dependance collective

Transcription

dependance collective
Ecole nationale d’assurances
l’Enass
[DEPENDANCE COLLECTIVE]
LE COLLECTIF : CLE DU SUCCES DE
LA DIFFUSION DE L’ASSURANCE
DEPENDANCE ?
Marie MOMBAZET
www.enass.fr
REMERCIEMENTS
Mes remerciements vont en premier lieu à ma direction, Christophe BOUTINEAU et Frédérique
CINTRAT-BARGAIN (Directeur Général et Directrice Marketing et Commercial de Filassistance) qui m’ont
donné l’opportunité et l’envie, de par leur engagement et leurs convictions dans nos métiers,
d’intégrer cette formation, ainsi qu’à Lucie Taleyson (Direction Technique & Marketing Collectives, AXA
Solutions Collectives) qui a accepté d’encadrer cette thèse.
Ma reconnaissance s’adresse de manière toute particulière aux professionnels rencontrés ces derniers
mois qui ont accepté de partager leurs expériences, expertises et réflexions avec une grande générosité
et beaucoup de bienveillance :
Edouard BIDOU, Directeur innovation et développement, Groupe Prévoir
Eric DEMOLLI, Directeur technique santé et prévoyance chez Mercer
Josette GUENIAU, Associée Fondatrice MX- Conseil
Serge GUERIN, Sociologue spécialiste des questions liées au vieillissement de la société
Isabelle HEBERT, Directrice stratégie marketing, santé et prévoyance, Malakoff-Médéric
Marie-Sophie HOUIS-VALLETOUX, Associée Fondatrice MX- Conseil
Jeannine LOUSSOUARN, Directrice des clientèles collectives, CNP ASSURANCES
Jean-Pierre MARTINIE - Directeur du développement de l’OCIRP
Marie-Françoise RESVES, Directrice de l’Actuariat Clients de, CNP ASSURANCES
Leur connaissance du secteur, leurs initiatives salutaires pour faire évoluer le marché et leur vision
avant-gardiste m’ont confortée dans le choix de cette problématique et confirmée tout l’attachement
des hommes et des femmes, de ce secteur, à la portée sociétale de l’assurance de personne.
1
Cette formation, très prenante, m’aura autant apporté de par son cursus pédagogique que par la
richesse des échanges qui se créent avec les intervenants et les camarades de promotion. Merci à eux
pour leur investissement, leur envie d’échanger et leur bonne-humeur, ayant souvent permis d’apporter
un vent de légèreté, même lors de journées parfois prenantes …
Je remercie également mes collègues dont la compréhension et les encouragements m’ont aidée à
rester mobilisée tout au long de ces dix-huit mois, je pense que sans les citer, ils se reconnaîtront.
Bien entendu, une pensée particulière est portée à Anne RAMIN et Martine MAILLARD qui s’impliquent
au quotidien pour faciliter notre cursus et dont l’écoute et l’attention ont été permanentes.
Enfin, je remercie mes proches, famille et amis, pour leur présence et leur réconfort qui comme toujours
nous rendent plus fort et persévérant.
2
SOMMAIRE
REMERCIEMENTS ......................................................................................................................................................... 1
SOMMAIRE ................................................................................................................................................................... 3
RÉSUMÉ ........................................................................................................................................................................ 4
ABSTRACT ..................................................................................................................................................................... 5
INTRODUCTION ............................................................................................................................................................ 6
CHAPITRE 1 : LE MARCHE DE LA DEPENDANCE, DES PROJECTIONS DE FORTES CROISSANCES : QUELS NOUVEAUX
ENJEUX SOCIODEMOGRAPHIQUES ET QUELLE DYNAMIQUE DE PROTECTION ENVISAGEE ? ................................... 10
1.
Des moteurs sociodémographiques, économiques et culturels importants ................................................. 10
2.
Le baby-boom, des besoins croissants en perspective .................................................................................. 23
3.
L’aide informelle, une réalité à intégrer ........................................................................................................ 38
CHAPITRE 2 : UN SECTEUR PUBLIC QUI N’A PAS ENCORE CADRE L’ENSEMBLE DE SES INTERVENTIONS ET DES
ASSUREURS DANS « L’INCERTITUDE », DONT L’APPETENCE A CE NOUVEAU MARCHE S’AFFIRME. QUELLES
TENDANCES OBSERVEES? ........................................................................................................................................... 51
1.
Un environnement réglementaire qui laisse une place à l’assurance ........................................................... 51
2.
Quelle présence actuelle pour les assureurs.................................................................................................. 65
3.
Acteurs clés et stratégie déployée ................................................................................................................. 75
4.
Positionnement et modélisation des offres dépendance .............................................................................. 82
CHAPITRE 3 : LA DEPENDANCE COLLECTIVE UN MARCHE STRATEGIQUE DANS LA LOGIQUE DE PROTECTION
SOCIALE DES POPULATIONS SALARIEES DANS L’ENTREPRISE ET EN SORTIE D’ACTIVITE. QUELLES STRATEGIES
POSSIBLES POUR UNE MONTEE EN PUISSANCE DES ASSUREURS ? ........................................................................... 92
1.
Légitimité des assureurs collectifs.................................................................................................................. 92
2.
Renforcer le rôle à jouer des assureurs face à la demande d’efficience latente ......................................... 103
3.
Réinventer l’approche « dépendance collective » en intégrant de nouveaux leviers de développement : 114
CONCLUSION ............................................................................................................................................................ 131
Table des matières ................................................................................................................................................... 135
ANNEXE 1 : LEXIQUE ................................................................................................................................................. 138
ANNEXE 2 : TABLEAU COMPARATIF DES OFFRES ..................................................................................................... 142
ANNEXE 3 : APPEL NATIONAL – PLUS D’EQUITE POUR LES AIDANTS ...................................................................... 147
3
RÉSUMÉ
L’assurance dépendance en France, malgré une reprise des souscriptions, n’a pas encore totalement
trouvé son modèle. Pourtant diffusée depuis une vingtaine d’années, elle s’est développée de façon
constante, faisant de la France le deuxième marché au niveau international. Ces dernières années des
évolutions sociodémographiques et culturelles fortes laissent penser que de nouveaux leviers de
croissance sont à saisir pour l’ensemble des acteurs du marché. Dans une première partie la
compréhension de ces enjeux sera donc un pré requis indispensable : « Le marché de la dépendance,
des projections de fortes croissances, quels nouveaux enjeux sociodémographiques et quelle dynamique
de protection envisagée ? ».
Cependant, les annonces répétées d’une réforme par les pouvoirs publics, la multiplication de la nature
des offres, le manque d’information et de coordination du secteur et de la filière de la prise en charge
dans son intégralité, n’ont pas permis une dynamique significative du marché de l’assurance
dépendance. Nous analyserons, ainsi, dans un second temps, quelles ont été les évolutions et les
initiatives portées par les pouvoir publics et les positions adoptées par les assureurs, et les
consommateurs, pour s’y adapter : « Un secteur public qui n’a pas encore cadré l’ensemble de ses
interventions et des assureurs dans « l’incertitude », dont l’appétence a ce nouveau marché s’affirme.
Quelles tendances observées?».
Au-delà de ces bilans, nous nous intéresserons plus particulièrement aux facteurs clés de succès qui
permettront au marché de poursuivre son développement, dans les années qui viennent, dans les
meilleures conditions envisageables : optimisation de la mutualisation, réduction des coûts d’accès,
standardisation des garanties, essor des services, structuration de la filière de prise en charge…
De fait, l’assurance collective trouve ainsi une forte légitimité, avec une potentialité de diffusion
optimale de l’assurance dépendance, sous réserve de la prise en compte de la continuité et des sorties
de groupe. C’est autour de cet enjeu que s’articulera la dernière et troisième partie de ce mémoire : « La
dépendance collective un marché stratégique dans la logique de protection sociale des populations
salariées, dans l’entreprise et en sortie d’activité. Quelles stratégies possibles pour une montée en
puissance des assureurs ? » .
Nous aurons ainsi tenté d’apporter quelques solutions à la problématique initiale : « Le collectif: clé du
succès de la diffusion de l’assurance dépendance ? » et aux questions qui y sont attenantes : « Malgré
les forts facteurs favorables au développement du marché de la dépendance, le marché du collectif
reste modeste. Pourquoi favoriser le développement du segment collectif ? Quels leviers d’actions ? ».
4
ABSTRACT
The French industry of long-term care insurance, in spite of an increase in new subscriptions, is still
looking for an appropriate business model. Distributed for the last 20 years, long-term care insurance
has constantly evolved, making the French market the second most important in the world.
In the past few years, strong sociodemographic and cultural changes suggest that new drivers of growth
are available to all market participants. In the first part of the study, we will therefore analyse the trends
that should impact the insurance industry: "Long-term care insurance market, expecting strong growth,
what new sociodemographic stakes and which protection scenarios should be expected?"
However, repeated public authorities announcements, diversification of the offer, lack of information
and industry as well as care network coordination have prevented significant dynamics of the market.
The second part of the study will therefore analyse which evolutions and initiatives were supported by
public authorities and what positions in response were adopted by insurers and consumers: «A public
sector which has not yet structured its outreach and the role of insurers which are eager to position
themselves in a market filled with uncertainties. What trends are observed?”
Beyond this overall assessment, we will detail the key factors of success which will allow the market to
continue its development in the best possible conditions: optimization of mutualisation, cost of entry
decrease, standardization of guarantees, services development, structuring of the care network. In this
context, group insurers have a strong legitimacy due to their appropriate distribution channels for longterm care insurance, under the condition of their capacity to handle continuity of contracts even as
policyholders exit their group.
The third part of the study will therefore address: «Group insurance for long-term care as a strategic
step towards social welfare of employees. What are the best strategies to optimize insurers
opportunities?".
Through this study, we highlight key solutions to our initial problem: "Group insurance: how to
successfully distribute long-term care insurance?" as well as answers to underline questions: "In spite of
the strong factors which could allow an important development of the long-term care insurance, the
market remains modest. Why developing collective segment? What levers of actions?".
5
INTRODUCTION
« Quelle place peut et doit-être faite aux personnes âgées dans la société d’aujourd’hui et, plus encore,
dans celle de demain ? », en 1962, déjà la problématique était soulevée par Pierre Laroque dans le
rapport « Politique de la vieillesse ».
La question, quarante année plus tard, est plus que jamais d’actualité…
Repoussé à plusieurs reprises, le grand chantier de réforme de la dépendance serait-il susceptible de
voir le jour avant la fin du nouveau quinquennat ? « Michèle Delaunay, a exprimé son "souhait" de voir
la loi en vigueur "début 2014". La loi comportera "trois volets", a expliqué Mme Delaunay : l'adaptation
de la société au vieillissement, la prévention de la dépendance et enfin l'accompagnement, c'est-à-dire
les aides aux personnes âgées1. »
De nouvelles missions préparatoires ont été menées en vue de cette future loi d’adaptation de la
société au vieillissement ; ces missions ont été confiées à trois experts en charge de livrer des rapports
concernant : les volets « anticipation », « adaptation » et une « comparaison internationale »:
Le docteur Jean-Pierre AQUINO, président du comité « Avancée en âge », gériatre et directeur
médical de la clinique de la Porte Verte à Versailles, a été chargé par Michèle DELAUNAY et
Marisol TOURAINE d’un rapport sur “anticipation-prévention”.
Luc BROUSSY, conseiller général du Val d’Oise, Adjoint au Maire de Goussainville, directeur de
l’Executive Master de Politiques Gérontologiques à Science-Po Paris, a été chargé par Michèle
DELAUNAY d’une mission interministérielle de réflexion, sur l’adaptation de la société française
au vieillissement de sa population.
Martine PINVILLE, députée de la Charente, s’est vu confier par le Premier ministre une mission
parlementaire de “benchmarking” visant à identifier les pratiques innovantes d’autres pays.
Il est surprenant de constater que le défi financier n’est pas réellement intégré à la réalisation de chacun
des trois rapports. Ces rapports devraient pourtant-être source de réflexion pour établir le prochain
projet de loi du gouvernement.
Effectivement, d’un débat principalement centré et orienté sur le « 5ème risque » que représente la
dépendance, nous passons à un débat national visant à adapter notre société au vieillissement ; la
démarche est certes indispensable, mais semble exclure de son périmètre la dépendance et ses enjeux
1
Nouvel Observateur - Vieillissement : le gouvernement relance le chantier de la dépendance -25-09-2012
6
financiers ; or rendre solvable les personnes âgées et leur famille pour financer leur prise en charge (à
domicile ou en établissement) lors de perte d’autonomie reste incontournable.
Face à un constat morose et à des tendances sociales sensibles - la persistance et l’augmentation du
chômage, le vieillissement de la population, une dette de l’Etat en augmentation ( 1 380 milliards
d'euros) et une dette de la Sécu de 143 milliards en 2011 (soit 8,5 % de la dette publique totale) 2- l’Etat
via ses politiques sociales ne sera pas en capacité de répondre seul au défi « du vieillissement », au défi
de « la dépendance », à l’accélération du coût global de la couverture des risques maladie, vieillesse et
dépendance, engendrés par les évolutions démographiques de notre pays.
En effet, le vieillissement de la population est une évolution majeure de la société à l’échelle mondiale
et à ce titre la France ne fait pas exception. Cette tendance au vieillissement était anticipée et
annoncées, cela n’est donc pas une nouveauté ; cependant le phénomène fort et nouveau des
évolutions démographiques est le vieillissement du vieillissement. En effet, si l’on se réfère aux
tendances démographiques récentes, les 60 ans et plus au nombre de 10,8 millions en 1990, sont 14,5
millions aujourd’hui et seront 33 millions en 2050 ; en parallèle les de 80 ans et plus qui étaient de 2
millions en 1990, sont de 3,8 millions aujourd’hui et seront potentiellement 7 millions en 2050, soit au
regard des plus de 60 ans, une proportion de 18% en 1990, 27% aujourd’hui et 31% en 2050…
Les systèmes de protection sociale seront donc les premiers touchés par cette révolution du
vieillissement ; il semble surprenant que les acteurs de la protection sociale complémentaire,
supportant pourtant une part de plus en plus importante des prises en charge suite à certains
désengagements de l’Etat, soient si peu sollicités dans le débat national.
Il semble donc peu probable que ce nouveau projet de loi apporte les réponses attendues par le secteur
assurantiel. Pourtant il est indéniable que les assureurs, qui s’arment de nouvelles offres et de nouveaux
services spécifiques à la couverture du risque dépendance, ne peuvent plus rester dans l’attentisme face
à un marché qui prend de plus en plus conscience de ce nouveau risque et qui est réceptif à des
solutions pragmatiques et pérennes.
En ce sens, je m’essaye à travailler sur la compréhension des enjeux sociodémographiques, culturels,
financiers et sur la structuration de tous ces aspects qui feront de l’assurance dépendance un sujet
incontournable pour les organismes d’assurance complémentaire. J’orienterai plus particulièrement ma
réflexion sur les problématiques de l’assurance dépendance collective, qui malgré des facteurs
favorables et des caractéristiques intrinsèques -la diffusion et l’accès à une couverture du plus grand
2
Le Point.fr - 2012, année risquée pour la dette française - Publié le 11/01/2012
7
nombre- reste insuffisamment développée. J’essaierai ainsi d’identifier tous les aspects favorisant la
couverture du risque dépendance en collectif, d’appréhender les freins existant notamment sur les
limites de diffusion de l’offre et à mener une approche prospective sur les potentiels leviers d’actions
des assureurs pour une meilleure pénétration du marché.
8
[CHAPITRE 1]
LE MARCHE DE LA DEPENDANCE, DES PROJECTIONS DE FORTES CROISSANCES : QUELS
NOUVEAUX ENJEUX SOCIODEMOGRAPHIQUES ET QUELLE DYNAMIQUE DE PROTECTION
ENVISAGEE ?
9
CHAPITRE 1 : LE MARCHE DE LA DEPENDANCE, DES PROJECTIONS DE FORTES CROISSANCES : QUELS
NOUVEAUX ENJEUX SOCIODEMOGRAPHIQUES ET QUELLE DYNAMIQUE DE PROTECTION ENVISAGEE ?
1. Des moteurs sociodémographiques, économiques et culturels importants
1.1. Vieillissement de la population et augmentation de la population dépendante
1.1.1.
Evolutions démographiques : Allongement de la durée de la vie et vieillissement de
la population
Si l'on fait exception des atteintes démographiques provoquées majoritairement par les conflits,
l’espérance de vie a augmenté de 55 ans sur les deux siècles et demi précédent, nous permettant de
gagner un trimestre de vie de plus par an.
10
Ainsi, durant les 25O années passées, la durée moyenne de vie n’a cessé de s’allonger et a plus que
triplé en France, passant de 25 ans en 1740 à 45 ans en 1900 puis à plus de 80 ans de nos jours. Ceci est
attribué au fait que, au fil du temps, les grandes catastrophes (famines, épidémies, guerres…) se sont de
plus en plus espacées, que de grands progrès ont été réalisés dans les domaines de l’hygiène (chirurgie,
salle d’accouchement,…), de la salubrité des villes et de l’habitat (eau potable, égouts…), de la sécurité
alimentaire, de l’éducation et de la santé.
Siècle
XVIIIème siècle
1810
1900
1950
de 1950 à 2000
2004
Espérance
de vie
25 ans
37 ans
45 ans
66 ans
79 ans
Mortalité
infantiles
La moitié des enfants
mouraient avant l'âge
de 10 ans
15% des
enfants nés
en 1900
meurent
avant un an
5 % des
enfants nés
en 1950
meurent
avant un an
0,4% des enfants nés en
2000 meurent avant un an
Elle atteint un niveau
extrêmement bas de 3,6 ‰ et
ne pèse quasiment plus sur
l'espérance de vie.
Progrès
*Intérêt grandissant
des médecins pour la
médecine
de
l’enfance,
*Généralisation
de
l’infirmerie dans les
écoles,
*Développement de
la
médecine
préventive
(alimentation,
sommeil,
assainissement des
espaces…)
*Recul de
la mortalité
infantile : Progrès de
l'hygiène et lutte des
infections, grâce aux vaccins
et
aux
antibiotiques.
*Vaccination
*Premières politiques de
contre
la
protection de la petite
variole
enfance.
*Progrès de
*Dès la moitié du XXème
l’alimentation
siècle, ces progrès influent
également sur le risque de
décès
par
maladie
infectieuse ou parasitaire
des plus de 60 ans.
*Progrès dans la lutte
contre la mortalité adulte
notamment les maladies
cardio-vasculaires et les
cancers
*Programme
de
périnatalogie et maîtrise de
la mort subite du nourrisson
*Ambitieuses politiques de
santé publique : mesures de
prévention
routière,
prévention de l'alcoolisme,
du tabagisme....
*Importantes
politiques
publiques de prévention :
dépistage précoce, campagnes
d’éducation de masse à la
bonne
alimentation,
prévention
des
risques
professionnels,
liés
aux
pollutions diverses, et liés aux
comportements
individuels
(MST,
tabac,
alcool).
*Progrès
technologiques
(Radiothérapie
3D,
nanotechnologies, télésanté...)
Plus de 80 ans
2012
82 ans
A partir des sources : L’hygiène à l’école aux XVIIIe et XIXe siècles : "Vers la création d’une éducation à la santé"-Séverine Parayre, Docteur en
Sciences de l’éducation, l’Université Paris Descartes (2008), "L’allongement de la vie et ses conséquences en France" - Emmanuelle Cambois, France
Meslé et Gilles Pison chercheurs au sein de l’unité Mortalité, santé et épidémiologie de l’Institut national d’études démographiques (INED) 2009 et
Tables Insee, estimations de population (résultats provisoires arrêtés fin 2011).
Le vieillissement de la population française est donc déjà bien entamé. Ainsi les plus de 50 ans représentent
35% de la population en 2012 soit 22 millions d’individus et seront 35 millions en 2060.
11
Source : BAYARD PUBLICITE- % de seniors dans la population totale +50 ans – A partir source INSEE
Le constat est identique pour les plus de 60 ans et les plus de 70 ans :
En moins d’un demi-siècle, la population de plus de 60 ans a augmenté d’environ de 75% et la part des
plus de 75 ans a doublé.
12
Selon les projections de l’INSEE, cette tendance du vieillissement de la population semble se confirmer
et s’amplifier sur les années à venir avec des seniors de plus en plus nombreux :
POPULATION AU 1er JANVIER
PLUS
DE 60 ANS
DONT 75 ANS
OU PLUS
2010
62,8 MILLIONS
22,9%
8,8%
2020
65 MILLIONS
26,2%
9,1%
2030
67,2 MILLIONS
29,3%
12,0%
2040
69 MILLIONS
31,0%
14,3%
2050
70 MILLIONS
31,9%
15,6%
Source : INSEE
La part des seniors dans la population française tend donc à augmenter fortement passant de 22,9% en
2010 à plus de 30% à l’horizon 2040. Le taux d’augmentation des seniors sera alors impressionnant
puisqu’il atteindra plus de 57%. Ce phénomène se constate également pour le grand âge : 17 000
centenaires vivent aujourd’hui en France, ils seront entre 200 000 et 400 000 dans 50 ans… Ce
phénomène de vieillissement de la population est, notamment, consécutif à l’allongement de la durée
de la vie, qui continue de croître pour atteindre, selon les projections de l’Insee, à l’horizon 2040, 88 ans
pour les femmes et 83 ans pour les hommes.
A titre de comparaison, l’espérance de vie est en 2012 en moyenne de 78,2 années pour les hommes
(39,7 ans à l’âge de 40 ans) et de 84,9 années pour les femmes (27,3 à l’âge de 60 ans)3.
Ainsi sur les trente dernières années, les femmes ont gagné 6,5 ans d'espérance de vie et les hommes 8
ans. Cette tendance ne s’inversera pas dans les années à venir puisque l’espérance de vie continuera
d’augmenter de 4 à 5 ans.
33
Le nouvel observateur “Les maladies chroniques en question” – 10/07/2012
13
Le vieillissement de la population illustré par les schémas précédent s’explique notamment par 3
phénomènes tangibles:
Un allongement de la durée de la vie avec 3 611 350 personnes de 80 ans et plus.
La réduction durable du taux de fécondité provoquant ainsi un rétrécissement de la pyramide
à sa base.
L’arrivée à un âge avancée des générations du baby-boom qui vient gonfler la pyramide au
niveau des âges intermédiaires ou âgés.
Ainsi pendant que la population Française augmente de +19% :
la cible des 25-49 ans progresse de +5%
la cible des 50 ans et + culmine à +35%
Source : BAYARD PUBLICITE- Les 50 ans et +, une génération en forte croissance
14
1.1.2.
L’évolution du nombre de personnes dépendantes quelle tendance
Aujourd’hui ce sont 1, 2 millions de personnes qui sont considérées comme dépendantes au titre de
l’APA et environ 225 000 nouveaux cas de personnes dépendantes chaque année :
2 % des 70 ans sont dépendants
30 % des 90 ans sont dépendants
L’enjeu de la dépendance concerne l’ensemble de la population : si le risque de se retrouver dans cette
situation affecte plus de 10 % des 65 ans et plus, non moins de 50 % des hommes et de 72 % des
femmes décédés en 2009 ont bénéficié de soins au cours de leur vie au titre de la dépendance4.
Le nombre de personnes dépendantes devrait ainsi progresser de 1 % en moyenne par an d’ici 2040
selon le rythme suivant :
21,2 à 28,5 % entre 2000 et 2020
21 à 26 % de 2020 à 2040
Une augmentation importante en valeur absolue mais moins nette en valeur relative puisque la
proportion de personnes dépendantes dans la population âgée de plus de 75 ans devrait baisser passant
de 18 à 13 %5.
Le nombre de personnes devrait cependant franchir le seuil des 2 millions en 2040 soit 50% de plus
qu’en 2010.
1.1.3.
L’impact du vieillissement sur le nombre de personnes dépendantes est incertain
4
Conférence introductive de M. Heinz ROTHGANG, Directeur du département « Économie de la santé, politique de la santé
et recherche sur les soins » - Programme pour la promotion d’un dialogue franco-allemand sur la protection sociale
5
A partir des données Insee.
15
L’augmentation du nombre de personnes âgées est un facteur de croissance acquis ; toutefois il est
important de noter que l’augmentation de l’espérance de vie s’est accompagnée d’un allongement de la
durée de la vie sans incapacité, selon l’Institut national d’études démographiques.
Ainsi la baisse de la mortalité et l’augmentation de l’espérance de vie n’est donc pas de façon
irréversible synonyme d’une augmentation exponentielle de la part des personnes malades ou fragiles…
Cependant il existe une incertitude quant à l’évolution future de ce lien entre dépendance et
vieillissement qui maintient les assureurs dans une logique de prudence.
En effet, tel est le constat d’un recul continu de l’âge, l’apparition des pertes d’autonomie établies et
validées devrait se confirmer à moyen terme, qu’en sera-t-il à long terme ?
Au-delà des limites structurelles de cette
tendance, il est difficile, voire impossible,
d’anticiper l’impact des politiques de prévention
présentes et futures ainsi que des recherches
médicales portant sur les évolutions et le
traitement des pathologies à l’origine d’un état de
dépendance (AVC, démences et maladies
dégénératives,
maladies
cardio-vasculaires,
chutes, etc.).
En effet, les maladies neurodégénératives, du type maladie d’Alzheimer, constituant aujourd’hui l’une
des principales causes de dépendance lourde, pourraient, en fonction des avancées thérapeutiques,
connaitre un franc recul ou continuer à toucher un nombre d’individus de plus en plus importants.
Il est donc difficile de prévoir comment évolueront, dans les prochaines décennies, la prévalence et les
modes de prise en charge de ces types de pathologies.
16
Cependant le vieillissement entraine bien différentes situations qu’il est important de comprendre et de
distinguer, telles que les limitations fonctionnelles6 et les gênes dans les activités7.
Ainsi au cours du temps, l’allongement de l’espérance de vie s’est accompagné en France d’une légère
augmentation du nombre d’années avec des incapacités courantes, mais sans accroissement du nombre
d’années
avec
gênes
dans
les
activités
de
soins
personnels.
Pour une espérance de vie à 65 ans, de 17 ans pour les hommes et de 21 ans pour les femmes, sont
différenciées différentes périodes (durées moyennes) :
6,8 ans pour les hommes et plus de 6,9 ans pour les femmes sans limitation fonctionnelle
physique ou sensorielle (soit respectivement 40 % et 32 % de leur espérance de vie).
11,7 ans pour les hommes et 13,1 ans pour les femmes sans limitation d’activité durable (soit
respectivement 69 % et 61 % de leur espérance de vie)
Plus de 80 % de l’espérance de vie sans restrictions pour les activités de soins personnels8.
Pour limiter les risques de limitations fonctionnelles, et limiter les risques qui se traduisent
en gênes dans les activités, des moyens peuvent être mobilisés pour compenser des
altérations et maintenir un niveau d’activité satisfaisant (aides techniques, rééducation,
aménagement du domicile ou du poste de travail, etc.). On dispose aujourd’hui d’éléments
d’information pour mieux identifier les besoins auxquels la société devra faire face avec le
vieillissement à travers les calculs d’espérance de vie sans limitation fonctionnelle et
d’espérances de vie sans gêne dans les activités. Les pouvoirs publics ainsi que les assureurs
sont donc en mesure d’apporter des réponses concrètes.
6
Les limitations fonctionnelles correspondent à l’altération des fonctions physiques, sensorielles ou cognitives, conséquences
des maladies ou accidents sur l’organisme (troubles de la vision, de l’audition, de la locomotion, de la mémoire, etc.).
7
Les gênes dans les activités reflètent les répercussions de ces problèmes de santé dans la vie quotidienne. Ces gênes
peuvent à terme limiter la participation sociale des personnes, et parfois les conduire à une situation de dépendance
lorsqu’elles touchent des activités élémentaires comme les soins personnels, nécessitant l’assistance d’un tiers.
8
INED - L’allongement de la vie et ses conséquences en France
17
1.1.4.
Chronicité et multi pathologies complexifient l’accompagnement des personnes
fragiles
Avec le vieillissement et l’augmentation de l’espérance de vie, on a vu apparaître des pathologies
multiples et chroniques chez une même personne. Cette nouvelle complexité entraîne une
augmentation des besoins de santé de ces personnes et, par ce fait, une augmentation de l’intensité, la
complexité des soins et de l’accompagnement qui leur sont nécessaires.
Cette augmentation de personnes souffrant de pathologies multiples et chroniques s’illustre aisément :
Un tiers des personnes en ALD ont plus de 75 ans 9, et 50% des plus de 75 ans sont en ALD10 (dont
75% des plus de 90 ans11)
Entre 1990 et 2008, la population du régime général, qui couvre 90% de la population française,
a progressé de 21% passant de 46,6 millions à 56,5 millions. Dans le même temps, le nombre de
nouveaux cas par an reconnus en affections de longue durée (ALD) est passé de 203.000 à
9
Rapport HCAAM-2010
10
DREES, Comptes nationaux de la santé 2010
11
L’état de santé de la population en France - Suivi des objectifs annexés à la loi de santé publique – Rapport 2011
18
380.000 (+87%) pour les maladies cardio-vasculaires et de 141.000 à 260.000 (+85%) pour les
cancers, soit une progression 4 fois plus rapide que la seule progression démographique 12.
12% des personnes de plus de 60 ans sont traitées pour le diabète. Entre 2000 et 2008, le
nombre de nouveaux cas a augmenté 8 fois plus vite que le changement démographique 13.
