le syndrome premenstruel revisite en 2008

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le syndrome premenstruel revisite en 2008
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SYNDROME PREMENSTRUEL
C. QUEREUX (CHU Reims)
Le syndrome prémenstruel (SPM) est composé d'une myriade de symptomes
physiques et psychiques dont le seul repère est la survenue prémenstruelle. Il reste l'objet de
nombreuses études et controverses sur sa génèse et son abord thérapeutique. Il est à ce sujet
caricatural de voir les positions extrêmes d'un pays à l'autre, la large place faite aux habitudes
et croyances médicales et l'importance des effets "médecin et placebo" dans la prise en charge
de ce syndrome.
DEFINITION
Le syndrome prémenstruel est défini par un ensemble de symptômes physiques ou
neuropsychiques gênants, survenant régulièrement avant les règles et cédant avec celles-ci
pour ne revenir qu'au cycle suivant vers la même période.
Le caractère cyclique, sur plusieurs cycles, et la notion d'intervalle libre d'au moins
une semaine suivant les règles sont indispensables pour parler de syndrome prémenstruel et le
différencier d'autres syndromes à recrudescence prémenstruelle.
HISTORIQUE
- Hippocrate déjà en décrit la symptomatologie l'attribuant "à l'agitation du sang cherchant à
s'échapper de l'utérus".
- Ce n'est qu'en 1931 qu'un endocrinologue new-yorkais, Robert FRANCK décrit ce syndrome
sous le nom de tension prémenstruelle suggérant déjà l'existence de plusieurs syndromes et
séparant deux groupes principaux de symptômes : les troubles physiques et les troubles
psychocomportementaux.
- K. DALTON introduit en 1953 la notion de syndrome prémenstruel trouvant trop restrictif le
terme de tension prémenstruelle ; c'est elle qui insistera sur les troubles comportementaux de
deuxième phase de cycle et sur leurs relations possibles avec la criminalité, le SPM étant
même en 1981 en Grande-Bretagne reconnu comme circonstance atténuante dans deux
affaires de meurtre.
- HALBREICH et ENDICOTT en 1982 propose l'expression "changement prémenstruel".
- Enfin, en 1987 l'American Psychiatric Association définit le trouble dysphorique de la
phase lutéale tardive.
EPIDEMIOLOGIE
* Fréquence :
- Chiffrer exactement la fréquence est difficile pour plusieurs raisons :
. le caractère très subjectif des symptômes
. la variabilité des critères retenus d'une étude à l'autre
. l'intrication des symptômes prémenstruels et menstruels.
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- Ceci explique la grande dispersion de fréquence selon les enquêtes de 25 à 92 %. On peut
néanmoins penser que :
. la plupart des femmes ont l'expérience d'un SPM à un moment de leur existence.
. 20 à 40 % des femmes en ressentent une certaine gêne psychologique et/ou physique les
amenant à consulter.
. un peu moins de 10 % des femmes éprouvent une forme sévère dont les symptômes sont
remarqués par l'entourage immédiat (conjoint, enfant) ou socio-professionnel gênant la
relation professionnelle, affective ou familiale.
* Histoire naturelle :
Contrairement à une idée reçue le SPM peut exister dès les premières règles et semble affecter
au moins 30 % des adolescentes.
Il existe une demande plus forte de soins au-delà de 40 ans, peut être parce que le SPM y est
plus long à chaque cycle mais ce n'est pas une preuve de corrélation positive ; de fait, la
majorité des études sont en faveur d'une corrélation indépendante entre l'âge et la sévérité des
symptômes.
Les variations dans le temps sont en fait fréquentes, liées à des événements sociaux ou à des
modifications menstruelles. Les signes disparaissent après la ménopause mais peuvent
réapparaître sous traitement hormonal substitutif.
* Facteurs de risques :
. Divers auteurs ont noté l'association fréquente du SPM avec des antécédents de dépression
du post-partum, consommation d'alcool excessive, polymédicalisation, toxémie gravidique ...
