Chapitre 3
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Chapitre 3
Structure de la matière Ramdane Benazouz /2009 Chapitre 3 :Stabilité des noyaux Chapitre 3 : ETUDE DU NOYAU Ernest Rutherford Sir James Chadwick Albert Einstein Sir James Chadwick Ernest Rutherford Rutherford, Rutherford Ernest, lord (1871-1937), physicien britannique, Prix Nobel de chimie en 1908 pour ses travaux de structure de l’atome et de la physique nucléaire. Chadwick, sir James (1891-1974), physicien Chadwick britannique, prix Nobel de physique en 1935 pour sa découverte du neutron. Aston, Francis William (1877-1945), physicien Aston britannique. Prix Nobel de chimie en 1922 pour ses travaux sur les isotopes Francis William Aston Aston 31 Structure de la matière Ramdane Benazouz /2009 Chapitre 3 :Stabilité des noyaux 1 – MISE EN EVIDENCE DU NOYAU ET SES NUCLEONS 1.1 Le noyau C’est Rutherford pour la première fois en 1910 qui, à l’aide d’une expérience, arriva à mettre en évidence le phénomène de la discontinuité de la matière. Il plaça une feuille d’or sous un faisceau de rayons α (la particule α est assimilée au noyau d’Hélium, He2+. Il remarque que la quasi-totalité des particules α ont franchi la feuille. Quelques rayons seulement, ont été déviés ou rétro émis (faisant un angle de 180°) Radium or Empreinte de 9999 particules α α 1/10000 de particules α est déviée ou retro-émise noyau d θ d distance d’approche θ angle de déviation Figure 19 : Discontinuité de la matière Le phénomène de perméabilité de la feuille métallique explique que la matière a une structure lacunaire. Cependant la déviation des particules α laisse suggérer que celles-ci se sont trouvées sur l’axe des masses pleines ou à leur proximité. La rétro émission et la déviation sont sujet d’une répulsion électrostatique. On comprend par là que ces masses sont également chargées positivement. La force qui s’applique entre les deux particules est de type de coulomb ayant pour module, F =K q1q2 d2 32 Structure de la matière Ramdane Benazouz /2009 Chapitre 3 :Stabilité des noyaux Où q1, q2 sont les charges de la particule α et celle du centre positif (noyau) et d est la distance d’approche, qui sépare les deux charges. Ces constatations ont permis à Rutherford de conclure que la matière est formée d’un grand nombre d’atomes électriquement neutres. Des espaces pleins sont considérés comme centres. Ils sont de petite dimension, chargés positivement, dits noyaux, très éloignés les uns des autres. Le rapport des diamètres de l’atome et du noyau est de l’ordre de 105. Si on assimile le noyau à la taille d’une balle de « ping pong » de 3 cm de diamètre, l’atome atteint 3000 m de diamètre. Les espaces intermédiaires aussi grands que possibles sont vides et occupés par les électrons. • Mise en évidence du proton (1918) En bombardant l’azote par les particules α Rutherford remarqua l’émission d’une particule. Après identification, la particule est de charge positive, nommée proton. N2 + α O2 + 2p Cette réaction montre que le proton est un constituant de l’atome d’azote. Les études de caractérisation montrent que le proton est une particule de charge élémentaire +e et de masse mp : +e = +1,602.10-19 coulomb mp = 1,67265 ×10-27 kg. = 1,0073 u.m.a La masse du proton est environ 1835 fois plus que celle de l’électron. Le nombre de protons est indiqué par Z (dit également nombre de charges). • Le neutron (1932) Le neutron comme son nom l’indique est neutre (pas de charge). Cependant il a une masse. La particule découverte par Chadwick est attribuée au noyau. La réaction nucléaire qui a permis sa mise en évidence est effectuée sur le bérilium par l’action de particule α de grande énergie cinétique conduisant à la formation du noyau du carbone-12. 9 4Be +α 12 6C + 1 0n mn = 1,67495 ×10-27 kg = 1,0087 uma Le neutron est environ 1839 fois plus lourd que l’électron. L’atome contient en tout A nucléons et A-Z neutrons. Volume du noyau : 33 Structure de la matière Ramdane Benazouz /2009 Chapitre 3 :Stabilité des noyaux 4 3 Le noyau est de forme sphérique de volume V = πR 3 . Le rayon est déterminé selon la 1 relation de fermi, R = R 0 A 3 où R est le rayon du noyau ayant pour unité le fermi ,fm ; R0 = 1,2 fm. A est le nombre de masse. 