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Médecine & Droit 2007 (2007) 119–122
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Bioéthique - Protection de la personne
La responsabilité médicale et hospitalière pour le non-respect
des volontés de fin de vie en droit civil québécois
Lara Khoury
Professeure adjointe, Faculté de droit, Université McGill, 3644, Peel, H3A 1W9 Montréal, Canada
Résumé
En 2005, le législateur français accordait un statut officiel aux directives anticipées, mais énonçait, au même moment, son refus de leur
reconnaître une force obligatoire. Qu’en est-il des autres ressorts de droit civil ? Ce texte évalue la position du droit québécois quant à la force
obligatoire des volontés de fin de vie anticipées et analyse dans quelles conditions leur non-respect entraînera la responsabilité des intervenants
médicaux. Le traitement québécois de ces questions est particulièrement intéressant car, bien que le Code civil du Québec prévoie la possibilité
de formuler de telles volontés dans le cadre d’un « mandat en prévision de l’inaptitude », son traitement de leur force obligatoire reste ambigu.
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Mots clés : Directives anticipées ; Fin de vie ; Testament (fin de vie)
1. Introduction
Alors que les directives anticipées acquièrent aujourd’hui en
France une valeur légale, il est utile d’en apprécier les limites
en étudiant leurs modalités d’exercice dans la Province de
Québec. Dans une ère où les concepts de paternalisme médical
et d’acharnement thérapeutique sont abandonnés au profit de
ceux d’autonomie de la volonté et de qualité de la mort, les
volontés de fin de vie gagnent en importance. Parce qu’elles
entrent souvent en conflit avec les devoirs déontologiques fondamentaux des médecins, le maintien de la vie et de la santé du
patient, leur respect entraîne des dilemmes importants pour les
acteurs du système de santé1. Bien que la question des volontés
Adresse e-mail : [email protected] (L. Khoury).
Voir à ce sujet Jean-Louis Baudouin, « Perspective juridique » (1981) 26
R.D. McGill 1076, 1077. Nous nous intéresserons aux volontés visant à interrompre un traitement médical ou un acte de soins en fin de vie, tels les ordres
de non-réanimation, le refus d’alimentation et d’hydratation, le refus d’être mis
sous respirateur ou d’être intubé et le refus de thérapie antibiotique. Seront
donc exclues les questions reliées au don d’organe et au refus de transfusion
sanguine.
2
La responsabilité du médecin et de l’établissement de soin est uniquement
soumise aux règles de la responsabilité civile en droit québécois. Il n’existe
aucun régime de responsabilité administrative, malgré le fait que le système
de santé québécois soit essentiellement public.
1
de fin de vie ait été discutée à profusion dans la littérature
médicale, bioéthique et juridique, peu de travaux ont porté
sur la responsabilité médicale et hospitalière2 pour leur nonrespect. Il convient dans un premier temps de discuter la
force obligatoire des directives de fin de vie.
2. Force obligatoire
Le véhicule privilégié des directives de fin de vie en droit
québécois est le « mandat en prévision de l’inaptitude ».
Cependant, aucune forme n’est imposée et, par conséquent,
les directives peuvent être incluses dans un autre document
ou être exprimées oralement. Au-delà de la question du formalisme de l’acte, se pose celle de la force obligatoire de la directive qui ne dépend pas du support formel utilisé.
2.1. Forme
Les articles 2131 et 2166 et suivants du Code civil du Québec (CcQ) permettent à toute personne de rédiger un mandat
appelé à être exercé lorsque survient l’inaptitude. Il est communément appelé « mandat en prévision de l’inaptitude ». Le
mandataire est chargé, entre autres, de prendre soin du mandant
à la survenance de l’inaptitude. Le mandant peut ajouter des
précisions sur les soins médicaux qu’il ne désire pas qu’on
lui apporte. Le mandat doit être signé devant deux témoins
1246-7391/$ - see front matter © 2007 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.
doi:10.1016/j.meddro.2007.05.006
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ou faire l’objet d’un acte notarié, homologué par le tribunal,
avant de trouver effet3.
