Les PIZIT - Oecoumene

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Les PIZIT - Oecoumene
Hypokhâgne – Tronc commun – 2014-2015
2.1.2.3.
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Thème – Les petites îles de la zone inter-tropicale
« Le système touristique domien » (JC Gay, Les cocotiers de la France), un système en crise ? La mise en tourisme des DROM insulaires français (Départements et Régions d’Outre-Mer, à savoir la
Guadeloupe, la Martinique, Mayotte, La Réunion et la Guyane, cette dernière n’étant pas une île) a commencé dès
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l’époque coloniale et jusque dans les premières décennies du XX
siècle avec le climatisme (pratique qui
consiste en des séjours censés atténuer ou soigner des pathologies grâce aux bienfaits du climat) et le
thermalisme (utilisation thérapeutique des eaux de source) dans les espaces de montagne réservé à l’élite
locale (près de la commune de Bouillante en Guadeloupe (fontaine Thomas qui forme une piscine naturelle en
bord de mer remplie d’une eau thermale chaude à 70°C ; centrale géothermique) ou dans les cirques
réunionnais).
⌦ Document 24 – Carte – Bouillante en Guadeloupe
ème
Le tourisme balnéaire se développe dans la seconde moitié du XX
siècle, bouleversant la géographie du
tourisme puisque les littoraux, ces lieux jusqu’alors vu comme sans intérêt (des lieux chauds et humides, où
se développaient des maladies) sont au cœur des aménagements et de la mise en valeur. C’est le temps du
« Sea, Sand et Sun », temps qui profite aux Antilles et moins à La Réunion qui possède proportionnellement
moins de plages.
ème
L’Etat constitue un acteur important à cette période et dans le cadre de ce que l’on appelle le 6
plan (19711975, vaste plan d’aménagements portés par l’Etat), la Guadeloupe et la Martinique sont dotées de bonnes
infrastructures hôtelières (grands hôtels de standing, aménagements des littoraux, etc.). De fait, dans les
er
Antilles, le 1 essor date des années 1970 et 1980. D’autres mesures permettent ce développement, citons la
loi Pons de 1986 qui propose des défiscalisations et permet d’augmenter les investissements dans le secteur
suivie par la Loi Paul en 2001 et loi Girardin en 2003.
En plus du tourisme balnéaire qui est le plus fréquent, les DROM développent des formes de « tourisme vert »
afin de mieux répondre à la demande actuelle, de prolonger la durée des séjours en proposant un panel
d’activités plus variées. On trouve donc des espaces protégés comme la réserve naturelle du grand cul-de-sac
marin à la Guadeloupe créée en 1987 (mangrove, récif corallien, biodiversité). L’objectif est l’accueil du public, la
recherche et la réintroduction du lamantin. On compte également des parcs naturels nationaux : celui de la
Guadeloupe ou de la Réunion.
⌦ Document 25 – Carte : les espaces protégés en Guadeloupe
⌦ Document 26 – Les aires protégées du Parc National de la Réunion
Mais malgré des paysages de cartes postales et des aménagements soutenus par l’Etat, les petites îles des
DROM sont marquées par une crise touristique sans précédent. Les principaux écueils sont les suivants :
• Les Antilles, Mayotte et la Réunion constituent d’abord des « oasis à haut niveau de vie » dans des
environnements socio-économiquement moins développés (les tarifs hôteliers de la République
dominicaine sont inférieurs de 30 ou 50 % par rapport aux Antilles françaises, un employé dans
l’hôtellerie à Maurice est 5 fois moins payé qu’à la Réunion). Le système domien a du mal à supporter
la concurrence, d’autant plus que la population locale n’est pas très intéressée par ce type d’emplois
• La population n’est pas réceptive à la mise en tourisme des îles :
" Les populations locales maîtrisent mal l’anglais
" l’accueil est souvent peu engageant et la réputation de certaines de ces îles se détériore (crise
en 2009 aux Antilles françaises, violence en Guadeloupe)
" La jeunesse n’est pas intéressée par les emplois dans le tourisme, moins bien payés que les
emplois administratifs.
" L’insularisme est développé
• Les infrastructures sont à moderniser : les évolutions du tourisme récent ont marginalisé l’hôtellerie
ème
alors que le secteur avait connu une forte croissance du fait du 6
plan et d’une politique de
défiscalisation. Les grands groupes présents sont seulement français (Accord et Club Med), ce qui
montre une défiance des professionnels internationaux vis-à-vis de ces destinations. Les hôtels
demandent des rénovations importantes. Or, les investisseurs, une fois arrivés à la fin de la période de
défiscalisation, vendent leur bien et dans le contexte de pénurie de logements, ceci s’avère chose aisée.
Ainsi, des hôtels touristiques se retrouvent transformés en résidences privées. La conséquence de cette
crise a des effets paysagers bien visibles avec des friches touristiques, peu engageantes pour les
investisseurs.
⌦ Document 27 – Carte + photographies : Hotêl Kalenda resort en ruines à Trois-Ilets, Martinique
# L’hôtel Méridien de Trois-Ilets, créé en 1973, était le fleuron de l’hôtellerie martiniquaise. Après une première
mise en redressement judiciaire en 2002, l’hôtel est repris par le groupe Kalenda Resort qui engage en 2006 des
travaux pour en faire un 4 étoiles de la chaîne américaine Radisson. La société Kalenda, placée en redressement
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Thème – Les petites îles de la zone inter-tropicale
judiciaire en 2007, puis en liquidation en 2008, ne peut faire aboutir le projet. Le site est racheté par la commune
pour un prix de 4,8 millions d’euros mais l’hôtel n’est plus en état d’être réhabilité.
• Les îles sont aussi victimes du cordon ombilical et constituent des goulets d’étranglement aérien.
Aujourd’hui, le transport aérien est en partie considéré comme un frein au développement touristique.
Les liaisons montrent des fréquentations dominées par la métropole et notamment Paris ; elles
mettent aussi en avant l’absence de liaisons aériennes régulières directes avec une capitale européenne.
Les relations régionales sont rares, couteuses et pas toujours économiquement viables. Les îles des
DROM sont mal reliées à leurs voisins, aujourd’hui, plus qu’hier : la Réunion n’a plus de vols directs avec
Durban ou Nairobi ; les Antilles françaises ont perdu les trajets avec l’Amérique du Nord.
Cette dégradation a des conséquences qui font craindre un cercle vicieux :
• L’activité fluctue beaucoup : certaines années le taux de remplissage est assuré et d’autres il est
inférieur à 50 %.
• Il s’agit de touristes essentiellement français avec une part belle pour le tourisme affinitaire, peu
porteur de devises.
• Les îles souffrent d’une mauvaise réputation auprès des opérateurs touristiques américains,
principaux acteurs du tourisme caribéen.
Le modèle touristique domien peut être schématisé simplement. Il reprend les logiques classiques du
développement du tourisme dans les îles en y ajoutant une offre diversifiée à l’intérieur liée aux efforts de
préservation financés par la métropole et l’Europe.
⌦ Schéma : le modèle touristique domien
Le tableau du tourisme est cependant en demi-teinte avec des exemples d’enrichissement et d’entraînement
mais aussi des réussites mitigées. Preuve en est, une fois encore que ce secteur ne peut, seul, soutenir un
développement durable, viable et bénéfique pour l’ensemble de la population.

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