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Imposture All the world’s a stage And all the men and women merely players WILLIAM SHAKESPEARE À l’ère d’Internet, on se fait des amis sur Facebook, on rencontre le grand amour sur Réseau Contact et on s’amuse sur World of Warcraft. Qu’y a-t-il de réel dans ce monde virtuel? En sommes-nous venus à préférer l’imposture d’une vie qu’on invente au gré de nos fantasmes à la vie quotidienne, souvent banale et sans grandes surprises? Internet permet non seulement de rêver sa vie, mais aussi de cacher son identité. Sur le Web, on peut prendre les traits d’un superhéros, faire courir des rumeurs farfelues, ou encore plagier un texte qu’on remettra à son prof in extremis. Soyons francs, les humains sont prédisposés à mentir, à travestir leur identité, à porter un masque et à se camoufler sous un second épiderme. L’être humain déforme la réalité, parfois à des fins pécuniaires, d’autres fois par peur du jugement d’autrui et bien souvent, il aime prendre des risques, quitte à perdre son identité première. L’art lui-même contient sa part d’imposture, qu’il s’agisse d’auteurs qui se dissimulent derrière des pseudonymes – quand ils ne sont pas carrément anonymes – d’artistes qui élèvent la merde au rang d’œuvre d’art, qui utilisent la chirurgie plastique à des fins artistiques ou encore d’artistes pour qui la filature est matière à réflexion. La littérature elle-même ne peut exister sans imposture puisque les écrivains créent de toutes pièces des personnages, des lieux et des péripéties. Certains, comme Tolkien ou Gauvreau, inventent même des langages. Vous pouvez lire les textes qui suivent comme le véritable Sherlock Holmes et tenter de distinguer le vrai du faux. Vous pouvez aussi les lire en prenant plaisir à vous faire avoir. Au fil des pages, vous vous ferez du souci pour cette jeune femme insouciante qui fait monter un autostoppeur à bord de sa voiture, vous serez étonnés de voir des personnages célèbres défiler sur la rue St-Denis et vous serez subjugués par cet homme qui, tel un funambule, marche sur la mince ligne qui sépare le monde réel du monde qu’il s’invente. Soyez alerte! Vous risquez de tomber dans le vide et de vous réveiller dans un monde qui ne ressemble en rien à celui que vous avez connu! Bonne lecture! Pascale Martin 1 es r è i g a g n a l Entréens.s. . . . . 4 Languàesadveeurbopoisli.ti.qu.e. . . . . . . . . . . . . . . . . . 93 Langue cois, parlooudrée de verve . . . . . . . . . . 87 es, Québquééb up sa se oi . . . . . . . .. . . . éc e. Québécoclisam èr ip la v à e r d eu e Langu Savoureuse e langue pimentée. . . 82 . 6 Mauvais . . . . . . . ............ . . . . . . . . . . . . . ts . o . . m rc té des accompagné d’un oeuf Langue dee pdeo taverne De l’autrioemcô olkien, T qu de si e as cl n id t U an . . . . . .89 Intrig ............ . . . . s. tombé. re ît u Langue d’h ......8 . . . îtres ? . . . . . . . Des langues d’hu . . . . . . . . D B t la e à o Porn tions cuites et salaces illustra Chaudes, humides vapeur. 26 .... ...... . . . . . . . . . . . re o Méréagim e à la Gauvreau Croumeboubouill es r i a n i g a m i Desse.r. .t. .s. . 34 McFlurry aux smarfatiesux .dr.am. .es. .. . . . . . . . . . . . 32 .... Catherine . . e d n o is a m la bière. La coulis poétique à un d’ e it du en e tt Bicycle e . . . . . . . . 36 ntemporain co e ir ço n a La bal ial moderne. s enfumées, spéc le el ru de é et ll ui Fe 2 levé de Ciel au cacao re es r i a t i t n e d I Plats . . . . 11 .... l. . . . . . . . . . e tu ir v e u sq ût virLe ma ec une sauce au go av ie rv se ur fo au Souris cuite 13 tuel. r . . . . . . . . . . . . . e rg u b m a H Run Like a e arrière. aires sur banquett Épluchures monét ros . . . . . 16 e . . . . . . 86 errière lesehs éhéroïques. d é ch a c ouin en sauc une sauce aux e rs m a m e d s L’hom pouvoirs grillés sur brai ra 20 Petit gux cholestérol de bébé cétacé dans Masques et Délicie oso . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . s . nt na ig sa m Watashi ni y iu prunettes chinoise 88 ssé méd pa un d’ e nc ce is . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Délectable rémin in p sa Salade de s était tous de x 23 cocottes u a e rv e c s ge de conifères en an Et si no él s . . . . . . . . . . . . . . M e u iq n u s Newdictionnaire ée dans les rues de em rs pa e ni ré ph zo Amère schi York. ires a l u p o p s f i Digest 30 r . . . . . . . . . . . . . . . . eu êt u q en l’ ck. Enquète sur whisky pur Sherlo . . . . . . . . 40 . . . . . . . . loupes nappés de . . et 52 . . dy . an ra D u lt u Metropolis C tomac . . . . . . . . . . . . . . . . es l’ er gl s. rè el e L’art d aux arômes cultur vermifugé. 42 Lait au chocolat ste au créma non54 Équivoque futuri e . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Bullshit . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . d p. o hu m tc la ke à de rs e ujou badigeonné 44 To Merda d’artista t de gloire fanée. s . . . . . . . . re ai ér tt cidentel au bouque li ac s e 56 re ag u rn st ou o T p im Le top 5 des es. ous après ? . . . . . . . . . . bl -v ou tr ez es tr m aî n ny n do co pseu va-vite. 47 Vous re Exquis auteurs au e d’or lanpée à la gi e . . . . . . . . . . . ur ir ru ch la e e us d ie e ic ss Dél , sage Sophie Calle nd de verre. ine qui Calle en Filature clandest fo 50 10 0% Rumeur . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . age Fallacieux bavard iat fouetté de vedettar 3 4 HIER-ROY UN TEXTE D’ALEXANDRA GAUT Je devais avoir neuf ou dix ans quand je me suis rendu compte que nous étions seuls, nous Québécois, dans un pays où nous sommes en fait des étrangers. La professeure nous montrait une grande carte où tout le Canada était tracé en couleurs vives qui délimitaient les différentes provinces. Le même jour, j’apprenais que le Canada est l’un des plus grand pays au monde. Je me disais : «Wow, tant d’espace juste pour nous!» Dans ce temps-là, je n’avais pas conscience que cet espace nous appartenait seulement dans la mesure où nous maîtrisions l’anglais, langue qui n’est pas la nôtre. Le cours d’histoire continuait, la prof disait : « Cette province, l‘Ontario est une province anglophone, cette province, le Manitoba, est une province anglophone, cette province, L’Îledu-Prince-Édouard, est une province anglophone…puis, notre province, le Québec, est une province francophone.» Humm! La prise de conscience s’est produite à cet instant. En tant que tel, je n’ai rien contre l’anglais, bon peut-être un peu en fait, puisque nous ne pouvons pas nous faire comprendre partout dans notre propre pays dans notre propre langue. Ce qui représente pour moi une grande frustration. Anglais, français, français, anglais. Je ne comprenais pas encore tout à fait le véritable problème. Aujourd’hui, je connais notre histoire et je connais l’histoire du pays. Je peux comprendre que plusieurs noms de villes soient anglais, mais quand je marche à Montréal ou que je magasine à Saint-Bruno et que j’entends des gens parler anglais, ça me surprend toujours. Je suis une personne ouverte, oui, mais comme le Québec est l’unique province canadienne où la seule langue officielle est le français, je m’attends à ce qu’on m’y parle et à ce qu’on m’y réponde en français. Trop souvent, je suis obligée de baragouiner l’anglais dans une ville francophone pour me faire comprendre des gens qui ne font souvent aucun effort pour converser en français, dans cette seule partie du pays où ce sont eux qui doivent s’adapter. Je ne peux pas être fière d’être canadienne puisque la barrière linguistique qui nous isole et nous sépare de nos compatriotes m’en empêche. Je suis par contre très fière d’être québécoise, même si le Québec n’est plus la province indépendantiste qui est décrite dans les livres d’histoire. Pendant des générations, le français fut dénigré, nos ancêtres ont dû se battre pour que notre identité ne soit pas effacée. Nous avons gagné cette longue bataille, car aujourd’hui en 2010, nous Québécois, nous trouvons encore notre place dans cette mer de Canadiens anglais. Pourtant, une nouvelle guerre, cette fois silencieuse, est en cours. Très influencés par tous ces voisins qui nous entourent, tranquillement, nous nous apercevons que nous perdons le fruit de notre révolte passée. La qualité du français que nous parlons au Québec diminue, les anglicismes sont courants et les efforts pour conserver NOTRE français s’amoindrissent. Il faut retrouver cette fierté qui enflammait notre peuple, il y a de ça pas si longtemps. Nous nous devons de parler notre langue et de bien la parler. Québécois et Québécoises, parlons! Soyons fiers de ce que nous sommes! Soyons fiers d’être Québécois, soyons fiers d’être uniques! Nous avons réussi à rester en marge du pays dont nous faisons partie et ce malgré la domination anglaise. Continuons de défendre nos origines, et par conséquent notre langue, et défendons-les en parlant! Il y a tout de même une bonne raison pour que nous parlions anglais, c’est pour affirmer qui nous sommes, à des gens qui ne comprendront rien autrement, quitte à le faire dans la langue qui, que cela nous plaise ou non, est celle du pouvoir et de la majorité. 5 de l’autre côté des mots PAR Julien Guèvremont-Cornut Qui ne connaît pas Humpty-Dumpty ? Ne serait-ce que parce que vous l’auriez remarqué sur les sacs de croustilles homonymes, ou encore vu dans les contes d’Alice au pays des merveilles ou De l’autre côté du miroir de Lewis Carroll, vous devez avoir une idée du personnage. Celui-ci provient de la comptine anglaise que voici : Humpty Dumpty sat on a wall, Humpty Dumpty had a great fall. All the King’s horses, And all the King’s men Couldn’t put Humpty together again! Lewis Carroll, l’ayant reprise dans ses romans, en fait une drôle de créature pas vraiment sympathique. Sieur Carroll en fait un philosophe aux idées bien arrêtées sur le langage et l’utilisation des mots. Voyez cet extrait du dialogue entre Alice et Humpty-Dumpty : […] Voilà de la gloire pour toi ! Je ne sais pas ce que vous voulez dire par là. Le Gros Coco 1 sourit d’un air méprisant : 6 Naturellement. Tu ne le sauras que lorsque je te l’aurais expliqué. Je voulais dire : « Voilà un bel argument sans réplique ! » Mais : « gloire », ne signifie pas : « un bel argument sans réplique ! » Quand, moi, j’emploie un mot, déclara le Gros Coco d’un ton assez dédaigneux, il veut dire exactement ce qu’il me plaît qu’il veuille dire… ni plus ni moins. La question est de savoir si vous pouvez obliger les mots à vouloir dire des choses différentes. La question est de savoir qui sera le maître, un point c’est tout. Bien que cela semble absurde, cet échange peut être compris de différente manière selon le niveau de lecture. Le premier, qui semble être une discussion irrationnelle est une simple rencontre entre Alice et l’Oeuf. Le second doit être vu comme un questionnement sur le langage. Il faut savoir que Lewis Carroll était un logicien, c’est-à-dire un spécialiste de la logique et qu’en tant que tel, il cherchait à pousser ses lecteurs à réfléchir à l’utilisation de la parole et au sens des mots. Mais qu’est-ce que la parole? Le dictionnaire la définit ainsi : Système de communication privilégié entre les êtres humains. Produit d’une activité nerveuse supérieure (système fonctionnel complexe) qui rend possible la transmission d’états psychiques (pensée) au travers d’un système de signes en accord avec une convention ou un code spécifique. Le langage est donc une convention et repose sur un système de codes, ici de sons, permettant à un peuple d’exprimer des idées. Ce que Carroll tente de faire, c’est de démontrer que rien ne nous oblige à accepter la tyrannie d’un pareil consensus. Bien sûr, c’est plus simple si tout le monde utilise le même système, mais aucune loi ne nous oblige à utiliser le modèle de phrase : sujet, verbe, complément. Personne ne nous oblige, non plus, à donner le même sens à un mot que celui « exigé par le consensus ». C’est ce que dit HumptyDumpty de façon plus simplifiée. Ce qui est intrigant, c’est le processus par lequel de tels consensus peuvent éclore. C’est ce que réussissent à expliquer les philologues et les linguistes par l’étude de la linguistique. L’étude du langage cherche à comprendre comment et pourquoi de tels phénomènes se sont développés. Il existe plusieurs sortes de langage. Certains sont élaborés dans le but de rapprocher les peuples dont les racines ethniques et langagières sont analogues. En guise d’explication, certaines langues se sont élaborées naturellement pour faciliter la communication entre les tribus d’une même région, puisque le « dialecte » de chacune rendait difficile la communication générale. Ces langues sont considérées comme naturelles puisqu’elles viennent d’un processus non planifié visant à faciliter les échanges. Un bon exemple est la France à l’époque médiévale. Il y existait plusieurs langues, la langue d’Oc ( qui signifie « oui » dans le sud de la France), la langue d’Oïl (« Oïl » signifiant « oui » dans le nord de la France), le latin, le picard, le normand, le francien, le vieux français et plusieurs autres. Le latin était réservé à une classe supérieure, alors que les autres étaient des langages provenant d’un latin baragouiné et fortement influencé par l’apport d’autres langues. Avec le temps, un langage commun a émergé et est devenu le français. Comme n’importe quelle langue le français à son lot de patois, qui varient d’une région à