. Beaucoup d'autres éléments sont sans liaison avec le SPM, comme l'âge des premières
règles, le statut marital, le tabac ou la parité.
. S'il n'y a pas de profil type de patientes à risque de SPM, on peut néanmoins souvent
remarquer que les femmes ont plutôt un haut niveau socio-économique et sont pour certaines
d'entres-elles instables sur le plan psycho-affectif.
. Enfin, certains désordres psychiatriques ont été rattachés au SPM et comprennent des
éléments cycliques ; il en est ainsi de certaines manifestations névrotiques ou psychotiques
pouvant s'exacerber en période prémenstruelle.
SYMPTOMATOLOGIE
"La nébuleuse", "Le syndrome aux 150 signes", "A chacun son syndrome"
Les SPM se caractérisent par une grande variabilité des symptômes en nombre, nature,
densité et durée, d'une femme à l'autre et souvent d'un cycle à l'autre encore que ce sont
presque toujours les mêmes symptômes qui sont régulièrement cités. Plus de 150 signes ont
été répertoriés ce que l'on peut schématiquement diviser en symptômes physiques et neuropsychiques.
1 - Les symptômes physiques ou somatiques
* Les signes physiques sont dominés par les manifestations congestives et oedémateuses
pouvant toucher différents territoires.
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- Les seins sont l'objet d'une tension douloureuse et souvent d'une augmentation de volume
ainsi que d'une hyperesthésie de contact rendant le palper très désagréable. Cette mastodynie
survenant plus de 4 jours avant les règles et cédant avec elle est le plus commun des
symptômes pour 60 à 80 % des patientes ; elle prédomine en supéro-externe et peut s'associer
variablement à des nodules douloureux isolés ou en placards ainsi qu'à une vascularisation
superficielle prolongée.
- La sphère abdomino-pelvienne est souvent concernée avec sensation de ballonnement
abdominal et un authentique accroissement du tour de taille. Il peut s'y associer une sensation
de pesanteur.
- Les extrémités : la face avec notamment un aspect bouffi des paupières ;les doigts qui
peuvent être boudinés ; et les chevilles volontiers enflées conservant la marque des chaussures
le soir.
Il n'est pas rare qu'il existe une prise de poids mais celle-ci reste modérée bien que surestimée
par les patientes impressionnées par les oedèmes et le gonflement. Parfois, l'importance de la
prise de poids, > à 4 kg et les oedèmes en deuxième phase de cycle peuvent faire discuter un
authentique syndrome des oedèmes cycliques idiopathiques aux frontières de la néphrologie.
Les troubles veineux participent largement aux manifestations congestives
responsables de jambes lourdes, sensibilité cyclique des varices voire poussées
hémorroïdaires.
* De nombreux autres signes peuvent exister susceptibles d'erreurs diagnostiques quand ils
sont isolés ce qui est rarement le cas.
- Digestifs : diarrhée, constipation, nausées, troubles du comportement alimentaire (boulimie
d'aliment sucré).
- Neurologiques : vertiges, épilepsie et surtout céphalées pré-menstruelles ou aggravation
migraineuse pré-menstruelle ; à la différence des céphalées cataméniales dûes à une chute de
l'estradiolémie, elles disparaissent avec la survenue des règles.
- Cutanéomuqueux : acné, séborrhée, urticaire, mycose vaginale, allergie ...
- Urinaires : cystite, pollakiurie, I.U.E. ...
- Cardiaques : palpitations.
2 - Les signes neuropsychiques
L'autre volet caractéristique du SPM est constitué par les manifestations psychiques
également très variables allant de banals changements d'humeur aux troubles
psychocomportementaux graves.
* Les troubles de l'humeur sont les plus fréquentes :
- La plupart des femmes observent de discrètes variations de l'humeur au cours de leur cycle
et on remarque que c'est en période péri-ovulatoire que sont maximales les sensations de bienêtre. A l'inverse, anxiété et agressivité augmentent jusqu'aux règles ; la majorité des femmes
connaît et maîtrise ces fluctuations.
