La représentation des minorités : les médias canadiens

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La représentation des minorités : les médias canadiens
ÉBAUCHE
La représentation des minorités :
les médias canadiens et l’identité des groupes minoritaires
Minelle Mahtani
Killam Postdoctoral Fellow
Département de géographie / École de journalisme Sing-Tao
Université de Colombie-Britannique
1984 West Mall
Vancouver, C.-B.
V6T 1Z2
[email protected]
Travail commandé par le ministère du Patrimoine canadien pour le séminaire d'identité
et de diversité ethnoculturelles, raciales, religieuses et linguistiques
Halifax (Nouvelle-Écosse)
1-2 novembre 2001
Ébauche : Ne pas citer sans la permission de l’auteur.
Vous pouvez consulter ce document en ligne en anglais et en français à l'adresse
www.metropolis.net
Les points de vue exprimés dans ce document ne sont pas nécessairement ceux
du ministère du Patrimoine canadien.
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1. Introduction
La représentation des minorités par les médias canadiens joue un rôle considérable
dans la construction de l’identité des minorités de ce pays. Ce document propose un
examen critique des analyses portant sur la relation complexe entre les médias canadiens
et les minorités1*. En effet, il importe, dans le cadre de cette série spéciale consacrée à
l’identité, de s’interroger sur la façon dont la représentation des minorités par les médias
influe sur la construction des identités au Canada. Les chercheurs ont insisté sur la
nécessité d’examiner les relations entre médias et minorités, étant donné le rôle
incontournable des médias au niveau de l’identité sociale (Henry, 1999) : les médias sont
une source d’informations privilégiée sur notre nation, qui façonnent nos attitudes et
croyances. Autrement dit, les médias sont directement responsables de la manière dont
le Canada, dans toute sa diversité, est interprété par ses citoyens. C’est par leur prisme
que les Canadiens découvrent leur pays, au-delà de leur horizon quotidien. Compte tenu
de l’immensité du territoire, les Canadiens, souvent dépourvus d’une expérience directe
des villes canadiennes, s’en remettent aux médias pour appréhender leur pays. Par
exemple, un adolescent qui vit à Fredericton ou à Whitehorse ne peut se faire une idée de
la vie à Vancouver et à Toronto que par les images véhiculées par les médias. Le pouvoir
des médias ne doit pas être sous-estimé. En somme, les médias sont responsables de la
manière dont la société canadienne est perçue, interprétée et évaluée par ses membres.
Les médias, en canalisant et en sélectionnant l’information diffusée, influent sur les
mentalités, dans la mesure où cette information sert de fondement aux divers choix du
quotidien. Or ce processus de sélection est régi par une série d’impératifs. Les images des
minorités canadiennes transmises par les médias ne sont pas qu’un éventail aléatoire de
représentations, car les décisions d’où procèdent les représentations médiatiques de la
diversité culturelle s’inscrivent dans un cadre de discours conflictuels au sein de ces
institutions. En dépit de ce que nous aimerions croire, les médias canadiens ne sont pas
justes, démocratiques ou objectifs par nature (Hacknett, Gruneau, Gustein et
Gibson, 2000). L’attachement « traditionnel » des journalistes à la mesure, à l’objectivité
et à l’impartialité ne signifie pas nécessairement que chacun bénéficie d’une égalité de
traitement en matière de représentation médiatique. Les groupes minoritaires sont
régulièrement exclus ou marginalisés, et la culture dominante est renforcée comme étant
la norme. Comme Jiwani l’a remarqué, « les médias comptent parmi les organisations les
plus riches de la société. Ils constituent un monopole de la connaissance et, par leurs
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Une clarification des termes utilisés apparaît utile. Il est important de noter que j’emploie le terme de « minorités »
pour désigner une large gamme de groupes raciaux, culturels, ethniques et linguistiques, dont les « minorités
visibles », les « groupes culturels », les « minorités raciales », les « non-Blancs », les « minorités religieuses » et les
« gens de couleur », afin de refléter les travaux d’autres chercheurs dans ce domaine (Fleras et Kunz, 2001;
Henry, 1999). Toutefois, l’emploi de cette terminologie est litigieux. Le terme peut être essentialiste et, souvent, ne
rend pas compte de la grande diversité des ethnies et des cultures, ni des différences religieuses et linguistiques qui
se cachent derrière cette définition. Je renvoie le lecteur à l’examen approfondi effectué par Karim des oppositions
entre les discours sur la terminologie ethnoculturelle, lesquelles reflètent les conceptions différentes des relations
entre la majorité et les minorités dans la société canadienne (voir Karim, 1993).
* Toutes les citations sont des traductions, à part celles qui sont tirées de L’égalité ça presse !, version française
officielle de Equality Now! (voir p. 19).
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pratiques de sélection, d’édition et de production, conditionnent les informations que nous
recevons à propos de notre pays » (Jiwani, 1995). Ils ont le pouvoir de choisir les images
des minorités qui seront dominantes dans l’espace public. Comme certains chercheurs l’ont
démontré (Fleras et Kunz, 2001; Henry, 1999), les médias braquent leurs projecteurs sur
certaines caractéristiques des minorités, le plus souvent négatives, ce qui a pour
conséquence d’en minimiser d’autres ou de les passer sous silence. Quelle incidence peut
avoir cette tendance sur le processus de formation de l’identité minoritaire?
La représentation négative des minorités inculque chez les membres de ces groupes l’idée
qu’ils sont menaçants, déviants et inutiles au développement du pays. Elle porte atteinte
au psychisme minoritaire en consolidant des complexes d’infériorité. Gist commente : « De
puissants signaux sont adressés aux jeunes [appartenant à des minorités] sur leur avenir
possible […] les modèles d’identification positifs sont rares… dans les messages et les
images véhiculés par les mass media » (Gist, 1990, p. 58). Soumis qu’ils sont à des
descriptions avilissantes et à l’absence de représentations nuancées, les membres des
minorités sont incités à croire qu’ils sont en marge de la société. Il suffit d’examiner le
portrait télévisuel des Canadiens noirs ou originaires de l’Asie du Sud. Rares sont les
comédies de situation ou les dramatiques mettant en scène des membres de ces groupes
ethniques . Lorsque c’est le cas, on les cantonne le plus souvent à des rôles de criminels
ou d’associaux. Ce type de représentation à la radio, à la télévision ou dans la presse
écrite a évidemment un effet démoralisant sur les Canadiens noirs ou originaires de l’Asie
du Sud. Comme Kelly (1998) le suggère dans son analyse des perceptions et du vécu de
Canadiens noirs, élèves du secondaire, les médias sont autant de sources des identités
qu’adoptent et construisent ces élèves chez eux, à l’école et pendant toute leur
adolescence (Kelly, 1998, p. 58).
