
P
-
3 à 6 mois +
TEMP
14 HPN
14i
P
-
3 à 6 mois + amélioration
cognitive
Poca 2002 [16]
Flux LCR
en IRM
35 HPN
suspectées
NP
P
+ 27 sujets âgés
sains
6 mois
+
Hertel 2003 [17]
Perfusion en
TEMP et/ou
IRM + PL
évacuatrice
Etude perfusion
post-PL
(24 h après)
27 HPN
27i
P
-
3 mois
+
Mase 2003 [18]
Dosage dans
LCR
Lipocalin-type
prostaglandin D
synthase (PGDS)
15 HPN
et 1 exclus
car shunt
inefficace
1i et 14s
P
+ 7 déments et
14 sujets âgés
sans pathologie
neurologique
NP
+
Marmarou 2005 [19]
Test de drainage
externe du LCR
prolongé sur 3j
151 HPN
151i
P
-
Enquête
sur 10 j
suivant
et +
NP
Ishii 2008 [20]
Angle du corps
calleux ≥ 40◦
en IRM
34 HPN
34i
P
+ 34 MA
appariées pour
âge et 34 sujets
âgés normaux
NP
NP
Woodworth 2009 [21] Monitoring de la
pression du LCR
et évacuation
prolongée
51 HPN
51i
P
-
+
1, 3, 6, 12
mois puis
annuellement
Algin 2010 [23]
Contraste de
phase en IRM
aqueduc et SLS
43 HPN
43i
P
+ 15 sujets âgés
sains
+
NP
Algin 2011 [24]
Cysternographie
par IRM
(présence de
contraste dans
VL > ou = 24 h ;
injection intra
thécale)
36 HPN
36i
P
+ 15 sujets âgés
avec
majoritairement
des kystes
arachnoïdiens
communicant
ou non
+ durée
NP
+ mais
faible
nombre
d’interventions
(14/36)
Klassen 2011 [25]
Procédure
globale et
évaluation
pronostique
pot-shunt
41 HPN
13 shunts
uniquement mis
si amélioration
marche post-PL
NP
R
-
+ 3 mois
à 3 ans
Idem
HPNi : hydrocéphalie à pression normale idiopathique ; LCR : liquide céphalo-rachidien ; MA : maladie d’Alzheimer ; NP : non précisé ; PL : ponction lombaire ;
P : prospectif ; R : rétrospectif ; VL : ventricules latéraux ; SA : sujets âgés.
HPN i: idiopathic normal pressure hydrocephalus; CSF: cerebrospinal fluid; MA: Alzheimer’s disease; NP: unspecified; PL: lumbar puncture; P: prospective study;
R: retrospective study; VL: lateral ventricles; SA: elderly people.
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Tableau 3. Principaux résultats des 13 études sélectionnées.
Table 3. Main results of the 13 studies selected.
Études
Test ou technique
Facilité de mise en Apport
œuvre
Ostertag 1978 [12]
Cisternographie avec
metrizamide par scanner
Injection de produit Non précisé. Étude de faisabilité
contraste par PL
N’a plus d’intérêt avec IRM
puis bascule
Kushner 1984 [13]
Débit sanguin par inhalation
de Xe 133
-
Pas d’amélioration post-PL ou post-dérivation
Pas de différence/autres déments
Wikkelsö 1989 [14]
Paramètres du scanner
prédictifs
+++
+
Élargissement V3 prédicteur amélioration
(96 % rép vs 40 % non rép)
Granado 1991 [15]
TEMP
++
+
Détection de 5 profils de MA cognitivement non
améliorés (rien sur évolution marche. . .)
Poca 2002 [16]
Flux LCR en IRM
+++
+
Mesure au niveau de l’aqueduc avec 90 % de sensibilité
mais 50 % de spécificité ; problème de détection des
patients avec pression intra crânienne anormale par
existence de « vagues »
Hertel 2003 [17]
Perfusion en TEMP et/ou
IRM + PL évacuatrice
Étude perfusion post PL
(24 h après)
+++
+
Mais aucun des patients ayant des résultats négatifs à PL
et imagerie – n’a été opéré
9 résultats positifs PL et perfusion : tous améliorés ; 9 PLet perfusion + : 6 améliorés (3 non opérés pour
contre-indication. . .)