- Quand les troubles de l'humeur sont exagérés et gênants, leur mode d'expression est variable
. le plus fréquent est la nervosité, l'irritabilité voire l'agressivité avec intolérance, impatience
et recherche de polémiques.
. les manifestations dépressives sont également fréquentes avec pessimisme, tristesse, pleurs,
idées noires.
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. méritent également mention la labilité émotionnelle avec émotivité exagérée et sautes
d'humeur ainsi que la fatigabilité, le manque d'énergie et les difficultés de concentration.
On comprend aisément que la vie sociale puisse être perturbée avec apparition de difficultés
relationnelles, professionnelles et affectives.
* Les troubles comportementaux graves :
Ils se situent à la frontière du SPM car il s'agit en fait de pathologie psychiatrique à
recrudescence ou à déstabilisation pré-menstruelle.
- Les troubles psychiatriques : Le cycle intervient dans la pathologie psychiatrique et la
période périmenstruelle est propice à la réapparition de troubles ou à des épisodes aigus ce
dont témoigne l'augmentation des hospitalisations d'urgence en milieu psychiatrique et celle
des tentatives de suicide à recrudescence prémenstruelle dans plusieurs études.
- Le comportement social : La période prémenstruelle a été incriminée dans les conflits
conjugaux, les sévices à enfants, l'absentéisme au travail ou la survenue d'accident, du travail,
domestique ou de la voie publique.
- Criminalité : Même s'il est vrai que la justice britannique a officialisé en 1981 le rôle du
SPM en accordant des circonstances atténuantes dans deux tentatives de meurtre perpétrées en
deuxième phase de cycle, il apparait en fait à la plupart des auteurs simplement possible une
recrudescence prémenstruelle de passage à actes délictueux voire criminels concernant des
femmes prédisposées à ce type de comportement agressif ou violent.
LE DIAGNOSTIC
Le diagnostic de SPM est un diagnostic d'écoute et d'interrogatoire, le critère
majeur de diagnostic positif reste le caractère rythmé par le cycle.
- Aucune exploration n'est nécessaire ; toutefois, une courbe thermique voire des dosages
hormonaux peuvent s'avérer nécessaire pour confirmer une possible dysovulation et la courbe
de poids peut être utile pour objectiver les variations pondérales alléguées par la patiente.
- Le plus instructif, en cas de doute ou d'imprécisions est très certainement l'auto-évaluation
prospective par questionnaire quotidiennement rempli par la patiente (selon le modèle de J.
BELAISCH et de A. TAMBORINI). C'est le meilleur moyen de connaître la date d'apparition dans
le cycle et ainsi d'éliminer certains faux SPM ; c'est aussi très utile pour apprécier au mieux
les composantes physiques et/ou psychiques et donc guider les prescriptions thérapeutiques.
APPROCHE THERAPEUTIQUE
A - Les bases physiopathologiques
Le syndrome prémenstruel pose un irritant problème de physiopathologie. de
nombreux facteurs ont été évoqué comme jouant un rôle, cependant aucun n'a une action
réellement prouvée et aucun ne peut à lui seul expliquer tous les troubles constatés.
* La théorie hormonale :
Il existe une intrication évidente entre la survenue des symptômes et le déroulement
du cycle. Malgré cela, il est difficile de mettre en évidence des anomalies hormonales du
cycle même en cas de SPM sévère.
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L'hypothèse selon laquelle les troubles seraient liés à une anomalie de sécrétion des
estrogènes ou de la progestérone ou de leur rapport est pourtant séduisante :
. L'estradiol joue un rôle sur la rétention hydrosodée et la perméabilité capillaire tout en
stimulant l'aldostérone. La progestérone, à l'inverse, à un effet natriurétique.
. De la même façon, au niveau neuropsychique, l'estradiol favorise l'excitabilité cérébrale
alors que la progestérone à une action sédative.
