Pratiques et recommandation sur la préparation, la mise en service
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Pratiques et recommandation sur la préparation, la mise en service
Pratiques et recommandation sur la préparation, la mise en service et la conservation de fûts neufs et usagés Nicolas Vivas Tonnellerie Demptos détaché au Centre d Etude Structurale et d Analyse des Molécules Organiques, Université Bordeaux I, 351 cours de la Libération - 33405 Talence Introduction L élevage en barriques représente aujourd hui une étape importante de la production des vins de qualité. Les avantages de cette pratique sont relativement bien connus ; ils concernent la clarification, la décarbonication du vin, l assouplissement des tanins, la stabilisation et l assombrissement de la couleur, l apport d arômes complémentaires à ceux du raisin, ainsi que la stabilisation de la structure colloïdale des vins (Moutounet et al., 1989 ; Vivas et al., 1991 ; Vivas et al., 1992 ; Chatonnet et al., 1992 ; Vivas et Glories, 1993 et 1996 ; Vivas, 1997 ; Saucier, 1997). Sur le plan pratique, il reste de nombreuses questions récurrentes auxquelles sont régulièrement confrontés les nologues et les maîtres de chais ou responsables techniques de domaines. Ce sont principalement des interrogations sur la façon la plus judicieuse de mettre en service des barriques neuves et d utiliser des barriques usagées. Dans mon Manuel de tonnellerie à l usage des utilisateurs de futaille on retrouve quelques éléments de réponse. Mais ici nous présentons plus longuement l état des expérimentations que nous avons réalisées sur le sujet ainsi que les pratiques que nous recommandons et qui ont fait leur preuve dans différents domaines tant en France qu à l étranger. Les questions sont divisées en deux groupes (figure 1) : - Les barriques neuves : d abord il convient de juger de la qualité et du respect du cahier des charges établi lors de la commande ; ensuite, les principaux problèmes restent en relation avec la conservation des dimensions de barriques vides en atmosphère plus ou moins sèche, de pratiques de nettoyage d intensité variable pour éliminer des débris, de désinfecter éventuellement les fûts afin de se débarrasser de contaminants microbiens hypothétiques. - Les barriques usagées : La problématique est directement liée aux conditions de préparation pour une conservation satisfaisante, puis les modes de traitement des fûts avant leur réutilisation. En outre, il convient de contrôler la contamination potentielle des fûts en relation des micro-organismes d altération et l atmosphère des lieux de stockage. Les questions les plus souvent posées sont : comment conserver en l état des fûts neufs ? Comment les traiter si ils ont séché ? Quelles sont les pratiques de préparation avant entonnage ? Pour des fûts usagés, on retrouve systématiquement le souci de régénération pour bénéficier encore des apports du bois au vin. Egalement une importante préoccupation est de savoir comment préparer, conserver et réutiliser un vieux fût ? Eventuellement comment récupérer une barrique avec des odeurs de moisissure, d écurie, des notes acétiques et piquées très avancées et bien sûr contaminées par les dérivés chlorés (chlorophénols et chloroanisols) ? A tous ces problèmes, il existe des réponses souvent simples et appuyées sur des expérimentations renouvelées. Mais il reste que dans le domaine de l emploi des barriques ou de tout autre futaille, la simplicité et le bon sens restent la règle d or ... BARRIQUES NEUVES Contrôle lors de la réception des fûts Lors de la réception des barriques il faut d abord s assurer que lors du transport elles n ont pas subi de dégâts importante. Ensuite, on observe l aspect général de la coque et, si possible, sur le peigne le grain, pour s assurer de l homogénéité des bois livrés. Je rappelle les grandes classes de grains correspondant à une classification par type et non par origine géographique : - Type