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COMMÉMORATION DE LA LIBÉRATION AU PRINTEMPS 1945 DES 15 CAMPS D’OFFICIERS FRANÇAIS PRISONNIERS 6 avril 1945 - 6 avril 2005 II B IV B IV C IV D VA 55 V D VI A VI D Arnswalde VIII F Marisch Trubau Koenigstein Sachsen, X B Nienburg ad Weser Colditz X C Lübeck Elsterhorst uber Hoyerswerda XII B Mainz Zitadelle Weinsberg b Heibronn, XVII A Edelbach, Wurzach Wurtz‚ (Zweilager) XVIII A Lienz ad Drau Soest Westf I A Stablack (Aspilag) Münster Westf La cérémonie a été organisée avec le concours du Gouvernement français, de la Ville de Soest et des associations « Geschichtswerkstatt Franzözische Kapelle » e.V. et « Mémoire et Avenir – Chapelle Française de Soest » Cette plaquette a été réalisée pour que soit conservé le souvenir de cette journée qui a rassemblé, sans doute pour la dernière fois, dans une ambiance d’émotion unanime, de nombreux représentants des pays et des générations impliqués dans l’épisode douloureux de la captivité. SOMMAIRE - Le La La La La service œcuménique en l’Église de Soest prise d’armes réception à la Mairie et le déjeuner réception par le GFK dans l’enceinte de la Caserne Bem Adam messe dans la Chapelle Française. CARTE DES CAMPS DE PRISONNIERS FRANÇAIS DANS LE « GRAND REICH » Extrait du rapport officiel de la réunion annuelle du Haut Conseil de la Mémoire Combattante du 10 novembre 2005 2.1.3.4.4. La libération des prisonniers de guerre L’Oflag VI A de Soest a été libéré le 6 avril 1945 par la 95ème division d’infanterie américaine. Une cérémonie y a commémoré la libération de tous les camps de prisonniers de guerre d’Allemagne (Oflag pour les officiers et Stalag pour les hommes de troupe), le 6 avril. Les anciens prisonniers de l’Oflag VI A étaient conduits par le président de l’Association Mémoire et Avenir – Chapelle Française de Soest. 3 LE SERVICE ŒCUMÉNIQUE EN L’ÉGLISE DE SOEST, SANKT MARIA ZUR WIESE La commémoration a débuté à 9 heures par un service œcuménique réunissant les cultes catholique, protestant et juif célébré en l’Église Ste Maria zur Wiese. En présence d’une assistance franco-allemande importante, l’homélie a été prononcée par le Père Salesse, adjoint de Mgr Le Gal, évêque des Armées. Quelques paroles du Père Salesse : «...et puis il y avait cette chapelle. Je pense que beaucoup ont dû venir s’y recueillir.» * «Tout homme a besoin de retourner à sa source pour voir clair, pour ne pas désespérer.» * «Laisser la place à l’esprit pour sauvegarder notre dignité d’homme.» * «Le Seigneur nous dit qu’il faut défaire tous les liens de servitude.» * «C’est vrai que souvent, et encore aujourd’hui, le monde préfère les Ténèbres à la Lumière. C’est souvent plus facile.» 5 LA PRISE D’ARMES A l’issue du service religieux, les participants se sont rendus, à 11 heures, au Camp où était organisée, avec le concours du Gouvernement français, une cérémonie commémorative de la libération, le 6 avril 1945, de l’Oflag VI A et de la Ville de Soest par la 95ème Division d’Infanterie de l’armée des ÉtatsUnis. Cette cérémonie, présidée par Jacques Moreau, Consul Général de France à Düsseldorf représentant l’Ambassadeur de France à Berlin, s’est déroulée au pied de la stèle érigée en mémoire du Lt Vantelot, abattu par une sentinelle à l’intérieur du Camp le 10 juin 1942. Un pavillon français était disposé au dessus de la stèle tandis que flottaient de part et d’autre ceux des Etats-Unis et du Royaume de Belgique et que celui de la République Fédérale Allemande était installé sur le mât de la tour d’entrée du Camp. Renate Drewke Parmi les personnalités présentes, il faut citer Renate Drewke, Présidente du Bezirkregierund d’Arnsberg, représentant le Ministre Président du Land RhénanieNord-Westphalie, G.W.Knowles, Consul Général des Etats-Unis à Düsseldorf, Serge Arvengas, officier de la France Libre chargé de la liaison avec la 95ème US DI au moment de la libération de l’Oflag, Claude Villeroy de Galhau, Conseiller AFE, Chantal Cointeaux, Présidente du Comité de jumelage Soest-Guérard, le Dr E. Ruthmeyer, maire de Soest, le Colonel F. Spangenberg, représentant l’Armée Fédérale. Le Consul Général du Royaume de Belgique était représenté par le Major Van Uffel. Sous les ordres du Général Mantel, Attaché de Défense près l’Ambassade de France à Berlin, une section du 3ème Régiment de Hussards et la Musique de la Région Terre-Nord Est (Metz) ont rendu les honneurs. Les hymnes Français, Américain, Belge et Allemand ont retenti. L’assistance a ensuite entendu la sonnerie « Aux Morts » suivie, après une minute de silence, du refrain de la Marseillaise. Plusieurs discours ont été prononcés et la cérémonie s’est achevée vers 12h30 avec le Chœur des élèves du Lycée de Soest qui a interprété l’Hymne Européen. 