On imagine bien qu'un déséquilibre de leur rapport peut provoquer oedème, gonflement et
congestion ainsi que certains troubles de l'humeur.
Certes, dans certaines études (HAMMÄRBACK) il existe une corrélation entre un taux
élevé d'estradiol et un score élevé de dépression. Malheureusement, dans la plupart des
études, les taux hormonaux périphériques sont normaux et le résultat des traitements
supplétifs à base de progestérone très variable.
Il parait dès lors plausible que le rôle, pourtant capital des hormones ovariennes,
s'effectue par l'action centrale sur les concentrations cérébrales des neurotransmetteurs ainsi
que sur la régulation des substances opioïdes comme les endorphines.
* Les neurotransmetteurs centraux :
Une anomalie de leur taux et de leur régulation parait l'hypothèse actuellement la
plus séduisante.
Plusieurs études mettent en évidence une baisse du taux de beta-endorphine dans la
deuxième phase du cycle chez les patientes présentant un SPM.
Les hormones ovariennes agissent sur le métabolisme de ces substances opioïdes et
sur celui des catécholamines dont les variations cycliques pourraient expliquer une partie des
troubles présentés, neuropsychiques en particulier, par un mécanisme proche de celui du
sevrage chez les toxicomanes.
Les femmes atteintes de SPM auraient une anomalie de la sensibilité des
neurotransmetteurs aux hormones ovariennes, peut être majorée par des facteurs
psychiques permanents.
* Facteurs nutritionnels, prostaglandines :
- La pyridoxine (vitamine B6) intervient dans le métabolisme de certains neurotransmetteurs
ainsi une carence pourrait favoriser un déséquilibre de la dopamine, de la sérotonine ou
noradrénaline.
- Les prostaglandines jouent un rôle dans la production des catécholamines et betaendorphines ainsi que sur la perméabilité capillaire. Certains auteurs ont montré une
diminution permanente des taux sériques de PGE1 en cas de SPM par rapport à des groupes
témoins, d'autres une augmentation de concentration de PGE2 et PGF2 alpha ; une carence en
acide gammalinoléique, précurseur de PGE est également suspectée. L'effet favorable de
l'apport d'acide gammalinoléique mais aussi d'antiprostaglandines rend perplexe encore que
cette apparente contradiction pourrait s'expliquer par des variations locales de l'équilibre
respectif des prostaglandines et de leurs effets.
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* Autres facteurs : ils sont nombreux
- Socio-culturel :
RUBLE pense que les symptômes dont se plaignent les femmes sont influencés par leur
éducation et leur croyance vis-à-vis du cycle. Il a ainsi obtenu l'apparition de symptômes
physiques chez des femmes à qui il avait fait croire qu'elles étaient en période prémenstruelle.
- Génétiques :
Dans une étude de MAGOS en Finlande, la prévalence du SPM est de 70 % chez les jeunes
femmes de mères souffrant de SPM. Par ailleurs, chez des jumelles l'apparition de SPM se fait
avec une égale fréquence si elles sont homozygotes et une fréquence très différente dans le
cas contraire. Ces notions font penser à la possibilité d'un facteur génétique prédisposant.
- Citons encore le rôle du psychisme, de l'hypoglycémie, de troubles hydroélectrolytiques ...
Il apparait ainsi que le SPM est probablement un syndrome multifactoriel ce dont il faut tenir
le plus grand compte dans l'abord thérapeutique.
B - Stratégie thérapeutique du syndrome prémenstruel
Les très nombreuses hypothèses physiopathologiques expliquent les multiples essais
thérapeutiques rapportés dans la littérature. Du fait de 40 à 80 % de bons résultats avec le
placebo, seules les études comparatives ont un réel intérêt dans le SPM.
1 - Les traitements hormonaux
Ils ont deux possibilités d'actions :
. Corriger un trouble hormonal (non démontré) en supplémentant. C'est la base de la
progestérone et des progestatifs.
. Supprimer le cycle ovarien et avec lui les perturbations hormonales supposées. C'est la place
du danazol et des analogues du LH-RH.