856 000 personnes atteintes de maladies dégénératives en 2009. Près de 90 % ont plus de 75 ans
et 73 % plus de 80 ans14
L’évolution de la dépendance se caractérisera, selon les études actuelles, notamment par une forte
progression des démences. En effet, une étude du professeur Ron Brookmeyer, relative à la prévalence
de la maladie d’Alzheimer sur la population américaine, démontre que si, aujourd’hui, aucune mesure
de prévention n’était mise en œuvre, le nombre des malades doublerait d’ici 2050 ; pourtant si l’âge de
début de la maladie pouvait être reculé de cinq ans, ce nombre serait réduit de moitié 15.
Le bilan humain est alarmant et le coût économique ne l’est pas moins. En effet, l’impact sur le coût
global au sein du régime général est énorme :
Le coût des maladies cardiovasculaires : 27 milliards d'euros
Le coût des cancers : 19 milliards d'euros
Le coût du diabète : 12,9 milliards d’euros16
Ainsi, si on avait stabilisé en 2009 le nombre de cas de diabète, de maladies cardiovasculaires et de
cancers au niveau de celui de 2004, toujours pour le seul régime général, en tenant compte du
changement démographique sur la période, ce sont respectivement 3,8 milliards, 2,57 milliards d'euros
12
A partir des études de la Caisse nationale d'assurance maladie des travailleurs salariés (CNAMTS) - Direction de la stratégie,
des études et des statistiques - Mise à jour au 8 juillet 2009
13
La pandémie de diabète, symbole de la crise de notre système de santé, Nouvel observateur – 22/09/2011
14
Dossier dépendance - Cercle des Epargnants –Janvier 2011 : www.cercledesepargnants.com/...content/.../Dossierdépendance-Generali.pdf
15
COMMISSION DES AFFAIRES SOCIALES- Rapport d’information en conclusion des travaux de la mission sur la prise en
charge des personnes âgées dépendantes- 2010
16
Rapport de l’inspection des affaires sociales – Evaluation de la prise en charge du Diabète –Avril 2012
19
et 2,02 milliards d'euros qui auraient été économisés. Soit un total de 8,39 milliards! Le déficit de la
branche maladie étant pour rappel en 2009 de 10,6 milliards d’euros.
Trois principales théories ont été confrontées au fil des années sur l’évolution de la perte d’autonomie
engendrée par les maladies chroniques :
La « pandémie des maladies chroniques, des troubles mentaux et des incapacités » (Gruenberg
et Kramer 1980) : la date d'apparition des maladies reste identique mais la durée de survie avec
maladie augmente. On voit donc apparaître des états plus sévères.
« La compression de la morbidité » (Fries 1980) : l'âge moyen d'apparition des maladies est
retardé, alors que l'espérance de vie est relativement constante. La morbidité est donc
comprimée dans une courte période.
L'équilibre dynamique (Manton 1992) : la hausse de l'espérance de vie est en partie expliquée
par le ralentissement du développement des maladies chroniques. La prévalence des maladies
augmente mais les affections sont en moyenne moins sévères.
Mais au final, les trois scénarios présentés confirment une augmentation des populations âgées et un
nombre croissant de malades chroniques constituant un groupe social vulnérable, aux demandes de
soins importantes.
Il est donc important dès à présent d'élaborer des stratégies visant à assurer aux malades chroniques
des soins médicaux de qualité aux niveaux national, régional et local, afin de limiter les conséquences de
cette chronicité sur la qualité de la vie des intéressés, de leur famille, ainsi que sur la collectivité.
Mais l’accompagnement d’une personne âgée en situation de fragilité, du fait d’une limitation de son
autonomie et de difficultés de santé se cumulant, sous-entend une gestion de situations complexes qui
génèrent fréquemment une succession de ruptures.
Certes les personnes âgées voient avec les années, le nombre, la fréquence et la gravité des maladies
augmenter avec l’âge et deviennent de grandes consommatrices de soins et de services de santé, telle
que la forte consommation de soins hospitaliers (durée moyenne de séjour deux fois plus élevées pour
les personnes âgées en affection de longue durée) ; mais avec plus de coordination et un parcours de la
personne amélioré de nombreuses ruptures et de nombreux coûts pourraient-être évités.
20
Par exemple, 40 % des admissions en hospitalisation complète passent par les urgences pour les
personnes âgées de 85 ans et plus, alors que 15 % passent par les urgences pour les personnes âgées de
30 à 70 ans17.
Parfois, l’hospitalisation était indispensable mais le passage par les urgences aurait pu être évité,
notamment avec une meilleure coordination des acteurs, prévenant ainsi une rupture supplémentaire.
Dans d’autres cas, le passage par les urgences peut déboucher sur une hospitalisation médicalement
évitable et complexifier un retour à domicile déjà bien souvent difficile à organiser.
Or, les organisations de soins restent encore très cloisonnées et intègrent difficilement des prises en
charge globales et transversales, pourtant indispensables pour gérer une population très âgée
fréquemment polypathologique.
17
ANAP – Les parcours des personnes âgées sur un territoire
21
Une étude réalisée par l’IGAS analyse les impacts de modes d’organisation coordonnée et
d’optimisation de coopération entre les acteurs de soins, sur certains territoires « pilotes » :
Réduction de manière significative les durées moyennes de séjours : l’écart entre les durées de
séjours des adultes entre 20 et 80 ans et celles des personnes de plus de 80 ans se réduirait de
près d’un quart.
Réduction des entrées en hospitalisation par les urgences de 24 à 36%18.
«Des améliorations sont réalisables grâce à une coordination de l’ensemble des intervenants19»
Les risques de perte d’autonomie pourraient-être diminués par la combinaison de facteurs
protecteurs (prévention, optimisation de la prise en charge, rééducation, aides techniques,
éducation, formation etc.) et d’amélioration des parcours de santé des personnes fragilisées.
Deux marqueurs particuliers sont témoins de cette insuffisance : la surreprésentation des
personnes âgées dans les passages aux urgences et la durée moyenne anormalement longue
de séjour pour certaines pathologies, notamment les maladies chroniques20. Il est difficile
une fois encore d’annoncer de façon certaine quelle sera la situation dans les années à venir,
mais il est certain que des mesures doivent-être mise en œuvre rapidement par les pouvoirs
publics et les organismes d’assurance complémentaire. Il est indispensable de passer d’une
politique de curatif à une politique de prévention et de prise en charge globale.
18
CLEIRPPA - Les organisations coordonnées dans la prise en charge des personnes âgées
19
IGAS - Impact des modes d’organisation sur la prise en charge du grand-âge, mai 2011
20
ANAP – Les parcours des personnes âgées sur un territoire
22
2. Le baby-boom, des besoins croissants en perspective
2.1. Le vieillissement, une notion bien relative et évolutive…
L’importance accordée à l’âge est récente. Et n’a jamais été aussi prégnante dans notre société.
Pourtant l’évolution de l’espérance de vie, l’espérance de vie aux grands âges, l’espérance de vie en
bonne santé font que la majorité d’entre nous vieillira différemment d’autrefois : en meilleure santé
jusqu’à des âges avancés.
Comme nous l’avons vu précédemment dans la France du XVIIIe siècle, un enfant sur deux mourait
avant l’âge de 10 ans ; la maladie et la vieillesse n’étaient pas relatives à l’âge. En effet il existait peu de
risques d’être plus malade ou de décéder à 40 ans qu’à 10 ans. Cette situation faisait alors des ainés, des
figures de référence échappant aux fléaux, aux maladies et à la mort. Elles étaient des personnes
respectées pour leur vécu et leur savoir.
Le gap est énorme avec notre perception du vieillissement, ce XXIe siècle débutant, où la vieillesse
devient aisément associée dans l’esprit de nos contemporains à la maladie et à la mort 21. Dans notre
vision collective les vieilles personnes sont ainsi souvent associées à une image de personnes
« nuisibles » à la collectivité (malades, handicapées et/ou « dépendantes »), … Alors que la réalité, est
toute autre puisque moins d’un quart des personnes âgées de plus de 85 ans connaissent des situations
de « dépendance grave » (GIR 1 à 3)…
Pourtant il semble, à regarder autour de nous, qu’il soit bien révolu le temps du XVII et XVIIIe siècles, où
étaient considérés comme « vieillards » les individus d’une quarantaine d’années et où, en 1950, les
retraités possédaient une espérance de vie assez faible et un état de santé précaire.
Les personnes de 60 ans et plus, issues de la génération baby-boom, ont bénéficié de tous les progrès
médicaux et de conditions de vie et de travail favorables (pas de conflits, plein emploi, accès aux études
et au logement, croissance…) les amenant à conserver un capital santé important.
Il semble donc ainsi dérisoire de comparer les éléments qui caractérisaient une femme ou un homme de
plus de cinquante ans au 19ème siècle et aujourd’hui.
21
Réflexions sur l’âge de la vieillesse - jerpel.fr
23
En 1870: Elizabeth Cady Stanton Et en 2012: Andie MacDowell (55 ans) Kim Basinger (60 ans) Jane Fonda (75 ans)
and Susan B. Anthony (50 ans)
Il est alors étonnant aux vues des importantes évolutions, notamment des différents indicateurs
permettant d’établir un âge d’entrée dans la vieillesse, que ces derniers n’aient pas évolué au fil du
temps.
En effet, il semble opportun de se détacher de cette notion d’âge chronologique et d’observer quels
sont les marqueurs sociaux du vieillissement pertinents.
A âge équivalent, on ne vieillit pas de la même manière que les générations précédentes.
Il est d’ailleurs difficile d’indiquer un âge chronologique pour déterminer le seuil de la vieillesse, puisque
selon ses pratiques sociales, son environnement, humain et matériel, sa place au sein de la famille, sa
situation professionnelle, etc., on ne se sent pas identiquement vieux.
24
Source : salondesseniors.com
En effet les 50 ans et plus, se sentent de plus en plus jeunes créant ainsi des écarts de plus en plus
important entre leur âge réel et leur âge ressenti.
Ainsi, nous pouvons nous interroger sur la pertinence des champs lexicaux utilisés tel que « pension de
vieillesse » pour s’adresser aux nouveaux retraités de 60 ans qui se sentent tel des quadragénaires …La
manière dont notre société définit le vieillissement social et la vieillesse, ne semble pas être en
adéquation avec les évolutions physiologiques et sociologiques vécues par les Baby-boomers sur le point
de prendre leur retraite.
Les figures d’hommes et de femmes que se donne en modèle les Baby-boomers, influent
quotidiennement, consciemment ou non, sur le vécu de notre vieillissement ; ainsi Andie MacDowell (55
ans), égérie de cosmétique pour femmes matures, serait difficilement qualifiable de « vieille ».
Il reste encore de grands progrès à faire pour comprendre, sans caricaturer, les différentes étapes de vie
des personnes en fin d’activité pour ne pas passer des clichés de jeune sénior voyageur et aventurier, au
papi dépendant et coûteux pour la société dans son monte escalier…
Nous n’avons pas encore mesuré la profondeur des maux sociaux que peut provoquer pour des
individus, la certitude que leur vie ne peut qu’être un déclin progressif et que leur existence de « vieux »
25
grèvera les conditions d’existence des autres. Aux regards de leur poids et de leur rôle fédérateur dans
notre société, principe de génération pivot22, il semble injuste de ne pas plus valoriser le parcours et
l’utilité sociale de ces générations, alors qu’ils sont bien souvent impliqués dans des activités bénévoles
ou des activités intrafamiliales (aide aux enfants pour les petits-enfants, aide aux parents âgées atteints
de maladies ou de handicaps…).
Les pouvoirs publics et les assureurs ont un champ d’action possible pour faire évoluer la
conception que l’on se fait du vieillissement et de la vieillesse : la manière dont on conçoit la
vieillesse, théoriquement, influe sur la manière dont on la vit… et réciproquement.
L’approche des individus par l’âge est peut-être obsolète, devant laisser place à une
meilleure connaissance et compréhension des marqueurs du vieillissement physiologique ou
sociaux.
Bernadette Puijalon23 : « On est socialement vieux de plus en plus jeune et biologiquement
vieux de plus en plus tard ».
2.2. Initiateurs de profondes révolutions sociétales et comportementales, les baby-boomers
vont-ils réinventer le vieillissement ?
La croissance économique constante depuis les années 1945, exception faite de quelques épisodes de
crise, a entraîné une hausse du niveau de vie des français ayant pour conséquence le développement
d’une société de consommation de masse.
Hyper communication, augmentation du pouvoir d'achat, généralisation du crédit, créent de nouvelles
demandes et de nouvelles attentes… Le confort domestique se développe (réfrigérateur, télévision,
machine à laver, automobile...), les nouvelles technologies se démocratisent et l’obsolescence de ces
équipements s’accentuant la demande continue de croître… l’émergence de la publicité de masse
(journaux, radios mais surtout la télé) a intensifié ces tendances.
La réduction du temps de travail a permis l'essor d'une société de loisirs et a transformé la vie culturelle
des pays développés. Les médias deviennent des moyens de diffusion de la culture.
22
Attias-Donfut, 1995
23
Bernadette Puijalon, anthropologue, Maître de conférences, Université Paris XII
26
Toute l’organisation de l’activité est impactée par ces phénomènes (croissance, progrès technologiques,
accès à la culture, accroissement du temps libre…) entrainant une féminisation et une tertiarisation
rapide de l’activité (75 % de l’activité en France) ainsi qu’une grande urbanisation des populations (en
1950, 28% de la population mondiale vivait en ville aujourd’hui un humain sur 2 vit en ville).
En effet, les progrès dans les transports (aviation, chemins de fer ou automobile) et la démocratisation
de ces derniers, vont permettre d’aller toujours plus loin et plus vite encourageant ainsi la mobilité des
français et l’éloignement des familles.
Progrès fulgurants, société prospère, révolution des mœurs (mai 68 : revendications féministes,
libération sexuelle...), c’est dans cette société se transformant, en partie par leurs actions, que cette
génération de 16 millions de baby-boomers s’est construite.
D’une certaine façon, le changement et le progrès sont dans leur gêne et aucunes évolutions ne créent
de rupture dans leur intégration ou leur participation à la modernisation de notre société…
A titre d’illustration Internet, la téléphonie mobile, les réseaux sociaux ont ainsi un niveau de
pénétration très important au sein de cette génération (ex : 84% des 50/60 ans équipés d’un téléphone
mobile, 95% des boomers intéressés par l’acquisition
d’un Smartphone, 68% des 50/70 ans envoient
quotidiennement des SMS, 3 millions d’utilisateurs
de 50 ans et plus sur Facebook, 12% de foyers de
séniors équipés de tablettes numériques vs 10% des
foyers français en général …24).
Cette rapidité et cette facilité à communiquer, à
effacer les distances, à consommer ainsi que ces
nouvelles valeurs de liberté et d’indépendance ne sont pas sans répercussions ! En soixante ans, les
schémas familiaux se sont radicalement métamorphosées et complexifiés, autrefois uniques ils sont
devenus multiples.
Les femmes de 68, pionnières en matière d'accès aux études et au travail, aspirent à un nouveau mode
de vie très différent de celui de leurs aînées.
24
Baromètre Doro/SeniorStrategic "Téléphonie mobile & Internet" - février 2013
27
Il n’est plus question d’une vie bien tracée mais d’une multitude de possibles où la quête du bonheur et
de l’épanouissement sont prioritaires. Les couples sont fragilisés et les rapports entre générations
transformés. En cela, les baby-boomers ont réinventé la famille : sans y renoncer, ils ont prouvé qu'elle
pouvait s'adapter au désir de liberté et aux aspirations individuelles de chacun de ses membres.
Cependant, ces baby-boomers en quête d’équilibre et de bien-être, sont confrontés, aujourd’hui, à une
situation bien particulière puisqu’ils doivent accompagner leurs parents aux âges élevés, premières
cohortes qui ont bénéficié massivement de l’augmentation de l’espérance de vie depuis 1945, alors que
leurs enfants subissent la crise économique avec la multiplication des emplois précaires et les difficultés
d’accès au logement.
Cette génération installée en position d’aidant ascendant et descendant sans y être préparée va
participer à la « révolution de l’âge que connaît la France25 » et accélérer les transformations de la
société et la façon de vivre les différents âges…Confrontés au vieillissement de leurs parents, vivant en
rupture avec la société moderne, il en sera différemment pour eux qui démontrent de plus en plus leur
capacité à s’adapter aux innovations ; il est primordial d’anticiper quelles seront leurs attentes, sans
stigmatiser les offres, car aucune rupture ne le justifie.
2.3. Une génération avec des attentes fortes en matière de services
Les femmes des années 68, plus diplômées et ayant intégré plus massivement le marché de l’emploi,
forment donc souvent des ménages bi-actifs avec un usage du temps de plus en plus intensif (dans leur
travail, autant qu’en dehors du travail). Résultats de ces nouvelles évolutions sociétales, les nouvelles
générations sont davantage demandeuses de services pour elles-mêmes ainsi que pour leurs proches.
En effet, seules 29 % des mères de deux enfants de moins de seize ans travaillaient en 1968 26,
aujourd’hui elles sont 53,9%27à travailler dans les mêmes conditions familiales ; ces femmes
représentent ainsi 47,7% de la population active. La volonté de travailler des femmes ont favorisé l’essor
des structures de services (crèche, SAP…).
25
Michèle Delaunay – Interview Patrick Lelong sur France info.
26
Source : www.womenology.fr
27
Source : www.observatoire-parite.gouv.fr
28
Ainsi entre 1995 et 2005, le nombre de ménages déclarant à l’administration fiscale employer un salarié
à domicile a augmenté de 76 %28.
La combinaison de facteurs sociétaux (taux d'activité féminin soutenu, population croissante de
personnes âgées et proportion élevée de familles monoparentales), expliquent en grande partie le fort
taux de recours aux services à la personne (SAP) ; ils permettent de mieux concilier travail et vie privée.
Les pouvoirs publics ont également joué un rôle essentiel dans la progression du recours aux services à
domicile, alors que l’emploi de personnel de maison faisait l’objet de taxes spécifiques jusqu’aux
années 1950 ; ils représentent désormais une dépense à encourager : plus de 5 milliards d’euros sont
accordés aux ménages aisés (2,3 aux seuls ménages actifs et 2,9 aux retraités imposables) en
exonérations fiscales et sociales diverses29 :
Crédit d'impôt pour les actifs employant un salarié à domicile : 1 700 millions
Réduction d'impôt pour les inactifs employant un salarié à domicile : 1 200 millions.
Exonération de TVA pour les associations agréées : 650 millions.
Taux de TVA à 5,5 % pour les services à la personne fournis par les entreprises agréées : 120
millions.
28
Centre d’études de l’emploi - janvier 2011 - Employer une femme de ménage à domicile. Pratiques et représentations
sociales
29
Le Monde Diplomatique - Mirage des services à la personne - 2011
29
Exonération des aides financières versées par l'employeur en faveur des salariés afin de financer
des SAP : 16 millions.
Non assujettissement à l'impôt sur les sociétés des associations agréées : 10 millions.
À ces dépenses fiscales, il convient d'ajouter celles concernant la Sécurité sociale :
Exonérations des aides à domicile employées par un particulier fragile : 845 millions
Exonérations des aides à domicile employées par une association ou une entreprise : 638
millions
Autres exonérations ou abattements pour les particuliers employeurs : 455 millions. 30
La nécessaire question de conciliation des temps, pendant la période d’activité, conduira certainement à
de nouvelles générations de seniors plus habitués à déléguer l'entretien du domicile ; il sera alors peutêtre plus pertinent d’orienter les politiques de l’action sociale, tel que le plan d’aide APA, vers une
logique de « solvabilisation » d’offre de services de soins et de prévention (« care »), à défaut de la prise
en charge de l’entretien domestique actuelle.
Les français confient leur domicile, leurs enfants ou proches fragilisés, à ces intervenants des services à
domicile, ils sont en attente de services de qualité et d’intervenants qualifiés.
Cette attente importante de choix et de qualité de service se retrouve également dans le domaine de la
santé. Nous pouvons en effet parler depuis quelques années de « consumérisme » de la santé.
La santé, une des premières préoccupations des Français, est un bien qui coûte cher.
L’augmentation croissante des dépenses de santé influe sur tous les secteurs de la santé. Mais les
français sont prévoyants et veulent de plus en plus et à tout âge préserver leur santé. Ils se préoccupent
dorénavant d’avoir la meilleure qualité de soins possible.
30
Lois de finances et lois de financement de la Sécurité sociale - Principales dépenses fiscales et sociales du champ des
services à la personne (SAP) en 2008
30
Il est important de souligner que l’effet lié au vieillissement de la population sur le système de santé se
décompose en deux volets :
D'une part, un effet mécanique lié à l'augmentation des effectifs des personnes âgées.
D'autre part, un effet génération, lié au fait qu'à âge égal des générations distinctes consomment
différemment.
L'impact de la structure par âge sur les dépenses de soins était estimé à 0,4% dans les années 80, à 0,5 %
dans les années 90, et devrait augmenter entre 2000 et 2020 pour se situer aux alentours de 0,7% par
an31.
On ne peut donc pas réduire aux seuls effets de l’âge l’évolution de la consommation.
En effet, rien ne permet d’affirmer que lorsqu’on compare plusieurs générations à une même date, le
comportement des anciennes générations préfigure celui des nouvelles générations quelque 25 ou 30
ans plus tard.
C’est même d’autant moins probable que dans la société actuelle coexistent des générations nées au
début du siècle, qui ont vécu des périodes de guerre et de pénurie, des générations nées dans les
années 30 et jusqu’au baby-boom, qui ont grandi pendant les « trente glorieuses », et des générations
nées après les années 50, qui ont connu le ralentissement de la croissance assez jeunes.
Les dépenses de santé augmentent avec l’âge. Cependant, le profil selon l’âge observé sous-estime
légèrement cette tendance : à revenu, taille de ménage et âge donnés, les générations les plus
anciennes ont, selon leur niveau de diplôme, des dépenses de santé de 2 à 3 fois plus faibles que les plus
récentes. Il se peut qu’à cet effet s’ajoute un effet d’offre, car l’offre médicale s’est élargie et diversifiée
tout au long du siècle32.
L’existence d’un facteur culturel, nettement renforcé par les couvertures assurantielles, donne à chaque
génération un peu plus l’habitude de consulter régulièrement un médecin, et d’avoir plus
systématiquement recours à toutes les possibilités offertes par le système de soins.
31
32
Etude pour le LEEM avec la collaboration d’IMS Health pour la fourniture des données-2007
ÉCONOMIE ET STATISTIQUE N° 324-325 - Les effets d’âge et de génération sur le niveau et la structure de la consommation
31
Ainsi depuis maintenant plusieurs décennies et dans la plupart des pays, on observe une augmentation
de la part de la richesse nationale consacrée à la production de services de santé. En France, la
consommation de santé et de biens médicaux (CSBM) représentait 2,5 % du PIB en 1950, 3,4 % en 1960,
6,3 % en 1980 et 8,7 % en 2007 pour atteindre 9 % en 2011.
En effet en 2011, chaque Français dépensait en moyenne 1 282 € en soins d’hospitalisation, 701 € en
soins de ville (soins de médecins, d’auxiliaires…) et 532 € en médicaments. Au total, il a consacré 2 815 €
pour sa santé.33
Les assurances souscrites à titre individuel, et les frais restant à la charge des ménages, ont ainsi
représenté en 2011 près de 10% de la consommation de soins et de biens médicaux (CSBM). 34
Ce sont donc des centaines de milliers de postes supplémentaires (infirmiers, aides-soignants, aides à
domicile…) qui seront nécessaires pour répondre aux attentes de toute une génération (350 000 postes
d’ici 10 ans selon la Dares).
Le développement de couvertures assurantielles a eu une influence importante, d’une part
en diminuant le coût ex-post des soins de santé, d’autre part en agissant sur l’offre de soins,
dans la mesure où le système d’assurances « organise » le secteur de production de la santé.
Brigitte Dormont, en 2006, estimait que dans les évolutions des dernières années, les
changements de pratiques (qui recouvrent des effets de génération et des effets de progrès
technique) ont été 3,8 fois plus importants que les changements d’ordre démographiques 35.
Lors de la survenance de la dépendance pour la génération « babyboom », la demande sera
certainement très forte en termes d’organisation des services (services à la personne et
services médico-sociaux). Les assureurs devront-être en mesure d’apporter la réponse
organisationnelle adaptée.
33
IRDES - Consommation médicale totale en 2011
34
Haut Conseil du financement de la protection sociale - « Etat des lieux du financement de la protection sociale en France »31 octobre 2012
35
DGTPE : Les dépenses de santé en France : déterminants et impact du vieillissement a l’horizon 2050
32
2.4. Un niveau de pouvoir d’achat significatif
Les personnes dont nous parlons et auxquelles nous faisons référence en mentionnant et en projetant le
choc démographique, auquel nous allons assister, correspondent à la génération du « baby-boom ». Ces
seniors présentent des caractéristiques et des attentes très différentes des générations qui les ont
précédées, nous l’avons constaté, mais c’est aussi une génération présentant une nouvelle aisance
financière : en effet les foyers ont en majorité une double retraite puisque 70% des femmes ont travaillé
et ils ont également un patrimoine plus important (plus de 70% sont propriétaires de leur logement).
Source : BAYARD PUBLICITE - Revenu net imposable annuel d’après Ministère des Finances
33
Ainsi le patrimoine moyen des tranches d’âge des 50-54 ans est de 246 000 euros, des 55-59 ans de
260 000 euros et des 60-64 ans de 224 900 euros soit deux fois plus élevé que le patrimoine moyen
actuel des 85 ans et plus qui est de 119 000 euros36.
Les ménages accumulent un patrimoine tout au long de leur vie, il est logique que la détention d’un
patrimoine immobilier progresse avec l’âge et les différentes étapes de vie.
Source : BAYARD PUBLICITE
Les trois quarts des retraités sont ainsi propriétaires d’au moins un logement contre un peu moins de
60% pour l’ensemble de la population. Et près de 20% détiennent un autre logement à côté de leur
logement principal contre 12% pour l’ensemble des ménages.
Les retraités, en France, sont également d’importants épargnants jusqu’à 75 ans. A compter de 65 ans,
ils diversifient leur patrimoine à des fins entre autre de prévoyance 37
36
Sources Insee, enquête patrimoine - 2004
37
Sources Insee, patrimoine des ménages 2009
34
Actuellement, les ménages de plus de 70 ans sont :
À 83 % titulaires d’un compte sur livret
À 27 % titulaires d’un plan d’épargne logement
À 33 % d’un contrat d’assurance-vie
La progression constante du taux d’emploi durant la seconde moitié du 20ème siècle, a procuré un plus
grand nombre d’apporteurs de ressources par ménage et des droits à la retraite plus importants grâce à
la généralisation du système de retraite, ce qui explique la constante progression des revenus hors
patrimoine de ces seniors. Dans le même temps, l’évolution des prix de l’immobilier et le souci
d’épargne accru des ménages ont constitué des moteurs constants de la croissance des patrimoines.
Le niveau moyen de vie des seniors les plus âgés va donc s’élever dans les années à venir. Sur les 20
prochaines années, les nouveaux retraités seront plus riches que les ceux des générations précédentes.
Les droits des personnes partant à la retraite (et en particulier en ce qui concerne les femmes)
augmenteront et le niveau de patrimoine (en particulier pour l’immobilier), des futurs retraités et des
futures personnes potentiellement
dépendantes, devrait être supérieur
à celui des actuels plus de 85 ans.
Cependant au-delà de 20 ans, ce phénomène de valorisation des revenus et du patrimoine peut être
remis en cause ; la réforme du système des retraites, la difficulté d’insertion des jeunes actifs, les
interruptions de carrières (chômage), l’augmentation des prélèvements obligatoires, les coûts d’accès à
l’immobilier sont autant d’éléments qui ralentiront la constitution de patrimoine pour les futures
générations.
35
En 2030, 50% des personnes de référence, au sein des ménages, auront plus de 55 ans et la
moitié de la consommation française sera réalisée par des personnes de plus de 65 ans38. Il
est important d’intégrer le niveau élevé de pouvoir d’achat, d’actifs financiers et de biens
immobiliers des seniors de demain pour préparer les modèles de prise en charge financière à
venir.
2.5. Vers une nouvelle société plus réceptive aux attentes des seniors ?
Après être passé par des changements d’environnement social aussi considérables, ce serait une erreur
de ne pas vouloir toujours bénéficier d’une évolution de la représentation des personnes âgées, jouir
des nouvelles relations entre les générations et des nouveaux styles de vie familiaux dessinés par nos
aînés.
Il est vital que ceci soit reconnu par les individus, les familles, les médias et la société dans son
ensemble.
Des initiatives « ponctuelles » et originales basées sur le « design pour tous », telles des déambulateurs
signés Philippe Starck39, sont salutaires pour mieux faire accepter les nécessités de l’âge, et endiguer le
déni de vieillesse. Cependant sans une mise œuvre de concert entre, pouvoir public, entreprises privées,
associations, vers un nouveau consensus sur les modalités à déployer pour permettre et diffuser une
culture « du vieillissement positif », les considérables progrès à réaliser peineront à prospérer dans un
nouvel environnement social en pleine mouvance.
Mais il semble que les nouveaux seniors « les papys boomers » de par leur poids économique, leur
place historique et leurs attentes nouvelles soient en mesure d’inciter la société à relever ce défi.
Ce sont les évolutions démographiques qui imposent de changer radicalement nos manières de penser
et de gérer les âges et les temps sociaux différent, certainement le début d’une longue transition des
« papys gâteaux » aux « papys gâtés »40…
38
« Le consommateur de demain ? Plus âgé, plus connecté et rationnel »-28/11/2012
39
« Bientôt des déambulateurs signés Philippe Starck » - latribune.fr | 10/11/2012
40
Article Le parisien décembre 2009 – « La génération de Mai 68 profite à plein de sa retraite »
36
En effet, la longévité croissante, due aux avancées de la médecine et de la santé publique, produit des
seniors dynamiques et en bonne santé, dotés d’une autonomie prolongée jusque dans le grand âge.