Allier, grain très serré, cernes de 0,5 à 1 mm/an ; - Type Centre France, grain serré, cernes de 2 à 1 mm/an ; - Type Vosges, grain moyen, cernes de 3 à 2 mm/an ; - Type Limousin, grain grossier, cernes de plus de 4 mm/an. La couleur du bois notée sur la coque représente pour certain un élément qualitatif indéniable. Janin (1987) a étudié la couleur des bois et son intérêt forestier et industriel. L auteur conclut que la méthode constitue un outil précieux pour le classement et le tri des pièces de bois. Plus tard, il étudie dans un travail collaboratif la couleur du bois de chêne de tranche -plus proche des bois de chêne de tonnellerie- (Janin et al., 1990). Il s est avéré que si les bois présentent des qualités physiques et un aspect de surface satisfaisant, la couleur est alors un critère de distinction qualitatif indéniable et facile à évaluer. En tonnellerie, la couleur des douelles peut indiquer si le bois est issu du centre du merrain ou de sa périphérie. Les bois les plus sombres sont ceux prélevés dans la masse du bois à proximité de la moelle, alors que les plus clairs proviennent souvent des parties les plus proches de l aubier (figure 2). Cette singularité influence la composition chimique des bois. En particulier, les douelles les plus sombres sont aussi les moins riches en ellagitanins extractibles (figure 3). Un élément souvent considéré comme très important est la chauffe et son homogénéité. Couramment les contrôles sont réalisés, sur des lots de barriques réceptionnées, par observation de la couleur interne de la coque depuis le trou de bonde grâce à une petite lampe et un miroir incliné, fixés sur une barre. Afin de vérifier si la couleur pouvait être un bon indice de l intensité de chauffe nous avons pratiqué des mesures chromatiques sur la partie brûlée de la coque de différents fûts. Mais il apparaît que le bois possède une aptitude très variable à se colorer sous l effet du brûlage. Nos résultats ne permettent pas de classer les intensités de chauffe des bois en fonction de leur couleur (Vivas, 1998). Cependant on peut noter que la chauffe sur des douelles travaillées* donne des écarts * La face interne des douelles peut être soit évidée intérieurement soit utilisée directement. Dans le premier cas la surface des douelles noircie par le séchage est éliminée. de couleur plus faibles que sur des douelles brutes (figure 4). Pour obtenir une coloration uniforme de l intérieur de la coque il suffit de pratiquer, en fin de chauffe, pendant 5 ou 10 mn la pose d un fond métallique. L étouffement du feu provoque alors la production de fumée recouvrant d une fine couche de particules la paroi. Mais ce procédé ne permet pas de distinguer l intensité de chauffe. Pour contrôler la chauffe, une démarche originale s inspire d une des habitudes singulière des tonneliers. Généralement, lorsqu ils chauffent une barrique, ils se basent sur deux critères : la couleur interne de la coque, pour laquelle nous avons constaté qu il était difficile de l utiliser comme critère objectif de maîtrise de la chauffe et la température de surface de la partie externe de la coque évaluée avec la paume de la main ou la partie intérieure de l avant bras. Ce dernier geste nous paraît intéressant dans la mesure ou la chauffe agit par la somme de calories apportées à la masse du bois. L accumulation de chaleur aux différents stades de l opération conduit à des températures repères en surface. Le moyen le plus adéquat de saisir ces températures repères est de disposer de patchs thermosensibles (PTS) étalonnés pour le cintrage, les chauffes faibles, moyennes, moyennes plus et fortes, respectivement. Ce système a plusieurs avantages: il est bon marché et utilisable qu une fois, le passage aux températures repères se traduit par un changement définitif de couleurs du patch, les contrôle sont praticables en continu lors de la chauffe et non à posteriori comme pour la couleur, ils permettent d éliminer l aspect