* La progestérone naturelle reste très prescrite en France dans cette indication alors que la
majorité des travaux l'ayant étudiée n'a pas montré d'efficacité supérieure à celle du placebo.
Elle est prescrite par différentes voies, 10 à 15 jours par mois avec peu d'effets délétères.
L'étude de DENNERSTEIN avec 300 mg de progestérone micronisée per os a conclu à un effet
supérieur au placebo sur l'anxiété , la dépression, le gonflement et la rétention d'eau. Une
autre de MAGILL avec 400 mg de progestérone en double aveugle contre placebo chez 281
femmes montre un effet significatif après deux mois de traitement.
Les taux plasmatiques de progestérone obtenus après traitement sont variables selon le poids,
la taille et l'alimentation des femmes ce qui pourrait expliquer les résultats contradictoires des
études. HOLTON insiste sur l'effet de la progestérone liée au métabolisme glucidique ainsi
l'hypoglycémie engendre un excès d'adrénaline responsable d'une anomalie de la liaison
récepteur-progestérone ; ceci peut selon lui être corrigé par des collations toutes les 3 heures
afin d'améliorer l'impact de la progestérone dans le SPM.
* Les progestatifs prescrits pendant la phase lutéale révèlent plus constamment une
efficacité. La substance la mieux étudiée est la dydrogestérone à 20 mg par jour du 12ème au
26e jour du cycle. Elle améliore les troubles du SPM de manière significativement supérieure
au placebo. L'acétate de médroxyprogestérone ainsi que l'acétate de nomegestrol ont
également obtenus des résultats positifs au cours de travaux américain ou français.
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* Les estrogènes naturels ont été évalués en association avec la norethistérone au cours de
différentes études. Après les premiers mois de traitement, les données sont en faveur d'une
efficacité à long terme plus importante et plus durable que le placebo. Avec la pilule
estroprogestative les résultats sont variables et controversés. Il n'existe pas d'étude contrôlée
récente. Il semble que la persistance du syndrome prémenstruel sous pilule soit possible mais
il est vraisemblablement moins durable et moins important. Du fait de leur commodité de
prescription, malgré cette efficacité inconstante, les estroprogestatifs représentent pour de
nombreux auteurs un traitement de première intention.
* Le danazol (Danatrol*) est un produit significativement efficace dans plusieurs études en
double aveugle sur la dépression, l'irritabilité, l'anxiété, l'apathie et les mastodynies. La
posologie la mieux adaptée est de 200 mg, dose particulièrement efficace quand elle
s'accompagne d'une anovulation (WATTS).
* Les analogues du LH-RH proposés dans les SPM sévères agissent par castration médicale
et ont suscité de nombreuses études dont les plus récentes sont celles de HELVACIOGLU et de
BROWN, toutes deux avec l'acétate de leuprolide en administration retard. Versus placebo, ce
produit s'est montré plus efficace sur l'ensemble des symptômes en particulier sur l'irritabilité,
les changements d'humeur, la tension mammaire, par contre les sujets présentant une
dépression menstruelle sévère n'ont pas été améliorés.
Afin de pallier les effets secondaires de la castration réalisée (ostéoporose, perte de l'effet
cardioprotecteur, des estrogènes endogènes) on a tenté de coupler un analogue
estroprogestatif (add back) mais cette association semble diminuer l'action bénéfique de
l'analogue de LH-RH sur le SPM.
* La mifépristone (Mifégyne*) par son mode d'action rendait possible son intérêt dans le
SPM mais les travaux n'ont pas montré de modification de l'intensité des symptômes dans une
utilisation 7 jours après le pic de LH (SCHMIDT).
2 - Les psychotropes
Leur utilisation est importante dans les pays anglo-saxons dont sont originaires la
plupart des auteurs qui les ont étudiés. Les psychotropes agissent sur la composante psychique
du syndrome par impact sur les neurotransmetteurs, le GABA et la sérotonine notamment.