La question est donc de s’attacher à développer des politiques marketing et de nouveaux moyens de
communication, susceptibles de capitaliser « sociétalement », sur ce nouveau potentiel de croissance.
Cela passe par, entre autre, une nouvelle gestion de la diversité et de la synergie des âges, afin de
construire une société pour tous les âges.
Jusqu’à présent, la gestion des âges et des temps sociaux reposaient avant tout sur une utilisation à
outrance de la segmentation par l’âge dans les politiques marketings. Le résultat a été une amplification
des barrières d’âge et de la discrimination par l’âge. L’âge est aujourd’hui en France l’un des premiers
facteurs de discrimination dans l’emploi, dans les rencontres, dans le sport, dans la culture, dans la
politique…
Cette gestion de la diversité des âges et de la nouvelle solidarité entre les générations demeure
largement à inventer41.
Cela suppose d’adopter de nouveaux instruments, dans les politiques de communication, plus orientés
sur les notions dynamiques de parcours, de cycle de vie et de valeurs communes qu’au seul critère de
l’âge ; en effet, la communication à destination des 50 plus, nécessite de prendre en compte de
nombreux facteurs : les effets de générations, les CSP, le vieillissement ou la maturité psychologique…
Entre une communication très orientée « Senior » et une communication généraliste, plusieurs
stratégies sont possibles.
C’est à ce prix et en se servant de l’opportunité et de la force de cette génération de senior
«révolutionnaire» que l’on pourra faire du vieillissement des sociétés une opportunité pour inventer
une nouvelle gestion des âges, capable d’édifier une société pour tous les âges où la cohésion sociale et
la solidarité entre les générations seraient renforcées.
41
6e Conférence internationale d’analyse et de recherche en sécurité sociale -2010
37
Et de belles initiatives fleurissent en ce sens, tel que les projets de Sacha Goldberger, photographe
français, autour de « Mamika » projet naissant de l'amour qu'un petit fils peut avoir pour redonner à sa
grand-mère de 93 ans la fierté d'exister et invoquant ainsi un nouveau paradigme : « Old people just
want to have fun ».
Il est facilement observable que les sujets attractifs pour tous (cosmétiques, nourriture,
loisir….) sont abordés de manière à satisfaire cette nouvelle cible mais est-ce que ce
phénomène d’acceptation de soi à tout âge et dans la réalité de cet âge permettra de
dépasser des tabous tels que la dépendance, la maladie, la vieillesse, la solitude…..Est-ce que
la communication des entreprises d’assurance parviendra à sensibiliser et faire accepter le
sujet « sensible » de la dépendance (bonne terminologie ?) auprès de cette génération de
nouveaux seniors (qui rappelons-le à une espérance de vie de 82ans), alors qu’il s’agit d’un
sujet très peu abordé et souvent peu attrayant.
3. L’aide informelle, une réalité à intégrer
3.1. Aide informelle: qualification et quantification de cette aide
De quoi parle-t-on, quand on parle d’aide informelle ? Il s’agit d’une aide de longue durée apportée à un
proche pour compenser sa perte d’autonomie par une personne non professionnelle. Cette notion
d’aide est vaste et complexe, allant bien au-delà d’une aide matérielle, puisqu’il s’agit d’une aide
multidisciplinaire dans la vie de tous les jours, intégrant aussi bien les domaines sanitaires que sociaux.
Une redéfinition du périmètre du risque à partir de l’intégration du rôle des proches est de rigueur. Le
risque dépendance n’implique plus seulement la personne dépendante.
38
Pour mesurer ses répercussions, il est maintenant pris en compte :
les impacts de la perte d’autonomie d’un individu sur son entourage;
les impacts indirects sur les entreprises de cette aide informelle, qui se traduit par une
moindre productivité.
Cette nouvelle détection de segment, reposant sur une population aux besoins spécifiques, est appelé «
aidants », et est de plus en plus courtisée par les assureurs. « S'occuper d'une personne dépendante
prend environ cinq heures par jour. Pour les aidants, dont 70 % occupent un emploi, cela peut s'avérer
très lourd »42.
La prise de conscience de ce rôle informel des aidants est relativement récente. La prise en compte des
risques indirects portant sur les aidants élargit le périmètre du sujet de la dépendance. La population
d’aidants de personnes âgées dépendantes est en effet de l’ordre de 4 à 4,3 millions de personnes en
France43.
En effet, l’aide informelle représente un engagement important des proches. L’aide étant en moyenne
apportée pendant 4,1 ans et pour 63% des aidants à fréquence quotidienne44.
Les aidants réalisent ainsi entre trois et quatre actes en moyenne lors de leurs interventions
principalement pour assister leur proche dans leur vie courante : Repas, toilette, entretien du domicile,
réalisation des courses… Un aide entrainant bien souvent des répercussions importantes sur le mode de
vie ou la santé des aidants.
Ce constat fait et leur légitimité confortée, aujourd’hui ce sont approximativement 75% de personnes
dépendantes qui sont aidées par un proche, cette « communauté émergente » appelée aidants
familiaux, aidants informels ou encore aidants naturels a été source de nombreuses études.
42
Bruno Carles, directeur général adjoint de Predica -Les Echos n° 21262 du 04 Septembre 2012 - page 26
43
Dress – Etudes et résultats n°799 – mars 2012
44
Etude Ifop pour la MACIF - 2008
39
Les « aidants » d’accord, mais qui sont-ils exactement?
A l’heure actuelle il est observé qu’une grande partie de l’aide informelle est portée par des femmes ; en
effet dans les fratries lors de perte d’autonomie d’un parent, l’aide est apportée dans trois situations
sur quatre par les filles et par l’épouse dans 70% des cas en situation lors d’aide au conjoint. Les femmes
assument donc davantage ce rôle d’aidant.
Face à une situation similaire, les époux lors de perte d’autonomie (de niveau similaire) de leur
conjointe procèdent plus souvent à une démarche d’institutionnalisation45.
45
Population et sociétés n°483 – Novembre 2011
40
Ce rôle, pris à bras le corps par les proches, ignorant souvent l’ampleur de la tâche qui les attend et sans
aucune qualification requise, a souvent des répercussions importantes sur la vie de l’entourage familial :
L’aide informelle correspond à l’équivalent de 500 000 emplois et sa valeur est estimée à 8
milliards d’euros. Formaliser de nouvelles solutions intégrant le rôle joué par les aidants
apparaît comme un enjeu clé. En poussant la logique à son terme, on devrait assister à
l’éclosion d’offres spécifiquement dédiées aux aidants, qui permettraient de réellement les
accompagner face aux risques liés à la perte d’autonomie d’un proche.
41
3.2. Aidants familiaux : une cible mieux définie mais potentiellement évolutive
Cependant ce profil type défini à l’heure actuelle, semble se prêter à être évolutif au regard de la
féminisation du travail, de l’évolution de l’aide apportée, des effets démographiques annoncés, de
l’éclatement géographique et des structures familiales :
Dès 2015, la génération des 40/59 ans sera moins nombreuse que la génération des plus de
60 ans. Les effectifs potentiels d’aidants informels des personnes âgées de 75 ans et plus
seront insuffisants à compter de 2020-2025. Ainsi, le nombre de personnes appartenant à la
classe d’âge des 50 à 79 ans (soit 80% des aidants non professionnels potentiels) progressera
de plus de 20% entre 2010 et 2040, tandis que le nombre de personnes âgées de 75 ans et
plus augmentera de près de 90%.
Par ailleurs, le nombre réel d’aidants non professionnels pourrait être encore
significativement inférieur au potentiel projeté, compte tenu notamment de la diminution
sur la période du nombre de femmes inactives âgées de 50 à 64 ans, de l’éloignement des
enfants du domicile des parents âgés, de l’éclatement des cellules familiales, de
l’impossibilité de concilier vie professionnelle et rôle d’aidant ou encore du choix des jeunes
retraités de se tourner davantage vers leurs descendants (enfants et petits-enfants).
42
La socio-démographie défaillante des aidants informels (familles et proches) est un facteur
favorable au développement d’une offre de prestations professionnelles dites formelles.
Néanmoins, la substitution aide informelle/aide formelle n’est que partielle. La famille et les
proches continuent à jouer un rôle social grandissant en fonction du niveau de dépendance
de la personne accompagnée. Ils sont également souvent à l’origine du recours à une aide
formelle. Ils ont également un rôle déterminant dans le processus d’entrée de la personne
soutenue en institution.
Le rééquilibrage des rôles familiaux et professionnels va transformer la nature de l’aide et des solidarités
des aidants potentiels.
Aujourd’hui plus de femmes âgées sont aidantes, avec la diminution de l’écart d’espérance de vie
homme/femme, la situation sera différente et plus d’hommes seront en situation d’aidants potentiels.
Les nouvelles générations de femmes plus impliquées dans leur travail, en situation de monoparentalité,
ou car elles n’ont pas le choix, seront moins à même de sacrifier leur activité professionnelle. Plus
habituées à consommer du service, elles feront peut-être évoluer la nature et la quantité d’intervention
pour avoir recours, comme les hommes aujourd’hui, à plus de prestataires de service ou à un partage de
tâche plus équitable.
L’aide à l’aidant va trouver un écho de plus en plus important face au public salarié (souvent
féminin). Disposant de moins de temps, les services, associés au contrat, d’aide à l’aidant
améliorent alors l’utilité perçue de l’assurance dépendance par les salariés et élargissent la
cible de prescripteurs et de clients potentiels des assureurs.
3.3. Aide financière : Un énorme reste à charge pour les familles
Selon l'Insee, le nombre de personnes dépendantes, assimilées aux bénéficiaires de l'aide personnalisée
d'autonomie (APA), devrait augmenter de 60 % d'ici 2040, pour atteindre 1,6 million contre 1,2 million
en 2011. La couverture publique française de la dépendance, pour faire face à cette tendance, est
relativement élevée, elle se situe au 7ème rang mondial mais elle reste cependant insuffisante :
Le tarif hébergement arrêté par le Conseil général est acquitté par le résident qui peut bénéficier
d’une prise en charge totale ou partielle avec l’aide sociale départementale qui pourra être
remboursée au titre de l’obligation alimentaire ou d’une récupération sur succession.
43
Le tarif soins arrêté par le directeur de l’Agence régionale de santé est pris en charge par
l’assurance maladie. Le tarif est variable en fonction du mode de fonctionnement de
l’établissement.
Le tarif dépendance arrêté par le Conseil général. Il est acquitté par le résident qui peut
bénéficier de l’APA. Logiquement, ce tarif recouvre les dépenses de surveillance et d’assistance.
L'allocation personnalisée d'autonomie (APA) sert donc au financement de la dépendance, elle est
attribuée par le conseil général en fonction du niveau de dépendance -GIR- groupe iso-ressource et
suivant le niveau de revenu :
Les personnes âgées en maison de retraite ou en EPAD peuvent en bénéficier elle sert à financer
le budget Dépendance dans la convention tripartie des établissements.
Les personnes âgées avec des revenus importants qui utilisent les services d'aide à domicile
peuvent également déduire cette prestation en fonction de leur niveau de GIR.
Mais cette aide publique, versée par les conseils généraux, est loin de couvrir la totalité des frais
engendrés par la dépendance :
En cas de prise en charge à domicile de la personne âgée, la prestation APA moyenne servie en
2011 à domicile était de 489 €/mois alors que le coût total s'élève à 1.800 euros par mois, dont
302 euros restent à la charge des familles.
En cas de placement en maison de retraite, la prestation APA moyenne servie en 2011 était de
517 €/mois pour un coût moyen de 2.500 euros mensuels, dont 887 euros pris en charge par les
conjoints ou enfants.
Le reste à charge (RAC) des ménages en matière de prise en charge de la dépendance est prohibitif et le
plus souvent sous-estimé. Sur les 34,3 milliards d’euros consacrés au financement de la dépendance en
2010, plus de 10 milliards d’euros, soit quasiment un tiers de cette somme, étaient à la charge des
ménages. En excluant les frais médicaux, on arrive même à un taux de financement par les ménages de
l’ordre de 50%.
44
L’assurance privée ne joue aujourd’hui qu’un rôle mineur dans le financement de ce reste à charge, avec
environ 200 millions d’euros de prestations versées en 2010 (soit moins de 2% du RAC). Cette part va
nécessairement progresser dans les années futures, la diffusion du produit auprès du grand public
n’ayant véritablement démarré que très récemment, à partir des années 90.
L’essentiel du reste à charge des ménages en matière de dépendance relève des dépenses
d’hébergement (près de 80% des frais).
Répartition du reste à charge des ménages dans la prise en charge de la dépendance
unité : % du reste à charge des ménages
Source : Xerfi-Precepta d’après rapport du groupe n°4 du débat sur la dépendance présidé par Bertrand Fragonnard
En effet, malgré une part importante des soins prise en charge par la sécurité sociale et la perte
d’autonomie par l’Etat :
45
Le reste à charge des familles, sur une durée moyenne de dépendance de 4,4 années 46, est conséquent
avec un montant moyen de 67 000 € à domicile, et pouvant atteindre 140 000 € 47 en établissements, soit
des dépenses mensuelles moyennes allant de 1 300 € à 2 900 €.
3.4. Aidants salariés, une prise de conscience pour les entreprises
Les entreprises saisissent également l'enjeu, avec le vieillissement de la population et l'allongement de
la durée d'activité, elles prennent conscience que de plus en plus de salariés seront conduits à concilier
leur vie professionnelle avec des responsabilités d'aidant d'un parent âgé ; ainsi les premiers résultats
d’études de la CNSA sont plutôt éloquents :
47 % des aidants occupent un emploi (ou sont apprentis).
36 % des aidants évoquent un impact négatif sur leur vie professionnelle.
26 % des aidants travaillant ou ayant déjà travaillé ont déjà pris des congés pour assurer leur
rôle.
15 % ont fait des aménagements dans leur vie professionnelle, dont 65 % ont changé leurs
horaires de travail et 36 % les ont réduits48.
L’aidant en emploi doit arbitrer entre son temps de travail, son temps d’aide, sa famille et ses loisirs.
Aujourd’hui ce sont 14% des salariés qui sont en situation d’aider un proche dépendant 49 et la tâche ne
s’avère pas évidente puisque qu’avec la charge engendrée, les aidants se voient contraints de renoncer
à certaines opportunités professionnelles ou d’accepter des emplois moins rémunérés50.
46
INSEE - La dépendance des personnes âgées : une projection en 2040
47
Etude UFC-Que Choisir : « Prise en charge de la perte d’autonomie des personnes âgées : pour un nouveau schéma de
financement »
48
Rapport d’activité de la CNSA 2011 – Avril 2012
49
Etude santé et bien-être des salariés - Sociovision/Malakoff Médéric- 2012
50
6ème Forum Social de l’UMC - Personnes handicapées ou dépendantes : quels accompagnements ?
46
En effet, selon une note du Haut Conseil de la Famille51, les aidants informels qui occupent un emploi et
aident au moins une personne âgée de plus de 60 ans vivant à domicile (soit environ 1,7 million
d’aidants informels et 1,4 million d’aidants familiaux) ont connu des répercussions sur leur vie
professionnelle :
77% (soit 1,3 million) ont modifié leurs horaires de travail (dont 37% - soit 630 000 - ont réduit
leur nombre d’heures) ;
un sur quatre (soit environ 400 000) a déjà pris des congés pour assurer son rôle d’aidant (durée
moyenne de congés de 16 jours52);
15% (soit 260 000) se sont rapprochés de leur lieu de travail ou ont opté pour le télétravail ;
15% ont connu un arrêt de travail (arrêt maladie, arrêt d’activité ou retraite anticipée) ;
13% ont changé la nature de leur travail (avec ou sans changement d’employeur) 53.
9% des aidants exerçant une activité professionnelle se seraient vu refuser une promotion du fait
de leur rôle d’aidant et 11% auraient du en refuser une de leur propre initiative54
Concernant spécifiquement les aidants familiaux de personnes atteintes de la maladie d’Alzheimer, 24%
(et 54% lorsqu’il s’agissait d’enfants de la personne malade) ont dû réaménager leur activité
professionnelle55.
Entre les congés sans solde, la réduction du temps de travail et les freins rencontrés au cours de leur vie
professionnelle du fait de leur rôle d’aidants, les aidants estiment le manque à gagner annuel lié à leur
situation d’aidant à environ 20% de leurs revenus.
51
Haut Conseil de la Famille - La place des familles dans la prise en charge de la dépendance des personnes âgées - 2011
52
L’enquête BVA – Novartis menée en 2009
53
DREES - L’aide aux personnes âgées et leurs aidants informels », 2011.
54
Enquête BVA – Novartis – 2009
55
Etude Pixel – L’entourage familial des patients atteints de la maladie d’Alzheimer – Novartis
47
Metlife, a d’ailleurs à ce propos publié une étude de l'impact sur la vie professionnelle ; le fait d'être un
aidant familial, met notamment en exergue le coût financier professionnel pour l’aidant familial :
diminution ou arrêt de travail et perte de revenus au moment de la retraite.
Ces données sont celles du marché américain mais ils semblent qu’en France la situation ne soit pas
réellement différente et il est clair que ces coûts ne sont pas anodins.
En conséquence, l’ajustement de l’aide, se réalise principalement sur les temps familiaux et sociaux. Les
loisirs et le temps passé auprès des enfants et du conjoint se réduisant, des déséquilibres ou des
désorganisations de la cellule familiale peuvent également s’ajouter, augmentant le « stress de l’aidant
salarié ».
Les assureurs peuvent développer une offre dédiée aux aidants, qui permettrait de
réellement les couvrir face aux risques de perte de revenu et de droits sociaux, tout en les
accompagnant dans une meilleur conciliation entre vie d’aidant et vie professionnelle. Ils
réduiraient ainsi les impacts directs de la perte d’autonomie d’un individu sur son entourage
et les impacts indirects sur les entreprises de cette aide informelle, qui se traduit par une
moindre productivité.
48
En synthèse de cette première partie, nous pouvons donc constater qu’il existe de réels
moteurs sociodémographiques, économiques et socioculturels, porteurs pour le marché de
l’assurance dépendance.
L’augmentation du nombre de personnes âgées, des maladies chroniques, des coûts à la
charge des personnes âgées ou de leur proche et la diminution du nombre d’aidant
potentiel, sont autant d’enjeux à relever pour les années à venir.
La sensibilisation croissante au sujet de la perte d’autonomie, le niveau de vie supérieure des
seniors, leur souhait de réponses qualitatives et leur technophilie grandissante, sont des
leviers favorables au développement de nouvelle stratégie d’offre.
Nous verrons ainsi dans le chapitre suivant quels sont les évolutions des dispositifs publics
existants et leurs limites ainsi que le niveau de préemption du marché par les organismes de
protection sociale complémentaire.
Nous aborderons également quelles sont les solutions (sociétales, financières et services)
apportées par les leaders du marché de l’assurance dépendance pour répondre à ces
nouvelles dynamiques démographiques et socioculturelles (Effet générationnel fort,
vieillissement polymorphe…) ; mais également les nombreux freins qui entravent le potentiel
de croissance du marché.
49
[CHAPITRE 2]
UN SECTEUR PUBLIC QUI N’A PAS ENCORE CADRE L’ENSEMBLE DE SES INTERVENTIONS ET
DES ASSUREURS DANS « L’INCERTITUDE », DONT L’APPETENCE A CE NOUVEAU MARCHE
S’AFFIRME.
QUELLES TENDANCES OBSERVEES?
50
CHAPITRE 2 : UN SECTEUR PUBLIC QUI N’A PAS ENCORE CADRE L’ENSEMBLE DE SES INTERVENTIONS
ET DES ASSUREURS DANS « L’INCERTITUDE », DONT L’APPETENCE A CE NOUVEAU MARCHE
S’AFFIRME. QUELLES TENDANCES OBSERVEES?
1. Un environnement réglementaire qui laisse une place à l’assurance
1.1. Un environnement législatif et politique en pleine évolution
A partir de 1905 est née la politique sociale en faveur des personnes âgées :
Loi de 1905 :
Principe de l’assistance
obligatoire aux vieillards
indigents, infirmes et
incurables.
Cette disposition légale
offre ainsi aux personnes
âgées sans revenus la
possibilité d’être
accueillies dans des
hospices ou de percevoir
une pension.
Loi de 1910 :
1947 :
1960 :
La législation de1905
est complétée par la loi
du 30 avril 1930 sur les
assurances sociales qui
garantissant un revenu
minimum vieillesse.
Mise en place des
régimes
complémentaires
de retraite.
La notion de
politique vieillesse
fait son apparition.
Loi de 1910 :
La législation de1905
est complétée par la loi
du 5 avril 1910 sur les
retraites ouvrières et
paysannes
1945 :
Lendemain de la guerre.
Les pouvoirs publics
instaure la branche
vieillesse de la Sécurité
Sociale par l’ordonnance
du 04/10/1945,
correspondant au risque
social de devenir vieux. .
1956 :
La lutte contre la pauvreté
des personnes âgées, en plus
des systèmes de retraite,
s’est concrétisée avec la
création du minimum
vieillesse en 1956, la création
des pensions de réversion et
la création de l’allocation
veuvage.
C’est à partir de 1960 que se constitue le véritable point de départ de la politique gérontologique
française. Avec notamment en 1962 la publication du rapport Laroque où sont clairement présentés les
objectifs de notre société moderne :
Changer le regard sur la vieillesse, ne pas exclure de l’emploi les personnes âgées ;
51
Développer la prévention ;
Développer la coordination entre les politiques sectorielles au niveau national et entre les
actions locales ;
Mettre en œuvre une politique d’actions médico-sociales qui privilégie le soutien à domicile
grâce à l’adaptation des logements individuels et au développement des services d’aide et de
soins à domicile.
Ces objectifs sont plus que jamais d’actualité.
Puis dans le contexte démographique des années 1970-1990 qui a vu croître la proportion de personnes
âgées, la mise en place progressive de prises en charge différentes selon l’âge, notamment pour des
questions de coût, a entraîné une cohabitation de plusieurs systèmes d’aide à la perte d’autonomie qui
complexifie le dispositif administratif actuel.
Loi du 20 juillet 2001 :
Loi du 24 janv. 1997 :
Loi du 30 juin 1975 :
Création de l’ACTP
(Allocation compensatrice
tierce personne): Aide en
espèce aux personnes
frappées par un taux
d’incapacité de 80%.
Création de la PSD
(Prestation spécifique
dépendance)
- Utilisation de la grille
Aggir
- Aide en nature pour les
+ de 60 ans de Gir 1 à 3
-recours sur succession
Création de l’APA
(Allocation personnalisée
d’autonomie)
-Aide en nature pour les
+ de 60 ans de Gir 1 à 4
-Plus de recours sur
succession
Loi du 11 fév. 2005 :
Révision de la loi de 1975
Création de la PCH
(Prestation compensatrice
du handicap)
Loi du 25 juillet 1994 :
Création de la Ped
(Prestation expérimentale
dépendance)
Mise en place d’une
« Barrière d’âge »
-de 60 ans sont handicapés
et touchent l’ACTP
+de 60 ans sont dépendants
et touchent la Ped
Loi du 9 juin 1999 :
Création du congé
d’accompagnement d’une
personne en fin de vie .
Loi du 30 juin 2004 :
Création de la Journée
de la solidarité
Loi du 2 mars 2010 :
Création du congé de
solidarité familiale
52
La réglementation s’est construite au détriment des personnes dépendantes les plus âgées.
Le montant mensuel versé au titre de la PCH (Prestation compensatrice du Handicap) s’élève à
980 euros en moyenne, tandis que le montant mensuel de l’APA ne dépasse pas en moyenne
500 euros. De plus, des dérogations existent afin de conserver la PCH au-delà de 60 ans.
La Loi de 2005 qui devait étendre la PCH dans un délai de 5 ans aux plus de 60 ans handicapées
et dans un délai de 3 ans aux enfants handicapés n’a finalement été étendue qu’à ces derniers
(décret du 7 mai 2008).
En 2001, l’APA (Allocation personnalisée d’autonomie) a permis cependant d’étendre la prise en
charge des personnes âgées dépendantes en Gir 4 et de faire de la dépendance une
responsabilité de l’état, et non plus uniquement des familles. En 2010, 1,16 millions de
personnes âgées ont perçu l’APA.
Cependant des évolutions importantes ont vu le jour impactant notamment sur le bien être individuel et
collectif des personnes fragilisées :
la PSD (Prestation Spécifique Dépendance) qui correspondait à l’aide en nature destinée aux plus
de 60 ans (ancienne APA) a permis de développer les services à la personnes, qui ont connu une
croissance importante depuis les années 2000. Des exonérations fiscales et des réductions
apparaissent alors pour les particuliers qui deviennent des employeurs à domicile.
Le congé de solidarité familiale (ancien congé d’accompagnement d’une personne en fin de vie)
est également un progrès important, ayant permis aux proches salariés d’assister un proche
gravement malade. Non rémunéré par l’employeur, il peut cependant percevoir sur une période
maximum de 21 jours, une allocation journalière d’accompagnement d’une personne en fin de
vie versée par l’Assurance Maladie. Depuis le décret du 14 janvier 2011, le montant de
l'allocation pour accompagner un proche en fin de vie est fixé à 53,17 euros et à 26,58 euros par
jour s’il réduit son activité.
Les débats sur la réforme de la dépendance débutés en 2010, posent aujourd’hui, la question d’un droit
universel à la compensation de la perte d’autonomie en remplacement de la kyrielle d’aides sociales et
fiscales.
Ainsi au cours de la campagne présidentielle, François Hollande a fait plusieurs déclarations d’intention
allant dans le sens d’une réforme de la dépendance :
53
Création d’une nouvelle branche de la Sécurité Sociale pour prendre en charge les dépenses liées
à la perte d’autonomie (aides à domicile, hébergement en maison de retraite, etc.)
Création d’une cotisation spécifique pour le financement
Promulgation d’une loi d’orientation sur l’allongement de la vie pour prendre en compte le
vieillissement de la population dans les politiques publiques : obligation pour les programmes de
construction d’inclure des logements adaptés pour le maintien à domicile, ou valorisation du
secteur des services d’aide à domicile par exemple.
Adaptation de 80 000 logements par an pour permettre aux personnes en perte d’autonomie de
rester chez elles
Doublement du plafond de l’APA pour les personnes les moins autonomes
Actions de formation pour les aidants familiaux et développement de structures de répit.
Accent mis sur la prévention, avant le financement des personnes déjà dépendantes
Début septembre2012, Michèle Delaunay, Ministre chargée des personnes âgées, a donc relancé l’idée
d’un projet de loi sur la dépendance, qui devrait voir le jour dans la première moitié du quinquennat
allant en ce sens :
Exclusion de la création d’une cinquième branche de l’assurance maladie
Un financement de solidarité nationale excluant un financement privé
Apparition dans le PLFSS 2013 d’une taxe dépendance de 0,30% dès le 1er avril 2013 pour 7.5
millions de retraités (imposés à la CSG à taux réduit de 3.8%). Cette nouvelle entrée d’argent
sera attribuée au budget de la Sécurité Sociale en 2013, puis à celui de la dépendance et de la
perte d’autonomie dès 2014.
54
L’amélioration de la prise en charge de la dépendance ne sera pas le seul axe du nouveau projet de loi. Il
sera orienté autour de trois axes :
Prévention
Adaptation de la société (ex. : adaptation du logement)
Accompagnement des personnes en lourde perte d’autonomie.
Les assureurs de leur côté, militent pour une logique de labellisation des offres :
Référentiel commun d’évaluation
Conditions d’adhésion
Transférabilité des droits acquis
Revalorisation des rentes
La prise en charge de la perte d’autonomie s’est donc à la fois étendue et « hybridée », à travers
l’allocation personnalisée d’autonomie, et dans une moindre mesure sur la prestation de compensation
du handicap, allant jusqu’au développement de prestations empruntant à la fois aux logiques
assurantielle et assistantielle.
Au-delà de l’évolution législative, les pouvoirs publics ont donné les grandes orientations de politiques
publiques et sociales en faveur des personnes âgées, en promulguant la mise en place de plans d’actions
au niveau national :
Ainsi en Novembre 2003, le premier plan « Dépendance » va voir le jour. La canicule d’août 2003 a
bousculé tous les acteurs de la politique gérontologique, mettant en évidence l’isolement d’un trop
grand nombre de nos concitoyens âgés et l’absence de système d’alerte et de veille. Ce sont 15 000
décès, qui ont particulièrement touché les personnes les plus fragiles et notamment les personnes
âgées, et qui ont amené le gouvernement de Jean Pierre Raffarin à se pencher sur l'amélioration des
conditions de prise en charge des personnes âgées en perte d'autonomie.
55
Puis suite à ce plan d’autres ont suivi sur les dix dernières années :
Le plan national Bien vieillir 2007 /2009 : visant à développer le concept de « vieillissement
réussi» défini par l'OMS en 2002, comme « le processus d'optimisation des possibilités de santé,
de participation et de sécurité dans le but d'améliorer la qualité de vie des personnes âgées tout
au long de leur vie ». Il a pour objectifs généraux de favoriser la prévention des complications de
santé, de lutter contre la solitude en renforçant le rôle social « des Seniors », d'améliorer
l'environnement individuel et collectif ainsi que la qualité de vie des personnes âgées 56.