Le mandat en prévision de l’inaptitude n’est pas le seul
mécanisme permettant d’émettre de telles directives à
l’avance4. En l’absence de disposition législative précise régissant les volontés de fin de vie, aucune forme particulière n’est
exigée, bien que l’écrit présente des avantages évidents au chapitre de l’accessibilité, de la clarté et de la preuve. Les directives peuvent donc se trouver dans un autre document ou être
exprimées verbalement. La position québécoise est donc différente de celle des provinces canadiennes de common law qui
exigent, selon la loi, que les advance directives soient écrites,
signées devant témoin et datées. La question de la force obligatoire des volontés de fin de vie est donc plus complexe en
droit civil québécois en raison non seulement de l’absence de
formalisme, mais également de certaines ambiguïtés contenues
dans le Code civil.
2.2. Force obligatoire de la directive de fin de vie
En droit québécois, aucun texte de loi ne traite spécifiquement de la force obligatoire des directives émises à l’avance5,
alors que les lois des différentes provinces canadiennes de
common law leur donnent expressément un statut juridique et
une force obligatoire6. En l’absence d’une telle législation au
Québec, la question dépend de l’interprétation donnée aux articles du Code civil. Les articles 12 et 15 CcQ semblent de
prime abord indiquer l’absence de force obligatoire des directives lorsqu’elles prennent effet après la survenance de l’inaptitude du patient. On a en effet prétendu que, dès ce moment,
entre en jeu l’article 15 CcQ qui prévoit que le consentement
provient de la personne autorisée à donner un consentement
substitué7. Une lecture conjointe des articles 15 et 12 CcQ
3
Art. 2166 CcQ. Le texte du Code civil du Québec est disponible à : www.
canlii.org/qc/legis/loi/ccq/20061117/tout.html. Lors de l’homologation, le tribunal fait la vérification judicaire de l’inaptitude : Édith Deleury et Dominique
Goubau, « Le mandat donné en prévision de l’inaptitude ou mandat de
protection » dans Le droit des personnes physiques, 3e éd., Yvon Blais,
Cowansville, 2002, 8.
4
Suzanne Philips-Nootens et Robert P. Kouri, L’intégrité de la personne et
le consentement aux soins, Yvon Blais, Cowansville, 2005, n° 369 et Commentaires du ministre de la Justice, t. 1, Québec, Les publications du Québec,
1993, p. 14.
5
Comparer avec la situation française où la Loi n° 2005-370 du 22 avril
2005 relative aux droits des malades et à la fin de vie (« Loi Leonetti »), J.O.
n° 95 du 23 avril 2005, bien qu’elle reconnaisse le droit au refus de traitement,
n’accorde pas de force obligatoire aux directives émises à l’avance. Celles-ci
sont soumises à une décision médicale collégiale qui « prend en compte »
l’avis de la « personne de confiance » désignée par le malade alors qu’il était
apte ainsi que le contenu des directives.
6
La Nouvelle-Écosse fut la première province à les règlementer : Medical
Consent Act, RSNS 1989, c. 279. Voir également : Advance Health Care
Directives Act, SNL 1995, c. A-4.1 (Terre-Neuve et Labrador) ; Personal
Directives Act, RSA 2000, c. P-6 (Alberta) ; The Health Care Directives Act,
CCSM c. H27 (Manitoba) ; Health Care Directives and Substitute Health Care
Decision Makers, SS 1997, c. H-0.001 (Saskatchewan).