l’autre, mais conserve tout de même une base commune permettant aux Français de bien se comprendre. D’autres, par contre, sont considérées comme des langues artificielles, puisqu’elles sont issues de groupes restreints qui les créent dans un but précis. Leur planification et leur création se développe durant de nombreuses années contrairement aux langues naturelles qui se sont métamorphosées et enrichies peu à peu durant des siècles. L’exemple le plus connu de langue construite est l’elfique de J.R.R. Tolkien. Auteur de la très populaire trilogie Le Seigneur des anneaux, Tolkien était aussi un philologue reconnu. Il a créé plusieurs langues imaginaires très complexes, dont le quenya, le sindarin, le khuzdul et l’adûnaic. La création d’une langue est un exploit peu commun, car elle requiert une connaissance approfondie des bases communes à toutes les langues. Pour les langues européennes, la base commune est le latin, puisque la plupart des langages occidentaux en sont un dérivé. Il faut reconnaître l’imagination déployée pour réinventer les mots les plus simples comme « soleil » et « pluie », qui se transforment en « Anor » et « Rhoss ». Sans compter que Tolkien a dû inventer des bases étymologiques propres à chaque dialecte. Aujourd’hui, nous pouvons comprendre qu’il est avantageux d’utiliser le même langage. Le choix des mots permet aux auteurs d’exprimer leurs pensées avec des nuances. N’empêche que certains littéraires comme Claude Gauvreau et son langage exploréen, ou bien Eugène Ionesco dont les pièces sont absurdes, ont mis en doute l’absolue nécessité du langage comme source de renseignement. Cette remise en question de la fonction de communication du langage permet d’explorer les limites de l’imagination. Certains auteurs pourraient dire, à l’instar d’Humpty-Dumpty : «Quand, moi, j’emploie un mot, il veut dire exactement ce qu’il me plaît qu’il veuille dire… ni plus ni moins» 1. Le Gros Coco réfère, dans cette édition, à Humpty-Dumpty. Le traducteur a jugé bon de traduire littéralement l’expression Humpty-Dumpty, qui désigne généralement soit un œuf ou une personne enrobée de petite taille. 7 Lorsqu’on parle de pornographie, on pense surtout à Internet comme moyen de diffusion et non à la bande dessinée ou à la littérature. Pourtant, malgré ce que l’on pourrait penser, on retrouve des ouvrages pornos depuis la création de la BD. Pendant longtemps, les textes et dessins sont restés anonymes mais depuis quelques années, les auteurs de BD porno s’assument et n’hésitent pas à montrer leurs oeuvres. 8 / par Carolyne Minville Le premier courant populaire dans la bande dessinée pornographique a été le Tijuana Bible. Publiées entre les années 1920 à 1960 aux États-Unis, ce genre particulier a atteint son apogée pendant les années 1930. Ces oeuvres se voulaient surtout des parodies d’oeuvres déjà existantes, comme Popeye ou Blanche Neige de Disney. Elles pouvaient aussi mettre en vedette des personnalités publiques. Le nom « Tijuana Bibles » avait été créé pour faire croire que ces petits livres de 8 à 12 pages étaient imprimés au Mexique et non aux États-Unis. Il faut dire que les moeurs libérées des personnages et certains sujets sensibles abordés, comme la bestialité, pouvaient heurter une Amérique encore puritaine à l’époque. Aujourd’hui, plusieurs questions se posent au sujet de la paternité des Tijuana Bibles. Plusieurs légendes racontent que le crime organisé ou quelques grands noms de la BD de l’époque auraient contribué à la réalisation de ces ouvrages. Créé dans les années 1980 au Japon, le dôjinshi est un manga amateur et autoproduit vendu principalement pendant de grandes conventions spécialisées. Les auteurs de dôjinshis, les dôjinshikas, se cachent sous des pseudonymes. Ils peuvent écrire en groupe (cercle de dôjinshika) ou seuls. Tout comme les Tijuanas Bibles, la majorité des dôjinshis parodient une oeuvre déjà populaire et renommée. Tous les dôjinshis ne sont pas pornographiques bien que ces derniers occupent une position très importante. Malgré que la censure au Japon exige que les organes génitaux soient voilés, les thèmes abordés peuvent parfois dérouter la morale occidentale. Il n’est pas rare d’y retrouver des personnages d’âge ou d’apparence mineure s’adonner à des actes sexuels. Bien que le monde du dôjinshi soit davantage underground, sa popularité a augmenté de façon exponentielle. Le Comiket, qui permet aux dôjinshikas de se faire connaître, est la plus grande convention dédiée à la bande dessinée sur la planète. Avec le succès des mangas en occident, il n’est pas étonnant que la culture et la popularité du dôjinshi ait eu écho dans nos contrées. 9 La bande dessinée pornographique a aussi une petite tradition en France mais n’y a jamais vraiment obtenu ses lettres de noblesses. Dans les années 1980, la plupart des oeuvres de nature érotique ou pornographique étaient bâclées et mal payées, ce qui rebutaient la plupart des auteurs intéressés par cette avenue. La bande dessinée pornographique et érotique flirtait surtout avec les blagues salaces , s’inspirant majoritairement de Fritz the Cat de Crumbs, ou bien portait une plus grande attention à l’esthétisme, comme celles de Jean-Claude Forest. Le scénario, incluait parfois des influences de science-fiction et de fantastique, un prétexte pour y introduire plusieurs scènes érotiques. Dans les années 90, la porno n’intéresse pas les grandes éditions et le public. La bande dessinée classée XXX doit alors se renouveler. Elle doit délaisser les histoires farfelues ou invraisemblables pour intégrer un érotisme plus torride et sensuel dans un scénario plus élaboré. Contrairement aux Tijuana Bibles ou aux dôjinshis, plusieurs auteurs français s’affichent publiquement comme étant auteurs de bandes dessinées érotiques ou pornographiques. Il n’est plus rare de voir un auteur faire une brèche dans sa collection pour y introduire un titre plutôt pornographique. En résumé, la pornographie et l’érotisme sont présents dans la culture de tous les pays de la planète. Avec le temps, l’expression d’une sexualité rêvée a investi la peinture, la littérature et même la bande-dessinée. La bande dessinée pornographique a tout d’abord été parodique, avec un scénario bâclé, mais la tendance se renverse tranquillement avec la bande dessinée française qui offre un scénario beaucoup plus travaillé dans ses oeuvres. Bien qu’il soit de moins en moins mal vu d’écrire de la pornographie, la plupart des bédéistes qui en dessinent ne s’affichent pas ouvertement et souvent, un voile de mystère entoure leur identité. Bien que l’ère électronique dans laquelle nous vivons banalise et rende plus accessible la pornographie, la promotion qu’elle fait de l’anonymat gardera fort probablement le bédéiste encore dans l’ombre. Néanmoins, il y a fort à parier que la BD porno occupera une plus grande place ces prochaines années. i 10 01010100011010000110010100100000011001100110100101101110011000010110110000100000011010100111010101100100011 0011101100101011011010110010101101110011101000010000001110011011010000110000101101100011011000010000001100010 01100101001000000110010001100101011011000110100101110110011001010111001001100101011001000000110100001010010 01110011011110 1100010011011 1101100100011 11001001000 00011000110 1100001011011 1000100000 0110010101110 0110110001101 100001011100 00011001010 01000000111 01000110100 00110010100 10000001110 0110110100101 10111000100000011101000110100001100001011101000010000001100110011011000110111101110111011100110010000001101001 01101110001000000111010001101000 un texte de David Péloquin 001110110011001010110100101101110011100110000 11010000101001010100011010000110010100100000011001000110000101110010011010110010000001100011011011000110111 1011101 010110 01000 1110011 00100 010110 1110011 001110 01000 000111 001101 10010 101100 00100 001101 0000 101001 01010 001101 00001 100101 00100 00001 1101110 110100 1011011 100110 01000 111001100100000011011110110011000100000011101000110100001100101001000000111010001100101011011010111000001100 10101110011011101000010000001100010011001010110011101101001011011100010000001110100011011110010000001110010011 0 1 0 0 1 Il est important de savoir que l’idée d’une vie inventée ne provient pas d’Internet. Entre 011100 110100 10110 0111011 autres, il y a le roman de Patricia Highsmith, intitulé Le Journal d’Édith, qui met en lumière 0111011 0 0 0 0 ce thème. Édith, le personnage principal du récit, vit misérablement. Son enfant est désa- 1011101 00011 01001 0 1 1 0 0 gréable, son mari n’est pas l’homme qu’elle croyait avoir épousé et sa famille n’est pas vrai- 011001 0 0 0 0 ment intéressante. Pour fuir tout cela, elle tient un journal intime dans lequel elle relate tout 001110 1110110 11110111 00100 ce qui lui arrive, en omettant les détails qu’elle ne désire pas dans sa « nouvelle vie ». Les 110010 001110 années passent et rien ne change; en fait, tout empire. Elle perd son mari, son fils devient un 011001 0000 001101 1010110 fainéant alcoolique, mais elle continue de tenir son journal. Elle en fait une obsession; son pro- 00010 1101011 blème est apparent lorsqu’on comprend qu’on entre peu à peu dans la schizophrénie. La vie 0 1 1 0 0 101001 0000 001110 qu’elle invente dans son journal l’obsède et elle perd peu à peu contact avec ce qui l’entoure. 100011 01000 01100 101001 0000 001110 Cette idée fut reprise à plusieurs occasions. Les cerveaux du marketing se sont rendu 1110110 100101 compte bien vite que la vie de bien des gens n’est pas telle qu’ils la souhaiteraient. Ils 110100 01100 011011 01000 ont donc mis leurs méninges au travail et le résultat est directement visible sur le sys- 0 1 1 0 0 1010111 tème de communication mondiale. Puisqu’il est théoriquement possible de créer un tout 0 0 1 1 0 01000 00011 0 0 0 1 1 autre univers sur Internet, il est aussi possible d’en créer plusieurs. Cela fait rêver tous 011010 000111 ces gens qui aimeraient mieux avoir une belle vie correspondant à leurs attentes… Des 010101 100011 011010 1101101 jeux massivement multijoueurs en ligne ont vu le jour : SecondLife et IMVU, par exemple. 1 0 0 0 1 100101 0000 110100 00101 0 0 1 0 1 Patricia Highsmith dénonce une vérité bien réelle et très présente de nos jours : avoir une 0 1 1 1 0 1 1 0 1 0 0 double vie comporte des risques. On se déconnecte de la réalité jusqu’au point où nos projets 001101 02010 10100 011010 0 0 0110010100100000011001100110100101101110011000010110110000100000011010100111010101100100 0 1 1 0 0 1 1 1 0 1 1 0 0 1 0 1 0 1 1 0 1 1 0 1 0 1 1 0 0 1 0 1 0 1 1 0 1 1 1 0 0 1 1 1 0 1 0 0 0 0 1 0 0 2 0 0 1 1 0 0 1 1 0 1 0 0 1 0 1 1 0 1 1 1 0 0 1 1 0 0 0 0 1 0 1 1 0 1 1 011 000 100000011010100111010101100100011001110110010101101101011001010110111001110010000001100110011 le masque virtuel Internet est partout. Avec l’avènement de la communication globale, il est désormais aisé de publier des données tels des textes et des œuvres. Ces créations sont accessibles à tous et les auteurs peuvent inventer ce qu’ils veulent et se forger une identité nouvelle. Grâce à certains programmes, il est même possible de se créer une seconde vie; une vie virtuelle qui peut être complètement différente de la vie réelle. Ce n’est pas un problème lorsque ce n’est qu’un simple passe-temps mais il ne faut pas en abuser… 010101000110100001100101001000000110011001101001011011100110000101101100001000000110101001110101011001000110011101100 1010110110101100101011011100111010000100000011100110110100001100001011011000110110000100000011000100110010100 10000001100100011001010110110001101001011101100110010101110010011001010110010000001101000010100100111001101111 01100 01001 101111 01100 s’écroulent et où nos rêves sont anéantis. Sur SecondLife, il est impératif de dépenser du temps. 1000 1111001 0 0 1 0 Le personnage commence avec presque rien. Pas d’argent, seulement lui-même et les vêtements 0 0 0 0 0110 prédéterminés par le joueur, d’une catégorie bas de gamme. Pour avoir de l’argent, il faut avoir 001101 1000 010110 1 1 1 0 0 soit un talent quelconque qui servirait dans le jeu (c’est-à-dire créer des lignes de modes, ou 01000 0001 encore être un excellent architecte) pour vendre ses créations aux autres joueurs, soit avoir 100101 01110 011011 0 0 0 1 de l’argent à dépenser (ici, il est question d’argent réel, puisqu’il est possible de dilapider de 101100 0010 vrais billets pour les changer irrémédiablement en données) ou soit avoir du temps à dépenser. 111000 00110 01010 0100 00001 11010 00110 Tout comme pour Édith, la double 1000 011001 0 1 0 0 vie est très tentante. En effet, sur ces 10000 00111 00110 programmes, il est possible de tout 11010 010110 1 1 1 0 0 faire ce qu’un humain peut faire. Il est 01000 0001 110100 possible de se bâtir une compagnie 01101 00001 1 0 0 0 d’automobiles ou de devenir agent 010111 0100 00100 d’immeubles… Tout est possible et 0 0 0 011001 1 0 0 1 1 on en devient très vite accro. Après 01100 011011 1101110 tout, c’est la vie que l’on souhaiterait 111011 100110 0 1 0 0 avoir! C’est le piège. Une fois pris, il 0000 11010 010110 est difficile de s’en défaire. Édith a 11100 01000 0 0 0 1 maintenu son journal pendant toute 110100 01101 00001 sa vie… et SecondLife, tout comme la 10010 101101 00101 plupart des programmes massive110010 0010 0000 ment multijoueurs en ligne, a un ef011101 100110 01010 fet boule de neige. La passion gran110100 10110 1110011 dit… et la vision de la réalité rétrécit. 