Une rétrospective personnelle Alles Gute zum Geburtstag! Joyeux

Transcription

Une rétrospective personnelle Alles Gute zum Geburtstag! Joyeux
VOICE
Sreken
roden
den!
Viu Glück
zum Geburi!
Otanjou-bi
Urime ditelindjen! Omedetou Gozaimasu!
Tut
bien
sil
natalezi!
Gratulerer
med
dagen!
Bon aniversari!
Hau‘ oli
la hanau!
Birthday
Alles Gute
zum Geburtstag!
Til hamingju med afmaelisdaginn! Chronia polla!
Feliz
Cumpleaños!
tillykke med
fødselsdagen
Happy Joyeux anniversaire!
Feliz Aniversario!
Zorionak!
buon compleanno!
rojbûna
te pîroz be
Le journal de la SPM | septembre 2014 | numéro 3
Les 25 ans de la SPM Suisse
Une rétrospective personnelle
Droits humains et diversité culturelle
Les droits de l’homme universels, tels que décrits
dans la Déclaration de l’ONU, constituent un socle
indissociablement lié à la dignité humaine, qui est
inaliénable. Cependant, les droits sociaux, politiques,
Une voix pour
les persécutés
depuis 25 ans:
Un voyage dans le temps
marqué par des actions de
protestation, des amorces de
solutions et des campagnes
1988
Des parlementaires suisses rencontrent par le biais de la SPM non
encore officiellement fondée Sa
Sainteté le Dalaï-Lama, à Berne.
culturels et économiques également énoncés dans la
Déclaration sont sujets à interprétation et sont à
apprécier voire à adapter au regard de particularités
culturelles. Celles-ci ne sauraient pour autant être
systématiquement considérées comme primant sur
les droits humains. Des traditions anciennes telles
que le sacrifice humain ou l’excision des fillettes, des
pratiques punitives mutilantes, la peine de mort ou
encore l’appel au meurtre ne peuvent être acceptées
sous prétexte de justifications culturelles ou religieuses. Cette tension est source de défis importants pour
le travail humanitaire, il s’agit d’un dilemme constant
que j’imaginais au départ plus simple à résoudre!
1989
Fondation officielle
de la Société pour
les peuples menacés
Suisse (SPM), par
Bernhard Pulver et
Göpf Berweger.
200 membres
De Göpf Berweger, membre du comité de la SPM:
«Cela fait 27 ans que dure mon engagement au sein
de la SPM en Suisse: deux années de préparation, la
création en 1989, la direction jusqu’en 2000 dans
le petit bureau bernois et, depuis, la participation
au comité. Pour les 25 ans de la SPM, je suis ravi de
raconter les défis et expériences dans le domaine des
droits humains.»
1990
La SPM attire avec Bruno Manser
l’attention sur le destin les
Penans au Sarawak/Malaisie et sur
la destruction massive de la forêt
tropicale.
2
VOICE | 3-2014
Ne se voiler aucune face
On ne peut bien sûr s’attendre spontanément à une
attitude ouverte à l’égard des étrangers, à une position cohérente contre l’oppression, la persécution, la
discrimination et le pillage et à un engagement pour
la diversité culturelle. Que des cercles xénophobes
ou racistes refusent de nous suivre dans notre lutte
n’est pas surprenant. Il a cependant été souvent douloureux pour moi de constater que même des milieux
«ouverts» ne puissent ou ne veuillent comprendre
que la source philosophico-idéologique de notre engagement ne tolère pas de concession tactique. Un
exemple: comment, en Suisse, des militants pacifistes de gauche nostalgiques de la Yougoslavie ont-ils
pu refuser d’admettre des mois et des années durant
1991
Première
édition de la
revue pour
les membres
«Nouvelles»,
qui deviendra l’actuel
«VOICE».
que les musulmans bosniaques étaient victimes d’un
génocide?
En somme, les «droits humains», les «peuples menacés» et la «diversité culturelle» sont des défis
ambitieux sur le plan théorique qu’il s’agit d’imposer
dans la pratique au milieu d’intérêts contradictoires.
Il est passionnant de tenter de les relever et cela a
été un grand privilège pour moi de le faire en travaillant pour une organisation comme la SPM: le sens,
l’efficacité, les contacts et les amitiés compensent
beaucoup de choses.
Göpf Berweger est l’un
des deux fondateurs
de la SPM Suisse et
il s’engage depuis le
début pour les peuples
autochtones et les
minorités menacées.
