La collecte - Association Française des Fundraisers

Transcription

La collecte - Association Française des Fundraisers
JANVIER 2013
NUMÉRO 33
Dossier
Collecte à l'international :
Entre rêve américain
et casse-tête chinois
Coté recherche
Ce que donnent les femmes
Zoom pays
Collecte de fonds privés au Brésil :
le chemin reste long !
Editorial
Actualités
4
6
Le monde change.
Et nous ?
8
10
B
onne nouvelle, le 21 décembre
2012, la fin du monde n’a pas
eu lieu. Mauvaise nouvelle : elle
approche ! Sans surprise, la conférence internationale sur le climat de
Doha, n’a produit que du réchauffé,
condamnant la planète à un inéluctable réchauffement estimé entre 3 à 5°C. La catastrophe annoncée
est désormais assurée. Le monde change... Nous, manifestement, pas.
Campagne du moment
« Charité 2.0 » :
une nouvelle génération est née
En débat
Santé, recherche : comment travailler
avec les industriels ?
Grande actu
Coups de projecteur sur la philanthropie
française
Dossier
11
Collecte à l'international :
Entre rêve américain et casse-tête chinois
Côté pratique
16
Bien sûr, la complexité de nos sociétés n’aide pas. Les échanges
dématérialisés accélèrent le temps. Raison de plus pour ralentir.
Et réfléchir. Par exemple, pour comprendre comment travailler
avec l’industrie pharmaceutique tout en gardant sa liberté
d’agir (rubrique « En débat »)…
Place aux débutants
Les dîners de charité ont-ils un avenir ?
Horizons
18
Parce que gouverner, c’est prévoir, notre « Dossier » sur la
collecte à l’international montre que si la mondialisation de la
générosité est en marche, seules les organisations les plus
outillées parviendront à se faire une place dans le grand
« marché » planétaire du « non-profit » - qui, à l’instar du secteur
marchand, n’a aucune raison d’échapper au darwinisme
ambiant...
20
22
Alors, pour rester dans la course (de fonds, comme Véronique
Sentilhes, notre « portraiturée » amatrice de challenges !),
préparons-nous à ce nouveau monde qui surgit. La crise
économique, sociale et écologique nous oblige à entrevoir des
crépuscules aussi inconnus que prometteurs. Et la nouvelle
génération des « charities 2.0 » (rubrique « Campagne du
moment »), pourrait bien venir secouer nos (trop) vieilles
habitudes… Mais pas de panique ! Vous trouverez onze façons
de rester zen et motivés dans notre « Out of the box ». De
modestes conseils à consommer sans modération. A l’inverse
du champagne que nous sablons pour vous souhaiter, quand
même, une excellente année 2013 !
Impression : Mailedit
Actualités du fundraising
Out of the box
Petit précis de motivation à usage
des fundraisers en surmenage
Côté recherches
Ce que donnent les femmes
Zoom pays
Collecte de fonds privés au Brésil :
le chemin reste long !
Opinions
23
24
Tribune libre
« Lever un tabou pour mieux anticiper
les risques »
La Donatrice Mystère
et les dons aux hôpitaux…
People
26
Véronique Sentilhes
L'anti-solitude de la coureuse de fonds
Le Comité de Rédaction
Répertoire
27
Prestataires
Publication trimestrielle éditée par l’Association Française des Fundraisers, association à but non lucratif enregistrée au JO du 15 mai 1996, dont le siège social se trouve 6 rue de Londres, 75009 Paris. Tél. : 01 43 73 34 65
Fax : 01 43 49 68 77 Site internet : www.fundraisers.fr - E-mail : [email protected]
ISSN : 1952-7284
Directeur de la publication : Xavier Delattre - Rédactrice en chef : Yaële Aferiat - Rédactrice en chef adjointe : Pauline Graulle - Secrétariat de rédaction : Pauline Graulle, Alexandra Maillet - Conseiller spécial de
la rédaction : Jean-Marie Destrée - Comité de Rédaction : Yaële Aferiat, Alexandre Ayad, Perrine Daubas, Philippe Doazan, Eric Dutertre, Pauline Graulle, Aude Hayot, Claire Heuzé, Sophie Le Maire, Marie-Eve Lhuillier,
Christine Quentin, Sophie Rieunier, Noémie Wiroth - Dossier : Pauline Graulle - Illustration de Une : \Excel, Myrna Rougier - Direction Artistique : Maxyma, Antoine Tavares
>
Merci à nos partenaires \Excel & Maxyma pour leur soutien à Fundraizine
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Agenda
Actualités
Formation
« Communication et fundraising »
19 février - Paris
Petit-déjeuner
« Partenariats entreprises »
22 février - Lyon
Revue digitale
Le contenu des emails
de collecte en débat
Petit-déjeuner
« Les bons tuyaux pour optimiser votre
stratégie de e-fundraising tout au long
de l’année »
26 février - Paris
Petit-déjeuner
« Mécénat d’entreprise »
15 mars - Marseille
Formation
Formation
« Les fondamentaux pour collecter
sur Internet »
26 mars - Paris
© www.morguefile.com
« Le cadre juridique et fiscal du fundraising
en France »
19 mars - Paris
Petit-déjeuner
« Développer une marque « grande école »
via le fundraising : c’est possible »
26 mars - Lille
Formation
« Développer une stratégie de mécénat
auprès des entreprises et des fondations »
28 mars - Paris
Certificat Français du Fundraising
Matinée d’informations
28 mars - Paris
Formation
Stratégie Grands donateurs
3, 4 et 5 avril - Paris
12e séminaire de la collecte
pour la solidarité
25, 26 et 27 juin - Paris
Pour plus d’informations
et adhérer en ligne :
www.fundraisers.fr
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Fundraizine
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Longs ou courts ? Narratifs ou informatifs ? Réflexion sur la forme
que doivent prendre les emails de collecte…
L
es marketeurs du secteur marchand sont unanimes pour
recommander des messages email
courts et directs. La zone haute du
message est la plus importante car
le mode de lecture de l’email de
haut en bas ne permet pas de visualiser le texte dans sa globalité et
l’augmentation rapide de la lecture
sur mobile n’arrange rien. De leurs
côtés, les fundraisers connaissent en
revanche l’efficacité des histoires
personnelles (« storytelling ») pour
illustrer les actions de leurs organisations et solliciter le don de
manière tangible. Alors, pour quel
contenu opter au moment de rédiger un email de collecte ? Une
approche directe qui décrit les
réalisations et les besoins de l’organisation, ou bien l’histoire d’un
bénéficiaire dont la vie a changé
grâce au travail de l’organisation
avant d’en venir aux nombreuses
autres personnes qui ont besoin de
votre aide ?
Au fur et à mesure de l’expérience
acquise et des tests réalisés par les
organisations américaines et européennes, une réponse plus nuancée
se précise :
• Premier enseignement, le « storytelling » dans les emails de collecte fonctionne moins bien que les messages
plus généralistes et institutionnels.
• Dans le même temps, les messages
plus longs ont tendance à surperformer les messages d’appel à
don courts, exception faite des
urgences.
L’email de collecte ne doit donc ni
être basé sur une histoire personnelle, ni se résumer à un visuel avec
une rapide accroche pour attirer le
visiteur sur son site. Le bon contenu
consiste plutôt à décrire un besoin
urgent et l’impact qu’aura le don de
votre lecteur, avant de prendre le
temps de rassurer, en expliquant
votre mission et les actions menées
par l’organisation.
n A. A.
Actualités
La collecte pour tous !
reuve que la collecte n’a pas
encore conquis le grand public,
alors que Fundraising for Dummies
en est à sa troisième édition aux
Etats-Unis, l’équivalent français
n’existe toujours pas… C’est cette
carence que les auteurs se sont
donné pour mission de combler ! En
effet, avec Se lancer dans la collecte
de fonds privés, Perrine Daubas et
Vincent Edin publient le premier
ouvrage destiné aux petits porteurs
de projet qui cherchent à diversifier
ou à développer leurs financements,
en partenariat avec l’AFF, le Crédit
coopératif, le Comité de la charte et
l’Avise.
Véritable vade-mecum du collecteur débutant, l’ouvrage présente
l’ensemble des étapes à respecter
pour mettre toutes les chances de
son côté. Il se lit comme un guide
pratique, dans lequel les plus néophytes viendront chercher l’histoire
et la théorie du secteur, les comparaisons internationales et les règles
élémentaires de stratégies.
Parmi les inédits, on retrouvera par
exemple des informations sur le
coût d’une démarche de collecte de
fonds, sur les différents canaux à
envisager lorsque l’on démarre, ou
encore des pistes pour décider
d’embaucher ou non un fundraiseur.
Le livre est émaillé d’entretiens avec
des experts du secteur (donateurs,
mécènes, fundraiseurs ou observateurs avisés) et contient des exercices pratiques et autres mises en
situations idéales pour vous guider
dans une saine introspection avant
l’action ! Les aspects règlementaires
et juridiques ne sont pas éludés loin
de là. Enfin, la multiplicité des exemples abordés, tant en termes de
taille de structure que de variété des
soutiens obtenus (argent, mais aussi
don en nature ou en compétence),
fait de cette publication un salutaire
manifeste pour la démocratisation
de la collecte !
n Y. A.
©Juris
P
Se lancer dans la
collecte de fonds
privés, par Perrine
Daubas et Vincent
Edin. Editions Juris
Associations,
22 €
Fundraizine
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La campagne du moment
© www.morguefile.com
Actualités
« Charité 2.0 » : une nouvelle
génération est née
Nous vous proposons de découvrir aujourd’hui ce qui pourrait bien être une nouvelle génération
d’humanitaires, pour lesquels le fundraising n’est pas seulement un moyen, mais bien une mission,
présidant souvent à la création de leur organisation. Cette nouvelle génération (« génération Y » oblige ?),
élevée aux nouvelles technologies et à leur usage, bouscule quelque peu les codes et, force est de le
constater, souvent avec succès ! Décryptage avec Charity: water, l’ONG dont tout le monde parle.
P
rès de soixante-dix ans après
la seconde guerre mondiale et
la première vague de création de
mouvements de solidarité nationaux et internationaux, quarante
ans après la naissance du mouvement sans frontièriste, trente ans
après les premiers show charity
people, l’univers des ONG, bien que
fortement concurrentiel, permet
encore l’émergence de nouvelles
organisations. Nous ne parlons pas
ici d’initiatives locales, ni d’étudiants
qui partent faire leur stage de fin
d’études pour aider « les pauvres »...
Non nous parlons bien d’organisations qui ont, et affichent, l’ambition
de sauver le monde, et qui d’après
leur succès, y contribuent réellement. Découvrons quelques traits
caractéristiques de ces ONG 2.0 au
travers de l’exemple de Charity: water.
n Le mythe fondateur
Charity: water a été créée par Scott
Harisson, un New Yorkais que sa
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Fundraizine
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naissance et ses années de jeune et
riche fêtard ne prédestinaient pas
vraiment à l’humanitaire. Mais un
jour, lassé de ses frasques vaines,
il part au Libéria comme photographe pour une ONG américaine.
Il découvre alors les ravages causés
par les difficultés d’accès à l’eau
potable et décide d’agir. De retour
au pays, il demande à ses amis de
faire un don plutôt que de lui faire
un cadeau à l’occasion de son anniversaire : 15 000 dollars sont ainsi
collectés ! Scott finance ainsi la
construction de six premiers puits
en Ouganda. Mais ce n’est que le
début. Son histoire commence à
faire « le buzz » et suscite un réel
engouement. Scott crée alors
sa structure « Charity: water », qui
recueille les dons de ceux qui,
comme lui, « donnent » leur anniversaire au profit de l’accès à l’eau.
Aidée par le relai de célébrités, tel
Will Smith qui, grâce à ses fans,
collecte près de 790 000 dollars.
