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Juillet 2006
L’EPR: expérience et innovation
Réorientation en Finlande
Après une interruption de dix ans, une
nouvelle centrale nucléaire va à nouveau
être construite en Europe occidentale: le
17 février 2005, le gouvernement finlandais
a accordé l’autorisation de construction
d’Olkiluoto 3, centrale nucléaire de 1600
MW. Il s’agit du premier réacteur européen
à eau pressurisée du type EPR dans le
monde. Il fait partie des centrales nucléaires dites de la troisième génération qui
profite du progrès technique des dernières
décennies et associe expérience et innovation. Il se caractérise également par une
mise à profit plus durable des ressources
en uranium. Dans le contexte de la problématique du climat, les centrales nucléaires de la troisième génération offrent une
solution économique et respectueuse de
Après un long processus de formation de
l’opinion publique, le Parlement finlandais a
pris en mai 2002 la décision de principe de
poursuivre le développement de l’énergie
nucléaire, parallèlement à celui des énergies
renouvelables, ceci dans le but de concilier les exigences existantes en matière de
sécurité d’approvisionnement, de production
d’électricité économique et de protection du
climat. Encore en 1993, une nouvelle extension de l’énergie nucléaire avait été rejetée.
Suite à cette réorientation de la politique énergétique finlandaise, la compagnie d’électricité
finlandaise Teollisuuden Voima Oy (TVO) a
décidé de construire un EPR à Olkiluoto près
de Pori, sur le golfe de Botnie. Olkiluoto comprend déjà deux centrales nucléaires et un
dépôt géologique en profondeur pour déchets
de faible et de moyenne activité. Conformément à la décision du Parlement finlandais,
ce site devrait abriter aussi un jour le dépôt en
profondeur pour déchets de haute activité.
l’environnement pour couvrir les besoins
en électricité des décennies à venir.
Tête de série en France
En France également, où les 59 tranches
nucléaires actuelles devront être remplacées
dans les décennies à venir, des considérations économiques et le besoin de sécurité
d’approvisionnement ont été à la source de
Photo: TVO
Photomontage de
l’EPR (avec la coupole ronde) en cours
de construction à
Olkiluoto, en Finlande.
On voit au premier
plan les deux centrales nucléaires déjà en
service.
la décision de principe, repoussée pendant des
années, de construire une centrale nucléaire de
la troisième génération. Electricité de France a
annoncé en octobre 2004 qu’elle allait construire
à partir de 2007 un EPR à Flamanville sur la Manche, à l’ouest de Cherbourg, réacteur qui servira
de «démonstrateur» français avant son lancement
en série. Deux tranches nucléaires sont déjà en
service à Flamanville.
Retour d’expérience de milliers
d’années d’exploitation
L’EPR est une installation typique des centrales
nucléaires dites de la «troisième génération» (comme la plupart des centrales nucléaires actuellement
en service dans le monde, celles dont la Suisse est
équipée font partie de la deuxième génération).
L’EPR n’est pas entièrement une nouveauté, mais
un développement avancé des réacteurs français
à eau sous pression et des centrales nucléaires
allemandes «Konvoi». Ce caractère évolutionnaire
a permis d’intégrer dans l’EPR les expériences
et les enseignements pratiques issus de milliers
d’années d’exploitation de réacteurs. Il a été tenu
compte par ailleurs des résultats des décennies de
2
recherche sur la sûreté nucléaire menée en France
et en Allemagne. La stratégie évolutionnaire a été
choisie pour minimiser les risques de développement inhérents à toute nouveauté technique.
L’EPR a été conçu à partir de 1993 par Framatome
ANP, une filiale d’Areva (France) et de Siemens
(Allemagne). La compagnie nationale Electricité
de France, divers grands électriciens allemands,
ainsi que les autorités de la sûreté nucléaire des
deux pays, ont été associés à cette étroite coopération franco-allemande. Même après la décision
d’abandon du nucléaire prise par le gouvernement
fédéral allemand en 1998, des experts allemands
de la sûreté ont continué à travailler sur le projet.
Probabilité d’accident encore
réduite
Les centrales nucléaires suisses actuelles de la
deuxième génération remplissent déjà des exigences très sévères en matière de sûreté. Les
installations futures profiteront en plus des progrès techniques réalisés ces dernières décennies.
Les exigences nettement plus sévères posées par
les autorités de sûreté françaises et allemandes
pour la troisième génération de réacteur, ainsi que
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les spécifications des électriciens européens et
américains, ont constitué le fil conducteur qui a
présidé au développement de l’EPR. En septembre 2004, les autorités de sûreté françaises ont
constaté officiellement que dans l’état actuel du
développement, l’EPR remplissait les exigences
renforcées imposées en matière de sûreté.