Photo: GfbV
J’ai toujours su que, malgré sa petite taille, notre
pays pesait économiquement et politiquement lourd
dans le monde. Mais j’ai été surpris de découvrir que
la Suisse était directement ou indirectement liée
à presque toutes les problématiques relatives aux
minorités, les persécutions et autres injustices sur
notre planète. Ce sont généralement des intérêts
économiques, soutenus par la politique extérieure
(et économique), qui nous ont conduits dans des
situations compromettantes. Rappelez-vous notamment toutes les opérations commerciales illégales
pendant l’apartheid en Afrique du Sud, l’incroyable
politique des banques suisses concernant les capitaux en fuite, la transformation et le commerce de
l’or, l’industrie et le commerce des armes, les pillages
de matières premières dans les coins du monde les
plus reculés, les récents accords de libre-échange…
Etant donné que la mondialisation du commerce, du
capital, de l’investissement, de la technologie, des
flux financiers et de l’information ne se fait pas sans
les humains, il est inévitable que ces derniers deviennent eux aussi plus mobiles. Toutefois, lorsque
des personnes frappent à notre porte non en qualité
de commerçant, consommateur, fraudeur fiscal, touriste ou artiste mais en tant que réfugié souhaitant
s’installer, cela entraîne un durcissement des dispositions d’asile et de politique étrangère, et ce dans une
mesure difficilement soutenable au regard des droits
humains. Là aussi, la SPM se doit de rester vigilante!
Mes expériences personnelles
» Sur le plan des minorités et des autochtones, nous
avons abordé une problématique qui était plutôt négligée en Suisse et qui depuis est devenue réellement
présente et même explosive.
» Il faut souligner l’importance collective des droits
humains universels et de la dignité humaine, qui en
est le fondement, tout en respectant les particularités
culturelles.
» Nous aurions été ravis de présenter la richesse multiculturelle de notre monde et de promouvoir la diversité culturelle, mais les circonstances nous ont toujours
obligés à évoquer davantage des événements négatifs
et à nous y attaquer.
1993
Campagne Adivasi: la SPM participe au groupe de travail de l’ONU à
Genève avec des représentant-e-s
adivasis venu-e-s d’Inde.
785 membres
Implication de la Suisse
1996
La SPM organise une marche funèbre
de Willisau
à Berne en
souvenir des
victimes du
massacre de
Srebrenica/
Bosnie.
1998
Manifestation contre les atteintes
aux droits humains en Chine, coorganisée par la SPM à l’occasion
de la visite du président Zemin.
VOICE | 3-2014
Editorial
» Il est étonnant de constater que, où que ce soit dans
le monde, la Suisse est très souvent impliquée économiquement ou politiquement dans les problématiques
liées aux minorités.
» Il n’est pas rare que l’on ne comprenne ou n’accepte
pas que la source de notre engagement est philosophico-idéologique, de sorte que nous ne tenons compte
ni d’opinions politiques ni de positions défendant un
quelconque intérêt.
» Je n’aurais jamais cru qu’autant de travail administratif et organisationnel, en particulier pour la récolte
de fonds, serait nécessaire pour mettre en place et
consolider une organisation qui demeure pourtant très
petite.
Nous avons aussi suivi un autre destin de femme tout
au long de cet été, celui de Máxima Acuña Chaupe, qui
s’attaque au plus grand producteur d’or au Pérou, Yanacocha. Elle a été condamnée fin août à une amende et
à 2 ans et 8 mois d’emprisonnement avec sursis pour appropriation illégale d’un terrain malgré des titres de propriété en règle. Voilà comment l’on entend réduire au silence ceux et celles qui critiquent des sociétés de matières
premières. A noter qu’environ 70 % de l’or de Yanacocha
sont transformés par la raffinerie tessinoise Valcambi.
Fête des 25 ans
Sans les membres, nous n’existerions pas. Venez
donc fêter avec nous les 25 ans de la SPM!
Quand: samedi 8 novembre 2014, du début
d’après-midi jusque tard dans la nuit. Avec débats, musique et apéritif
Où: Theatersaal Hotel National, Berne
Le programme détaillé se trouvera dès octobre
sur gfbv.ch/25ans et dans les prochaines newsletters en ligne. Nous nous réjouissons de vous
voir!
L’équipe de la SPM: Christoph, Angela, Erika, Nicole, Lisa, Dominic, Yves, Anna et le comité de la
SPM: Gaby, Göpf, Sonja, Urs et Theodora.