* Parmi les gabaergiques ont été particulièrement utilisés :
- Alprazolam (Xanax*) 0,25 - 0,50 Mg. Ce potentialisateur des récepteurs à l'acide gamaamino-butyrique (Gaba) a été essayé dans plusieurs études contrôlées avec une efficacité
certaine sur les symptômes neuropsychiques, l'action étant moins intéressante sur le
gonflement et les crampes. La plus récente étude est celle de FREEMAN comparant l'action de
l'alprazolam 0,25 mg 4 fois par jour à celle du placebo et à celle de la progestérone à des
doses de 300 mg 4 fois par jour. L'étude ne montre pas de différence entre placebo et
progestérone alors que l'aprazolam est significativement efficace dès le 2ème mois
d'utilisation.
- Valproate (Dépakine*) a été testé à des posologies de 125 à 500 mg par jour avec un intérêt
pour son effet sur les neurotransmetteurs et l'augmentation du taux de gaba qu'il entraine.
* Sérotoninergique :
Un déficit en sérotonine semble impliqué dans la genèse de l'irritabilité et de la dépression.
Les médicaments de la classe des inhibiteurs de recapture de la sérotonine sont très utilisés
outre atlantique.
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- Fluoxétine (Prozac*) : dans plusieurs études contrôlées en double aveugle contre placebo 20
mg par jour de fluoxétine ont déterminé des rémissions marquées, les résultats étant
particulièrement notables sur les troubles du comportement.
- Funfluramine (Pondéral*) : ce médicament de l'obésité améliore mieux la dépression et
l'anxiété que placebo et a par ailleurs une action logique sur la consommation calorique de
glucides et de lipides.
- Buspirone (Buspar*) a un effet intéressant sur l'irritabilité, sur la fatigue et sur le
comportement social.
- Clomipramine (Anafranil*) réduit particulièrement l'irritabilité et la dépression.
* Bromocriptine (Parlodel*) : cet agoniste dopaminergique a été l'objet de 7 études
contrôlées à 5 mg par jour en phase lutéale ; trois de ces études montrent une amélioration
supérieure au placebo, principalement de la situation mammaire.
3 - Autres traitements
* Les thérapeutiques nutritionnelles sont très prisées en particulier aux Etats Unis :
- Un certain nombre de mesures hygiéno-diététiques ont été préconisées (régime riche en
fibre, pauvre en sucres rapides et en acide gras, restriction saline) mais leur justification est
empirique. Inversement, l'huile d'onagre qui contient de l'acide cislinoléique et
gamalinoléique, composés entrant dans la synthèse des PGE1 a été utilisée avec un effet
supérieur au placebo mais variable selon les études (PUOLAKKA, HORROBIN, COLLINS)
- La vitamine B6, par son action sur les neurotransmetteurs a montré une action supérieure au
placebo dans des études anciennes non confirmées par des études plus récentes.
- Vitamines et sels minéraux ont bénéficiés de quelques études montrant une supériorité par
rapport au placebo. Ils sont très utilisés aux U.S.A.
* Les antiprostaglandines du fait des variations de PGF2 alpha et PGE2 dans le SPM ont été
essayés en particulier l'acide méfénamique (Ponstyl*) ce qui améliore psychisme, douleurs
abdominales et céphalées mais reste d'action discutée sur les seins et le poids.
* Les diurétiques : seule la spironolactone, agoniste de l'aldostérone a un intérêt sur l'humeur
et la prise de poids (O'BRIEN) ainsi que sur le gonflement (VELLACOTT)
* Les veinotoniques et vasculoprotecteurs :
Les perturbations du métabolisme hydrosodé et de la perméabilité capillaire rendent
logiques les essais thérapeutiques avec les veinotoniques. Parmi les études, il faut citer :
. celle de TAMBORINI multicentrique, double aveugle contre placebo avec l'extrait standardisé
de ginkobiloba ; c'est sur les symptômes congestifs et particulièrement mammaires que
l'amélioration est significativement supérieure au placebo avec 160 mg de produit du 16e jour
du cycle au 5e jour du suivant.