Charity: water prend son essor et les
« nobodys » s’y mettent aussi. Aujourd’hui, ce sont 7 000 projets qui
ont été financés.
n Les clés du succès
Avec les « charities 2.0 », tout se
passe sur le net (ou presque). Le site
de Charity: water1 est un exemple
de ce qui se fait de mieux : un site en
apparence très simple, peu de
rubriques, pas de navigation secondaire (tout est dit sur une seule et
même page) et surtout, une omniprésence de la photo et de la vidéo
– nous y reviendrons. Le style rédactionnel est simple, direct, familier,
très « américain », mais surtout
efficace et inducteur de confiance :
le visiteur se trouve immédiatement
dans une proximité avec l’organisation, avec les membres, et, in fine,
avec les bénéficiaires. Car c’est
une des promesses d’efficacité de
Charity: water : une plus grande
proximité et donc efficacité du don.
Actualités
La campagne du moment
La présentation de la problématique de l’accès à l’eau est simple et
accessible à tous, et la présentation
de la mission en une phrase laissera
sans doute un certain nombre d’entre nous songeur... Mais ce qui
frappe le fundraiser, c’est que la stratégie de collecte est principalement
orientée vers la collecte « peer to
peer » (P2P), de pair à pair, puisque
que l’action principale demandée
au visiteur est de... collecter. Bien entendu, il est possible de faire un don,
mais le modèle est clairement développé sur l’événement fondateur de
l’organisation : la collecte par un
tiers. Différents « produits » de
collecte P2P sont proposés, autour
de ce que nous appelons le « liferaising » : la collecte à l’occasion de
grands moments de la vie (anniversaire, mariage, diplôme, in memoria,
etc...). Bien entendu, le site a sa propre plateforme de collecte P2P en
ligne et, une fois inscrit, le fundraiser
a une page personnelle de collecte
qui, fait notable, comprend un onglet où sont présentés les projets
qui ont été financés grâce à la
collecte. Bien entendu, lorsqu’on
démarre sa collecte, les projets sont
« vides » mais une judicieuse incitation à démarrer la collecte permet
de motiver les troupes. L’ONG a également développé un ensemble
d’outils pour aider les donateurs à
collecter : une page dédiée sur le
site, où les meilleurs collecteurs
donnent leurs trucs et astuces2, mais
également un programme relationnel très sophistiqué qui permet
d’animer, relancer, motiver la
communauté de fundraisers. Bien
entendu, ceux d’entre vous qui maîtrisent la collecte P2P connaissent
déjà, mais la qualité des outils mis à
disposition laisse à penser que nous
avons encore une certaine marge de
progression. Quant à envisager que
90 % de votre collecte repose sur vos
fundraisers donateurs...
n Vidéo : la force des images
La botte secrète des « charities 2.0 »,
c’est l’utilisation massive de vidéos.
La vidéo pour présenter la cause, la
vidéo pour expliquer les missions, la
vidéo pour inciter à s’inscrire à la
newsletter, la vidéo pour remercier
les donateurs... Bref, il y a toujours et
systématiquement une vidéo, sur
chaque page. La raison en est simple, la vidéo augmente significativement le temps de navigation sur un
site et surtout, augmente drastiquement les taux de transformation en
don... En moyenne, 65 % des visiteurs d’une page qui contient une
vidéo vont regarder la vidéo, et 70 %
d’entre eux la regarderont jusqu’au
bout. Accolée à un module de don,
une vidéo peut augmenter de 50 %
le taux de passage à l’acte. Aujourd’hui, la démocratisation des
outils numériques, de la prise vidéo
aux solutions de montage, permet
de rendre accessible à tous la production de contenus vidéos qui
peuvent faire la différence ! Car,
comme vous le savez, c’est l’émotion qui fait agir, et donc donner ! Et
quel meilleur vecteur que la vidéo
pour véhiculer cette émotion ? Et
contrairement au bon vieux print, la
vidéo permet de ne pas communiquer exclusivement sur le problème
à résoudre, mais également d’illustrer le pouvoir du don... Quoi de plus
émouvant qu’une vidéo qui se
termine par un « merci » des enfants
que vous allez aider ?
n Une promesse qui dérange
Il y a tout de même quelques petits
détails qui peuvent nous interpeler,
nous fundraisers français. Notamment ce qui concerne l’éternelle
question des ratios de collecte. Chez
Charity: water, la promesse faite
au donateur est claire : 100 % du
don est envoyé sur le terrain. C’est
devenu un label, certifié par le cabinet d’audit de l’ONG dont le rapport
est bien mis en avant et accessible
en téléchargement. Bien entendu,
Charity: water a des frais de fonctionnement. Elle ne les fait pourtant
pas financer par les donateurs, mais
par des « business angels », en fait
des grands donateurs éclairés qui se
sont engagés à financer les frais de
« développement » sur plusieurs
années. Charity: water va même
jusqu’à se comparer à une startup,
mais pour laquelle les investisseurs
ne sont pas récompensés par des
stocks-options, mais par la satisfaction générée par l’efficacité de
l’ONG, mesurée par le nombre
de bénéficiaires... Alors que le marché américain subit une énième
polémique sur les ratios, que Dan
Pallotta se démène pour montrer
que les ONG ont le droit et même le
devoir d’investir, et parfois de se
tromper, y compris en collecte de
fonds, le message de Charity: water
nous semble bien ambigu. D’un
côté, elle encourage le fantasme des
donateurs sur l’efficacité ultime de
leur don qui est reversé à 100 % sur
le terrain, générant un engouement
tout à fait compréhensible, mais qui
met les autres organisations en
porte à faux... De l’autre, elle se compare à un business et joue la transparence... Un peu facile quand
on peut se le permettre et qu’on
dispose de grands donateurs qui
jouent le jeu, mais cela serait-t-il
facilement transposable pour toutes
les ONG ? Et en France ?
C’est peut-être cette audace (la
« bold idea » de Charity: water) qui
caractérise ces « charities 2.0 » : une
certaine volonté de ne pas faire
comme les autres, et surtout de faire
mieux, plus efficace. Une autre
vision du fundraising, où le fundraising « ne serait pas basé sur l’exploitation de stéréotypes », comme le
disent les étudiants à l’origine de la
campagne « Africa for Norway »3.
Une campagne qui dénonce gentiment, mais réellement, les traditionnelles campagnes d’appel à don
des ONG pour l’Afrique. Comme
nous devons apprendre à intégrer la
« génération Y » dans nos équipes,
ces nouvelles générations de « charities 2.0 » ont beaucoup de choses
à nous apprendre, et c’est certain,
elles représentent l’avenir !
n M. E. L.
1
Accédez au site
Charity: water
2
3
Découvrez la vidéo des meilleurs
collecteurs de Charity: water
Riez, ou riez jaune avec la
campagne Africa for Norway
Fundraizine
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En débat
© www.morguefile.com
Actualités
Santé, recherche : comment
travailler avec les industriels ?
Alors que les conflits d'intérêts liés à l'industrie pharmaceutique sont de plus en plus souvent dénoncés,
les fundraisers du secteur doivent eux aussi se montrer prudents pour défendre l'intérêt général.
I
ntérêts très lucratifs du secteur
marchand, intérêt général, intérêt
des populations : l’éternelle question
de la place à donner (ou pas) aux
industriels dans le financement de
nos missions prend un relief particulier dans le secteur de la santé. Qu’il
s’agisse de lutter contre les maladies
négligées, de favoriser la recherche
sur les maladies génétiques, le cancer, ou encore la maladie mentale,
difficile de faire sans les laboratoires
pharmaceutiques.
Et pour cause : avec 27 milliards d’euros investis en Europe en Recherche
et Développement, l’industrie phar-
maceutique laisse loin derrière elle
l’AFM Téléthon (120 millions) et la
Fondation pour la Recherche Médicale (50 millions). Bref, on a beau
refuser d'accepter le financement
des industriels, le fait même de travailler dans un domaine thérapeutique avec recherche de traitements
conduit les équipes scientifiques à
travailler de toutes façons avec des
labos... Paradoxe résumé par Jean
Louis Da Costa, de l’AFM Téléthon :
« Nous n’avons pas à ce jour de
démarche structurée en terme de
mécénat auprès des industriels, mais
en terme de recherche, nos labora-
toires sont en relation avec différentes
sociétés bien évidemment. »
Et si la question n’était donc pas tant
« faut-il ? » mais plutôt « comment ? »
travailler avec les industriels ? Votre
organisation a-t-elle une politique
claire et transparente sur le sujet ?
Regards croisés sur une question
complexe avec Johanna Couvreur,
responsable de la collecte privée
de la toute jeune fondation FondaMental, et Mélanie Cagniart pour
Médecins sans Frontières (MSF),
à l’initiative du DNDi (Drugs for
Neglected Diseases initiative) (voir
encadré).
DNDi (Drugs for Neglected Diseases initiative, dndi.org) : créée en 2003 à l’initiative de Médecins sans
Frontières et 6 autres membres fondateurs, la fondation financée à parts égales par des fonds publics et
privés développe des partenariats pour la recherche et la mise à disposition de traitements accessibles pour
les « maladies négligées » ou maladies de la pauvreté. A date 6 nouveaux traitements (ou combinaisons de
traitements existants) ont été mis à disposition des patients.
Fondations de Coopération Scientifique : créé par la loi du 18 avril 2006, ce nouveau statut permet entre
autres de bénéficier de la capacité juridique et fiscale d’une fondation Reconnue d’Utilité Publique.
Investissements d’avenir : lancé le 1er juin 2010, le programme d’investissement public de 35 milliards
d’euros sur 10 ans prévoit 22 milliards pour l’enseignement supérieur et la recherche.
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Fundraizine
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Actualités
En débat
déjà le cas avec des fondations
privées comme la fondation Bettencourt-Schueller ou le groupe Dassault (au passage ces bailleurs sont
autrement plus exigeants que les
industriel). Cette diversification est
indispensable si nous voulons à
terme couvrir nos frais de fonctionnement et poursuivre un développement équilibré de nos trois axes
de mission : la recherche, le soin et
l’information du public ».
Johanna Couvreur,
Fondation
Fondamental
La fondation FondaMental est
une fondation de coopération
scientifique dédiée aux maladies
mentales créée en juin 2007. Elle
intervient dans trois domaines :
la recherche fondamentale, les
soins et l’information du public.
« La fondation est très récente, et
travaille sur des sujets peu attractifs
pour le grand public. Notre modèle
économique repose donc essentiellement sur les dispositifs publics
comme les investissements d’avenir,
et les partenariats avec les entreprises et les fondations. Les laboratoires pharmaceutiques ont donc
été des partenaires évidents dans le
développement de nos ressources
privées.
Les partenariats de recherche sont
négociés directement avec les
équipes universitaires. Au niveau de
la fondation, nous gérons ce que les
industriels partenaires appellent
eux-mêmes des « subventions »,
sans ingérence de leur part dans la
conduite des projets. Qu’il s’agisse
de financer des bourses de
recherche (laboratoires Servier), ou
un réseau de centres experts sur
la dépression résistante (Astra
Zenecca), nos partenaires n’interviennent pas dans les projets qu’ils
financent.
Pour l’image, ceux qui nous reprochent de travailler avec le secteur du
médicament contestent en fait le
fondement même de l’approche
scientifique de la fondation (l’approche psychiatrique de la maladie
mentale et du patient, vs approche
psychanalytique).
Si nous voulons réussir à pérenniser
la fondation, l’ouverture à d’autres
partenaires est indispensable. C’est
« Pour garantir notre
liberté, nous refusons
le mécénat avec les
« Big Pharma » »
© Mélanie Cagniart
© Fondation Fondamental
« Nos partenaires
n'interviennent pas
dans les projets »
Mélanie Cagniart,
directrice de la
collecte de fonds
privés MSF France
Médecine d’urgence et lutte
contre les pandémies, on ne
présente plus l’action de terrain
des « French Doctors ».