1000 membres
En 1987, Göpf Berweger et Berhard Pulver, aujourd’hui
membre du Conseil-exécutif bernois, ont demandé chacun de leur côté à la SPM Allemagne s’ils pouvaient créer
une section suisse. Voilà une raison de jeter un regard en
arrière dans ce numéro de VOICE, tout en nous tournant
vers l’avenir. Ainsi, nous nous prononçons clairement contre l’initiative Ecopop, qui méprise la dignité humaine et
ne résout en rien les problèmes migratoires et environnementaux, et rendons compte d’évolutions inquiétantes. En
effet, les atteintes aux droits humains à l’encontre des
minorités au Sri Lanka, surtout les Tamoul-e-s, se multiplient à nouveau. Cela n’a pas empêché l’Office fédéral
des migrations (ODM) de mettre fin, en mai, à la suspension des renvois forcés de Tamoul-e-s, pour laquelle nous
nous étions battus. Nous interviewons à ce sujet Shalini,
l’épouse d’un Tamoul renvoyé au Sri Lanka qui se trouve, à
cause de l‘ODM, incarcéré au Sri Lanka depuis l‘été dernier.
Nous avons cependant quelques bonnes nouvelles à
annoncer: Ali Hajdini, qui participe à notre programme
de construction de capacités pour Roms, a été invité au
bureau de l’ONU à Pristina en tant que représentant rom.
Cela montre que notre programme d’empowerment porte
des fruits à long terme! De plus, nous fêtons en novembre
les 25 ans de la SPM, ce qui ne va pas de soi pour une petite organisation de défense des droits humains. Cela mérite
d’être célébré! Pensez à réserver le samedi 8 novembre.
Après des informations sur nos campagnes sur l’or et les
Tamoul-e-s, nous fêterons cet anniversaire au son d’une
musique live. Nous nous réjouissons de votre venue. Le programme détaillé se trouvera dès octobre sur gfbv.ch/25ans.
Christoph Wiedmer, directeur de la SPM
2000
2002
2003
2004
La SPM soutient à Noël avec une action des enfants dans le Caucase qui
subissent la guerre d’extermination
russe contre la Tchétchénie.
Des étudiant-e-s kurdes exigent
en Turquie un enseignement dans
leur langue maternelle à travers la
campagne «Le kurde est ma langue
maternelle».
Sur initiative de la SPM, le Parlement
reconnaît le génocide arménien comme
un fait historique.
La SPM organise une grande collecte
de dons pour soutenir les personnes
qui retournent dans la région de
Srebrenica/Bosnie-Herzégovine.
4
VOICE | 3-2014
Les 25 ans de la SPM
La diversité enrichit: regard en arrière de Bernhard Pulver
langues et la diversité culturelle permettent de voir le monde autrement, stimulent la curiosité et enrichissent.
Photo: Mark Nolan
En quoi la SPM se différenciait
à l’époque d’autres organisations
de défense des droits humains?
Bernhard Pulver, aujourd’hui membre du Conseil-exécutif bernois, a fondé la
SPM Suisse avec Göpf Berweger en 1989, à l’issue de deux années de préparation. Les expériences et rencontres qu’il a faites pendant ces neuf années à
défendre les droits humains lui servent aujourd’hui encore. Son principal apprentissage: on n’a jamais fini de défendre les droits humains. Il faut toujours
garder un œil ouvert et critique.
Göpf et moi voulions parler de choses positives, pas négatives. Nous nous souhaitions une organisation qui montre que la
diversité culturelle est une opportunité.
Nous voulions exposer le savoir incroyable
que recèlent les peuples autochtones et
qu’il faut préserver. Il existe des groupes
ethniques passionnants: les Tibétains, les
Samis de Norvège, les Yéniches en Suisse
ou les Penans de Bornéo, pour n’en citer
que quelques-uns. Nous voulions montrer
qu’il ne faut pas combattre la diversité et
l’inconnu mais au contraire en tirer des
enseignements. Malheureusement, des
guerres ou des atteintes aux droits humains commises par des multinationales
envers des peuples autochtones nous ont
souvent obligés à aborder avant tout des
thèmes négatifs.
Votre plus belle expérience?
Comment est née l’idée de créer
une section suisse de la SPM?
Bernhard Pulver: Il y a 27 ans, le fondateur de la SPM Allemagne, Tilman Zülch, a
reçu deux lettres. Toutes deux venaient de
Suisse, de Berne, avec quasiment le même
code postal. Göpf Berweger et moi avions
chacun de notre côté eu la même idée au
même moment: créer une section suisse
pour la SPM. Tilman Zülch a réuni les deux
Bernois, et c’était parti.
afin que nous puissions nous atteler au
vif du sujet et créer un bureau qui tourne
à temps plein. Evidemment, ça n’a pas été
aussi simple! Mais malgré notre idéalisme juvénile – j’avais alors 24 ans – nous
avons pu officiellement créer la SPM Suisse deux ans après le premier contact avec
l’Allemagne. Certes, le budget était petit,
mais l’engagement et la joie énormes.