1fm = 10-15 m. La masse volumique du noyau, r = A/V ρ= A , 4 1/ 3 3 π ( R0 A ) 3 ρ= 3 4π ( R0 )3 2- LES ISOTOPES STABLES 2.1 Séparation des isotopes En 1913, Thomson obtint des taches de déviation correspondantes aux paraboles données en présence des champs magnétique et électrique appliqués dans un spectromètre de masse. Ces empreintes laissées sur une plaque photographique se rapportent aux atomes de néon. Thomson conclu qu’il s’agit de deux atomes différents du néon, le 20Ne et le 22Ne (voir annexe 2). A l’aide d’un spectromètre de masse et d’un détecteur, on enregistre le courant ionique I des différents nucléides qui est proportionnel à leur abondance relative. La séparation peut se faire soit, sur spectrogramme soit, sur une plaque photographique. 24 Mg2+ 24 26 25 Mg+ Mg2+ Mg2+ 26 25 Mg+ Mg+ a) b) Fig. 21 Spectrogramme de masse de Mg : a- Enregistré b- photographié On connaît différents types de spectromètres à savoir le spectromètre de Dempster, le spectromètre de Baimbridge (figure 18). D’autres méthodes sont également utilisées pour séparer et obtenir des isotopes à l’état pur ou enrichi. On peut citer la centrifugation, l’électrolyse, la diffusion thermique et la diffusion gazeuse. 34 Structure de la matière Ramdane Benazouz /2009 Chapitre 3 :Stabilité des noyaux 2.1 Répartition isotopique On parle d’isotopes quand un ensemble d’atome appartient au même élément chimique. Ils se manifestent par le même nombre de protons et ne diffèrent que par le nombre de neutrons. Depuis que le spectromètre de masse est mis au point plusieurs isotopes ont été découverts. La présence isotopique ainsi que leur abondance relative a trouvé plus que jamais des travaux de confirmation une fois qu’ Aston a perfectionné le spectromètre de masse en 1919. Plusieurs corps simples ou éléments ont été découverts dans la nature, en tant que mélange d’isotopes. On y trouve des isotopes stables et des isotopes radioactifs. On connaît près de 2000 noyaux d’atomes. Seulement, 279 sont stables. L’abondance relative est constante dans la nature pour chaque isotope notée par xi. Elle représente la fraction isotopique dans l’élément naturel. L’oxygène, dans la nature, se trouve sous forme de 16O avec 96,76%,17O avec 0,04% et 18O avec 0,2% de présence. D’autres éléments ne connaissent pas encore d’isotopes, l’aluminium et le bérilium à titre d’exemple. Tandisque d’autres peuvent avoir un nombre important (cas de l’iode). 123 53 I 124 , 53 I 125 , 53 I 129 , 53 I 131 , 53 I 132 , 53 I 135 , 53 I Figure 20 : structure atomique des isotopes de carbone 2.2 Masse molaire moyenne d’un élément Les réactions chimiques ne font pas de différence entre isotopes. Le recours à la valeurs moyenne de leurs masses molaires, dite masse molaire de l’élément est utile pour le calcul du bilan matière. Le magnésium se trouve à l’état naturel sous forme de 24Mg, 25Mg, 26Mg avec des pourcentages de 78,60 ; 10,11 et 11,29 respectivement. La masse molaire est calculée sur la base de la fraction isotopique dans la nature (xi ) ou de leur abondance Xi. M = Mi x i (xi =Xi/100) 35 Structure de la matière Ramdane Benazouz /2009 Chapitre 3 :Stabilité des noyaux Mg = [23,985 78,6 + 24,98540 10,11 + 25,982591 11,29 ] / 100 = 24,31166 Mg = 24,31166 la masse moyenne de Mg 3- ENERGIE DE LIAISON ET STABILITE DES NOYAUX 3.1 L’énergie de cohésion Elle est appelée encore énergie de liaison des nucléons se manifeste au moment où on désire déstabiliser le noyau. Il faut au moins une quantité d’énergie équivalente à celle qui s’oppose aux forces fortes qui assurent la cohésion du noyau. Lors de la formation des noyaux à partir des noyaux plus légers ou à partir des nucléons une partie de la masse est transformée en énergie. Einstein propose la relation qui donne l’équivalence masse-energie. Dans le cas de la formation du noyau le processus s’effectue