Un tracteur qui carbure au colza

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Un tracteur qui carbure au colza
Un tracteur qui carbure au colza
Souvenez-vous : 13 mars 2000, plus de cent tracteurs
escortent la Mission Granite pour dire NON à
l’enfouissement des déchets.
Au fil du temps, les mentalités ont
lentement évolué, et certains
agriculteurs ont compris la nécessité
de dépasser ce stade.
Afin d’éclairer la lanterne de ses
lecteurs, l’équipe de COEDRA Mag s’est
rendue à Bais, au siège de la CUMA des
Collines. Rappelons qu’une CUMA (Coopérative
d'Utilisateurs de Matériel Agricole) est une structure
agricole dans laquelle les adhérents fédèrent leur
énergie autour d’un projet commun. Forte de 60
membres, cette CUMA met à disposition de ses
adhérents 60 matériels, dont trois tracteurs, et l’un
d’eux fonctionne exclusivement avec du carburant
«vert», nommé aussi parfois agro-carburant.
Notons dès à présent qu’il existe deux sortes d’agrocarburant industriel:
l’éthanol, tiré des céréales (blé, maïs…) ou de
plantes sucrières (betterave, canne à sucre…) Ce
dernier est ajouté au carburant sans plomb des
moteurs à essence.
Le diester, tiré des huiles végétales (palmier à huile,
soja, tournesol, colza…) destiné aux moteurs diesel
Graines de colza aspirées par une vis sans fin
L’objet de
notre
reportage
concerne donc
le tracteur à
«colza», avec
lequel la CUMA
des Collines
s’est lancée
dans une expérimentation fort riche.
Au sein de cette association, chaque membre s’engage
à utiliser ce tracteur un minimum d’heures dans l’année.
Quatre adhérents ont libéré des espaces afin de
produire le colza. Ils reçoivent une indemnisation
compensatrice. Ce sont les 13 adhérents du
groupe/tracteur qui mutualisent aussi leur temps pour
tous les travaux de culture, récolte, pressage, filtrage…
Mais pourquoi donc utiliser un agro-carburant ?
Par le passé, les paysans consacraient environ 15% de
leur surface cultivée afin de satisfaire aux besoins de la
traction animale (cheval, bœuf). Il n’est donc pas
anormal de penser qu’on puisse élaborer une démarche
similaire pour la traction mécanique.
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Mais on nous a bien fait remarquer que la vocation
première du paysan est de nourrir la population. Sachez
aussi que l’huile de colza présente un bilan énergétique
plus intéressant que celui obtenu avec l’éthanol
(issu du blé ou du maïs), et elle peut même
se substituer en totalité au gazole. En
tant que carburant, l’huile de colza
présente trois possibilités techniques, que
d’autres paysans mayennais ont par ailleurs
mis en œuvre :
en mélange 30% huile, 70% gazole, moteur
ordinaire
en bi-carburation, deux réservoirs, basculement
manuel, moteur également non retouché
100% huile, de façon à être autonome par
rapport au gazole et ne pas compliquer la tâche des
utilisateurs ; mais il faut dès lors adapter le moteur.
C’est cette 3ème solution qui a été adoptée par la
CUMA des Collines. A signaler qu’elle est la seule CUMA
en Mayenne ayant opté pour le 100% colza. Elle a donc
acheté un tracteur neuf aux Ets Salin (Le Ham) dont il a
fallu modifier le moteur. Elle a bénéficié de différentes
aides (voir encadré au bas de cette page)
Au sein de la CUMA, la démarche « tracteur » entraîne
également une réflexion et une expérimentation sur :
les techniques de culture (par exemple les semis
sans labour, la diminution des intrants : engrais,
pesticides),
la conduite du troupeau (les vaches qui
mangent de l’herbe sont moins énergivores que celles qui
se nourrissent de maïs)
l’extraction de l’huile et son utilisation.
L’économie elle-même lorsqu’il s’agit de
s’affranchir des cours fluctuants soumis à la
spéculation dont font l’objet le gazole, le colza et le
tourteau entre autres.
La CUMA loue la presse et le filtre à huile auprès d’une
Le surcoût de ce tracteur au "moteur modifié" s'élève à 7500
Euros. Subventions obtenues:
3500 E du Conseil Régional Pays de Loire, 3500 E du
Conseil Général de la Mayenne, 1000 E par le concesssionaire
Deutz, les Ets Salin, 1000 E grâce au gain du 1er prix lors
d'un concours organisé par le Crédit Agricole à l'intention des
CUMA, 500 E par an sur 5 ans par la CAM (Coopérative des
Agriculteurs de la Mayenne). A noter que chaque utilisateur
du tracteur paie le litre d'huile au même tarif que celui auquel
se trouve le gazole au moment de faire le plein. La différence
est absorbée par la cagnotte approvisonnée par les trois
dernières subventions: Salin, CA, CAM)