L’époque était marquée par un idéalisme
motivant. Avec Göpf, nous rêvions de
créer la section en un clin d’œil; nous
croyions qu’une grande fondation nous
promettrait directement 200 000 francs
La diversité culturelle m’a toujours intéressé et les langues me fascinaient. En
tant que militant vert, les monocultures
me font horreur, d’un point de vue écologique mais aussi philosophique. Les
2005
2005
3000 membres
Comment étaient les débuts?
Pourquoi avez-vous opté à
l’époque précisément pour le
thème des peuples menacés?
Les rencontres avec les personnes, toutes
si différentes. La collaboration avec Bruno Manser m’a notamment marqué. Mais
l’expérience qui m’a le plus impressionné était l’audience privée avec le Dalaï
Lama. En 1988, j’étais secrétaire général
des Verts et j’ai organisé avec Göpf une
rencontre entre le Dalaï Lama et des parlementaires suisses. En guise de remerciement, nous avons été conviés pour une
audience privée avec Sa Sainteté.
Vos souvenirs de ce moment?
C’était incroyable et indescriptible. Je
n’oublierai jamais avec quelle décontraction il nous a reçus pendant une heure.
Pas de maniérisme ni de protocole, juste une chaleur humaine sincère, en toute
2007
2008
Free, Prior and Informed Consent
and Sustainable Forest Management
in the Congo Basin
Fondation du Forum de la société
civile tchétchène: 25 membres tchétchènes du forum adoptent un plan
d’action en vue d’un développement
pacifique de la Tchétchénie.
La SPM organise des ateliers et crée à
l’intention d’ONG afghanes un manuel
sur les droits humains.
Des autochtones de Guyane condamnent à l’occasion d’une conférence
de presse de la SPM l’implication des
banques suisses dans la destruction de
leur espace de vie.
Collaboration de la SPM à l’élaboration
de directives pour les entreprises du
bois au Congo. Très important: droit de
participation de la population locale
aux décisions la concernant.
VOICE | 3-2014
5
GOOD NEWS
amitié. Lorsque nous sommes entrés, il a par exemple commencé
par s’intéresser à la boucle d’oreille appenzelloise de Göpf. J’ai
rencontré quelques hommes d’Etat depuis, mais rarement une
personnalité aussi simple, sympathique et grande, avec une curiosité enfantine aussi admirable. Bien sûr, nous avons aussi
parlé de la situation des droits humains au Tibet. Là encore:
pas d’entretiens prédéterminés mais une discussion animée et
authentique. C’était formidable!
Notre travail avec les Roms au Kosovo
porte ses fruits
Nous sommes ravis qu’Ali Hajdini, un
participant à notre programme de construction de capacités, ait été invité au
bureau de l’ONU à Pristina en tant que représentant des jeunes militants roms, où
il est désormais engagé comme personne
de contact. Maintenant, il peut faire valoir les intérêts des Roms directement.
C’est un pas important. La SPM soutient
depuis 2011 le programme qui encourage
des jeunes roms de cinq régions du Kosovo œuvrant pour l’amélioration des droits
des minorités et une meilleure participation à la vie sociale et politique.
Votre pire expérience?
Très clairement le conflit en Bosnie et l’approbation de l’intervention
de l’OTAN. En tant qu‘antimilitariste, j‘étais dévasté qu’il ait fallu
combattre la violence par la violence. Toutefois, il fallait mettre
un terme à cette guerre horrible, aux viols collectifs et au génocide de la population musulmane. Malheureusement, par les armes.
En quoi vous a marqué la défense des droits humains?
Le Conseil fédéral institue un groupe de
travail pour les Yéniches, Sintis et Roms
Mi-juin, le Conseil fédéral a décidé
d’instituer un groupe de travail chargé
d’élaborer des mesures concrètes pour la
mise en œuvre des obligations conventionnelles pour la protection des minorités
nationales des Yéniches, Sintis et Roms.
La SPM salue ce premier pas qu’est la
création du groupe du travail mais espère
surtout que les différentes minorités y seront bien représentées, dès le départ, et
qu’elles y participeront à part entière.