7
Tuteur, curateur ou mandataire nommé dans un mandat donné en prévision de l’inaptitude. Si le majeur n’est pas ainsi représenté, le consentement
est donné par le conjoint ou, à défaut, par un proche parent ou par « une personne qui démontre pour le majeur un intérêt particulier ».
paraît indiquer que l’avis de cette personne prévaut sur les
volontés exprimées par le patient à l’avance8. En effet, l’article
12 CcQ dispose que les volontés du majeur inapte ne doivent
qu’être « prises en compte » par celui qui consent à des soins
pour autrui ou qui les refuse. Ce dernier « est tenu d’agir dans
le seul intérêt de cette personne en tenant compte, dans la
mesure du possible, des volontés que cette dernière a pu
manifester »9. Certains auteurs ont cependant argumenté que
l’on ne doit recourir au consentement substitué — et donc
aux articles 12 et 15 CcQ — que dans les cas où aucune directive n’a été émise à l’avance alors que le majeur concerné était
apte ou lorsque les circonstances envisagées par ces directives
sont différentes de celles en cause10. Outre ce débat, d’aucuns
s’expriment en faveur de la force obligatoire d’une manifestation par le patient d’une volonté non équivoque et claire alors
qu’il est apte, même s’il devient ultérieurement inapte11. Prétendre que la directive de fin de vie a une force obligatoire ne
signifie cependant pas que son non-respect entraîne forcément
la responsabilité du défendeur.
3. Responsabilité engendrée par le non-respect des volontés
de fin de vie
Bien qu’il n’existe à ce jour aucune jurisprudence québécoise sur la question, la responsabilité potentielle du professionnel de la santé et de l’établissement de soins peut être évaluée sur la base des décisions plus générales portant sur le nonrespect du refus de soin. Elle s’apprécie également en référence
à ce qu’un médecin/établissement raisonnable aurait fait dans
les mêmes circonstances.
3.1. Responsabilité attachée au non-respect du droit au refus
La primauté du droit au respect de l’autonomie et à l’intégrité de sa personne est énoncée dans plusieurs textes législatifs, constitutionnels et quasi constitutionnels12. Cette primauté
8
Danielle Chalifoux, « Les directives préalables de fin de vie et les pouvoirs publics » dans SFPBQ, Pouvoirs publics et protection, Yvon Blais,
Cowansville 1, 15–16. Chalifoux conclut que cet article confirme que les
directives préalables n’ont aucun caractère obligatoire du Québec.
9
Le Ministre de la Justice indique dans les commentaires accompagnant
cette disposition qu’elle permet d’assurer, dans la mesure du possible, le respect des volontés de la personne devenue inapte postérieurement à l’expression de ses volontés, volontés qui peuvent « être exprimées dans un testament
de vie » : préc. note 4.
10
Nootens et Kouri, préc. note 4, no 375.
11
Nootens et Kouri, préc. note 4 ; Danielle Chalifoux, « Les obstacles à la
mise en œuvre des directives de fin de vie en milieu institutionnel » dans François Dupin, Les mandats en cas d’inaptitude : Une panacée ? SFPBQ, Yvon
Blais, Cowansville, 2001, 21, 32 ; Pauline Lesage-Jarjoura citée dans Manoir
de la Pointe Bleue c. Corbeil, [1992] RJQ 712 (CS) 29-30. La Commission de
réforme du droit du Canada s’exprima d’ailleurs au même effet en 1982, avant
même l’adoption des dispositions citées : Commission de réforme du droit du
Canada, Euthanasie, aide au suicide et interruption de traitement, Série Protection de la vie, document de travail 28, 1982.
12
Art. 10 et 11 CcQ ; art. 1 de la Charte québécoise des droits et libertés de
la personne, LRQ C-12 : droit à la vie, la sûreté, l’intégrité et la liberté de sa
personne ; Art. 7 Charte canadienne des droits et libertés : droit à la vie, la
liberté et la sécurité de sa personne.
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pose des défis pour le clinicien qui est appelé à respecter les
volontés de son patient, surtout lorsque ces dernières peuvent
mener à la mort. L’on sait cependant depuis les affaires de
common law canadienne, Malette c. Schulman13 et Fleming c.