Les médias canadiens continuent de diffuser des images négatives et stéréotypées qui ne
font que rabaisser les minorités canadiennes. En d’autres termes, la représentation des
minorités ethniques n’est pas fidèle à la réalité, et cette marginalisation perpétue les
sentiments d’exclusion; ces sentiments sont exacerbés du fait que l’on perçoit cette
représentation comme étant un miroir précis et équitable du pays. Comme le soulignent
Wilson et Gutierrez, « en l’absence d’autres représentations et d’une couverture élargie,
les descriptions et les articles de presse biaisés deviennent facilement la réalité dans
l’esprit du public » (Wilson et Gutierrez, 1985, p. 41-42). Les personnalités dépeintes dans
les médias qui ne reflètent pas la réalité, de même que les stéréotypes récurrents nuisent
à l’identité des minorités canadiennes, parce que ces représentations dictent implicitement
qui est Canadien, qui a le droit de nourrir un sentiment d’appartenance, et qui se trouve en
marge de l’identité canadienne (Bullock et Jafri, 2001). Ils influent également sur la
perception qu’ont les Canadiens des groupes minorités auxquels ils n’appartiennent,
puisqu’ils reproduisent des stéréotypes négatifs. Comme Kelly l’explique, « la
représentation et la réalité sont des concepts qui se conditionnent mutuellement »
(Kelly, 1998, p. 52).
Au Canada, les questions touchant les relations entre identités, médias et minorités sont
cruciales, du fait notamment de la politique multiculturelle. On a dit que dans les pays où
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le multiculturalisme est officiellement enchâssé dans la loi, des formes complexes de
racisme peuvent surgir des différentes représentations que font les médias des minorités
(Dunn et Mahtani, 2001). Comme Essed nous le rappelle, « lorsque […] le racisme
imprègne des pratiques quotidiennes qui semblent “normales”, du moins aux yeux du
groupe dominant, il s’ensuit nécessairement que le racisme n’est souvent pas perçu, ni
même reconnu et encore moins considéré comme un problème par le groupe dominant »
(Essed, 1991, p. 10). La politique multiculturelle influe sur les représentations des minorités
par les médias au Canada parce qu’en vertu de la loi, les médias sont tenus de refléter « la
nature multiculturelle et multiraciale du Canada » (Loi sur la radiodiffusion de 1991).
Toutefois, certains avancent que cette loi est régulièrement bafouée par la presse, la radio
et la télévision canadiennes (L’égalité ça presse! 1984; voir également DuCharme, 1986,
p. 11; Dunn et Mahtani, 2001), ce qui peut engendrer des formes encore plus subtiles de
stéréotypes et de préjugés dans les médias, qui s’ajoutent aux formes plus flagrantes de
discrimination. Même s’il existe une relation progressive entre la politique multiculturelle et
l’intégration des minorités dans l’État-nation, cette intégration s’appuie souvent sur des
stéréotypes.
La structure de ce document est la suivante. La première section passe en revue les
études réalisées au Canada sur les relations entre les médias et les minorités. Je me
penche ensuite sur d’autres recherches liées aux travaux sur les médias et les minorités,
y compris celles qui portent sur les médias ethniques, les auditoires, l’origine des capitaux
des médias et le rôle des personnels de l’information dans la représentation des minorités
ethniques. Enfin, j’examine quelques-unes des principales problématiques théoriques et
empiriques sur lesquelles il faut encore se pencher, avant de poser plusieurs questions
issues de discussions avec des professionnels dans ce domaine et susceptibles de faire
l’objet de recherches plus poussées.
2. Représentations des minorités ethniques
Depuis leurs origines, à la fin des années 60, et jusqu’aux années 80, les recherches sur
les relations entre médias et minorités se résument principalement à l’examen des deux
principales formes de traitement insatisfaisant des minorités ethniques par les médias. La
première concerne la sous-représentation (ou l’absence) de ces minorités; la deuxième
porte sur la représentation erronée (ou le portrait négatif) qui en est donnée. Ces deux
formes de partialité aboutissent aux mêmes conséquences : elles limitent la citoyenneté
et justifient l’oppression continue des minorités au Canada en « faisant office de substituts,
[et] en remplaçant la réalité. Elles ne rendent pas compte du réel, mais encouragent les
faux-semblants » (Kelly, 1998, p. 52). J’analyse à tour de rôle la sous-représentation et la
fausse représentation.
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A) Sous-représentation
La sous-représentation de plusieurs groupes culturels dans les médias canadiens pourrait
donner à croire que ces groupes sont négligeables ou inexistants. La plupart des
recherches initiales sur la représentation ethnique s’attachaient, pour étayer cette
hypothèse, à en mettre en lumière cette absence de représentation médiatique. Divers
chercheurs ont constaté que la diversité culturelle caractéristique de la société canadienne,
est très souvent absente des images médiatiques (Fleras et Kunz, 2001; Fleras, 1994).
C’est un constat particulièrement décevant, puisque le Canada a misé sur les principes du
multiculturalisme pour bâtir un cadre de gestion de la diversité ethnique.