subjectif lié au tonnelier pratiquant la chauffe, enfin il assure, potentiellement, une bonne homogénéité dans les diverses classes de chauffe en prenant en compte l effet thermique et non la coloration interne de la coque. A partir de ces mesures répétées sur plusieurs cycles de chauffes à des dates différentes, nous avons composé un patch breveté. Il se colle sur une douelle à mi-hauteur et permet un contrôle rigoureux des intensités de chauffe. Aujourd hui la garantie de l origine des bois n a jamais été aussi importante ; en particulier avec l exploitation de nouveaux massifs forestiers des pays de l Europe de l est. Mais aucune méthode de contrôle n existe, c est pourquoi nous y travaillons très sérieusement pour s assurer d abord d un approvisionnement en bois sûr et ensuite donner au client l assurance que les barriques livrées correspondent bien à leur commande. Le cas particulier du dessèchement des fûts lors du transport et du stockage Jusqu'à une valeur correspondant au point de saturation des fibres, valeur proche de 30%, le bois conserve ses dimensions. Lorsqu'il sèche et que son taux d'humidité devient inférieur à 30%, le bois subit des variations tridimensionnelles (retrait du bois). Sur une série de bois de Q. robur et Q. petraea nous avons réalisé des mesures de rétractabilité au cours d'une phase de déshydratation lente à l'étuve (température, 50°C jusqu'à poids constant puis 100°C dans les mêmes conditions). Le retrait volumique total (Rv) est plus élevé pour Q. robur que pour Q. petraea. Des résultats obtenus par ailleurs, nous permettent de généraliser cette remarque: les bois à grains grossiers ont des Rv plus importants que les bois à grains serrés à très serrés. En partant des données obtenues, nous proposons une équation qui permet d'estimer le Rv des bois. Cette équation est utile pour prévoir les déformations du bois en cours de séchage et les risques d'apparition de fuites sur des barriques après un stockage dans des locaux trop secs. Avec: - e, l respectivement l'épaisseur et la largeur de la pièce de bois en mm, - h son humidité en % après déshydratation, - a son coefficient moyen de rétractabilité volumique en % par % d'humidité (a= 0,25 pour les bois à grains serrés types Allier; 0,35 pour des grains moyen types Vosges et 0,45 pour des grains grossiers types Limousin), le coefficient liés à l'anisotropie du retrait (en moyenne le rapport retrait radial / retrait tangentiel = 0,5), -Rv le retrait volumique total (retrait radial + retrait tangentiel) en %. On pose l'équation suivante : [l.(30-h) + (e.(30-h).a.) x ] Rv = 100 Le retrait volumique total Rv est en relation avec le grain du bois et par conséquent il est également lié à l'infradensité. On comprend aisément que plus la rétractabilité est élevée et plus l'infradensité est élevée; dans la mesure où, dans l'expression de ID, Po reste inchangé mais Vs diminue. Concrètement lorsque des fûts ont séché soit pendant le transport (surtout vrais à l export) ou lors du stockage avant utilisation en local trop sec, il est nécessaire de recourir à la réhydratation du bois. En fonction de l intensité du séchage on recommande : - Pour des fûts peu séchés, il n est pas utile de les mettre en eau, le vin lors de l entonnage suffira à donner aux pièces de bois leur forme ; - Pour des fûts dont les joints inter-douelles s écartent légèrement , alors il faut remplir le fût à moitié d eau chaude (40°C) et laisser imbiber 4 heures chaque coté. L entonnage est alors possible. Lorsque le séchage est plus sérieux, alors on renouvelle sur 2x4heures l opération ; - Pour des fûts très secs, alors il faut d abord procéder au gonflement des pièces de fond en mettant de l eau, sur le dessus des barriques posées fond au sol et en retournant après 4 à 8 heures selon l importance du séchage, d un coté puis de l autre. Après, il s agit de mettre en eau la coque, on rempli d eau le fût durant 1 à 2 jours. Les deux opérations peuvent