Mase 2003 [18]
Dosage dans LCR
+/Lipocalin-type prostaglandin D
synthase (PGDS)
+
Taux significativement plus bas/sujets normaux et aux
déments
Marmarou 2005 [19]
Test de drainage externe
du LCR prolongé sur 3j
-
+
Amélioration marche meilleur prédicteur ; apport tests
de perfusion avec 72 % de bonne prédiction d’évacuation
prolongée ; pas d’effet de l’âge sur efficacité
si amélioration par évacuation prolongée
Ishii 2008 [20]
Angle du corps
calleux > ou = 40◦ en IRM
+++
+
Pour un angle > ou égal à 90◦ acuité diagnostique
de 93 % MA, sensibilité 97 %, spécificité 88 %
Combinaison avec index d’Evans acuité 96 %, sensibilité
97 %, et spécificité 94 %
Woodworth 2009 [21] Monitoring de la pression du
LCR et évacuation prolongée
+
+
En analyse multivariées amélioration post-évacuation
prolongée prédictive + à 69 % pour la marche, 55 % pour
le cognitif et 22 % pour les sphincters
Pas de différence entre les répondeurs ou non
avec « vagues » ou pas
Algin 2010 [23]
Contraste de phase en IRM
aqueduc et sinus longitudinal
+++
+/Mesures des vitesses de flux LCR supérieures dans HPN
et inférieures pour les vitesses veineuses mais aucune
prédiction de l’effet du shunt
Algin 2011 [24]
Cysternographie par IRM
(présence de contraste
dans VL > ou = 24 h ;
injection intra thécale)
+/-
+
Persistance contraste au-delà de 24 h pour toutes les
HPN ; prédictivité amélioration post-shunt sensibilité
100 % mais spécificité 17 %
Klassen 2011 [25]
Procédure globale
et évaluation pronostique
post-shunt
NA
Déclin pour 12 survivants avec 5 pathologies associées
ou alternatives dont 4 neurodégénératives (3 diagnostics
neuropathologiques dont 1 PSP)
Amélioration : marche 50 % à 1 an et 33 % à 3 ans ;
troubles cognitifs 1/8 patients et incontinence urinaire 1/6
améliorés à 3 ans. Aucun patient avec instabilité posturale
modérée à sévère n’a eu une amélioration significative.
Complications : 33 % patients avec mort périoperatoire
LCR : liquide céphalo-rachidien ; MA : maladie d’Alzheimer ; NA : non applicable ; PL : ponction lombaire ; VL : ventricules latéraux.
LCR: cerebrospinal fluid; MA: Alzheimer’s disease; NA: not applicable; PL: lumbar puncture; VL: lateral ventricles.
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M. Verny, G. Berrut
Nos critères de sélection de la littérature, particulièrement restrictifs (articles comportant la mention du
diagnostic dans le titre), pourraient être considérés comme
trop limitatifs, ne permettant pas d’inclure suffisamment
d’études. En pratique, l’analyse de la bibliographie des
articles sélectionnés, et notamment celle des études les
plus récentes, n’a pas montré de travaux que notre sélection aurait négligés. On peut ainsi considérer que le critère
de choix portant sur la présence des mots clés uniquement
dans le titre des articles a conféré une réelle spécificité
à cette recherche bibliographique. On peut ainsi y voir un
critère de qualité.
Les principales critiques que l’on peut émettre concernant les travaux analysés dans cette revue de la littérature
sont :
– des effectifs de patients souvent limités, avec 10 études
ayant porté sur moins de 50 patients. Une seule étude a
inclus plus de 100 patients [19] ;
– des méthodes d’évaluation, notamment en termes
d’efficacité après soustraction de LCR très inhomogènes ;
– des durées de suivi et de réévaluation des patients après
traitement extrêmement variables, mais le plus souvent
inférieures à une année ;
– une absence fréquente de prise en compte des problèmes de co-morbidités, notamment cognitives, pourtant
reconnues comme très fréquentes dans cette situation
pathologique comme le montre le travail de Klassen et al.
[24] avec un mauvais pronostic à court - moyen termes.