avec une perte de masse symbolisée par ∆m. L’énergie qui en correspond est E= ∆mc2 La reconstruire du noyau d’hélium à partir de ses nucléons d’après le schéma donné par la figure 22, présente une différence de masse entre la masse calculée à partir des particules élémentaires et la masse du noyau proprement dite. P p 2p n n + + 2n 2p 2n 4 2He Figure 22 : Constitution du noyau à partir des nucléons m(2p+2n) = 2.1,0076 +2.1,0086 = 4,0322 u m(He) = 4,00150 u ∆m = m(He) - m(2p+2n) = 4,00150 – 4,0322 = - 0,0307 u Le signe (-) indique que la formation du noyau de He s’effectue avec perte de masse. Cette différence de masse, dite défaut de masse, est équivalente à l’énergie nucléaire exprimée par la relation d’Einstein. Souvent, elle est considérée comme l’énergie de liaison des nucléons ou l’énergie de cohésion du noyau, égales en valeur absolue. E = ∆mc2 E = Ι∆mΙ c2 E = 0,00307. 1,66.10-27.(3.108)2 E = 4,58.10-12 joule En calorie, cette énergie s’évalue à 36 Structure de la matière Ramdane Benazouz /2009 Chapitre 3 :Stabilité des noyaux 1cal. 4,18 J X 4,58.10-12 J E = 1,097.10-12 cal. Quand à la formation d’une mole d’hélium, l’énergie succeptible de se dégager serait E’ = N.E E’ = 6,60.1011 cal = 6,60.108 Kcal En MeV, 1 MeV 1,6.10-13 J x 4,58.10-12 J E’ = 28,62 MeV Comparée à l’énergie libérée par une réaction de combustion du charbon par exemple, la quantité de combustible qui substituerait la formation de 4 g de He par fusion serait : 94 Kcal 1 mole de charbon 8 6,60.10 Kcal x x = 7021276,59 moles m = 7021276,59 moles x 12g.mol-1 m = 84255319 g m = 84,25 tonnes L’énergie recueillie par la formation de 4g de charbon remplacerait la combustion de 84 tonnes de charbon. L’intérêt énergique donné par le noyau qui a passionné un moment donné l’humanité. L’exploitation de l’atome à des fins pacifique et militaire est devenu une priorité des civilisations et une course aux différentes technologies au cours du 20é siècle. En est-il le bon choix ? Les problèmes posés par les centrales nucléaires en matière de contamination et de pollution et l’effet de la destruction massive provoquée par l’armement nucléaire ont laissé l’élite scientifique revoir ce point de vue. L’énergie a pour unité le erg, le joule et la calorie, l’électron-volt et le méga-électron-volt. 1 joule 107 erg 1 cal 4,18 joule 1eV 1,6.10-19 joule 1 MeV 106 eV L’équivalent énergétique à une masse aussi petite qu’une unité de masse atomique (« uma » ou « u » en abrégé) 1 u = 1/ N = 1,66.10-24 g Si on assimile le défaut de masse à une masse équivalente à celle de l’u, l’énergie équivalente calculée selon la relation d’Einstein est ; 37 Structure de la matière Ramdane Benazouz /2009 Chapitre 3 :Stabilité des noyaux E = 1,66.10-27. (3.108)2 = 14,94.10-11 joule 1 MeV 1,6.10-13 joule x 14,94.10-11 joule 1u 933 MeV 3.2 Stabilité des noyaux Si la formation d’une mole d’He s’effectue avec production d’énergie équivalente à 28,62 MeV, sa dissociation se fait donc avec consommation d’énergie. Cette dernière est dite énergie de liaison des nucléons ou énergie de cohésion du noyau. Cette énergie est le résultat de l’intervention de certains facteurs. La conséquence est évidente cependant les causes sont diverses et non unanimes. L’explication est loin d’être unique et claire. Les chercheurs présentent chacun à son tour une théorie qu’elle lui semble convaincante. • Selon l’échange de pions : Yukawa en 1935 proposa que la cohésion du noyau est une affaire d’échange de pions ou mésons. Ces particules agissent et assurent la liaison à de très courtes distances (< à 10-15 m). Le neutron libère un pion neutre ou un pion négatif. Quand au proton il cède un pion positif selon les schémas suivants : 0 n n+π n p + π- p n + π+ Ē MeV 8,8 Fe Courbe d’Aston fission fusion • Selon l’énergie de liaison moyenne : Aston trouva une relation entre la stabilité et l’énergie de liaison moyenne Ē. Plus Ē est élevée plus le noyau s’avère stable. La raison pour laquelle la majorité des noyaux stables sont de taille moyenne 56 A (poids atomique moyen). La