Entre plaidoyer et promotion
de partenariats innovants,
l’organisation cherche également
à faire bouger les lignes dans
le monde impitoyable du
médicament.
« MSF est tout à fait convaincu de la
nécessité de développer les partenariats avec le secteur marchand et
c’est une priorité dans la stratégie
de diversification de nos ressources.
Néanmoins, nous excluons certains
secteurs et certaines entreprises des
partenaires potentiels, de manière
concertée au niveau international.
Pour garantir notre liberté de parole
et notre indépendance vis-à-vis des
grands laboratoires pharmaceutiques dont les intérêts diffèrent
parfois des nôtres et de ceux de nos
patients, nous refusons d’établir des
accords de mécénat avec les « Big
Pharma ».
Les maladies liées à la pauvreté
ne représentent pas un enjeu com-
mercial intéressant pour l’industrie
pharmaceutique. Le DNDi a été initié en 2003 sous l'impulsion de MSF.
C’est une organisation indépendante de recherche et développement à but non lucratif. Le DNDi
s’intéresse aux besoins des populations frappées par la maladie et
cherche le meilleur moyen de les
soigner, en mettant au point des
médicaments adaptés et disponibles à des prix abordables. DNDi
s’appuie pour cela sur des partenariats multiples privés et publics :
entreprises pharmaceutiques et de
biotechnologie, universités, institutions publiques de recherche, ONG,
ministères de la santé des pays
concernés, etc. Il s’agit de conduire
une approche de R&D, de pré-développement et développement clinique et avec en ligne de mire
le déploiement sur le terrain humanitaire. C’est ainsi que le DNDi a mis
au point de nouveaux traitements
dont bénéficient aujourd’hui des
millions de patients pour la maladie
du sommeil, les leishmanioses, la
maladie de Chagas, les maladies parasitaires, le SIDA pédiatrique et le
paludisme…
MSF soutient financièrement le
DNDi depuis sa création. Le DNDi
pour accomplir sa mission doit créer
des synergies avec les acteurs du
développement clinique, et les laboratoires pharmaceutiques en particulier. Il s’agit de partenariats de
travail, pour faire avancer l’accès aux
traitements pour les patients. C’est
très différent de la notion de mécénat financier et de la question de
l’indépendance de ton et d’action à
laquelle MSF reste très attaché ».
Aux fundraisers de s'assurer que leur
organisation a une politique claire
et transparente sur le sujet.
n C. H.
Fundraizine
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9
Actualités
Grande Actu
Coups de projecteur
sur la philanthropie
française
Déductions fiscales menacées, recul des intentions de dons, exil
fiscal des plus fortunés, encore une fin d’année morose pour la
générosité. Ne passons pas pour autant à côté de deux coups
de projecteur donnés récemment sur l’essor de la philanthropie
française.
© www.morguefile.com
L
e premier est paru à l’occasion
des Rencontres Internationales
des Philanthropes, le 25 septembre
dernier. L’Observatoire de la Fondation de France y a publié les résultats de l’enquête : « Philanthropie à
la française, engagement au service
du progrès social ». L’étude est riche
d’enseignements sur le potentiel
de générosité que représente cette
population, si discrète que l’on
pourrait la croire inexistante.
Au sein des fondations françaises,
les fondations personnelles ou
familiales capitalisent 2,7 milliards
d’euros et reversent chaque année
165 millions d’euros. Leur nombre
est en forte progression depuis les
années 2000. A ce jour, sur les 467
fonds et fondations de financement
créés par des personnes de leur
vivant, 40 % ont vu le jour depuis
l’an 2000. Cela témoigne d’une
véritable accélération du mouvement philanthrope. En outre, 67 %
des créateurs ont initié leur fondation alors qu’ils étaient encore actifs
professionnellement, dont 28 %
avant l’âge de 50 ans. La population
des philanthropes rajeunit donc
considérablement. Cette génération
dessine les contours d’une nouvelle
philanthropie tournée vers le plaisir
de s’ouvrir à d’autres mondes, de
s’engager, désireuse de soutenir des
causes « originales » et des modalités d’actions parfois avant-gardistes.
L'enquête qualitative menée par
10
Fundraizine
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l’Observatoire auprès de 18 philanthropes a identifié 4 profils se distinguant par leurs motivations et leurs
pratiques :
• Les héritiers de la philanthropie : ils
se caractérisent par un patrimoine
reçu en héritage et une ancienne
tradition familiale de philanthropie ;
• Les enfants de la République : ils
ont un parcours marqué par des
difficultés personnelles, et sont dès
lors reconnaissants de ce que le
service public a pu leur apporter.
Conscients de ses limites, ils sont
désireux de contribuer en retour ;
• Les entrepreneurs solidaires : ils
ont constitué eux-mêmes leur
patrimoine, par leur réussite
professionnelle, et leur action
philanthrope se caractérise par
l'application des méthodes et
réflexes qui leur ont apporté le
succès ;
• Les militants du terrain : ils se
caractérisent par une expérience,
une connaissance du secteur caritatif déjà « éprouvée ». Ce sont des
philanthropes particulièrement
jeunes.
Quelques semaines après la publication de cette étude paraissait L’espoir philanthropique, de Sandrine
L’herminier, aux éditions Lignes de
Repères. Selon l’auteur, l’essor de la
philanthropie témoigne aujourd’hui
d’une formidable quête de sens et
renforce notre besoin de mettre
l’humanité au cœur de chacune de
nos actions. Des propos qui mettent
à mal les idées reçues sur la quête
effrénée d’optimisation fiscale que
l’on prête souvent aux plus fortunés.
Cet ouvrage de réflexion est également un recueil de témoignages
avec des interviews inédites de
grands donateurs. Un décryptage
renouvelé des pratiques des grands
philanthropes, dont le dernier date
de 2009 – La nouvelle philanthropie,
de Virginie Seghers.
Jean-Baptiste Descroix Vernier, fondateur de Rentabiliweb, y raconte
ainsi pourquoi il a légué l’intégralité
de sa fortune de son vivant à sa
fondation privée : « Aujourd’hui, je
ne suis que l’usufruitier de mon
patrimoine », explique-t-il. Jacqueline Délia Bremond, épouse du fondateur de Pierre & Vacances, et
vice-présidente de la Fondation
familiale Ensemble, s’applique de
son côté à faire rimer générosité
avec rigueur « car le bénéficiaire le
mérite ».
L’ouvrage se conclut par une série
de propositions pour développer
davantage l’élan philanthropique
en France, aux côtés d’un Etat qui
doit rester principal contributeur :
limiter la fragmentation du secteur,
assurer un développement à l’international, améliorer gouvernance et
évaluation, faire évoluer certaines
dispositions telles que la réserve
héréditaire, etc.
n S. L. M.
Collecte à l'international :
© www.morguefile.com
Dossier
Collecte à l'international :
Entre rêve américain
et casse-tête chinois
La collecte à l’international, d’une redoutable complexité, peut, dans certains cas, rapporter gros aux
organisations qui visent un public de donateurs expatriés ou étrangers. La mondialisation de la
générosité est-elle l’avenir ?
C’
est, paraît-il, le grand départ.
En Suisse, Belgique ou en
Angleterre... Chaque année, 65 000
Français, parmi les plus riches, iraient
s'installer hors de nos frontières,
occasionnant pour le pays une
perte de recette fiscale évaluée à
près de 40 milliards d'euros annuels.
Réelle ou exagérée, cette « fuite des
capitaux » a le mérite de soulever un
débat de fond pour le fundraising :
alors que les échanges et les flux
d'hommes et de marchandises s'internationalisent, l'avenir du don estil, lui aussi, dans la mondialisation ?
n Vers des « multinationales »
de l'humanitaire ?
La réussite des mobilisations planétaires, de type Tsunami ou Haïti,
plaide en ce sens. Mais si la collecte
à l’étranger (soit pour toucher des
expatriés, soit pour internationaliser
sa cause) apparaît comme un appétissant relais de croissance, la question n'est pas tranchée. L’Europe
peine encore à définir un cadre fiscal commun du fait de la « territorialité du don », retardant la naissance
d’un « don européen ». Ailleurs,
les complexités juridiques ou culturelles font parfois ressembler le
fundraising international à un chemin de croix. « Cela fait des années
que j’alerte Bercy sur la nécessité de
mettre en place des conventions
fiscales entre pays qui prennent en
compte la fiscalité des dons, mais je ne
suis pas très entendu », déplore
Daniel Bruneau, directeur de la
recherche de fonds aux petits frères
des Pauvres.
Collecter à l'international nécessite
d'importants moyens : du temps, de
l’argent, mais aussi des professionnels aptes à faire vivre des structures
dans des pays où le fundraiser
« lambda » ne connaît en général ni
le droit, ni la langue, ni les us et coutumes locaux. Il faut ainsi savoir qu’à
Dubaï, où Planet Finance a implanté
l’un de ses bureaux, une loi oblige
les structures faisant appel à la
générosité à reverser une partie des
dons au Croissant Rouge. Et qu’en
Chine, bien partie pour devenir la
première puissance mondiale en
2016, « il n'est pas vraiment dans
la culture de donner », remarque
Nathalie Bousseau, directrice du
mécénat et des relations anciens
élèves à l’Ecole Centrale Paris (ECP).
Si 15 à 20 % de la collecte est réalisée entre les Etats-Unis, la Suisse
et la Grande-Bretagne, l’école d’ingénieurs, également implantée à
Pékin, peine ainsi, pour l’instant, à
développer le « marché » chinois.
Last but not least, le levier fiscal,
la plupart du temps absent de la
collecte transfrontalière (sauf aux
Etats-Unis et dans certains pays
européens, voir encadré), n’aide pas
à mobiliser les donateurs vivant à
l'étranger.
Même au sein du mouvement
Médecins sans frontières (MSF), qui
est pourtant parvenu à lever près de
Fundraizine
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Dossier
Collecte à l'international :
Une diversité
de structures...
Par quelle structure passer pour sa collecte à l'international ?
Plusieurs formes coexistent, parfois au sein d’une même institution.
Passage en revue non exhaustif.
Les structures déjà existantes : Le Transnational Giving Europe (TGE)
est un réseau de fondations et associations qui, par des accords de réciprocité entre pays, permet aux donateurs de 14 nationalités de bénéficier des réductions fiscales de leur pays de résidence. On peut passer par
la Fondation de France, membre du dispositif TGE, ou la Fondation du
Roi Baudoin en Belgique. « La mise en place de structures propres de collecte n’est intéressante que lorsque l’on atteint un certain montant », estime
Nathalie Bousseau.
La déconcentration : Cette configuration, où les décisions se prennent
au sein de la maison-mère basée en France, est incarnée par le modèle
des « friends of », comme il en existe aux Arts Décos, à l’ECP ou à Polytechnique (qui passe par une « charity » pour ses activités en GrandeBretagne). A l’Ihes, la structure des « friends of » est « un outil qui nous
donne de la visibilité et de stabilité », explique Johanna Jammes, et offre
surtout des réductions fiscales aux donateurs (particuliers, entreprises,
fondations) grâce à son statut de « 501C3 » de l’Internal Revenue Code,
applicable aux organisations « not-for-profit » américaines.