6 LES DISCOURS Discours de Jacques Moreau, Consul Général de France (extraits) Madame la Regierungspräsidentin, Monsieur l’Attaché de Défense, Messieurs les Présidents d’associations et anciens prisonniers des Oflags, Monsieur le Maire, Messieurs les Représentants des Etats-Unis d’Amérique et de la Belgique, Monsieur le Conseiller à l’Association des Français de l’Etranger, Madame la Présidente et chers membres de la Geschichtswerkstatt französische Kapelle, Mesdames et Messieurs les autorités et représentants d’autorités et associations françaises et allemandes, Mesdames et Messieurs, La participation exemplaire des autorités allemandes au niveau de la ville, du Kreis, du Bezirk, du Land et du Bund, leur coopération, leur accueil, témoignent éloquemment du degré d’achèvement de la réconciliation francoallemande, objectif majeur et parfaitement réussi de notre relation bilatérale depuis maintenant 60 ans. [...] Je voudrais maintenant saluer la présence parmi nous de jeunes écoliers de nos deux pays. Dans l’esprit de la déclaration franco-allemande du 22 janvier 2003 nous invitant à une relance de notre relation bilatérale, je saisis l’occasion pour les inviter instamment à suivre l’exemple donné par leurs aînés, et à poursuivre leur travail. La relation franco-allemande ne va pas de soi. [...] Suivons l’exemple de cette cérémonie, de ces anciens prisonniers venus sans rancune, brûlant du désir de poursuivre avec nos amis Allemands de Soest les liens de coopération et d’amitié déjà établis, et préparant déjà un lieu de rencontre culturel, qui, sur ce site même, permettra à de jeunes Français et à de jeunes Allemands de bâtir ensemble des projets qui, n’en doutons pas, contribueront au rapprochement franco-allemand, désormais devenu un véritable exemple pour les peuples du monde. Jacques Moreau, en compagnie du Général Marcel Guérin C’est avec une réelle émotion que je me joins à vous pour cette cérémonie du souvenir, en tant que représentant de l’Ambassadeur de France en Allemagne, et en tant que Consul général en Rhénanie du Nord-Westphalie. A ce dernier titre, je représente – avec leur délégué élu, M. Villeroy de Galhau – les quelques 30 000 Français qui ont le privilège de vivre dans ce Land. [...] Je me félicite enfin du caractère vraiment particulier de cette manifestation, avec une assistance à la fois très diversifiée et très unitaire. Elle rassemble en effet aussi bien les grands anciens des Oflags que des jeunes de nos écoles ; des civils et des militaires ; des Français et des Allemands ; mais aussi des représentants des Etats-Unis, libérateurs de l’Oflag, et de la Belgique, qui, dans cette caserne qu’elle a prise en charge après la guerre, a su préserver et perpétuer le souvenir des Français qui y avaient été détenus. [...] Choeur des élèves du lycée de Soest 7 LES DISCOURS Discours du Général Marcel Guérin (extraits) Leur libération intervint peu après celle de l’Oflag VI A et nous en célébrons aussi l’anniversaire aujourd’hui. [...] Pourquoi le site de l’Oflag VI A a-t-il été choisi par le Gouvernement français pour célébrer le 60e anniversaire de la libération des officiers prisonniers ? Il abrite, en effet, dans des combles, une petite chapelle, véritable îlot de culture française en Westphalie. Cette chapelle, gardée comme lieu de culte par l’Armée belge, a, depuis 1992, été classée en Allemagne parmi les monuments protégés et est entretenue par le Autorités allemandes. Guillaume Gillet, prisonnier, ultérieurement Grand prix de Rome d’Architecture, membre et Président de l‘Académie des Beaux-Arts, en a réalisé la décoration en collaboration avec un de ses condisciples, René Coulon. En évoquant son souvenir, je veux ici saluer Madame Guillaume Gillet. Condensé de théologie et d’hagiographie française mis en valeur par la beauté des lignes et l’harmonie des couleurs, encore imprégnée, semble-t-il, des confidences, des chagrins, des espérances et des prières dont elle garde le secret, cette chapelle reste un émouvant lieu de visite et demeure un lieu de culte. Général Marcel Guérin La cérémonie à laquelle nous venons d’assister qui a été organisée grâce à l’appui du Gouvernement Français, commémore le soixantième anniversaire de la libération de l’Oflag VI A par la 95ème division d’infanterie de l’Armée américaine, le 6 avril 1945. Les prisonniers et les familles, pour qui ce jour a marqué la fin d’une longue épreuve, n’ont pas oublié ceux qui les ont libérés. C’est cela, Monsieur le Consul Général de Etats-Unis, que je veux vous dire, en saluant à vos côtés M. Arvengas, officier de liaison français auprès de la 95ème division, qui, le premier, a pénétré dans le camp. A vous, Monsieur le représentant du Royaume de Belgique, je dis la gratitude que nous ressentons à l’égard de l’Armée Belge, parce que, ayant occupé cette caserne de 1950 à 1994, elle a pris le soin d’y inscrire le souvenir de la captivité française. Et pourtant, ce souvenir aurait sans doute été perdu si une association allemande locale n’avait regroupé dès 1997 quelques personnes bénévoles qui, intéressées par le passé récent de leur ville, ont commencé à écrire l’histoire de cette caserne. Au nom de tous les français qui ont des liens avec l’Oflag VI A, j’exprime notre reconnaissance à Madame Barbara Köster, présidente et à tous les membres de son association. Cette reconnaissance se porte aussi, vous le savez tous, vers Madame Gisela Rogge qui s’est consacrée à cette association depuis son origine, l’a animée et continue de s’y intéresser activement. Autour de la stèle devant laquelle nous sommes rassemblés figurent les noms des quinze Oflags qui subsistaient au printemps de 1945. Quant à cette stèle autour de laquelle nous nous trouvons, dressée par l’Armée Belge en souvenir de la mort tragique du Lieutenant Vantelot en 1942, elle rappelle des moments graves qui ont marqué profondément la vie du Camp. Il est souhaitable en effet que, de quelque manière, les noms de tous ceux qui ont permis avec excellence de satisfaire dans les camps 8 l’exigence vitale d’une vie culturelle de haut niveau, ne soient pas oubliés. Même ceux, nombreux, qui ont acquis ailleurs une notoriété indiscutée. Je pense en particulier ici au Doyen Bouxin, aux conférenciers, parmi lesquels Charles Merveilleux du Vignaux, Jacques Robichez, au groupe des poètes avec Jacques-Henri Gros, Guy