10011 00001 10100 00101 00101 01000 L’imagination et la création sont deux 11010 00011 00101 choses indissociables et sont un re00100 0 0 0 011001 mède à l’ennui. Il faut toutefois se 0001 10000 101110 souvenir qu’un monde réel nous at010011 01011 00100 tend, et que même si notre temps est 0 0 0 01100 0 1 1 0 1 limité, il faut en jouir pleinement, 101100 011011 1101110 comme nous l’a enseigné Édith. 101011 00100 01110 01100 1000 1011011 10011 001110 0100 00001 11001 101100 10101 10000 1000 011010 0001 01001 01010 001101 000011001010010000001110111011010010110111001100100011100110010000001101111011001100010000001110100011010000 11001010010000001110100011001010110110101110000011001010111001101110100001000000110001001100101011001110110100 12 1011011100010000001110100011011110010000001110010011010010111001101001011001110110110101100001011101000110100101 Texte, photos et dessins par Jaelle Thériault Cette histoire fait probablement partie du lot de celles que je qualifie d’incroyables. Je ne blague pas. Je parle ici du genre de truc qui ne vous arrive qu’une fois dans votre vie, un truc tellement marquant, tellement imprégné dans votre mémoire que vous ne pouvez plus passer un jour sans y penser après qu’il se soit produit. Mon truc incroyable à moi, il s’est passé il y a environ un mois et encore aujourd’hui, j’arrive à peine à y faire face. Je vous raconte. Je me rappelle très bien le jour. C’était un 5 février. Un ami et moi venions de commencer un long congé de trois jours et nous avions convenu de nous voir, en ne prévoyant rien comme à l’habitude, histoire de pouvoir avoir plus de liberté si jamais l’un de nous deux avait spontanément une idée géniale de sortie. Je savais que ce jour-là allait probablement être le dernier jour ou j’allais avoir l’occasion de le voir avant son départ pour Toronto, alors je tenais à en profiter. Lorsque je suis arrivée chez lui à l’heure où j’étais attendue, il m’a accueillie en m’annonçant que trois autres amis sortaient le soir même au Wicked Willy’s dans Greenwich Village. C’était à une heure de route en voiture, mais j’ai accepté tout de même. Nous n’étions pas en congé pour rien, il fallait en profiter ! La soirée s’est déroulée comme à l’habitude. L’alcool coulait à flot, ça parlait, ça riait, ça gueulait, ça chantait et ça montrait ses fesses. Rien d’extraordinaire, en somme. Voyant que mon ami – apellons-le John -, désigné conducteur officiel, buvait beaucoup trop – même s’il m’obstinait qu’après avoir bu deux chopes des bières à lui seul et essayé de m’embrasser deux fois, il n’était pas ivre -, j’ai décidé de rester tranquille pour le restant de la soirée en sirotant mon Porn Star à 7,50$. Et comme prévu, on m’a suppliée d’être la conductrice désignée pour le retour. C’est après avoir racompagné John complètement fini chez lui, à Little Falls, que mon histoire incroyable a réellement commencé. Je suis remontée dans ma vieille Sunbird 1988, j’ai démarré, puis j’ai émis un grognement de mécontentement en constatant l’état bordélique du véhicule. Cartables scolaires, canettes de boisson énergétique vides, vêtements divers, vieux joints de pot, sacs réutilisables et emballages de plastiques encombraient l’espace. Le plus écœurant dans tout ça était le reste de hamburger de chez McDonald’s d’il 13 y a une semaine abandonné derrière le siège du passager et auquel j’avais la trouille de toucher. Il fallait vraiment que je fasse du ménage. J’ai haussé les épaules en me disant «Pas ce soir, il est presque 3h30 du matin», j’ai mis Psyclon Nine à fond et j’ai repris la route. Je devais rouler sur Notch road depuis quelques kilomètres déjà quand un évènement quelque peu inattendu s’est produit. Sans que je m’y attende, un homme a sauté au beau milieu de la route. J’ai freiné sur-le-champ, puis je suis restée là, immobile, confuse mais assez lucide pour me rendre compte qu’il y avait quelque chose d’anormal qui était en train de se produire. L’homme est arrivé à ma hauteur et a frappé à ma fenêtre. J’ai réduit le volume de la musique et je l’ai ouvert de quelques centimètres, histoire de savoir ce qu’il voulait. Normalement, en présence d’un étranger à cette heure de la nuit, j’aurais pris mes jambes à mon cou en croyant qu’il est dangereux, mais cette fois-ci, je suis restée plantée là, aussi imperturbable que le vieux hamburger au fond de la voiture. «Je suis perdu. Je ne sais pas où je suis. Ça fait sept heures que je marche et que personne ne veut me prendre dans sa voiture. Les gens dans le New Jersey sont très peu serviables…» J’ai déverrouillé la porte du côté passager et je lui ai dit de monter. L’homme ne sentait pas bon, mais je n’arrivais pas à identifier l’odeur. Il était vêtu d’un large manteau bleu à capuchon et il portait d’horribles gants bruns. Ses lunettes à monture large étaient embuées à un point tel que je ne pouvais même pas voir ses yeux. Il devait avoir quarante-cinq ou cinquante ans. «Pouvez-vous augmenter le chauffage ? J’ai froid.» Évidemment qu’il avait froid. Il faisait dix degrés sous zéro et le vent balayait la poudrerie sur la route. J’ai mis le chauffage au maximum. J’ai demandé à l’homme où il voulait aller et il m’a répondu qu’il n’en avait pas la moindre idée. Pratique. Durant tout le trajet, l’homme n’a pas cessé de déblatérer sur le fait qu’il n’était pas fou, qu’il n’était pas un tueur et qu’il n’allait pas me tuer. Je trouvais cela particulièrement rassurant. J’ai cru comprendre qu’il arrivait de quelque part dans l’ouest, qu’une fête avait mal tourné et que personne n’avait voulu le raccompagner chez lui. «Quand est-ce que vous descendez ? » Mon passager n’a pas répondu. Je n’ai pas insisté et j’ai continué à me concentrer sur la route. Je me disais que si je restais froide et distante, tout allait bien se passer. En fait, je commençais à regretter d’avoir fait monter l’homme dans ma voiture. Je le trouvais de plus en plus louche et je devenais de plus en plus craintive. Je me sentais prise au piège. J’ai accéléré en voyant l’enseigne d’un dépanneur au loin. J’avais hâte que tout cela finisse, que j’aille dormir et qu’on n’en parle plus. je travaillerai davantage cette page demain 14 J’ai ralenti en arrivant au dépanneur et je me suis stationnée à la pompe à essence. « Voilà. Ici, c’est ouvert vingt-quatre heures sur vingt-quatre. Vous allez pouvoir vous réchauffer et demander au commis si vous pouvez consulter une carte pour retrouver votre chemin. La route 3 est à environ cinq cents mètres vers le nord. Vous aurez certainement plus de chances d’arriver à destination sur cette route, si jamais vous vous souvenez d’où vous venez, qu’au beau milieu de Notch road…» L’homme a marmonné un «Merci» et il a ouvert la portière du véhicule. Il a eu un moment d’hésitation, puis il a fouillé dans une des poches de son manteau. Pendant un instant, j’ai eu peur qu’il en sorte un couteau, un revolver ou quelque chose du genre, mais la seule chose qu’il en retira fut une liasse de billets de banque. Il m’en a tendu un en me disant que c’était pour l’essence. Je l’ai vite fourré dans mon sac à main, je lui ai souhaité «Bonne chance», j’ai fermé la portière en vitesse et je suis partie. Je savais que cela était un peu égoïste de le laisser là, perdu et confus, mais je ne pouvais pas me permettre me mettre ma vie en danger plus longtemps. En effet, il s’était avéré être totalement inoffensif, mais j’aurais pu tomber sur un maniaque ou quelque chose du genre. On ne peut jamais prévoir ce genre de choses, surtout lorsqu’on est une fille naïve et innocente comme moi. Peut-être était-il en effet un criminel dangereux et qu’il avait joué le jeu du parfait imbécile en manteau à capuchon pour que je ne me doute de rien. C’était un peu difficile d’y voir clair. Je suis arrivée chez moi dix minutes plus tard et je me suis tout de suite mise au lit. Je n’en pouvais plus, j’étais complètement éreintée. C’est en fouillant dans mon sac à main pour trouver mon cellulaire afin de l’éteindre que j’ai mis la main sur le billet que l’homme m’avait remis. Je l’ai sorti et je l ‘ai déplié. Je n’en croyais pas mes yeux. C’était un billet de cent dollars. C’est là que j’ai commencé à avoir vraiment peur. Et si il avait pris mon numéro de plaque d’immatriculation en note et qu’il me retrouvait afin de récupérer son argent ? Et s’il venait chez moi pendant mon sommeil pour me tuer ? Oh mon Dieu ! Le billet de cent dollars, c’était peut-être pour que je garde le silence, pour que je me taise si jamais on m’interrogeait ! L’hypothèse du tueur en série se faisant passer pour un débile mental perdu sur une route déserte devenait de plus en plus plausible. Rien n’arrivait à me rassurer, même pas le fait qu’il était à pied et moi, en voiture et qu’il devait être probablement bien loin à l’heure qu’il était...je me suis finalement endormie d’épuisement, la tête cachée sous les couvertures, tremblant comme une feuille. J’ai gardé le billet de cent dollars pendant un certain temps, comme s’il était devenu sacré. Je me sentais mal à l’idée de dépenser cet argent, mais bon, la vie d’étudiante au seuil de la pauvreté oblige, j’en ai eu besoin pour payer mon loyer. J’ai fini par jeter le vieux hamburger. Ce genre de truc attire la vermine. 15 e r e i r r e d e h c a c e m m o h L’ ! s o r e le h Des noms comme Batman, Superman, Spiderman, cela vous dit quelque chose? Eh bien! Que savez-vous de leur vie derrière le costume? En connaissez-vous d’autres qui mènent une double vie aussi trépidante? Voici un aperçu des superhéros de la littérature. texte : Nadia Tétreault et France Diez 16 17 dieu du ciel ! cette eau pourrait abimer ma combinaison !?! quelle odeur ! serait-ce de la pisse de carcajou ? je suis pris de fatigue ! une sieste ne me fera pas de tort... Nom d’humain: Peter Benjamin Parker Nom de superhéros: Spiderman Lieu de naissance : New-York la sieste de notre heros fut longue et reparatrice. voyons maintenant si l'homme araignee se sortira de cette impasse... ah ! ca y est ! ce gros visage va pouvoir m'aider a empecher cette bombe atomique d'exploser. Mais. hmmm. ehhn. arggghhh! ils ne font que me raconter des anecdotes par la pensee j'en oublie le desastre qui attend manhattan. si seulement je pouvais me rappeler cette formule magique pour faire apparaitre de gros visages blancs... Profession surperhéros : Lycéen Pouvoirs : vision, force et agilité surhumaine, grimpe aux murs et projette des toiles d’araignée qui lui sortent des poignets. Costume : Bleu et rouge avec des toiles d’araignée noires. Peter Parker est élevé par son oncle et sa tante à la suite du décès de ses parents. Peter est un garçon introverti qui manque de confiance en lui. Il excelle en sciences au lycée. À la suite d’une expérience à laquelle il assistait, Peter Parker est mordu par une araignée radioactive. Grâce à cette morsure, il développe des pouvoirs surhumains. Il décide d’utiliser ses pouvoirs pour gagner de l’argent. Par contre, après la mort de son oncle tué par un voleur qu’il aurait pu arrêter, il décide d’utiliser ses pouvoirs pour sauver et protéger la population new-yorkaise. 18 Première apparition littéraire : Amazing Fantasy # 15 (1962) Éditeur : Marvel Comics 19 Je détestais mon père. Son loisir favori consistait à m’empêcher de vivre comme je l’entendais. Et que dire de ses hommes de mains! Je haïssais tout particulièrement celui qui me poursuivait de demandes en mariage. De toute manière, mon père m’avait déjà promise à un autre garçon. Un type au beau visage dont les lèvres suintaient de paroles venimeuses. J’aurais au final passé deux heures à la convention. Trop peu pour réellement apprécier l’étonnante diversité de la culture japonaise… Je m’arrêtai un moment à un petit kiosque qui vendait des Pocky3. Lorsque j’eus payé, je m’approchai d’un des murs en verre et m’absorbai dans la contemplation du monde extérieur. Le Chrysler Building, avec sa flèche élancée qui rappelait un assortiment de poupées russes, retint mon attention. Même si plusieurs bâtisses à New York étaient uniques, le Chrysler Building restait mon coup de coeur. Bien sûr, il n’était pas tout en verre comme le Javits Center, ni aussi haut que le Rockefeller Center, mais il avait indéniablement fière allure. Si je détestais tous ceux qui m’entouraient, j’aimais New York, la ville qui m’avait vu naître. Ce qu’il y avait de bien avec la Grosse Pomme, c’était l’étonnante diversité de ses événements. Cette ville ne dormait jamais. Aujourd’hui, j’avais décidé de faire de même et d’aller au New York Anime Festival. Soudain, une terrible explosion retentit. Je sursautai et me retournai. Sur ma droite, une porte close : la salle de bain. Des grognements de douleur et plusieurs bruits sourds confirmèrent que l’auteur du vacarme précédent s’y trouvait. Inquiète, je frappai doucement sur le panneau de bois usé. J’étais une véritable accro de mangas1 et d’animes2. Cette passion avait commencé avec Shinobi Life, splendide romance entre un ninja et la descendante de son ancienne maîtresse qu’il rencontre à la suite d’un voyage temporel. Je changerais bien d’époque, moi aussi. Changer de vie, de nom… Me prénommer Eruruu faisait partie des graves erreurs que j’attribuais à mon père. J’avais donc choisi d’incarner Beni, l’héroïne de Shinobi Life, dans le cadre du New York Anime Festival. - Est-ce que tout va bien? WATASHI NI YOSO 私によそ par Rébecca Mathieu La convention d’anime se tenait au Javits Center. Lorsque je parvins au numéro 655 ouest de la 34e rue, je ne pus m’empêcher d’être soufflée par la magnificence de l’édifice : une gigantesque structure de verre. Les murs et le toit translucides réfléchissaient la lumière, évoquant le plus démesuré des diamants. J’ajustai d’une main distraite la ceinture de mon kimono et pénétrai dans le château de verre. 