La décentralisation : Une formation en étoile, chaque branche conservant une relative autonomie. C’est le choix de Planet Finance, financée à
30 % sur fonds privés et majoritairement par des grandes entreprises,
qui a créé des structures autonomes (avec conseil d'administration) dans
plusieurs pays d'Europe (Italie, Allemagne, Luxembourg...), mais aussi au
Japon, aux Etats-Unis, et à Dubaï. Chaque structure est dirigée par un responsable qui organise la collecte dans le pays, voire la région (l'antenne
de Dubaï gère ainsi tout le Moyen-Orient), les fonds étant ensuite utilisés
pour les populations locales. Dans le cas de Planet Finance, ces bureaux
ont pour autre objectif de nouer des relations avec les agences de coopération locales et des entreprises. Toutefois, si théoriquement, chaque
structure indépendante doit couvrir ses propres coûts au bout de trois
ans d'existence, « on essaie de coordonner l'action de fundraising au niveau
du siège », indique Sarah Corne.
Chez les petits frères des Pauvres aussi, les huit associations implantées
à travers le monde (Etats-Unis, Canada, Pologne, Espagne...) mènent une
collecte endogène, afin de mener à bien leurs propres actions de terrain.
Néanmoins, on réfléchit à la création d’un dispositif transversal pour les
aider dans cette tâche et apporter un appui technique. En attendant, un
plan pour renforcer la capacité d’action de ces organisations est en
œuvre depuis 2007. « Chaque année, un séminaire de formation est organisé pour aider ces structures à sortir de la “petite épicerie” », indique en
outre Daniel Bruneau.
Le réseau : Atypique, l'organisation matricielle de Médecins sans frontières,
regroupe, autour des cinq centres opérationnels (Paris, Bruxelles, Amsterdam, Genève et Barcelone), une vingtaine de « sections partenaires ». Ces
« satellites » répartis dans plusieurs pays font du fundraising sur leur propre territoire afin de soutenir financièrement un ou plusieurs centres opérationnels. Le centre de Paris est ainsi soutenu par les sections américaine,
japonaise, australienne et des Emirats Arabes Unis, chaque section étant
autonome sur sa stratégie de collecte – la section américaine a ainsi été
précurseur quant à la mobilisation des grands donateurs.
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Fundraizine
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800 millions de fonds privés en 2011
dans l’ensemble des sections à l’international et a récemment ouvert
des sections au Brésil, en Afrique du
Sud, en Inde et en Corée du Sud,
« il y a un vrai débat autour de la multiplication des sections internationales, explique Mélanie Cagniart,
directrice de la collecte. Il peut être
tentant de les multiplier, mais les
coûts de structures sont importants, et
nous n'avons pas pour vocation
de devenir une multinationale de
l'humanitaire ».
n Patience, patience...
Alors, se lancer ou pas ? Quelle stratégie adopter ? D’abord, s'armer de
patience. Selon Corinne Servily, de
Faircom, et Sandrine Blanchard, de
Handicap International, qui intervenaient sur le sujet au 11e séminaire
de juin de l'AFF, à l'étranger, un
business plan s'entend sur cinq ans
minimum. Il faut en compter six
pour espérer faire du bénéfice via
une acquisition par courrier, et
trois à quatre pour une campagne
majeure...
La question du choix du pays où implanter une structure est déterminante. Malgré les complexités
administratives ou le manque de
structures, les Etats en forte croissance – Brésil, Afrique du Sud, Corée,
Chine – ne sont pas à négliger
quand on peut y investir dans une
perspective à moyen ou long terme.
Si lancer une campagne de collecte
peut pour de multiples raisons,
ne pas s'avérer immédiatement
« rentable », il est toutefois « très
intéressant d'avoir un pied ici ou là
pour créer un réseau avec les entreprises locales. En réalité, la collecte est
aussi une manière d’animer le réseau
à l’international », souligne Nathalie
Bousseau.
En Europe, la Belgique, la Suisse ou
le Luxembourg sont également souvent la cible des organisations qui, si
elles ne l'avouent pas franchement,
savent bien que les avantages
fiscaux attirent là-bas de grandes
fortunes françaises, et donc, de grands
donateurs ou futurs testateurs.
n L'Amérique, terre promise
Sans surprise, ce sont les pays anglosaxons, Etats-Unis en tête, qui ont le
Dossier
Entre rêve américain et casse-tête chinois
plus la cote. Normal : ils sont le berceau de la culture du don, et le nombre d’expatriés français y est très
important. En Grande-Bretagne,
Polytechnique a totalisé 13,5 % des
35 millions d'euros collectés lors
de sa dernière campagne (contre
10,5 % aux Etats-Unis). Quant au
pays de Barack Obama, qui arrive en
tête du World Giving Index et
concentre un tiers des personnes les
plus riches de la planète, c’est
un peu la terre promise des organisations françaises. La Fondation
américaine de l'Institut Pasteur, rappellent Corinne Servily et Sandrine
Blanchard, y a ainsi collecté plusieurs millions de dollars avec un
bureau composé d’une seule personne, et près de 10 millions en legs
en vingt ans... De quoi faire rêver !
Même si, là-bas aussi, « du fait de la
crise, la fiscalité se durcit », tempère
Sarah Corne, responsable du « non
profit » au sein de Planet Finance.
N’empêche, la familiarité de l'Amérique avec le fundraising est un
atout réel : « Comme ils vivent aux
Etats-Unis, les anciens de l’X sont très
au fait des méthodes du fundraising.
On n'a pas besoin de les convaincre
que ce qu'on fait est utile », explique
Laurent Mellier, le directeur de campagne de Polytechnique, qui détaille les méthodes assez classiques
de relations avec les « major donors »
(rencontres en one-to-one, soirées
de galas, événements). Revers de la
médaille : « La concurrence, en particulier avec Stanford ou Harvard, est
rude, poursuit Laurent Mellier, et les
exigences importantes. Les Américains ne supportent pas l'amateurisme, mais si on fait bien notre travail,
ils adhèrent ».
n La « french touch »
Bien que parfois un peu snobées
pour leur verdeur en matière de fundraising, les organisations françaises
peuvent globalement se féliciter de
leur image à l’étranger. Les « french
doctors » de Médecins sans frontières ont ainsi excellente presse aux
Etats-Unis. « Si notre notoriété y est
beaucoup moins importante qu’en
France, on y est reconnus pour avoir
fait bouger les lignes de la médecine
humanitaire, pour la qualité de nos
prestations, et notre fiabilité dans la
réponse aux urgences. Mais aussi pour
notre « style » : quand nous avons
appelé à l’arrêt des dons pour le
Tsunami car nous avions dépassé nos
besoins opérationnels, cela a été très
apprécié », assure Mélanie Cagniart.
Réputée pour sa médecine, son bon
goût, la France l’est aussi pour ses
mathématiques. Preuve avec l’Ihes
(Institut des hautes études scientifiques), ce centre de recherche en
maths, physique et théorique, dont
la moitié du budget est assurée par
des fonds étrangers. « La France est
le leader mondial incontesté en
maths. On n’a pas à travailler notre
image d’excellence », reconnaît
Johanna Jammes, directrice du
développement et de la communication. Il faut dire que, depuis sa
création en 1958, le centre a pour
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Dossier
Collecte à l'international :
vocation de faire échanger les plus
grosses têtes de par le monde en
accueillant 200 professeurs étrangers chaque année, dont 30 à 40 %
d’Américains. Résultat, l’institut vient
d’achever une campagne de levée
de fonds de 27 millions d’euros dont
la moitié provient des Etats-Unis.
Prestige, universalisme, sentiment
d’appartenance à une communauté,
les contreparties symboliques ne
manquent pas. Cédric Villani, le gagnant de la Medal Fields, s’est rendu
aux Etats-Unis pour faire connaître
l’Ihes. Mais nos « matheux » rayonnent également au Japon ou en
Chine, où l’Ihes, qui n’y a pas encore
de structure, a déjà reçu un don de
250 000 euros de l’entreprise Huawei.
n Les clefs du succès
L'essentiel est d'apparaître comme
le plus compétent sur la scène internationale. Ou d'« avoir une légitimité
locale », insiste Sarah Corne, de Planet Finance, qui collecte auprès des
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grands comptes, agences de coopération locales et entreprises, pour
mener des actions locales sur le
micro-crédit.
Reste à savoir qui on cible. Mis à
part MSF, qui se distingue par ses
opérations de marketing direct
(street-fundraising, prospection...)
particulièrement populaires au
Japon (une croissance à deux chiffres sur ce segment depuis cinq
ans), ou lors des opérations d'urgence, les grands donateurs, sont
privilégiés. La tâche est relativement
aisée pour les structures de renom
qui, on l’a vu, peuvent afficher une
« marque » bien française. Les
grandes écoles, grâce à leurs
réseaux d’anciens partis travailler
à l’étranger, sont a priori les plus
avantagées. Polytechnique peut
ainsi compter sur ses 300 anciens
travaillant dans la finance à Londres,
et ses 800 anciens aux Etats-Unis
(dont 300 à New York et 300 dans la
Silicon Valley).
© illustration.fr
A défaut d’un réseau déjà constitué,
dénicher un bon ambassadeur est
primordial afin de bien connaître
son public, et constituer, de fil en
aiguille (et pour pas cher), des bases
de données. Aux Arts décoratifs, la
collecte à l’international n’aurait
ainsi sans doute pu voir le jour sans
une ambassadrice de choc. Hélène
David-Weill, la présidente embléma-
Dossier
Entre rêve américain et casse-tête chinois
tique du musée vivant entre Paris,
Londres et New York, a fait bénéficier ses équipes de son impressionnant carnet d’adresses quand il a
fallu trouver 10 millions d’euros
pour rouvrir l'établissement après
dix ans de fermeture. Aujourd'hui,
l’établissement reçoit, chaque année,
entre 500 000 et un million de
dollars de la part d’amis américains
passionnés par le Moyen-Age, la
mode ou les bijoux, qui aiment à
retrouver leur nom sur les plaques
de remerciement dans le musée.
n Savoir bien s’entourer
En dix ans, le prestigieux comité international des Arts déco aura levé
11 millions d’euros auprès d’une
soixantaine de membres de nationalité américaine, canadienne, asiatique ou australienne… Eux-mêmes
ont pu mobiliser un réseau de personnalités, comme cette avocate
américaine qui réalise gracieusement les comptes pour les « Friends
of » du musée. « On fonctionne vraiment par réseau et réseau de réseau »,
explique Jennifer Hallot, responsable des Amis des Arts Décoratifs et
du Comité international. Problème :
le départ imminent de la présidente.
« C’est la grande inconnue, tout dépendra de notre nouveau président,
reconnaît Jennifer Hallot. Mais nous
avons confiance dans les liens créés
avec nos mécènes ». Même si beaucoup d’entre eux voient d’un oeil
méfiant le retour… d’un socialiste à
l’Elysée !
Dans tous les cas, savoir bien s'entourer est une force. Se faire accompagner par un cabinet d'avocats, par
un comptable sur place... Surtout,
« ne pas créer et gérer seul ce genre de
structure, car c'est autant de temps en
moins passé à la prospection »,
conseille Laurent Mellier. Pour son
premier « charity gala » (du doux
nom de « Beauty and Mathematics »)
organisé aux Etats-Unis, l’Ihes a ainsi
recruté un cabinet pour se faire guider sur les codes locaux. « La collecte
à l’international est dépendante
du relationnel, estime Johanna
Jammes, il faut trouver des gens qui
nous éclairent ». Le fundraiser a aussi,
parfois, des airs d'anthropologue !
« Etre en cohérence avec
l'image que la France renvoie »
Ancien directeur de l’AFF, Jon Duschinsky, d’origine britannique, vit aujourd'hui au Canada. Il a fondé Bethechange,
réseau international de spécialistes du fundraising, et
co-fondé Conversation Farm, une agence de pub sociale
qui travaille sur la première campagne mondiale sur la
maladie d’Alzheimer ou pour le Superbowl… L’auteur de
Philanthropy in a flat world (Wiley Press, 2009) vient de
publier, avec Tony Meyers, (Me)volution (First edition,
2012*), qui analyse le processus d’empowerment en chacun de nous.