Delage, Balmary, Nicolas Raiewski, aux mathématiciens et d’abord à Pierre Costabel, normalien devenu à la libération prêtre de l’Oratoire, aux musiciens de l’Orchestre de Chambre dirigé par Sully Ledermann, polytechnicien, possesseur d’une vaste culture scientifique et artistique, pianiste virtuose dont chaque concert créait l’évènement. Je suis heureux d’évoquer son souvenir en la présence aujourd’hui de Madame Sully Ledermann et de deux de ses fils. Beaucoup d’autres noms, je le sais, mériteraient aussi d’être cités. Laissez moi cependant exprimer la gratitude de tous à l’égard de Pierre Lascombes. Il a su maintenir longtemps les liens qui unissent les membres de notre Association, avec le soutien de sa fille Christiane, que je suis heureux de voir parmi nous aujourd’hui ! Je termine en souhaitant que cette cérémonie officielle et les rencontres qui vont la suivre permettent de confirmer la vocation de ce site à garder le souvenir de la captivité française des années 40, mais aussi, après que les cultures française et allemande s’y soient vivement opposées pendant quatre ans, sans pourtant cesser de se respecter, à devenir un lieu de rencontre où les jeunes de nos deux pays puissent apprendre à toujours mieux se comprendre et à servir ainsi d’exemple aux autres peuples de l’Europe. 9 LES DISCOURS associer tous les officiers français qui ont été prisonniers et dire la tristesse que ressentent les générations allemandes actuelles lorsqu'elles se représentent les épreuves qui leur ont été imposées par le Reich. Qui aurait cru il y a soixante ans, demande-telle, que des Français et des Allemands pourraient un jour regarder en arrière ensemble ? Et pourtant, vous qui ne pouvez pas oublier le temps des années 1940-1945, vous voici avec vos familles, démontrant que l'hostilité peut être oubliée et se transformer en amitié, vous avez jeté un pont entre le passé et l'avenir et je vous en remercie. En ces lieux, dit-elle, notre association étudie l'histoire locale du national-socialisme. Nous consacrons nos efforts à réunir nos histoire respectives : nous voulons faire de la Chapelle un centre à la fois religieux et culturel en prolongeant le travail de mémoire et initier une tradition dont l'origine remonte au travail de vos compatriotes français, il y a plus de soixante ans. Nos deux pays ont maintenant dépassé les périodes sombres et tristes : je souhaite ? pour vous et pour nous ? que les relations francoallemandes, politiques, sociales et culturelles, se développent désormais dans une ambiance harmonieuse. Travaillons ensemble pour faire du travail de mémoire une culture de mémoire et perpétuer l'amitié franco-allemande à la fois parmi les anciennes et les nouvelles générations. Discours de Barbara Köster, (extraits) Présidente de l'Atelier Historique " Chapelle Française de Soest. " Barbara Köster Madame Koster salue les Autorités et les personnes présentes. Elle rappelle que cette cérémonie a pour objet de commémorer le jour où, il y a 60 ans, il a été mis fin ? dans cette région ? au régime de terreur imposé par le national-socialisme. La libération de l'Oflag VI A par les troupes américaines le 6 avril 1945 a aussi marqué la fin de la captivité pour des milliers d'officiers français et la fin de la deuxième guerre mondiale pour la ville de Soest. Souhaitant exprimer mieux que ne peut le faire un récit historique, l'émotion qui s'attache au souvenirs de la captivité, elle cite l'évocation par Marc Blanpain, professeur et journaliste, de son arrivée à Soest en 1940 : " C'était l'exil et la prison. Le cadre de notre vie devint une caserne en plein vent, comprise dans un double réseau de barbelés, surveillé nuit et jour par des sentinelles à terre, des sentinelles dans des miradors, et des chiens. Nos premiers jours étaient vides, plus vides que nos estomacs ? des jours sans lumière, sans espérance, sans fin. ". S'adressant à MM.de Chateauvieux, Raclet et Guérin, seuls anciens de l'Oflag VI A présents, qui ont vécu cette situation, elle dit vouloir leur Merci En écoutant l'hymne américain 10 LES DISCOURS Rede von Barbara Köster (Auszug) wir heute hier gemeinsam auf die Vergangenheit schauen können. Für Sie, die Sie die Jahre zwischen 1940 und 1945 in Gefangenschaft erleben mussten, wird diese Zeit nie vergessen sein - aber, ungeachtet dessen, sind Sie heute mit ihren Familien hierher gekommen. Sie haben damit ein Zeichen gesetzt und unmissverständlich gezeigt, das Feindschaft zu überwinden ist und zur Freundschaft werden kann. Ihnen ist es gelungen, eine Brücke zwischen Vergangenheit und Gegenwart zu schlagen. Ihnen ist Versöhnung gelungen. Haben Sie Dank dafür. Die Mitglieder unseres Vereins setzen sich dafür ein, dass an diesem authentischen Ort Geschichte erlebbar gemacht wird, Ihre und unsere. Neben der Kontinuität im Hinblick auf diese Erinnerungsarbeit ist unsere Zielsetzung, den Block 3 der heutigen Colonel BEM Adam Kaserne mit der französischen Kapelle wieder zum Zentrum eines religiösen und kulturellen Lebens zu machen. Damit wollen wir an die Tradition anzuknüpfen, die durch die kulturellen Aktivitäten ihrer französischen Landsleute vor mehr als 60 Jahren hier ihren Anfang nahm. Ich wünsche Ihnen und uns, dass die Beziehungen, sei es auf politischer, sozialer oder kultureller Ebene sich zukünftig weiter nur in hellen Farbtönen skizzieren lassen. Arbeiten wir gemeinsam daran, dass aus der Erinnerungsarbeit eine Erinnerungskultur wird, und dass die deutsch-französische Freundschaft für Jung und Alt zum Kontinuum wird. Herzlichen Dank." Präsidentin