Le plan Solidarité Grand Age 2007/2012 : souhaitant donner aux personnes âgées dépendantes
le libre choix de rester chez elles, en développant les services de soins et d'aide à domicile, en
soutenant davantage les aidants familiaux, en assurant une continuité entre domicile et maison
de retraite. Il repose sur une augmentation de 2,3 Md€ des crédits que consacre l'assurancemaladie aux personnes âgées.
Le Plan « Alzheimer » 2008-2012 : Un plan spécifique, pour la maladie d'Alzheimer et les
affections apparentées constituant un défi majeur de santé publique pour notre société, afin de
permettre la mise en place, sur l'ensemble du territoire, des mesures adaptées susceptibles
d'améliorer la prise en charge des patients et la qualité de vie de leur entourage. Celui-ci prévoit
une enveloppe budgétaire de 1,6 Md€ sur 5 ans, dont 1,2 Md€ pour le volet médico-social, 200
M€ pour le volet sanitaire et 200 M€ pour le volet recherche.
La loi du 21 juillet 2009 portant sur la réforme de l'Hôpital et relative aux patients, a la santé et
aux territoires (HPST) : intégrant notamment l'attribution de compétences médico-sociales aux
Agences afin de développer des passerelles entre le sanitaire et le médico-social, d'encourager la
transversalité dans les soins et l'accompagnement des personnes dépendantes en travaillant sur
une meilleure articulation entre les différents acteurs que sont la Médecine de ville, l'EHPAD et
l'hôpital.
56
A partir d’une présentation CAFDES A.R.I.F 2011 - La politique en faveur des personnes âgées
56
1.2. Les trois grands piliers du financement public à bout de souffle
1.2.1.
Le coût social actuel du vieillissement et son financement
Il est intéressant d’observer les grandes répartitions des prestations sociales versées par l’Etat afin de
couvrir les dépenses résultant de l’apparition de certains risques : santé, famille-maternité, pauvretéexclusion, emploi, logement et vieillesse-survie :
80% de l’ensemble des prestations sont versées dans le cadre de la vieillesse-survie et santé
9% sont attribuées au risque maternité/famille
6% pour l’emploi
Et 5% sont réservés au risque logement et pauvreté-exclusion.
Nous pouvons également regarder la nature des répartitions par logique de risques et de classes d’âges :
+60 ans (20% de la population) : 18,5% PIB
o Dont 77% pour les pensions de retraite
o Et 23% pour les dépenses santé
25-60 ans (49% de la population) : 9,3% PIB
o Dont 33% pour les dépenses santé
o Et 22% en allocation familiale
-de 25 ans (31% de la population) : 10,1% PIB
o Essentiellement éducation et formation (60%)
A la lecture de ces quelques données, nous pouvons affirmer que les engagements de l’Etat au profit des
plus de 60 ans est fort. Dans le contexte économique actuel, il semble difficile d’imaginer une
augmentation des prestations sociales à destinations des ainés sans que cela ne soit aux dépens des
classes d’âges plus jeunes.
57
En effet l’aide publique, au-delà de financer une grande partie du vieillissement de notre société, tient
un rôle de financement majeur de la perte d’autonomie notamment via la sécurité sociale contribuant
au financement des crédits des EHPAD (46% des dépenses), aux dépenses hospitalières et de médecine
de ville (31% des dépenses), aux exonérations de cotisations sociales liées à la prise en charge de la
dépendance ( 10% des dépenses) et aux budgets d’action sociale des caisses de retraite (13% des
dépenses).
Les collectivités locales via le financement de l’APA par les conseils généraux (3,9 milliards) et l’aide
sociale à l’hébergement (1,2 milliards) sont également un financeur important de la dépendance.
Plus marginalement, la CNSA et l’Etat participent également au financement de la dépendance. La CNSA
en participant au financement de l’APA pour 1,6 milliard d’euros et à celui des EHPAD et SSIAD pour 1
milliard d’euro, enfin l’Etat en finançant des exonérations fiscales au titre de la dépendance et des aides
au logement.
58
1.2.2.
L’évolution du coût de la dépendance : les dépenses liées à l’APA ont triplé en 10
ans
Le dispositif le plus important mis en place par les pouvoirs publics pour financer la dépendance est
donc l’APA. Entre 2007 et 2010, le nombre de bénéficiaires de l’APA a ainsi progressé de 14 % pour
culminer à 1 200 000 allocataires, soit bien au-delà des prévisions de l’INSEE EN 2005 qui tablaient sur
une hypothèse haute à 920 000 personnes âgées dépendantes à l’horizon 2010, et 862 000 selon une
hypothèse basse.
Par ailleurs la Direction de la Recherche, des Études de l’Évaluation et des statistiques, avance le chiffre
de 2.3 millions de bénéficiaires de l’APA en 2060, dont près de 800 000 en situation de dépendance
lourde, correspondant aux indices GIR les plus élevés de la grille AGGIR.
Ainsi depuis la mise en place de l’APA les dépenses sont croissantes passant d’un rapport de 1 à 3 entre
2001 et 2011 et pesant de plus en plus lourd dans les dépenses des Conseils généraux.
59
1.3. Un système de financement insuffisant et pas de solvabilisation de la demande
Le prix moyen d'un hébergement en maison de retraite médicalisée coûte approximativement 2200€
par mois, somme qui peut facilement atteindre les 4 000€ en région parisienne. Ces montants sont à
mettre en corrélation avec le montant moyen de pension (inférieur à 1000 euros) des femmes n’ayant
pas de retraite complète, soit 80% des résidents d’EHPAD.
Une personne dépendante dépense en moyenne 1 800€ par mois pour financer son maintien à domicile.
La dépendance lourde pouvant engendrer des frais qui peuvent excéder 5 000€/mois.
Alors en rapportant les sommes moyennes que doit débourser une personne dépendante aux prises en
charge assumées par les aides publiques (un peu moins de 500€ 57 pour l'APA), on constate que le coût
de la dépendance est bien trop élevé pour les classes moyennes et modestes.
En effet, le résultat de l'addition des aides publiques (moyenne de 450 euros) et des revenus des
retraites (entre 800€ pour les pensions de réversion et 1 200€ pour les retraites moyennes) apparaît
bien insuffisant pour financer une prise en charge décente à domicile ou en institution.
En 2010, les dépenses liées à la dépendance sont selon le périmètre le plus large retenu d’environ 34
milliards d’euros. Parmi ces dépenses, la partie consacrée à la perte d’autonomie proprement dite
s’élèverait à 8,4 milliards d’euros, 10 milliards pour l’hébergement, entre 10,3 milliards d’euros et 14,4
milliards d’euros pour la santé selon le
périmètre choisi.58
57
Source DRESS. Prestation moyenne Servie en 2011 - APA à domicile : 489 €/mois et APA en établissement : 517 €/mois
58
Conseil économique, social et environnemental- La dépendance des personnes âgées - 2011
60
Même si la dépendance à domicile est davantage solvabilisée59 que celle en établissement, la part de
l'aide publique ayant très peu de chance d'augmenter dans un contexte de déficit public, l’assurance à
titre collectif ou individuel semble la seule alternative qui puisse permettre de couvrir le reste à charge.
En effet quand l’on constate que :
L’APA permet de couvrir en moyenne seulement 68 % du tarif dépendance observé dans les
établissements,
Le Haut Conseil pour l’avenir de l’assurance maladie estime en 2010 à plus de 1000 euros par an
la dépense moyenne non couverte par l’assurance-maladie des personnes de plus de 80 ans
(dont la moitié est pourtant prise en charge à 100 % au titre d’une longue maladie),
Moins d’un quart des besoins en aide à domicile réels sont couverts par le plan APA,
Nous concevons qu’en dépit de l’avancée que l’APA et autres aides sociales représentent pour les
personnes dépendantes âgées, à la fois en termes de reconnaissance de la souffrance vécue et en
termes de prestation versée, elles restent cependant pour ses bénéficiaires insuffisantes.
Financement possible
par APA (max)/mois
GIR 4
GIR 3
GIR 2
GIR 1
Moy GIR 1-4
529
794
1059
1235
676
Equivalence en heures Financement Equivalence en heures
d'aide a domicile/mois APA (Moy)/mois d'aide a domicile/mois
26,45
39,7
52,95
61,75
33,8
356
585
790
1013
491
17,8
29,25
39,5
50,65
24,55
Equivalence en heures réalisée sur l’hypothèse d’un coût de 20 euros l’intervention d’une heure
A titre d’illustration, les besoins en aide à domicile sont évalués en moyenne pour une personne en
perte d’autonomie (GIR 1 à 4) à 37 heures par semaine 60 ainsi nous pouvons constater que pour un
montant maximum d’APA seul 22% des besoins d’intervention sont couverts et 17% pour une allocation
moyenne.
59
Les dépenses à domicile bénéficient d’un taux de couverture de 84%.
60
Sénat, Etude sur le marché de l’offre de soins, d’hébergement et de services destinés aux personnes âgées.
61
Ce constat se vérifie également pour une personne en perte d’autonomie lourde puisque sur une
estimation d’aide nécessaire de 54 heures par semaine seule 28% seraient prises en charge avec un
niveau d’allocation maximum et 23% pour un niveau moyen61.
Il ne semble pas envisageable que les fonds publics financent l’intégralité des dépenses liées
à la dépendance. Un financement complémentaire via l’assurance privée semble être
indispensable pour faire face aux dépenses engendrées par la perte d’autonomie, en
complément du financement particulier.
1.4. Politique de prévention et adéquation de l’offre, tout le partenariat reste à construire
La prévention constitue actuellement le point faible de la politique de lutte contre la dépendance.
Quelques faits et exemples marquants amènent à un amer constat concernant le délicat problème de
l’accompagnement des personnes vieillissantes et par ce fait plus fragiles et vulnérables :
L’été caniculaire de 2003 : en un peu moins de trois semaines, le phénomène caniculaire a
entrainé directement la mort de près de 15.000 personnes, le drame met en évidence les
dysfonctionnements des services de santé en août et l'isolement des personnes âgées,
principales victimes de la canicule, ne recevant plus de visite aussi régulière de la part de leurs
proches que les générations précédentes62.
En France, un tiers des suicidés ont plus de 65 ans : Chaque année, près de 3 000 personnes de
plus de 65 ans mettent fin à leurs jours, ce qui représente le tiers des 10 499 suicides recensés
par l'Inserm en 2009. Plus on monte en âge, plus les chiffres sont alarmants : alors que le taux de
suicide dans la population générale française est de 17,1 pour 100 000, il monte à 32 chez les 7584 ans, et à 44 pour 100 000 chez les 85-94 ans.63
61
Etude Dress, L’évolution de l’allocation personnalisée d’autonomie (APA)
62
A partir de midilibre.fr - La vague caniculaire n’épargnera pas le Midi -2012
63
Source : lacroix.com - Le suicide, trop souvent ignoré, des personnes âgées - 2012
62
Selon une estimation de l'Institut de veille sanitaire (InVS), l’hiver 2012 a été particulièrement
meurtrier pour les personnes âgées, près de 6 000 décès supplémentaires ont été enregistrés en
février-mars durant la vague de froid et les épidémies saisonnières. 64
A la lecture de ces faits, nul ne doute que le développement d’actions de prévention, visant
à préserver l’autonomie, l’envie de vivre et à favoriser un vieillissement en bonne santé
physique et intellectuelle, constitue encore un réel enjeu pour répondre au défi
démographique mais également économique de demain.
Le vieillissement est un processus protéiforme aux conséquences multiples et contrastées. En ce sens
« bien vieillir » nécessite un accompagnement global pour optimiser la gestion du risque vieillesse.
La possibilité de reculer l’âge d’entrée dans la dépendance nécessite la mise en œuvre d’actions de
prévention tout au long de la vie et plus particulièrement lors de la cessation d’activité. Différentes
actions sont proposées et pourraient très amplement être développées :
Un suivi médical spécifique (dépistage des facteurs de risques) incorporant la situation familiale
et sociale des personnes concernées
Un diagnostic des dangers à domicile pour réduire le nombre de chutes : 84 % des accidents de la
vie courante des personnes de plus de 75 ans sont constitués de chute à domicile
Un meilleur suivi des prescriptions médicamenteuses qui sont responsables de 20 % des
hospitalisations chez les plus de 80 ans).
Les actions de prévention qui peuvent être mises en œuvre présentent donc une très grande diversité et
la responsabilité de ces actions relève d’une multiplicité d’acteurs, tant au niveau national que régional :
L’Etat, les Caisses de sécurité sociale (maladie et vieillesse), l’Institut national de prévention et
d’éducation en santé (INPES), la Haute autorité en santé (HAS), la CNSA, les ARS, les départements avec
les CARSATS, les communes via les CCAS ou les CLIC, les mutuelles et les assurances agissent toutes,
d’une façon ou d’une autre, en faveur de la prévention de la dépendance mais sans de réelles
concertations….
64
Source : lemonde.fr - Un hiver 2012 particulièrement meurtrier pour les personnes âgées - 2012
63
Cette fragmentation pose de nombreuses difficultés. En effet, malgré des initiatives positives, cette
dispersion entraine pour les personnes âgées des difficultés d’adhésion aux messages de prévention, et
il est difficile, dans ce contexte, de cibler les politiques de prévention sur ceux qui en ont le plus besoin.
De plus, le morcèlement de l’expertise et la faible professionnalisation de l’ingénierie limitent l’efficacité
des actions, tel que pour l’éclatement des prises en charge des personnes âgées entre les départements
(personnes en GIR 1 à 4) et les caisses de retraites (GIR 5 et 6) qui renforce les difficultés de coordination
de la politique de prévention.
Les assureurs peuvent renforcer ou participer à la structuration des politiques de prévention,
notamment celles relatives à la perte d’autonomie via la mise en place de consultations
gratuites ou de campagnes ciblées auprès de leurs cotisants adhérents par exemple.
Cependant ils doivent pour cela sortir des initiatives, souvent de dimensions ponctuelles et locales,
difficilement lisibles pour les assurés, pris à partis au milieu d’un foisonnement d’initiatives, et aider à
redonner une cohérence aux actions mises en œuvre par les différents acteurs ainsi qu’au suivi et à la
mesure des impacts des interventions de prévention. Un travail collaboratif avec les acteurs locaux est
ainsi souhaitable pour mutualiser moyens et savoir-faire et enfin parvenir à sortir de notre modèle
social fortement axé sur le curatif…
Les organismes complémentaires de protection sociale en entreprise peuvent en effet, à travers leurs
garanties, être un levier de prévention permettant de réduire le risque santé des salariés et ses
conséquences (arrêts de travail, consommation de soins, etc.). Ils peuvent également inciter leurs
adhérents à consulter les opérateurs sanitaires (HAD, SSR, gériatrie) qui développent des activités
autour de l’éducation thérapeutique et de la prévention (ex : consultations mémoire et d’évaluation
gériatrique), il semble donc opportun de renforcer les logiques partenariales pour augmenter la valeur
ajoutée de chacune des actions des différentes partie prenantes de la prévention, et de légitimer le rôle
« d’organisateur » de l’assureur.
La prévention de la perte d’autonomie est d’autant plus un enjeu qu’au-delà de diminuer la prévalence
du risque, elle permet de retarder la survenance de la dépendance et par ce fait d’en diminuer la durée.
En effet, sur une période moyenne, il est constaté un raccourcissement de la durée de dépendance en
phase avec une entrée plus tardive.
64
2. Quelle présence actuelle pour les assureurs
La couverture du risque de perte d’autonomie, à titre principal ou accessoire, ne concernait que 5,5
millions de personnes en 2010, alors que la France compte 10,9 millions de personnes âgées de plus de
soixante-cinq ans et 13 millions de retraités. Aujourd'hui, seule la moitié du marché cible est donc
couvert.
Cela représente un taux d’équipement au sein de la population française de 8% et de 17% des 45-80 ans
(en individuel)65.
Le marché de l’assurance dépendance est cependant en effervescence depuis l’abandon de la réforme
du dernier quinquennat. En effet, les différents acteurs du secteur sont sortis de l’attentisme et ont
proposé leurs nouvelles offres afin de se développer sur ce marché de un demi-milliard d’euros au
perspective de croissance importante.
A partir de la source UFC-QUE CHOISIR
Les trois types d'organismes participant au marché de l’assurance complémentaire proposent des
contrats d'assurance dépendance : les sociétés d'assurances régies par le Code des assurances, les
mutuelles « 45 » régies par le Code de la mutualité et les institutions de prévoyance régies par le Code
de la sécurité sociale. Les bancassureurs de façon plus récente ont également investi ce marché et en
contrôle 52% de la distribution.
65
« L’assurance dépendance » - Xerfi-Pecepta - 2011
65
Selon les données de la mutualité française et de la fédération Française des sociétés d’assurance
(FFSA), près des deux tiers des assurés, soit 3,6 millions de personnes, le sont auprès d’une mutuelle
régie par le code de la mutualité, contre 1,5 million de personnes qui le sont par une société
d’assurances relevant du code des assurances. Les institutions de prévoyance ne couvrent que 0,4
million de personnes.
Le volume est faible comparativement aux autres risques en assurance de personnes (Santé, retraite,
prévoyance), mais c’est un risque à fort potentiel de croissance.
2.1. Une légère reprise des souscriptions
Des cotisations en hausse de 6% au global en 2011, dont une part significative liée aux souscriptions en
collectif (40%), et de 5% en 2012, le marché est en reprise de croissance, certainement boosté par le
débat national sur la dépendance et la proposition par les assureurs de nouveaux produits en 2012.
En attendant une hypothétique réforme du financement de la dépendance, François Hollande a
confirmé que la réforme de la dépendance « sera prête d’ici la fin de l’année ».
En effet, alors que le sujet refait surface dans le nouveau gouvernement, l’annonce de la réforme de la
dépendance ne semble pas dissuader les assureurs ; selon l’enquête menée par Optimind Winter, plus
de la moitié des acteurs de l'assurance travaillent au lancement ou à la refonte de garanties
dépendance, et les français continuent à s’équiper de couverture assurantielle (+5% de souscriptions en
201266).
66
Argus de l’assurance - L'assurance dépendance progresse faiblement en 2012 – janvier 2013
66
Ainsi depuis début 2012, AG2R-La Mondiale, Axa, Crédit agricole assurances (Predica), Malakoff-Médéric
et Pro BTP, entre autres, ont lancé de nouvelles offres, et de nombreux projets sont annoncés.
Selon les dernières publications de la FFSA, plus de 90% des contrats dépendance en circulation sont des
contrats à garantie principale dépendance dont 70% ont été souscrit directement et 30% par le biais
d’une souscription via une entreprise. Dans les deux types de souscriptions, individuelles ou en
entreprise, la croissance est continue depuis deux ans, se caractérisant d’ailleurs par une croissance à
deux chiffres du nombre d’assurés pour les contrats collectifs.
Quelques chiffres supplémentaires donnés par la FFSA :
la cotisation annuelle moyenne d’une assurance dépendance est de 358 euros, soit environ 30
euros par mois
les sociétés d’assurance ont versé 173 millions d’euros aux personnes en dépendance totale ou
partielle (soit +16% en 2011), pour les souscripteurs d’une garantie dépendance
la rente dépendance moyenne est de 584 euros par mois
67
2.2. Un marché concentré et multiforme
Malgré une commercialisation de produits d’assurance dépendance depuis près de 25 ans67, le marché
de l’assurance dépendance est un marché petit en volume, mais avec un potentiel de développement
important : taux d’équipement de 55% pour un marché potentiel de 8 à 10 millions de personnes 68.
Dans le cadre de son TOP 30 de la prévoyance, L'Argus de l'Assurance a réalisé un classement des
principaux acteurs de l'assurance dépendance, toutes familles d'assureurs confondus, ce qui n'avait
jamais été réalisé jusqu'à présent.
Ce panorama élargi montre tout son intérêt puisque l'on retrouve aux 15 premières places les trois
familles d’acteurs intervenant sur le secteur de la protection sociale : 7 compagnies d’assurance, 4
mutualistes et 4 groupes de protection sociale. On constate, une diversité d'intervenants sur un marché
qui demeure très modeste, puisque le total des cotisations déclarés par la vingtaine de répondants sur
ce segment représente un peu moins de 530 M€, en ligne avec l'estimation de 538 M€ réalisée par Scor
pour 201069.
Les 5 premiers acteurs réalisent près de 295 M euros de chiffres d’affaires, soit plus de la moitié du
marché global de l’assurance dépendance. La concentration du marché s’articule notamment autour de
Crédit Agricole Assurances, Groupama, AG2R La Mondiale, La Banque Postale Prévoyance, UNPMF qui
détiennent 54,77% du marché.
Il semble donc que la diffusion de cette offre soit particulièrement favorable aux acteurs vendant de la
garantie individuelle, qui possèdent une importante force de vente, tel que les bancassureurs (Crédit
Agricole Assurances, La Banque Postale Prévoyance…) ou qui ont couvert ce risque très tôt (AG2R et
Groupama font figure de pionniers avec des garanties lancées respectivement en 1985 et 1988).
67
68
69
En 1985, AG2R Prima a commercialisé le produit d’assurance dépendance SAFIR
Etude Xerfi - L’assurance dépendance en France
Argus de l’assurance - 06 avril 2012- Un petit marché très concentré
68
Source argus de l’assurance - 6 avril 2012
Les institutions de prévoyance moins présentes sur ce baromètre ont cependant connu, sur ce segment
de marché, une augmentation de cotisations en 2010, avec 25 millions d’euros de cotisations
encaissées supplémentaires. Pour les institutions de prévoyance, le segment de la dépendance
représente 117 millions d’euros de primes collectées (600 000 assurés), essentiellement collectées sous
forme individuelle et 10% sous forme collective (12 millions d’euros).
Les acteurs de l’assurance notamment via la distribution bancassurance, restent en tête de course et les
cinq premières sociétés se partagent 70% des assurés et de la collecte annuelle (Predica, GroupamaGan, Prima, LBPP, CNP) soit 300 millions d’euros de primes.
Les mutuelles se font également plus présentes avec 3,6 millions d’assurés et 75% des primes en contrat
collectif facultatif (notamment via la MGEN), soit 123 millions collectés dont 31 millions d’euros en
contrat individuel.
69
Le marché de par la diversité des acteurs, des formes de distributions et des types de garanties est
multiforme :
Source : Journée Dépendance MutRé – Présentation du 27 Juin 2011
On retrouve ainsi, que cela soit sur le marché individuel ou sur le marché collectif, de multiples façons
d’accéder à des couvertures financières, permettant de se prémunir et d’anticiper les frais pouvant être
engendrés par une perte d’autonomie :
Epargne
Assurance Vie
Contrat Entreprise
Assurance Prévoyance
Contrat Aidant
70
Les contrats de prévoyance individuels pour lesquels la prévoyance est la garantie principale. Ces
contrats prévoient le versement d'une rente viagère dès la survenance du risque. Ils sont à fonds
perdus.
Les contrats mixtes : Les contrats d'assurance vie pour lesquels la garantie principale est une
garantie décès ou épargne retraite où la couverture du risque dépendance est une garantie
complémentaire. Ils ne sont donc pas souscrits à fonds perdus.
Les contrats de prévoyance entreprise pour lesquels la prévoyance est la garantie principale. Ces
contrats peuvent-être à fond perdus ou sous logique de points…
Les contrats spécifiquement dédié aux aidants
Tout confondu, plus d’une trentaine de contrats existent aujourd'hui mais leur contenu et leur
mécanisme ne sont pas homogènes, ce qui rend très difficile leur comparaison car les niveaux moyens
de rente mensuelle observés peuvent osciller de 1 à 5 pour des montants de cotisation tout autant
variables.
2.2.1.
Répartition du marché (population assurée) en fonction du type de garanties
71
On constate que le type de garantie et la durée de garantie varie beaucoup en fonction de la démarche
d’adhésion à la garantie dépendance. En effet, lors de démarche individuelle et facultative la garantie
principale est bien la dépendance associée à une couverture viagère ; les autres modèles ne semblent
pas répondre aux attentes du grand public.
Concernant les garanties résultant d’une démarche de souscription effectuée dans le cadre de
l’entreprise, les garanties en inclusion à l’inverse sont très largement majoritaires ; résultat de
négociations lors de la mise en place de la garantie.
Le marché en volume de cotisation relève essentiellement des personnes couvertes à titre individuel
avec 421 millions d’euros en 2010 pour 64 millions de cotisations via les contrats « entreprise ».
Cette non proportionnalité des grandeurs s’explique principalement par le montant moyen de cotisation
annuelle qui est sans commune mesure dans le cadre d’une souscription individuelle ou collective.
En effet la cotisation moyenne d’un assuré pour une couverture dépendance individuelle est d’environ
300 euros par an contre environ 35 euros dans le cadre d’un accord collectif avec le cofinancement de
l’entreprise70.
Dans le cadre d’un accord collectif, le principe de mutualisation intergénérationnelle, l’âge de
souscription (62 ans en individuel vs 40/44ans en collectif) ainsi que les montants de rente proposés
inférieurs et temporaires, permettent un important abaissement de cotisation.
2.2.2.
Des freins importants au regard d’une forte appréhension par le particulier
75% des primes collectées sont versées au titre d’un contrat individuel ; cependant seule 1,3 millions de
personnes sont couvertes à titre individuel sur une population concernée (45-80 ans) de 24 millions
d’individus. Quelles sont les freins à la souscription individuelle ?
Un des premiers constats est le niveau d’information encore insuffisant du grand public ; très peu de
personnes sont en mesure d’évaluer le coût réel de la perte d’autonomie. En effet selon le dernier
70
Spécificité du risque dépendance, caractéristiques des contrats, acteurs, prospective - 2010
72
baromètre de la dépendance réalisé par l’OCIRP, France Info et Le Monde 81% des interviewés ne
connaissent pas le montant mensuel des dépenses pour une personne dépendante.
De plus, après une analyse d’une cinquantaine de commentaires sur les forums, il
apparaît que les adhérents sont très peu confiants vis-à-vis ce type de couverture et
se sentent seuls face à un certains nombres d’incompréhensions.
Par soucis d’éthique, il n’est pas envisageable d’intégrer les différents extraits des
forums, car le nom des compagnies d’assurance sont systématiquement cité, mais il
est intéressant de souligner les points récurrents de cette analyse de commentaires sur les forums
dédiés. En effet, les commentaires sont principalement orientés autour de quatre problématiques :
1. Non compréhension du refus de versement de prestations de l’assurance lorsque les évaluations
du médecin traitant et/ou du conseil général concluent à une dépendance totale. Notion d’outils
d’évaluation différents pas appréhendable par le particulier, situation déclenchant un sentiment
d’injustice
2. Problème de réévaluation des cotisations, engendrant une distorsion pour l’assuré entre un
paiement de cotisation plus conséquent et un niveau de garanties restant constant
3. Le sentiment de mauvaise orientation par les conseillers et la non compréhension des conditions
générales jugées « trop confuses »
4. Complexité des conditions de déclenchement de l’indemnisation (délai de carence, franchise,
etc.) considérées comme des “pièges” par les assurés.
5. Pas de bénéfices immédiats perçus.
Le groupe de travail ministériel présidé par Bertrand Fragonard, « Stratégie pour la couverture de la
dépendance des personnes âgées », avait, par ailleurs, dressé un portrait de l’assurance privée pas
réellement plus flatteur : « Des contrats qui manquent de transparence et présentent une protection
insuffisante des intérêts du souscripteur, des cotisations très variables et des rentes qui ne le sont pas
moins, des méthodes de revalorisation peu explicites… ».
73
Les produits individuels déjà par nature marqués par une sélection médicale sévère, permettant à
l’assureur d’apprécier la teneur du risque sur laquelle il s’engage, d’un prix de cotisation élevé, en raison
d’un âge de souscription avancé, et d’un risque d’anti-sélection fort, semblent également devoir faire
face au défaut de confiance de l’assuré ayant une faible compréhension de ce qui lui est garanti.
Tout cela ne facilite pas la commercialisation de ces contrats qui sont déjà par nature difficiles et
complexes à vendre pour les réseaux de distribution. En effet, le thème est « anxiogène », difficile à
aborder en logique de vente complémentaire, il existe pue de bénéfices immédiats et la cible est
relativement difficile à capter, entre des ménages aux revenus limités pour lesquels les garanties sont
trop couteuses et les plus aisés qui peuvent puiser dans leur patrimoine pour faire face aux dépenses.
Ce marché caractérisé par un âge de souscription relativement avancé (62 ans71) exclut, en effet, de par
les cotisations élevées et la sélection médicale, les personnes disposant de faibles revenus mais
également les individus présentant des risques élevés de perte d’autonomie.
Et l’absence de toute incitation fiscale à la souscription des contrats individuels est un frein pour une
cible plus aisée, qui compte par ailleurs sur son épargne ou son patrimoine pour faire face à ses
dépenses.
Des contraintes rendant difficile la mission de conseil et de vente d’un commercial.
71
Conférence Argus du 7 Juin 2012
74
3. Acteurs clés et stratégie déployée
Malgré une absence de réforme majeure concernant la perte d’autonomie, les opérateurs du privé
tentent de relancer le marché de la dépendance, d’une part, par la création du label GAD (Garantie
Assurance Dépendance) par la FFSA et d’autre part, par l’émergence d’offres destinées aux aidants de
personnes dépendantes.
Les acteurs tentent alors selon leurs forces et leur positionnement sur le marché d’apporter des
réponses innovantes.
Les assureurs vont en ce sens plutôt utiliser leur puissance financière et leurs compétences techniques
pour proposer de nouvelles garanties à leurs réseaux propriétaires mais également en logique
partenariale, où ils porteront le risque en tant qu’assureurs ou réassureurs, avec les bancassureurs,
mutuelles et IP.