Quel est le potentiel des organisations françaises sur le « marché » international
de la collecte ?
La France n’est pas connue et reconnue dans sa culture du « faire ». A l’étranger, on
considère que les Français sont très forts dans les activités intellectuelles, cérébrales,
qui ont trait à la conceptualisation. Les étrangers considèrent que la France est un pays
complexe (droit du travail, compétitivité, etc.), où il n'est pas toujours facile de mettre
en œuvre des projets, même ceux qui y ont été conçus. Par conséquent, les organisations
françaises ne peuvent pas (et ne devraient pas) jouer dans la même « cour » que les
Etats-Unis ou la Chine pour ce qui est de la mise en œuvre de projets qui, concrètement,
vont changer le monde. La France conceptualise le monde, mais c’est le reste du
monde qui le fait tourner !
Comment, alors, les organisations peuvent-elles attirer des fonds étrangers ?
Il faut savoir se positionner en fonction de l’image que l’étranger se fait de la France. Si
on veut démarrer une conversation (qui mènera, à terme, à une collecte) avec le reste
du monde, il faut savoir comment le monde nous perçoit pour être dans une certaine
cohérence. Première règle du fundraising : connaître son public. L’excellence en mathématiques portée par l’Ihes est en cohérence avec l'image que les étrangers ont de la
France. Le financement de bourses pour une université qui n'apparaît pas sur le radar
international, beaucoup moins... De même, si MSF réussit sa collecte à l’international,
c’est parce que l’image du « french doctor » est parlante… En France, il y a une dizaine
de structures dans cette configuration qui peuvent réellement peser à l’international.
Les autres doivent-elles rendre les armes ?
Non, elles doivent se positionner selon leurs forces et les attentes du marché international. La question n’est pas de poursuivre telle ou telle tactique mais de rechercher
ce qui est intéressant à dire au reste du monde. Il faut se demander : « Au fond, qu’estce que mon organisation incarne ? » Aujourd’hui, dans la mondialisation, les entreprises
sous-traitent leurs activités dans différents pays, en fonction des compétences locales.
Pour la collecte, c’est la même chose. La France doit accepter modestement que la
vision qu'elle a d'elle-même ne correspond pas nécessairement au regard que le
monde porte sur elle : contrairement à des pays comme l'Allemagne, le Brésil ou même
la Turquie, elle n'est plus dans la « ligue 1 » des pays les plus attractifs du monde. Néanmoins, si elle se positionne comme la conceptualisatrice du monde de demain, elle a
une chance de rivaliser. Pour être concurrentielle dans le monde international de la
collecte, elle devra mettre cet atout en valeur.
n Propos recueillis par P. G.
n P. G.
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Place aux débutants
© Gersende de Pontbriand
Côté pratique
Les dîners de charité
ont-ils un avenir ?
Les carnets de bal en ont été largement émaillés : la saison des dîners de charité à peine terminée,
force est de constater qu’ils sont de plus en plus nombreux. Ils prennent des formes nouvelles, et
s’invitent dans le quotidien des chefs d’entreprises, prenant un tour plus corporate.
Q
u’il s’agisse de grands galas
dont le compte-rendu sera
relaté dans la presse people, ou de
rencontres discrètes permettant de
se retrouver entre soi, tous les dîners
de charités un même objectif : créer
le rendez-vous annuel d’une association ou d’une fondation, une
occasion pour ses grands donateurs
de la soutenir tout en apprenant à
mieux la connaître.
Sarah Huisman-Coridian, fondatrice d’Equanity, a organisé de nombreux dîners de levée de fonds,
notamment pour Sciences-Po Paris
ou l’Université Ben Gourion du
Negev. Gersende de Pontbriand,
fondatrice de Mécène Invest a été
l’organisatrice du dîner annuel de
l’Opéra de Lyon, puis de celui de la
16
Fundraizine
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Fondation Culturespace. Elles font
part de leur expérience, de leurs
conseils et de quelques mises en
garde.
Contours. Multiforme, le dîner de
charité peut permettre de collecter
des fonds… Ou pas ! Comme l’explique Sarah Huisman-Coridian, on
retrouve deux types de manifestations : celle qui vise à une rentabilité
immédiate – on pense au fameux
dîner où l’on « vend » des tables, qui
réunit plusieurs centaines de personnes –, et celle qui permet d’entretenir et d’élargir son cercle de
donateurs, en plus petit comité, sans
appel à don direct (les tables n’y
sont généralement pas payantes).
Les objectifs finaux sont les mêmes,
mais la temporalité n’est pas la
même.
Les ingrédients du succès. Pour
Gersende de Pontbriand, un dîner
réussi repose sur 4 points incontournables : l’implication d’un conseil
d’administration décidé à se retrousser les manches (ou à défaut,
d’un comité de pilotage ad hoc),
l’originalité de l’événement, la présence d’un invité d’honneur « attractif », et la possibilité de s’appuyer
sur des prestataires « amis », auprès
desquels l’association obtiendra des
tarifs très intéressants. Gersende de
Pontbriand insiste : la rentabilité de
l’opération dépend presque autant
de la vente des tables que d’une
bonne négociation avec les presta-
Place aux débutants
taires, et idéalement, de l’obtention
d’un espace à titre gracieux. La
vente des tables, quant à elle, dépend beaucoup de ce que l’association propose aux invités : avez-vous
pu décrocher les clefs d’un lieu exceptionnel ? Votre invité
d’honneur est-il rare, drôle, influent,
connecté ? Soyez en adéquation
avec votre cible, essayez de proposer une offre qui vous démarque et
qui fasse sortir vos invités de leur
quotidien. La compétition est rude,
il est essentiel d’être créatif. En résumé, on ne crée pas du jour au lendemain un réseau capable de payer
le prix fort pour une table dans un
dîner de charité. Il vous faudra
compter sur des alliés.
n Pe. D.
Collecter pendant le dîner :
quelques idées
• La base : ne pas hésiter à mettre en
avant les missions de l’association,
et laisser la possibilité aux participants de faire un don ;
• Organiser une tombola, où chaque
ticket est gagnant ;
• Lancer une vente aux enchères ;
• Vendre vos produits dérivés signés
par des personnalités.
Qui peut se lancer ?
Pour Sarah Huisman-Coridian, il est
risqué de se lancer sans quelques
bases solides : une démarche de
collecte de fonds auprès de grands
donateurs, un réseau, une marque
installée, ou encore des partenariats
qui sortent de l’ordinaire. Pour une
association déjà ancrée, mais plutôt
auprès du grand public, la démarche
ne sera pas forcément aisée ajoutet-elle. Mieux vaux avoir déjà cultivé
un réseau qui corresponde bien à la
cible des galas de charité. Dans le
secteur de l’enseignement supérieur, Sarah Huisman-Coridian a observé que cette logique de réseau
était très forte : les participants viennent pour se retrouver, souvent plus
que pour soutenir l’organisation.
En cela, la mise en place d’un petit
groupe de personnes qui vont porter la démarche et sensibiliser leur
réseau est cruciale pour la réussite
d’un tel événement.
© illustration.fr
Côté pratique
Une méthode made in USA.
14 mai : dîner de 4 000 personnes pour la Fondation Robin Hood
(57 millions de dollars).
20 novembre: dîner du Committee to Protect
Journalistes : 8 000 personnes (1,57 millions de dollars)…
Comme le relate une correspondante du Point1, le modèle du gala
de charité américain repose sur une chaîne toute simple: vous
vous investissez pour une association, et à l’occasion de son gala,
vous recrutez une dizaine de vos amis qui vont acheter une place
au prix fort. Lorsque ces amis vous solliciteront à leur tour pour
le gala de soutien de l’association qu’ils défendent, le moins que
vous puissiez faire est d’accepter... Faites les comptes…
La fin du bling bling ?
Le dîner de charité n’est-il finalement pas déjà un peu has been ?
Si certains se posent la question, une chose est sûre, il a encore
de beaux jours devant lui (les résultats annoncés n’étant pas à la
baisse, au contraire !). Cependant, Sarah Huisman-Coridian
observe, à travers ses discussions avec les grands donateurs, que
certains d’entre eux sont extrêmement blasés, lassés de cette
forme qu’il jugent éculée. Autre bémol de taille : en temps de
crise, il n’est pas forcément de bon ton de donner des dîners
somptuaires. Il faut veiller à rester dans une tonalité acceptable.
Comme l’exprime le directeur de cabinet d’un grand chef
d’entreprise à propos d’un dîner récent : « J’étais scié par ce dîner,
mais finalement, il m’a plutôt éloigné de l’association : trop léché,
trop orchestré ». Prudence, donc…
Sarah Huisman-Coridian suggère de se rabattre sur des événements de taille plus modeste, et
organisés par une personne extérieure à l’association : de 30 à 80
personnes avec entrée non payante, qui permettront de remercier, de mobiliser, de célébrer un anniversaire. Ils concentrent bien
l’attention sur la cause il sera plus facile de communiquer sur un
dîner pour lequel ce n’est pas l’association qui engage les frais.
Ce qu’il faut retenir.
Le dîner de gala n’est pas nécessairement un outil de collecte
en soi. Il matérialise une démarche « grands donateurs » au long
cours. Attention au budget qui peut atteindre des sommets… La
rentabilité de l’opération repose essentiellement sur les partenariats que l’on aura réussi à nouer avec des prestataires, des
salles, etc… En période de crise, il faut être dans une tonalité plus
sobre, ou se rabattre sur d’autres modèles.
1
Cécile David-Weill, « Letters from New York ».
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Out of the box !
© Fotolia
Horizons
Petit précis de motivation
à usage des fundraisers
en surmenage
« Motivés, motivés, faut rester motivés ! » La motivation est un apanage essentiel pour l’hygiène mentale
du fundraiser qui se retrouve bien souvent tiraillé entre l’inertie de son environnement interne et la
dureté de son environnement externe.
E
n cette période dite « de crise »,
difficile de rester motivé quand
la pression interne monte et que
l’urgence de renflouer les caisses se
fait impérieuse. Le fundraiser se retrouve ainsi fortement sur la sellette
et devient, dans bien des cas, le
bouc émissaire idéal pour masquer
les incapacités de leadership de sa
gouvernance1. Voici quelques
conseil clefs, tirés d’un article du JDN
management2 paru il y a quelques
années, pour retrouver la motivation
quand on commence à perdre la
flamme.
1 - Dès le lever, pensez positif
Votre état d'esprit au réveil conditionne votre journée. Au petit-
18
Fundraizine
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déjeuner ou même encore au fond
de votre lit, passez en revue votre
emploi du temps au travail et repérez ce qui va vous motiver le plus :
un rendez-vous, certes difficile, mais
au final valorisant ? Un nouveau
dossier sur lequel vous avez beaucoup à apprendre ? Une tâche fastidieuse que vous allez enfin finir ?
Prenez chacun de ces éléments par
leur côté positif : concentrez-vous
sur les opportunités et mettez
provisoirement de côté les risques
associés.
Pour les jours où vous redoutez une
baisse de votre motivation, n'hésitez
pas à avancer le réveil d'une heure
ou 30 minutes. Profitez-en pour
pratiquer une activité stimulante
intellectuellement (lecture d'un essai
sur votre métier, de revues professionnelles...), physiquement (footing,
réveil musculaire) ou socialement
(écriture d'un post pour votre blog,
email à quelques contacts de votre
réseau).
2 - Revalorisez votre travail
à vos yeux
Après plusieurs années à faire du
fundraising, il est naturel de ressentir un certain ennui. Vous voudriez
bien voir de nouveaux horizons
mais, en ces temps de crise, ce serait
trop risqué. Et puis au fond, vous
l’aimez quand même bien votre
organisation. C'est le moment de
regarder votre situation profession-
Horizons
Out of the box !
nelle d'un autre œil, celui des
débuts, quand votre motivation
était à son maximum. Posez-vous la
question de ce qui a objectivement
changé, en bien ou en mal, et de
ce dont vous vous êtes tout simplement lassé. Le bilan n'est certainement pas si noir.