Reid14, et de droit civil québécois, Nancy B c. Hôtel-Dieu de
Québec15 et Manoir de la Pointe Bleue c. Corbeil16, que le
refus de soins émis par un majeur apte, même à l’avance,
doit être respecté même si ce refus met la vie du patient en
péril17. On peut donc argumenter que la volonté de refuser un
soin, exprimée clairement à l’avance, doit recevoir le même
statut que la volonté contemporaine à l’acte de soin. Cette affirmation doit cependant être nuancée. En effet, l’obligation de
respect de la directive émise à l’avance s’appréciera à la
lumière des circonstances de chaque cas.
3.2. Faute de non-respect
L’appréciation du caractère raisonnable du non-respect
devrait dépendre de facteurs liés aux circonstances de chaque
cas. Les arguments fréquemment soulevés dans la littérature
médicale et de bioéthique afin de justifier le refus de respecter
les directives de fin de vie sont d’une utilité certaine pour identifier quels devraient être ces facteurs.
● Les volontés doivent l’emporter sur le meilleur intérêt du
patient lorsque ces deux valeurs sont en conflit — Une
telle hiérarchie a été défendue par certains bioéthiciens18 et
est reconnue par les législations des provinces canadiennes
de common law adoptées dans les années 199019. Selon ces
dernières, la personne donnant le consentement substitué
doit d’abord se conformer aux volontés exprimées dans
une directive anticipée. À défaut, elle doit décider en accord
avec les volontés exprimées par le patient avant la survenance de l’incapacité ou, à défaut, sur la base de ce que la
personne donnant le consentement substitué pense être dans
le meilleur intérêt du patient20. En droit québécois, cette
hiérarchie se heurte cependant à l’article 12 CcQ qui semble
accorder la priorité à l’intérêt du patient dans les cas où un
13
(1990), 72 OR (2d) 417 (CA).
(1991), 82 DLR (4th) 298 (CA). Le droit québécois a été grandement
influencé par la jurisprudence des provinces de common law sur cette question.
15
[1992] RJQ 30 (CS). Dans cette affaire, la patiente, atteinte du syndrôme
de Guillain-Barré, désirait qu’on lui retire son support respiratoire artificiel.
16
Préc. note 11.
17
Nootens et Kouri, préc. note 4, n° 366 et références citées à la note 1421.
18
Jocelyn Downie, « Where There is a Will, There May Be a Better Way:
Legislating Advance Directives » (1992) 12:3 Health Law in Canada 73.
19
Par ex. : art. 1 et 12 de la Advance Health Care Directives Act de TerreNeuve et du Labrador, préc. note 6 ; art. 14 de la Personal Directives Act de
l’Alberta, préc. note 6 ; art. 13 de la Health Care Directives Act du Manitoba,
préc. note 6 ; art. 8 de la Health Care Directives and Substitute Health Care
Decision Makers Act de la Saskatchewan, préc. note 6.
20
Art. 12 de la Advance Health Care Directives Act de Terre-Neuve et du
Labrador, préc. note 6 ; art. 14 du Personal Directives Act de l’Alberta, préc.
note 6 ; art. 13 de la Health Care Directives Act du Manitoba, préc. note 6.
21
Voir la citation ci-dessus. À moins que l’on accepte l’argument soulevé
plus tôt que cet article ne s’applique que lorsqu’un consentement substitué
est admissible, ce qui peut ne pas être le cas en présence de directives.
14
121
consentement substitué est donné suite à la constatation de
l’incapacité de ce dernier21.
● L’existence d’un dialogue entre le médecin traitant et le
patient préalable à l’énoncé de la directive milite en faveur
de son respect — Ce facteur permet de répondre à l’argument selon lequel, si les volontés ne donnent pas la certitude
d’un refus éclairé, elles n’ont pas à être respectées. Cet
argument a un poids certain, vu le rôle central que joue
l’information préalable au consentement. Cependant, insister sur l’existence d’un refus anticipé « éclairé » ne fait que
souligner l’importance d’une discussion avec le médecin
traitant avant d’émettre des directives de fin de vie, afin
d’assurer la compréhension par le patient de la nature de
la directive et de son effet sur sa santé et sa vie22.
