Politique de rémunération en Mauritanie
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Politique de rémunération en Mauritanie
Politique de rémunération en Mauritanie rédigée par Cécile de Calan en juillet 2011 Présentation de l'organisation Créé il y a 35 ans, le Gret est une association professionnelle de solidarité et de coopération internationale, présente en Afrique, Asie, Amérique latine et Europe, pour contribuer à un développement durable et solidaire et lutter contre la pauvreté et les inégalités structurelles. Ses actions visent à accroître les revenus des populations rurales et urbaines, réduire leur vulnérabilité, améliorer leur accès à des infrastructures et des services de qualité, développer leur capacité à faire entendre leur voix. Il combine des actions de terrain avec des activités d’expertise, de contribution aux politiques publiques et de capitalisation/diffusion de références. Contexte Le Gret est présent en Mauritanie depuis 20 ans et y mène actuellement 7 projets (eau, électrification rurale, déchets, appui aux communes, insertion sociale des jeunes et nutrition des enfants) dans 3 implantations différentes. L'équipe est forte de 50 salariés mauritaniens et de quelques expatriés. Le Gret Mauritanie s'est doté d'un service ressources humaines pour la première fois en 2004. Yaghoub Kone, actuel responsable des ressources humaines, a rejoint l'équipe en 2005. Le cadre légal et fiscal en Mauritanie est perçu comme complexe à connaître et interpréter. Analyse du problème L'absence d'une grille de salaire rigoureuse et de professionnel RH dédié avait conduit à des décisions au cas par cas, souvent sans trace écrite des motifs de décision, en matière de rémunération. De plus le package de rémunération se composait de diverses primes, elles aussi distribuées de façon aléatoire, et dont le régime fiscal et social était incertain. Si les salariés ne se préoccupent pas forcément de comprendre le détail de leur feuille de paye, ils sont en revanche sensibles aux disparités constatées, allant du simple au double par exemple sur le poste d'animateur, et interpellent le service RH sur les raisons de certains positionnements. L'arrivée d'un nouveau représentant, Bernard Gay, en 2010, parallèlement au démarrage d’un chantier RH international par le Gret visant l’harmonisation des pratiques, ouvre l’opportunité de remettre à plat la politique de rémunération pour : − en assurer la conformité avec le cadre légal − disposer d'une grille de salaire bien structurée et comprise par le personnel, et qui donne des perspectives de progression − mettre en place une protection sociale tout en gardant la maîtrise des coûts salariaux dans un contexte de financement difficile. Solution mise en place Avec l'appui de la directrice des ressources humaines au siège,Yahgoub et Bernard sont partis d'un recensement de l'existant. Dans le cadre d’une classification métiers, définie de façon homogène pour l’ensemble des pays par le Gret, et structurée sur 5 grandes catégories de postes, ils ont ensuite définis des critères qui ont permis de classer les emplois selon le niveau de responsabilité et de compétence. Juillet 2011 Le salaire est composé de 5 rubriques: la fonction et la technicité requise, la formation, l'expérience antérieure, avec un pourcentage variant selon qu'elle est similaire ou non avec la fonction prise au Gret, l'ancienneté au Gret (codifiée par la loi) : l'ancienneté moyenne des salariés du Gret en Mauritanie est autour de 5 ans, les compétences spécifiques transverses comme la pratique des langues locales ou le français. Le principe a été posé dès le départ que les revenus des salariés présents ne pouvaient baisser. Chaque catégorie a un plancher défini. Celui de la catégorie des emplois de base se situe par exemple à 50 % au-dessus du salaire minimum mauritanien. Une augmentation collective annuelle vise à compenser (au moins partiellement) l'inflation, élevée dans le pays. L'attribution des per diem, qui était devenue systématique, a été revue et limitée aux cas de déplacements. La politique globale du Gret en matière de rémunération a fourni certains repères incontournables : l'engagement global de respecter un rapport de 1 à 25 entre le plus bas et le plus haut salaire, un poids majeur à la fonction dans la définition du salaire de base et la prise en compte des évaluations annuelles de compétences dans les décisions d'évolution. La mise en place de la grille s'est faite sur 6 mois. En cours d'élaboration, plusieurs réunions avec les chefs de projets, puis les salariés et leurs représentants, ont permis de présenter le projet et de vérifier son acceptabilité. Au fil des consultations, la demande du personnel d'un système de protection sociale a émergé auquel le Gret était tout à fait favorable. Son coût (14 % de la masse salariale) a été partagé entre les salariés, qui ont accepté de renoncer à un 14ème mois de salaire, et l'employeur. Face à une certaine méfiance des employés vis-à-vis des prestataires locaux d'assurance, le Gret a pris le temps de rechercher une compagnie réputée et de négocier de bonnes conditions avec elle. Plusieurs réunions de sensibilisation du personnel à la couverture proposée ont été organisées pour veiller à une responsabilisation collective sur son usage. La mise en place de ce système a été ratifiée par un vote du personnel remportant 90 % d'approbation. La direction s'apprête aujourd'hui à étudier les demandes d'évolution issues des entretiens annuels qui viennent de se tenir. Juillet 2011 Enseignements Le système apparaît satisfaisant pour l'ensemble du personnel, qui apprécie particulièrement l'assurance santé. Il donne une meilleure visibilité sur les pratiques de rémunération et fait que chacun comprend son salaire. Il fournit « un canevas qui nous permet de bien structurer tout ce qu'on fait sur le salaire, du recrutement aux évolutions, de faire des simulations, et de répondre aux questions du personnel » témoigne Yaghoub. L'outil lui permet de travailler sereinement et dans la clarté, et renforce la confiance du reste de l'équipe envers le service RH. La mise en place de la nouvelle grille n'a pas forcément donné lieu à d'importantes augmentations qu'avaient pu attendre certains, mais des rattrapages ont été effectués pour les salariés situés sous le plancher de leur catégorie. Quelques dimensions restent délicates à manier : la tension entre des fourchettes de salaires resserrées et la volonté d'attirer des profils rares et de valoriser leur expérience antérieure au Gret, le besoin de conserver une certaine souplesse pour rétribuer des dimensions comme la connaissance des zones d'intervention et pour pouvoir assurer la diversité de l'équipe, une composante cruciale dans la société mauritanienne. Bernard recommande aux organisations qui envisageraient de réformer leur politique de rémunération de prendre le temps d'une étude préalable approfondie du contexte légal et des pratiques des autres ONG, ce qui n'a pas été possible faute de temps à l'origine de son projet mais est envisagé à une étape ultérieure. Il conseille aussi d'investir dans la communication sur le nouveau système et de veiller au lien avec les entretiens d'évaluation et l'évolution professionnelle. Yaghoub pour sa part invite ses pairs à s'engager dans cette démarche avec le souci de créer des systèmes clairs et compréhensibles, y compris pour que les responsables futurs comprennent les décisions passées avec le souci de la traçabilité et de la cohérence des décisions dans la durée. Juillet 2011