Ces études permettent toutefois de retenir quelques
indicateurs pronostiques cliniques et radiologiques postdérivation [19, 20, 24]. Dans la triade caractéristique, il
semble bien que la marche soit le trouble le plus susceptible
de s’améliorer. Viennent ensuite les troubles cognitifs avec
une amélioration portant plutôt sur les troubles attentionnels et la vitesse d’exécution. Les troubles sphinctériens
sont les moins améliorés. Il apparaît que la probabilité
d’amélioration post-dérivation soit d’autant plus faible que
la triade symptomatique est présente [19]. Parmi les éléments d’amélioration post-PL évacuatrice (a fortiori après
un drainage externe prolongé du LCR), la diminution du
nombre de pas lors du demi-tour dans une épreuve de
marche paraît particulièrement intéressante [19]. Du point
de vue neuro-radiologique, outre les notions traditionnelles
de dilatation ventriculaire proportionnellement plus importante que le degré d’atrophie corticale (faible dimension des
sillons notamment à la convexité) et de signes de résorption
transépendymaire, il est nécessaire de recourir à la mesure
de l’index d’Evans et à celle de l’angle du corps calleux.
On peut retenir par ailleurs que les techniques les plus
performantes en termes de prédiction d’amélioration postdérivation sont également les plus invasives et comportent
des risques notamment infectieux [19, 21]. Elles sont aussi
techniquement les plus difficiles à mettre en œuvre chez
le sujet âgé et peuvent poser des problèmes de disponibilité. C’est le cas en France où, à notre connaissance,
seules quelques rares équipes neurochirurgicales réalisent
les techniques de mesures de résistance du LCR par les
tests de perfusion ou les drainages externes prolongés du
LCR (le plus souvent sur 3 jours !).
Si l’on retient la définition de l’hydrocéphalie à pression normale probable clinico-radiologique avec les critères
de diagnostic proposés par Relkin et al. [3] (tableau 4),
il apparaît que le diagnostic pourra souvent être retenu
sans nécessité de prévoir des investigations complémentaires. La difficulté vient de l’absence d’élément permettant
d’établir un diagnostic de certitude (pas de gold standard).
Cela est particulièrement vrai dans la population âgée où les
diagnostics différentiels peuvent aussi être des diagnostics
associés à l’HPN (tableau 1). C’est pourquoi toute une partie
de la littérature porte sur la capacité de certains examens
à prédire l’efficacité de la dérivation proposée lorsque le
420
Geriatr Psychol Neuropsychiatr Vieil, vol. 10, n ◦ 4, décembre 2012
compris entre 14 et 151 avec une moyenne sur l’ensemble
des travaux qui s’établit à 41,5 ± 14,9. Dans toutes les
études, la moyenne d’âge des patients était supérieure à
65 ans. Dans 2 publications [12, 13], cette donnée n’était
pas disponible.
Du fait de la variété des techniques et des tests utilisés en procédure diagnostique comme de leurs modalités
d’évaluation, il est difficile de proposer une synthèse. On
peut retenir que dans le domaine des données d’imagerie
morphologique, la mesure d’un angle au niveau du corps
calleux inférieur ou égal à 90◦ en IRM semble avoir une
excellente valeur diagnostique et sa valeur prédictive est
encore augmentée en la combinant à l’index d’Evans donnant ainsi une sensibilité de 97 % et une spécificité de
94 % [20]. Les mesures étaient effectuées sur des coupes
en séquence T1. L’indice d’Evans a été calculé comme le
rapport de la largeur maximale des cornes frontales sur la largeur maximale du crâne à sa face interne. L’angle du corps
calleux a été mesuré sur la coupe coronale perpendiculaire
au plan antéro-postérieur au niveau de la commissure postérieure. Les meilleurs résultats obtenus par ailleurs portaient
sur des techniques plus invasives et notamment celles de
drainage externe du LCR sur une période prolongée comme
le montre l’étude de Marmarou et al. [19]. Cette technique
impose que le cathéter soit en place pendant 3 jours, ce
qui limite son utilisation chez les patients présentant des
troubles cognitifs.
Discussion
Diagnostic de l’hydrocéphalie à pression normale
Tableau 4. Critères de diagnostic d’HPN idiopathique (HPNi) selon Relkin et al. [3].
Table 4. Idiopathic hydrocephalus diagnosis criteria (HPNi) from Relkin et al. [3].