figure 23 présente une courbe dont la stabilité Figure23 : Courbe de stabilité des noyaux maximale tourne autour du noyau du fer avec 8,8 MeV/nucléon. La raison pour laquelle les éléments de masse atomique moyenne sont largement répartis dans la nature tel que l’oxygène, l’azote, le calcium, le magnésium, le néon le silicium (16O ,21Ne,28Si, 56 Fe …). Ce qui explique d’ailleurs la forte proportion de ces éléments dans la nature. • Stabilité en fonction du nombre de protons et du neutron : l’étude a montré que les noyaux dont les nombres de nucléons rapprochés sont les plus stables. Pour un rapport 38 Structure de la matière Ramdane Benazouz /2009 Chapitre 3 :Stabilité des noyaux N/Z égal à 1 les noyaux sont stables et pour un rapport compris entre 1 et 1,5 les noyaux sont peu stables et enfin les noyaux dont le rapport dépasse 1,5 se trouvent instables. Une formulation analogue tient compte uniquement du nombre de charge, Z. Pour une valeur de Z comprise entre 1 et 20 les noyaux sont stables. Peu stables sont ceux dont Z est compris entre 20 et 83 et instables quand le nombre de charge est supérieur ou égal à 83. Dans ce cas ces éléments sont radioactifs suite à l’excès des neutrons qui les rend très instables. • Il est montré par ailleurs que la stabilité du noyau est liée à la parité de Z et N. Une étude statistique a donné 166 nucléides stables avec N et Z tous les deux pairs. 57 nucléides ont été trouvés stables ayant Z pair et N impair et 53 nucléides stables avec Z impair et N pair. Seulement 4 nucléides sont stables avec N et Z impairs. • En fin une dernière étude n’ayant aucune logique, lie la stabilité aux nombres 8, 20, 50, 82 et 126 dits nombres magiques. Le nucléide est stable si au moins un des nucléons coïncide avec un de ces nombres (tableau 2). N Figure 24 : courbe de stabilité N = f(Z) N=Z 20 20 Elément Isotope majoritaire Z N 8O 17 O 8 8 K 39 K 19 20 40Zr 90 Zr 40 50 Pb 82 126 19 82Pb 208 Z Tableau 2: nombres magiques EXERCICES CORRIGES 39 Structure de la matière Ramdane Benazouz /2009 Chapitre 3 :Stabilité des noyaux 3-1. 1) Indiquer le nombre de protons, de neutrons et d'électrons qui participent à la composition des structures suivantes : 818O, 818O2-, 1735Cl-, 2656Fe2+, 2040Ca, 2040Ca2+, 32 259 55 16 S , 28 Ni, 26 Fe. 2) Désigner celles qui présentent des isotopes ou des isobares. Qu’appelle –t-on les nucléides qui possèdent le même nombre de neutrons ? 3-2. Deux isotopes constituent l'élément brome: 79Br (50,54% et 78,9183 g. mol-1) et 81Br (49,46% et 80,9163 g. mol-1). Déterminer sa masse molaire 3-3. L’antimoine présente deux isotopes dans la nature 121Sb et 123 Sb. Sachant les masses atomiques des isotopes et la masse atomique de l’élément calculer la répartition isotopique dans la nature. On donne : 121 Sb : 120,9038u 123 Sb : 122,9042u Sb : 121,7600u 3-4. L'énergie libérée lors de la formation du noyau à partir des nucléons séparés au repos est dite énergie de liaison. L'énergie de liaison par nucléon est voisine de 8 MeV pour la majorité des nucléides. Le fer en a 8,8 MeV. 1) Vérifier par vous-même cette valeur et comparer la à celle de l'uranium 235.sans faire d’approximation. 2) Faites une étude comparative de stabilité des 2 noyaux Fe (Z=26 ; masse du noyau de fer naturel 55,845 u) U (Z=92; masse du noyau d'uranium 235,234994 u) masse du proton: 1,007276 u; du neutron:1,008665 u; de l'électron:0,000549 u 3-5. 1) Donner la composition des noyaux de l'iode 131 et de l'iode 123 (Z=53). 2) L'iode 123 est produit par réaction nucléaire entre des deutons 12 D de haute énergie et du tellure 122Te. Ecrire l'équation correspondant à la réaction nucléaire. - Préciser les lois de conservation utilisées et donner la nature de la particule qui accompagne la formation de l'iode 123. 3) Quelle doit être la caractéristique commune des deux isotopes de l'iode pour qu'ils puisent être utilisés comme marqueurs ? 4) Calculer l'énergie de liaisons par nucléons pour chacun des deux isotopes. Comparer les valeurs trouvées à la courbe d'Aston et conclure. 40