Mes expériences passées me sont souvent utiles au Conseil-exécutif bernois. Prenons la question du Jura: le canton de Berne
est bilingue, avec une minorité francophone dont il faut prendre
soin. Toute minorité a besoin de droits spéciaux, sinon elle disparaît. Il va de soi que c’est au plus grand de se tourner vers le
plus petit. Selon moi, le canton de Berne est comme un pont
entre la Suisse alémanique et la Suisse romande. Là encore: le
multilinguisme et la diversité culturelle sont un enrichissement.
Qu’est-ce qui caractérise la défense des droits
humains?
Il faut être conscient que l’on n’a jamais fini de défendre les droits
humains et savoir gérer cet état de fait. Je m’engage aussi dans
le mouvement gay et nous avons atteint beaucoup d’objectifs
ces dernières années, comme l’adoption de la loi sur le partenariat. Un temps, il semblait que le plus dur était fait. Pourtant,
Les discriminations actuelles à l‘encontre des gays et lesbiennes en Russie ou en Ouganda montrent qu’il n’en est rien. Les
droits humains ne sont malheureusement jamais garantis pour
toujours. Il faut donc toujours garder un œil ouvert et critique.
VOICE
Impressum: VOICE 3/2014, septembre 2014
Editrice: Société pour les peuples menacés,
Schermenweg 154, 3072 Ostermundigen,
031 939 00 00, [email protected], www.gfbv.ch
Rédaction: Nicole Huwyler Collaboratrices pour ce
numéro: Christoph Wiedmer, Nicole Huwyler, Angela
Mattli, Anna Rudin, Göpf Berweger Parution: semestrielle Tirage: 1500 exemplaires
Impression: gdz AG, Zurich; imprimé surPlano Speed
(«FSC Mix») Abonnement: 30 francs par an
Cotisation: dès 60 francs par an
2009
Campagne
SPM pour
obtenir la
fermeture
d’un camp de
réfugiés roms
au Kosovo,
contaminé par
des métaux
lourds. Trois
ans plus tard,
une solution
était trouvée
pour toutes
les familles.
10 000 membres
Interview: Nicole Huwyler
2010
2011
La SPM enjoint la commission d’experts
de l’ONU à mener une enquête indépendante sur les crimes de guerre commis
au Sri Lanka par les deux parties au
conflit.
La SPM découvre que Jagheth Dias, vice-ambassadeur du Sri Lanka auprès de
la Suisse et ancien général de l’armée
sri lankaise, est présumé coupable de
crimes de guerre.
2011
Fukushima beginnt
bei den Tuareg:
Deklarationspflicht jetzt!
La SPM attire
l’attention
de parlementaires sur
les dégâts
environnementaux et
les atteintes
aux droits
humains liés
à l’extraction
d’uranium.
6
VOICE | 3-2014
ECOPOP
NON à l’initiative inhumaine
Le 30 novembre, lors du vote sur Ecopop,
nous nous prononcerons pour la seconde fois sur une initiative populaire qui
réclame la limitation de l’immigration
en Suisse. Sous couvert de motivations
écologiques, il s’agit de faire supporter aux populations du Sud les problèmes des pays industrialisés du Nord.
Il est grand temps d’envoyer un signal
fort en rejetant clairement l’initiative
Ecopop: oui aux droits humains et non
à une politique du bouc émissaire.
Avec son initiative «Halte à la surpopulation – Oui à la préservation durable des
ressources naturelles», l’association Ecopop (ECOlogie et POPulation) entend réduire l’immigration annuelle à 0,2 % de la
population résidente. Cela correspondrait
à une limite de quelque 16 000 personnes
par an, réfugié-e-s, personnes provisoirement admises et Suisse-sse-s de l’étranger
revenant au pays y compris. Limiter
l’immigration sous couvert d’écologie
et désigner les immigré-e-s comme des
boucs émissaires pour les problèmes écologiques n’est pas une solution mais tout
bonnement inhumain. Un «mur autour de
la Suisse» ne permettrait de résoudre ni
les défis de politique climatique ni ceux
liés à la migration. En outre, les initiante-s, issu-e-s principalement de cercles
éco-conservateurs, réclament qu’un dixième des fonds d’aide au développement
soit consacré à l’encouragement d’une
planification familiale volontaire. Cette
approche partiale datant des années 70
est considérée comme dépassée et inefficace. En résumé: contre le gaspillage
des ressources, la pollution de l’air et le
mitage du territoire, ce ne sont pas des
instruments de politique extérieure qu’il
nous faut, mais des politiques environnementales crédibles. L’initiative Ecopop ne
permet donc ni de résoudre les défis écologiques auxquels la Suisse doit faire face
ni de lutter dignement contre la pauvreté
dans les pays en développement.