Les Mutuelles qui bénéficient d’un capital confiance important choisissent un positionnement d’offre
sous une logique affinitaire, correspondant à leur stratégie commerciale et aux attentes de leur
bénéficiaire (ex : cible fonctionnaire).
Ce sont les bancassureurs plus récemment arrivés sur le marché qui pénètrent le plus rapidement le
marché. Ils ont rapidement pris des parts de marché conséquentes notamment grâce à la densité de
leur réseau de proximité, de leur volumétrie client et de leur grande force de communication.
Quand aux institutions de prévoyance, bien que des initiatives soient menées vers le grand public, elles
conservent un plus grand champ d’actions sur le collectif de par leurs liens privilégiés avec les
partenaires sociaux.
Ainsi dans un environnement en constant mouvement, sur un secteur où l’offre est relativement faible
et la demande croissante, il est intéressant d’observer les stratégies qu’ont choisi d’adopter les acteurs
clés du marché en terme de d’offre, de distribution, de partenariat, de services, de prévention et de
communication.
75
Malakoff Médéric
Politique Communication
4
Malakoff Médéric réalise
Politique Offre individuelle
Politique Services (SAP)
3
un chiffre en assurance
2
dépendance de 20,6M€ et
est très présent sur le
1
segment du collectif. Le
Politique Offre collective
Politique Prévention
0
Groupe a mené plusieurs
actions depuis quatre ans
pour se renforcer sur le
Politique Hébergement
Politique Prévention habitat
segment de la dépendance
en
prenant
des
Politique Cible aidants
participations
au
sein
d’Assistéo (services à la personne), de Korian (EHPAD)et de Bien-être assistance (plateforme de services
à la personne). Malkoff Médéric a réactualisé son offre en 2012 et propose une nouvelle offre
dépendance en direction des entreprises « Pass Indépendance »qui se distingue par un pack de services
à destination des salariés en situation d’aidant. dont un bilan de sa situation d’aidant, qui pourra
déboucher sur un accompagnement personnalisé réalisé avec l'Association française des aidants, ainsi
que le financement d’un panier de prestations à domicile à concurrence de 1000€ .
Dans le cadre de ce contrat collectif, le salarié peut également bénéficier d’une rente mensuelle en cas
de dépendance lourde, mais surtout, ce qui est plus innovant, il a la possibilité, en cas de départ de
l’entreprise de souscrire un contrat individuel en bénéficiant de réduction sur sa cotisation. Et cela
suivant le principe : plus le salarié a cotisé longtemps dans le cadre de son entreprise, plus l’abattement
sur sa prime est important.
Source : malakoffmederic.com
76
AG2R La Mondiale
Politique Communication
4
Politique Offre individuelle
3
Politique Services (SAP)
2
AG2R réalise un chiffre en
assurance dépendance de 61,7M€
dont une partie conséquente est
réalisée sur l’individuel.
1
C'est l’un des pionniers de
l’assurance dépendance qui s’est
engagé depuis plus de dix ans dans
l’écoute et l’accompagnement
Politique Hébergement
Politique Prévention habitat
notamment Dom plus et Personia.
Le groupe a proposé une nouvelle
Politique Cible aidants
offre en 2011 couvrant la dépendance partielle plus axée sur les aidants ainsi qu’un site qui leur est
dédié : aidonslesnotres.fr. En 2012, un pas de plus est fait avec une nouvelle génération de contrat
spécifique pour assurer les aidants « « AIDE AUX AIDANTS », intégrant des prises en charge de services à
destination de l’aidé en cas d’aléa sur l’aidant.
Politique Offre collective
0
Politique Prévention
Politique Communication
4
AXA
Politique Offre individuelle
3
Politique Services (SAP)
2
Axa réalise un chiffre en
1
assurance dépendance de 36M€
Politique Offre collective
Politique Prévention
0
et s’est lancé depuis 2008 sur le
segment du collectif. L’acteur
s’appuie sur son réseau d’une
Politique Hébergement
Politique Prévention habitat
grande
diversité :
agents
généraux, réseaux de courtage et
Politique Cible aidants
accords de partenariats (Agipi)
pour distribuer ses garanties dépendance qui sont majoritairement incluses dans des contrats
d’assurances vie. Axa a par ailleurs lancé un nouveau produit en 2012, Entour’Age et renforce sa
présence sur le marché avec ce produit complet et innovant par son option « capital décès »,
permettant en cas de décès avant l'âge de 85 ans sans perte d'autonomie, le remboursement des
cotisations versées depuis l'adhésion, sous forme de capital. Axa via sa filiale Axa assistance a investi,
depuis 2006, dans des sociétés spécialistes de services à la personne Maison&Services, Cours Legendre,
Family Sphere et Adhap Services.
77
De nouveaux services de téléassistance et vidéo-vigilance sont d’ailleurs proposés par Adhap Services.
Axa propose également des dispositifs internet pour permettre aux aidants (entreaidant.fr) et
personnes soucieuses de maintenir leur capital santé d’accéder à des informations spécifiques
axaprevention.fr et n’hésite pas à mettre en place des campagnes de communication originales (vidéos,
application iPhone / iPad, conférences) autour des risques du vieillissement. « Attention au coup de
vieux ».
OCIRP
Politique Communication
4
Politique Offre individuelle
Politique Services (SAP)
3
Considérant la dépendance
comme le risque majeur de
2
demain, l'Ocirp, spécialiste
1
de la protection sociale de
la
Politique Offre collective
Politique Prévention
0
famille, a souhaité apporter
une réponse dans le cadre
de
l'entreprise
pour
Politique Hébergement
Politique Prévention habitat
permettre à chacun le
préfinancement
des
Politique Cible aidants
dépenses futures liées à la
perte d'autonomie et a créé le premier contrat collectif de garantie dépendance. Il peut être souscrit par
une entreprise pour ses salariés ou peut faire l’objet d’un accord collectif de branche. Un nouveau
contrat est proposé aux partenaires, un régime à points qui permet de conserver ses droits en cas de
départ de l'entreprise et de bénéficier des avantages fiscaux et sociaux des contrats de prévoyance. Un
accompagnement des aidants est proposé par l’action sociale et réalisé par Filassistance.
L’OCIRP joue un rôle de lobbying important et travaille à lever les freins du marché. Elle participe
également à l’éducation du marché avec des actions de communication ciblée le Baromètre dépendance
OCIRP - France Info - Le Monde, Les Débats annuel Dépendance-autonomie de l'OCIRP…
78
CNP Assurances
Politique Communication
4
3
Politique Offre individuelle
Politique Services (SAP)
2
1
0
Politique Offre collective
Politique Hébergement
Politique Prévention
Politique Prévention habitat
Politique Cible aidants
CNP Assurances, premier assureur de
personnes en France réalise un chiffre
d’affaire en assurance dépendance
individuelle de 72,7 M€ et est très
présent sur couverture collective avec
un portefeuille de 779 000 adhésions.
Son offre collective développée
depuis 1988 est essentiellement
diffusée par les mutuelles et
institutions de prévoyance.
L’assureur a développé une forte stratégie partenariale en commercialisant ses contrats par le biais
d’accord de partenariats avec La Banque Postale, la BPCE et l’UNPMF (Mutex) mais également via son
propre réseau CNP Trésor. L’acteur est également actionnaire majoritaire de MFPrévoyance regroupant
les mutuelles de la fonction publique.
CNP Assurances a été l’un des premiers à structurer son positionnement sur le marché de l’assurance
dépendance en prenant des participations au sein du réseau de franchises Age d’Or Services, en
développant l’un des premiers portails internet destinés aux seniors, en créant sa propre plateforme
d’assistance, FILASSISTANCE International et en bâtissant des produits associant en amont des services
d’accompagnement et de prévention.
Source : caissedesdepots.fr
79
Crédit Agricole
A travers Prédica, sa filiale
d’assurance de personnes le
Crédit Agricole a réalisé en
assurance dépendance un chiffre
d’affaire de 83 M€ en 2010.
Politique Communication
4
Politique Offre individuelle
Politique Services (SAP)
2
1
Politique Offre collective
Son offre intègre la couverture de
la dépendance totale et partielle
(50% de la rente) et un capital
équipement pour faire face au
premier frais dès le GIR5.
3
0
Politique Hébergement
Politique Prévention
Politique Prévention habitat
Politique Cible aidants
L'absence de délai de carence en cas de maladie et la dimension intergénérationnelle via des prestations
d'assistance aux ascendants et descendants de l'assuré et une garantie « Répit de l'aidant » très
performante (1 000 €/an) sont à souligner.
Le Crédit Agricole participe vivement à l’essor de bonnes initiatives en finançant chaque année des
actions locales suite à un appel à projet.
La large politique de communication mise en place depuis quelques années, diffusion de programme
télévisé « La minute des aidants », nouvelle campagne publicitaire « contre la dépendance, le mieux
c’est de s’assurer » et création d’un site à accès grand public etreaidant.com et i-dependance.fr,
contribue de façon conséquente à sensibiliser le grand public aux problématiques de la perte
d’autonomie et des aidants. Sur le site i-dependance.fr, les assurés bénéficient d’un espace privatif et
ont accès à un programme de prévention personnalisé (à partir de 50 ans).
Le Crédit Agricole a également favorisé sa stratégie opérationnelle (intégration de la filière de la prise en
charge de la perte d’autonomie) en développant sa plateforme de services à la personne Viavita et en
prenant part dans le capital de deux des leaders des maisons de retraites et cliniques privées Korian et
Médica.
80
La Banque Postale
En vie et prévoyance, La Banque Postale
distribue les contrats conçus par CNP
Assurances. La filiale La Banque Postale
Prévoyance, détenue à parité par les deux
partenaires, est un acteur majeur en assurance
vie et de personne. En 2011, la compagnie a
réalisé un chiffre d’affaires de 417 millions
d’euros et compte plus de 2,4 millions de
contrats de Prévoyance Individuelle en
portefeuille. Présent depuis 2004 sur le
marché de l’assurance dépendance, La Banque Postale est devenue un acteur majeur, avec 26,2% de
part de marché en 2010. Elle a néanmoins un rôle de distributeur uniquement, ses offres étant conçues
et gérées par CNP Assurances, suite à un partenariat commercial. La Banque Postale peut s’appuyer sur
le réseau très dense de 17000 bureaux de poste et points de contact via l’enseigne La Poste, qui
constitue un réseau de commercialisation B to C unique en son genre. L’acteur au-delà d’une offre
complète (capital équipement, différents niveaux de rentes, prestations d'assistance - assurées par
Filassistance - tout au long de la vie du contrat…) a créé des leviers de souscription intéressants
(Réduction couple : 20% pour le conjoint) et s’est impliqué sur une démarche plus global en parrainant
notamment, depuis 2007, « Baromètre Prévoyance - Dépendance » annuel.
La Banque Postale, à l'instar d'autres acteurs de l’assurance, a développé un site pour les aidants :
« Vivre en aidant ». « Vivre en aidant » est un site qui donne des conseils pratiques et des informations
utiles à tous ceux qui s'occupent d''un proche âgé, malade ou dépendant. Tout dernièrement, le site a
été associé à la réalisation d’une expérimentation menée par Filassistance et eduPad, pour le compte de
la Caisse des dépôts, visant à développer et tester la première application mobile de formation dédiée
aux aidants des personnes âgées : eduAidants.
81
Ainsi qu’il s’agisse d’assureurs déjà leaders sur le marché (Predica, AG2R La Mondiale, Prévoir), ou
d’autres souhaitant s’inviter dans les débats (AXA, Henner/Humanis, …), un grand nombre d’acteurs ont
procédé à une création ou un renforcement de leur offre Dépendance au cours de ces dernières années.
Les initiatives les plus fréquentes sont l’aménagement des garanties pour couvrir la dépendance
partielle et les services en faveur des aidants (site internet et organisation/financement de services) ; les
contrats de dernières générations (AG2R La Mondiale et le Groupe Prévoir) proposent des solutions
d'assurance spécifiques à destination des aidants familiaux.
4. Positionnement et modélisation des offres dépendance
4.1. Deux types d’offres : l’offre épargne vs l’offre prévoyance
Il existe deux types principaux de contrats sur le marché assurantiel français :
Les contrats de prévoyance, ou contrats de risques, pour lesquels la dépendance est la garantie
principale. Ces contrats se caractérisent par l'ouverture du droit à prestations (habituellement le
versement d’une rente) dès la survenance du risque. Ce contrat de garantie principale
dépendance est également commercialisé dans le cadre d’un «package» constitué avec un
contrat d’assurance complémentaire santé.
Les contrats d’assurance vie pour lesquels la garantie principale est une garantie décès ou
épargne-retraite, et la couverture du risque dépendance qui correspond à une garantie
complémentaire (ex : doublement de la rente en cas de dépendance).
Le fait de cotiser à perte en cas de non survenance du risque réduit l’attractivité des contrats de
prévoyance, qualifiés de « contrats à fonds perdus ». Alors pour atténuer cet aspect négatif, les
assureurs ont mis en place des contrats d’épargne, incluant des garanties complémentaires
dépendance. La commercialisation de ces contrats a également permis de rajeunir la cible des assurés
visée par les produits dépendance. S’agissant d’un risque à très long terme du point de vue de l’assuré,
ce type de contrat présente l’avantage d’être comparable aux autres produits d’épargne.
82
Cependant depuis quelques années, des contrats dits « mixtes » ont vu jour. Ces contrats combinant
une logique indemnitaires et forfaitaires sont peu nombreux. Ils allient alors épargne et prévoyance tel
Aviseo de la MAAF ou EnVie Universelle d’Axeria Prévoyance72.
Cette segmentation de l’offre se traduit par trois catégories principales de contrats, diffusés sur le
marché des entreprises :
Les contrats de prévoyance à fond perdu garantissant une rente viagère dont le montant est
défini à l’avance ;
Les contrats de retraite par capitalisation avec option dépendance : lors de son départ à
la retraite, le salarié peut choisir une option dépendance qui lui permet de doubler sa rente de
retraite supplémentaire dans le cas où il deviendrait dépendant ;
Les contrats à points « dépendance » : Comme vu précédemment, les cotisations sont alors
converties en points acquis à vie, eux-mêmes transformés en rente en cas de dépendance. Le
salarié conserve ses points quand il quitte l’entreprise ou part à la retraite, et peut poursuivre
par la suite sa cotisation à titre individuel. Les contrats en points sont donc portables et
abondables
après
la
cessation
d’activité.
Ce contrat, proposé par l’OCIRP, est diffusé par l’ensemble des institutions de prévoyance et
présente l’avantage de pouvoir ainsi cumuler les points pour un salarié évoluant dans
différentes entreprises rattachées au contrat l’OCIRP.
Ce sont 831 000 personnes qui étaient couvertes par une garantie dépendance dans le cadre d’un
contrat collectif en juin 2010 (hors inclusions au sein de complémentaires santé). Les institutions de
prévoyance et les grands assureurs acteurs du collectif (Axa, CNP, Allianz, etc.) sont les principaux
acteurs sur ce segment.
72
Produit arrêté en 2012.
83
4.2. Des offres reposant sur un système d’évaluation complexe
En France, plusieurs grilles coexistent pour déterminer le niveau de perte d’autonomie. Le secteur privé
et le secteur public utilisent des grilles différentes.
La grille publique de référence est, depuis 1997, la grille AGGIR qui sert de base à l’attribution de l’APA.
Cette grille a été élaborée à partir des instruments d’évaluation clinique gérontologiques. Elle repose sur
l’observation par un tiers de la réalisation de six actes de la vie courante et des problèmes relatif à
l’orientation dans le temps et dans l’espace de la personne concernée.
L’évaluation est réalisée sur la base de 17 variables : 10 variables discriminantes et 7 variables «
illustratives » qui concernent la perte
d’autonomie domestique et sociale.
Soit dix variables, discriminantes, dont 8 sont
retenues pour le calcul du GIR :
6 se rapportant à la perte d’autonomie
physique (AVQ73)
2 variables psychiques (cohérence et
orientation)
2 variables instrumentales (AIVQ – se
déplacer à l’extérieur et alerter)
Ces dix variables sont complétées par 7 autres AIVQ dite illustratives, étayant l’évaluation par des
éléments de contexte nécessaires à l’élaboration du plan d’aide (capacité de faire le ménage, de suivre
un traitement médical, d’utiliser les moyens de transports etc..) qui n’entrent pas non plus dans le
calcul du GIR.
73
Les activités de la vie quotidienne (AVQ), définies par la grille de Katz sont : Se laver entièrement, s’habiller, aller aux
toilettes et les utiliser, se déplacer du lit au fauteuil, contrôler ses sphincters, se nourrir.
Les activités instrumentales ou élémentaires de la vie quotidienne (AIVQ) comprennent les activités qu’un individu doit
réaliser pour rester à son domicile : utiliser le téléphone, faire ses courses, préparer ses repas, tenir sa maison, laver son
linge, utiliser les moyens de transports, prendre ses médicaments, se servir de l’argent.
84
Chaque variable possède trois modalités :
A : fait seul totalement, régulièrement et correctement les actes quotidiens,
B : fait partiellement ou irrégulièrement ou incorrectement les actes quotidiens,
C : ne fait pas les actes quotidiens.
Selon la valeur A, B, C attribuée aux dix-sept variables de la grille AGGIR, un logiciel informatique
détermine alors le GIR.
Avec ce système de pondération les personnes sont classées en 6 groupes ; GIR 6 pour les personnes
présentant des signes de perte d’autonomie les plus légers jusqu’à GIR 1 pour les cas les plus sévères
(GIR : groupes isoressources censés être homogènes). En fonction du classement, la personne concernée
peut se voir attribuer un montant mensuel qui peut au maximum atteindre au 1er avril 2010 :
GIR 1 : 1235,65 euros
GIR 2 : 1059,13 euros
GIR 3 : 794,35 euros
GIR 4 : 529,26 euros
Quand aux personnes classées en GIR 5 et 6, elles peuvent prétendre au versement de prestations
d’aides ménagères servies par les régimes de retraite ou l’aide sociale départementale.
Ainsi après analyse de 45 contrats d’assureurs privés, nous pouvons constater que :
28% d’offres individuelles reposent sur la seule Grille AGGIR
22% utilisent seulement la grille Katz (AVQ : Actes de la Vie Quotidienne)
6% utilisent des grilles d’évaluation qui leur sont propres
44% une combinaison de deux grilles
Cette multiplication de référentiels rend les conditions de versement des rentes quasiment illisibles et
peut générer des inégalités ou des incohérences difficilement appréhendables pour les individus
concernés.
85
Différentes problématiques peuvent-être générées par ce manque de « standardisation » :
Critère de l’âge parfois peu pertinent (60 ans)
Mauvaise prise en compte de l’état psychique : les maladies dégénératives comme Alzheimer
sont mal évaluées car les variables de cohérence et d’orientation ne sont pas identifiées par les
outils. En effet, ne sont prises en compte que les limites dans l'autonomie effective des
personnes concernées (incapacité à se nourrir, à se déplacer, etc.) et non les facteurs d'absence
de contrôle qui mettent en danger la personne dépendante et son entourage.
Les frontières entre les différentes catégories ténues : les évaluateurs peuvent alors sciemment
ou non commettre des erreurs de jugement, les politiques de gestion financière peuvent alors
influencer l’acte d’évaluation.
Les applications divergentes des grilles : n’existant pas de cadre et de process de forte
standardisation, le niveau de formation des évaluateurs et leur liberté d’appréciation peuvent
générer une grande latitude dans les interprétations et des inégalités.
Le choix de politique mise en œuvre en fonction du niveau des moyens (effectif et budgétaire)
des départements : théoriquement l’évaluation des besoins de la personne âgée pour son plan
d’aide de l’allocation personnalisée d’autonomie (APA) doit-être réalisée par une équipe médicosociale au domicile de la personne. Dans les faits, 87 départements le font dans « tous les cas »
et 7 départements « uniquement dans certains cas» et ce n’est pas une équipe mais une seule
personne de l’équipe qui se rend au domicile de la personne âgée. Seuls 10 départements
envoient des binômes « toujours » ou « souvent »74.
L’absence de cohérence entre les différentes évaluations (privées et publiques par exemple)
Ainsi le manque de standardisation des outils d’éligibilité (AVQ, AGGIR, autres) et de process, nuisent à
la bonne compréhension et lisibilité des contrats d’assurance. Il est ainsi difficile pour une personne de
comprendre qu’elle puisse être prise en charge par le système public et ne pas pouvoir accéder à sa
couverture assurantielle. Cette dichotomie d’information peut-être nuisible au rapport de confiance
assureur/bénéficiaire.
74
Enquête DREES 2013 : Gestion de l’APA et de l’ASH
86
En effet, ces différents sujets, l’outil d’évaluation utilisé, les différentes définitions proposées pour les
activités de la vie quotidienne et les qualifications des personnes en charge de l’évaluation, faisant
varier la définition-même de la dépendance d'un contrat à l'autre, il semble compliqué d’instaurer un
échange reposant sur la plus grande transparence souhaitable.
Pour que le système de prise en charge de la personne puisse reposer sur une articulation entre
couvertures publiques et privées puis entre couverture privée collective et individuelle, il semble
nécessaire d’harmoniser les modes d’évaluation et les définitions de la dépendance.
4.3. De la prise en charge de la dépendance lourde, à la prise en charge de la dépendance prépartielle
Il est certain que la dépendance lourde coûte cher ; la situation de la personne, souvent confinée au lit,
nécessite une assistance quasi permanente. Mais il ne faut pas négliger les coûts de la dépendance
partielle, pouvant engendrer d’importants coûts de réaménagement de son logement et un niveau
d’aide à domicile quotidien. Une étude menée sur un échantillon représentant 88 % des personnes
couvertes, a permis d'évaluer le niveau de couverture des contrats détenus. Ainsi, un peu plus des deux
- tiers des personnes (68 %) ont opté pour une couverture de la dépendance lourde seule et un tiers
environ (32 %) pour une couverture plus large englobant à la fois la dépendance lourde et la
dépendance partielle75.
Selon le type de couverture choisie, les garanties peuvent varier du simple au double puisque la rente
mensuelle servie est en moyenne de 563 euros pour les personnes en dépendance lourde et de 292
euros en moyenne pour celles en dépendance partielle.
Cependant cette tendance est amenée à varier fortement sur les années à venir. La proportion de
personnes couvertes par des contrats d’ancienne génération, qui ne sont plus commercialisés, est
encore importante.
75
Les contrats d’assurance dépendance en 2010 - www.ffsa.fr
87
En effet, la quasi-totalité des personnes, assurées par des contrats fermés fin 2010, sont couvertes au
titre de la seule dépendance lourde (98 %), ce type de couverture ne correspond qu'à 48 % des
personnes couvertes par les contrats toujours commercialisés.
Les nouvelles générations de contrats intègrent tous la couverture de la dépendance partielle (cf tableau
page suivante) et de nombreux contrats dépendance prévoient le versement d'un capital équipement,
soit en inclusion (April, Crédit Agricole, Groupama, Macif), soit en option (AG2R La Mondiale, AXA, Asac
Fapès/CNP, La Banque Postale, Radiance)76dès GIR4 (dépendance pré-partielle).
Source : Les Echos n° 21146 du 16 Mars 2012 • page 40
La définition de la dépendance partielle est cependant très variable d’un contrat à l’autre. Elle peut ainsi
prendre effet dès le GIR 5 pour le Crédit Agricole et seulement à partir du GIR 3 à La Banque Postale et
Groupama. Par ailleurs, la rente dépendance partielle est généralement réduite de moitié par rapport à
la rente dépendance totale, seul le contrat d'April propose 66 % de la somme dès le GIR 3, mais ne
couvre pas le GIR 4.
76
Les Echos n° 21146 du 16 Mars 2012
88
Cependant de nombreux contrats, à défaut de verser une rente en dépendance pré-partielle, prévoient
pour faire face aux premières dépenses le versement d’un capital dès GIR 4 et des services d’assistance
(avec le portage d’un risque de services en nature) pour pallier différents aléas.
Les différentes formules n'ont pas le même coût. Il semble opportun de concéder à un investissement
un peu plus élevé afin de se protéger face aux niveaux de perte d'autonomie car la probabilité de se
trouver dans une situation de dépendance partielle est plus grande.
En effet ce sont 63% des bénéficiaires de l’APA qui sont concernés par une dépendance partielle voire
pré-partielle, telle que définie par les contrats d’assurances -43 % des bénéficiaires de l'APA sont
modérément dépendants (GIR 4), 20 % moyennement dépendants (GIR 3)-, et 37% par une perte
d'autonomie lourde (GIR 1 et 2).
Du côté des contrats mixtes, les assureurs ne proposent pas de verser de rente en cas de dépendance
partielle. Seule l’offre d’AGF propose ce type de garanties.
En conclusion de ce deuxième chapitre, nous pouvons témoigner que la réponse à apporter
au problème de la perte d’autonomie, et particulièrement à celui de la dépendance des
personnes âgées, est une priorité pour l’ensemble des partenaires concernés. Pour tous les
acteurs, du secteur public comme du secteur privé, il s’agit de relever un défi aussi bien
sociétal qu’économique.
Avec la mise en place de l'Allocation Personnalisée pour l'Autonomie (APA) en 2001, puis de
la Caisse Nationale de Solidarité pour l'Autonomie (CNSA) en 2005, la dépendance a été
mieux prise en compte par le système public, cependant l’aide apportée ne permet pas la
solvabilisation des ménages face aux coûts engendrés par la perte d’autonomie. Avec un
déficit important de la Sécurité sociale et l’augmentation conséquentes des dépenses
publiques et sociales en faveur des personnes âgées, les pistes de financement d’un
dispositif public sont assez réduites. L’Etat ne pourra pas, à lui seul, soutenir durablement et
de manière pérenne la prise en charge de la dépendance.
Le contexte législatif et réglementaire est non stabilisé, cependant les
organismes de protection sociale complémentaire ont continué à développer des garanties
complémentaires de dépendance à travers des contrats individuels ou collectifs.
Les offres sur le marché sont donc multiples et les acteurs leaders contribuent activement au
renouvellement de ces offres. Un certain nombre de freins existent cependant : produits
89
complexes, système d’évaluation peu homogène, méconnaissance du risque, absence de
maintien ou transférabilité….
Face aux perspectives démographiques, il reste encore à définir et à organiser un système
pérenne pour relever le défi du financement et de prise en charge de la perte d’autonomie.
Nous verrons donc dans le chapitre suivant comment dans la recherche d’un équilibre entre
solidarité nationale et responsabilité individuelle, la couverture d’entreprise semble être une
des solutions les plus adaptées pour couvrir le plus grand nombre et optimiser l’organisation
du marché.
90
[CHAPITRE 3]
LA DEPENDANCE COLLECTIVE, UN MARCHE STRATEGIQUE DANS LA LOGIQUE DE
PROTECTION SOCIALE DES POPULATIONS SALARIEES DANS L’ENTREPRISE ET EN SORTIE
D’ACTIVITE. QUELLES STRATEGIES POSSIBLES POUR UNE MONTEE EN PUISSANCE DES
ASSUREURS ?
91
CHAPITRE 3 : LA DEPENDANCE COLLECTIVE UN MARCHE STRATEGIQUE DANS LA LOGIQUE DE
PROTECTION SOCIALE DES POPULATIONS SALARIEES DANS L’ENTREPRISE ET EN SORTIE D’ACTIVITE.
QUELLES STRATEGIES POSSIBLES POUR UNE MONTEE EN PUISSANCE DES ASSUREURS ?
1. Légitimité des assureurs collectifs
1.1. L’optimisation de la mutualisation
La capacité de négociation de l'entreprise conduit, dans une approche globale et homogène de ses
salariés, à l’obtention de garanties majorées et de cotisations maîtrisées.
Cette amélioration des conditions d’accès, offerte par les des contrats à caractère obligatoire et collectif,
se justifie notamment par la réduction des coûts de gestion et d'acquisition pour l’assureur, une
réduction de la volatilité de la sinistralité de par le nombre de salariés, des principes de fortes de
solidarité et de non-discrimination entre les salariés actifs et des conditions de déductibilité des
contrats.
En effet, le caractère obligatoire du régime optimise le principe de mutualisation en posant le principe
de l'accès à l'assurance de tous les salariés de l'entreprise, excluant ainsi que les garanties puissent être
refusées en raison des :
conditions d'âge,
conditions d'ancienneté,
toutes autres considérations : genre, statut matrimonial, structure familiale ou état de santé.
Il en découle notamment qu'en assurance collective complémentaire santé ou prévoyance les
cotisations et les garanties ne seront également pas différenciées en fonction de considérations
afférentes à la personne.
La seule notion de « catégorie objective » pour lesquelles les conditions d'assurance (cotisation, part
patronale, garanties) doivent être adaptées renvoie au collège professionnel : cadre ou non-cadre d'une
façon générique, ces catégories pouvant toutefois être rassemblées dans un seul contrat « ensemble du
personnel ». En effet, dans une série de trois arrêts rendus le 13 mars 2013, la Cour de cassation a
validé les régimes « catégoriels » en matière de prévoyance en considérant que l'égalité de traitement
ne s'applique qu'entre les salariés relevant d'une même catégorie professionnelle. Une entreprise peut,
92
ainsi, mettre en place une mutuelle prévoyant un financement différent selon les catégories
professionnelles : prise en charge de 60 % des cotisations dues par les cadres et agents de maîtrise et
100 % des cotisations dues par les autres catégories de personnel, sans violer le principe d’égalité de
traitement.