Les études initiales ont mis en évidence le fait que la description inadéquate des
immigrants par les médias n’est aucunement un phénomène récent. Anderson a établi qu’à
la fin du 19e siècle, les journaux étaient passionnément anti-Chinois (Anderson, 1987). Les
minorités brillent toujours par leur absence des magazines et des feuilletons au Canada
(MediaWatch, 1994). L’étude réalisée par MacGregor sur les femmes appartenant aux
minorités visibles dans le magazine Maclean’s sur une période de trente ans
(MacGregor, 1989) a mis en lumière l’absence des femmes de couleur dans ce magazine
à tirage national. Comme Fleras (1995) le souligne, l’absence des minorités dans les
médias canadiens est la règle, et non l’exception. Non seulement des groupes spécifiques
sont exclus, mais le mélange culturel est, lui aussi, évité. Au Canada, les relations
interraciales dans les dramatiques sont rares. Lorsqu’elles sont mises en scène, elles sont
souvent dépeintes comme source de multiples problèmes (voir Mahtani, 2000;
Camper, 1994). D’aucuns prétendent que les séries canadiennes n’ont jamais présenté
d’union interraciale harmonieuse2, malgré le fait que les couples de races différentes n’ont
jamais été aussi nombreux au Canada (Mahtani, 2000). Cela prouve que les médias ne
jouent pas leur rôle de miroir — un miroir dans lequel les minorités canadiennes peuvent
se reconnaître, ne serait-ce qu’en leur renvoyant une image vraie de leurs relations
amoureuses.
Une étude MediaWatch portant sur la représentation des minorités ethniques dans les
programmes de divertissement canadiens, a examiné huit séries dramatiques produites
au Canada; elle a révélé que 4 p. 100 seulement des personnages féminins et 12 p. 100
des personnages masculins provenaient d’horizons ethniques ou raciaux divers
(MediaWatch, 1994). Ce résultat révèle que les minorités ethniques (notamment les
femmes) sont indéniablement sous-représentées dans les dramatiques et dans
l’information. Miller et Prince (1994) ont procédé à un examen similaire de l’information, en
analysant les photos et les reportages publiés dans six grands journaux canadiens. Ils ont
conclu que sur les 2 141 photos publiées, les minorités ethniques n’apparaissaient que sur
420 d’entre elles. Sur ce chiffre, 36 p. 100 étaient des photos d’athlètes. Ils ont ensuite
démontré que sur les 895 reportages publiés dans ces journaux, 14 p. 100 seulement
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Pour des exemples, voir l’ancien feuilleton Street Legal sur CBC et la série qui passe actuellement à CTV,
The Associates. Bien que ces deux programmes mettent en scène des couples de races différentes, leurs relations
échouent dans les deux cas, ce qui montre aux téléspectateurs que les unions interraciales sont vouées à l’échec
(Mahtani, 2000).
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s’intéressaient aux minorités, soit beaucoup moins que les 20 p. 100 correspondant au
pourcentage des minorités ethniques dans la population combinée des cinq villes où ces
journaux sont publiés (Vancouver, Calgary, Winnipeg, Toronto et Montréal). Cette lacune
caractérise particulièrement le traitement réservé aux membres des « Premières nations ».
Non seulement les populations autochtones sont en général privées du droit de parole
dans la plupart des médias, mais ce n’est que récemment que les médias leur ont donné
un visage (Francis, 1992; voir également Meadows, 1991; Singer, 1982).
Les chercheurs spécialisés dans les médias ont indiqué que la marginalisation des
minorités dans les médias ne fait que renforcer leur invisibilité dans la société
(Fleras, 1995). Les minorités ethniques au Canada ne se voient pas représentées dans les
médias, ce qui perpétue les sentiments de rejet, minimise leurs contributions et dévalue
leur rôle en tant que citoyens de leur pays (voir Gosine, 2001; Jiwani, 1995). Par exemple,
dans leur document intitulé « Media (Mis)Representations: Muslim Women in the Canadian
Nation », Bullock et Jafri citent des propos de femmes musulmanes réunies dans le cadre
de consultations thématiques pour discuter de leur représentation dans les médias. Bullock
et Jafri ont constaté que nombre de ces femmes étaient parfaitement conscientes que leur
vécu de musulmane était systématiquement ignoré, au profit de faits plus sensationnels
(Bullock et Jafri, 2001). L’absence de représentations complexes des minorités conforte
dans l’idée que la « blancheur » est la norme dans les médias, puisque « la blancheur
s’inscrit confortablement dans nos schémas de pensée habituels… les messages
présentés comme « normaux », neutres, universels deviennent ainsi la réalité »
(Mirza, 1997:3; voir Fleras et Kunz, 2001; et Daley, 1997). Ce silence renforce l’exclusion,
puisqu’il prive les immigrants de la possibilité d’exprimer leurs opinions sur l’avenir du pays
et mine leur sentiment d’appartenance (Fleras et Kunz, 2001). L’invisibilité même des
communautés minoritaires et de leurs problèmes dans les médias canadiens nourrit un
sentiment « d’altérité » chez les Canadiens minoritaires.
B) Fausse représentation
Ces études préliminaires ont eu pour effet bénéfique d’inciter les chercheurs à examiner
comment les médias présentent les minorités ethniques lorsqu’ils s’y intéressent. Ils ont
montré que la représentation des cultures non dominantes a généralement progressé au
cours des dernières décennies (Fleras, 1995). Toutefois, la plupart des études ont conclu
que malgré cette avancée, on a bien pris garde de ne pas remettre en cause l’hégémonie
culturelle eurocentrique (Crawford, 1998; Jiwani, 1995; Fleras, 1994). L’une des méthodes
suivies pour maintenir cette hégémonie consiste à limiter la représentation des minorités
ethniques dans les médias à des stéréotypes négatifs ou folkloriques.
Les minorités ethniques affirment que les images que leur renvoient les médias sont
franchement négatives. Les chercheurs soulignent, dans différentes études, les
descriptions peu flatteuses des minorités ethniques (Miller, 1994; Ungerleider, 1991;
Fleras, 1995; Tator, 1999). Dans des travaux qui datent des années 70, les chercheurs
canadiens mettaient constamment en évidence le fait que les médias « n’évoluent pas...
et persistent dans leurs généralisations raciales et culturelles » (Wong, 1977, p. 269). Les
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médias canadiens restent adeptes de descriptions négatives et stéréotypées des minorités
ethniques (Roth, 1996; MediaWatch, 1994; Fleras, 1994; Zolf, 1989). Voici quelques
grandes études qui ont mis en lumière ces tendances.