Le diagnostic d’HPNi probable est basé sur l’histoire clinique, l’imagerie cérébrale, les signes physiques, et des critères physiologiques.
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I. Anamnèse
Les symptômes rapportés doivent être corroborés par un informateur familiarisé avec l’état pré morbide du patient et son état actuel et
doit inclure :
a. Un début insidieux
b. Un début après l’âge de 40 ans
c. Une durée minimale d’au moins 3 à 6 mois
d. Aucune preuve d’un événement antérieur comme un traumatisme crânien, une hémorragie intracérébrale, une méningite
ou d’autres causes connues de l’hydrocéphalie secondaire
e. Progression au fil du temps
f. Aucune autre pathologie neurologique, psychiatrique ou médicale générale suffisante pour expliquer totalement les symptômes
présentés
II. Imagerie cérébrale
Une étude d’imagerie cérébrale (scanner ou IRM) réalisée après l’apparition des symptômes doit mettre en évidence :
a. Une dilatation ventriculaire non entièrement attribuable à une atrophie cérébrale ou d’origine congénitale
(utilisation de l’indice d’Evans 0,3 ou mesure comparable)
b. Aucune obstruction macroscopique à l’écoulement du LCR
c. Au moins une des caractéristiques suivantes pour étayer l’hypothèse :
1. L’élargissement des cornes temporales des ventricules latéraux n’est pas entièrement attribuable à une atrophie hippocampique
2. Un angle de 40 degrés du corps calleux ou plus
3. La preuve d’une modification du contenu en eau du parenchyme cérébral, y compris les modifications de signal périventriculaire en
TDM ou l’IRM qui ne sont pas attribuables à des changements microvasculaires ischémiques ou à une démyélinisation
4. Un manque de flux du LCR dans l’aqueduc ou le quatrième ventricule en IRM
D’autres résultats de l’imagerie cérébrale peuvent être en faveur d’un diagnostic d’HPNi, mais ne sont pas nécessaires pour une
désignation probable :
1. Une étude d’imagerie cérébrale réalisée avant l’apparition des symptômes montrant de plus petite taille ventriculaire
ou sans preuve d’hydrocéphalie
2. Une cisternographie isotopique ayant une clairance retardée du radiotraceur au niveau des convexités cérébrales après 48-72 h
3. Une étude en Ciné IRM ou une autre technique montrant une augmentation du débit ventriculaire
4. Un TEMP avec épreuve à l’acétazolamide montrant que la diminution de la perfusion périventriculaire n’est pas modifiée
par l’acétazolamide
III. Clinique
Selon les définitions classiques d’Hakim [1] et Adams [2], des perturbations de la marche/équilibre doivent être présents,
et au moins un autre domaine de déficience : cognition, symptômes urinaires, ou les deux
En ce qui concerne la marche/l’équilibre, au moins deux des critères suivants doivent être présents et ne pas être entièrement
attribuables à d’autres conditions :
a. Diminution de la hauteur du pas
b. Diminution de la longueur des pas
c. Cadence réduite (vitesse de marche)
d. Augmentation du balancement du tronc pendant la marche
e. Élargissement de la base de sustentation
f. Orteils tournés vers l’extérieur lors de la marche
g. Rétropulsion (spontanée ou provoquée)
h. Demi-tours « en bloc » (rotation nécessitant trois ou plusieurs étapes de 180 degrés)
i. Une altération de l’équilibre lors de la marche, comme en témoignent deux ou plusieurs écarts sur huit pas lors de l’épreuve de
marche en tandem.