20 Silence. Je répétai mon geste avec un peu plus de force. Cette fois-ci, la porte s’ouvrit d’un coup et je m’étendis de tout mon long par terre. Un goût métallique envahit ma bouche. Je tâtai ma lèvre dans l’obscurité. Mes doigts étaient poisseux de sang. Je cherchai l’interrupteur à tâtons. Et la lumière fut. CAPSULE JAPONAISE 1. Manga : Manga : bande-dessinée japonaise se lisant de droite à gauche. 2. Anime : Animation télévisuelle japonaise. 3. Pocky : Dessert japonais en forme de bâtonnet, souvent couvert de crémage à l’un des bouts. 日本語 CAPSULE JAPONAISE 4. Cosplay : Mot-valise regroupant costume et play. Un cosplay est un déguisement porté dans les conventions et qui représente un personnage d’anime ou de manga. 5. Daijoubu desu ka : Est-ce que vous allez bien? 6. Chotto matte : Attends. コ ご め ス ん な さ プ い レ 生きることお許してくれますか 7. Gomennasai : Désolée. Mais seulement dans la pièce, car ce que je vis était loin d’être une explication. Aucune réaction. Je lui tapotai doucement les joues. - Daijoubu desu ka5? Un homme était étendu sur le sol, sa robe mauve et blanche couverte de sang. Je m’accroupis à côté de lui et murmurai, complètement paniquée : L’angoisse libérait un flot de sueur entre mes omoplates. Je décidai d’aller chercher de l’aide. - Est-ce que vous m’entendez? - Chotto matte6… Pas de réponse. Mon cœur s’emballa. Les doigts tremblants, j’écartai des mèches de cheveux de son visage. Un masque argenté dissimulait son front et ses yeux. Un beau cosplay4, ne pus-je m’empêcher de remarquer. Mes yeux s’attardèrent sur le flot de sang qui sourdait de sa poitrine. Je débranchai mon esprit émotionnel et me décidai à agir. Après tout, je n’étudiais pas en soins infirmiers pour rien. L’homme avait émergé du noir. J’étais soulagée, mais des questions en profitèrent pour se faire entendre. Qui était cet homme? Que lui était-il arrivé? Est-ce que je risquais de me faire tuer, moi aussi? Un moment plus tard, je portais un kimono un peu trop court pour être décent, mais le torse de l’inconnu était couvert d’un bandage. J’essuyai mes mains couvertes de sang sur mes cuisses et me penchai vers mon blessé. Un cri me vrilla les oreilles. Je tournai vivement la tête. Une jeune femme nous regardait fixement, les traits déformés par l’effroi. - Est-ce que vous m’entendez? - Eruruu… -Je vais aller chercher quelqu’un, bredouillai-je. Je ne peux pas vous aider, je ne sais pas qui vous êtes… Gomennasai7. - Madame, cet homme a besoin d’aide… 21 夢 み る まど Des voix se rapprochaient. Des cris, des pleurs… L’inconnu me tira vers lui. Je me laissai faire, totalement stupéfaite qu’il sache mon nom. Ses Le comité d’accueil de la plus grande révélation de mon existence. Je me fis pressante. yeux gris cherchèrent les miens et s’y rivèrent. Je m’abandonnai à son regard comme si c’était - Hakuoro, shiranai9… la chose la plus naturelle du monde, comme si je l’avais déjà fait auparavant. Je sentis une migraine m’étreindre les tempes. Des visions de - Mamonako… Mamonako shita10… villages brûlés, de combats sanHakuoro se redressa. Je l’aidai à se glants, de temples grandioses et 9. Hisashiburi : Ça fait lever. de visages souriants m’assaillilongtemps. rent. Je ne comprenais plus rien. - Mado11… Mon désarroi lui arracha un sou10. Shiranai :Je ne sais pas. rire qui se transforma bien vite en une grimace de douleur. 11. Mamonako shita : Tu sauras Je levai les yeux vers ce qui avait dû être un mur translucide. Des éclats bientôt. 8 de verre jonchaient le sol tout autour. - Hisashiburi … Eruruu. 12. Mado : La fenêtre. Sans hésiter, Hakuoro s’approcha du vide. Quinze étages nous séparaient - Hakuoro… du sol. Je frissonnai. Hakuoro prit ma main et je n’eus plus peur. Mes lèvres avaient formé ce nom sans effort. Je me sentis glisser vers un autre état de conscience, Un nouveau monde s’ouvrit sous nos un autre état de moi-même. Je n’étais plus la fille pieds. de mon père, ni même une passionnée de mangas. Je devenais une nouvelle Eruruu : celle que Hakuoro avait reconnue. おわり アニメとマンガ Inspiré par: Shinobi Life, un manga par Shoko Conami : Beni, une adolescente suicidaire, fait la rencontre inusitée d’un jeune ninja venu du passé. Celui-ci la confond avec son ancêtre, une princesse qui lui ressemble comme deux gouttes d’eau. Il la protègera donc tout en s’interrogeant sur l’univers étrange qu’est le futur… Utawarerumono, un anime inspiré d’un jeu vidéo : Eruruu est apprentie guérisseuse auprès de sa grand-mère. Un jour, elle trouve un homme amnésique gravement blessé. Il porte un masque qu’il ne peut enlever et sera éventuellement baptisé Hakuoro. Tout au long de sa vie, il cherchera à savoir qui il est, une vérité d’autant plus déconcertante qu’il ne vient pas véritablement de ce monde… Intrigué ? Visitez le http://myanimelist.net 22 Et si nos cerveaux étaient tous des dictionnaires uniques... un texte de Myriam Desnoyers 10 h 16 : Je me réveille en sueur. Je sens que cette journée ne sera pas une journée comme les autres. Je dois sortir de mon lit au plus vite, on a besoin de moi quelque part, je le sens. 10 h 17 : Qu’est-ce qui m’attend ? Personne ne m’a mis au courant, pourtant mon corps se prépare, mes muscles se raidissent, mes gestes sont plus saccadés, mes jambes ne tiennent plus en place. Je vais porter mon smoking. Le smoking convient à toute éventualité. 10 h 30 : Ai-je le temps de déjeuner ? Si une grosse journée s’annonce, je devrai être en forme. Je n’ai pas faim de toute façon, je suis habitué à ne rien manger, j’ai mes réserves… elles se trouvent dans mon coco. J’arrêterai prendre un bagel si la faim me prend par surprise. 10 h 35 : Qu’est-ce que je fais encore à tourner en rond dans mon salon? Il me semble avoir oublié quelque chose. Tant pis, j’ai ce qu’il faut à partir du moment où j’ai ma tête. Le café ne se désintégrera pas. Je le boirai froid, j’aime le goût amer qu’il laisse dans ma gorge. 10 h 48 : Si seulement j’avais une arme, je l’aurais apportée avec moi. J’ai peur des armes, voilà pourquoi je ne pourrai pas me protéger adéquatement si un malheur survient. Maudites soient mes peurs! Si j’avais un peu plus de couilles, je ne craindrais pas pour ma vie maintenant. Maudites soient mes peurs ! Je voudrais être fait d’acier, de béton et de ciment, plus personne ne m’effraierait, j’aurais pu défendre le jeune homme jeudi dernier, devant ce bar miteux. Non, tout ce que je garde en souvenir, c’est cette affreuse image de la jeunesse ensanglantée. Quoiqu’elle m’a inspiré une peinture… 11 h 23. : Comment faire pour ne pas me perdre dans cette mare de monde ? New York est la spécialiste quand il s’agit de perdre des âmes. Si je veux accomplir ma mission, je dois avoir une vue d’ensemble sur la ville, sinon par où commencer? Times Square? L’idée n’est pas mauvaise mais je ne crois pas que cet endroit soit encore à la mode pour les malfaiteurs, la publicité les a remplacés. 23 24 Schizophrénie n. f. (allemand Schizophrenie, du grec skhizein, fendre, et phrên, pensée) État de l’homme ordinaire qui se transforme en superhéros. 11 h 49 : Quel idiot ! Idiot, idiot, idiot, idiot, chut, chut. Du calme. Une vue d’ensemble de la ville. Je l’ai dis moi-même plus tôt. Le Rockefeller Center, bien sûr. Quel mauvais espion ferais-je! Tout ce temps perdu devant la plus grande évidence : celle qui surplombe la ville. Je cours. 12 h 24 : Je suis passé inaperçu. Un simple touriste. Mieux vaut ne pas attirer les doutes lors d’une mission. Le simple fait d’avoir des cheveux bien lissés pourrait faire sortir le Dr Terreur de nulle part. Même de ma poche. Mes poches ! Elles sont vides. Erreur. J’avais bien oublié quelque chose à l’appartement. Que vais-je faire si les autorités m’interrogent? Je jouerai la carte du portier. Peut-être est-ce à cause de mon smoking qu’ils m’ont fait entrer sans payer ? 12 h 59. : Mon tour de garde n’est pas encore très concluant. J’ai pris quatre fois l’ascenseur, j’ai noté dans mon esprit tous les visages, j’ai observé le paysage en me plissant les yeux et j’ai compté toutes les lumières sautillantes de la pièce étrange. Qu’est-ce que c’est que cette pièce? C’est vrai, ils l’ont mise là, probablement pour que les touristes se disent que ce n’est justement rien d’autre qu’une attraction touristique, quand au fond, ce serait un projet instauré par la CIA concernant les nombreuses visites extraterrestres des soixante dernières années. Je ne suis pas dupe, messieurs dames. Je ne suis pas un touriste parmi tant d’autres. sé et j’ai absolument besoin d’utiliser ces binoculaires. Elle rouspète. Devrais-je lui faire comprendre ce qu’elle risque en miaulant de la sorte? Devrais-je lui faire comprendre que ce n’est pas un jeu et que cette altercation pourrait lui coûter cher, très cher, qu’elle pourrait même lui coûter la vie? Qui sait? Peut-être est-ce cette jeune femme que je dois sauver? Peut-être que quelqu’un est en train de mourir asphyxié, juste là, en ce moment même, devant mes yeux. Non plus bas, tout juste en-dessous de moi, au sol. Dans une automobile?! 13 h 43 : Ça y est. J’ai repéré de la fumée. De la fumée très suspecte. Comment me rendre à cet endroit sans perdre une seule seconde? Je voudrais tant être plus vite que mon ombre. 14 h 02 : Je suis perché au bon endroit. Si ce matin je suis arrivé à ressentir le besoin imminent de partir de chez moi, à la rescousse de je ne sais qui ou quoi, je dois nécessairement avoir ce don. Le don spécial, impulsif et spontané qui permet de venir en aide à la personne en détresse. Je dois me faire confiance. J’ai tout ce qu’il faut. Tous les outils sont en moi. Je suis prêt à faire tout ce qui est en mon pouvoir pour régler cette situation. Et je le peux. J’en ai la force. J’en ai la conviction. Si j’en suis autant persuadé, je suis dans l’obligation de sauter, j’arriverai en quelques instants seulement et je pourrai ainsi mettre fin à toute cette histoire. 13 h 16 : Pause cigarette. Je reste vigilant. 14 h 07 : … 13 h 21. : Pardon mademoiselle? Je suis un homme très pres25 26 NEUFFENEKA nirk ir vneuf vnorak nikantine argu déréaginek perano dizzipur noklak laruchnive chnak monto gu fnef neko gnok nzorlanges pérénisse morech fréluchi mirando fnefnak igori NEUFFENEKA yéwêlopsi tnoffnucur prozkazferof burinx numiarnimuche kzal ploge salceuclasse férwé munimaque phénégondre mojni calutor béroj distonpon arémède falanfouèle / ostenpentisco thorve bérabéra fénouz tholbo thulbur nervégonlice hupitave vurtupilwèle kwem knaz noffeu / irjamalasgo ralt NEUFFENEKA supulpe flove mnénika folgo bondi desve yarnali rubonige huccin feularance NEUFFENEKA vos tribulations ne suscitent que peu d’infelte dirôme pour le dophinphe voltimueckkhatonpruz gresstallije uhl thiorn bejdd zdrél concti prsizmq mrowya afhnmé pliozdène mermédnor orche orozcrozmame staunau fazri tapapaucercle yajelde fromrâh NEUFFENEKA ismothéwèle dambizarné dufudla dostolef fouz fnijmorak vatuvi grezch arznimaf dubi cannechtmole fernosnisnakmzmule azn persmondilajno acafir achmeitiste fiourate âzamé bedcongule lostriamose génèphule bondri akacin twèledime ponrate ftcheu pouné zhaglazir gulm zdé mèroc zlév dumacrachnel fezdonzir divhèro urcmulfunuge prèvzemouek jegori sfonze glauclèje lahazdedug xamirzacte tupoc yorozherm tulvda romnulgu jagaver / bersdachilde chtogoune bïeulle djernume taublaumatanchulde zoggri cémeule yâfre yonzirion peupinou NEUFFENEKA mais à qui vous adressez-vous bon sang de craunlaurèrdulip kifloflette kfar dimounik arbisourid prufanok kvuk kopluk votre rumdal vnikoch ziglauclèje éflonaure priz m’exgruvuge la gochela névé kerdonzef nofchnivoèru prustweldé dubli veulvak chéftouwèm bleûde zivnodal NEUFFENEKA jafnobul kaf mijanbo kreufnasse pwèleburnine pofnouze pwègétu cafnomène trapildif tnédé zozozhiar brédulblure troddize chausamne nifnori fétionce nicolflu wouweûrdé yatafohi ztadli mernuclinx gourvèneuque ogolzdou janglère turufame nuguemèleu hurvenatuk ozecauwèlnaharssi prumèneuvenigè wilgle tnâ bef yovtev tnarpo / ofminèmatalpwol ivirondice chigar talbandé mecsimune prèligonzinevo dumuguedauglazère wawa éléglode yémhné corcruzan brutize chumavnanil orthonsile crusète jiboré dumanik bruholduf hevnékonsikalokipore prédéontuque mânogé grufustuque ménâle urftu swèmné ivoritzi mwèmwé perléoncule digridor ofthonakilamnev chipito pwèletou vasufsnak zidachère grèzvénuve zédimarve tovavwé efnéga tubucleuznére molbodul fnège furète gasdimarge turmatwé arzq ifhircle crossef zdavol ulnaure ornaumi bronsourgourzte 27 jarvnima neka jaurendulde dlélègueuze twudlé chafsnûble froncè brutispintre néménogrizte yaccami origlate taufnawère carafnève nipar covnèmage dlolo / corsiméïve NEUFFENEKA ifn nvé tadi tachalte tahi merwèle zohilé hmnéropare twèf tume gèfte yémh nofhnef broze mniko grèvti uji chné cnarmé jdi preuf filègwole pardaurepistonèj swèf pouave damihilve iknafé dizbondil NEUFFENEKA le masque d’orvenettes a l’allure du paryagymor /d’ostrapoulie il armonte les breunettes et neijatte la cournume pour en faire un gras gémaque NEUFFENEKA tais-toi eunuque dostakinus, ton fiel puant se solidifie et / calfeutre ta raison mernévale tu ne sais pas qui tu es NEUFFENEKA ïekal norvbedblanne yiprezine prutrécli