. COHEN avec des oligomères procyanidoliques (Endotélon*) trouve des résultats équivalents
à Surgestone* sur la symptomatologie rétentionnelle.
. CHARLES montre une action supérieure de la troxérutine (Veinamitol*) 2 g par jour par
rapport à 300 mg de progestérone sur lourdeur, gonflement et score de congestion.
. D'autres études ont été conduites avec d'autres produits et des résultats similaires (Daflon*)...
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EN PRATIQUE
La multitude de possibilités thérapeutiques liées à la diversité des théories
pathogéniques du SPM explique qu'il existe parmi les prescripteurs des attitudes fort
divergentes. Le plus frappant est la différence d'approche entre les anglo-saxons plutôt
partisans des psychotropes ou des analogues du LHRH et les auteurs français tenant des
hormones, progestatives et des phlébotoniques.
Il est important de savoir ne pas se montrer plus agressif que le SPM qui ne l'est
guère et de moduler sa réponse à l'intensité et à la gêne, sans perdre de vue des effets
secondaires possibles de nombreux traitements qu'ils soient hormonaux (prise de poids,
bouffées de chaleur ...), psychotropes (la liste des effets indésirables est impressionnante) ou
autres (neuropathies sensitives de la vitamine B6 ...).
Il faut sûrement commencer par des propositions simples :
- informations sur la genèse du SPM, sa liaison au stress.
- élimination des "toxiques sociaux" de l'alimentation (caféine et chocolat) réduction de la
consommation d'alcool qui affecte l'humeur et de l'absorption de sodium qui peut jouer un
rôle dans la rétention hydrique, privilégier les sucres lents pour éviter les hypoglycémies
auxquelles ces sujets sont très sensibles.
Si le traitement s'avère nécessaire :
- La progestérone parait intéressante sur la composante congestive du fait de son action
natriurétique ainsi que sur la perméabilité capillaire. La faible biodisponibilité, les variations
individuelles et les effets secondaires dominés par somnolence et vertiges font souvent
préférer les progestatifs bien qu'ils n'aient pas l'action natriurétique de la progestérone. Les
dérivés de la 17 OHP et les nor pregnanes sont très largement utilisés ... avec des fortunes
diverses.
- Les veinotoniques trouvent une légitime préférence quand oedèmes et douleurs des seins et
des membres dominent la clinique.
- Le danazol, tout comme la bromocriptine, peuvent être intéressants sur un temps court
lorsque la symptomatologie mammaire est prédominante.
- Les analogues, eu égard à leurs effets secondaires, même avec une add back thérapie ne
paraissent légitimes que dans les formes majeures du SPM où la note congestive et
douloureuse reste dominante.
- Les psychotropes ont trop d'effets secondaires pour être utilisés en première intention mais
doivent être discutés en cas de composante psychique dominante, en particulier après échec
des traitements hormonaux ou vasculotropes.
CONCLUSION
Seule une écoute et une enquête basée sur un calendrier d'auto-évaluation permettent un
diagnostic précis de la forme clinique du SPM qui autorisera une prise en charge de qualité
privilégiant les traitements hormonaux vasculotropes lorsque la congestion domine le tableau
et les traitements psychotropes dès lors que les troubles psychiques sont sur le devant de la
scène.
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BIBLIOGRAPHIE
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QUEREUX C., TAMBORINI A.
Reproduction humaine et hormones 1995, N° spécial 7, 58-63
- Le syndrome prémenstruel en 1996
Gynécologie Obstétrique pratique - Hors série mars 1996
- Le syndrome prémenstruel
GUILLERD X., MERCERON R.E., CORDRAY J.P., NYS P.
Concours Médical - 27.05.1995, 1635-1638
- Les syndromes prémenstruels.
Reproduction Humaine et Hormones - 1995, N° spécial 7
- Syndrome prémenstruel
TAMBORINI A., TAURELLE
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- Progesterone or not progesterone
COHEN J.
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