C’est ainsi par exemple que par rapport aux centrales nucléaires de la deuxième génération, la
probabilité d’un accident avec fusion du cœur,
probabilité déjà très faible à l’heure actuelle, a été
encore divisée par dix. Dès le début des travaux
de développement, des dispositions ont toutefois
été prises pour que même en cas d’accident hypothétique avec fusion du cœur, aucun rejet significatif de radioactivité dans l’environnement ne se
produise.
Cœur du réacteur
avec les assemblages
combustibles
Générateurs
de vapeur
2
4
1
Double enceinte
de confinement
Réservoir d’eau
intégré / Puisard
3
1
2
3
4
Quatre systèmes de
sauvegarde indépendants
Récupérateur
de corium
Schéma: Framatome ANP
Préservation des ressources
naturelles
L’EPR renforce la contribution de l’énergie nucléaire à un approvisionnement énergétique durable.
Du fait de son taux d’efficacité élevé et de la mise
à profit améliorée du combustible, il consomme
sensiblement moins d’uranium par kilowattheure
d’électricité, ce qui préserve les ressources en uranium et réduit les déchets radioactifs à vie longue.
Grâce au recyclage obtenu par le retraitement,
l’EPR permet aussi de charger dans le réacteur
une part plus élevée d’assemblages combustibles
contenant du plutonium, ce qui préserve encore
plus les ressources en uranium.
Coûts de production
d’électricité peu élevés
Enfin, compte tenu de la libéralisation du marché
européen de l’électricité, l’EPR devrait pouvoir
être exploité de manière compétitive. C’est la raison pour laquelle sa puissance a été augmentée
à un peu plus de 1600 MW pour pouvoir imputer les coûts de construction sur une production
d’électricité plus importante (à titre de comparaison, Leibstadt, la plus grande centrale nucléaire
suisse, a une puissance de 1165 MW). Parallèlement à la mise à profit optimisée du combustible,
le raccourcissement de la durée de construction
à quatre ans (sans la procédure d’autorisation), la
maintenance simplifiée, ainsi que les arrêts plus
courts et plus rares pour la maintenance et le
renouvellement du combustible, contribuent également à la compétitivité.
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Développement des systèmes de sûreté
Les mesures suivantes contribuent notamment à la sûreté de l’EPR:
– Les systèmes du réacteur ont été examinés et optimisés sur la base de
décennies d’expérience d’exploitation et de recherche sur la sûreté. Ceci
a conduit dans de nombreux cas à une simplification et à une meilleure
visibilité de la conception.
– L’optimisation des interfaces homme-machine et la simplification du système de contrôle-commande ont diminué encore le risque de défaillance
humaine.
– Le bâtiment réacteur (confinement) a été doté d’une deuxième coque en
béton extrêmement robuste.
– L’EPR dispose de quatre systèmes de sûreté techniquement différents et
entièrement indépendants les uns des autres, systèmes qui sont aménagés dans quatre bâtiments séparés si bien qu’en cas de défaillance
d’un système, un autre pourrait toujours reprendre sa fonction. De plus,
deux des quatre bâtiments sont protégés contre les chutes d’avion par
une double coque en béton. Les deux autres se trouvent sur les côtés
opposés du bâtiment réacteur de sorte que si un avion s’écrasait, un seul
tout au plus de ces systèmes de réserve cesserait d’être fonctionnel.
– Sous les angles du génie civil et de la sûreté, l’EPR est donc conçu de
telle manière que même en cas d’écrasement d’un avion militaire ou d’un
gros avion de passagers, l’installation pourrait être amenée dans un état
sûr et mise à l’arrêt sous contrôle sans que ceci n’entraîne de dangers
pour l’environnement.
– Des fondations plus épaisses ont permis d’améliorer encore la résistance
de l’installation à de graves tremblements de terre.
– Si, malgré toutes les mesures de précaution prévues, un accident avec
fusion du cœur devait se produire, le cœur fondu (corium) pourrait être
récupéré dans un réservoir d’étalement spécial aménagé à l’intérieur
de l’enceinte de confinement, et la chaleur résiduelle serait évacuée.
Les substances radioactives s’échappant de fuites éventuelles seraient
recueillies dans l’espace annulaire entre les deux parois du confinement
et filtrées avant d’être rejetées dans l’environnement.