orglutre zatuche pomnivèche orostimaclinthe purnuvale swèmetinek NEUFFENEKA l’unicité virginale est rompue la fuite du détérampion /nimok népondarince l’oznocolcanek nefzu teûlèdi mevnézon tafanaconir huellètin NEUFFENEKA le scandale parthénogénétique rikh nief chrisnhiak breuf breuf NEUFFENEKA irnicouclix moftogage perné soufnibar curdidonceau chimop deutil twèle nifloucette preudibaure arnoncellin buldi ornolda adiratanpachette / feufouinè synfum cemnikbron frujbulina parnimnomak jèbebwol nonimnoftef jchnunigasse florlémonceau jnonivek mnina gérvo prudastil cimek mnonilas vnénérèmoncu soldim mdérè wola didi hirsature dorga gruvnakni schnougrutte mirvine snonansk mèchebelinne frontispvire argu oèle uzapirè gazgi fné frodjejréga jrudu branceménèfe gurdi moupli adguéréban senken venze gozdoz rolwé zoncar djichtu liposwène habétézo mimni cophagime optoru hunje minof sirandé dofnur valdiran méthoque nifaré jibati mondugrance rémémontru génardodileske nocarampluche mifalesque dimophe écherpe paurizanepse NEUFFENEKA je suis le plus grand des pohètes NEUFFENEKA affabulateur tu te confonds avec Philippe Morissette tes schrunges géméar prurisse ton identité odwolée RIDEAU NEUFFENEKA c’est la parité qui néantise et gardamude mina fnak fnak 28 29 Cela fait maintenant presque cent vingt-trois ans que le fameux détective nommé Sherlock Holmes a été créé par l’écrivain britannique Arthur Conan Doyle. Sa réputation et son histoire se sont répandues d’un océan à l’autre et d’une génération à l’autre. Malheureusement, comme toute histoire, celle de Sherlock Holmes a été déformée par le temps. Saviez-vous que jamais Sherlock Holmes n’a dit « Élémentaire mon cher Watson. »? Étonnant, n’est-ce pas ? De nos jours, la plupart des gens croient, à tort, que Holmes était un homme respectable, sans vices et très respectueux de la loi. Un vrai gentleman, quoi! Pourtant, la véritable personnalité du détective est celle qui est présenté dans le film Sherlock Holmes, réalisé en 2009 par Guy Ritchie et adapté du Comic book de Lionel Wigram, qui suit très fidèlement ce qui est écrit dans les nombreuses œuvres de Connan Doyle. Dans les différents romans et nouvelles de Doyle, Holmes n’était pas représenté comme quelqu’un de fréquentable. C’était une personne égoïste, qui fumait beaucoup, qui participait à de nombreux combats de boxe illégaux et qui n’hésitait jamais à enfreindre la loi lorsqu’il en avait envie. Par exemple, il ne se gênait pas pour entrer par effraction dans une maison ou pour voler quelque chose qui était important pour son enquête. Il lui arrivait aussi de se droguer lorsqu’il ne travaillait pas. Tout ce qui l’intéressait dans la vie était de résoudre ses enquêtes : il ne vivait que pour son travail. Même l’identité de ses clients n’avait pas d’importance à ses yeux. Il pouvait s’agir de n’importe qui, tant que l’enquête était intéressante. La seule chose de bien à son sujet était qu’il détestait la paresse et les paresseux. La question se pose donc : qu’est-ce qui a changé Sherlock Holmes à ce point ? Qu’est-ce qui a transformé ce personnage peu recommandable en quelqu’un de gentil et de vertueux? Peut-être les adaptations, qui ont été faites au cinéma et à la télévision ainsi que les livres pour enfants. La personnalité de Sherlock Holmes a dû être modifiée afin que les enfants puissent regarder les différentes aventures de ce personnage excentrique et s’en servir comme modèle dans la vie. Cela leur donnait aussi l’envie de servir la justice et de ne rien faire d’illégal. Comme l’indique Lionel Wigram, le créateur du Comic 30 Book de Sherlock Holmes, « Historiquement, ce n’est qu’au début des années 30, avec l’interprétation de Basil Rathbone, que Holmes s’est mué en une sorte de gentleman british. ». C’est Basil Rathbone qui interprétait Sherlock Holmes dans le film de 1939 intitulé Les Aventures de Sherlock Holmes. C’est aussi lui qui a dit pour la première fois « Élémentaire mon cher Watson. ». La vision générale de Holmes a donc été principalement modifiée par un seul film des années trente, preuve que les gens sont influençés par la télévision. Heureusement, Guy Ritchie et Lionel Wigram font partie des quelques érudits qui connaissent la vérité puisqu’ils ont lu attentivement les livres de Sherlock Holmes. Par son film, Ritchie parvient donc à rétablir la véritable identité du détective. Ce que Ritchie a entrepris n’est pas une simple tâche, car il doit inculquer de force la vérité dans l’esprit conditionné de plusieurs générations et ce, partout dans le monde. Il aura réussi à briser l’illusion du Sherlock Holmes bon et vertueux et à déconditionner les gens, afin que les générations futures ne croient pas en un imposteur. 31 Ceci n’est qu’une fiction par Jennifer Labrecque 32 - Qui veut encore de la bière? cria la serveuse avec un clin d’oeil enjôleur à la foule qui se pressait devant elle. Les hurlements de joie se firent entendre de partout, surtout de la part des garçons qui trouvaient que la jeune fille avait de bien jolies fesses lorsqu’elle se penchait pour faire quelques drinks qu’on boirait en dansant sur du Yelle en version tecktonik. Sur la piste de danse dangereusement surpeuplée, Cora tentait de se frayer un chemin. Elle était très énervée par un gars qui tentait depuis tout à l’heure de la prendre en sandwich entre lui et un autre mec dont l’apparence ne lui disait rien qui vaille. - Tassez-vous! Laissez-moi passer! hurlait-elle, une expression craintive sur le visage qu’elle avait d’ailleurs fort joli. Elle finit par bousculer violemment une autre fille qui faillit s’étouffer avec l’olive qu’elle dégustait langoureusement , croyant charmer le gars qui se trouvait devant elle. Cora se retrouva alors devant le bar occupé par une majorité masculine. Regardant à sa droite, elle vit une sortie de secours par où elle pourrait s’échapper. Coupant le chemin à une serveuse qui lui lança un regard courroucé, elle poussa la porte, monta un escalier et se retrouva sur le toit du bar Le Soft Pub. Soupirant de soulagement, elle avança tranquillement vers le bord du toit qui n’était d’ailleurs pas sécuritaire, car il n’y avait aucune cloison protectrice. La rue de l’Étoile était célèbre pour ses deux bars côte à côté dont les patrons, deux amis d’enfance, se menaient une lutte continuelle pour attirer le plus de clients possibles. Cora, du haut du toit, entendait très bien le sol vibrer sous ses pieds tant la musique qui émanait du Soft Pub était forte. Devant elle s’étendait la magnifique ville de Bourg-en-Bresse. La beauté de l’endroit rési- dait principalement dans ses milliers de lampadaires: le tout était un mélange de lumières de différentes couleurs, ce qui donnait à la ville, aux aurores des matinées d’hiver, une allure de Mcflurry aux smarties. À la porte du bar s’étendait une courte file de jeunes adultes qui patientaient pour entrer profiter de la boisson et de la musique. Un peu plus loin, une voiture de police circulait dans le quartier et vers l’est, un camion de pompier faisait le tour du quartier pour la troisième fois. « Sûrement madame Angers qui a encore vu un chat dans un arbre », pensa la jeune fille avec une expression mi-figue mi-raisin. En les observant, Cora s’assit sur le bord du toit, les pieds dans le vide, et regarda autour d’elle avec dégoût. Le Soft Pub était un immeuble constitué de béton et de briques. Ces dernières étaient dangereuses, coupantes et, pour quelques-unes, collantes de sperme et de pisse. La fenêtre de la porte était craquelée et elle laissait entendre un petit sifflement énervant à cause du vent frisquet. Cora frissonna. La jeune femme se retourna vers la ville qui s’étendait devant elle et elle respira profondément. Perdue dans le cours de ses pensées, elle n’entendit pas les bruits de pas qui se rapprochaient derrière elle. Un jeune homme avançait avec la ferme intention de ramener la jeune demoiselle en bas pour la faire danser. Lorsqu’il lui toucha l’épaule, elle sursauta et se retourna vers lui si brusquement que son corps, déjà en équilibre précaire sur le bord du toit, bascula vers l’avant. La bouche de Cora forma un rond parfait qui aurait pu être drôle si la situation n’avait pas été aussi dramatique. La jeune fille tomba du toit avant d’avoir pu pousser le moindre cri de terreur. Ceci n’est pas une fiction « Deux héros à Bourg-en-Bresse : un policier et un pompier Jeudi, en pleine nuit, les deux hommes ont sauvé la vie d’une jeune fille de 19 ans, suspendue au toit d’un bar de deux étages. Son compagnon, allongé sur le toit. essayait de la retenir. mais il était sur le point de lâcher prise quand les deux hommes sont arrivés sur les lieux et ont réussi à amortir la chute de la victime. Les deux héros souffrent de légères contusions. » Rédigé par B.C. dans Faits Divers le 16/03/2010 à 09h11 33 la maison de Catherine un TextE dE THIerry avard * * un texte de Thierry Avard 34 Ses poèmes ne valaient pas de la crotte, et c’est pour ça qu’il était allé voir son frère. Ses poèmes n’étaient pas tellement mieux, mais au moins ce n’étaient pas les siens, il ne serait pas gêné quand on allait comparer son style à celui d’un enfant de cinq ans peu inventif. La plupart du temps, les langues se dégourdissaient lorsqu’il était question de ses poèmes, ou de ceux de son frère. Généralement, les gens ne faisaient pas la différence. Son frère, Claude de son prénom, adorait jouer avec la ponctuation. La remise était le lendemain, pour un projet d’école dans lequel il s’impliquait le moins possible, pour des raisons qu’il qualifiait de métaphysiques. Ça ne faisait rire personne, surtout pas sa maman, qui avait un très mauvais sens de l’humour. Claude avait sa chambre dans le sous-sol. Il fallait cogner, trois fois, très rapidement, la seule façon tolérée par Claude, qui aimait qu’on cogne «comme une symphonie de Beethoven». On lui demandait : «La combientième?», il souriait au moins quatre secondes avant de prononcer lentement : «La trente-troisième, comme le numéro de Patrick Roy.» Claude écrivait un roman, il en était au vingt-septième chapitre et se demandait combien il allait devoir faire exploser de planètes encore avant de comprendre où il voulait en venir avec tout ça. Il finit par lever ses grosses fesses de sa chaise d’ordinateur. - Je veux un de tes poèmes, il faut que ça parle de l’imposture. Ou d’une maison. - Les poèmes qui parlent d’une maison, je les garde pour moi, ils sont trop personnels. L’évidence; il n’y aurait absolument aucun moyen de le convaincre. Mais la remise était le lendemain, et le temps filait; se mettre au travail pour écrire un bon texte l’aurait assassiné. Aussi bien aller fouiller dans la boîte de souvenirs de maman; Claude lui avait déjà offert des poèmes pour sa fête ou pour la Saint-Valentin, alors qu’il avait sept ans, ou à peu près. - Si on va boire de la bière, je vais peut-être avoir le goût de te donner un poème, lança Claude. Ce n’était qu’une question de temps avant que Claude se mette à parler de bière, d’aller en boire sur la montagne, comme quand ils avaient quatorze ans. Claude semblait condamné à devoir considérer ça comme le plus beau moment de sa vie durant plusieurs décennies encore. Pour son frère, c’était deux ou trois souvenirs plus ou moins bizarres; pour avoir un poème, ce n’était pas cher payé qu’un petit six bières au dépanneur du coin et une promenade à vélo jusqu’à la montagne. - Je me rappelle encore de la dernière fois…t’avais mis mes lunettes pis tu disais que tu comprenais pourquoi j’avais tout le temps mal à la tête…eh eh… Claude était jadis un grand cycliste; on le connaissait à la boutique de vélo, où on l’appelait « Monsieur.» Depuis quelques années, ça s’était un peu modéré. Ses fesses étaient de plus en plus grosses. Les rues changeaient, Claude remarquait chaque détail. Son frère n’apprenait rien et il s’en foutait. Tout ce qu’il voulait, c’était un poème pour pouvoir passer à autre chose. Le dépanneur Du Lac s’appelait comme ça depuis les années soixante-dix, ça ne rajeunissait personne, surtout qu’il n’y avait pas de lac. - Si ce sont des Chinois qui ont le dépanneur maintenant, pourquoi ils ne changent pas le nom? La Root Beer maison ne coûtait rien; Claude ne s’en rendrait même pas compte, et il a une affection toute particulière pour l’effet placebo. La montagne était toute proche. Ils appelaient ça la montagne, mais c’était rien qu’une colline. D’en haut, la première chose que Claude a regardé c’est la maison de Catherine. Plus précisément la fenêtre de sa chambre. Il était allé au bal des finissants avec elle. Et ça le faisait encore pleurer. Ils sont rentrés à la maison. Claude n’a pas donné de poème à son frère; ils sont trop personnels, ils parlent tous de la maison de Catherine. 