von der Geschichtswerkstatt " Französische Kapelle von Soest " Frau Köster begrüsst die Persönlichkeiten und die anwesende Personnen. Sie sagt : "Mit diesem Festakt erinnern wir heute an den Tag , an dem vor 60 Jahren für diese Region die nationalsozialistische Schreckensherrschaft ein Ende fand. Mit der Befreiung des Oflag VI A durch amerikanische Truppen endete am 6 April 1945 für tausende französischer Offiziere die Zeit ihrer Gefangenschaft und für die Stadt Soest der Zweite Weltkrieg. Marc Blancpain, im zivilen Leben Lehrer und Schriftsteller, beschrieb seine Ankunft am 31 Juli 1940 in Soest mit folgenden Worten... "Unser Lebensbereich wurde eine Kaserne mitten im Wind, umschlossen von einem doppelten Stacheldraht, Tag und Nacht bewacht durch Wachposten am Boden, in Wachtürmen und durch Hunde. Unsere ersten Tage waren leer, leerer als unsere Mägen, Tage ohne Licht, ohne Hoffnung, in endloser Folge." Verehrter Monsieur Guérin, Monsieur de Chateauvieux und Monsieur Raclet, all das, was in dem Text beschrieben wurde, haben Sie hier an diesem Ort selbst durchlebt ….. Erinnern möchte ich an dieser Stelle auch an alle anderen französischen Offiziere, die in den übrigen Oflags des Reichsgebietes Gefangenschaft erfahren mussten. …. Marc Blancpains Worte machen die Verbrechen des Nationalsozialismus konkret - sie machen sprachlos und traurig. Lassen Sie mich für einen Augenblick der Frage nachgehen, was es zu bedeuten hat, dass Serge Avengas, Jean Cuene Grandidier, Marcel Guérin, Joseph de Chateauvieux, Guy Raclet 11 LA RÉCEPTION DES PARTICIPANTS DANS LA PAR LA MUNICIPALITÉ DE SOEST. " BLAUEN SAAL " A l'issue de la cérémonie militaire, les participants se sont réunis dans la salle d'honneur (la " Blauen Sall " ) de la Mairie de Soest, décorée aux couleurs allemandes et françaises. Ils y ont été accueillis par le Dr. Eckhard Ruthemeyer, Maire de Soest. Le Ministre Président de Rhénanie-Nord Westphalie Peer Steinbrück ainsi que Mme Silvia Hupfeld, Vize-Landrätin, étaient présents. Après la signature du Livre d'Or par les personnalités présentes, trois discours ont été prononcés respectivement par le Maire de Soest, le Ministre Président et le Général Guérin. Au total, environ deux cent personnes ont pris part à cette réception. Pendant la réception, la musique militaire française a donné une aubade sur la place principale de la ville L'assemblée applaudit le petit concert inaugural Klaus Schubert et Serge Arvengas George W Knowles, Consul des USA et le Général Marcel Guérin 12 Claude Villeroy de Galhau et Gisela Rogge LES DISCOURS Discours du Dr Eckhard Ruthemeyer, maire de Soest (Extraits) à Soest et peuvent encore témoigner, est révolue. Monsieur Ruthemeyer a remercié Marcel Guérin qui, alors âgé de 24 ans, a été libéré du camp de Soest il y a 60 ans. Durant ces derniers mois, il s'est occupé avec ses partenaires allemands du GFK de l'organisation de cette journée. " Ils sont un modèle pour nous " s'est écrié le Maire en s'adressant à ces anciens officiers français. Rede von Dr Eckhard Ruthemeyer (Auszug), Soests Bürgermeister Marie Mayer et Eckhard Ruthemeyer Zuvor hatte Soests Bürgermeister Eckhard Ruthemeyer die Geschichte der letzten Kriegstage in Soest und die Folgen nachgezeichnet. [...] Ruthemeyer stellte unmissverständlich fest : Schuld an Krieg und millionenfachem Tod seien Deutsche gewesen, die den Krieg entfacht hatten, "Wir trauern um die Opfer." [...] "Wir bedurften der Niederlage, um politisch frei zu werden", sagte Ruthemeyer. Er empfahl "neue Formen des Erinnerns und des Wachhaltens". Die Zeit, daß Zeitzeugen wie die gestern in Soest zu Besuch weilenden französischen Offiziere des 2. Weltkrieges als Zeit- und Augenzeugen auftreten, neige sich dem Ende. [...] Tout d'abord, le maire de la ville de Soest, Monsieur Eckhard Ruthemeyer a évoqué les derniers jours de la guerre à Soest et leurs conséquences (….) Affirmant sans équivoque que ce sont les Allemands qui ont déclenché la guerre et qui sont responsables des millions de morts, il a dit : " Nous portons le deuil de toutes ces victimes (…) Nous avons eu besoin de la défaite pour devenir libres politiquement et établir de nouvelles formes de souvenir et de vigilance ". L'époque où des officiers français de la 2ème guerre mondiale, comme ceux qui sont arrivés hier Discours de Peer Steinbrück, Président du Land (Extrait) Américains, les Britanniques et les habitants de Soest, membre de l'association d'histoire ou du GFK qui avaient préparé ce jour de mémoire et organisé un programme varié et des rencontres émouvantes avec leurs amis Français, l'ont tous applaudi. Rede von Peer Steinbrück (Auszug) [...] Für solche Sätze erhielt der Ministerpräsident gestern Mittag beim offiziellen Empfang zum 60. Jahrestag des Kriegsendes in Soest Beifall von allen Seiten : Die 100 Franzosen -– ehemalige Gefangene des Offizier-Lagers in der Adam-Kaserne und ihre Angehörigen -–, Belgier, Amerikaner, Briten und Soester, etwa vom Geschichtsverein oder von der Geschichtswerkstatt Französische Kapelle, die den würdigen Gedenktag, das vielfältige Programm und die anrührenden Begegnungen mit ihren französischen Freunden vorbereitet und ermöglicht hatten. [...] Peer Steinbrück Lors de la réception officielle à l'occasion du 60 anniversaire de la fin de la guerre, l'allocution du Président du Land de Rhénanie du NordWesphalie a été chaleu-reusement accueillie : les cent Français -– anciens prisonniers de l'oflag de la caserne Adam et leurs familles -– les Belges, les ème 13 LES DISCOURS Discours du Général Marcel