être réalisées simultanément et l eau est éventuellement sulfitée à 0,5 ou 1 %. Préparation des fûts avant entonnage Sur des fûts neufs de qualité il est souvent inutile de pratiquer de nombreuses opérations de nettoyage qui n ont pour finalité que l élimination d une fraction soluble de constituants du bois. C est en quelque sorte perdre un peu des apports du bois au vin. Dans les eaux de rinçage à l eau chaude on retrouve souvent des traces de composés aromatiques ainsi que des quantités appréciables de tanins ellagiques. Si on pratique en outre une phase de stabulation de quelques jours avec de l eau sulfitée les eaux de rinçage s enrichissent alors sensiblement de composés boisés définitivement perdus. Nous recommandons alors, à l exception de problèmes particuliers comme le séchage important des barriques, de ne recourir qu à un simple rinçage à l eau froide, assurant l élimination des poussières et des petits éclats de bois, ensuite l entonnage devant être rapide. Dans ces conditions, on note par dégustation que les 2 à 3 premiers mois sont marqués par un boisé important, qui s atténue ensuite ; en fin d élevage les vins des barriques utilisées brutes (après un simple rinçage à l eau froide) sont généralement mieux notés que ceux provenant de barriques plus lourdement traitées (tableau 1). Il est utile de rappeler que, les tanins du bois participant aux phénomènes oxydatifs des vins, leur présence pour des élevage long reste indispensable. Lorsque l on recherche d avantage d aromatisations rapides alors, il est plus intéressant d épuiser le bois partiellement en composés phénoliques. Sur de courte durée d élevage, des barriques fortement lessivées et dégorgées provoquent des prises de boisé plus lentes par rapport à de simples rinçages. Cependant, le coût inhérent à l emploi de fûts, justifierait de recourir à l assemblage de lots élevés en barriques et élevés en cuves pour doser le boisage qui, dans ce cas, est principalement un problème aromatique. Il existe des cas où le recours au dégorgeage et au rinçage intense des barriques est utile et même souhaitable. C est le cas de barriques douteuses marquées par des odeurs de vert et de sève. Pour repérer ces caractères, il suffit de collecter quelques copeaux de la coque et de les faire infuser 2 heures dans un verre de vin ; la dégustation permettra rapidement de juger de la qualité de l affinage des bois. Si le défaut est avéré, on procédera avantageusement à un rinçage de 15 mn du fût à l eau chaude (60-70°C), suivi d un remplissage de la barrique avec de l eau très chaude, sulfitée, le vidage après 48 heures, passage à la vapeur, avec une pression modérée (pour limiter le défibrage interne de la coque) et rinçage 15 mn (60-70°C). Dans ces conditions extrêmes, la prise de boisé reste minime et les caractères verts et séveux sont sensiblement gommés. On emploie souvent du SO2 pour traiter des barriques neuves. Or, dans la masse du bois, après brûlage, très peu de micro-organismes viables restent, ils sont en outre peu adaptés au milieu vin (inhibition par l alcool, très sensible au SO2, et milieu liquide en microaérobiose). Au cours des opérations de tonnellerie, en particulier lors de la chauffe, le bois est susceptible de subir des tensions plus ou moins fortes à l origine de déformations ou de ruptures de fibres. Un des problèmes pouvant préoccuper les utilisateurs de barriques concerne les cloques et leur abondance. Lors de la chauffe, l intérieur de la coque monte progressivement en température. Dans ces conditions, la vapeur provenant de l eau résiduelle et des gaz formés s échappent au rythme de leur production; ainsi la surface des douelles reste parfaitement lisse. Mais dans le cas d une montée en température rapide ou d une chauffe prolongée sur un feu intense; les gaz sont formés en plus grandes quantités; il en résulte un décollement des tissus qui se soulèvent et forment alors une cloque (tableau 2). Tableau 2- Exemple de