3
L’EPR, la meilleure solution pour
la Finlande
Les concurrents de l’EPR
Les coûts effectifs de la production d’électricité
varient selon le site et le pays. L’EPR d’Olkiluoto,
qui est financé sur une base privée par l’exploitant
TVO avec l'engagement des consommateurs
d'électricité, sans aide de l’Etat finlandais, coûtera quelque 3 milliards d’euros (intérêts compris)
et devrait fournir de l’électricité à un prix d’environ
2,4 centimes d’euro par kWh. Selon des études
approfondies de l’Université technique de Lappeenranta, le nucléaire livre en Finlande une électricité nettement meilleur marché que le charbon, le
gaz naturel, la tourbe, le bois et le vent, même si
l’on ne tient pas compte des échanges de droits
d’émission de CO2 dans l’UE. L’industrie et les
syndicats escomptent donc de l’EPR des prix de
l’électricité stables, prévisibles et concurrentiels
au niveau international. La construction de l’EPR
profitera enfin aussi à l’économie régionale: plus
de 50% des commandes d’investissement seront
passées à des entreprises finlandaises.
L’EPR offrira à la Finlande d’autres avantages: il
remplacera des anciennes centrales à combustible fossile et contribuera ainsi au respect des
obligations de réduction du CO2 contractées par
la Finlande dans le cadre du Protocole de Kyoto.
Le pays réduira en plus sa dépendance des
importations d’électricité.
L’EPR d’Olkiluoto est un investissement à long terme et devrait livrer de l’électricité pendant 60 ans
à partir de 2009. L’exemple finlandais montre que
la construction d’une nouvelle centrale nucléaire présente un intérêt économique même sur les
marchés de l’électricité européens libéralisés.
Prix de revient de l’électricité en Finlande
(en centimes d’euro par kWh)
5,01
5
Frais de
combustible
4,68
1,00
4
3,12
Frais d’exploitation
* sans l’échange de droits
d’émission de CO2
3,46
2,56
3
2,37
Frais de capital
3,29
2
0,27
1,79
1,79
0,82
0,72
0,74
1
1,38
4,01
2,24
0,35
0,53
0,76
0,65
1,02
1,30
Energie Gaz Houille* Tourbe* Bois
nucléaire naturel*
Taux d’intérêt réel de 5% par an,
niveau des prix en mars 2004
(source: Université technique
de Lappeenranta, TVO)
4
8000 heures d’exploitation par an
Eolien
Des centrales nucléaires de la troisième génération sont proposées sur le marché mondial par
des constructeurs d’Amérique du Nord, d’Asie
de l’Est, d’Europe et de Russie. Les deux réacteurs japonais à eau bouillante de Kashiwazaki
6 et 7, du type ABWR (Advanced Boiling Water
Reactor), sont considérés comme les premières
centrales nucléaires de cette 3e génération. Leur
puissance électrique unitaire est de 1315 MW,
leur mise en service industrielle datant de 1996
et de 1997. Elles ont été développées conjointement par General Electric, Hitachi et Toshiba.
Parmi les concurrents potentiels de l’EPR, on
peut citer encore les installations suivantes:
– le réacteur à eau bouillante SWR-1000 de
Framatome ANP (1000 –1300 MW),
– le réacteur à eau bouillante ESBWR (Economic and Simplified Boiling Water Reactor) de
General Electric (1380 MW),
– les deux réacteurs à eau sous pression
AP 600 et AP 1000 (Advanced Passive Plant)
de Westinghouse (600, resp. 1090 MW),
– le réacteur à eau sous pression APR 1400,
qui se base sur le «System 80+» d’ABB Combustion Engineering Nuclear Power, repris
par Westinghouse, et qui devrait devenir le
futur type standard de la Corée du Sud (1400
MW),
– le réacteur à eau sous pression avancé
APWR 1500, un développement avancé des
réacteurs à eau sous pression japonais de
Mitsubishi Heavy Industries et de Westinghouse (1500 MW),
– des développements avancés de la filière
russe de réacteurs à eau sous pression VVER
(640, 1000 et 1500 MW),
– le réacteur à eau lourde ACR-700 d’Energie
Atomique du Canada Limitée (EACL), un
développement avancé des réacteurs «Candu» (700 MW).
La troisième génération comptera également
des réacteurs de petite taille tels que le réacteur à haute température refroidi au gaz PBMR
(Pebble-bed Modular Reactor, réacteur modulaire à lit de boulets) d’Afrique du Sud (120 à 160
MW), et Iris (International Reactor Innovative
and Secure), réacteur de taille moyenne techniquement très innovant de Westinghouse d’une
puissance électrique de 335 MW.
2200
heures
d’exploitation par an
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