Avec le dispositif de « portabilité des droits instaurés par l'article 14 de l'accord national
interprofessionnel (ANI) du 11 janvier 2008, cette mutualisation est également étendue au salarié dont
le contrat de travail est rompu qui continue de bénéficier pendant les neuf mois (12 mois, si le nouveau
projet de loi est mis en place) suivant leur sortie de l’entreprise de leur couverture entreprise. Ainsi la
couverture des ex-salariés éligibles à l'accord est financée par le principe de cotisation des actifs.
Dans le cadre de leur activité, les organismes de protection sociales collectifs appliquent ainsi un
principe de segmentation au niveau des groupes, mais pas aux niveaux des individus, selon les critères
de :
taille d'entreprise : plus l’entreprise présente un nombre de salariés plus la mutualisation du
risque et les économies d’échelles sont importante, cela bonifie alors les conditions d'assurance
et de tarification des grandes entreprises.
type d'activité : secteur d’activité, pénibilité, exposition au risque.
caractéristiques du groupe : structure démographique, niveau de CSP, géocalisation…
Les partenaires sociaux, pour atténuer ce phénomène de segmentation des risques au niveau groupe, et
conserver un niveau de solidarité et de maîtrise économique important, ont lié les conditions de
couverture prévoyance aux conventions collectives nationales, permettant ainsi l'assurabilité de petites
ou très petites entreprises en prévoyance dans de meilleures conditions. En effet, elles bénéficient ainsi
d’un effet de taille du groupe assuré, qui s'apprécie donc sur un secteur économique entier, et de
couvertures adaptées à leur activité.
1.2. Une expérience dans la gestion des risques
93
Le risque est une composante fondamentale de l’assurance dont il est bon de vouloir améliorer la prise
en compte et la mesure … dans la mesure du raisonnable.
La base du métier d’assureur repose sur l’évaluation des risques. En effet, un contrat d'assurance est un
contrat aléatoire par lequel l'assureur s'engage envers les assurés à couvrir, moyennant le paiement
d’une prime, une catégorie de risques déterminés par le contrat. Le métier de l’assureur est de trouver
l’équilibre entre le risque, la prime et la probabilité de réalisation du risque.
L’une des expertises des assureurs collectifs est bien leur capacité à gérer les risques long (invalidité,
rentes temporaires, rentes viagères…) et à respecter les normes prudentielles qui s’inscrivent sur la
durée.
Le coût du risque attaché à l’activité devient alors central et le pilotage de l’activité est facilité par
l’expérience des acteurs collectifs à gérer des mutualisations homogènes.
La réelle capacité des assureurs à gérer la congruence entre le passif (gestion et projection des enjeux
techniques) et les actifs (gestion financière) est un enjeu principal.
L’assureur a donc déjà intégré à son activité le coût du risque couvert (à son passif). Si, (et
particulièrement en cette période de forte volatilité des actifs) il semble intéressant d’intégrer la mesure
du risque à l’évaluation des actifs, il paraît difficilement défendable de vouloir le faire sans prendre en
compte certaines caractéristiques fondamentales des passifs associés telle que la duration moyenne des
engagements.
Pour cela, il faut modéliser l’ensemble des risques (ça a été fait), prendre en compte leur impact sur
l’évaluation de chaque classe d’actif et les répercussions sur les besoins en capitaux associés à chaque
classe d’actif des assureurs.
En ce sens, la vision « réelle » du risque dont disposent les assureurs sur le risque dépendance, semble
rencontrer certaines limites liées à l’approche des données quantitatives peu qualitatives, et face aux
risques qui échappent à l’approche quantitative (risques stratégiques et de réputation, prise en compte
des évolutions, des business plans…).
Le risque dépendance à l’instant « T » est relativement bien connu des assureurs (réalisation du risque, à
l’âge moyen de 83 ans, durée en dépendance de 4 ans en moyenne, probailité de la survenance 90 000
nouvelles personnes concernés par an, 50 % de décès observée moins de 24 mois après le dépôt du
dossier sinistre Dépendance Totale …) cependant l’enjeux de maitriser les besoins à long terme (veille
94
sur nouveau type de pathologie) ou la traduction en services (coût et disponibilité) ne semble pas
évident dans un contexte non stabilisé (attentes des pouvoirs publics) où des engagements de
prestation en espèce et de prestations en nature ont été pris à long terme.
Ainsi afin de mieux appréhender les paramètres techniques pouvant varier dans le temps (loi de
mortalité des autonomes, loi d’incidence en dépendance, loi de longévité en dépendance) et de lisser
l’ensemble des risques par rapport aux besoins de fond propre, les acteurs du collectif s’appuient
notamment sur la réassurance.
Cela leur permet éventuellement un partage du risque, une réassurance financière, de couvrir les
personnes à hauts risques ou les populations à risque spécifique (ex : amiante).
Le niveau moyen de cession en réassurance sur le marché français de la dépendance s’élevant à 70%.
1.3. Un fort pouvoir de diffusion (accord de branche, grand groupe, couverture ascendant et
conjoint…)
La couverture des salariés en termes de prévoyance et de complémentaire santé s’est notablement
élargie ces dernières années. Ainsi, 95% des employeurs interviewés par le CTIP, dans le cadre d’une
enquêtes sur la protection sociale en entreprise, proposaient au moins une garantie de prévoyance
collective à leurs salariés et 81% déclaraient proposer au moins 3 des 4 principales garanties de
prévoyance collective (incapacité de travail, invalidité, décès, épargne retraite) à une partie des salariés.
Vu par les salariés, ce sont 85% d’entre eux qui bénéficiaient de garanties prévoyance via leur
entreprise contre au moins un risque parmi l’incapacité de travail, l’invalidité, le décès ou qui
disposaient d’un dispositif d’épargne retraite77.
Dans les grandes entreprises (entreprises du CAC 40) ce sont 100 % des salariés qui disposent d'une
couverture collective santé et prévoyance par le biais de leur entreprise 78.
77
Baromètre CTIP/Crédoc 2011
78
Solidarité, non-discrimination et segmentation en assurance collective - Éric Demolli, Directeur technique Health & Benefits
Mercer
95
Les offres de prévoyance collective sont donc largement diffusées ; cette pénétration dans l’univers de
l’entreprise peut également être illustrée par la mise en place de garanties prévoyance au sein des
branches professionnelles.
En effet, au 1er janvier 2012 ce sont 252 branches équipées d’un régime prévoyance et 60 par un
régime de complémentaire santé qui couvrent ainsi, en prévoyance et en complémentaire santé, plus de
13 millions de salariés et représentent 70% des salariés du secteur privé en France.
Cette tendance incitant à la protection collective semble se confirmer avec l’annonce de l’accord
national interprofessionnel (ANI) du 11 janvier proposant notamment la généralisation de la
complémentaire santé aux salariés.
Ainsi sur les 65 millions de français, 94% sont aujourd’hui déjà couverts par un contrat d’assurance
santé, dont :
35 millions environ à titre individuel dont notamment les fonctionnaires, les retraités et les
chômeurs.
74% des 16 à 17 millions de salariés du privé sont couverts par leur entreprise.
Sur les 26% de salariés non protégés par un contrat entreprise environ 60% sont couverts par
une assurance individuelle, les autres l’étant par le biais de leur conjoint ou bénéficiant de la
CMU-C.
Avec l’annonce de l’ANI, cette répartition risque d’évoluer légèrement. Ce sont environ 5,5 millions de
personnes (2 millions de salariés et 3,2 millions avec leurs ayants-droits) qui passeront d’ici 3 ans du
segment individuel vers le segment collectif 79, soit pour les acteurs du collectif, de nouvelles cibles à
potentiellement sensibiliser sur les métiers « connexes » à la couverture santé, soit la prévoyance et la
dépendance.
“L’aide aux aidants est un premier pas dans la prise de conscience de la problématique de la
dépendance, pour le DRH comme pour le salarié. Si les gens rechignent à s’assurer contre leur propre
79
Lesechos.fr - Les conséquences limitées mais déplorables de l'ANI du 11 janvier – 11 février 2013
96
dépendance, ils accepteront plus facilement de s’assurer contre la dépendance d’un proche”80. C’est donc
sur ce postulat qu’Axa a bâtît son offre dépendance entreprise.
L’assureur ainsi sensibilise le salarié sur son propre risque de devenir dépendant, tout en lui apportant
des solutions concrètes sur son risque le plus proche (celui de devenir aidant), tels que : des services
spécifiques, le versement d’un capital au salarié pour parer aux dépenses liées à l’entrée en dépendance
d’un de ses parents, mais également la possibilité de souscrire à titre individuel, en supplément de sa
couverture entreprise, un contrat pour ses parents, son conjoint ou ses beaux-parents, dans des
conditions optimisées.
Les acteurs collectifs peuvent ainsi adresser une couverture dépendance obligatoire, composée de
garanties d’assurance et d’assistance, à une cible massive de salariés mais également capter une cible
plus large en ouvrant leur régime facultatif aux proches du salarié.
1.4. Un dialogue établi avec les salariés, les entreprises et les partenaires sociaux
Les entreprises prennent conscience du rôle stratégique de la gestion des ressources humaines dans le
rendement de ses activités et de sa pérennité.
Le « capital humain » est la principale valeur des entreprises. Ainsi, les acteurs de la prévoyance
collective ont joué et peuvent encore jouer un rôle crucial dans la pérennisation de l’activité et la
fidélisation des effectifs, enjeux stratégiques pour l’entreprise.
Les acteurs de l’assurance collective présents dans les entreprises depuis 1947 (Convention Collective
Nationale De Retraite Et De Prévoyance Des Cadres Du 14 Mars 194781), ont en effet, permis aux
collaborateurs, d’assurer leur santé et leurs revenus de travail, via le déploiement des garanties de
prévoyance collectives leur permettant d’accéder aux soins et d’être équipés de protection financière
contre les risques de la vie ; un réel besoin pour eux et leurs proches. Ces investissements perçus
80
Lenouveleconomiste.fr - Dépendance : La prise en charge par l’entreprise –extrait déclaration de Yves Hérault (Directeur
Prévoyance et Dépendance Collectives chez AXA France)
81
La convention collective nationale de retraite et de prévoyance des cadres du 14 mars 1947 prévoit l’obligation pour
l’employeur de verser une cotisation au titre de la prévoyance égale à 1,50 % de la tranche A des salaires pour son personnel
cadre. Cette cotisation, à la charge exclusive de l’employeur, doit être affectée en priorité à la couverture de prestations en
cas de décès.
97
comme indispensables par les salariés pour optimiser leur sécurité, offre un mode de rémunération
‘‘judicieux’’, en favorisant la rémunération nette grâce à un traitement fiscal avantageux.
Ces types de couverture, qui concernent à l’heure actuelle plus de 13 millions de salariés82, font partie
intégrante des politiques de gestion des entreprise. Ces politiques se veulent plus rationnelles, plus
motivantes et leurs promoteurs recherchent désormais pour les collaborateurs, un équilibre entre vie
professionnelle et vie privée (prévention du stress, aide aux salariés parents, aide aux aidants…), dans
un objectif de hausse de la productivité, de baisse du présentéisme et de fidélisation des talents.
Ainsi cette expérience de la protection institutionnalisée des personnes contre les aléas de la vie, a
amené les acteurs de la protection sociale complémentaire collective à développer une vraie légitimité
et un réel savoir-faire pour gérer la négociation de la mise en place d’un nouveau contrat, tel qu’un
contrat dépendance, avec les différents interlocuteurs engagés sur le sujet de protection sociale en
entreprise. Participation financière de l’employeur, gestion des dialogues à instaurer pour la mise en
place d’un contrat notamment avec les partenaires sociaux, les syndicats, les comités d’entreprise, que
ce soit dans le cadre d’accord de branche ou en entreprise, sont au cœur de l’activité des acteurs de la
prévoyance collective.
La prévoyance collective est donc devenue avec le temps, au-delà d’un outil de protection sociale, un
outil de rémunération différée et durable ainsi qu’ un avantage social fort, permettant entre autre de
faire profiter d’avantages fiscaux à l’entreprise et aux collaborateurs, de les protéger mais également
d’instaurer un dialogue fédérateur entre les différentes parties prenantes.
Dans ce contexte, il devient naturel de poser la question de savoir si les acteurs de la prévoyance
collective et les partenaires sociaux, fortement attachés à ces couvertures, n’ont pas un rôle commun à
jouer sur le sujet de la dépendance afin de permettre:
le cofinancement salarial/patronal garantissant aux salariés d'accéder à des couvertures
d'assurance significative en contrepartie d'une cotisation minorée par rapport à l'assurance
individuelle ;
82
Rapport annuel CTIP 2011
98
une capacité de négociation de l'entreprise plus forte, de par la réduction des coûts de gestion et
d'acquisition de l'assurance, pour une approche globale et homogène, des garanties majorées et
de cotisations maîtrisées.
L’entreprise demeure un point central de l’organisation de la société afin de matérialiser la continuité
entre l’univers du travail et la protection du salarié tout au long de sa vie. L'implication et l’engagement
des partenaires sociaux ont fortement participé au développement de l'assurance collective, prévoyance
et santé notamment, leur rôle sera donc déterminant pour une émergence conséquente de la
couverture dépendance en entreprise.
1.5. Un savoir-faire fort en tant qu’intégrateur de services
Les assureurs collectifs intègrent l’ensemble des besoins de la protection sociale : Santé, prévoyance,
retraite… Ils sont en mesure de convaincre les entreprises et de construire des protections qui
s’inscrivent dans le temps : le temps de l’activité (25-65 ans) mais également le temps de la préparation
à l’inactivité (55-65 ans) puis lors de la sortie de l’entreprise (+ de 65 ans). Ils apportent donc des
services de prévention et des services d’accompagnement et/ou financier lors de transition (retraite,
vieillissement…) ou de rupture (perte d’emploi, décès, incapacité…).
Leur action collective permet notamment une fiabilisation des solutions par rapport aux besoins et
cibles couvertes. Raisonner sur la « masse », permet de continuellement assurer un ensemble de
population homogène dans son mouvement global. Telle une société miniaturisée, le renouvellement
des effectifs permet la conservation d’un âge moyen constant de la population couverte.
L'acculturation progressive des populations salariées permet le développement et une adhésion plus
rapide aux services de prévention et d’accompagnement en cohérence avec la protection assurantielle
et des besoins identifiés.
En ce sens, les modèles collectifs permettent de réfléchir et de construire, à des niveaux significatifs voir
industriels, de nouveaux modèles. La concentration des acteurs notamment paritaires ou de certaines
mutuelles ont créé des acteurs de taille significative, laissant penser que beaucoup de nouvelles
99
initiatives porteront sur des volumes conséquents et permettront par l’analyse des données l’essor de
nouveaux modèles économiques.
En effet, la possibilité de mener des pilotes et des expérimentations, sur de grandes entreprises (en
tenant compte des logiques des CSP, des logiques de secteurs (pro/inter pro), des aspects familiaux et
géographiques) permettront à terme de faire évoluer les contrats selon les résultats obtenus, et les
besoins recensés, mais également d’inscrire une relation client dans le temps.
Ainsi au-delà, de sa capacité à gérer la partie technique et financière (cotisation et prestation),
l’assureur collectif à de plus en plus vocation d’être l’interlocuteur privilégié de l’assuré et à capitaliser
sur sa capacité à gérer la relation client « multicanal ».
1.6. Bien-fondé de l’assurance collective
Au sein des contrats collectifs, on distingue les personnes couvertes par des contrats souscrits dans le
cadre d’une entreprise ou d’un groupe professionnel de celles pour lesquelles la garantie dépendance
est commercialisée dans le cadre d’un « package » constitué avec une garantie d’assurance
complémentaire santé.
76% des assurés relèvent de contrats collectifs… Mais en volume cela ne représente que 4,2 millions de
personnes couvertes par des garanties limitées.
Le faible développement de la couverture assurantielle dans le cadre de contrat collectif s’explique
notamment par la faible implication des entreprises qui ont une connaissance limitée de ce risque, dont
la probabilité de survenance est ultérieure à la période d’activité.
Ce type de couverture présente pourtant des atouts indéniables face aux contrats individuels.
En effet, les contrats à adhésion obligatoire souscrits au sein de l’entreprise présentent des avantages
certains en terme de couts et de mutualisations des risques en comparaison des produits individuels.
100
Les contrats collectifs (à adhésion obligatoire) ou de branche peuvent donc constituer un socle solide,
et semblent une opportunité pour couvrir le plus grand nombre contre le risque dépendance dès lors
qu’ils produisent leurs effets quand la personne a quitté l’entreprise. En effet, ils présentent l’avantage
de lever un certain nombre de freins identifiés lors de souscription et de gestion de contrat individuel :
Frein lié au coût : Un tarif mutualisé sur la masse (double mutualisation des risques au sein des
salariés d’une même génération et entre les différentes générations), donc inférieur pour les
assurés, et un cofinancement intéressant avec l’entreprise. De plus, le risque d’importante
revalorisation de la prime est également atténué grâce au phénomène de mutualisation et de
cofinancement.
Freins lié à l’exclusion, l’anti-sélection et à aléa moral : Il n’y pas d’exclusion envisageable la loi
Evin, interdisant toute sélection médicale ou exclusion de garanties au sein du groupe. Les
phénomènes d’anti-sélection ou d’aléa moral sont atténués par la diffusion du risque sur
l’ensemble de la population couverte, se traduisant par une absence de questionnaire médical,
de délais de carence et de franchises.
Frein lié à la compréhension de la couverture : Les choix de couverture se faisant par décision
collégiale (RH, délégués syndicaux…), un important travail de pédagogie sera réalisé pour
permettre la bonne compréhension des niveaux de garanties. De plus un certain nombre d’outil
intervenant dans la gestion du risque lors de souscription individuelle (questionnaire médical,
délai de carence et franchise) étant absent des contrats collectifs, la lecture en sera largement
simplifiée.
Freins liés à l’âge : l’article 4 de la loi Evin offre la possibilité lors de leur passage à la retraite aux
anciens salariés de l’entreprise de bénéficier, sans questionnaire médical préalable et sans délai
de carence, d’une couverture similaire de celle dont il bénéficiait jusqu’à alors. Les modalités et
les conditions tarifaires sont susceptibles d’être différentes, dans une certaine mesure, des tarifs
appliqués aux salariés. Ainsi, le retraité a la possibilité de maintenir, ou compléter, utilement sa
garantie pendant sa retraite afin de bénéficier, le cas échéant, d’une rente ou d’une majoration
de rente.
Ainsi, l’entreprise peut offrir à son salarié une couverture de base abordable dans de
meilleures conditions qu’une assurance individuelle généralement moins abordable, si elle
lui permet de pouvoir pérenniser ses garanties en sorite d’entreprise.
101
En effet, la cotisation annuelle par tête assurée en collectif s’élevait à 35 euros en moyenne en 2009.
Avec pour les contrats souscrits dans le cadre de l’entreprise ou d’un groupe professionnel, une
cotisation moyenne de 74 euros, et une cotisation moyenne de 30 euros pour les contrats souscrits dans
un cadre mutualiste83.
Cependant, les contrats collectifs d’assurance ne constituent pas une solution parfaite et ne s’adaptent
pas toujours à la situation particulière de l’individu, c’est pourquoi l’assurance individuelle a toujours
une utilité importante en complément de la couverture collective obligatoire.
Au-delà de cet aspect de manque de personnalisation de l’offre, des freins à la souscription
existent, telle que la réticence des employeurs à financer une éventuelle couverture de
prévoyance, dont les indemnisations seront potentiellement versées plusieurs années après
que le salarié ait quitté l’entreprise, et cela malgré les exonérations sociales prévues par
l’article L.242-1 du code de la Sécurité Sociale.
Ces mécanismes et logiques ne sont cependant pas applicables aux contrats collectifs facultatifs qui
hormis une sensibilisation plus importante des salariés dans le cadre de l’entreprise, présentent les
mêmes problèmes d’anti-sélection et d’aléa moral que l’assurance individuelle. Par conséquent, ce type
de couverture limite très fortement le phénomène de meilleure mutualisation du risque de dépendance.
Pour diffuser ce type d’assurance collective, la présence sur le terrain est bien entendu moins
importante que pour l’individuel ; l’activité reposant principalement sur la capacité à négocier des
accords de branche, à tisser des liens avec le grand courtage et les entreprises locales, l’aspect qualitatif
du réseau de distribution est bien plus engageante que l’aspect quantitatif, diminuant entre autre les
coûts d’acquisition.
83
http://www.cercledesepargnants.com/
102
2. Renforcer le rôle à jouer des assureurs face à la demande d’efficience latente
2.1. Une évolution contrainte vers a minima davantage de coordination
Les besoins et attentes d’une personne fragilisée par l’âge sont multidimensionnels, car plus les besoins
sont multiples, plus le parcours de santé va devenir complexe et requérir l’intervention de différents
acteurs intervenant sur les domaines du sanitaire, du social, de la psychologie et du médical. Les acteurs
à mobiliser pour répondre à ces besoins sont multiples et la complexité de l’aide à apporter tient
précisément de la nécessaire combinaison des réponses en matière de compensation dans le domaine
des soins et de l’aide à la vie quotidienne.
Afin que les réponses puissent au mieux-être coordonnées, une évaluation multidimensionnelle est
nécessaire pour apprécier une situation et ajuster une réponse adéquate. Il est alors essentiel de
disposer d’un outil d’évaluation multidimensionnel permettant d’objectiver une situation et par ailleurs
de disposer d’un outil et d’un référentiel partagé entre les professionnels.
Bien souvent une absence de coordination des interventions et de communication entre les
professionnels peut engendrer des conséquences importantes : polymédication de la personne
fragilisée, multiplication d’examens inutiles entrainant de forts surcoûts et une potentielle mise en
danger des personnes dépendantes.
Les assureurs dans leur fonction « d’organisateur » ont déjà des solutions permettant de maîtriser,
partiellement, cette dimension de coordination de parcours.
103
Dans l’offre de demain, au vu de la multiplication d’initiatives locales, les acteurs devront renforcer et
professionnaliser cette dimension d’accompagnement, plébiscitée par les assurés. Sur quels acteurs
s’appuient-ils et quelles sont les marges de manœuvres restantes ?
2.1.1.
La place des assisteurs : logique d’assuristance
Les sociétés d’assistance disposent de plate-forme médico-psycho-sociale joignable 24h/24. Les équipes
pluridisciplinaires peuvent-être composées, en fonction des sociétés, de Médecins, assistantes sociales,
ergothérapeutes, psychologues cliniciens, infirmière libérale… reconnues comme expertes sur les sujets
de la perte d’autonomie. Ces professionnels s’inscrivent dans la logique de travaux transversaux initiés
par les médecins conseils lors de situation complexe.
Pour répondre aux attentes qualitatives et quantitatives de leurs partenaires, les sociétés ont créé en
France et à l’international des réseaux de prestataires qui leur permettent d’organiser et de prendre en
charge des prestations de proximité, facilitant notamment, le maintien à domicile des personnes
fragiles.
Par conséquent, ces plateformes disposent aujourd’hui d’une forte capacité à développer des services
d’écoute, d’informations, d’accompagnement, de prévention et d’organisation de prestations et à
recueillir des informations. Elles sont potentiellement en mesure d’apporter une meilleure
harmonisation des interventions, transversalité de la réponse, lisibilité du système et fluidité du
parcours des personnes fragilisées dans l’ensemble des domaines liés au champ de l’aide à l’autonomie,
allant de la prévention jusqu’à la gestion globale du parcours de la personne, intégrant les
problématiques de l’habitat.
104
Les plateformes d’assistance ont ainsi pour objet de favoriser l’accès aux soins et aux aides sociales ainsi
que la coordination, la continuité et l’interdisciplinarité de la prise en charge médico-psychologique et
sociale à domicile.
105
Comme c’est déjà le cas sur les produits actuels, l’étude d’Optimind Winter 84 confirme que les assureurs
vont continuer à développer des offres majoritairement forfaitaires. « Cette approche est plus
maitrisable que l’approche indemnitaire, l’aléa sur le coût annuel de sinistre étant neutralisé par le
versement d’une prestation dont le montant est fixé à l’avance. »
84
Enquête Assurance Dépendance 2012 – Optimind Winter / OpinionWay - 1ère édition
106
Néanmoins, en raison de l’augmentation continue des frais médicaux et des prestations de service, le
forfaitaire ne peut être à terme une réponse suffisante à la dépendance. Pour couvrir le besoin de
l’assuré, une des solutions est de développer des offres avec prise en charge de services à la personne,
comme il en existe sur le marché depuis quelques années, et qui complète la réponse apportée par
l’assureur.
Dans cette logique, la mise en place de nouvelles offres nécessitent une collaboration
renforcée entre assureur/assisteur ; les assisteurs sont en mesure de contribuer, par leur
capacité à gérer des réseaux et à mutualiser les expertises, à un accompagnement et à des
soins de qualité pour tous, en alliant efficacité et maîtrise des coûts. En effet, ils pourront
notamment aider les assurés à optimiser les financements de l’assurance (ex capital
équipement) en organisant les solutions les plus pertinentes avec leur situation de vie.
2.1.2.
Renforcer les relations avec les ARS, un acteur local incontournable
Les agences régionales de santé (ARS) sont nées le 1er avril 2010 au terme d’un long processus.
Leur création a permis de réunir les différentes structures chargées des politiques de santé dans les
régions et les départements en une seule : Directions régionales et départementales des affaires
sanitaires et sociales (Drass et Ddass ), agences régionales de l’hospitalisation (ARH), groupements
régionaux de santé publique (GRSP), unions régionales des caisses d’assurance maladie (Urcam ),
missions régionales de santé (MRS) et le volet hospitalier de l’assurance maladie, composé d’une partie
du personnel des caisses régionales d’assurance maladie (Cram), du régime social des indépendants
(RSI), de la mutualité sociale agricole (MSA), des directions régionales du service médical (DRSM).
Ce décloisonnement entre les secteurs place les usagers au cœur du dispositif en contribuant à fluidifier
leur parcours de soins, sans rupture de prise en charge et permet une mise à disposition d’un
interlocuteur unique sur le champ sanitaire et médico-social.
107
Professionnels de santé et particuliers peuvent donc s’adresser à un seul interlocuteur pour avoir une
information et une vision globale sur les établissements de santé, les maisons de retraite, la médecine
libérale, la prévention.
Les ARS ont dorénavant un rôle essentiel pour concevoir des projets régionaux de santé pertinents et
notamment en incitant à une approche globale de la santé, une plus grande cohérence des réponses et
des parcours pour les personnes en situation de perte d’autonomie.
Pour s’adapter aux nouveaux besoins des populations fragiles, suscités par l’augmentation de
l’espérance de vie et l’augmentation du nombre de personnes âgées, l’offre de santé doit évoluer tout
comme l’offre assurantielle.
En effet, la dépendance est notamment une question de santé et relève à ce titre de l’organisation des
soins, de la mise en œuvre efficace du système de santé et d’une complémentarité des financements.
Pour parvenir à un tel résultat cela implique d’imaginer de nouvelles solutions sociales : la perte
d’autonomie nécessite des solutions adaptées aux besoins des personnes concernées et de leur
entourage ; besoins qui se modifient avec l’âge et l’évolution des pathologies. Il s’agit donc d’organiser
de manière transversale, entre les acteurs concernés, des réponses en termes d’information, de rupture
de l’isolement, d’aide pour le maintien à domicile, d’hébergement ou de soutien aux aidants.
Dans la mise en place de telles stratégies ou politiques d’organisation, reposant sur la
communication et les échanges d’information, il semble adapté de renforcer les projets
communs entre organismes complémentaires d’assurance et ARS. En effet l’expertise de
coordination entre le médical et le médico-social des ARS, combiné à l’expertise de
gestionnaire et de financeur des soins des assureurs ainsi qu’à leur capacité
d’industrialisation via l’accès à un grand nombre d’assurés, répondraient aux objectifs
recherchés, d’efficience, de qualité des organisations et du service rendu aux personnes, par
ces deux types d’acteurs.
108
2.2. Vers des groupes exhaustifs maîtrisant ou intégrant tous les chaînons de l’offre
Parallèlement à la démocratisation de la demande, les assureurs devront dans ce souci de coordination
et d’intégration des services s’appuyer sur une stratégie opérationnelle cohérente, pour aider à la
structuration du marché de l’amont à l’aval, tout au long de la filière de prise en charge de la
dépendance. C’est une condition sine qua non pour pouvoir tenir ses engagements à l’horizon des
trente années à venir.
Les effets de taille et d’expérience pouvant être prodigués par les assureurs seront déterminants sur la
plupart des maillons de la chaîne de valeur du métier (maîtrise technique du risque, réseaux de
distribution, stratégies de services, etc.) et la création de modèles économiques pérennes.
C'est un enjeu fort de l’assurance dépendance, devant évoluer d’une réponse « financements » à une
réponse « solutions ».
2.2.1.
Structurer et rendre « solvable » l’offre de services à la personne (SAP)
Dans les services à la personne, seule une minorité d’acteurs, comme AXA (avec Adhap services) ou CNP
Assurances (avec Age d’or services), ont opté pour un modèle intégré et une entrée dans le capital des
prestataires, permettant de maîtriser la qualité de la prestation à domicile en plus de la mise en relation.
Les autres acteurs ont plus souvent pris part au marché en participant au développement des enseignes
nationales (Groupama avec Fourmi Verte, Axa assistance avec Domiserve+, Groupe D&O avec
Domissimo Services, Malakoff Médéric avec Assistéo, la MGEN avec Serena…) dont le rôle est la mise en
relation entre le particulier et le prestataire de services. Ce niveau de participation et d’intégration à
l’activité est-il suffisant pour une structuration et l’essor de ce au marché ?
