S. Abdel Samad – Soif nocturne

Transcription

S. Abdel Samad – Soif nocturne
‫ﻗــﺴــﻢ ﺗـﺪﺭﻳــﺲ‬
AMBASSADE DE FRANCE
EN
REPUBLIQUE ARABE D’EGYPTE
DEAC
‫ﺍﻟﻠﻐﺔ ﺍﻟﻌﺮﺑﻴ ّﺔ ﺍﻟﻤﻌﺎﺻﺮﺓ‬
n° MEA2108315
ATELIER DE TRADUCTION
DU DEPARTEMENT D’ENSEIGNEMENT DE L’ARABE CONTEMPORAIN
Session 2013-2014
Supervision : Marie-Hélène AVRIL – HILAL, directrice du DEAC
Soif nocturne – Sharif ‘Abd al-Samad
Le festival SOS présente des groupes appartenant à des courants musicaux différents
allant du rock au rap. Les conditions posées par les organisateurs, c’est que les
groupes présentent des morceaux originaux et qu’ils participent à des jam sessions
après leur concert pour en quelque sorte commencer à décoder et à recombiner les
possibilités infinies offertes par l’ADN de la musique, en mélangeant le pop au reggae
et le rock au rap. Les organisateurs considéraient cela comme le summum de la
réussite, du fait des inimitiés qui divisaient ces différents courants.
Il salua les musiciens qui étaient dans le jardin. C’était un petit monde où tout le
monde connaissait tout le monde, que réunissaient des amitiés et des inimitiés, et
pour certains, les groupes dans lequel ils jouaient ensemble et des projets communs.
Tewfiq passa le micro parmi les jeunes dispersés sur le gazon pour tester le son,
suivi par l’ingénieur du son, qui était en train de brancher les câbles à la table de
mixage en se plaignant parce que le groupe avec lequel il travaillait depuis deux
jours ne lui avait pas versé la somme convenue.
- Tu n’avais qu’à tout débrancher en plein concert, lui dit Tewfiq en lui rendant le
micro.
- Farouq n’est pas encore là ?
- Il est avec sa fille.
Il hocha la tête. Aujourd’hui, c’est vendredi, c’est le jour où il a sa garde depuis qu’il
s’est séparé de sa mère.
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- Des fois, j’ai l’impression que c’est son seul vrai moment de bonheur dans la vie.
- C’est vrai, ça et la musique.
Tout ce qu’avait à leur offrir la scène musicale en Egypte, c’était de se faire plaisir et
de faire plaisir à leur public. Si ça ne leur convenait pas, ils n’avaient qu’à plier
bagage et faire autre chose.
Tewfiq se replongea dans sa réflexion, pour savoir si sa décision d’émigrer, qu’il avait
annoncée au studio, était sérieuse ou si elle était due à un instant de désespoir qui
passerait aussi vite qu’il était venu.
- Comment ça va, les mecs ?
Loubna leur fit ce grand sourire dont elle avait la spécialité, qui laissait croire à celui
à qui elle le faisait qu’il était le seul à lui plaire. Elle avait les cheveux mouillés et
portait un top bleu à fines bretelles et un jean étroit. Ses orteils vernis rouge foncé
dépassaient de sandales à semelles de bois dans lesquels ses pieds s’emboîtaient
parfaitement.
Elle portait un sac qui reposait sur sa hanche droite et dont la bandoulière passait
entre ses seins, mettant en valeur sa poitrine.
- Mon Dieu, protégez-nous !, dit Tewfiq en guise de bienvenue.
Elle fit un sourire aimable. Elle jouait avec une bouteille d’eau minérale qu’elle tenait
à la main, et quand elle la pointa vers lui, l’eau remplit le goulot.
Elle le regarda, s’attendant à ce que lui aussi lui fasse un compliment, et il se
contenta de lui sourire. Elle sortit un paquet de Kent Light de son sac – elle ne fumait
que ça – et lui demanda, l’air indifférent :
- Vous faites quoi là ?
- On attend que la lune se lève, lui répond Tewfiq en battant des paupières.
- Ça alors ! Et si je n’étais pas venue, qu’est-ce que vous auriez fait ?
Cette fois-ci, c’est lui qui répondit :
- Je t’aurais dédicacé toutes les chansons en ton absence.
- Très drôle, commenta Tewfiq.
Elle lui fit le reproche qu’elle lui faisait toujours, sans qu’on sache si c’était sérieux ou
pas :
- Tu ne m’as jamais dédicacé de chansons !
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Elle remit le paquet de cigarette dans son sac, souffla la fumée dans sa direction, et,
quand il agita la main pour la chasser, elle sourit:
- Bon, tu vas nous chanter quoi aujourd’hui ?, lui demanda-t-elle.
- C’est vrai, tu vas chanter quoi, Bambino ? répéta Tewfiq d’un ton langoureux.
- Je vais chanter I hate you so much right now.
Elle se mit à rire, découvrant ses dents blanches et régulières :
- Tu es trop belle !, cria Tewfiq.
- C’est ça la chanson que tu voulais me dédicacer ?, lui demanda-t-elle en se
tournant vers lui. Ton copain n’as aucun goût, dit-elle en s’adressant à Tewfiq.
- C’est un plouc, il a toujours été comme ça !
- Tewfiq, qu’est-ce que t’attends pour lui apprendre comment il faut se comporter
avec le sexe faible !
- Regarde, tu vas voir comment il faut s’y prendre !
Il lui prit la main et y déposa un baiser. Très émue, elle mit la main sur le cœur, et
sourit, l’air heureux :
- C’est trop, je n’en peux plus !
- Tout ce que tu sais faire, c’est m’enfoncer !, dit-il l’air farouche.
- Tu ne me laisse même pas t’embrasser ! Baise les mains de ta Dame, allez !
- Non, je ne me laisse pas embrasser par n’importe qui !
- Tewfiq t’as pas dit qu’il n’allait pas très bien en ce moment ?, marmonna-t-il d’un
ton vindicatif.
- Qu’est-ce qu’il y a, Tewfiq ? Khaled te pourrit la vie ?
- Non, mais pourquoi on n’arrête pas de se disputer ?
- Pose-toi la question !
- C’est pour ça qu’on peut pas avoir de copains !
- Ça fait un moment que Khaled a des problèmes avec son SPM1 !
- Khaled a toujours eu des problèmes avec son SPM.
Il commençait à trouvait leurs blagues pénibles et il voulait s’isoler avant le concert.
- Où tu vas ?
- T’étais pas en train de parler de SPM ? Je vais changer de tampon.
- T’es dégueulasse !
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syndrome pré-menstruel
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