En ce qui concerne la cognition, il faut documenter une baisse de performance avec des valeurs ajustées pour l’âge et le niveau
d’instruction et/ou avec un test de dépistage cognitif, ou la preuve d’au moins deux des éléments suivants lors de l’examen
qui n’est pas entièrement attribuable à d’autres conditions :
a. Ralentissement psychomoteur (latence de réponse accrue)
b. Diminution de la vitesse des gestes fins
c Diminution de la précision motrice
d. Difficulté de division ou de maintien de l’attention
e. Rappel mnésique altéré, en particulier pour les événements récents
f. Dysfonctionnement exécutif, telle qu’une altération dans les procédures, la mémoire de travail,
la formulation des abstractions/similitudes
g. Des changements de comportement ou de la personnalité
Pour documenter les symptômes dans le domaine de la continence urinaire, l’un des éléments suivants doit être présent :
a. Incontinence urinaire épisodique ou persistante non imputable à une cause urologique
b. Incontinence urinaire
c. Incontinence urinaire et fécale
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M. Verny, G. Berrut
Tableau 4. (Suite)
Table 4. (Continued)
Ou au moins 2 des critères suivants :
a. Urgenturie
b. Pollakyurie (définie par plus de six épisodes de miction pour une période de 12 heures en dépit d’une prise de liquide normale)
c. Nycturie définie par le besoin d’uriner plus de deux fois en une nuit en moyenne
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IV. Physiologique
Pression d’ouverture LCR dans l’intervalle de 5-18 mmHg (ou 70-245 mmH2 O) déterminée par une ponction lombaire ou une procédure
comparable. Des pressions mesurées sont significativement supérieures ou inférieures à cette plage ne sont pas compatibles avec un
diagnostic probable HPN.
diagnostic d’HPN sera fait. La tentation est effectivement
forte d’assimiler l’efficacité de la dérivation à la certitude du
diagnostic. Si cette question (faut-il ou non proposer une
dérivation ?) est fondamentale en pratique clinique, elle ne
rentre pourtant pas dans la démarche diagnostique de l’HPN
selon les critères de diagnostic actuellement proposés.
Ceux-ci ne comportent même pas un test de PL soustractive
(tableau 4). Mais, dans la conclusion de l’article de Relkin
et al. [3], l’ambiguïté est maintenue puisqu’il y est indiqué
que les travaux futurs devront vérifier que les patients classés comme HPN probable répondront plus souvent à une
intervention de dérivation du LCR. Pourtant, la plupart des
auteurs s’accordent à considérer que certains patients qui
ont une HPN ne répondront pas au traitement (HPN trop
évoluée avec lésions irréversibles ?), du fait des pathologies
associées ou de l’existence conjointe de troubles exécutifs
d’une autre origine, gênant l’évaluation du bénéfice thérapeutique. À moins de changer la définition, il paraît donc
légitime de continuer à différencier le diagnostic d’HPN et
l’efficacité de la dérivation ! Sinon, il faudrait considérer que
l’on ne peut parler d’HPN que si l’intervention de dérivation
est efficace.
L’ensemble des études de ce travail confirme cette difficulté et cette ambiguïté. En effet, ces travaux ont été
sélectionnés dans notre revue de littérature car ils portaient
spécifiquement sur le diagnostic d’HPN et ne devaient pas
s’intéresser exclusivement à l’efficacité de la dérivation.
Pourtant, comme on peut le constater dans les tableaux 2
et 3, les études ont surtout mesuré la capacité de prédiction
d’amélioration post-dérivation pour les différentes techniques diagnostiques étudiées. La notion d’amélioration
reste elle-même mal définie (sur quel(s) signe(s) clinique(s),
selon quel(s) instrument(s) de mesure, à quel moment. . .)
et soumise à la variabilité d’appréciation inter observateur.
Un certain consensus existe toutefois pour reconnaître
que la marche est le critère le plus fiable pour mesurer
l’amélioration et aussi celui qui est le plus souvent amélioré,
mais les modalités d’évaluation ne sont pas homogènes.
Ainsi, il apparaît clairement que au-delà de la question
du diagnostic d’HPN, c’est celle de l’attitude thérapeutique
qui se pose avec le plus d’acuité. Or celle-ci repose, en
pratique, sur une intervention neurochirurgicale de dérivation du LCR et le taux de complications potentielles de ces
interventions reste élevé. Il s’est pourtant réduit pour les
troubles directement en lien avec la dérivation. Cela résulte
notamment des progrès fait avec les nouvelles valves. Le
taux de complications liées à la dérivation passe ainsi de 3540 % à moins de 20 % [7, 25, 26]. Les complications plus
indirectes (épilepsie, hématome intracérébral) sont quant à
elles réduites de 10 à 5 % [27-30].