● La directive doit être claire et précise — La littérature soulève la difficulté que le professionnel de la santé peut avoir à
interpréter23 et respecter les volontés de fin de vie en raison
de phrases types retrouvées dans plusieurs directives où le
refus est exprimé par des références vagues, par exemple,
au refus de traitements « extraordinaires » ou « agressifs »24.
La directive devra donc être rédigée sans ambiguïté ; à défaut
l’intervenant pourrait justifier leur non-respect.
● L’obligation de respecter la directive sera renforcée si cette
dernière est renouvelée périodiquement en tenant compte
des changements au niveau du pronostic, des options thérapeutiques et des valeurs du patient25 — Ces conditions permettent de répondre à l’objection voulant qu’une directive
émise à l’avance ne puisse jamais prévoir tous les scénarios
pouvant se produire en fin de vie ainsi que les avancées de
la science médicale et les progrès technologiques26. On met
l’accent sur le fait que l’opinion du patient puisse avoir
changé ou aurait changé, à la lumière des nouvelles circonstances, surtout si les directives datent de plusieurs années.
Les auteurs Nootens et Kouri rejettent cependant cet argument, à moins qu’il n’y ait des motifs raisonnables de croire
22
Newfoundland Law Reform Commission, Discussion Paper on Advance
Health Care Directives and Attorneys for Health Care (WP 6), janvier 1992,
St-John’s. 61; J. Teno, J. Lynn, N. Wenger, et al, « Advance directives for
seriously ill hospitalized patients: effectiveness with the patient selfdetermination act and the SUPPORT intervention » (1997) 45 J. Am. Geriatr.
Soc. 500, 504 et 506.
23
M. Kelner, I. L. Bourgeault, P. C. Hebert et E. V. Dunn, « Advance directives: the views of health care professionals » (1993) 148: 8 CMAJ 1331,
1335.
24
Muriel R. Gillick, « Advance Care Planning » (2004) 350(1) New England
Journal of Medicine 7, 7; Robert E. Astroff, « Who Lives, Who Dies, Who
Decides? Legal and Ethical Implications of Advance Directives » (1997) 7
Windsor Review of Legal and Soc Issues 1, 9; Alberta Law Reform Institute
and Health Law Institute, Advance Directives and Substitute Decision-making
in Personal Health Care (Report #64), mars 1993, Edmonton, 6-7; Newfoundland Law Reform Commission, préc. note 22, 60; Chalifoux, préc. note 11, 24.
25
Downie, préc. note 18, 77 ; Newfoundland Law Reform Commission,
préc. note 22, 67.
26
Downie, préc. note 18, 77 ; Gillick, préc. note 24, 7 ; M. Gregg Bloche,
« Managing Conflict at the End of Life » (2005) 352(23) New England Journal of Medicine 2371, 2372 ; Newfoundland Law Reform Commission, préc.
note 22, 40, Dupin, préc. note 11, 5 ; Pascal Morin, « Fin de vie et Code civil :
faut-il combler le vide législatif ? » (2004) (14) Revue générale de droit médical 391, 393.
122
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à un revirement. Selon ces auteurs, si ce raisonnement était
accepté, aucune directive donnée à l’avance n’aurait de
valeur27.
4. Conclusion
La poursuite de ces facteurs ne permet pas seulement
d’assurer la force obligatoire de la directive de fin de vie anticipée, mais protège également le personnel médical qui l’a respectée d’une éventuelle responsabilité. Une telle protection est
bienvenue et permet aux cliniciens de fonder ce respect non
pas sur la menace d’une responsabilité individuelle, mais plutôt
sur les principes de l’éthique clinique et de la bonne pratique
médicale, en accord avec la préservation de l’autonomie décisionnelle du patient.
Note de la Rédaction
La réforme de la protection juridique des majeurs mise en
place par la loi no2007-308 du 5 mars 2007 portant réforme
de la protection juridique des majeurs (1), parue au J.O.
no 56 du 7 mars 2007 précise les actes susceptibles d’être
accomplis par le tuteur et met en place un mandat de protection future.