Fleras (1994) explique que les images des minorités ethniques transmises par les médias
canadiens restent prisonnières de stéréotypes « ancrés dans des généralisations sans
fondement qui tournent au comique, voire au grotesque » (Fleras, 1994, p. 273), et qui
associent fréquemment les minorités ethniques aux « problèmes sociaux ». Les minorités
sont souvent dépeintes sous les traits de souteneurs, d’étudiants qui abandonnent l’école,
d’adolescents sans foyer ou de revendeurs de drogue dans les dramatiques canadiennes.
Il écrit : « Les médias se servent des minorités comme… faire-valoir des qualités des héros
conventionnels, comme catalyseurs de l’intrigue ou de l’évolution des personnages, ou
pour ajouter une touche de couleur folklorique à un produit culturel qui, sans elles, serait
terne » (Fleras et Kunz, 2001, p. 155). Fleras souligne, et c’est important, que les membres
des minorités ethniques sont rarement présentés comme des gens qui ont quelque chose
d’important à dire — au contraire, leur « expérience de vie [est] réduite à de simples
anecdotes destinées à pimenter l’intrigue » (Fleras, 1995, p. 6). John Haslett Cuff,
ex-critique des médias pour The Globe and Mail, a écrit qu’à la télévision, les Canadiens
noirs sont souvent cantonnés dans des rôles de méchants ou de victimes, ou bien de
bouffons et de personnages folkloriques de feuilleton (Cuff, 1990; voir également
Daley, 1997).
La représentation des Autochtones par les médias perpétue, elle aussi, les stéréotypes.
Fleras étudie quelques portraits des membres des Premières nations, notamment « le bon
sauvage », « l’Indien sauvage », les « barbares sanguinaires » et « l’Autochtone
alcoolique », entre autres stéréotypes dégradants (Fleras, 1994; voir également Fleras et
Kunz, 2001). Dans un numéro spécial du Canadian Journal of Communication, Gail Guthrie
Valaskakis procède à un examen très instructif des discours dont les femmes membres des
Premières nations sont l’objet. Elle explique que les « Indiens ont un nouveau cheval de
bataille au chapitre des identités qu’on leur prête ; cette fois, c’est celle qui est ancrée dans
la représentation dominante construite durant l’occupation mohawk à Oka : le guerrier
médiatisé. La télévision, les journaux et les caricatures politiques ont présenté le guerrier
médiatisé comme un primitif nouvelle formule, une représentation monolithique des
activistes indiens » (Valaskakis, 1993). La représentation des minorités selon le sexe est
un thème assez peu exploré, comme Jiwani (1995) l’a indiqué. Dans des travaux
antérieurs, Jiwani (1992) a montré que les femmes appartenant à des minorités visibles
sont souvent dépeintes dans les films comme étant malhonnêtes et sinistres.
Manifestement, la relation entre la représentation des minorités et d’autres éléments
constitutifs de l’identité, comme la classe sociale et le sexe, mérite un examen plus poussé,
comme je le précise dans la section de ce document qui est consacrée aux
recommandations.
Plusieurs acteurs et présentateurs d’émissions d’informations ont ouvertement exprimé
leurs inquiétudes à propos des représentations erronées des minorités ethniques dans les
médias. Dans un article publié dans The Ottawa Citizen, l’acteur d’origine amérindienne
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Gary Farmer a expliqué comment les images à l’écran renforcent les clichés au sujet des
Autochtones, si bien que la norme dominante des Blancs génère des préjugés invisibles
sur ce qui est considéré comme digne de faire partie de l’histoire canadienne (Southam
News, 1997). De même, Rita Deverell, réalisatrice en chef de Vision TV, a fait connaître
son opinion sur la représentation faussée des minorités ethniques à la télévision. Elle a
souligné que, comparés aux images véhiculées par la télévision américaine, « les portraits
de femmes de couleur très négatifs et malveillants sont rares chez nous. Au Canada, nous
avons tendance à pécher par omission » (dans MediaWatch, 1994), en ce sens que les
femmes de couleur brillent par leur absence. L’actrice canadienne noire Tonya Lee
Williams s’est fait l’écho de ce point de vue lors du récent colloque sur les minorités,
organisé par CHUM-TV à Victoria.
De nombreux chercheurs s’entendent pour dire que dans les médias canadiens dominants,
les minorités ethniques sont des menaces. Il y existe un clivage net entre « nous » et
« eux » : le « nous » est assimilé à la majorité blanche, et le « eux » à la minorité ethnique
(Fleras et Kunz, 2001; Daley, 1997). Les groupes non blancs sont présentés comme
« mystérieux, insondables ou incompatibles » avec la culture dominante (Sun, 1997-1998).
Un acteur canadien noir a remarqué avec une ironie désabusée que « les images
stéréotypées sont toutes des caricatures de personnes à qui il manque intrinsèquement
quelque chose — elles ne sont qu’à demi humaines. Ces images engendrent chez les
minorités un sentiment d’infériorité, une honte de leur héritage culturel et des ambitions
moindres » (Henry, 1983, p. 10). Ce phénomène n’est malheureusement pas limité aux
séries télévisées — il se produit également dans les journaux et les bulletins d’informations
télévisées. Dans le cadre d’une étude de la représentation des minorités ethniques et des
membres des Premières nations dans deux grands journaux de Winnipeg, un rapport
réalisé par le Social Planning Council of Winnipeg (1996) a constaté que les minorités
ethniques se voient souvent refuser l’accès aux médias et n’apparaissent que lorsqu’elles
sont impliquées dans des incidents ou des événements. Tator (1995) a démontré que les
minorités ethniques sont constamment « singularisées » et désignées comme étant la
source d’un « problème social » dans les représentations des médias. S’appuyant sur
l’exemple de la conférence « Writing Through Race » qui s’est tenue à Vancouver en 1994,
elle explique que les médias donnent constamment une image fausse et déformée des
questions d’importance pour les minorités. Dans ce cas particulier, les médias ont été
obnubilés par le souhait de l’organisateur de la conférence de ne pas ouvrir certaines
sessions aux écrivains blancs, afin de donner aux écrivains de couleur un espace critique
et rassurant pour échanger leurs idées et leurs expériences. Jugeant que cette conférence
constituait une menace pour les valeurs nationales et un « acte de racisme », plusieurs
médias ont, des semaines durant, vivement critiqué les objectifs de la manifestation
(Tator, 1995).