Guérin (extraits) Ce Centre ferait ainsi écho, en terre allemande, au lieu de rencontre projeté près de Chartres pour conserver en terre française le souvenir de l'Abbé Stock, aumônier allemand de la prison de Fresnes. Général Marcel Guérin M. le Ministre Président, M. le Maire, M. l'Attaché de Défense, MM. les Consuls Généraux, Mmes et MM. les Élus, Autorités et représentants d'Autorités, chère Mme Köster, cher Dr. Loer, chers amis, je veux d'abord, Monsieur le Ministre Président, vous remercier de votre présence à cette réunion dont elle confirme hautement le caractère à la fois officiel et amical sous lequel Monsieur le Maire a voulu la placer. [...] J'espère notamment qu'un lieu de Mémoire y sera conservé et qu'un Centre culturel y recevra des jeunes de nos deux pays. Abbé Franz Stock Merci, Monsieur le Maire, de cette cordiale et magnifique réception, merci à tous ceux qui l'ont préparée, merci au GFK qui a été sur place, depuis deux mois, l'artisan attentif de cette journée et a patiemment écouté et satisfait les nombreuses demandes que je lui ai présentées depuis quelques semaines. Peer Steinbrück, Marcel Guérin, Eckhard Ruthemeyer M et Mme Jean Cuene Grandidier Duo clarinette-violoncelle par des jeunes de Soest Françoise Dessertenne et Claude Perrez, filles du Lt Vantelot 14 Françoise Cohn Klaus Schubert et Françoise Pellerin Marie-Christine Choquet et Marcel Guérin Rose Gillet, Robert Casanova et Nicole Caye-Catillon Marie de Chateauvieux Elisabeth Bonnerot et David Servaty Marcel Guérin et Gilles Mantel Claude Lecoq, Nicole Serfaty et Michel Raclet Marie-Andrée Balbastre et Bernadette Ormières 15 LA RÉCEPTION DES VISITEURS FRANÇAIS PAR LE DE LA CASERNE BEM ADAM GFK DANS L'ENCEINTE C'est sans aucun doute la remise des titres de Membres d'Honneur du GKF, remis à MM. Cuene-Grandidier, Chateauvieux, Raclet et au Général Guérin qui a été le moment le plus émouvant de l'après-midi. Mais il faut aussi évoquer le concert exceptionnel donné par le Soester Madrigal, un quintette vocal qui a magnifiquement interprété des œuvres de Brahms. A la fin de l'après-midi, la projection du film " Sous le Manteau ", clandestinement tourné à l'Oflag XVII A a donné, mieux encore que tous les discours, à tous les participants une idée de ce qu'était la vie dans les camps de prisonniers en prouvant l'extraordinaire ingéniosité de l'homme, même quand il semble dénué de tous moyens. Marcel Guérin et Gisela Rogge Marcel Guérin, Jean Cuene Grandidier, Guy Raclet Anne Ledermann, Eckhard Ruthemeyer, Rose Gillet 16 MADRIGAL SYNDIKAT DE SOEST trouvions un havre de paix, comme si nous donnions et recevions la réconciliation. Et c'était d'autant plus extraordinaire que tout cela passait à travers la musique à laquelle mes collègues et moi, attachons tant d'importance. Je n'avais jamais encore éprouvé quelque chose de semblable et je ressens le besoin de vous faire part de ces sentiments. Je n'oublierai jamais les regards, les accolades, les poignées de main et les remerciements spontanés de ces vieux messieurs …" Wenn man in Deutschland nach dem Krieg aufwächst und eine halbwegs kritische und humanistische Erziehung geniesst, dann kommt man ja eigentlich gar nicht umhin, so etwas wie ein "Schuldgefühl" oder zumindest ein Verantwortungsbewußtsein für die furchtbaren Geschehnisse des Krieges zu entwickeln, auch wenn ich als 1966er Jahrgang kaum persönlich schuldig sein kann. Wiedergutmachung kann und wird es nie geben aber ich denke, in jedem von uns steckt eine Sehnsucht nach Aussöhnung und das Verlangen, irgendwie persönlich dazu beitragen zu können. Vor diesem Hintergrund können Sie sicher verstehen, was die Reaktion der französischen Gäste auf unsere Musik für unbeschreibliche Gefühe in mir - und ich gehe einfach mal davon aus, daß ich da auch für Christine, Arp, Hans und Stefan sprechen darf - ausgelöst haben. Es war, wie ein Stück Frieden finden, Aussöhnung geben und erhalten. Und das war umso überwältigender, da es durch die Musik geschah, an der mir und meinen Mitstreitern so viel gelegen ist. Etwas Vergleichbares habe ich noch überhaupt nicht erlebt und es ist mir einfach ein Bedürfnis, Ihnen als Veranstalterin dies mitzuteilen. Die Blicke, Umarmungen, das Händeschütteln und die spontanen Dankesworte der alten Herrschaften werde ich sicher nie vergessen. Der Soester Madrigal Syndikat Quand on a grandi en Allemagne et qu'on a reçu une éducation humaniste et quelque peu critique, on ne peut absolument pas s'empêcher d'avoir un " sentiment de culpabilité " ou au moins d'être conscient de notre responsabilité face aux événements épouvantables liés à la guerre, même si personnellement, je ne peux pas être coupable, étant né en 1966. Réécrire l'Histoire ne peut pas et ne sera jamais possible mais je pense que chacun d'entre nous aspire à la réconciliation et désire y contribuer personnellement. Dans ce contexte vous pouvez sûrement comprendre ce que la réaction des hôtes français qui ont écouté notre musique a déclenché chez moi : des sentiments difficilement exprimables et je pense que ce fut la même chose pour Christine, Arp, Hans et Stefan. C'était comme si nous Wolfram Herbe, von Soester Madrigal Syndikat 17 LA MESSE DANS LA CHAPELLE FRANÇAISE La visiter suscite toujours en moi une émotion profonde. Chaque soir, avant l'extinction des feux, nous étions nombreux à nous rassembler pour chanter complies puis repartir apaisés vers nos chambres. Aujourd'hui, avec ma fille Martine, nous restons longtemps silencieux devant l'image du " Lieutenant Bleu " gisant sous le drapeau