« Art. 459. – Hors les cas prévus à l’article 458, la personne protégée prend seule les décisions relatives à sa personne dans la mesure où son état le permet ».
« Lorsque l’état de la personne protégée ne lui permet
pas de prendre seule une décision personnelle éclairée, le
juge ou le conseil de famille s’il a été constitué peut prévoir
qu’elle bénéficiera, pour l’ensemble des actes relatifs à sa
personne ou ceux d’entre eux qu’il énumère, de l’assistance
de la personne chargée de sa protection. Au cas où cette
assistance ne suffirait pas, il peut, le cas échéant après
l’ouverture d’une mesure de tutelle, autoriser le tuteur à
représenter l’intéressé ».
« La personne chargée de la protection du majeur peut
prendre à l’égard de celui-ci les mesures de protection strictement nécessaires pour mettre fin au danger que, du fait de
son comportement, l’intéressé ferait courir à lui-même. Elle
en informe sans délai le juge ou le conseil de famille s’il a
été constitué ».
« Toutefois, sauf urgence, la personne chargée de la protection du majeur ne peut, sans l’autorisation du juge ou du
conseil de famille s’il a été constitué, prendre une décision
ayant pour effet de porter gravement atteinte à l’intégrité
corporelle de la personne protégée ou à l’intimité de sa vie
privée ».
« Art. 459-1. – L’application de la présente sous-section
ne peut avoir pour effet de déroger aux dispositions particu-
27
Nootens et Kouri, préc. note 4, no 376.
lières prévues par le code de la santé publique et le code de
l’action sociale et des familles prévoyant l’intervention d’un
représentant légal ».
« Toutefois, lorsque la mesure de protection a été confiée
à une personne ou un service préposé d’un établissement de
santé ou d’un établissement social ou médicosocial dans les
conditions prévues à l’article 451, l’accomplissement des
diligences et actes graves prévus par le code de la santé
publique qui touchent à la personne et dont la liste est
fixée par décret en Conseil d’État est subordonné à une
autorisation spéciale du juge. Celui-ci peut décider, notamment s’il estime qu’il existe un conflit d’intérêts, d’en
confier la charge au subrogé curateur ou au subrogé tuteur,
s’il a été nommé, et, à défaut, à un curateur ou à un tuteur ad
hoc ».
« Art. 477. – Toute personne majeure ou mineure émancipée ne faisant pas l’objet d’une mesure de tutelle peut
charger une ou plusieurs personnes, par un même mandat,
de la représenter pour le cas où, pour l’une des causes prévues à l’article 425, elle ne pourrait plus pourvoir seule à ses
intérêts ».
« La personne en curatelle ne peut conclure un mandat de
protection future qu’avec l’assistance de son curateur ».
« Les parents ou le dernier vivant des pères et mères, ne
faisant pas l’objet d’une mesure de curatelle ou de tutelle,
qui exercent l’autorité parentale sur leur enfant mineur ou
assument la charge matérielle et affective de leur enfant
majeur peuvent, pour le cas où cet enfant ne pourrait plus
pourvoir seul à ses intérêts pour l’une des causes prévues à
l’article 425, désigner un ou plusieurs mandataires chargés
de le représenter. Cette désignation prend effet à compter du
jour où le mandant décède ou ne peut plus prendre soin de
l’intéressé ».
« Le mandat est conclu par acte notarié ou par acte sousseing privé. Toutefois, le mandat prévu au troisième alinéa
ne peut être conclu que par acte notarié ».
« Art. 478. – Le mandat de protection future est soumis
aux dispositions des articles 1984 à 2010 qui ne sont pas
incompatibles avec celles de la présente section ».
« Art. 479. – Lorsque le mandat s’étend à la protection de
la personne, les droits et obligations du mandataire sont
définis par les articles 457-1 à 459-2. Toute stipulation
contraire est réputée non écrite ».
« Le mandat peut prévoir que le mandataire exercera les
missions que le code de la santé publique et le code de
l’action sociale et des familles confient au représentant de
la personne en tutelle ou à la personne de confiance ».