En effet à l’heure actuelle, les organismes de services à la personne sont peu structurés, 63 % d’entre
eux emploient moins de 25 salariés85 (étude DRESS) et la multiplication des enseignes n’encourage pas à
la professionnalisation et à la concentration du marché, ni à l’atteinte de taille critique nécessaire pour
engendrer des modèles vertueux.
85
L’enquête auprès des intervenants à domicile (IAD)- Étude DRESS 2010
109
La dépendance est consommatrice de personnels et d’heures d’assistance, la solvabilisation de la
demande des personnes âgées notamment via l’APA a ouvert des opportunités pour les services d’aide à
domicile à destination de ce public.
Rappelons les besoins d’aide évalué dans le cadre d’un maintien à domicile, soit le besoin d’heures en
fonction du GIR :
GIR 6 : 1,6 heure par semaine
GIR 2-4 : 37,4 heures par semaine
GIR 1 : 54,3 heures par semaine
Les prestations engagées par les assureurs concerneront un large public, dans les années à venir, et
potentiellement un volume d’heures très importants. Les prestations assurantielles suscitant ou
solvabilisant une demande impulseront donc certainement une forte dynamique dans le secteur de
l’aide à domicile.
Pour répondre aux attentes, que ce soit sous un angle quantitatif ou qualitatif, des assurés, il existe de
forts enjeux de structuration et professionnalisation de ce secteur. Les assureurs ont tout intérêt à y
prendre part ; il s’agit d’un vecteur important pour limiter les coûts, maîtriser la qualité des services
apportés et de ce fait garantir aux acteurs une nouvelle source de différenciation potentielle.
Cette démarche permettrait notamment à moyen terme une facilitation de conversion des prestations
financières en prestations en nature, au coût maîtrisé, en cohérence avec le souhait des français de
rester au sein de leur domicile le plus longtemps possible, avec des bouquets de services adaptés à la
situation de la personne.
Les acteurs du collectif couvrant un nombre de personnes important, ont un vrai levier de
« volume » à jouer pour renforcer leur relation avec les prestataires de services et optimiser
les synergies entre leurs différents domaines d’activité (santé, retraite, prévoyance…).
110
2.2.2.
Inciter au développement de l’offre qualitative et quantitative d’hébergement
Selon une enquête du cabinet d’audit KPMG dans le cadre de l‘Observatoire annuel des établissements
d’hébergement pour personnes âgées dépendantes, le coût de l’hébergement serait de 1857 euros par
mois soit un montant supérieur à la retraite moyenne française qui est de 1600 euros par mois. Ce
montant s’élève à 2242 euros par mois en Ile-de-France, contre 1819 euros hors Ile-de-France, soit en
moyenne 26% de plus que dans les autres régions. La question de l’accès des classes moyennes à ces
établissements est alors posée car malgré l’allocation personnalisée d’autonomie, accordée sous
condition de ressources, les classes moyennes ne peuvent pas sans liquidation de leur patrimoine ou
une importante contribution de leurs proches accéder à ces offres.
Bien que le souhait exprimé des français soit le maintien à domicile, il faut constater que la dépendance
survenant de plus en plus tardivement et étant de plus en plus lourde, s’accompagne le plus souvent par
un placement en établissement comme le confirme le tableau ci-dessous (âge moyen
d’institutionnalisation 83 ans et 10 mois)86.
En effet, actuellement, l’absence de pont entre les établissements d’hébergement long et les soins à
domicile, due aux cloisonnements institutionnels des structures existantes (accueil de jour,
hébergement temporaire…) ne permet pas de répondre aux attentes des familles et aboutit le plus
souvent sur une institutionnalisation.
Mais la construction et la gestion des EHPAD mobilisent d’importants fonds propres et génèrent des
coûts de fonctionnement conséquents. Du fait que le prix à la journée constitue pour les familles un
facteur de choix important, avec la qualité des services prodigués, les principaux groupes ont augmenté
leur capacité de financement, en ouvrant leur capital aux investisseurs institutionnels tels que les
assureurs afin d’atteindre une taille critique nécessaire à leur pérennité.
Ainsi les acteurs de la protection sociale ont, depuis quelques années, développé différentes stratégies
pour peser sur le secteur des EHPAD dont la prise de participation capitalistique : Predica (Groupe
86
CNSA – Chiffres clés 2012
111
Crédit- Agricole) est présent au capital de Korian et de Medica, le groupe BPCE au sein de DomusVi et les
Groupe Axa, Macif et Covéa (MAAF-MMA-GMF) au sein de Medica.
D’autres acteurs ont choisi comme stratégie une logique de partenariat afin de prioriser l’accès de
places en EHPAD à leurs assurés (partenariat Afer/Orpéa ou Réunica/Arepa) ou d’information et
d’orientation de leurs assurés (sur les tarifs, la qualité des prestations, etc.) pour Malakoff Médéric, et
Humanis.
Il est important pour les acteurs de la protection sociale d’apporter un accompagnement dans cette
période de transition, de rupture pour l’assuré et ses proches. Toutes initiatives permettant de faciliter
l’accès à une solution ou permettant l’amélioration de la transparence de l’information sont
appréciables.
En développant leur rôle de prescripteur dans cette filière les assureurs apporteraient de
nouveaux services à leurs assurés mais également à leurs proches aidants et permettraient
d’installer une certaine force de négociation avec les établissements.
2.2.3.
Renforcer les synergies inter-offres santé/dépendance
La santé est corrélative du vieillissement et le risque dépendance et le risque santé ne sont pas si
différents.
Ces deux marchés ne sont pas au même stade de maturité, la santé étant un marché beaucoup plus
développé (93% des français couverts) et culturellement mieux assimilé mais il existe de fortes
similitudes de structuration dans l’approche de ces deux risques.
En effet les modèles d’assurances individuelles couvrant ces deux types de risques présentent les
mêmes limites :
Les personnes s’équipent de couvertures conséquentes lors d’une plus grande prédisposition au
risque.
Le phénomène de mutualisation est donc amoindri concentrant une population au risque plus
élevé que la moyenne, engendrant une augmentation importante des tarifs.
112
Les personnes les plus fragilisées économiquement et socialement mais largement exposées au
risque, rencontreront des difficultés pour accéder à une couverture.
Ainsi les couvertures santé comme les couvertures dépendance proposées dans un cadre collectif ne
sont pas sujettes à ces inconvénients et constituent même des solutions efficaces en offrant une
meilleure mutualisation et en présentant des tarifs beaucoup plus abordables.
Ces deux activités présentent également des similitudes dans leurs enjeux :
Favoriser la prévention pour diminuer la prévalence du risque de dégradation physique et/ou
mental et optimiser l’entretien du capital santé
Protéger les assurés et leurs proches lors de la survenance du risque en garantissant soit en
logique forfaitaire, soit en logique indemnitaire une prise en charge des soins nécessaires
Prolonger cette démarche dans une logique d’accompagnement personnalisé d’orientation dans
un parcours de soins complexes et très parcellés.
Ainsi la couverture santé telle que la couverture dépendance sont deux offres qui nécessitent une
double approche, financière et d’organisation de services.
Il apparaît donc légitime que les assureurs exploitent au mieux les synergies envisageables
entre les activités de la santé et de dépendance, notamment dans le cadre de stratégies de
prévention, de prestations proposées et/ou d’implication auprès de la filière en aval, auprès
des prestataires que nous avons pu citer précédemment (EHPAD, SAP mais aussi relation
avec les professionnels de santé ou du médicosocial).
Certains acteurs vont jusqu’à coupler les garanties et inclure des garanties dépendance dans leur offre
santé (mutuelles fonctions publiques), permettant une diffusion rapide de l’offre mais pouvant
cependant ne pas répondre aux enjeux de pérennité d’une couverture du risque dépendance qui est un
risque long.
Des synergies sont à développer ou à renforcer mais les logiques d’investissements, de lissage et de
ROI, étant très différentes, des limites peuvent exister à fusionner ces deux types de garanties.
113
3. Réinventer l’approche « dépendance collective » en intégrant de nouveaux leviers
de développement
3.1. Cibles : Rechercher l’adhésion de toutes les parties prenantes
Il est difficile pour les DRH, qui sont très soucieux de la dérive des coûts des complémentaires santé et
de la prévoyance, d’intervenir aussi sur la dépendance. De plus les DRH sont moins réceptifs et se
sentent moins concernés face à ce risque qui se réalisera quand les salariés seront partis de l’entreprise
depuis de nombreuses années.
Ils favorisent ainsi le financement des couvertures qui sont d’application immédiate, pour la période
pendant laquelle le salarié est en entreprise (l’incapacité, l’invalidité, la maladie ou le décès), et freinent
leur engagement sur la dépendance qui ne relève pas d’une solidarité d’entreprise immédiate.
Cependant, à l’image de ce qui se passe dans la société française, une prise de conscience est en train de
s’opérer dans le monde de l’entreprise notamment via l’émergence de la problématique des aidants
concernant les salariés en activité. Les grands groupes en viennent donc à s’intéresser de plus en plus à
la question de la dépendance.
Une démarche de pédagogie est donc à entreprendre sur ce public de
professionnel, déjà plus sensibilisé à la problématique mais encore
insuffisamment informés.
En effet selon le Baromètre 2011 de l’OCIRP et de Molitor Consult, seules 52% des Directions des
Ressources Humaines estiment fin 2011 être très bien, bien, ou assez bien informées sur le sujet de la
dépendance… Elles sont également que 13,3% à avoir une connaissance du coût mensuel moyen
dépensé par une personne dépendante et 76,7% à être surprises par le rapport de un à quatre entre les
coûts respectifs des deux types de contrat collectif (santé et dépendance).
Les acteurs du collectif doivent donc entreprendre de larges actions de communication afin
d’apporter une meilleure information (concernant le coût moyen de la dépendance, les
modalités de la prise en charge des pouvoirs publics et le montant du reste à charge pour les
proches) et initier une démarche pédagogique, pour une meilleure connaissance, des
conséquences financières de la dépendance et des solutions existantes (offre, avantages et
coûts), de ses interlocuteurs.
114
Cette démarche de sensibilisation doit-être entreprise également auprès des salariés qui en raison du
caractère obligatoire de l’adhésion peuvent ne pas percevoir la valeur d’une couverture collective.
Ainsi équiper systématiquement les Directions des Ressources Humaines de « mallette de
communication » incluant des services web spécifiques rappelant la valeur ajoutée de couverture
collective : risques engendrés par une perte d’autonomie, niveau de garanties offertes, mutualisation
des risques entre tous les salariés de l’entreprise ou de la profession, protection sociale complémentaire
au meilleur rapport qualité / coût, niveau de prise en charge de l’employeur, absence de sélection,
déduction fiscale, gestion des formalités de l’employeur… Semble une démarche indispensable pour
susciter l’adhésion et expliquer, aux entreprises les bienfaits qu’engendre une telle couverture.
Toujours selon le Baromètre 2011 de l’OCIRP et de Molitor Consult, les Partenaires Sociaux et les
délégués syndicaux semblent avoir une connaissance technique plus affinée du sujet et être favorable
au développement de couverture dépendance au sein de leur entreprise.
Les partenaires sociaux ayant un rôle participatif important dans l’animation du dialogue social au sein
de l’entreprise, leur meilleure appréhension de la problématique est une force.
En effet, les partenaires sociaux sont fortement attachés à ces couvertures permettant un
cofinancement salarial/patronal et l’accès aux salariés, à des couvertures d'assurance significative en
contrepartie d'une cotisation minorée par rapport à l'assurance individuelle.
L'implication des partenaires sociaux a d’ailleurs fortement orienté l'assurance collective, prévoyance et
santé notamment, dans une perspective paritaire, ce qui s'est traduit concrètement par l'émergence de
115
nouveaux organismes porteurs de risque et co-administrés par les représentants des employeurs et des
syndicats, les institutions de prévoyance87.
Resserrer les liens et s’appuyer sur eux, comme relais de promotion au sein de l’entreprise, sera la
stratégie gagnante pour accélérer les prises de conscience nécessaires, concernant les problématiques
de la perte d’autonomie, à l’instar de ce qui a pu être fait pour la prévoyance.
Ces acteurs seront également enclins à engager les discussions avec les salariés. En effet, banaliser
l’offre dépendance et la faire entrer les mœurs, malgré l’engagement de l’entreprises à financer une
partie des cotisations, sera un processus long notamment vis-à-vis des
salariés les plus jeunes.
Des services innovants tels des « serious game », des applications mobiles
ou une simulation de vieillissement sont autant d’initiative pouvant-être
proposé aux salariés afin de créer un lien vis de cette garantie qui ne les
concernera potentiellement que dans quelques dizaines d’années.
3.2. Offre : Faire évoluer l’offre en cohérence avec les attentes du marché
Les gens ne souhaitent plus seulement qu’on les accompagne lors de la perte d’autonomie mais qu’on
les accompagne à rester en bonne santé et en sécurité au sein de leur domicile. C'est un changement de
paradigme pour les assureurs devant transiter du « cure » vers le « care ».
Proposer une offre intégrée et graduelle de prise en charge, pour répondre aux logiques de parcours de
vie individualisé, est donc le nouvel enjeu ; faisant basculer l’approche de l’assurance dépendance vers
une solution complète de renforcement de l’autonomie.
D'ailleurs, AG2R La Mondiale qui a de l'expérience sur le marché - puisque le groupe a lancé en 1985 le
premier produit dépendance – n’a cessé de faire évoluer son offre pour s’adapter à ces évolutions et a
en ce sens commercialisé, en 2012, un nouveau produit spécifique pour les aidants.
87
Solidarité, non-discriminationet segmentation en assurance collective - Éric Demolli, Directeur technique Health & Benefits
Mercer
116
3.2.1.
Des contrats tournés vers les aidants
En intégrant des garanties d’aides aux aidants, le contrat dépendance peut alors être vendu non
seulement pour couvrir la dépendance de l’assuré, mais aussi pour l’aider à gérer celle de ses parents
(ou d’un proche), enlevant de ce fait un frein à l’achat quand il s’agit d’acheter un produit pour couvrir
sa propre dépendance.
Pour l’employeur, la problématique de la dépendance est simplifiée quand il s’agit d’aider les salariés à
rester au travail tout en assumant l’aide à leur parent dépendant.
L’entreprise pas toujours concernée par un risque dont la survenance n’a que très peu de probabilité
pendant le temps d’activité, trouve, face à cet enjeux de soutenir les aidants salariés, une réelle
légitimité dans le fait de l’aider à concilier sa vie familiale, sa vie professionnelle et sa vie comme soutien
d’une personne dépendante.
Un grand nombre d’acteurs de l’assurance se mobilise, en ce sens, depuis 2010 :
• Communication ciblée sur les sites internet
• Financement de projets associatifs
•Plus grande place aux services et aides aux aidants inclues dans les contrats dépendance
Ainsi parmi la palette de services proposés, en inclusion dans les contrats dépendance, les plus
pertinents pour l’entreprise pourraient concerner l’aide aux aidants salariés.
Ce statut « d’aidant », engendrant stress, sensibilité médicale, épuisement est source d’absentéisme au
sein des entreprises, nécessite un accompagnement et un soutien spécifique permettant
potentiellement de réduire le risque d’absentéisme ou de présentéisme, un argument choc pour les
employeurs.
117
Aussi un champ de possible est encore à créer sur ce segment pour les assureurs afin de développer de
nouveaux services afin de prévenir l’épuisement physique et psychique des aidants et inciter les
entreprises à intégrer la question de la dépendance dans leur réflexion sur la conciliation vie
professionnelle/vie familiale.
Mais ce n’est pas leur seul axe de tir, en effet des besoins matériels existent auprès de cette cible
d’aidant salarié et la logique de protection sociale n’a pas été portée à son paroxysme sur ce volet.
Au-delà d’un rôle de conseil, de pédagogue et d’organisateur, aucun service répondant à une logique
nécessaire de dédommagement lors d’aléas (interruption de travail), n’a été proposé par les assureurs
pourtant en mesure d’apporter des compléments de financements au dispositif de législation sur le
congé de soutien familial.
Les assureurs pour encourager la souscription d’offre collective dépendance intègrent donc des services
d’écoute, de coordination de services, d’aide administrative et parfois de prise en charge de services en
cas d’absence de l’aidant, mais leur rôle, pour maintenir le salarié dans un circuit professionnel,
pourrait-être bien au-delà, en participant notamment à l’engagement de l’entreprise auprès de ses
salariés en situation d’aidants et en préconisant, voir en cofinançant des initiatives salutaires pour tous,
telles que :
la diffusion, via le Comité d’Entreprise de chèques emploi service universel préfinancés, auprès
des salariés aidants, pouvant servir pour financer des services et donc des emplois à domicile
pour leurs proches dépendants ;
l’incitation à un suivi de santé personnalisé en relation avec la médecine du travail ;
la mise en place de compléments de financements au dispositif de législation sur le congé de
soutien familial ;
Un accompagnement renforcé des aidants familiaux devient alors une condition permettant au salarié la
poursuite de l’accompagnement de la personne malade et son maintien dans l’activité professionnelle
dans des conditions favorables.
Par exemple lors de situation complexe, le salarié peut faire une demande de conges de solidarité
familiale auprès de son employeur. Le congé de solidarité familiale est accordé pour une durée de 3
mois renouvelable une fois, soit une durée maximale de 6 mois. Il ne peut être ni reporté ni refusé par
l’employeur cependant il peut être transformé en période d'activité à temps partiel avec son accord.
118
Pendant toute la durée du congé de solidarité familiale, le contrat de travail est suspendu, le salarié
n’est donc en principe, pas rémunéré par son employeur. Il peut alors solliciter une allocation
journalière d'accompagnement à domicile d'une personne en fin de vie auprès de la CPAM en
fournissant notamment un formulaire cerfa n°14555*01, un certificat du médecin et une attestation de
l’employeur.
Cette allocation est de 54,17 € par jour sur une durée maximale de congés de 21 jours et de 27,08 € si le
salarié a transformé son congé de solidarité familiale en activité à temps partiel pendant 42 jours. Pour
rappel le Smic horaire brut est de 9,43 € soit un montant de rémunération de 66€/jour pour un contrat
de 35h/semaine, ainsi il est facilement observable que le niveau d’indemnisation est faible et ne peut
pas se substituer ne serait-ce qu’à un mois de rémunération.
En effet, si la personne obtient un congé de 6 mois (durée maximale accordée) pour s’occuper d’un
proche en fin de vie à domicile, elle recevra au maximum 1137€… Bien que cette allocation soit une
initiative positive, elle sera insuffisante… Quel choix a alors réellement le salarié ? Absentéisme,
présentéisme ou sortie de la vie professionnelle…
Une aide au maintien de revenu et des congés générant des droits sociaux 88(ex retraite) lors des aléas
de la vie professionnelle de l'aidant - arrêt temporaire (congé de soutien familial) ou définitif, temps
partiel,... seraient une réelle avancée au regard de l'apport des aidants et vrai un dispositif pour
permettre aux aidants de rester dans une dynamique professionnelle.
Afin de faciliter ces périodes délicates de nouvelles solutions complémentaires peuvent-être
envisagées pour faciliter le maintien dans l’emploi du salarié aidant, tel que l’adaptation des
rythmes de travail avec des conditions optimisées, une incitation à surveiller sa santé ou un
maintien de revenu lors de congé de solidarité familiale, permettant ainsi au salarié de
recevoir une indemnisation financière pour faire face à la diminution, puis interruption de
revenus engendrée par ce congés.
Il semble opportun pour les assureurs et les entreprises d’imaginer ensemble de vrai relais
pour fidéliser et maintenir la productivité du salarié à son poste.
88
Un appel pour un soutien équitable en faveur des aidants bénévoles a été d’ailleurs été lance en ce sens en Février 2013
par Céline Dupré, co-fondatrice de Rose Magazine, Serge Guérin, sociologue, Professeur à l’ESG Management School,
Paulette Guinchard, ancienne secrétaire d’Etat aux personnes âgées, Pierre-Henri Tavoillot, philosophe, Maître de
Conférences à Paris IV et Thierry Calvat, fondateur de Idées Solutions Sociétales.
119
3.2.2.
Renforcer les actions de prévention pour prévenir l’apparition de la dépendance
La prévention est de tous les échanges, de toutes les conférences ou autre débat, pourtant un politique
déterminée de prévention tarde à être mise en œuvre.
Depuis les recommandations nutritionnelles pour lutter contre l’obésité ou le diabète- facteurs de
risques de la perte d’autonomie - jusqu’à l’incitation à la pratique d’activité physique, les initiatives sont
insuffisantes dans l’univers assurance. Pourtant la prévention concerne tous les âges, les personnes
jeunes sont moins visées par les programmes de prévention, une politique globale de promotion de la
santé, favoriserait pourtant l’autonomie et l’optimisation du capital santé quand l’âge avance.
La tranche d’âge des 50-75 ans, est particulièrement concernée par la mise en œuvre d’actions
préventives pouvant jouer un rôle prépondérant dans la perte d’autonomie des personnes âgées. Cette
catégorie est effectivement pivot entre l’âge actif et l’âge de la dépendance, ce qui justifie une action
toute particulière, d’une part pour informer cette population sur les mesures utiles de prévention,
d’autre part pour l’inciter à s’inscrire dans une démarche proactive de gestion de leur santé.
Pour les personnes âgées, les initiatives sont plus fréquentes mais l’accent doit être mis sur la
prévention des chutes, qui, l’âge augmentant, deviennent un facteur d’importance croissante dans la
perte d’autonomie. Des recommandations, et des aides doivent être déployées à grande échelle pour
permettre l’aménagement des logements des personnes âgées. Les assureurs sont particulièrement
actif sur ce volet proposant dans les contrats dépendance, le financement d’un capital « travaux » lors
des premiers signes de perte d’autonomie.
Les assureurs connaissent ces facteurs d’entrée en dépendance et les leviers d’action pour retarder
l’entrée en dépendance, mais malgré cela peu de moyens sont réellement engagés.
Pourtant un certain nombre d’actions pourraient être facilement intégrés au parcours d’un assuré et à
coût maitrisable :
Un suivi médical spécifique, en mettant en place des campagnes de dépistage des facteurs de
risques, incorporant la situation familiale et sociale des assurés
Le financement partiel d’un diagnostic des dangers à domicile pour réduire le nombre de chutes
avant tous signes de dépendance (84 % des accidents de la vie courante des personnes de plus
de 75 ans sont constitués de chute à domicile)
120
Une information et un accompagnement pour un meilleur suivi des prescriptions
médicamenteuses, tel que le financement d’un pilulier électronique. Les seniors sont souvent
polymédiqués, les personnes de plus de 60 ans consommant plus de 3,3 médicaments par jour
quand elles vivent dans leur domicile et 5,2 en établissement, les accidents iatrogéniques sont
responsables de 10% des hospitalisations chez les plus de 70 ans, 20% chez les plus de 80 ans…
et sont très souvent dû à une mauvaise observance du traitement thérapeutique.
Des nouveaux services de ce type suscitent l’intérêt des salariés, tel qu’apprécié dans l’enquête du
Crédoc/CTIP sur l’offre dépendance, 70% des salariés seraient favorables à la mise en place dans
l’entreprise d’un dépistage proposé par l’assureur et 61% à un suivi et un accompagnement spécifique à
l’aide d’un outil de télésanté.
Les initiatives restent insuffisantes en nombre mais également en moyens engagés, les logiques de
prévention n’ont pas encore réellement leur place dans l’offre assurantielle. Elles sont souvent
déployées sous forme minimaliste (apport d’information ponctuelle) ; en cohérence avec le manque de
volonté d’investissement actuel.
Il existe donc encore un grand champ des possibles sur le développement d’actions de
prévention, notamment pour les acteurs collectifs qui par leur présence au sein des
entreprises ont un pouvoir pédagogique important auprès des différentes parties-prenantes.
Ils peuvent préconiser et inciter les entreprises à déployer des programmes de prévention,
en cofinançant éventuellement un certain nombre d’initiatives.
3.2.3.
Adopter le principe d’un socle commun entre assureurs (garanties minimales, outil
d’évaluation, portabilité des droits …)
Dans le cadre, de l’intérêt des assurés et de la bonne acceptabilité et compréhension de l’offre
dépendance, en complément des travaux initiés par Valérie Rossot-Debort en 2010 préconisant la
labellisation des contrats d’assurance dépendance obligatoire et de la FFSA avec le projet de label
Garantie assurance dépendance (GAD), le marché a commencé à converger au niveau des définitions
des garanties pour la dépendance totale.
Afin de continuer à impulser un tel niveau de concertation, les assureurs devraient créer un consortium
dépendance ou un institut de la perte d’autonomie afin de maintenir un niveau d’échange constructif
121
pour la structuration et la pérennité de ce marché et favoriser une résolution collective des
problématiques liée à cette offre :
Facilitation de portabilité de la couverture d’un assureur à un autre
Plafonnements des augmentations annuelles de cotisations
Indexation obligatoire des garanties et des rentes servies
Homogénéisation des outils d’évaluation pour un déclenchement synchrone de l’aide privée et
des prestations publiques
Limitation des délais de franchise suivant la reconnaissance de l’état de dépendance
Simplification de la portabilité du collectif à l’individuel et incitation à maintenir l’effort de
cotisation en sortie d’entreprise
Information en sortie de contrat concernant l’accès à des garanties supplémentaires
Maintien des droits avec un coefficient de réduction en cas de sortie du contrat
Accès à des prestations en tant qu’aidants
Adopter une telle démarche d’homogénéisation ne semble pas simple et pourtant apporter des
réponses communes et uniformes concernant les conditions de souscription et de réduction des
contrats (la nature et le montant de la rente, les durées de franchise et de carence, calendrier des
revalorisations) et les principes de transférabilité serait un réel gage de confiance auprès du public
salarié et des entreprises.
122
3.3. Consolider les enjeux techniques (évolution des tables, provisionnement…)
Les enjeux techniques et actuariels sont très importants pour l’offre dépendance, d’autant plus qu’elle
se fonde sur des données quantitativement et qualitativement peu nombreuses sur lesquelles les
assureurs ont peu de recul. L’évaluation de ce risque, base de la tarification et du provisionnement,
nécessite donc des modèles adaptés et évolutifs.
En effet, qu’il soit souscrit comme une garantie principale ou une garantie complémentaire à un contrat
d’assurance vie, le risque dépendance est un processus complexe à formaliser : c’est un risque de long
terme pour lequel le manque de recul constitue une réelle difficulté, notamment concernant la
détermination des probabilités de survenance du risque mais également des coûts qu’il peut engendrer
et la manière dont il peut évoluer.
Ce manque d’information et de recul concernant les données statistiques peuvent avoir des
répercussions importantes sur les révisions du niveau de prime et conduire à des augmentations
tarifaires lourdes, consécutives au vieillissement en mauvaise santé d’un groupe non anticipé.
Aucune table de maintien en dépendance n’est proposée par le Code des Assurances. Par conséquent,
les lois sont estimées sur la base du portefeuille à modéliser si les données sont suffisantes, par défaut,
en fonction de statistiques nationales et d’enquêtes médicales comme celle réalisée par l’INSEE :
Handicap-Incapacités-Dépendance (HID).
123
Les tables utilisées sont donc statiques et ne tiennent donc pas compte des évolutions potentielles du
risque sur les années à venir.
Pouvoir exploiter un échantillon de données plus important est donc indispensable pour envisager
travailler sur la modélisation du risque, en segmentant le portefeuille suivant d’autres variables
caractéristiques que l’âge (ex : sexe, catégorie professionnelle...), et afin d’établir des probabilités de
transition d’état d’autonomie, et de maintien dans chacune de ces phases, en fonction de facteurs
explicatifs évolutifs (progrès médicaux, prévalence de nouvelles pathologies...).
Les assureurs devraient ainsi pouvoir mutualiser leur table dépendance pour améliorer la
connaissance et la gestion de ce risque ; les premiers à bénéficier de cette évolution
seraient, sans nul doute, les assurés.
3.4. Renforcer la communication
Les différents niveaux de communication des acteurs autour de l’offre dépendance peuvent-être
renforcés :
Communication institutionnelle
Communication média
Communication produit
En impact grand public, le mot « dépendance » à une connotation négative pour aborder un sujet déjà
de nature plutôt anxiogène. Renommer ce type d’assurance sans être un réel levier de vente, pourraitêtre bénéfique à une communication plus positive et éventuellement moins stigmatisante : « PPDA
(Prévoyance Perte D’Autonomie) »89.
Une communication, reposant sur les valeurs et les liens intergénérationnelles, adoucie et dédramatise
ce sujet « tabou » et bien difficile à aborder, notamment par les réseaux de proximité ; ces bonnes
pratiques commencent à être mises en œuvre par les leaders du marché.
89
Newsletter EFE- François Lusson, Actuaire Consultant au sein du Cabinet ACTENSE
124
Ils facilitent par leurs actions de communication, bien que pas encore assez nombreuses, une
pénétration rapide du marché.
L’un des éléments sur lesquels les assureurs ont un grand champ de manœuvre est d’avoir plus de clarté
de leurs conditions générales. Tout d’abord en rendant les contrats accessibles plus aisément et
intelligibles pour le grand public.
En effet une étude d’UFC-Que choisir sur les offres assurances dépendance, menée en 2011, s’est
notamment intéressé à l’analyse de conditions générales ; le constat n’est pas très positif :
« Le consommateur n’a aucune certitude sur l’évolution de sa cotisation, confronté à un mécanisme
complexe, de surcroit présenté de manière illisible dans les conditions générales. »
« Les informations données aux consommateurs sur les conditions de revalorisation sont parcellaires. »
« Le consommateur n’est ainsi pas en mesure de savoir précisément ce qu’il souscrit, à quoi il s’engage et
ce qu’il obtiendra en contrepartie. »
Au final l’étude démontre que même sur les conditions générales des contrats considérés comme les
plus fiables, très peu informent l’assuré de la prévisibilité des garanties d’offres d’assurance
dépendance : plafonnement de l’évolution des cotisations, indexation automatique des rentes,
revalorisation des garanties réduites ou information sur l’affectation des provisions.