nombre de cloques produites sur une série de barriques. (grains serrés, humidité du bois 15%) ____________________________________________________ Type de chauffe Intensité Nombre de cloques nb/fût ____________________________________________________ Ouverte faible moyenne forte <1 <1 1-3 Fermée faible <1 moyenne 1-2 forte 3-5 ____________________________________________________ Les cloques sont souvent considérées comme des sources de contaminations microbiologiques en favorisant la stagnation de petites quantités de vins. En réalité, les 3 à 5 premiers millimètres de bois des fûts sont déjà imprégnés de 4 à 6 l de vins. Dans la partie centrale souvent creuse des cloques nous n avons jamais observé de vin à l état libre; même après décortication au laboratoire d échantillons de bois cloqués et immergés dans du vin pendant plusieurs jours, le résultat est inchangé. En outre, des observations réalisées en microscopie électronique à balayage, montrent que les cloques ne présentent pas plus de micro-organismes que des parties de douelles intactes. Il n y a donc pas de risques microbiens supérieurs dans le cas de barriques présentant des cloques. Pour confirmer les risques d altérations microbiennes, nous avons déterminé les populations bactériennes totales des eaux de rinçage de différentes barriques (tableau 3). Il apparaît clairement que la présence de cloques ne modifie pas la population bactérienne totale de ces dernières. En revanche, les barriques présentant des odeurs acétiques, présentent dans leurs eaux de rinçage de très nombreuses bactéries. Tableau 3- Bactéries totales contenues dans les eaux de rinçage de différents fûts. (nombre total de bactéries acétiques + lactiques / ml d eau de lavage des fûts; volume d eau 50 l pour des barriques de 225 l) ____________________________________________________ Nombres de bactéries totales ufc/ml ____________________________________________________ Eau de lavage 25 Barriques usagées saines 115 Barriques usagées piquées 1784 Barriques usagées saines et cloquées 216 ____________________________________________________ BARRIQUES USAGEES Contrôle de barriques usagées achetées L achat de barriques usagées présente toujours un risque, dans la mesure où, le plus souvent, on ne connaît pas les conditions d entretien des barriques ni même leur lieu d entreposage. Il est alors préférable d avoir recours à l examen attentif du fût : - Odeur nette et franche de SO2 ; - Absence de caractère acétique et moisi ; - Bonne apparence des fûts et des pièces le composant ; Outre cet examen de base, il est souvent recommandé de se déplacer quand cela est possible, pour contrôler la netteté de l atmosphère des chais qui ont contenu ces fûts. Pour une garantie plus complète le dosage des dérivés chlorés sur un échantillonnage de copeaux de l extérieur et de l intérieur des fûts est fortement recommandé. 5 à 10 % de barriques prélevées au hasard sur chaque lot sont satisfaisants. Diminution des apports du bois au vin au cours de l utilisation prolongé des barriques Un des aspects important de la réutilisation des fûts concerne la pérennité des apports du bois aux vins. En dosant les composants spécifiques du bois on peut formuler différentes observations valables dans le cas d un séchage naturel (figures 5 et 6). L apport d ellagitanins, dont les rôles fondamentaux lors de l élevage ont été rappelés, ne présente pratiquement plus d efficacité après 3 ans. Essentiellement parce que leur teneur est alors devenue insuffisante. Il est important de noter que la chauffe peut modifier les courbes d apports. En chauffe forte, même si les teneurs dans les couches brûlées sont faibles, l apparition de nombreuses microfissures à la surface des douelles permet sur la durée une libération plus grande de ces tanins. La principale explication est une meilleure accessibilité du vin dans la masse du bois. Nous avons très souvent observé ce phénomène. Les composés odorants se comportent