Regardez aussi autour de vous ceux
qui aiment, voire admirent ce que
vous faites. Tous ces collègues ou
proches qui trouvent formidables
et tellement valorisant votre engagement pour une cause. Mieux vaut
écouter ces voix positives que
ressasser...
3 - Injectez de la nouveauté
dans votre quotidien
Du neuf ! Pour maintenir la motivation, la nouveauté est un remède
efficace. Tout peut être source de
nouveauté au travail comme dans
votre vie personnelle. Changer vos
habitudes, vos trajets quotidiens,
vos musiques, vos types de films
préférés.
4 - Ne vous laissez plus enterrer
sous les to-do-lists
Vous n'en pouvez plus de ces listes
de tâches à faire qui s'amoncellent
sur votre bureau et dans votre tête ?
Et si vous commenciez par concevoir des to-do-lists qui ne démotivent
pas ? N'y inscrivez pas seulement ce
que vous auriez dû faire il y a cinq
jours et que vous passez votre
temps à repousser car c'est compliqué ou ennuyeux. Ce que vous faites
sans rechigner y a tout autant sa
place. Prévoyez donc deux colonnes
et répartissez sur la semaine (ou la
journée) ce qui vous plaît et ce qui
vous rebute. Faites-en sorte que
vous ne puissiez plus vous dire le
soir : « Je n'ai avancé sur rien ». Au
contraire, récompensez-vous lorsque
vous avez bien progressé dans une
tâche pénible et passez le reste de
la journée sur ce qui vous motive le
plus.
5 - Projetez-vous dans un futur
qui vous sourit
La motivation n'aime pas le vocabulaire de l'échec et du doute. Bannissez
des mots comme « souci », « risque »,
« peut-être », « je vais essayer ».
Au-delà du langage, appliquez la
méthode Coué et visualisez vos
succès. Voyez-vous en situation de
réussite ou anticipez la date de la
semaine où vous serez enfin venu à
bout d’une tâche qui vous bloque.
6 - Fêtez les petits succès
Offrez vous un bon repas, un jour de
repos, un cinéma ou toute autre
chose qui vous plait après avoir
bouclé un dossier délicat dans les
temps, ou mené à bien cette présentation qui vous a demandé tant de
préparation.
7 - Maniez aussi le bâton
de temps en temps
Si vous vous fixez des objectifs personnels que vous n’arrivez pas à
remplir, vous vous envoyez un signal
désagréable qui nuira à votre motivation pour les prochaines tâches.
Fixez-vous des délais et mettez-vous
au défi de les tenir. N'hésitez pas à
prévenir un collègue ou un proche
des objectifs que vous vous êtes
fixés. Si vous êtes tenté de remettre
votre travail à plus tard, demandezlui de jouer le rôle de rappel.
8 - Bougez-vous !
Se sentir bien est un facteur essentiel de la motivation. Pratiquer une
activité physique permet au corps
de fabriquer des endorphines, qui
procurent une sensation de bienêtre. Rien de tel qu'une marche
rapide le matin pour fixer ses objectifs pour la journée et un tour de
vélo le soir pour prendre du recul
face aux problèmes rencontrés.
9 - Faites un sort à ce qui
vous irrite au bureau
Et si finalement, ce qui vous démotivait le plus, c'était vos conditions
de travail ? Vous n'en pouvez plus de
l'open space, vous ne supportez
plus tel collègue - ou votre chef –,
vous en avez assez de travailler autant pour ce salaire de misère ?
L'un des grands théoriciens de la
motivation en entreprise, Frederick
Herzberg, a démontré que les facteurs d'insatisfaction jouaient un
rôle au même titre que les facteurs
de satisfaction. Autrement dit, pour
lutter contre la démotivation, il faut
commencer par résoudre les sources
de mécontentement. Or, celui-ci est
essentiellement lié à l'environnement de travail et non au travail
lui-même. Cernez ce qui vous irrite
le plus et voyez ce que vous pouvez
faire pour l'améliorer : demander à
ne plus traiter avec ce collègue, à
déplacer votre bureau dans un coin
tranquille... Sans demander l'impossible, faites preuve de créativité
pour embellir votre quotidien.
10 - Chaque jour,
notez ce qui est positif
Toutes vos bonnes intentions ne
tiendront dans la durée que si l'on
en voit rapidement les résultats.
Pour cela, ne comptez pas sur votre
mémoire : quand vous ferez le point,
pour peu que ce soit un moment de
fatigue, vous ne verrez que ce qui
n'avance pas, que ce qui vous
ennuie et pas le chemin que vous
avez parcouru.
Prenez donc l'habitude de noter
toutes vos petites réussites quotidiennes, tous les moments où vous
avez été content de ce qui vous
arrive. Un compliment de votre
manager, un moment de gloire en
réunion, un contrat obtenu grâce à
vous, un échange intéressant avec
un collègue... Même anecdotiques,
ces événements positifs du quotidien ont leur place dans la liste. Puis
relisez-la à chaque fois que vous
sentez votre motivation flancher.
11 - N'oubliez pas de faire
des pauses
Pour rester motivé sur ce que
vous faites, n'oubliez pas de vous
ménager des breaks. Le midi, le soir,
le week-end, les vacances... Le
cerveau – comme le corps – a
besoin de ces coupures pour rester
efficace et concentré. N'attendez
pas de percevoir les signes de la
démotivation, souvent annonciateurs de problèmes plus graves,
pour agir et gardez un rythme de
vie équilibré. Qui veut aller loin
ménage sa monture.
n Ph. D.
1
2
« Out of the box », Fundraizine n°32.
« Se motiver au quotidien », Séverine
Leboucher, JDN Management du
24/08/2009.
Fundraizine
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Côté recherches
© www.morguefile.com
Horizons
Ce que donnent les femmes
« Côté recherches » s’attaque à un sujet curieusement assez peu abordé dans la littérature : le don des
femmes.
L
es femmes donnent-elle différemment des hommes ? Vaste
sujet qui vient de donner lieu à
la publication d’un numéro de la
revue du Mauss entièrement consacré à ce thème « Que donnent
les femmes ? ». En 567 pages, un
grand nombre de chercheurs, sociologues pour la plupart mais aussi,
psychanalystes, psychologues, anthropologues, gestionnaires ou
économistes, explorent la question
de ce que donnent les femmes. Les
travaux publiés dans ce numéro
spécial sont très divers et explorent
le don au sens large : les femmes et
le « care », les femmes et la maternité, les différences entre hommes
et femmes ainsi que les travaux sur
le genre, le don des femmes et le
don des hommes dans une vision
anthropologique ou ethnologique,
le don des femmes sur le web, dans
20
Fundraizine
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les loisirs ou encore, « ce que donnent
les hommes qui font leurs courses ».
n Le « care » :
typiquement féminin ?
La question du « care » est au centre
de toutes les réflexions. Bon nombre
d’auteurs affirment que les femmes
sont plus généreuses que les
hommes puisque « donner la vie »
inclut un don de soi obligatoire qui
se poursuit ensuite par la nécessité
d’élever l’enfant et de l’entourer de
bienveillance. Certains auteurs
défendent donc l’idée que les
femmes sont naturellement plus généreuses que les hommes de par
leur différence biologique. Le rôle
traditionnel des hommes étant
davantage dans la défense contre
les agresseurs, la force physique et
la protection de sa famille du point
de vue sécuritaire.
Ces textes montrent notamment
que les femmes sont peut-être
prisonnières du « care » et de leur
rôle bienveillant dans le foyer : en
faisant passer pour naturel leur
enracinement dans la dimension du
« care », ne risque-t-on pas de les
enfermer ? Cependant, certains
auteurs, comme Elena Pulcini, soulignent : « Au nom de leur familiarité
séculaire avec cette dimension, les
femmes ont peut être un accès privilégié à l’attention à la sollicitude
envers l’autre pourvu qu’elles soient
capables de désaliéner le “care” et de
l’assumer librement à partir de la
reconnaissance de sa valeur universelle… Elles peuvent transformer leur
condition traditionnelle d’assujetties
au “care” (et au don) en agissant activement et volontairement en tant que
sujets de “care” (et de don) ».
Une vision psychanalytique du don
Horizons
Côté recherches
des femmes propose ici une vision
assez originale : la femme, contrairement à la pensée de Freud, ne vit
pas dans la frustration de ne pas détenir de phallus. Ce seraient plutôt
les hommes qui seraient frustrés de
ne pas pouvoir enfanter et ressentir
toutes les émotions liées à la maternité. Ils seraient ainsi envieux du fait
de réaliser le « don par excellence »,
celui de la vie. Certains auteurs de ce
numéro spécial défendent alors la
thèse que l’aliénation des femmes
provient sans nul doute de cette
frustration masculine à ne pas pouvoir avoir accès à ce niveau de don,
proprement féminin.
De fait, « le don de la vie » fait par les
femmes inclus trois temps de don
pour ces dernières : l’avant grossesse au travers du don de leur
beauté, du don de leur corps à
l’homme, le « pendant » où elles doivent accepter toutes les contraintes
liées à la transformation de ce corps
et à l’accueil d’un autre être en la
personne du fétus, puis, « l’après »
où elles se doivent de donner leur
lait, leur tendresse et les soins au
tout nouvel enfant. Ces trois temps
sont donc ponctués de trois formes
de don qui s’imposent aux femmes :
« Il y a là l’expérience d’une altérité,
d’un autre en soi, dont les hommes ne
feront jamais l’expérience ». Elles
doivent par ailleurs se résoudre
ultérieurement à donner l’enfant
au reste du monde lorsqu’il aura
grandit. Des facteurs culturels
expliquent également le don des
femmes qui sont souvent élevées et
valorisées dans le rôle de celles qui
doivent s’occuper de la famille, des
ainés et veiller au bien-être affectif
de la famille.
n Et le don aux associations ?
Curieusement, la question du don
des femmes aux associations de solidarité n’est pas abordée dans ce
numéro. Pourtant, plusieurs auteurs
ont déjà travaillé sur cette question
en marketing ou en communication. Camille Chédotal, qui a soutenu
sa thèse de doctorat en novembre
2011 sur la culpabilité et le don, a
publié une synthèse des recherches
sur le sujet dans le domaine du mar-
keting dont nous allons à présent
nous faire l’écho. « Les recherches
s’accordent sur le fait que l’on compte
plus de femmes parmi les donateurs,
écrit-elle, mais les résultats concernant les montants donnés diffèrent.
Dans la majorité des recherches, les
femmes seraient plus nombreuses
que les hommes à donner, elles soutiendraient plus d’associations différentes et donneraient plus souvent
que les hommes. Ces résultats sont
cohérents avec la vision du rôle de la
femme : dans les pays occidentaux, les
femmes représentent les “qualités
de soin, d’amour de l’autre, de dévouement et de don”. Leur “fonction
maternelle” fait des femmes des personnes généreuses et désintéressées.
Et comme le don augmente avec l’âge
et que les femmes vivent plus longtemps que les hommes, on comptera
plus de femmes seniors donc plus de
donatrices. Lorsque l’on s’intéresse
aux montants donnés, les résultats
diffèrent. Dans certains cas, les
hommes sont plus généreux. Mais
lorsque l’on regarde la part du
montant donné par rapport au
revenu, les dons des hommes et des
femmes sont équivalents ; les
hommes donnent des montants plus
importants car ils gagnent plus
d’argent. Lorsque l’on s’intéresse au
sexe et au statut marital, les femmes
seraient plus généreuses que les
hommes : les femmes célibataires
sont plus nombreuses que les
hommes célibataires à donner et
donnent des montants supérieurs ».