français. En pensée, je suis auprès de René Coulon, dans notre chambre 110 du Block III ; il dessine les projets de ce mémorial. Quelques semaines plus tôt, nous étions ensemble lorsqu'il a ouvert la lettre qui lui apportait la douloureuse nouvelle de la mort de Marcel Guillain, son beau-frère, tombé lors des combats de Juin 1940. Guy Raclet Le Père Salesse Le Soldat Bleu sous le Drapeau Français 18 AU SOIR DE LA CÉRÉMONIE Allocution de Anne Faure-Mallen au soir des cérémonies du 60e anniversaire de la libération de l'Oflag VI A à Soest et des autres camps de prisonniers de guerre. Mon père, Pierre-Louis Mallen, après un an au camp de Nuremberg, a vécu au IV D avec six mille officiers, ingénieurs, juristes, agronomes, prêtres, historiens, géographes, philosophes, comme Jean Guitton, ... Pendant ses cinq années de captivité, PierreLouis Mallen organisa des conférences quotidiennes, piochant dans ces rassemblements d'officiers, conférenciers et public. Il contribua ainsi à remonter le moral de ses compagnons d'infortune. Un de ses camarades m'a dit, récemment, sa reconnaissance émue. L'Association des anciens de L'Oflag IV D a été dissoute après cinquante ans d'existence. A 90 ans, Pierre-Louis Mallen l'a remontée sous forme d'Amicale se réunissant annuellement; les descendants ont été conviés également. C'est ainsi que plusieurs d'entre nous, fils et filles de prisonniers, sont ici ce soir, prêts à œuvrer avec vous, Général, avec toi mon oncle Guy Raclet et ton frère Michel Raclet, à travailler sur ce terreau du souvenir, pour construire non seulement la Mémoire mais aussi l'Avenir. J'ajoute aussi un grand MERCI, VIELE DANKE, à Gisela Rogge de l'Atelier Historique de la Chapelle française de Soest et à toutes celles et tous ceux qui ont contribué au succès de cette journée. Anne Faure-Mallen Je tiens à remercier l'Association Mémoire et Avenir Chapelle française de Soest, en particulier le Général Guérin, pour avoir associé, aux cérémonies d'aujourd'hui, d'autres Oflag et Stalag autour de l'Oflag VI A, en particulier l'Oflag XVII A et son merveilleux film Sous le Manteau que nous avons eu l'honneur et l'émotion de voir cet après-midi, et l'Oflag IV D qui se trouvait à l'est de Dresde à Hoyerswerda. Anne Faure-Mallen, Martine Guillain, Christiane Lascombes et Jane Vauvel 19 TÉMOIGNAGES Guy Raclet, ancien prisonnier de l'OFLAG VI A J'ai pu avoir avec les jeunes français participant à notre voyage, un précieux " dialogue inter-générations ". Leur question initiale était : " Comment avez-vous pu supporter, physiquement et moralement, après la défaite militaire, les épreuves de la captivité ? " des lectures de nos grands auteurs ; les musiciens ont organisé chorales et concerts. Une " paroisse " aussi est née, offrant vie religieuse et études bibliques (cf " Une paroisse derrière les barbelés " que fit éditer le Cardinal Suhard dès 1942). En quelques semaines devait surgir dans notre désert, Douloureuse question pour tant d'activités possibles que la moi ! Le désastre me touchait à question devenait " Que choisir ? ". 22 ans ! Il me séparait d'une jeune Nous vivions là un de ces cas de femme épousée en juillet 38 et résilience auxquels s'intéressent de notre premier bébé. Il nos psychosociologues. brisait ma vie professionnelle alors que je commençais à y Les deux discours d'accueil découvrir, en divers domaines que nous avons pu écouter à plusieurs champs d'intérêt. Et la la Mairie de Soest ont eu un débâcle militaire venait nous contenu d'une actualité humilier en quelques jours, à remarquable et d'une grande Guy Raclet l'ouest de Verdun, sur les lieux richesse. L'essentiel du discours mêmes où nos glorieux anciens du Maire a été un exposé s'étaient illustrés ! Par quelles méthodique des efforts de voies, en chacun de nous, la confiance, l'espérance dénazification en Westphalie, depuis la fin de la ont-elles pu renaître ? Dans la vie commune de guerre. Cette déconstruction réussie du nos chambrées d'abord ! Dans cette chambre 110 totalitarisme hitlérien est un exemple précieux, du Block III, cadre de ma vie quotidienne. Très alors que nous assistons aujourd'hui aux échecs vite, nous étions une quarantaine de jeunes de la déstalinisation des états qui ont constitué la officiers, chacun a fait apport de ses richesses de Russie soviétique. caractère, richesses culturelles ou artistiques. Et, Le Ministre-Président du Land de Rhénanienos vies se sont organisées dans l'ensemble du Westphalie s'est présenté comme l'heureux camp : la " Place Rouge " a vu de mémorables homme qui a pu vivre une ère de paix …alors que séances de gymnastique. Une Université nous a les trois générations précédentes avaient été offert des conférences et des cours, dans les plongées dans des guerres sanglantes. Le tandem domaines les plus variés. Un théâtre a proposé franco-allemand a apporté cette paix durable en ses spectacles ; les " Amis de la Poésie " ont offert construisant l'Europe. Lettre d'Alix de Chateauvieux à son Grand-Père, Joseph de Chateauvieux Mon cher Bon Papa, Encore brûlante des émotions ressenties et vécues à vos côtés hier, j'ai trouvé que seule la plume pourrait vous adresser ma requête. Cette journée du 6 avril 2005 fut bouleversante pour moi. Elle ne m'a pas permis de m'imaginer votre vie de captivité car, à toute représentation il manquerait une ambiance, une atmosphère, un état d'esprit dont étaient imprégnés les événements. M et Mme de Chateauvieux et leurs petits-enfants 20 Cependant, elle m'a permis de me rendre compte à quel point le jeune homme tranquille et