35 36 La balançoire contemporaine un poème de Vincent Lavoie Dans une ruelle un condom dans le fond d’un conteneur à bébé éprouvette vous voyez pourquoi je n’aime pas la ville elle est comme un poignard lavé elle est comme une multitude de solitude *** manifestation dans les rues agents créateurs d’émeutes tout ressemble à un viol financé par le gouvernement qui est financé par nous qui est financé par les patrons que le gouvernement finance. *** Qui es-tu? feuilles multicolores dans tes yeux mon pays, ma ville est en chacun de mes pas chacun de mes mots chacun de mes souffles je marche à l’amour je manifeste Qui es-tu? de tes baisers sans bois, sans feu mes lèvres ont froid à l’arrêt d’autobus plein de boucane bleue plein de bruit de cadavres motorisés Qui es-tu? je suis l’ensemble, le tout la réunion, les fiançailles de l’apaisement et de l’action je suis le rhum après la bière Je suis L’AMÉRICANISATION La banlieue. *** la ville sent la vieille cigarette bon marché la pluie pisse dans le canal *** 37 photo de vincent 38 poème plein de taurine et de frétillements de clopes dans le fond d’une bouteille de rhum naviguant comme des cadavres dans un lac, tabarnak je me demande bien comment je vais faire pour vaincre mon cancer ma bouche est un désert une Camel ferait mon affaire envoie donc une petite dernière calvaire, Calvaire! *** Le paradoxe de la vie… une fleur pousse dans le milieu du chemin elle est seule parce qu’elle est belle *** vois les forêts d’asphalte et parfois vois l’industrialisation des arbres et il se demande pourquoi on n’a pas encore de pays je reviens, j’entends bêler *** dénaturé bientôt les pôles vont s’inverser « quadripolaire» à chacune des saisons et je reviens la cigarette au bec comme Lévesque dans les ruelles infâmes *** où des serpents salaces cherchent des La mort vit trous perdus Et la vie meurt viens avec moi En chacun de nous on va changer le monde *** 39 METROPOLIS CULTURA 40 La culture... ce qui a fait de l’homme autre chose qu’un accident de l’univers - André Malraux Montréal, l’été, c’est comme la campagne... on y trouve autant de vie qui grouille, qui pue et qui nous fait sentir vivant. Assise sur les marches d’un escalier qui mène à un quelconque appartement, je me sens vivante, je n’existe pas. Toute cette marée de gens, pressée d’aller nulle part, fait en sorte que je disparais. Nous existons seulement quand nous nous retrouvons seul, face à nous-même. Devant moi, de l’autre côté de la rue, le théâtre St-Denis annonce un spectacle d’humour. Les gens passent devant l’édifice blanc, ne se souciant que de la chaleur qui tourmente St-Denis et qui lui donne un aspect désertique. Un homme à l’allure étrange passe devant moi. Il s’arrête. Il me regarde doucement et me fait un sourire derrière une petite barbe pointue, jaunie par des années de tabac. Une camisole grise, sur laquelle un moulin trône tristement, pend sur son corps sec et décharné par la vieillesse. Je ne peux m’empêcher de lui trouver une ressemblance avec Don Quichotte. Le chevalier déchu se tient devant moi. Il me tend un carton de lait au chocolat, format d’un litre, toujours en souriant dans la lumière de la rue St-Denis. Je lui dit qu’il ressemble à Don Quichotte. Il me répond qu’il le sait en s’asseyant près de moi. J’ouvre le carton de lait sans dire un mot, sans le regarder. Je bois goulûment une gorgée qui me rafraîchit. Il sourit toujours lorsque je lui redonne le contenant de lait chocolaté. Des minutes qui semblent durer une éternité s’évanouissent dans la chaleur torride du mois de juillet. Un flot de personnes sortent du cinéma Quartier latin, un film vient de se terminer. Je regarde les gens qui sortent de la fraîcheur de l’air climatisé des salles de ciné et qui affrontent de nouveau l’été montréalais, en buvant une énième gorgée. Don Quichotte me tape sur l’épaule. «Regarde celui-là, me dit-il en pointant du doigt un homme arborant une énorme moustache, il ressemble à Nietzsche». En effet, l’homme près de la brasserie, à droite sur l’autre rive de St-Denis, avait bien la dégaine du philosophe allemand. Je me mets à rire et je commence à m’amuser du petit jeu qui s’installe entre moi et l’homme assis à mes côtés. Près du restaurant mexicain, John Lennon discute avec Marx. Ray Charles traverse la rue Emery avec un bâton. Devant le restaurant Blues, Tom Waits chante sa douleur et Clint Eastwood fouille dans les poubelles en face du cinéma. Mon ami me donne le lait au chocolat et me pointe du doigt Jacques Brel dans un beau chandail de marin. Tintin passe en courant en face de nous. Je ris devant cette merveilleuse assemblée. Confucius reluque mon carton de lait et trébuche au passage de Doesteivsky qui ne semble manifestement pas faire attention à qui que ce soit. Charlie Chaplin nous tire son chapeau tandis que Toulouse Lautrec essaie d’attirer son attention. Je ferme les yeux, enivré de soleil, de joie et de lait au chocolat. Sade me lance un regard aguicheur mais se ravise et jette son dévolu sur Nelligan qui ne lui sourit pas. Fragonard et Picasso boivent tranquillement une bière sur le toit des 3 brasseurs et Bethoveen sort de la maison de thé, sachet en main. Lewis Caroll tient la main d’une jeune fille brune et traverse St-Denis comme si sa vie en dépendait. Alexandre Dumas mange tranquillement un sous-marin en se dandinant drôlement. Mon ami et moi restons encore longtemps assis à boire le lait, comme si rien pouvait m’atteindre. Demain n’existe pas et hier n’est jamais passé. Je ris et je rêve longtemps sur les marches de l’escalier qui mène à un appartement quelconque, sur la rue St-Denis à Montréal. À chaque rire, je meurs, pour revivre l’instant d’après. Don Quichotte a disparu, le carton au chocolat aussi. Assise, contemplant le monde dans la pénombre du soir, je me lève, frêle et effrayée, pour aller combattre mes moulins. 41 un texte de Roxanne Nadeau Le célèbre Carré blanc sur fond blanc de Malevitch exposé au MoMA, (The Museum of Modern Art situé à New York) en 1918, avait, à cette époque, (et encore aujourd’hui) fait soulever bien des sourcils : « Ça, une œuvre? Lui, un artiste? Je pourrais faire la même chose ». Malgré les divergences d’opinions, la réponse est oui. Pourquoi oui? Parce qu’il faut considérer la démarche réflexive qui a précédé la réalisation de la toile. Malevitch désirait accéder à l’essence même des principes de la peinture. Les formes, les couleurs, l’espace, tout ces éléments de compositions ont été repensés jusqu’à leur plus simple expression. En représentant un carré blanc sur un fond blanc, il voulait illustrer la pureté, l’atteinte des fondements suprêmes de la peinture. Oui, c’est de l’art et attachez vos tuques, car au delà des coups de pinceaux, le domaine artistique offre encore bien des surprises… DHC/ART ou encore Diving Horse Creation/ART est une fondation montréalaise dédiée à l’art contemporain qui présentait, à l’automne 2009, l’exposition « Survivre au temps ». Sur les murs étaient accrochés des photographies, des textes explicatifs, des horaires provenant de la performance de Tehching Hsieh, intitulée : One year performance 1980-1981_Time clock piece. L’artiste, durant une période de trois cent soixante-cinq jours, s’obligeait à poinçonner une carte de temps à toutes les heures. De jour comme de nuit. Froncement de sourcils… de l’art ça? Oui. Il faut porter attention au message, ce à quoi Hsieh voulait conscientiser le public : la relation de l’homme avec le temps, son organisation, sa dépendance. Nos activités sont chronométrées, nos déplacements sont calculés, notre société est programmée selon les tics tacs de la montre. Oh! mais, comme le temps passe vite, suivant… À l’automne dernier, le sol maskoutain recevait pour une troisième fois Orange et son édition Il nostro gusto qui signifie « Notre goût ». L’événement, qui allie art actuel et agroalimentaire, proposait treize artistes et plusieurs projets éclatés. Parmi eux, Cosimo Cavallaro. Son œuvre? Un appartement recouvert, ou plutôt noyé, de 518 litres de ketchup. Plafonds, planchers, meubles, rien n’y échappa! EXIT. A Room in Ketchup, est une expérience multisensorielle avec l’odorat, la vue, les pieds qui 42 collent sur le parquet… Ne vous étouffez pas! Il s’agit bien là d’une œuvre artistique. Ce qui paraît comme un énorme gaspillage est, pour l’artiste, un symbole. Symbole de la bouffe préparée industriellement versus la nourriture de la famiglia . ne s’achète pas avec de la petite monnaie. Grimace? Aberration? Cette audacieuse création nauséabonde, qui marie science et art, reflète l’hypercapitalisme et la surconsommation de notre société actuelle. Une nouvelle idée pour les cadeaux de Noël… Incroyable mais vrai! Piero Manzoni a fait une création à partir d’une substance connue et méprisée de tous : les excréments! Ce que son corps a évacué, Manzoni l’a pesé (30 grammes pour être précis) et l’a inséré dans de petites boîtes de conserve. Merde d’artiste s’est vendu à prix d’or. Payer cher pour du caca, cela semble absolument saugrenu, pourtant tout cela est bien vrai. Il ne faut pas serrer les fesses! L’art peut naître n’importe où! Avec cette œuvre, il jette un regard sur le rôle du corps humain dans l’art contemporain et il questionne également la notion du statut de l’œuvre d’art. Malgré sa nature dégoûtante, la merde, une fois signée, est tout à coup moins répugnante. Dans une optique plus obscure, plus dérangeante, voire malsaine, Guillermo Habacuc Vargas emploie au service de l’art, un chien. En 2007, lors d’une exposition à Manama au Nicaragua, il offre à l’assistance un spectacle troublant. L’animal en question est, au début de la performance, en vie. La bête se verra privée de toute nourriture jusqu’à ce que mort s’ensuive. Eres Lo Que Lees, qui signifie : « Vous êtes ce que vous lisez », n’est pas passée inaperçue. Cela a soulevé une énorme controverse et depuis, plusieurs pétitions circulent à ce sujet. Est-ce que tuer « pitou » est considéré comme de l’art? De l’art bestial? La question est ici beaucoup plus délicate. Des gestes aussi graves peuvent-ils vraiment être exécutés au nom de l’art? Quelles sont les limites à ne pas franchir? Est-ce que les artistes iront jusqu’au meurtre ou au suicide? Le monde des arts contemporains est fou, disjoncté, hallucinant! Il peut être facile de crier BULLSHIT à la vue de certaines réalisations. Par leur propos choquants ou leurs formes bizarroïdes, les toiles, les sculptures, les vidéos, les performances, restent souvent incomprises. Sous cette première apparence de « n’importe quoi » trop souvent trompeuse, se cache des merveilles. Prendre le temps de comprendre une œuvre n’est pas risqué. Et au contraire, cela se révèlera peut-être une expérience positivement déroutante… À essayer! Dans le même ordre d’idées, l’UQAM recevait en janvier 2009, Cloaca N 5. Son créateur, Wim Delvoye, a conçu huit modèles différents, tous aussi productifs les uns que les autres. Leur spécialité? La même que Piero Manzoni… Des étrons artistiques, pardi! Mais cette fois, ils sont fabriqués par une grosse machine qui reproduit le système digestif humain. Pour la réalisation de Cloaca (peu importe la version), l’artiste s’est entouré de plusieurs scientifiques. Carottes bouillies, filets mignons, le tout est ingurgité par le monstre fait de tuyaux, de bocaux remplis d’acides et de bactéries. Le résultat fraîchement sorti de ces entrailles métalliques peut être emballé sous-vide et se trouver un propriétaire. Qui sera le chanceux détenteur de la « crotte-copie » humaine? Il faudra y mettre le prix, car une défécation signée Cloaca 43 George Sand est une romancière du 19e siècle qui a écrit sous un nom masculin afin de pouvoir émettre son opinion sur des sujets sociaux importants à une époque où les femmes n’avaient pas voix au chapitre. Ses livres défendent le statut de la femme dans la société, ils prônent le droit à la passion et ils attaquent certains rites établis tel le mariage. Malgré le caractère dissident de ses romans, George Sand obtient des critiques favorables. Son premier roman, Rose et Blanche, est écrit en collaboration avec Jules Sandeau. À partir de 1832, elle signe seule ses romans. La même année, elle publie Indiana et Valentine. Puis, en 1833, elle écrit Lélia, œuvre qui restera associée à son nom pour 44 toujours. Au total, elle écrira soixante-dix romans et cinquante volumes d’œuvres diverses réunissant des nouvelles, des contes, des pièces de théâtre, des critiques littéraires ainsi que des textes politiques. En 1854, elle publiera ses mémoires intitulés Histoire de ma vie avant de s’éteindre en 1876. Aurore Dupin baronne Dudevant demeure une parfaite inconnue pour la plupart des gens mais le nom de George Sand est encore connu mondialement plus d’un siècle après sa mort. Ses lecteurs sont donc les grands gagnants de ce stratagème qui aura permis à la baronne de signer d’un nom d’homme ses pensées de femme. Romain Gary est né en Russie en 1914. Il a été aviateur durant la Seconde Guerre mondiale, secrétaire d’ambassade après la guerre et il travailla ensuite pour les Nations unies. Cela dit, Romain Gary a surtout été un écrivain fort populaire. En 1945, il gagna le Prix des critiques avec son premier roman, Éducation européenne. Il écrit ensuite Le Grand Vestiaire, Les Couleurs du temps et bien d’autres oeuvres. En 1956, il gagne pour la première fois le prestigieux Prix Goncourt. En 1960, il publie La Promesse de l’aube qui lui assure une grande notoriété. En 1975, Gary gagne pour la seconde fois le prix Goncourt sous le pseudonyme d’Émile Ajar, avec le roman La Vie devant soi. Puisque cette haute distinction ne peut être accordée qu’une seule fois dans la vie d’un auteur, l’imposture était lourde de conséquences. Bien que l’auteur ait pensé user d’un stratagème efficace en engageant son cousin, Paul Pavlowith, en tant que figure publique d’Émile Ajar, la tromperie a été démasquée après la découverte de leur lien de parenté. Romain Gary affirme qu’il a créé Émile Ajar afin de déjouer la critique et de revivre la fascination du recommencement. « C’était une nouvelle naissance » a-t-il déclaré dans la revue Express en 