Enfin, les différences entre les
hommes et les femmes face au don
sont certainement à contextualiser
en fonction de la cause. Ainsi,
Bennett a montré en 2003 au travers
d’une expérimentation que les
profils de donateurs varient selon le
type de causes. Il a ainsi interrogé
250 personnes dans la rue en leur
donnant de l’argent et en leur
proposant de choisir l’association à
laquelle ils voulaient donner cet
argent : Mac Millan Cancer Relief
Organization (Cancer), Royal Society
for the Prevention of Cruelty to
Animals (défense des animaux) ou
Amnesty international (droits de
l’homme). Les résultats de cette
recherche montrent que les
hommes ont plus tendance à choisir
les droits de l’homme alors que les
femmes se tournent plus volontiers
vers la cause du cancer. Pour la
cause animale, le sexe n’est pas un
facteur explicatif.
«
Les femmes
célibataires sont
plus nombreuses
que les hommes
célibataires à donner
et donnent des
montants supérieurs.
»
La question du don spécifique des
femmes et de leur comportement
face au don aux associations et
fondations reste donc encore certainement à explorer. Il serait d’ailleurs
très intéressant de travailler par
exemple sur les différences émotionnelles selon les sexes. Il serait
également passionnant que tous les
adhérents de l’AFF se mettent
ensemble autour d’un observatoire
pour contribuer, au travers de l’analyse de leurs bases de données,
à une meilleure compréhension
de ce comportement puisqu’elles
contiennent toutes les indicateurs
de don et le sexe des donateurs.
n S. R.
Source
Bennett R. (2003), Factors Underlying The
Inclination to Donate to Particular Types
of Charity, International Journal of Nonprofit
and Voluntary Sector Marketing, vol. 8, n°1,
pp. 12-29.
Chédotal C. (2011), « Le rôle de la culpabilité
dans le comportement de don des
particuliers aux associations », Thèse de
doctorat soutenue le 29 novembre 2011,
Université Paris Dauphine.
Collectif (2012), « Que donnent les femmes ? »,
éditeur La découverte, Revue du MAUSS,
numéro 39, volume 1, 572 pages.
Fundraizine
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Horizons
Zoom pays
© www.morguefile.com
Collecte de fonds
privés au Brésil : le
chemin reste long !
Dans ce pays en pleine croissance, la générosité des particuliers
peine à se développer, faute d’un cadre sécurisant.
«C
ollecter des fonds auprès
du grand public demeure
difficile au Brésil car les gens n’ont pas
confiance », C’est Maria Fernanda,
jeune étudiante brésilienne à la
Sorbonne, qui parle. « Il y a eu trop de
corruption, déplore cette bénévole
de l’Association GRAAC qui finance
des soins pour des enfants atteints
du cancer. Il faut vraiment être original dans notre fundraising et être très
clair sur l’allocation des fonds et leur
utilité sur le terrain. C’est ce que nous
avons réussit à faire à GRAAC, et j’en
suis très fière ! »
Maria peut l’être. En 2011, GRAAC a
su mobiliser l’opinion publique en
utilisant les réseaux sociaux et la
renommée de plusieurs célébrités
comme les joueurs de foot Kaka et
Neymar, ou encore de Mike Tyson,
grâce à une campagne de collecte
originale : avant de collecter des
fonds, GRAAC a d’abord collecter…
des « fans » ! Orchestrée par Ogilvy
Brasil, la campagne « Donate your
Fame » permettait à dix enfants
atteints d’un cancer de devenir les
administrateurs, durant une journée, des profils Facebook ou Twitter
des célébrités partenaires. Tout au
long du 23 novembre 2011, ces
enfants ont twitté et informé,
auprès des fans, sur leur maladie,
leurs rêves et leurs besoins de fonds
pour bâtir un hôpital.
Résultat, 24 millions de fans collectés en une journée ! 40 % des Brésiliens utilisateurs d’Internet ont été
touchés par cette campagne, cent
mille dollars collectés en un mois, le
nombre de donateurs mensuels a
22
Fundraizine
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été multiplié par cinquante ! Un
succès qui ne fait que confirmer le
potentiel de générosité des Brésiliens mais qui ne doit pas cacher
la réalité du marché du don au
Brésil, toujours très limité en ce qui
concerne les dons privés.
n Un cadre juridique
peu incitatif
Malgré une croissance de plus de
7 % et l’émergence d’une classe
moyenne, le dernier rapport de
l’Institut pour le Développement
Social (Idis), le partenaires brésilien
de l’AFP (Association of Fundraising
Professionals), montre que si le
nombre de fondations et de dons
privés augmente sensiblement,
celui-ci demeure marginal au regard
du mécénat d’entreprise qui structure aujourd’hui le paysage de la
générosité au Brésil. Depuis vingt
ans, les dons individuels semblent
stagner autour de 465 millions
d’euros alors que la Responsabilité
Sociale des Entreprises (RSE) et le
mécénat ne cessent, eux, de s’envoler.
« Malheureusement, les dons des
entreprises sont concentrés dans les
métropoles, comme à Sao Paulo. Ils
servent aussi les intérêts marketing
des entreprises et restent centrés sur
l’éducation, la culture et l’environnement alors que le pays a d’autres
besoins, comme la santé ou les droits
humains », explique Paula Fabiani,
directrice de l’Idis. « Les grandes
banques comme UBS Pactual ou
Itausa observent une nouvelle
demande de la part des grandes
familles pour être conseillées en phi-
lanthropie, poursuit Paula Fabiani,
mais notre cadre juridique n’est pas
du tout incitatif ».
Une remarque corroborée par Fernando Rossetti, Directeur exécutif
du GIFE, le groupement des instituts, fondations et entreprises brésiliennes, qui compare le système
actuel de son pays à celui des EtatsUnis d’il y a un siècle ! Il faut dire que
les déductions fiscale liées aux dons
privés oscillent actuellement entre
5 % et 7 % quand elles atteignent
près de 50 % aux USA !
Pour autant, si les problèmes de
corruption et d’évasion fiscale sont
deux freins évidents à la mise en
place d’un cadre législatif favorable
à la générosité privée, ces phénomènes n’expliquent pas à eux seuls
les réticences des Brésiliens. Selon
l’Idis, le Brésil manque encore de
structures intermédiaires pour faciliter la philanthropie dans le pays,
notamment des formations à la
philanthropie et au fundraising, qui
aideraient les ONG à se professionnaliser pour mieux collecter des
fonds auprès du grand public et des
grands donateurs.
Pour aller dans ce sens, l’Idis a récemment nouer un partenariat avec le
Global Philanthropy Forum. Une initiative soutenue et regardée de près
par les ONG américaines. Le Brésil et
les pays d’Amérique Latine forment
un potentiel important de leur diversification de ressources, même si
toutes savent le temps et les preuves
nécessaires pour que la confiance
puisse un jour s’installer...
n C. Q.
Tribune libre
© Fotolia
Opinions
« Lever un tabou pour mieux
anticiper les risques »
Professeur titulaire à la chaire Philanthropie de l’ESSEC, Anne-Claire Pache s’interroge sur la manière
dont les financements philanthropiques changent les organisations qui en bénéficient.
«A
lors que les associations
mobilisent une part croissante de ressources philanthropiques
(venant de fonds et fondations privées, de mécénat d’entreprise ou de
grands donateurs…), elles ont
rarement une vision claire de la
manière dont ces financements les
influencent. Pourtant, la philanthropie est loin d’être neutre pour les
associations. Au-delà de l’impact
social généré par les actions ainsi
financées, ces ressources impactent
les associations en modifiant leur
organisation, leurs pratiques, leurs
priorités et leurs façons façon de
travailler.
Dans de nombreux cas, ces effets
sont extrêmement positifs. Au
contact des philanthropes ou de
gestionnaires de fonds philanthropiques, les associations peuvent développer leurs capacités à innover
et à mettre en place des partenariats. Elles peuvent également s’ouvrir à d’autres mondes ou d’autres
territoires, rejoindre des réseaux
plus larges et accroître leur transversalité. Globalement, les financements philanthropiques peuvent
permettre aux associations de se
renforcer, d’améliorer leur capacité
de gestion ainsi que leur capacité
d’action.
Cependant, dans certains cas,
les financements philanthropiques
peuvent également avoir des conséquences fâcheuses pour les associations. Celles-ci peuvent gaspiller des
ressources importantes en vue
d’attirer ces financements d’un type
nouveau. Elles risquent parfois de
perdre leur identité à essayer de
coller aux attentes de philanthropes, parfois bien éloignées de la
réalité de leurs besoins, et dévier
progressivement de leur mission initiale. Cet effet potentiellement néfaste de la philanthropie est pour
l’instant peu reconnu, voire un sujet
tabou.
Pourtant, afin de maximiser les
effets positifs des financements
philanthropiques, associations et
fondations ont intérêt à collaborer
afin de minimiser leurs potentiels
effets négatifs. Pour y parvenir, les
deux types d’acteurs doivent faire
l’effort de mieux comprendre leurs
enjeux et fonctionnements respectifs ainsi que ce qui anime leurs
actions. Pour ce faire, ils doivent
prendre le temps d’échanger en
toute transparence dans le cadre de
leur collaboration. Cependant, s’il
est facile de discuter ensemble des
effets bénéfiques d’un partenariat,
faire état de ses effets déstabilisateurs est d’autant plus délicat que
l’un des acteurs dépend de l’autre
pour sa survie.
C’est pour cette raison que la chaire
Philanthropie de l’ESSEC, en tant
qu’institution académique neutre,
souhaite développer la connaissance de ces effets, tant dans leur
dimension positive que négative.
Comment les financements philanthropiques changent-ils les associations ? Pour répondre à cette
question, la chaire lancera, en janvier
prochain et en partenariat avec
l’AFF, une étude auprès de 30 associations visant à comprendre les
effets des financements philanthropiques qu’elles reçoivent sur leurs
objectifs, leurs fonctionnements,
leur gouvernance et leurs actions.
Ces premiers éléments d’analyse
permettront d’éclairer d’un jour
nouveau notre compréhension de
la relation philanthropique, afin d’en
améliorer l’impact. »
n A. C. P.
Fundraizine
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23
Opinions
La donatrice mystère
La Donatrice Mystère
et les dons aux
hôpitaux...
« Notre système de santé est le meilleur du monde » ! L’analyse tient surtout de la méthode Coué. En
juillet dernier, la presse lançait un cri d’alarme signalant que deux tiers des hôpitaux publics français
se trouveraient bientôt en cessation de paiement et que la qualité des soins ne cessait de se dégrader.
Le sujet n’est pas neuf. En 2009, l’Etat créait la Fondation Hospitalière, une nouvelle coquille juridique
pour inciter au mécénat et à la philanthropie. Ce dispositif complétait les fondations reconnues d'utilité
publique (FRUP), mais aussi les fonds de dotation, les fondations de coopération scientifique, les
fondations partenariales, sans oublier les associations loi 1901 créées dans le giron de nombreux
hôpitaux pour attirer la générosité. Le « business-model » de la santé, longtemps porté par l’Etat
providence, est bouleversé : public, privé, et maintenant philanthropique, les « 3 P » tentent de créer un
nouvel équilibre économique. Mais qu’en pensent les citoyens-usagers-patients ? Comment répondentils aux sollicitations des hôpitaux ? La DONATRICE MYSTÈRE nous en révèle un petit aperçu...
En direct avec la
DONATRICE MYSTÈRE :
Jean, 38 ans, cadre, marié, 2 enfants,
neveu de la Donatrice Mystère :
« Tu as vu dans le journal, Mamie ?
L’agence Moody’s vient de baisser la
note des Centres Hospitaliers Régionaux Universitaires de Aaa à Baa1 » !