différemment selon qu ils ont pour origines le bois ou la chauffe. Les arômes du bois se libèrent régulièrement et peuvent participer significativement à l arôme des vins pendant 3 à 4 ans. En revanche, les arômes de chauffe localisés seulement dans les 3 premiers millimètres des douelles exposés au brûlot. De ce fait, au delà de 2 ans peu de caractères de chauffe marquent le nez des vins. Mais un paramètre reste à considérer, il s agit du mode d affinage du bois (figure 7). Il est facile de constater que des bois traités rapidement par lessivage conduisent à des douelles épuisées en divers extractibles positifs ou négatifs. Alors qu un séchage naturel correctement conduit, permet de maintenir les apports du bois aux vins même après la première année d utilisation. Des résultats de dégustations renouvelées de nombreuses fois dans tous les vignobles mondiaux d importance, confirment ce fait. Il est certain que le boisé est parfois brutal la première année puis s atténue dans le temps. Mais on pratique souvent des assemblages et 100% barriques neuves est peu fréquent, il est réservé aux vins les plus riches, présentant des équilibres satisfaisants et un potentiel d amortissement remarquable. Enfin, on ne doit jamais juger de la qualité du boisé avant 6 mois d élevage au minimum. Optimisation de la durée d utilisation des barriques Il existe de nombreuses techniques permettant de régénérer les barriques. En réalité, une barrique usagée subit de profondes modifications de composition, qui sont irréversibles. Dans ce contexte tout essai de reconditionnement parait souvent illusoire. La meilleure des techniques consisterait à changer une partie du bois usagé par du bois neuf : changement des fonds et de quelques douelles ; mais alors le surcoût de l opération la rendrait vite peu rentable. Les méthodes de reconditionnement employées fréquemment sont le grattage du fût, éliminant la couche de bois tachée par le vin, suivi parfois du rebrulage. Le grattage permet en effet d augmenter certains des apports du bois aux vins, cependant les oxydations ayant lieu dans la masse des douelles ne redonnent pas les résultats d un fût neuf (tableau 4). En revanche, le rebrulage n est pas une opération satisfaisante. Les substances contenues dans les 5 litres de vin qu une barrique de 225 l peut renfermer sont pyrolysées au cours de cette phase; il s accumule alors des méthylphénols et des diméthoxyphénols conférant aux vins qui sera logé dans ce fût des caractères de bitume et de caoutchouc brûlé. Ces odeurs sont regroupées sous le terme de cramé . Il s avère donc que la meilleure technique d utilisation de barriques usagées se résume en 3 points : - Se constituer son propre stock de barriques usagées pour ne pas risquer faire entrer des éléments à risque potentiel; - Faire autant qu il est possible une rotation du vin de sorte que les barriques restent le moins longtemps vides; - Dégorger systématiquement pendant plusieurs jours les barriques usagées avec une eau sulfitée avant leur emploi si elles sont restées vides quelques mois. Puis pratiquer un sulfitage par voie gazeuse du fût bien égoutté (méchage ou gaz S02). Lavage et conditionnement des barriques usagées Il s accumule, normalement, dans la masse de bois imprégnée de vin de l acide acétique, des sulfates renforçant la dureté des tanins, augmentant l acidité totale. Ces différents produits s accumulent ensuite dans les vins conservés en barriques usagées (figure 7). Le dégorgeage des fûts avant leur utilisation s avère dans la plupart des cas un remède suffisant (VIVAS et al., 1995). Un autre problème est à évoquer. Lors de l élevage, les thiols s hydrolysent pour une part et donne du sulfure de diméthyle, augmentant régulièrement en cours d élevage. Généralement, en barriques neuves, les teneurs en ce composé restent systématiquement plus faibles en fûts neufs par rapport aux fûts usagés et aux cuves (figure 7). Pratiquement la préparation des