Ecopop ne résout aucun problème
environnemental
Si les ressources de notre planète ne sont
pas illimitées, leur consommation dépend
cependant moins du nombre de personnes
sur terre que de la façon dont ces ressources sont exploitées. A l’instar de la Suisse,
qui émet 54 fois plus d’émissions de carbone que le Niger, les nations industrielles et les pays émergents sont aujourd’hui
encore les plus gros consommateurs de
ressources. Il est faux et discriminatoire
de tenir les habitant-e-s d’autres continents pour responsables de nos propres problèmes. D’ailleurs, les problèmes
écologiques sur une moitié du globe ne
s’évaporeront pas du fait que le nombre
d’enfants soit diminué sur l’autre moitié;
la politique du bouc émissaire prônée par
Ecopop est donc parfaitement injuste.
Ecopop viole les droits humains
Les initiant-e-s rejettent sur les pays du
Sud la faute des problèmes des pays du
Nord et se permettent en outre de se poser en donneurs de leçons pour le Sud. Au
regard des droits humains, cette position
est doublement contestable, car le droit
de bénéficier des ressources naturelles
est le même pour tou-te-s les habitante-s de la planète. Avec la hausse du prix
des matières premières, ce droit est pourtant régulièrement bafoué par des multinationales qui s’accaparent des terres
déjà cultivées localement pour y établir
des plantations immenses. Expliquer à un
paysan africain qui a ainsi perdu ses terres qu’il doit régler ses problèmes grâce à
une planification familiale raisonnée est
on ne peut plus cynique. Quiconque tient
aux droits humains se doit donc de voter
NON le 30 novembre.
Ruth-Gaby Vermot-Mangold, ancienne
conseillère nationale, membre du
Conseil de l’Europe et présidente de la
SPM votera NON le 30 novembre.
«Des frontières fermées aux réfugié-e-s
et aux migrant-e-s dans le Nord et une
planification familiale régulée dans le
Sud, voilà comment ECOPOP entend
sauver le monde. Il faut dire NON à cette initiative obtuse qui méprise la personne humaine – non à cette logique
cynique!»
«Limiter l’immigration à 0,2 % est censé rétablir la nature dévastée tandis
que chaque jour, des personnes fuyant
la guerre et la violence se noient dans
la Méditerranée. Par ailleurs, une planification familiale – volontaire – est
censée réduire le nombre d’enfants dans
le Sud, en échange d’une ‘récompense’
sous forme de fonds d’aide au développement. Il nous faut des solutions politiques et plus d’égalité entre le Nord et
le Sud. Arrêter par exemple le commerce
des armes, le pillage des ressources, la
traite des humains... Ce n’est pas ECOPOP qu’il nous faut, mais appliquer les
droits humains!»
Texte: Nicole Huwyler
2011
2011
La SPM lance une campagne de
protection des peuples autochtones
vivant dans la forêt amazonienne. La
présidente du Brésil reçoit des centaines d’e-mails de protestation.
Lors d’une conférence internationale à
Berne, la SPM présente publiquement
les archives tchétchènes sur les droits
humains, qui comptent le plus de documents vidéo au monde sur le sujet.
La SPM et d’autres organisations de défense des droits humains déposent une
pétition réclamant la création d’une
unité spéciale destinée à poursuivre les
criminels de guerre.
12 000 membres
2011
2012
Début de la campagne «No dirty
gold!»: la SPM entend par le biais
de diverses actions mettre fin à
l’importation d’or sale en Suisse.
VOICE | 3-2014
7
395 jours de douleur
Le 21 août 2013, la Suisse renvoie
de force une famille tamoule au
Sri Lanka. Dès leur arrivée sur le
sol sri lankais, le père est incarcéré. L’Office fédéral des migrations
(ODM) admettra peu après officiellement avoir commis une erreur: la
famille n’aurait jamais dû être renvoyée. Entretemps, l’ODM a fait revenir la mère et les enfants en Suisse.
Un an plus tard, nous avons rendu visite à Shalini Ahilaruben
Thambipilai à Winterthour.
de salle de jeux. Les traits de la mère
de 29 ans trahissent la difficulté de la
situation, elle ne peut cacher sa profonde tristesse. La douleur transparaît
dans ses mouvements, son regard, son
silence. «Je ne peux pas mettre de mots
sur la peine que je ressens», dit-elle.
Ses pensées sont dominées par la peur
et l’incertitude, elles tournent en rond
dans sa tête et provoquent des migraines, la paralysent. Jour et nuit, 24 heures sur 24 depuis le jour
du renvoi forcé. Depuis 395 jours.