1981. Sous le nom d’Émile Ajar, Romain Gary publie aussi Gros Câlin en 1974, Pseudo en 1976 et L’Angoisse du roi Salomon en 1979. Il met fin à ses jours en 1980. Un an après sa mort, un court texte est publié. Intitulé Vie et Mort d’Émile Ajar, le récit tente de démystifier la grande imposture de Romain Gary. Contrairement aux auteurs à qui le pseudonyme apporte l’anonymat nécessaire à créer une œuvre littéraire controversée, l’imposture de Romain Gary est plus difficile à justifier. Est-ce que Romain Gary a réellement voulu vivre une seconde naissance littéraire ou a-t-il seulement voulu renflouer ses coffres? Nous ne le saurons jamais. Misha Defonseca publie en 1997, chez Robert Laffont, sa biographie intitulée Survivre avec les loups. Le roman connaît un véritable succès. Il est traduit en 18 langues et la version française se vend à plus de 200 000 exemplaires. Il raconte le récit touchant d’une jeune fille rescapée de la Shoah (mot hébreu par lequel on désigne l’extermination des juifs par les nazis durant la Seconde Guerre mondiale) qui, à partir de 1941, aurait parcouru 3000 kilomètres à pied afin de retrouver ses parents. Durant ce long périple, elle aurait été protégée par une meute de loups. Cependant, après la sortie du roman, certains historiens et plusieurs membres de la communauté juive relèvent quelques invraisemblances dans son récit. Après plusieurs recherches, ils découvrent que Misha Defonseca a menti. Bien qu’elle ait réellement perdu ses parents pendant la guerre, elle n’essaya jamais de les retrouver, car elle fut rapidement amenée dans un pensionnat catholique en Belgique. Son vrai nom est Monique Dewael. Elle vécut 8 ans en Belgique, au sein d’une famille de confession catholique. Outre ses lecteurs et son éditeur, Bernand Fixot, la supercherie de Monique Dewael a choqué Véra Belmont, cinéaste qui avait récemment porté l’histoire de Misha Defonseca à l’écran, y référant comme à une œuvre autobiographique. Pour sa défense, Defonseca a affirmé publiquement que l’histoire qu’elle avait écrite n’était peut être pas réelle mais que cette histoire l’avait aidée à survivre. Les atrocités de la Seconde Guerre mondiale, les traumatismes qui ont vraisemblablement ébranlé tous les témoins de cette époque et le besoin d’en exorciser les démons sont peut être la cause de l’imposture de Monique Dewael dont le crime aura été d’avoir laissé l’imagination l’emporter sur l’honnêteté. 45 46 En 1946, les Éditions du Scorpion publient pour la première fois le roman J’irai cracher sur vos tombes. Ce livre, en apparence écrit par Vernon Sullivan et traduit de l’anglais par Boris Vian, est un bel exemple d’imposture littéraire. Boris Vian a utilisé le pseudonyme de Vernon Sullivan afin de pouvoir traiter en toute liberté d’un sujet socialement très controversé : le racisme. Il choisit de duper le public en écrivant un roman qui raconte l’histoire d’un jeune homme, Lee Anderson, né dans le sud des États-Unis, d’un père noir et d’une mère blanche. Jeune homme à la peau pâle, Lee n’est pas victime de racisme. Cependant, son frère, dont le teint foncé trahit les origines, se fait pendre par un groupe de garçons blancs. Lee passera sa vie à venger la mort de son frère. Dans son roman, Boris Vian parle des difficultés quotidiennes des Noirs américains. Le roman contient beaucoup de violence et de sexualité. Interdit dès 1949, son auteur sera condamné pour outrage aux bonnes mœurs. Afin de prouver son innocence, Boris Vian traduira secrètement son roman en anglais et le déposera à la cour afin de prouver que l’original avait bel et bien existé et qu’il n’en était que le traducteur. Cependant, le stratagème ne fonctionnera pas et en 1950, Vian sera reconnu coupable et devra payer une amende. Si le juge avait eu le sens de l’humour, il aurait pu condamner Boris Vian à une double amende en lui conseillant d’en faire payer la moitié par Vernon Sullivan. Boris Vian s’éteint en 1959, le jour même où son roman est porté à l’écran. Konrad Kujau, né en Allemagne, a, en 1983, la brillante idée de publier le journal d’Adolf Hitler. Il s’associe donc à un célèbre journaliste collectionneur de reliques nazies, Gerd Heidemann, qui affirme avoir trouvé le journal intime du Führer en Allemagne de l’Est. Le journal aurait été gardé par un certain Dr Fischer qui prétend avoir trouvé le livre dans l’épave d’un avion près de Dresde. En 1983, Kujau annonce officiellement détenir le journal intime du Führer. Il est donc approché par le magazine allemand Stern qui publie quelques extraits du journal. Il nomme l’ouvrage Les Carnets d’Hitler. Le journal intime est analysé par des experts et déclaré authen- tique. La nouvelle, bien entendu, se répand rapidement. Cependant, quelques mois plus tard, un autre groupe d’experts de la Seconde Guerre mondiale découvre quelques anomalies historiques. La supercherie est alors dévoilée. Konrad Kujau avoue qu’il a imité l’écriture d’Adolph Hitler et qu’il s’est acoquiné avec Gerd Heidemann. En 1985, tous deux sont condamnés pour escroquerie et passent 42 mois en prison. Il est étonnant de constater combien les humains sont peu scrupuleux quand il s’agit de faire de l’argent. SOPHIE CALLE, SAGESSE DE LA RUE par Julia Smith L e slogan « faire de sa vie une œuvre d’art », qui a pris forme dans les années 60 avec l’avènement du courant Fluxus, propose un remède efficace contre l’ennui de son propre quotidien. Devenir l’ouvrier de la beauté de sa vie est toutefois un défi d’envergure qui, aux yeux de certains, ne reflète que le narcissisme démesuré d’une personne. L’œuvre de la plasticienne française Sophie Calle échappe à de tels reproches, puisqu’elle révèle l’intérêt de l’artiste à rendre fascinant non pas le commun de sa vie, mais celui des étrangers. Elle s’immisce dans leur intimité, les suit, annote leurs déplacements, les photographie à leur insu, reconstruit leur trajet et étudie leurs empreintes. Les travaux de Calle viennent troubler les frontières entre l’art et le voyeurisme, entre la vie privée et publique et entre la réalité et la fiction. On peut se poser la question : est-elle véritablement une artiste? C’est en 1978 que l’artiste réalise ses premières œuvres, après plusieurs années d’errance hors de son pays. Filatures parisiennes est une série de photographies de gens dans la rue, vus de dos. Calle tient à reproduire le portrait de ces étrangers aux récits intrigants, qui lui proposent une voie à emprunter. Non seulement ils sont ceux –là mêmes qui concrétisent son travail et répondent à son impulsion de s’infiltrer dans ce qui relève du privé, mais ils l’incitent également à ne pas sombrer dans le vagabondage. La filature semble être un excellent moyen pour elle d’écrire et sa première source d’inspiration, puisque l’année suivante, l’artiste se lance dans un projet similaire. Cette fois, elle concentre son attention sur une personne seulement, suivant ses traces jusqu’à Venise. Suite vénitienne est un récit descriptif accompagné de clichés de l’homme en question. L’artiste conceptuelle fait des pieds et des mains, en 1981, pour être embauchée comme femme de ménage dans un hôtel de Venise. Lorsqu’elle nettoie les chambres d’hôtel désertées par les clients, elle s’attarde à leurs ba47 fig. a fig. b fig. c 48 gages ouverts, aux déchets retrouvés dans les ordures, aux draps froissés et au parfum embaumant les taies d’oreiller. L’artiste note ces informations et photographie les objets, les endroits et les traces du passage des résidents temporaires. Elle récrée leur vie en joignant aux photos des textes au style atone et désaffecté. Je quitte mon poste pour aller faire le 47. Quand je reviens, ils sont sortis. Toujours cette odeur de tabac. Ils vont partir. Les valises sont prêtes. Dans la corbeille, il reste des boîtes vides de foot-cream (crème antiseptique pour les pieds) et de suppositoires Anusol ainsi qu’une lettre froissée. Je la défroisse et la lis […] Calle travaille en collaboration avec Paul Auster, dans les années 1990. Lors de la rédaction de son roman Léviathan, Paul Auster crée le personnage de Maria, dont la personnalité est forgée à partir des expériences de l’artiste française. Sophie Calle se voit « séduite par ce double » et inspirée pour un nouveau projet, soit la rédaction d’un roman, De l’obéissance, pour lequel elle va vivre à New-York à la manière de Maria, s’appropriant notamment ses curieuses habitudes. Elle suit un régime chromatique qui l’oblige à consommer des menus ne comprenant qu’une seule couleur chacun, autant les aliments que les couverts. Elle s’assimile également, à chaque jour, à une lettre de l’alphabet. Par exemple, lorsqu’elle suit la lettre « B », elle est « belle, blonde, bestiaire, belette et Brigitte Bardot ». Être un personnage de fiction ne suffit pas à l’artiste; elle doit se mettre dans sa peau et en faire une expérience ancrée dans la réalité. Si la vie est souvent confondue avec l’art dans les travaux artistiques de Calle, le courriel de rupture, provenant de son dernier amant, est l’élément principal de sa plus récente exposition Prenez soin de vous et brouille davantage la distinction entre le chef-d’œuvre et l’ordinaire. Cette réalisation de la plasticienne consiste à suivre au pied de la lettre les derniers mots, « Prenez soin de vous », apparaissant au bas du texte et à exposer les interprétations et impressions de 107 femmes choisies pour leur métier sur ce qui a brusquement mis un terme à la relation amoureuse. Parmi celles-ci, une philosophe, une danseuse indienne, une voyante, une latiniste, une clown, une linguiste médiéviste, une commissaire de police, une traductrice en langage SMS, une chanteuse, une diplomate et une écrivaine. L’art est, dans le cas présent, la solution purificatrice contre les âmes en peine et fait office de catharsis. Sophie Calle incarne l’imposture d’abord en considérant sa vie, et celle des étrangers, comme étant un art, puis en revêtant des apparences trompeuses : l’enquêtrice ou la détective, la ménagère, le personnage de fiction et la victime désemparée qui implore l’attention et les soins de 107 femmes. Un rapport peut être établi entre la signification du nom de la Française et ses premières réalisations, les filatures. Dans la langue grecque, Sophie désigne « sagesse » et en espagnol, Calle signifie « rue », soit « Sagesse de la rue ». L’artiste accorde une grande importance à l’expression résultant de ces traductions, assez pour en conclure qu’elle est destinée à rôder dans les rues et à faire de cette errance sa principale motivation et source d’inspiration. /// 49 Des rumeurs 100% fausses 100% rumeur SÉPARATION P.K Pédaleau Media P. K Pédaleau Mediafdsfg ewr vol. 62 no. 19 texte de Katia Desmarais Leur enfant s’apprêtait à naître Guillaume Marie-Loup Emma Watson Sébastien Dubé le Denis Drolet barbu arrêté pour voie de fait Hermione cocue ? L’ex VJ-recherché Karl Hardy se confie photos exclusives vol. 62 no. 19 1 9 50 4 92910 29381 6 Prince Timmy Le nouveau labrador de Philippe fehmiu Jamais deux sans trois ! Samuel Lavoie, le grand gagnant d’Occupation Double, cinquième édition, ne semble réellement plus être à la hauteur de celle qui a été son premier choix en final, Jessica Corneau. Pour des raisons encore inconnues, la belle Jessica a mis fin à leur relation qui durait depuis à peine cinq mois. De toute évidence, elle a vite fait de retomber sur ses pieds puisqu’elle fréquente dorénavant le capitaine du Lightning de Tampa Bay, Vincent Lecavalier. Cette rumeur qui circule de plus en plus est loin de plaire au joueur étoile qui a plutôt l’habitude de garder le silence en ce qui concerne ses histoires de cœur. PETITE LOUVE PERDUE Hermione cocue ? À peine sortie de sa relation avec le financier britannique Jay Barrymore, la jeune actrice Emma Watson, qui s’est fait connaître pour son rôle d’Hermione dans la saga Harry Potter, n’a pas tardé à redonner toute sa confiance à un séduisant Espagnol. En plus d’avoir conquis en un tour de main le cœur de la charmante Emma Watson, il semblerait que l’étudiant de l’Université Brown, Rafael Cedrian, ait également séduit sa belle-mère. Emma Watson dit n’avoir jamais imaginé vivre une telle situation et elle avoue être dans tous ses états. Sa mère, l’avocate Jacqueline Watson, s’est absentée pour quelques jours de son cabinet pour des raisons personnelles. De son côté, Rafael Cedrian nie toutes les rumeurs lancées à son sujet. Nouveau passe-temps pour Karine Vanasse... Selon plusieurs sources, la jeune actrice Karine Vanasse aurait été surprise à plusieurs reprises la main dans le sac. En effet, M. Patnaude, agent de sécurité du mail Champlain, affirme avec certitude avoir surpris la star en flagrant délit samedi dernier. À son tour, l’agent Mercier confie avoir été témoins de crimes semblables, non seulement impliquant l’accusée, mais également d’autres personnalités connues du show-business québécois. La pauvre cleptomane en herbe n‘en a visiblement pas assez de voler la vedette au grand écran. Dommage pour elle que son talent ne se fasse pas valoir dans tous les domaines! Après avoir déclaré en manchette d’Échos Vedettes le 29 octobre 2009 qu’elle était enceinte, Marilou Wolfe met fin à sa relation avec son fiancé Guillaume Lemay-Thivierge. La jeune actrice et réalisatrice refuse catégoriquement de donner des détails sur sa rupture avec celui qui deviendra papa au printemps. Pour sa part, l’acteur vedette du film Nitro (2007) affirme qu’il nage