"Homework" des Daft Punk.

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"Homework" des Daft Punk.
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Source : lesechos.fr, 24/06/2016
"Homework"
Économie collaborative et fin du salariat annoncé : pour un Big
Bang de l’emploi ! C’est en 1997 que j’ai décidé de devenir
entrepreneur. C’était juste après la sortie de l’album
"Homework" des Daft Punk.
C'est en 1997 que j'ai décidé de devenir entrepreneur. C'était juste après la sortie de
l'album "Homework" des Daft Punk. Leur son était nouveau, disruptif et ne
ressemblait à rien de ce que l'on pouvait écouter à l'époque, tout en étant grand
public.
Depuis, je me suis efforcé d'appliquer ces trois fondamentaux, clés pour la réussite
de tout produit : créativité, disruption et Mass-Market. Je ne savais pas alors que le
titre même de l'album et la manière dont il avait été conçu allait donner une
résonnance troublante à la révolution que nous traversons aujourd'hui et à ce que je
fais. Ce titre "Homework" annonçait une ère nouvelle dans laquelle n'importe qui
allait être en mesure de produire un travail de qualité depuis le confort de son salon
et le vendre au monde entier !
La Sharing Economy n'est pas une simple mode, elle va continuer de prendre une
place de plus en plus importante dans nos vies et peut être même réinventer la
manière dont nous consommons. C'est un changement sociétal profond et durable.
Irréversible. Si l'on devait faire un parallèle avec la révolution industrielle, nous n'en
sommes qu'à la période du développement ferroviaire du milieu du XIXe siècle.
La notion de possession devient de plus en plus obsolète pour les Millennials : "c'est
ma voiture, mon appartement, mon nouveau CD" sont des expressions qui sont
progressivement balayées par les BlaBlaCar/Uber, AirBnB et autres Deezer (dont
deux pépites françaises, il est toujours plaisant de le rappeler !).
Je suis persuadé pour en être le témoin chaque jour que la prochaine vague sera
celle des plateformes de Freelances et la fin du salariat considéré comme étant la
norme. Par la même occasion, ces dernières ringardiseront cette notion de
possession dans le monde du travail. Combien de fois peut-on déplorer entendre un
chef d'Entreprise demander à un confrère : "tu possèdes combien d'employés
désormais dans ta boîte" ?
Bien sûr, il va falloir réguler et assurer à cette nouvelle forme de travail, une
couverture sociale digne de notre pays : assurances complémentaires et mutuelles,
contributions à la formation professionnelle, et pourquoi pas un système de
recouvrement simplifié des cotisations sociales avec prélèvement à la source...
L'équité commande tout pareillement une égalité de traitement sur l'assurance
maladie et la retraite comme l'a souligné Hervé Novelli, à l'origine de la mise en place
du statut d'auto-entrepreneur.
Le train est déjà en marche et il est peu probable que le mouvement s'inverse. Victor
Hugo affirmait : "Rien ne peut arrêter une idée dont l'heure est venue". Il ne s'agit pas
ici de simple Uberisation de la Société, mais d'un changement sociétal profond.
Il est aujourd'hui 10 fois plus facile de trouver des clients qu'un travail. C'est sans
compter que cette nouvelle vague et cette aspiration à une qualité de vie meilleure
commencent déjà à repeupler nos campagnes. Et répondre, certes, pour l'heure à
une petite échelle, mais de manière pérenne, à la problématique de désertification
des territoires ruraux. Le salariat est né, s'est développé et concentré près des villes,
du capital et des entreprises.
Aujourd'hui, l'essor des outils numériques favorise l'ubiquité et participe déjà à cette
décentralisation du travail. Meilleure qualité de vie, logements à prix accessibles,
plus de temps pour s'occuper de sa famille, économies substantielles sur les gardes
d'enfants pour la sortie d'école... les motivations sont légion.
D'après François Fillon, la facilitation de l'accès au statut de Freelance et à celui
d'auto-entrepreneur serait un véritable Big Bang pour l'emploi avec à la clé près d'un
million de chômeurs en moins sur deux ans. Certes, les promesses aux parfums de
campagnes pré-électorales n'engagent que ceux qui y croient, mais aux États-Unis
ce n'est pourtant pas Donald Trump, mais bien Hillary Clinton qui prend parti en
faveur de la Gig Economy et pour cause : 50 millions d'Américains ont déjà adopté
ce mode de travail et sont devenus Freelances.
Thomas Picketty décrit fort bien dans son livre les inégalités qui se sont creusées au
cours des deux derniers siècles et qui sont nées de la concentration du travail et du
capital dans les mains de grandes fortunes et de sociétés regroupées.
Si demain l'économie était portée par des millions d'auto-entrepreneurs responsables
de leur réussite, et facilités par les plateformes leur apportant confort, commandes,
outils et sécurité du paiement, les rapports de forces se rééquilibreraient très
probablement.
Côté consommateurs, qu'ils soient particuliers ou entreprises, l'approche est similaire
: ils aspirent à consommer mieux et différemment. À être acteurs éclairés de leurs
choix. La première vague alimentaire & bio n'a été que le coup de feu d'un
changement des mentalités et des comportements des consommateurs. Ces
derniers veulent se sentir libres et ont une approche de plus en plus rebelle dans leur
manière de consommer.
Ce sont les premiers Punks de la consommation. Cela ne vous rappelle rien ?

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