Il est 22 heures, les trois enfants sont au lit et dorment paisiblement. Les parents s’affairent joyeusement à la préparation de
la fête d’anniversaire de Kaviya, leur plus jeune fille. Kaviya aura
un an le lendemain. Des ballons roses, un grand gâteau, des cadeaux pour la petite de la part de proches, une jolie robe – que
de choses à préparer pour le grand jour! Shalini et son mari rient
de bon cœur.
L’espoir d’un retour en sécurité
Ceci est le début d’un rêve. Un rêve que Shalini fait de manière récurrente depuis plus d’un an. Elle y entend son propre
rire, son mari et elle sont ensemble. C’est un moment heureux.
Cependant, à peine Shalini se réveille, la réalité reprend le dessus. Impitoyable. Envolés, les ballons roses. Disparue, la gaieté.
Plus de mari. Il ne reste que le monde réel, morne et gris: son
quotidien dans le centre de transit à Winterthour. C’est ici que
vit Shalini avec ses trois enfants, Tamilyan, Oviya et la cadette
Kaviya, née en Suisse.
Revenue sans mari
Kaviya n’a jamais encore vu son père. Depuis que les autorités
suisses l’ont renvoyé de force au Sri Lanka, il est retenu prisonnier. Bien que l’ODM ait admis avoir commis plusieurs erreurs au
cours de la procédure de renvoi, seuls Shalini et ses enfants ont
pu revenir en Suisse. Son mari reste quant à lui en détention au
Sri Lanka jusqu’au 13 avril 2015. Shalini et ses enfants vivent
dans le centre de transit depuis six mois. Entretemps, elle a obtenu un permis B, ce qui lui assure un peu de sécurité. Mais les
incertitudes concernant son mari, elles, demeurent.
Douleurs sur 20 m2
Les journées de Shalini au centre de transit sont longues. Elle
vit avec ses trois enfants dans 20 mètres carrés. La pièce sert
à la fois de salle à manger, de salon, de chambre à coucher et
«Ma peur ne disparaîtra que lorsque mon mari sera à nouveau
en Suisse, en sécurité», déclare Shalini. Leur fille Kaviya aura un
an le 25 avril prochain, précisément le mois où son père devrait
être libéré. Il faut espérer que le gouvernement suisse fera tout
pour réparer son erreur et assurer au mari de Shalini un retour
en Suisse au plus vite et en toute sécurité. Il le faut pour qu’au
bout de 395 jours de douleur, l’anniversaire de Kaviya soit enfin
un jour de fête, que la famille pourra célébrer en Suisse au grand
complet. Le rêve de Shalini doit devenir réalité!
Texte: Nicole Huwyler
La Suisse doit réparer son erreur!
Marcel Bosonnet, avocat spécialisé dans les droits humains,
assiste la famille sur le plan juridique et il a porté plainte
devant la Cour européenne des droits de l’homme. Le sort du
mari était prévisible, explique-t-il. Les autorités ont donc
selon lui violé l’article 3 de la Convention européenne des
droits de l’homme, qui interdit la torture et les traitements
inhumains ou dégradants.
Son argumentation
» L’Office fédéral des migrations doit faire revenir le mari de
Shalini en Suisse au plus vite et en sécurité, après sa libération
au mois d’avril.
» Ce cas montre que l’ODM et le Tribunal administratif fédéral
n’ont pas tenu compte de données politiques concrètes relayées par des ONG et que la situation politique actuelle au Sri
Lanka n’a pas été appréciée à sa juste mesure lors du renvoi.
Pourtant, la SPM et d’autres ONG avaient plusieurs fois tiré la
sonnette d’alarme concernant ce pays.
2012
2012
2013
2013
Début du projet de construction des
capacités avec des Tamoul-e-s de
seconde génération: ateliers sur la
participation politique, la mobilisation, la médiation et le leadership.
Raoni et Megaron, chefs de tribus
kayapos, visitent l’ONU accompagnés
par la SPM.
La SPM se rend au salon de
l’horlogerie et de la bijouterie, BaselWorld, en compagnie de l’activiste
péruvien Marco Arana.
La SPM dépose la pétition sur le Sri
Lanka et exige le respect des droits
humains dans ce pays. L’Office fédéral
des migrations suspend le renvoi forcé
des Tamoul-e-s.
8
VOICE | 3-2014
L’or, un commerce sale
Condamnation injuste de Máxima Acuña de Chaupe
que la famille Chaupe, qui compte cinq
personnes, avait chassé avec violence
vingt agents de sécurité de la société Yanacocha avant de prendre possession du
terrain. Si aucune preuve n’atteste cette
version des faits, des enregistrements vidéo témoignent en revanche des violents
assauts de la police contre la famille.