Certains travaux parmi les plus convaincants sur la perpétuation des stéréotypes ont
examiné la manière dont les reportages d’informations canadiens homogénéisent les
minorités ethniques. Plusieurs études gouvernementales, financées en vertu des
programmes de multiculturalisme, ont cherché à savoir comment les médias rendent
compte de la diversité; elles ont conclu que les stéréotypes et les images négatives
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abondent (voir Karim, 1995; Karim, 1992). Ducharme (1986) a étudié la manière dont un
journal national a relaté la politique canadienne d’immigration pendant une période de cinq
ans. Ses recherches ont montré que l’utilisation de commentaires, de titres et de clichés
particuliers entraînait des représentations discriminatoires et racistes, qualifiant les
immigrants de « menace pour le système, mais également pour les Canadiens en tant
qu’individus » (Ducharme, 1996, p. 3). Une étude récente réalisée par Henry (1999) a
soulevé de vives inquiétudes quant au rôle des médias dans l’exacerbation du racisme au
Canada. Par l’analyse de trois grands journaux de la région de Toronto, Henry a démontré
que les médias, « par leur utilisation sélective et subtile de stéréotypes et de
généralisations..., contribuent à la construction d’une image négative des communautés
raciales, qui sont ensuite marginalisées et victimes de lois iniques » (Henry, 1999, p. vii).
L’analyse du quotidien The Toronto Sun qu’a effectuée Tator entre 1978 et 1985 lui a
permis de constater « la persistance du racisme et des préjugés » (Tator, 1995, p. 1). Dans
son examen des retombées du multiculturalisme sur les relations entre médias et minorités,
Karim s’est aperçu que la couverture des questions multiculturelles par la presse écrite a
augmenté entre 1980 et 1988, mais que cette couverture était essentiellement négative.
Les médias avaient tendance à se montrer hostiles au multiculturalisme, estimant que cette
politique allait à l’encontre de la construction du sentiment national (Karim, 1989; voir
également Jiwani, 1995). Miller et Prince (1993) se sont également intéressés à la manière
dont les minorités étaient dépeintes. Après avoir analysé pendant deux mois 2 141 photos
et 895 reportages locaux dans six grands journaux, ils ont constaté que les minorités
étaient présentées, en gros, sous trois éclairages : dans la moitié des cas, il s’agissait soit
d’athlètes, d’artistes du spectacle ou de gens qui ont maille à partir avec la loi, à quoi
s’ajoutent de rares spécimens reconnus pour leur contribution significative à la prospérité
du Canada. Comme l’écrit John Miller : « …Les médias ne s’intéressent pas beaucoup aux
relations raciales, et lorsqu’elles sont traitées, c’est de manière réactive, négative et hors
contexte » (Miller, 1998, p. 133).
La description de la population asiatique au Canada a également retenu l’intérêt des
chercheurs. Riley (1993) souligne que les bulletins d’informations évoquent sans cesse la
prétendue « vague de criminalité asiatique » à Ottawa et, comme le relève Greenberg, ils
comparent l’immigration de certains groupes asiatiques à une catastrophe naturelle
(Greenberg, 2000). Dunn et Mahtani (2001) ont souligné le fait que les documentaires
télévisés réduisent la population asiatique à un groupe de personnes qui menacent les
ressources nationales et sont un « problème social » auquel sont confrontés les « vrais
Canadiens ». Henry (1999) a également examiné la caractérisation essentialiste des
Asiatiques dans les informations, en analysant de façon particulièrement convaincante les
références à des « gangs asiatiques » dans des reportages concernant un assassinat
perpétré dans un restaurant chinois. Elle explique que les journaux ont présumé que
l’assassinat d’un Asiatique par un autre Asiatique était forcément lié à un conflit entre
gangs et que même s’il s’est avéré par la suite que tel n’était pas le cas, les médias ont
continué de publier des articles montant en épingle des détails à l’appui de l’existence
d’une pègre (Henry, 1999). La description du lieu de vie des immigrants a également été
examinée. Les journalistes se font l’écho de l’horreur des Blancs découvrant le domicile
d’un immigrant asiatique à Vancouver, qualifié de « maison monstrueuse » (Dunn et
10
Mahtani, 2001; Wanning Sun, 1997-98; Li, 1994) — expression couramment employée
dans les reportages, révélant l’idée d’un lieu « laid, effrayant et sinistre… une métaphore
du caractère des personnes qui y vivent, ce qui donne une dimension concrète à l’image
traditionnellement orientale qu’on se fait des Chinois » (Sun, 1997-1998, p. 147). On doit
à Greenberg l’une des plus récentes analyses du discours concernant la population
asiatique. Il examine le contenu et les expressions utilisées dans des articles « d’opinion »
publiés à l’occasion de l’arrivée, en 1999, au large des côtes de la Colombie-Britannique,
de réfugiés originaires du Fujian. Dans une étude de 57 articles parus entre juillet et
octobre 1999, Greenberg conclut que les cinq journaux concernés jugent critiquable l’action
de ces réfugiés, et il met en évidence certains leitmotive présentant les immigrants comme
« l’incarnation d’un danger, des gens qui sont porteurs de maladies, qui menacent
gravement le bien-être moral, physique et économique des Canadiens ‘légitimes’ »
(Greenberg, 2000, p. 531).