sans histoire que vous étiez, est toujours là, vivant, dans ce que vous êtes à 90 ans. Comment arriver à peindre autant de paroles d'espérance alors que votre avenir était sombre. Quelle leçon pour nous ! Nous nous plaignons de nos soucis quotidiens mais avons-nous pensé à ceux qui furent les vôtres pendant cinq années ? " La jeune génération " n'est pas si mauvaise, elle a juste besoin d'un coup de pouce des " anciens " pour ne pas dérailler. Comprenez Bon Papa que votre expérience fait pour moi partie de l'histoire de la famille. Bien sûr, il n'y a pas d'exploits militaires, d'évasions spectaculaires, mais ces événements sont bons pour les livres d'Histoire. Ce que je désire, c'est connaître et transmettre votre histoire. Alors peut-être consentirez-vous à vous enregistrer ou à nous accorder une trace durable de cette période de votre vie, parce que je comprends aisément qu'il vous serait pénible de prendre la plume. Comme le disait le ministre de Rhénanie-Westphalie, je considère comme une chance d'être de la génération qui connaît la paix mais votre expérience est une leçon d'espoir et de courage dont vous ne pouvez nous passer. Personne ne peut raconter, expliquer et informer mieux que vous. [...] Hier en entrant dans votre chapelle, je suis tombée sur la phrase de Saint Matthieu chapitre 15 " j'étais en prison et vous êtes venus me voir ". Au cœur de ce camp de prisonniers où le doute et le désarroi peuvent être omniprésents, quelques hommes s'abandonnent à Dieu et pleins d'espérance, le prient. A la sortie de cette messe extraordinaire, je vois Monsieur Raclet montant péniblement les marches que jadis peut-être il enjambait. A la porte, il me dit " la foi est une action, ce n'est pas seulement une croyance ". Alors j'ai décidé d'agir pour être une porteuse de joie, témoin de l'amour du Christ pour les hommes et de partager l'espérance qui habite les hommes même si les épreuves les accablent. Je vous remercie, Bon Papa, de m'avoir ouvert les yeux sur ce qui fut votre monde pendant cinq ans, et de m'avoir donné la force de m'engager à être lumière du monde. J'ai la certitude que vous m'avez lue jusqu'au bout et j'espère de tout cœur ne pas vous avoir blessé ou avoir été maladroite. Ainsi je vous embrasse très fort et avec toute mon affection ainsi que Bonne Maman. Votre petite fille, Alix de Chateauvieux (20 ans) Réponse de Joseph de Chateauvieux Cependant une vue générale de cette période peut se restituer maintenant et je ne dis pas non à une conversation qui te permettrait de noter ce qui t'intéresserait. On peut envisager la chose quand tu voudras, " avant qu'il ne soit trop tard " ! [...] Tout cela reste le passé avec ses ombres et sa nostalgie. Quid de l'avenir ? Famille de Chateauvieux Le Général Guérin espère beaucoup que les jeunes générations reprendront le flambeau. Pour que " la Chapelle Française ", qui est le fondement de tout, demeure, il faut un engagement et la persévérance dans l'action. Selon quel programme ? A vous de suivre cela ultérieurement...et d'agir concrètement. Ma chère Alix, Ta lettre écrite au retour de Soest m'a fait un très grand plaisir. Je comprends tout à fait que tu sois curieuse de connaître la vie que nous avons menée pendant ces années, mais comment la décrire maintenant ? Il eut fallu noter au jour le jour les faits marquants pour pouvoir les ordonner ensuite et en faire le récit. Je t'embrasse très fort. 21 Bon Papa MESSAGE DE BERNARD LALLEMENT, PRÉSIDENT DE LA FÉDÉRATION ASSOCIATIONS FRANCO-ALLEMANDES POUR L'EUROPE DES Chacun sait que dès le lendemain de la fin de la seconde guerre mondiale, les deux populations de France et d'Allemagne, qui s'estimaient l'une et l'autre, et au même degré, victimes des atrocités, des deuils et des privations de toutes sortes engendrées par la folie des nazis, ont souhaité voir s'instaurer entre les deux pays un climat de réconciliation, préludant à l'amitié et à la coopération qui prévalent aujourd'hui. Contrairement à ce que l'on pourrait penser, les plus ardents partisans de cette réconciliation étaient précisément ceux qui avaient le plus souffert dans leur chair et dans leur liberté. Certes, les morts ne pouvaient plus pardonner. Mais les vivants, les survivants, eux, l'ont fait sans la moindre hésitation dans leur grande majorité. Ce fut le cas, en particulier, des prisonniers retenus pendant des années loin de leurs foyers et de leurs affections, et parmi eux, les plus responsables et les plus éclairés, je veux parler des officiers, qui là encore ont su prêcher d'exemple. En cette période de commémorations diverses des événements majeurs de la libération des villes de France et des camps de la mort, il est donc juste et légitime de ne pas oublier ceux qui ont souffert à l'OFLAG VI A et ont su transmuer leur rancune en volonté de camaraderie. Empêché de venir me joindre à l'hommage qui leur est rendu sur place par l'Association " Mémoire et Avenir-Chapelle Française de Soest ", je tiens néanmoins, au nom de la Fédération des Associations Franco-Allemandes, à féliciter chaleureusement son Président, M. Marcel Guérin, pour sa pieuse initiative. Elle n'efface en aucun cas la mémoire, mais elle s'inscrit dans l'avenir pacifique que nous voulons pour nos deux pays au sein de l'Europe. LE SOIXANTIÈME ANNIVERSAIRE DE LA LIBÉRATION DE L'OFLAG 6 avril 45 6 avril 2005 Un jour sous les hourras Prit fin l'Oflag VI A Ses bourrasques chassent au loin Les risques de chagrin De ces larmes de pluies Qui affligeaient vos nuits Pauvres officiers français Vous y fûtes enfermés Durant