L’avocate de Máxima condamne le fait que
le tribunal ait accordé beaucoup plus de
poids aux déclarations de la société minière et que les preuves fournies par Máxima n’aient pas été prises au sérieux.
Le combat continue
Jugement douteux
Mirtha Vasquez, l’avocate de Máxima,
dénonce un jugement injuste. En effet,
alors que Máxima avait fait état d’un titre
de propriété justifiant clairement que sa
famille avait acquis ce bien en 1994 de
façon légitime, la société de Yanacocha
n’avait pas été en mesure de prouver que
le terrain où vit Máxima lui appartenait.
Néanmoins, le juge s’est laissé convaincre
2013
3ROL]HLLP6ROGHGHU5RKVWRIIILUPHQ
'LH9HUDQWZRUWXQJGHU6FKZHL]XQG3HUXIU0HQVFKHQUHFKWV
YHUOHW]XQJHQLP5RKVWRIIVHNWRU
Publication
du rapport de
la SPM sur les
contrats secrets
entre la police
péruvienne
et des sociétés,
notamment
suisses, de
matières
premières.
Mais Máxima ne baisse pas les bras. Avec
son avocate, elle n’a pas tardé à faire recours. Une fois de plus. Il y a un an déjà,
la juridiction de deuxième instance avait
annulé une décision, jugée illégale, prononcée contre elle par le tribunal local.
Máxima espère désormais avoir à nouveau droit à un procès équitable, où les
arguments des deux parties seront pris en
compte de façon impartiale.
2014
La responsabilité de la Suisse
Dans le cas de Máxima, la responsabilité
de la Suisse est incontestable, car c‘est ici
que la moitié de l‘or péruvien est transformé. La raffinerie suisse Valcambi, qui
achète environ les deux tiers de l’or extrait dans la mine de Yanacocha, est l’une
des plus grandes raffineries d’or au monde.
Elle affiche l’image d’une entreprise aux
pratiques durables et responsables, mais
refuse vis-à-vis de la SPM de s’exprimer
sur ses fournisseurs controversés. A noter
que la société de production Yanacocha
et la raffinerie Valcambi sont toutes deux
contrôlées par la société américaine Newmont Mining, laquelle se présente aussi
volontiers comme une entreprise responsable. La SPM continuera de suivre de près
les agissements de ces trois sociétés dans
le conflit qui les oppose à Máxima et à la
population locale.
2014
Texte: Anna Rudin
2014
STOP À L’ANTITSIGANISME
La SPM critique l’intervention policière humiliante contre les familles
yéniches et enjoint la Confédération
et les cantons à créer davantage
d’aires de séjour et de transit.
Lobbying intense auprès du Conseil
des droits de l’homme de l’ONU, à
Genève, et organisation de manifestations avec des défenseurs cinghalais et
tamouls des droits humains.
Lors de la journée internationale des
Roms, Sintis et Yéniches, les trois
groupes ethniques s’affichent pour la
première fois ensemble, afin d’attirer
l’attention sur leur situation.
12 542 membres
Máxima, 47 ans, et sa famille sont épuisées et abattues. Depuis 2001, elles
font l’objet de menaces, d’intimidations
et même d’agressions de la part de collaborateurs de la société gérant la mine
de Yanacocha et d’une unité spéciale de
la police péruvienne. En outre, la famille
Chaupe doit également depuis deux ans
se défendre devant les tribunaux contre
l’entreprise de Yanacocha. Quatre fois déjà,
les membres de la famille ont dû subir des
interrogatoires confus de plusieurs jours
et endurer les accusations des avocats de
la société aurifère. A la mi-août, le jugement est tombé, révoltant: Máxima, son
mari, sa fille et son gendre sont condamnés à 2 ans et 8 mois d’emprisonnement
avec sursis, à une amende de 1900 US$ et
à quitter le terrain car il leur est reproché
de se l’être approprié illégalement.
Photo: Philipp Bürkler
La Péruvienne Máxima Acuña de Chaupe lutte sans relâche pour son lopin de
terre. Depuis 2011, l’exploitant de la
plus grande mine d’or du pays, Yanacocha, tente de lui enlever son terrain,
où il veut installer une nouvelle mine,
«Conga». En août dernier, un tribunal
local a fini par déclarer Máxima et sa
famille coupables d’appropriation illégale de ce terrain. Une fois de plus,
la justice a donné raison à l’économie
plutôt qu’à la population locale sans
ressources.

Documents pareils