Les chercheurs se sont également intéressés de très près au traitement de groupes
religieux particuliers par les médias (Karim, 2000; Congrès islamique canadien, 2000). Au
début des années 90, ils ont fourni un pendant canadien utile aux études américaines
focalisées sur la multiplication des images anti-islamiques dans les bulletins d’informations
américains. Winter (1992), s’intéressant au traitement par les médias de la guerre du Golfe,
de l’occupation d’Oka, du budget du NPD en Ontario et de l’accord Meech, a décrit la
manière dont les médias commerciaux déforment systématiquement le compte rendu des
grands événements au Canada. Pour sa part, Mayer (1998) fournit une analyse
convaincante de la représentation des Irakiens pendant l’opération Tempête du désert, en
recensant les clichés du type « terroristes du Moyen-Orient » et « fondamentalistes
islamistes » employés dans les bulletins d’actualités quotidiens. Les groupes de pression
ont également apporté leur pierre à ce débat : pensons seulement au rapport rédigé par
l’Organisation des femmes afghanes, qui passe en revue l’opinion des chercheurs, des
activistes locaux et des communautés sur la représentation des femmes musulmanes dans
les médias canadiens (Jafri, 1998). Le groupe d’évaluation des médias du Congrès
islamique canadien a étudié pendant six mois les reportages anti-islamiques dans plusieurs
journaux canadiens et a préconisé des solutions (Congrès islamique canadien, 1998). Une
conférence de 1998 sur les médias et la foi a alimenté le débat sur la religion et les médias.
Lors de cette manifestation, Lois Sweet a présenté les résultats d’une étude de plus de
1 300 articles de journaux de huit provinces, et a affirmé que de toutes les communautés
religieuses représentées au Canada, les Catholiques romains (environ 45 p. 100 des
Canadiens) et les Juifs (environ 1,2 p. 100) bénéficient de la plus large couverture de la
part de la presse écrite (dans Baglo, 1998). Selon ses travaux, les Protestants, qui
comptent pour 36,5 p. 100 de la population, sont rarement mentionnés dans les journaux.
Les Musulmans, Hindous, Bouddhistes, Sikhs et autres « minorités religieuses » ont
rarement voix au chapitre, sauf dans les reportages provenant de sources internationales
(Baglo, 1998).
On a également reproché à la publicité de renforcer ce statu quo. Les travaux de Kunz et
Fleras (1998) ont examiné de manière pertinente la publicité et la représentation des
minorités au Canada. Ils montrent, en analysant des annonces parues dans le magazine
11
Maclean’s, que les gens de couleur sont surreprésentés dans certaines catégories
(produits de nettoyage et travaux ménagers; annonces touristiques), mais sousreprésentés dans d’autres (publicités pour les alcools). D’Innocenzo (2001) a analysé le
contenu de magazines canadiens et a découvert que les minorités visibles étaient
pratiquement... invisibles dans les annonces. Elle a également constaté, en s’entretenant
avec des professionnels du secteur, que le nombre de personnes de couleur qui travaillent
dans la publicité au Canada était très faible. Une étude menée par la Fondation
canadienne de la publicité démontre que les minorités sont rarement présentées comme
des « gens ordinaires » (FCP, 1992; voir également MacGregor, 1989; Wyckham, 1983).
Stigmatiser les minorités par la répétition d’images stéréotypées dans la publicité est très
lourd de conséquences. Pourtant, les intégrer et donner d’elles des représentations
diversifiées pourrait accroître les ventes. Une étude de la Fondation canadienne de la
publicité a montré que les minorités sont plus susceptibles d’acheter un produit si l’annonce
publicitaire correspondante les met en scène (FCP, 1992). Samuel suggère que le pouvoir
économique des minorités au Canada se renforce, puisqu’elles détiennent pour environ
300 milliards de dollars d’actifs, soit 20 p. 100 du PIB canadien (dans Fleras et Kunz, 2001;
Samuel, 1998). Ces chiffres ont poussé les annonceurs à réfléchir. De toute évidence, les
annonces contiennent moins de représentations ouvertement négatives des minorités,
mais font la part belle à des images qui symbolisent la diversité de manière superficielle
et starisée, comme l’illustre la campagne de Benetton. Toutefois, les chercheurs affirment
que dans ces représentations, les minorités continuent d’être vues à travers le prisme de
la majorité blanche (Wilson et Gutierrez, 1995). Les minorités ne sont pas considérées
comme des « gens ordinaires » dans la publicité même si, dans la réalité, elles détiennent
un solide pouvoir d’achat. Fleras et Kunz suggèrent que de nombreuses agences de
publicité sont à l’affût de moyens qui leur permettraient d’atteindre les minorités, parce que
« les professionnels de la publicité et du marketing ne se sentent pas qualifiés pour créer
ou autoriser des programmes onéreux qui ciblent des communautés ethniques dont ils
connaissent mal la langue ou la culture » (Fleras et Kunz, 2001, p. 119). De fait, la
domination blanche du secteur contribue à perpétuer la même vision des minorités et de
leur capacité à construire la société canadienne. La relation entre les caractéristiques
d’achat des minorités et leur représentation équitable dans la publicité doit être analysée
en détail.
Les médias francophones sont un autre secteur à étudier. Le champ de recherche y est
beaucoup plus limité. Les Francophones n’ont pas bonne presse dans les médias
canadiens anglophones. Potvin (1999), dans une étude qui analyse comment les
événements qui se sont déroulés au Québec entre 1995 et 1999 ont été relatés dans des
journaux canadiens anglais, montre que les Francophones sont souvent perçus comme
« différents » et comme une menace pour l’identité canadienne. Nous devons approfondir
l’étude des liens entre la diversité linguistique et la représentation des minorités, comme
le suggèrent les travaux de Henry Chow et Cynthia Baker qui font partie de cette série.
Dans son document intitulé « Is Quebec Culture Doomed to Become American » (La
culture québécoise est-elle condamnée à devenir américaine?), Tremblay fait une analyse
du discours centrée sur les émissions américaines diffusées à la télévision québécoise
12
entre 1982 et 1989. Il affirme que les programmes américains constituent une « influence
potentiellement importante, mais relative » (Tremblay, 1992). Examinant les limites du
marché culturel québécois, Tremblay prétend qu’il y a lieu de se méfier de l’invasion
culturelle américaine. Thomas (1992) concentre sa réflexion sur la rencontre entre la
télédiffusion canadienne anglaise, la télédiffusion canadienne française et les programmes
télévisés américains, ainsi que sur le rôle des minorités ethniques et raciales. Ses travaux
montrent que les systèmes de télédiffusion anglais et français s’excluent mutuellement, et
que les dramatiques américaines sont leur seul dénominateur commun. Comme Thomas
l’écrit : « Ces tendances conflictuelles, qu’il s’agisse de télédiffusion ou de politiques
culturelles et linguistiques, ainsi que des attentes différentes quant aux rôles sociaux que
les minorités ethniques doivent jouer, font de l’intégration de ces minorités dans la société
québécoise une question beaucoup plus complexe que partout ailleurs dans le pays »
(Thomas, 1992). Ces études citées, les informations sur la représentation des
Francophones dans les médias anglais et français demeurent rares et il convient de
remédier à cette situation.