fûts usagées peut être résumé par les modes opératoires suivant : - Un fûts devant être conserver vide : Pour cela un rincage simple à l eau est précaunisés, suivit d un égouttage soigné (d une nuit au moins). En effet, si de l eau reste sur les parois, l efficacité du sulfitage diminue par production d acide sulfurique ; d autre part la capacité de pénétration des gaz SO2 est limité. Ensuite ont procède au mèchage à 10 g/fûts et à la fermeture hermétique par une bonde bien frappés (bois ou silicone). - Avant réutilisation le dégorgeage est indispensable pour éliminer les sulfates et l acide acétique produits. Pour cela la barriques est remplie d eau sulfité 0,5 à 1% puis laissé 2 à 4 jours avant d être vidée, méché et d y entonner du vin. L opération permet en outre de réhydrater sérieusement le bois plus ou moins séché. Barriques neuves C Conservation avant utilisation (semaines, mois) C C Réception au chai Achat de barriques usagées C Préparation avant entonnage T C, T, C Elevage des vins Conservation vide avant reutilisation (semaines, mois) C Destruction de fût présentant des défaut ou altération irrémédiable C Réutilisation immédiate C, T, C T, C Reconditionnement des fûts usagées Figure 1. Différentes étapes de contrôles (C) et de traitement (T) de fûts dans les chais. C Intensité croissante de la Luminosité de la couleur (Noir/blanc). L 90 Aubier Bois de coeur proche de l aubier 70 50 Bois de coeur proche de la 2 moelle 4 6 a* Intensité croissante du rouge Figure 2. Influence de l âge du bois sur sa coueleur. L aubier est le bois le plus récent, il est vivant ; Le bois de coeur proche de la moelle est le plus ancient ; le bois de coeur est du bois mort. L (Intensité croissante de la Luminosité de la couleur ) 200 40 100 20 50 Proche de l aubier Proche de la moelle Echantillon de douelles Figure 3. Relation entre la couleur (histogramme) et la teneur en ellagitanins soluble (point barré) du bois provenant de divers partie du merrain. Ellagitanins solubles totaux (mg/g de bois sec) 60 L 80 NC 60 40 CM 20 Douelles non travaillées 1 2 3 4 5 6 8 9 7 n° échantillons Douelles travaillées 10 11 12 13 14 Figure 4.- Evolution de la luminosité (L) du bois au cours de la chauffe. Variabilité du phénomène d'assombrissement et influence du travail interne de la douelle. NC: non chauffé ; CM: chauffe moyenne 15 % de l'apport potentiel initial du bois 75 50 25 1 2 3 4 5 Durée d'utilisation des barriques (années) % de l'apport potentiel initial du bois Figure 5.- Evolution des apports d'ellagitanins aux vins au cours de la réutilisation de barriques. Arômes du bois : Méthyloctalactones Eugénol 75 Arômes de chauffe : Syringol Dérivés furaniques 50 25 1 2 3 4 5 Durée d'utilisation des barriques (années) Figure 6.- Evolution des apports en composés odorants aux vins au cours de la réutilisation de barriques Acidité volatile (g H2S04/l) 0,6 0,4 0,2 Cuve Inox Barriques neuves Barriques Barriques usagées usagées utilisées dégorgées en l'état Barriques neuves Barriques Barriques usagées usagées utilisées dégorgées en l'état Sulfates (g/l) 1,2 0,8 0,4 Cuve Inox Sulfure de diméthyle (µg/l) 15 10 5 Cuve Inox Barriques neuves Barriques Barriques usagées usagées utilisées dégorgées en l'état Figure 7.- Incidence de la nature du récipient et de son mode de préparation sur la teneur d'un vin rouge en acidité volatile et en sulfate (analyses après 12 mois d'élevage dans un même local). Tableau 1- Influence de traitements avant entonnage des barriques sur les qualités organoleptiques de vins rouges Rinçage à l'eau froide Conservation 3 j. pleine d'eau et rinçage eau chaude 2 h. et rinçage eau chaude 2 h. vapeur (1 mn.) et rinçage 4a 5a 2c 3b 3b 3b 2c 2c 3a 5c 7b 7b C A B A 2a 1a 3b 2b 3b 2a,b 2a 2b 7a 6b 5b,c 5c A B C C Jugement après 3 mois : (/5) (/5) Intensité du boisé Dureté en bouche (/10) Note globale Préférence Jugement après 3 mois : (/5) (/5) Intensité du boisé Dureté en bouche (/10) Note globale Préférence