En pratique, c’est dans la population des patients les
plus âgés que le diagnostic d’HPNi est le plus fréquent
mais aussi le plus difficile à établir. En effet, c’est dans
cette catégorie de population que les diagnostics différentiels sont les plus nombreux car beaucoup d’entre eux sont
liés en termes d’incidence à l’âge (maladie d’Alzheimer,
lésions vasculaires multiples sous-corticales, microangiopathie, myélopathie cervicarthrosique. . .). La situation apparaît
encore plus difficile car, dans cette population, l’association
d’une possible HPN avec une maladie neurodégénérative
(maladie d’Alzheimer) pourrait être fréquente [31, 32]. Les
associations avec les lésions vasculaires seraient aussi plus
fréquentes que ne le voudrait le hasard posant la question
d’éventuels facteurs communs sur le plan physiopathologique entre ces différentes affections [3, 33-35]. Ces
hypothèses sont cohérentes avec des données comme
celles de l’étude de Klassen et al. [24] montrant qu’audelà de l’indication de la dérivation du LCR et l’éventuelle
amélioration qui en résulte, un suivi à long terme montre
le mauvais pronostic global (tableau 3). Dans ce même
travail, les résultats des corrélations clinico-pathologiques
effectuées chez des patients en post-mortem confirment
la relative fréquence des lésions neurodégénératives associées. À partir de biopsies effectuées lors de l’intervention
de dérivation, Bech-Azeddine et al. [31] ont montré
l’association de lésions vasculaires et/ou de démence de
type Alzheimer dans 89 % des cas. Les patients présentant
des lésions associées présentaient une plus faible probabilité d’amélioration post-dérivation sans que ce résultat ne
soit statistiquement significatif. Il faut toutefois souligner
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Diagnostic de l’hydrocéphalie à pression normale
que l’évaluation de l’efficacité de la dérivation survenait
dans ce travail en moyenne à 6 mois. Dans un autre travail, rétrospectif, portant sur une analyse neuropathologique
des cerveaux de patients présentant une démence d’une
« banque de cerveaux », Cabral et al. [32] ont aussi constaté
l’existence d’une maladie d’Alzheimer dans 89 % des cas
d’HPN.
Au total, au regard des travaux publiés sur le diagnostic
d’HPN, il semble cohérent de recommander, pour diagnostiquer une HPN (notamment une HPNi) dans la population
âgée, la démarche suivante :
– reconstitution d’une histoire clinique cohérente avec
l’hypothèse (tableau 4) ;
– mise en évidence de signes cliniques en adéquation avec
le diagnostic (au mieux identification d’au moins 2 éléments
de la triade classique d’Hakim et Adams, mais des troubles
de la marche/équilibre isolés caractéristiques peuvent être
suffisants) (tableau 4) ;
– réalisation d’une imagerie cérébrale par IRM plutôt que
TDM chaque fois que possible avec calcul de l’index d’Evans
(> ou égal à 0,3) et/ou de l’angle du corps calleux au niveau
de la commissure postérieure (< ou égal à 90◦ ) (tableau 4) ;
– réalisation d’une PL avec mesure de la pression
d’ouverture qui doit être inférieure à 18 mmHg.
L’ensemble de ces données est suffisant pour répondre
aux exigences des critères de diagnostic de l’HPN (tableau
4). Dans les cas où le diagnostic serait évoqué par
l’intermédiaire d’un résultat de TDM ou d’IRM cérébrale,
il est indispensable de reprendre le schéma ci-dessus et
notamment de reprendre l’interrogatoire du patient et de
son entourage ainsi que l’examen clinique [35, 36]. Le
diagnostic ne peut en effet reposer uniquement sur un
compte-rendu d’imagerie. Ce point est particulièrement
important à souligner car les comptes-rendus radiologiques
comportent parfois des affirmations péremptoires pouvant
compliquer le dialogue sur le diagnostic et la discussion sur
l’évolution avec le patient et les proches.