De nombreux présentateurs ont exprimé avec force leur mécontentement à propos de la
représentation erronée des minorités dans les médias. Irshad Manji s’est intéressé à la
responsabilité qui incombe aux professionnels des médias de lutter contre le racisme.
Critiquant un documentaire sur le multiculturalisme diffusé dans le cadre du programme
d’informations et d’affaires publiques « W5 » de CTV, Manji explique comment les
journalistes se sentaient « protégés par la ‘blancheur’ dominante » puisqu’ils ont posé la
question : « Le multiculturalisme est-il préjudiciable? » plutôt que son pendant plus
adéquat : « Le multiculturalisme est-il préjudiciable à la tolérance manifestée par la
majorité? » (Manji, 1995). Suhana Merharchand, présentatrice des nouvelles de la CBC
à Toronto, a également déploré la mauvaise représentation des minorités dans les médias
lors du colloque de CHUM-TV en mars 2001.
À la fin des années 1990, les chercheurs ont constaté que les prises de position
ouvertement racistes dans les médias avaient diminué (Henry, 1999), soulignant le recul
des descriptions ignobles des groupes minoritaires et leur caractère beaucoup moins
stéréotypé. Ils ajoutent toutefois qu’il n’y a pas de quoi se réjouir, précisant que cette
évolution est imputable à la montée du « nouveau racisme » ou à ce que Henry et coll.
appellent « le racisme démocratique » — une idéologie qui préconise la promotion d’idéaux
démocratiques comme l’égalité et l’équité, mais où semblent coexister des attitudes et des
comportements contradictoires, au nombre desquels se trouve la discrimination des
minorités ethniques. Henry et coll. (1995) suggèrent que cette forme de racisme reste
profondément ancrée dans le milieu des médias, qui véhiculent des images encore
imprégnées d’un racisme structuraliste et où les habitudes de sous-représentation et de
fausse représentation continuent de creuser le déséquilibre des relations de pouvoir. En
d’autres termes, le racisme serait simplement devenu plus rusé en prenant des formes
moins voyantes.
Pour résumer cette section, les études canadiennes de la représentation ethnique dans les
médias se sont attachées à mettre en lumière la folklorisation des cultures minoritaires, afin
13
de révéler l’incapacité des médias à servir de miroir à la société canadienne en lui donnant
la possibilité de contempler l’éventail complet de sa diversité ethnique restituée fidèlement.
Face à la pauvreté des images que les médias renvoient des minorités ethniques, il est
difficile de considérer ceux-ci comme des acteurs majeurs de la construction de la société
canadienne. Les chercheurs soulignent que ces stéréotypes négatifs sont préoccupants,
car ils génèrent un clivage entre les minorités ethniques et les « vrais » Canadiens — les
Canadiens appartenant à des minorités visibles sont considérés comme « différents » ou
« étrangers » et susceptibles de menacer la nation (Fleras, 1995). Le renforcement des
stéréotypes négatifs fait des minorités ethniques des parias culturels et élargit le fossé
racial. Dans ce contexte, il est intéressant de citer Henry :
[E]n analysant les représentations des personnes de couleur dans les médias…[il
semble clair que la] culture dominante continue de renforcer son pouvoir et de
préserver son hégémonie en inculquant des images négatives et stéréotypées des
minorités… génér[ant] une perception faussée de ces minorités par la majorité. La
création de projections négatives d’un groupe et le martèlement constant d’images
défavorables peuvent porter atteinte aux individus ciblés […] et entraver le
développement […] d’une société démocratique et saine (Henry, 1999, p. 135-136).
3. Repousser les limites de l’analyse du discours : Autres méthodes de recherche
Comme le démontrent ces études, nombre des critiques centrées sur la représentation des
minorités ethniques par les médias ont tendance à aboutir à des conclusions assez
pessimistes. Ce phénomène est largement attribuable à l’approche structuraliste, axée sur
l’analyse du contenu, laquelle a été adoptée par la plupart des chercheurs. Dans la section
qui suit, nous examinerons les cadres d’analyse adoptés par la majorité des recherches
sur la représentation des minorités, afin mettre au grand jour certaines de leurs limites.
Les méthodes suivies par les chercheurs qui se sont intéressés à la représentation des
minorités ethniques dans les médias sont peu nombreuses (Fleras, 1994). En général, la
méthode la plus couramment adoptée dans ce domaine a été l’analyse du contenu (ou
encore du discours), une technique qui permet d’analyser systématiquement un document
ou tout autre produit culturel (van Dijk, 1991), en répertoriant le nombre de descriptions
négatives et positives d’un groupe. Les auteurs de nombreuses études canadiennes de
cette nature sont redevables à Teun van Dijk, un chercheur hollandais dont les travaux
constituent une exégèse structuraliste de reportages médiatiques, focalisée à la fois sur
ce qu’ils représentent en surface et sur leur signification sous-jacente. Nombre des
recherches publiées dans les années 90 sur le thème de la représentation des minorités
ethniques par les médias font référence à l’ouvrage déterminant de van Dijk, intitulé
Racism and the Press (1991), où est souligné le rôle prépondérant des médias à l’égard
du problème que pose le racisme et des processus qui en sont porteurs (1991, p. x).
Comme le suggère van Dijk, on reconnaît depuis quelque temps que les médias sont à
l’origine des idées concernant la race, étant donné que ce sont eux qui les formulent, les
reproduisent et les modifient (voir également Hall, 1981). Dans le sillon de van Dijk, les
chercheurs canadiens ont conclu que les médias jouent un rôle clé dans la reproduction
des idéologies relatives au racisme et à la classification des ethnies (Fleras et Kunz, 2001;
14
Henry, 1999; Fleras, 1995). Même si les travaux de van Dijk datent de plus de dix ans, les
chercheurs canadiens sont loin d’avoir abandonné cette méthode d’analyse, comme le
démontrent certaines études récentes sur la relation entre les médias et les minorités.