cinq ans trop longs A cause de vos galons Aujourd'hui dans ce camp On célèbre le moment Où les américains Vous libérèrent enfin Dans le ciel bleu de France Le soleil désoffense Les bâtisses vert de gris Où s'étouffaient vos cris ... Ce souffle imprévisible Semble présence invisible De vous tous disparus Qui fûtes ici reclus ... Vos cinq années de chaînes Ne resteront pas vaines Si aux jeunes dans ce camp On raconte vos tourments Sur l'Oflag ce matin Souffle ce vent mutin Comme celui qui complice Glaçait vos os jadis Alors ils comprendront Et puis se souviendront Que les idées de haine Ne sèment que des peines Cinq années De patience Cinq ans de De haine et de souffrance et d'offense privation d'humiliation Robert Casanova 22 VI A LA LIBÉRATION DE L'OFLAG VI A En Westphalie, dans le premier camp d'officiers français libéré (de Pierre Frederin, correspondant de guerre - avril 1945) Allemagne occupée, avril 1945. Quatre grandes casernes de pierre, contenant chacune 1 200 hommes empilés : quelques bâtiments annexes. Fermant le tout avec un rectangle de fils de fer barbelés. Des prairies, une campagne plate d'où surgissent d'autres bâtiments, des lignes d'arbres et, à un kilomètre de là, la petite ville de Westphalie, à l'est du bassin de la Ruhr, à l'Oflag VI A. Cinq mille captifs debout dans les cours ou couchés sur trois étages de couchettes, dans quatre étages de bâtiments. Cinq mille êtres sousalimentés, emprisonnés, affaiblis et qui pourtant, depuis des mois, sinon des années, savent que leurs gardiens seront un jour les véritables vaincus. Le colonel Meunier Le 31 mars, l'officier d'appel allemand fait prévenir le chef français du camp que tous les prisonniers doivent se tenir prêts à partir. A pied, bien entendu. Douze kilos de bagages sur le dos. Pour où ? On ne sait pas. Où il n'y aura pas encore d'Américains, ni d'Anglais, ni de Français, ni de Russes. Le chef français du camp, le colonel Meunier, est un homme habile et énergique. Il veut gagner du temps. Les blindés américains sont à trente kilomètres de Soest. " Nous ne pouvons pas partir, explique-t-il au colonel allemand commandant le camp, et nous ne le voulons pas. " - " C'est un ordre. - Inexécutable. - Vous l'exécuterez. - Si vous nous contraignez, votre responsabilité personnelle sera gravement engagée. " Le colonel allemand hésite, réfléchit. Tout est perdu pour l'Allemagne, il s'en rend compte. Il cède devant son "prisonnier". Le soir, les Français sont encore dans le camp. Ils y sont toujours lorsque, la nuit du 5 au 6 avril, les obus américains commencent à tomber sur la petite ville de Soest. Et cette fois, ce sont les Allemands, eux seuls, qui commencent à faire leurs bagages. "Camp de prisonniers français ici... camp de prisonniers français ici...", émet leur radio. Le 6 avril, à 18 heures, l'infanterie américaine est à la sucrerie de Soest. Un colonel français et un capitaine allemand sortent ensemble. Ils ramènent un lieutenant américain et trois hommes. Quand cette patrouille arrive au camp, les Français ont déjà saisi toutes les armes allemandes, fusils, revolvers, mitrailleuses. Les quatre cents gardiens allemands et leurs dix-sept officiers sont rangés devant la "kommandantur". Les prisonniers maintenant c'est eux. Un clairon sonne. Un drapeau américain (préparé depuis quelques semaines) est hissé a un mât, à la place du drapeau hitlérien. Soudain, sur le faîte des casernes, les couleurs françaises se déploient. "Le moment le plus extraordinaire, m'ont-ils dit, ça a été celui-là. Evidemment, on savait que cela viendrait. On le savait depuis longtemps. Tout de même..." Beaucoup de ces Français, près de deux mille, n'étaient pas sortis de leur rectangle de barbelés depuis l'été 1940. Sauf quelques rares suppléments que la Croix-Rouge réussit par miracle à leur faire parvenir (deux tiers de colis suédois et un colis et demi américain vers le milieu de l'hiver) les prisonniers de l'Oflag VI A, de tous les Oflags, ont été réduits aux rations allemandes. Les lettres non plus, et cela c'est un fait commun à tous les prisonniers en Allemagne, n'arrivaient plus. Les dernières nouvelles de France étaient parties en octobre ou novembre 1944. Ces prisonniers en cage n'avaient plus avec le monde extérieur qu'un lien : la radio. Pas l'allemande, cela va de soi. Ni la franco23 allemande. J'ai demandé si la propagande de Sigmaringen-Berlin avait eu un effet quelconque et l'on m'a regardé avec des yeux ronds. Non : la radio alliée, comme dans tous les oflags, des postes clandestins fonctionnaient à l'intérieur des barbelés du VI A. Ils fonctionnaient malgré les recherches continuelles et toujours infructueuses des Allemands, depuis la fin de 1942. En 1944, l'organisation était devenue si parfaite qu'on lisait quotidiennement deux communiqués militaires et politiques détaillés dans chaque bâtiment, dans chaque chambre. Le lendemain de la Libération, j'ai entendu "l'orchestre du camp" jouer entre autres hymnes nationaux des alliés, le nouvel hymne russe. "Comment diable le savez-vous ? Oh, très simple. On l'a écouté à la radio clandestine, noté sur du papier à musique, repéré en sourdine au milieu des "frisés"... Et voilà. " Ces hommes amaigris, pâles, fatigués, je les ai vus se ranger hors du camp sur le sol de l'Allemagne envahie et saluer les couleurs américaines et françaises qui montaient. Je les ai vus se redresser et défiler magnifiquement devant leur chef français : un homme qui les défendit de toutes ses forces pendant des années. Texte communiqué par Mme Jacqueline MALBY, (GR 121)