La donatrice mystère : « Encore une
histoire d’andouillettes ! Ce doit être
pour ça qu’ils mettent autant de
temps pour me rembourser de mes
derniers examens. Il n’y a plus
d’argent à l’hôpital. »
Rose, une amie de la Donatrice
Mystère : « Il suffit de voir l’état du
CHU de Caen pour comprendre. Mon
amie Simone y est restée un mois cet
été pour une opération des carotides.
Elle me disait que la peinture des murs
n’avait pas dû être refaite depuis
trente ans, que les infirmières, en sous
effectifs, couraient dans tous les sens
et n’avaient pas plus de deux minutes
à accorder à chaque malade, qu’elle a
passé une échographie dans les caves
de l’hôpital pendant qu’ils désamiantaient certaines salles... C’est effrayant ! »
Jean : « Oui, il y a de quoi s’inquiéter
pour l’avenir des soins à l’hôpital…
Pourtant, les cotisations santé ne
cessent d’augmenter sur mes fiches
de paie. »
24
Fundraizine
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La donatrice mystère : « Et oui, la
santé coûte de plus en plus cher, et
dans le même temps, on continue à
fermer des services dans les hôpitaux
de proximité et à dé-rembourser des
médicaments. Il faut faire des économies ! Regarde cette histoire terrible, le
mois dernier, de cette jeune femme
qui a accouché sur le bord de la route
en perdant son bébé, parce qu’il n’y
avait pas de maternité près de chez
elle ! Et pour avoir un RDV avec un
professeur, si on n’est pas à l’article
de la mort, il faut attendre des
semaines… Bientôt, lorsqu’on voudra
bien se faire soigner, il faudra aller à
l’Hôpital Américain de Neuilly, comme
les riches ! »
Jean : « On s’achemine tout doucement vers un schéma à l’américaine...
à trois vitesses... Si tu es riche, il y a une
médecine privée très chère, même
dans l’hôpital public ; si tu es pauvre,
tu vas aux centres de soins de Médecins du Monde ; entre les deux, tu
prends ton mal en patience avec un
hôpital public qui marche de moins
en moins bien ».
La donatrice mystère : « C’est pour
ça que j’ai commencé à faire des dons
à l’Hôpital Foch de Suresnes. Cela fait
quelques années que sa fondation
m’envoyait des mailings. Je me suis
décidée à les aider récemment. J’ai un
peu l’impression d’éloigner la maladie, en faisant cela. Je sais c’est idiot...
Et puis, sait-on jamais, si un jour j’ai
besoin d’eux, je serais peut-être mieux
traitée... »
Jean : « Ah bon ? L’Hôpital Foch te réclame des dons ? C’est quand même pas
les Restos du Cœur ou le Secours Catholique quand même... C’est nouveau ? »
La donatrice mystère : « Tu sais,
quand j'y pense, ça fait des années
que je donne déjà à l’Institut Curie ou
à Pasteur, c’est un peu pareil... »
Jean : « Oui, mais ce sont des fondations caritatives, et c’est pour la
recherche, comme l’ARC ou la Fondation pour la recherche Médicale…
Ce n’est pas la même chose qu’un
hôpital qui est censé assurer un
service public. »
Rose : « On revient un peu au XIXème
siècle… Quand les hospices et hôpitaux étaient financés pas des legs, des
mécènes, des dons… Quant à ton Hôpital Américain à Neuilly, je crois qu’ils
font appel à la générosité depuis toujours. Il suffit de voir le hall d’accueil
avec toutes les plaques de marbre à la
mémoire des grands donateurs... Il
soignent des célébrités, des gens qui
ont de l’argent, et puis c’est dans leur
culture, là-bas. »
Opinions
La donatrice mystère
Jean : « Tout ça ne paraît pas très normal... on va payer trois fois maintenant : en tant que contribuable, en
tant qu’usager et maintenant en tant
que donateur !? »
La donatrice mystère : « Mais
regarde Jean, quand Anne, ton
épouse, a accouché de Lisa, votre
petite dernière, à la maternité des
Diaconesses, tu m’as bien dit qu’au
final, tu avais fait un don de 500 euros
à la communauté religieuse qui administre la maternité… »
Jean : « C’est vrai… Mais le personnel
des Diaconesses, l’accueil, et l’accompagnement étaient si sympathiques...
Et quand on vient d’avoir un enfant,
on est un peu ga-gazouilleux. »
Rose : « Ce qui n’est pas clair, c’est à
quoi sert l’argent lorsqu’on donne à
un hôpital. C’est pour repeindre les
murs ? Payer le personnel ? Combler le
déficit ? C’est pour cela que je préfère
faire des dons à la Fondation des
Hôpitaux de Madame Chirac, ou aux
Blouses Roses. Ces organisations
aident directement les malades. »
La donatrice mystère : « Je me
souviens, il y a une dizaine d’année,
lorsque j’habitais en Seine et Marne,
j’avais répondu à une souscription de
l’Hôpital de Meaux. C'était pour acheter un scanner ou un IRM ou autre, je
ne me souviens plus bien… Mais au
moins, c’était précis et c’était pour
sauver des gens du département. »
Rose : « Ca me fait penser à une de
mes amies. Elle m’a dit avoir versé une
partie de son ISF à l’hôpital où elle a
été soignée pour son cancer du sein.
Elle affirme que son argent y sera plus
utile que pour combler les déficits de
la sécu ou de l’Etat. »
Jean : « Enfin, pour l’instant, on n’est
pas encore envahis par les courriers
de sollicitations ou les appels télépho-
niques, comme les pratiquent les
ONG. Ça reste tellement discret que
peu de gens sont au courant. D’ailleurs, peut-être font-ils davantage
appel au mécénat d’entreprise qu’à
celui des particuliers ? Parce que malgré la crise, ils peuvent aller taper à la
porte des labos pharmaceutiques…
Ils sont pleins aux as, ceux-là ! »
La donatrice mystère : « Rose,
sert toi une part de ma tarte aux
pommes... ça te gardera en bonne
santé ! Parce que le mieux avec l’hôpital, c’est encore de ne pas en avoir
besoin. »
Les « tests » et propos de la
DONATRICE MYSTÈRE ne
représentent aucune vérité
scientifique, mais le simple
constat d’un donateur
« lambda » en contact avec nos
associations et fondations.
Fundraizine
| 33 | JANVIER 2013
25
People
Portrait
L'anti-solitude
de la coureuse de fonds
© Fondation Telecom
Véronique Sentilhes, Directrice du développement de la Fondation Telecom (Institut Mines Telecom),
dévoile son tempérament de coureuse de fond derrière son métier de coureuse de fonds... ou plutôt
de relayeuse, de passeuse de témoin. De tisseuse de lien.
Q
u'est ce qui fait courir Véronique
Sentilhes ? La réponse, indirecte,
vient plusieurs fois au détour de la
conversation : "l'envie de m'engager
pour un monde un peu plus équilibré".
Peu importe la cause tant que la main
se tend pour en saisir une autre. Fil
d'Ariane, bâton de marche, balancier...
Elle qui trouve son équilibre dans la
course, manifeste pour la première fois
au Lycée ce besoin de s'engager pour
aider autrui à marcher sans tomber.
Premier pied dans l'humanitaire, un
peu par hasard. Le frère d'une amie
monte avec un groupe d'étudiants en
médecine un projet pour Action
Contre la Faim. Elle les rejoint. Sa verve
les convainc, ils lui proposent de lever
des fonds...
Après le bac, elle choisit pharmacie. La
greffe ne prend pas. "Ca m'a un peu
écœurée des études !". En guise de
réorientation, elle se lance dans la vie
active, option marketing et communication. Une fois convaincue de la voie,
elle révise son jugement sur les études
et enchaine un BTS puis Sup de Pub.
Nouvelle incursion dans l'associatif.
Pour son projet de fin d'études, elle organise – avec un comparse coureur,
pédiatre-cancérologue de son état –
une course de collecte de fonds au
profit de l'Institut Curie.
Ce projet lui donne envie de poursuivre dans l'événementiel. Elle postule
en ce sens. Philip Morris la rappelle, séduit par son profil de globe-trotteuse.
Car quand elle ne se défoule pas
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Fundraizine
| 33 | JANVIER 2013
autour d'un stade ou d'un pâté de
maison, c'est autour du monde qu'elle
court. "Toutes mes économies d'étudiante passaient dans des billets
d'avion..." Mais point d'événementiel
au bout du premier rendez-vous. La
multinationale lui propose un poste
de chargée d'études marketing en
création. Elle est un peu dubitative, sur
la fonction, l'entreprise, le secteur d'activité... Elle finit par accepter pour voir
de l'intérieur à quoi ressemble
l'éthique d'un fabricant de tabac... et
de chocolat (elle est accro au cacao).
Elle y restera dix ans, justement pour
"l'éthique remarquable" et surtout
parce qu'on lui fait confiance.
Elle adhère bien à cette "logique américaine", Véronique Sentilhes. Etre formée, encouragée. Créer son équipe et
voir son "potentiel", reconnu, monter
en responsabilité, quand "la France est
un pays où 'casser' les gens est devenu
un sport national". Pas étonnant alors
qu'elle suive avec enthousiasme son
mari transféré à New-York en 1998.
Ambition immersion. Découverte du
"roi dollar", de la pauvreté du système
scolaire public... Revers de la logique
américaine, qui la fait finalement se
sentir "profondément française". Découverte aussi de l'indépendance professionnelle : elle crée sa structure de
conseil en marketing. Au passage, elle
s'offre un marathon. "Pas pour viser une
perf', juste pour aller jusqu'au bout..."
11 septembre 2001. Début d'un déclic.
Elle s'investit dans l'association FrenchAmerican Aid for Children. Ses filles veulent accrocher un drapeau US à la
fenêtre et ne jurent plus que par le God
Bless America. "Là, je mets en place un
plan anti-pensée unique à la maison et
je me dis qu'il est temps de rentrer...".
Back to Paris donc, avec - coté carrière
– la certitude de vouloir mettre ses
compétences au service du non profit.
Assez logiquement, elle se tourne vers
les partenariats entreprise et rencontre
l'association Solidarités. Elle y passera
cinq ans, d'abord aux partenariats puis
comme Directrice Communication /
Collecte. "J'ai adoré. C'est probablement
là où j'ai été la plus épanouie professionnellement, notamment à cause de la très
forte proximité avec les bénéficiaires.
C'est chez Solidarités que j'ai pris
conscience que le lien humain comptait
autant, peut-être plus, que l'aide matérielle. C'est une chose essentielle à apporter à une population en détresse. Lui dire
qu'elle n'est pas oubliée...".
Elle adore mais se fatigue. "L'aide
humanitaire d'urgence c'est aussi commencer et finir ses journées avec des
morts. C'est compenser en énergie, en
temps, ce qui manque en moyens financiers". La coureuse de fond a de la ressource mais sa famille traverse une
période difficile. Impossible d'être sur
tous les fronts, de gérer toutes les
crises. Elle entend alors parler du Groupement des Ecoles Telecom, en quête
d'un directeur de campagne. Une de
ses amies – chercheuse, avec laquelle
elle court, évidemment – lui vante la
qualité de l'établissement. Elle les rencontre et signe, pour une ambition de
collecte de 25 millions d'euros.
Mais comme pour le marathon, cela ne
semble pas tant être la performance
qui mobilise Véronique Sentilhes, que
l’efficacité et la série d'attaches tissées
au fil de la route. "La base de notre
métier c'est d'instaurer un climat de
confiance pour faire naître des liens
entre personnes. C'est cela "créer de la
valeur". Que la rencontre génère quelque
chose de plus..." . Plus que la vitesse, ce
qui fait gagner la course ce sont des
passages de témoin réussis. Entre
chercheurs et entreprises. Entre étudiants et grand public. Entre anciens et
nouveaux diplômés. Et plus encore.
Une anti-course en solitaire.
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