125
Cet aspect peut avec peu de moyen être amélioré par les acteurs, ce type de documentation devant
totalement intégrer à la stratégie de communication.
Le second point important qui est ressorti des études menées sur le sujet, concerne le besoin de
sensibilisation, d’éducation et d’information sur la dépendance, car le grand-public, les entreprises ou
les salariés connaissent assez peu le sujet. Il est donc nécessaire de mieux sensibiliser les personnes sur
les risques encourus en fonction de l’âge, mais également en situation d’aidant.
Le Crédit Agricole a opté, en ce sens pour une communication télévisée grand public (spot publicitaire/la
minute des aidants) sensibilisant de manière massive l’audience, à la problématique de protection
intergénérationnelle, plus qu’à l’offre elle-même.
Les initiatives des autres acteurs se portent plutôt sur internet :
Des sites dédiés aux aidants
126
Peu de campagnes de communication de grande envergure sont déployées, des actions plus
fréquentes, informant de la nature des risques, des solutions existantes, des valeurs de
solidarité familiale auraient certainement un fort impact pédagogique et seraient
certainement un moteur pour «déstigmatiser» et désenclaver cette offre.
3.5. Favoriser l’essor de solutions innovantes, « L’ I-pad plutôt que l’Eh-pad »90
Les technologies de l’autonomie devraient se développer dans les prochaines années ; elles ont un réel
intérêt pour faciliter la vie des personnes âgées, et notamment des personnes âgées en perte
d’autonomie, ainsi que de leur proche aidant.
Avec les NTIC, les possibilités d’assistance et de surveillance des personnes dépendantes à domicile et
en établissement vont se multiplier : géolocalisation, système de télévigilance, de téléassistance,
robotique, dispositif d’analyse et de bilan de santé à distance via télémonitoring…
En effet, face à l’enjeu sociétal majeur que représente le vieillissement de la population, les technologies
pour l’autonomie apportent des réponses pratiques et concrètes au besoin de renforcement du lien
social, de sécurité, de suivi de santé et de mobilité aux personnes en situation de fragilité.
La part des aidants familiaux et professionnels s’est accrue très rapidement depuis 200591.
90
Mission Interministérielle sur l’adaptation de la société française au vieillissement de sa population –Luc Broussy - 2013
127
Les besoins en termes d’information (formation et qualification) et de solution (aide techniques ou
technologiques) des aidants naturels et professionnels sont donc de plus en plus pressants pour éviter
les ruptures de soutien social, médico-social et sanitaire et permettre ainsi aux personnes les plus
fragiles d’être accompagnées de manière pertinente. Les technologies et technologies de l’information
et de la communication peuvent s’avérer être des outils appropriés pour répondre à leurs besoins
(formation, information, lien social, organisation, coordination…) dès lors qu’elles sont complétées par
les liens sociaux..
Cependant la demande semble encore insuffisamment mature et un certains nombres de ces solutions
ne sont que peu connues du grand public :
91
Le nombre de structures de services à la personne agréées a été multiplié par 5 dans entre 2005 et 2010 (5 000 OASP en
2005 ; 25 000 en 2010).
128
Mais ceci se vérifie également auprès des populations professionnelles (aide à domicile, médecin,
pharmacien, assistante sociale…) qui demeurent assez réticentes et mal-informées sur l’usage potentiel
de ces nouvelles technologies.
Ces technologies permettent pourtant de nouveaux usages, de nouveaux services et de nouvelles
réponses aux défis existants, mais également de nouveaux modes de fonctionnement. Les mutations
qu’elles engendrent, se diffusent de plus en plus chaque jour et les assureurs ont un réel intérêt à
trouver des modèles de prise en charge pour solvabiliser l’accès à ces outils qui ont un vrai potentiel de
prévention et de maitrise des coûts.
Ce marché des technologies d'aide aux seniors représentait 2,7 milliards en 2010 et peine à trouver une
légitimité et un modèle économique lui permettant un réel essor. Pourtant 87% des 65 ans et plus
seraient d'accord d'abandonner la protection de leur vie privée si cela leur permettait de rester à leur
domicile mais le consentement à payer pour une solution technologique d'assistance à domicile reste
limitée (150 euros). Les assureurs peuvent en favorisant le système de solvabilisation de ces offres créer
une viabilité économique et commerciale pour ce nouveau marché.
En synthèse, les assureurs ont un rôle d’agent économique majeur et multiple à jouer pour
favoriser la croissance de marché de l’assurance dépendance, notamment dans le cadre de
l’entreprise :
-Un rôle de lobbyiste : en charge d’influencer directement ou indirectement les décisions des
entreprises, des partenaires sociaux mais également des pouvoirs publics
-Un rôle de financeur : en charge du financement ou du co-financement des services
-Un rôle de distributeur : en charge de la vente ou de la mise à disposition des services sur
l’ensemble de la chaîne de besoins de l’assuré
-Un rôle d’organisateur : en charge de l’organisation des prestations et de la structuration de
la filière de la perte d’autonomie
-Un rôle d’opérateurs : en charge de la réalisation des services pour les assurés et leurs
bénéficiaires
129
130
CONCLUSION
Face aux évolutions démographiques, culturelles et
socioéconomiques, il existe de forts enjeux sociétaux,
structurels et financiers pour améliorer la prise en
charge des individus en perte d’autonomie.
Le recours à la solidarité nationale ne pourra pas suffire,
effectivement, les efforts nécessaires pour solvabiliser
les ménages sont trop importants et les leviers
budgétaires insuffisants. Dans ce contexte, les
assurances privées semblent donc indispensables.
Dans la recherche d’un équilibre entre solidarité
nationale et responsabilité individuelle, la couverture d’entreprise apparaît une des solutions les plus
pertinentes ; elle permet d’abaisser l’âge de la souscription, d’optimiser la mutualisation du risque et
d’éviter au salarié les problématiques d’anti-sélection, à des conditions tarifaires, sans commune
mesure avec une souscription de garanties à titre individuel.
Cotiser plus tôt, dans des logiques d’accès avantageuses (cotisation basse par la dilution du risque,
participation de l’employeur, défiscalisation des contrats obligatoires …) assurera aux salariés un socle
conséquent, qu’ils pourront alors plus facilement pérenniser ou compléter au moment de leur sortie de
l’entreprise, dans la mesure ou les garanties sont maintenues…
Ainsi, en cumulant l’APA, la retraite du dépendant et la rente de l’assureur, plus conséquente de part
une cotisation lors de l’activité professionnelle et lors de la période d’inactivité , le reste à charge sera
moindre.
Si l’assurance dépendance collective continue à se développer et si les tendances observées se
confirment - changement de mentalité perceptible et intérêt croissant des directions d’entreprises l’assurance dépendance a vocation à devenir un produit de masse.
En effet si nous nous replaçons dans notre problématique initiale, il s’avère que la faible taille du marché
ne semble pas s’expliquer par l’absence de demande ou par une demande réservée à des strates très
particulières de la population.
La difficulté à mettre en place une assurance dépendance en entreprise tient plus de la complexité de
l'architecture du système français de protection sociale, du cadre réglementaire non stabilisé et du
manque d’information des décideurs.
131
Les acteurs du marché importants (Axa, CNP, AG2R-La Mondiale, Malakoff-Médéric, Humanis) peuvent
jouer un rôle important pour « démocratiser » ce marché ; ils ont pour cela une nécessité de pédagogie
auprès des entreprises, des salariés et des citoyens et de structuration de la filière de la prise en charge
de la perte d’autonomie.
Leurs liens existants avec le marché des grandes entreprises et les partenaires sociaux sont une aubaine.
L’inclusion de garanties dépendance dans les contrats collectifs obligatoires d’entreprise ou de branche
serait en effet un facteur de légitimation pour le marché dans son ensemble.
132
Pour permettre une avancée sociale, il est nécessaire que les acteurs du collectif développent des offres
pertinentes et amplifient leurs efforts de pédagogie auprès des DRH et des partenaires sociaux. A cet
effet, différents leviers d’actions existent et sont essentiels pour développer le segment du collectif :
92
•
Favoriser les principes de portabilité des droits : il s’agit d’un point essentiel, car les offres à «
prestations définies » apparaissent en décalage avec les attentes des salariés et des partenaires
sociaux, dans la mesure où le salarié perd ses droits s’il quitte l’entreprise avant sa retraite.
•
Traiter la continuité : mettre en œuvre les dispositifs suffisants (information, marketing,
communication et GRC92), au sein de l’entreprise et de l’activité assurantielle, pour garantir une
continuité de couverture du salarié, lors de changement ou de rupture ponctuelle d’activité et
lors de leur sortie de vie active, est indispensable pour que le modèle de l’assurance collectif soit
pérenne.
•
Renforcer les actions de pédagogie auprès des directions et des partenaires sociaux : la bonne
compréhension et l’appropriation, des problématiques liées aux enjeux sociétaux de la perte
d’autonomie, ainsi que des éléments techniques de l’offre assurantielle, par les directions
d’entreprise et les partenaires sociaux, seront indispensables pour aboutir, au-delà d’une
nécessaire sensibilisation, à la souscription de couverture et au maintien de cette dernière lors
de sortie de l’entreprise.
•
Améliorer l’information des salariés : les salariés doivent être convenablement informés des
droits et services dont ils disposent, et sensibilisés aux risques que représente la perte
d’autonomie (impact santé, financier…) afin de pouvoir s’en préserver.
•
Apporter des solutions aux problématiques des aidants : les aidants sont un point d’entrée clés
pour apporter une légitimité au contrat collectif ; répondant à des besoins de solutions, de
l’entreprise et des salariés, pendant la période d’activité. A cet effet, accompagner les aidants
dans leur nouvelle « fonction » (accompagnement psychologique et santé), face à la multitude
de dispositifs existants (services sociaux, administratifs, médicaux, etc.) et à leur nécessaire
organisation, apparaît comme un besoin essentiel. Des problématiques de maintien de revenus
financiers peuvent se présenter pendant ce temps de double activité, des offres, en cohérence
GRC : La gestion de la relation client
133
avec les couvertures prévoyance, sont certainement à développer afin d’apporter une
couverture complète à cette cible d’aidant salarié…
•
Inciter au développement de la prévention : la prévention est un moyen d’apporter, dès la
souscription, une utilité aux contrats. Elle est favorable aux salariés (optimisation du capital
santé), aux entreprises (meilleure productivité) et aux assureurs (diminution potentielle de la
sinistralité). Elle permet, notamment, via des services faisant le lien entre l’entretien du capital
santé et le bien vieillir, de répondre aux souhaits exprimés des assurés, d’être accompagnés dans
un vieillissement positif et en bonne santé.
•
« Démystifier » la dépendance : Les assureurs ont démontré à multiples reprises, sur des actions
de communication autour de problématiques sensibles, qu’ils étaient capables de vulgarisation
et de communication positive… Des investissements importants sont à mettre en œuvre, tant
concernant la communication institutionnelle que commerciale, au sujet de la dépendance.
La dépendance collective est un sujet technique. Il nécessite des compétences commerciales, des
investissements, une expertise dans la gestion des risques de long terme, une taille critique…Apporter
globalement un instrument de retour à l´observation sur le long terme - et ce, pour l´ensemble des
grands acteurs du secteur privé - est un enjeu de taille pour « modérer » les impacts sociétaux
pressentis, aiguiller leurs décisions et leur fonctionnement.
La dépendance est de plus en plus intégrée dans les cahiers des charges des appels d’offre en
entreprise. Certaines organisations syndicales se sont emparées de ce sujet de société et poussent à la
mise en place d’accords et à la généralisation des protections complémentaires (santé et prévoyance).
Le succès du développement d’un marché de masse ne se fera pas sans efforts, concertation,
structuration, innovation et communication… les maîtres mots pour garantir l’« évangélisation » de
l’offre dépendance et la « solvabilisation » des assurés face à ce risque « anxiogène ».
134
Table des matières
REMERCIEMENTS ............................................................................................................................................. 1
SOMMAIRE ...................................................................................................................................................... 3
RÉSUMÉ .......................................................................................................................................................... 4
ABSTRACT ....................................................................................................................................................... 5
INTRODUCTION ............................................................................................................................................... 6
CHAPITRE 1 : LE MARCHE DE LA DEPENDANCE, DES PROJECTIONS DE FORTES CROISSANCES : QUELS NOUVEAUX
ENJEUX SOCIODEMOGRAPHIQUES ET QUELLE DYNAMIQUE DE PROTECTION ENVISAGEE ? ................................ 10
1.
Des moteurs sociodémographiques, économiques et culturels importants ................................................. 10
1.1.
2.
Vieillissement de la population et augmentation de la population dépendante .................................. 10
1.1.1.
Evolutions démographiques : Allongement de la durée de la vie et vieillissement de la population10
1.1.2.
L’évolution du nombre de personnes dépendantes quelle tendance ........................................... 15
1.1.3.
L’impact du vieillissement sur le nombre de personnes dépendantes est incertain ..................... 15
1.1.4.
Chronicité et multi pathologies complexifient l’accompagnement des personnes fragiles .......... 18
Le baby-boom, des besoins croissants en perspective .................................................................................. 23
2.1.
Le vieillissement, une notion bien relative et évolutive… ...................................................................... 23
2.2. Initiateurs de profondes révolutions sociétales et comportementales, les baby-boomers vont-ils
réinventer le vieillissement ? ............................................................................................................................. 26
3.
2.3.
Une génération avec des attentes fortes en matière de services .......................................................... 28
2.4.
Un niveau de pouvoir d’achat significatif ............................................................................................... 33
2.5.
Vers une nouvelle société plus réceptive aux attentes des seniors ? .................................................... 36
L’aide informelle, une réalité à intégrer ........................................................................................................ 38
3.1.
Aide informelle: qualification et quantification de cette aide ............................................................... 38
3.2.
Aidants familiaux : une cible mieux définie mais potentiellement évolutive ........................................ 42
3.3.
Aide financière : Un énorme reste à charge pour les familles ............................................................... 43
3.4.
Aidants salariés, une prise de conscience pour les entreprises ............................................................. 46
CHAPITRE 2 : UN SECTEUR PUBLIC QUI N’A PAS ENCORE CADRE L’ENSEMBLE DE SES INTERVENTIONS ET DES
ASSUREURS DANS « L’INCERTITUDE », DONT L’APPETENCE A CE NOUVEAU MARCHE S’AFFIRME. QUELLES
TENDANCES OBSERVEES? ............................................................................................................................... 51
1.
Un environnement réglementaire qui laisse une place à l’assurance ........................................................... 51
135
2.
1.1.
Un environnement législatif et politique en pleine évolution .............................................................. 51
1.2.
Les trois grands piliers du financement public à bout de souffle........................................................... 57
1.2.1.
Le coût social actuel du vieillissement et son financement ........................................................... 57
1.2.2.
L’évolution du coût de la dépendance : les dépenses de liées à l’APA ont triplé en 10 ans .......... 59
1.3.
Un système de financement insuffisant et pas de solvabilisation de la demande ................................ 60
1.4.
Politique de prévention et adéquation de l’offre, tout le partenariat reste à construire ..................... 62
Quelle présence actuelle pour les assureurs.................................................................................................. 65
2.1.
Une légère reprise des souscriptions ..................................................................................................... 66
2.2.
Un marché concentré et multiforme ..................................................................................................... 68
2.2.1.
Répartition du marché (population assurée) en fonction du type de garanties ............................ 71
2.2.2.
Des freins importants au regard d’une forte appréhension par le particulier ............................... 72
3.
Acteurs clés et stratégie déployée ................................................................................................................. 75
4.
Positionnement et modélisation des offres dépendance .............................................................................. 82
4.1.
Deux types d’offres : l’offre épargne vs l’offre prévoyance ................................................................... 82
4.2.
Des offres reposant sur un système d’évaluation complexe ................................................................. 84
4.3.
De la prise en charge de la dépendance lourde, à la prise en charge de la dépendance pré-partielle . 87
CHAPITRE 3 : LA DEPENDANCE COLLECTIVE UN MARCHE STRATEGIQUE DANS LA LOGIQUE DE PROTECTION
SOCIALE DES POPULATIONS SALARIEES DANS L’ENTREPRISE ET EN SORTIE D’ACTIVITE. QUELLES STRATEGIES
POSSIBLES POUR UNE MONTEE EN PUISSANCE DES ASSUREURS ? .................................................................... 92
1.
2.
Légitimité des assureurs collectifs.................................................................................................................. 92
1.1.
L’optimisation de la mutualisation ......................................................................................................... 92
1.2.
Une expérience dans la gestion des risques........................................................................................... 93
1.3.
Un fort pouvoir de diffusion (accord de branche, grand groupe, couverture ascendant et conjoint…) 95
1.4.
Un dialogue établi avec les salariés, les entreprises et les partenaires sociaux .................................... 97
1.5.
Un savoir-faire fort en tant qu’intégrateur de services ......................................................................... 99
1.6.
Bien-fondé de l’assurance collective: ................................................................................................... 100
Renforcer le rôle à jouer des assureurs face à la demande d’efficience latente ......................................... 103
2.1.
Une évolution contrainte vers a minima davantage de coordination ................................................. 103
2.1.1.
La place des assisteurs : logique d’assuristance ........................................................................... 104
2.1.2.
Renforcer les relations avec les ARS, un acteur local incontournable ........................................ 107
136
2.2.
3.
Vers des groupes exhaustifs maîtrisant ou intégrant tous les chaînons de l’offre .............................. 109
2.2.1.
Structurer et rendre « solvable » l’offre de services à la personne (SAP).................................... 109
2.2.2.
Inciter au développement de l’offre qualitative et quantitative d’hébergement ....................... 111
2.2.3.
Renforcer les synergies inter-offres santé/dépendance .............................................................. 112
Réinventer l’approche « dépendance collective » en intégrant de nouveaux leviers de développement : 114
3.1.
Cibles : Rechercher l’adhésion de toutes les parties prenantes .......................................................... 114
3.2.
Offre : Faire évoluer l’offre en cohérence avec les attentes du marché.............................................. 116
3.2.1.
Des contrats tournés vers les aidants .......................................................................................... 117
3.2.2.
Renforcer les actions de prévention pour prévenir l’apparition de la dépendance .................... 120
3.2.3.
Adopter le principe d’un socle commun entre assureurs (garanties minimales, outil d’évaluation,
portabilité des droits …) ............................................................................................................................... 121
3.3.
Consolider les enjeux techniques (évolution des tables, provisionnement…) ..................................... 123
3.4.
Renforcer la communication ................................................................................................................ 124
3.5.
Favoriser l’essor de solutions innovantes, « L’ I-pad plutôt que l’Eh-pad »......................................... 127
CONCLUSION ............................................................................................................................................... 131
Table des matières ....................................................................................................................................... 135
ANNEXE 1 : LEXIQUE .................................................................................................................................... 138
ANNEXE 2 : TABLEAU COMPARATIF DES OFFRES ............................................................................................ 142
ANNEXE 3 : APPEL NATIONAL – PLUS D’EQUITE POUR LES AIDANTS ................................................................ 147
137
ANNEXE 1 : LEXIQUE
Accord collectif
Acte juridique issu de la négociation entre partenaires sociaux. L’accord collectif traite d’un ou de
certains sujets parmi l’ensemble de ceux abordés dans la convention collective (voir ci-dessous). Il a
donc un objet plus restreint que cette dernière, qui traite de l’ensemble des conditions d’emploi, de
travail et de garanties sociales.
Cette distinction s’applique quel que soit le niveau de négociation : il existe donc des conventions et des
accords d’entreprise, comme des conventions ou des accords nationaux.
Anti-sélection:
Asymétrie d’information qui empêche les assureurs de distinguer les personnes à haut risque de
dépendance, l’assuré peut cacher une maladie connue de lui seul ou ignorer qu’il a un risque important
d’être dépendant.
Ayant droit
Personne qui bénéficie de prestations, non à titre personnel, mais du fait de ses liens avec l’assuré.
Complémentaire santé
Ensemble de garanties (voir ci-dessous), définies contractuellement, apportant un remboursement
complémentaire à celui de l’assurance maladie obligatoire, de tout ou partie des dépenses médicales
laissées à la charge des patients : ticket modérateur, dépassement d’honoraires, forfait hospitalier… Elle
peut aussi rembourser des soins et biens médicaux non pris en charge par la Sécurité sociale.
Contrat individuel
Signé sans intermédiaire entre l’assureur et le souscripteur, qui est le plus souvent l’assuré. Chaque
contrat conclu possède sa propre identité juridique, l’assuré peut donc négocier certaines clauses.
Contrat collectif
Contrat de prévoyance ou de complémentaire santé passé entre un organisme assureur et une
entreprise au bénéfice des salariés. Il peut être facultatif (les salariés sont libres de s’y affilier ou non) ou
obligatoire (tous les salariés concernés y sont obligatoirement affiliés). Seul ce dernier bénéficie
d’exonérations sociales et de déductions fiscales (article 83 du Code général des impôts (cotisations
déductibles de l’IS) et L.242-1 du Code de la Sécurité sociale (exonération de l’assurance des cotisations
de sécurité sociales)).
Contrat collectif obligatoire
Un contrat collectif obligatoire répond aux critères suivants :
il est applicable à une catégorie objective de salariés, définie de manière générale et impersonnelle,
il assure les risques couverts par les régimes de base de Sécurité sociale,
ses cotisations sont fixées à un taux uniforme,
ses cotisations comportent une part patronale.
138
Cotisation
Somme dont le paiement ouvre droit, de façon immédiate ou différée, au bénéfice des garanties
couvertes par un organisme assureur, ainsi qu’éventuellement à des services associés. La cotisation en
matière de prévoyance ou de complémentaire est soit forfaitaire, soit calculée en fonction du salaire de
l’assuré.
Convention collective
Accord conclu par les partenaires sociaux en vue de déterminer l’ensemble des conditions d’emploi et
de travail des salariés et de leurs garanties sociales.
Des avenants à la convention collective peuvent venir compléter, remplacer, dénoncer ou préciser ses
dispositions.
La conclusion s’effectue entre un ou plusieurs d’employeurs et les organisations syndicales de salariés
représentatives. La convention collective ne lie que les employeurs adhérant aux organisations
patronales signataires.
La convention peut faire l’objet d’un arrêté d’extension et/ou d’élargissement.
Couverture
Garantie de protection donnée par un organisme assureur en cas de survenance d’un risque prévu dans
le contrat.
Délais de carence
Période d’attente pendant laquelle l’assuré n’est pas couvert. Si l’état de dépendance survient pendant
ce délai de carence, il doit se référer aux clauses de remboursement des cotisations.
Dépendance partielle
De manière générale: dépendance partielle = GIR 3/4 et l’incapacité de réaliser au moins 2 des 4 AVQ.
Définition peu homogène, difficulté de définir les limites de la dépendance partielle, notamment du fait
de l’incertitude sur l’irréversibilité.
Dépendance totale
Définition à peu près homogène : Gir 1 et 2, et/ou impossibilité de réaliser 3 AVQ sur 4, avec
irréversibilité de l’état de santé.
Franchise
Période d’attente entre la reconnaissance du risque (acceptation de la déclaration du risque
dépendance par l’assureur) et le versement des rentes et prestations.
Garantie
Engagement pris par l’assureur de fournir une prestation prévue à l’avance en cas de survenance d’un
risque prévu dans le contrat.
En savoir plus : fiche Focus RH « Les garanties de la prévoyance collective »
Grille AGGIR (Autonomie, Gérontologie, Groupe Iso-Ressources)
Classe les personnes âgées en six niveau de perte d’autonomie à partir du constat des activités ou gestes
139
de la vie quotidienne réellement effectués ou non par la personne: GIR 1 = très dépendant à GIR 6 = pas
dépendant.
Incapacité de travail
Etat ne permettant pas provisoirement l’exercice d’une activité professionnelle. Les organismes
assureurs interviennent en complément des indemnités journalières versées par la Sécurité sociale.
Invalidité
Etat d’une personne qui est atteinte d’une affection qui réduit au moins les deux tiers de sa capacité de
travail. Les organismes assureurs interviennent en complément du revenu minimum versé par la
Sécurité sociale au salarié déclaré invalide (pension d’invalidité), en versant une rente d’invalidité.
Mesure de la dépendance
Combinaisons de plusieurs critères (AGGIR, AVQ, AIVQ, et autres grilles pour maladies neurodégénératives) pour limiter le risque d’erreur de mesure.
Mutualisation
A la base de la technique de l’assurance, dont le principe est de mettre en commun des risques, de les
répartir et de les maîtriser par des lois mathématiques permettant de connaître approximativement le
montant des sinistres futurs. Dans le cadre des contrats collectifs (voir ci-dessus), les risques sont
mutualisés entre salariés au sein d’une même entreprise ou profession.
Organisme assureur
Seuls peuvent juridiquement obtenir la qualification d’organismes assureurs et être habilités à mettre
en œuvre des opérations de prévoyance complémentaire, les organismes qui répondent aux directives
communautaires relatives à l’assurance. En France, ce sont 3 types d’organismes d’assurance :
les institutions de prévoyance, organismes assureurs à but non lucratif et à gestion paritaire, régies
par le titre III du livre IX du Code de la Sécurité sociale, ou par l’article 1050, II du Code rural,
les mutuelles, à but non lucratif, dont le conseil d’administration est désigné par les sociétaires, régies
par le Code de la mutualité,
les sociétés d’assurance ou sociétés d’assurance mutuelle régies par le Code des assurances.
Prestations (en espèces / en nature)
Les prestations en espèces sont des allocations versées par la Sécurité sociale ou un organisme assureur
sous la forme d’une indemnité journalière, d’une pension ou d’une rente, en garantie (voir ci-dessus)
d’un risque se concrétisant par une baisse de revenu. Les prestations en nature correspondent aux
remboursements, effectués par la Sécurité sociale ou un organisme assureur, de frais engagés par
l’assuré en cas de maladie, d’accident, d’hospitalisation…
Prévoyance / prévoyance collective
Ensemble des garanties liées aux risques de dommages corporels résultant de la maladie ou de
l’accident (maladie, incapacité de travail, invalidité, dépendance) et des engagements liés à la durée de
vie (décès, retraite). Ces garanties donnent lieu à des prestations venant en complément de celles
140
versées par la Sécurité sociale. Quand elles sont mises en place dans le cadre de l’entreprise ou de la
branche professionnelle, on parle de prévoyance collective.
Protection sociale complémentaire
Regroupe les éléments de protection sociale, obligatoires ou non, qui interviennent en complément des
régimes de base de la Sécurité sociale. La protection sociale complémentaire recouvre le domaine de la
retraite complémentaire et de la prévoyance (voir ci-dessus).
Régime de prévoyance
Correspond à un ensemble de garanties (voir ci-dessus) dont la mise en place résulte des dispositions
d’une convention collective ou d’un accord collectif (voir ci-dessus).
Retraite supplémentaire (épargne retraite)
Ensemble des contrats d’investissements financiers permettant la constitution d’une épargne lors de la
vie active, en vue de disposer d’une rente après le départ à la retraite. L’épargne retraite est une forme
d’épargne par capitalisation, constituée à partir des versements périodiques de l’épargnant. Les sommes
sont bloquées jusqu’au départ à la retraite. Elles sont alors versées sous forme de capital ou
transformées en rente viagère.
Sélection médicale
Une première sélection peut s’opérer par la signature d’une déclaration de bonne santé ou le
renseignement d’un questionnaire simplifié. La personne qui ne peut pas signer cette attestation de
santé ou questionnaire de santé simplifié doit remplir un questionnaire médical complet, et parfois,
passer des examens médicaux.
SAAD
Services d'Aide et d'Accompagnement à Domicile.
SIAD
Services de soins Infirmiers A Domicile.
141
ANNEXE 2 : TABLEAU COMPARATIF DES OFFRES
142
143
144
145
146
ANNEXE 3 : APPEL NATIONAL – PLUS D’EQUITE POUR LES AIDANTS
147
Thèse professionnelle
soutenue en mars 2013
pour l’obtention du MBA Manager
d’entreprise majeure Assurance
Sous la direction de :
Lucie TALEYSON
Président du Jury :
François EWALD
Une école est un lieu de production et de diffusion de connaissances.
L’Ecole nationale d’assurances s’organise pour répondre le mieux possible à cette mission en
direction de ses élèves d’abord, mais aussi de la profession de l’assurance et de ses partenaires :
• les « séminaires innovation » animés par les auditeurs du Centre des Hautes Etudes
d’Assurance (CHEA), permettent aux professionnels de suivre les grandes innovations en assurance telles
qu’on peut les observer à l’étranger ;
• les « dialogues de l’Enass » éclairent l’actualité par le débat avec une personnalité remarquable ;
• « les travaux de l’Enass » sont destinés à faire bénéficier la profession des travaux menés au sein
de l’Enass par ses professeurs et ses élèves, à tous les niveaux, dans la mesure où les jurys qui les ont
évalués ont noté leur qualité et leur originalité. Ces travaux vous seront adressés par Internet, certains
d’entre eux pouvant faire l’objet d’un tirage sur papier ou même, être édités.
Nous souhaitons que toutes ces initiatives vous soient profitables.
François Ewald
Président du Conseil scientifique et pédagogique
de l’Université de l’Assurance