Si le diagnostic d’HPN est retenu, en fonction de l’état
du patient peut se discuter une intervention de dérivation du
LCR. Dans ces cas, il est légitime de tenter de déterminer si
le patient est susceptible de s’améliorer de manière significative en post-opératoire. On peut proposer le schéma
suivant [35, 36] :
– Dans un premier temps, on essayera de préciser le pronostic en effectuant un test de PL soustractive d’au moins
40 mL, que l’on peut renouveler dans un délai de 24 à 48 h
en cas d’amélioration inexistante ou douteuse. Il faut insister sur l’importance d’un protocole d’évaluation rigoureux
avant et après la PL comportant :
– une épreuve de marche standardisée (10 mètres avec
demi-tour et retour mesurant le temps, le nombre de
pas avec une attention particulière et des mesures spécifiques sur le demi-tour et sa décomposition) ;
– des tests cognitifs évaluant les fonctions attentionnelles et exécutives (empan chiffré, TMT A et B, vitesse
de traitement de l’information –code-. . .) et non pas des
outils globaux comme le MMSE dont on sait qu’ils sont
soumis à un effet retest ;
– une mesure du nombre de mictions dans la journée et
la nuit.
– Puis, en l’absence d’amélioration après une simple
épreuve de PL soustractive correctement effectuée et évaluée, il semble pertinent de discuter pour les patients
présentant le moins de co-morbidités et le moins de risque
du point de vue chirurgical, les techniques les plus invasives revues dans ce travail : tests de perfusion du LCR
et/ou de drainage externe prolongé. Il faut également, chez
ces patients, tenter de préciser au mieux l’existence d’une
pathologie associée et notamment une atteinte vasculaire
cérébrale (importance de l’IRM et de la bonne qualité de son
interprétation) et/ou une maladie d’Alzheimer (bilan neuropsychologique, IRM cérébrale, dosage de biomarqueurs de
MA du LCR, TEMP. . .).
– Enfin avec l’ensemble de ces données, il faut aménager
un temps de concertation nécessaire et indispensable avec
l’équipe de neurochirurgie. Il faudra préciser les objectifs
attendus de l’intervention de dérivation. Il faudra insister sur
le degré de probabilité d’amélioration portant dans l’ordre
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423
Points clés
• L’hydrocéphalie à pression normale peut être secondaire (troubles de la résorption du LCR après méningite
ou hémorragie méningée. . .), ou idiopathique (HPNi).
• Dans la population âgée, l’HPNi est prédominante,
mais les diagnostics différentiels sont nombreux.
• La maladie d’Alzheimer et les lésions cérébrovasculaires sont non seulement des diagnostics différentiels possibles, mais souvent un diagnostic associé
(co-morbidités) à l’HPNi.
• Il existe une confusion entre diagnostic de l’HPN et
amélioration post-dérivation due à l’absence de « gold
standard » pour le diagnostic. Cela rend les études sur
le diagnostic de l’HPN difficiles.
• L’imagerie cérébrale (notamment l’IRM) permet en
association aux signes cliniques de faire le diagnostic
d’HPN surtout en y associant un index d’Evans supérieur ou égal à 0,3 et un angle du corps calleux inférieur
ou égal à 90◦ .
• Les tests de perfusion du LCR ou de drainage externe
prolongé du LCR sont les plus prédictifs d’une amélioration post-dérivation, mais sont difficilement réalisables.
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M. Verny, G. Berrut
sur la marche et l’équilibre, puis les troubles cognitifs (amélioration potentielle sur la vitesse d’exécution et certains
éléments exécutifs) et, à un moindre degré, les troubles
sphinctériens. On pourrait ainsi imaginer proposer à un
patient très gêné par des troubles de la marche avec des
chutes, une intervention et ce malgré un diagnostic concomitant de maladie d’Alzheimer probable légère. Il faudra
bien indiquer que le patient ne sera alors probablement
pas amélioré par l’intervention sur le plan cognitif et que la
maladie d’Alzheimer continuera à évoluer pour son propre
compte.
L’HPN apparaît donc comme un exemple supplémentaire d’une situation clinique complexe tant diagnostique
que de prise en charge, dans la population âgée où la
polypathologie est plus la règle que l’exception. Le démembrement précis des affections qui peuvent intervenir dans
la présentation clinique peut seul aider au processus décisionnel aboutissant à une prise en charge efficace.
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Conflits d’intérêts : Marc Verny déclare avoir effectué une conférence aux Journées annuelles de la SFGG (octobre 2012) sur le
thème de cet article lors d’un symposium satellite organisé par le
Laboratoire B. Braun Medical SAS (Boulogne Billancourt F 92660).
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