encore dans une effrayante confusion et qu’il espère du fond du cœur renouer avec sa bien-aimée. Décidera-t-elle de donner une deuxième chance à son petit loup? Les Denis Drolet dans le brun Dans la nuit du 12 au 13 février,les policiers de Montréal ont dû intervenir auprès de deux individus bien connus du public. Ayant reçu plusieurs plaintes pour bruit excessif, deux agents se sont présentés à la résidence des Denis Drolet. Visiblement, Sébastien « le barbu » Dubé et Vincent « les palettes » Léonard étaient d’humeur festive. Après que l’un d’eux ait injurié l’un des policier et lui ait assené un coup à la tête, des renforts ont été appelés et on a procédé à une 51 arrestation. L’art de régler l’estomac Le corps d’ébène inerte avance au rythme de la courroie mécanique. Le bruit du grand four ronronne au bout de ce chemin final, et pas âme qui vive pour apprécier cette dernière parade. Les autres morts sont étalés à perte de vue, tous aussi nus, noirs et luisants. Tous aussi émaciés. Tous morts du VIH, du moins c’est ce qu’affirment les registres. De toute façon, personne ne surveille, et tout le monde s’en fout, car ils ne servent plus à rien, sinon à la biomasse. La société roule bien. On ne se salit plus les mains avec des tâches aussi indignes que la manipulation des cadavres. La porte s’ouvre sur une pièce éclairée par... oh! je ne saurais les nommer. Ce sont de petites lampes, à la lumière qui vacille. Si on respire trop près, elles s’éteignent. Elles se déplacent vers le bas progressivement, très lentement, et leur lumière est chaude comme les tubes à boisson d’énergie des cafétérias publiques. Plus encore, sûrement. Elles sont différentes des autres lumières, plus douces et plus jaunes. À la fin de la soirée, elles disparaissent comme en s’excusant d’avoir fait dégoutter leur support, et laisse un instant un souvenir d’air blanc. Cliquetis des rails autocalibrés du robot charognard. Il ouvre une large bouche, avec des bruits d’air pressurisé, et crépite le feu de son ventre avide; un caméléon à la langue infinie qui déguste et halète de plaisir. - Je suis Lavanya, votre hôtesse, qu’elle a dit. Bienvenue dans mon restaurant. Je suis heureuse d’enfin pouvoir vous rencontrer – mon bon ami Fitzroy m’avait glissé mot de votre visite imminente et je crois pouvoir honorer cette heureux événement de quelques frivolités délicieuses. * J’en veux. Encore. Il m’en faut. Je me sens si fatiguée, si vide. Sous mon joli chemisier orangé, mon ventre gargouille... j’ai peur que mes voisins de bureau m’entendent... Heureusement, plus que quelques heures avant ce soir, avant... * Fitzroy me fait prendre mille dédales dans les corridors métalliques de la Cité. J’ai peine à comprendre comment il parvient à s’orienter, alors que tous les coins me semblent identiques. Finalement, dans un couloir qui me semble pareil aux autres, nous frappons à une porte tout aussi semblable. - Gastronomie pour deux, clame-t-il. 52 par Roxanne Baril-Bédard Elle est étrangement habillée, cette Lavanya, sans couleur, et avec une jupe, je crois, si c’est ainsi que l’on nomme une bande de tissu conique qui part de la taille et descend jusqu’aux genoux. Aussi, son visage est peinturé, comme celui d’une actrice. Ça surprend, c’est sûr, mais ça fait partie du plaisir; j’ai appris à apprécier ces bizarreries durant mes visites. Trishana en mange trop, Fitzroy. Ses calculateurs biométriques nocturnes afficheront un nombre de glucide et de lipide anormaux, une bonne nuit, et c’en sera fait de ma négoce. Et c’est moi qui n’aurai plus droit à mes petites douceurs. Oh! si tu savais ce que tu manques, mon pauvre eunuque... * Alors que nous absorbions la compote calorique et vitaminée dans la cafétéria publique, je me suis plains à Fitzroy de la vie, pour faire la jasette. - Ta vie est terne ? Mais... tu portes toujours de si jolies couleurs, Trishana... - Mais, comprends-moi, ce n’est pas que je n’aime pas toute la palette, j’ai seulement l’impression que ma petite vie d’analyste manque de saveur... - Pratique, quand même, que les sauvages refusent de vermifuger leur bétail. Les mêmes multiplications de globules blancs et rouges dans notre mal commun que dans le cas d’un ver solitaire. Les scanneurs nocturnes n’y voient que du feu. - Au fond, vous rendez service à la Direction, chère Lavanya, en les débarrassant de ces pommes pourries... * Ce soir, j’ai eu droit à tout un festin. Un truc vert en entrée, tout mince, et un peu croquant. Il dégoulinait de gras liquide et assaisonné. Je ne me rappelle plus de son nom, mais Lavanya m’a expliqué que ça commence comme une graine, qui est cachée dessous plein de minuscules morceaux de roches et de déchets... Les explications étaient fort complexes... mais c’était délicieux. Preuve que les sauvages ne sont peut-être pas si fous. Elle m’avait ensuite réservé un morceau de viande, qu’elle avait apprêté très saignant. Les coins de ma bouche suintaient de son succulent jus. À la moitié à peine, je n’avais plus faim, mais je m’obstinais à manger. Pour conclure, une charlotte, qui dansait sur son socle alors que mon hôtesse l’entamait à l’aide d’un outil brillant et triangulaire. Sa couleur rose mettait l’eau à la bouche, son goût était crémeux et elle fondait délicieusement sur ma langue. Je me permis même un deuxième morceau... 53 Chaque fin de mois, mes copines et moi, on se donne rendez-vous à New York pour faire les boutiques. Un rituel de filles. Chaque fois, c’est toujours le rêve! Vingt-quatre heures à se prendre pour des riches et à faire les boutiques, de la plus chic à la moins huppée, pour finir par se balader en limousine et faire quatre clubs différents! Je ne suis pas une accro du magasinage, mais métro-boulot-dodo, ce n’est pas fait pour moi. C’est le bon temps, même si je dois conduire des heures, passer les douanes et rouler encore quelques kilomètres. C’est couchée sur le rebord de la fenêtre d’un grand hôtel, au coin de la 96th W et de Broadway, que je m’étire après m’être fait réveiller par le garçon d’étage. Ce dernier, qui est assez mignon d’ailleurs, m’offre un succulent déjeuner comportant des crêpes, des tranches de pains dorés, des œufs miroirs, des pommes de terre, des fruits tropicaux, des brioches, une salade de fruits et des croissants. Tout cela et si peu de temps pour un estomac qui reste indépendant de ma volonté… 54 À 13 h 42, je porte mon manteau rouge, mes lunettes fumées et je sors avec mon sac à main noir verni. Ensuite, mes talons plateformes me portent jusqu’au stand à journaux où le magazine Vogue m’est tendu. J’en profite pour acheter de la gomme à mâcher et je prends le premier taxi pour la 5th Avenue. Arrivée à destination, un moka, sans sucre ni lait. Puis, je remonte dans ce même taxi qui roule 15 minutes jusqu’à ce que je croise Halley, qui sort d’un magasin d’où tous les clients sortent à leur tour, suivis des propriétaires qui supplient Halley à genoux. Je descends du taxi, passe mon bras par-dessus le sien, la complimente sur son maquillage et l’entraîne avec moi jusqu’au taxi. La sonnerie de mon cellulaire m’indique que j’ai reçu un texto d’Allyson et qu’Halley est en appel conférence avec elle et son « one night ». Sexy_Allyson-bella send : Shopping time!! On descend sur Amsterdam, où nous at- tend Allyson. Des touristes s’arrêtent même pour la prendre en photo. On la rejoint et nous marchons d’un pas synchronisé et décidé lorsque j’ai l’idée d’afficher l’horaire de magasinage sur mon cellulaire et de le lire tout en continuant de marcher. Liste : - Maquillage Benefit ; - Lunettes de soleil Gold & Wood ; - Vêtements Proenza Schouler ; - Souliers Zap ; - Sac à main Gucci ; - Bijouterie Ginette NY. - Hey you! Don’t you have eyes?! Je n’avais pas fait attention… je ne l’avais pas vu… Heureusement qu’il était là, sinon le camion m’aurait percuté de plein fouet! C’est alors qu’un sac à main en PVC (couleurs vert pomme et caramel) est balancé dans mes bras! L’instant d’avant, j’apercevais le bras foncé de mon sauveur qui le tenait avec la même fermeté et la même autorité avec laquelle il tenait mon bras, il y a quelques secondes. Au loin, loin là-bas, Halley et Allyson continuent leur chemin sans moi, oubliant d’un seul coup mon existence… COUPEZ! Je sens encore la MARQUE… et je la vois. Je les vois. Bijoux, chaussures, lunettes, sac à main, perruques, maquillage et costume… J’ai oublié ma langue. J’ai oublié mon nom. J’essaie de repenser à mon enfance et je veux et ne veux pas oublier la dernière image que m’a reflétée mon miroir. Le tournage est terminé. - Oh no!! Where’s my handbag ? 55 Vous reconnaitrez-vous après ? 56 un texte de Stéphanie Grégoire Pourquoi? Pourquoi est-ce que certaines personnes rêvent de la beauté stéréotypée? Pourquoi certains sont-elles prêtes à utiliser la chirurgie plastique pour y accéder? Probablement parce que tous les jours, dans les médias et dans les rues, on nous projette la même image de la femme et de l’homme parfaits. Par ces projections, la société nous dit : « Si vous n’êtes pas mince ou si vous paraissez vieux ou vieille, je vous rejetterai ». Parce que sans un joli minois, rien n’est accessible. L’apparence est maîtresse de nos vies! Bien sûr, tous ne se laissent pas influencer aussi facilement. Une artiste française nommée Orlan tente, depuis les années 1960, de contrer ces stéréotypes de beauté du corps imposés à nos esprits. Elle s’attaque tout particulièrement aux différentes pressions qui mènent au culte exagéré du corps de la femme. C’est une féministe affirmée! Orlan est principalement reconnue depuis les années 1990, car c’est entre 1990 et 1993 qu’elle a osé faire ce que personne n’avait essayé auparavant : elle a utilisé la chirurgie plastique dans un but artistique. Durant ces années, elle a subi sept opérations qui ont radicalement modifié son visage. Contrairement à la plupart des adeptes de la chirurgie plastique, elle ne l’a pas fait pour ressembler aux actrices et chanteuses hollywoodiennes squelettiques qu’on voit constamment dans les médias. Les augmentations mammaires, les rhinoplasties, les liposuccions ou tout autre chirurgie plastique du genre, ce n’est pas son truc. Son but n’est pas de répondre aux standards de beauté, mais plutôt de montrer sa différence au monde entier. Par exemple, une des chirurgies qu’elle a subie est un ajout de deux implants de silicone assez volumineux au-dessus des sourcils. Le plus étonnant dans ses performances chirurgicales, c’est qu’elle est restée éveillée lors de ses opérations. Elle a même lu des textes et dessiné avec son sang pendant que la chirurgienne était à l’œuvre. Elle a fait de la salle d’opération son atelier d’artiste. Orlan croit qu’il faut évoluer avec son temps et qu’actuellement, on ne peut plus faire comme Marcel Duchamp l’a fait avec ses ready-made à l’époque. Dans les années 1920, signer un urinoir était quelque chose d’innovateur, mais aujourd’hui, ce n’est plus suffisant. Les artistes qui souhaitent innover utilisent la technologie mise à leur disposition. Actuellement, la chirurgie plastique permet cette innovation puisqu’il est possible de modeler son corps de façon artistique. Par contre, la technologie continue à se développer et bientôt, utiliser la chirurgie plastique pour son art ne sera plus suffisant. C’est pourquoi Orlan affirme qu’elle compte bien utiliser les modifications génétiques dès que possible. Elle continuera donc son travail artistique qui, espère-t-elle, mènera à une réflexion sur le culte du corps qui est poussé à l’extrême dans notre société. La chirurgie plastique a sa raison d’être et les possibilités qui s’offrent à nous grâce à elle sont infinies. Toutefois, plutôt que de tenter de ressembler à la femme que nous avons aperçue dans une publicité de shampooing, donc de Pourquoi faire une telle chose? Parce que dans sa jeunesse, masquer notre vrai corps, ne vaudrait-il pas mieux utililorsqu’elle se regardait dans la glace, elle ne se voyait pas ser cette technologie pour montrer ce qui nous différencie comme elle se sentait à l’intérieur. Elle voyait plutôt une des autres, ce qui fait de nous un être unique? fille ordinaire, semblable à toutes celles qu’on aperçoit dans les rues. Malgré le fait qu’elle était belle, Orlan n’était pas Après tout, c’est cette différence qui importe. Chaque heureuse ainsi. Au fond d’elle-même, elle savait qu’elle homme et chaque femme a son propre idéal, les icônes était différente et elle voulait le montrer à tous. Elle voulait de beautés montrées par les médias n’attirent pas tous fuir les stéréotypes, elle n’avait plus envie d’être admirée les individus de la société. Donc, si nous ne sommes pas pour sa beauté. bien avec notre corps, il est normal que nous rêvions de La chirurgie plastique lui a permis de projeter à tous l’image le changer pour qu’il nous représente mieux. La chirurgie de la femme qu’elle est véritablement. Ce faisant, elle a dé- plastique nous permet de le faire, mais il faut éviter de veloppé une nouvelle forme d’art. tendre vers un modèle unique, au risque de perdre ce qui fait de nous des êtres humains. o 57 58 coordonnator en service Merci a lucie pour sa comprehension :) merci au jeune Thierry pour ses dessins Merci a Jennifer pour cette photo farfelue. 59 Merci à nos commanditaires pour leur soutien financier Visitez le Regroupement des Étudiantes et Étudiants du Cégep de Saint-Hyacinthe au : http://www.reecsh.org Les finissants de Culture et Création 2010 60