Mentionnons, en guise d’exemple, l’analyse effectuée par Greenberg des articles sur les
réfugiés de la mer originaires du Fujian (Greenberg, 2000), et encore l’étude de Henry,
parue en 1999, sur la racialisation du crime dans les médias imprimés de Toronto
(Henry, 1999; voir également Mahtani et Mountz, 2001).
L’analyse du contenu a fait l’objet de nombreuses critiques. Celles-ci soulignaient
notamment que s’ils se laissent quelque peu détourner d’un objectif axé sur les processus
sociaux générateurs du contenu médiatique, les chercheurs peuvent accorder trop
d’importance aux résultats de l’analyse du discours (Fleras, 1995; Fleras, 1994).
L’approche a suscité des réserves parce qu’en l’appliquant, il est facile d’isoler de son
contexte le produit médiatique, qui est alors évalué de façon critique sans que pour autant
soit examiné le processus qui a été suivi pour le forger (Burgess et Gold, 1985). Les liens
simples établis grâce à une analyse du discours masquent souvent l’intelligence des
processus décisionnels complexes et multiples qui président, en coulisses, à l’élaboration
de l’image des minorités dans les médias — comme l’a démontré de manière
particulièrement convaincante Wyckham (1983) dans sa communication sur les
stéréotypes féminins en publicité. Il fait remarquer que les annonceurs n’ont montré aucun
intérêt pour les résultats qui peuvent être tirés d’une analyse du contenu, précisément à
cause de l’absence de validité de cette méthode et des difficultés inhérentes à la réplique
d’études se fondant sur une analyse marquée par la subjectivité du chercheur qui en est
l’auteur. Il signale en particulier que le recours à cette méthode ne prend pas en compte
l’idée qu’a pu se faire le chercheur des processus décisionnels compliqués d’où est issu
le produit culturel.
Wyckham n’est pas le seul à critiquer les méthodes fondées sur l’analyse du discours. Des
chercheurs comme Fleras (1995) et Head (1981) en sont arrivés aux mêmes conclusions
à propos des limites de cette technique. Des chercheurs américains spécialisés dans les
médias se sont fait l’écho de ces opinions, en soulignant également les lacunes des
examens théoriques. « Une analyse productive des médias ressemble à un iceberg, » écrit
Ferguson (1998). « On peut comparer la partie statistique de l’analyse à la partie émergée
d’un iceberg. L’énorme masse qui n’est pas immédiatement visible correspond aux
fondements intellectuels, historiques et analytiques sans lesquels une analyse des médias
court le risque d’être superficielle, mécanique ou creuse » (Ferguson, 1998, p. 2). D’une
part, il est impératif de reconnaître les importantes contributions des chercheurs qui ont
utilisé l’analyse du contenu comme principale approche méthodologique. En effet, il faut
bien faire un examen critique des représentations elles-mêmes pour être en mesure de
signaler les problèmes que soulève l’image donnée des minorités par les médias. Il a
toutefois été suggéré que l’on n’a pas encore entrepris de recherches significatives
centrées sur les formes complexes et contradictoires que peuvent prendre la considération
et l’expression de la « différence » à l’origine de ces images. Les chercheurs font
également valoir, à juste titre, qu’absence et négativité confirment la non-normalité des
minorités ethniques, et que c’est sur ces deux points que se concentrent la majorité des
15
études consacrées à la représentation des minorités ethniques dans les médias (Dunn et
Mahtani, 2001). On a suggéré qu’une analyse qui s’inscrit dans un cadre conceptuel
binaire — c’est-à-dire des évaluations centrées soit sur la sous-représentation, soit sur la
représentation erronée des minorités dans les médias — ne laisse pas nécessairement aux
chercheurs qui s’intéressent à ce domaine la liberté de considérer un cadre théorique plus
perfectionné pour comprendre les relations entre les médias et les minorités. Comme l’a
suggéré Fleras, « les études qui ont été faites jusqu’ici ont accordé beaucoup d’importance
à des exposés descriptifs qui approfondissent rarement les causes, les effets et les
solutions » (Fleras, 1992, p. 340). Ce point de vue est partagé par d’autres chercheurs qui
sont de plus en plus nombreux à se rendre compte que « signaler les erreurs et les abus
ne permet pas nécessairement de résoudre le problème » (Fraser, 1994, p. 15). Ce point
de vue a également été exprimé lors d’entrevues avec des chercheurs qui s’intéressent aux
médias (voir la section de ce document consacrée aux recommandations).
Ainsi donc, au cours des dix dernières années, on a cherché à dépasser ces deux types
d’analyse pour parvenir à une discussion plus nuancée des relations entre les minorités et
les médias. Les chercheurs spécialisés dans les médias ont commencé à abandonner la
méthode consistant simplement à citer des exemples de sous-représentation ou de fausse
représentation dans les médias pour tenter de comprendre pourquoi ces images sont
tolérées et même produites. Ce mouvement est peut-être également en partie attribuable
à l’évolution de la critique théorique concernant la « race » qui a relancé le débat sur les
relations entre les médias et les minorités au Canada. Les travaux de théoriciens de la
culture comme Stuart Hall (1981), Paul Gilroy (1993) Wilson et Gutierrez (1985), et Homi
Bhabha (1994) ont également incité les chercheurs à ne pas se contenter d’accumuler des
chiffres sur les représentations des minorités dans les médias, mais à approfondir les
raisons pour lesquelles perdurent des images stéréotypées mettant en cause le
multiculturalisme, la discrimination et la (re)diffusion d’un discours raciste.
Dans la prochaine section, je décris dans quelle voie se sont dirigés les chercheurs qui
n’ont pas uniquement eu recours à l’analyse du discours comme méthode d’évaluation.
Premièrement, j’examine les travaux qui éclairent le lien entre l’origine des capitaux des
entreprises médiatiques, les impératifs économiques et la représentation qui est donnée
des minorités. Deuxièmement, j’explore la recherche portant sur le rôle de l’auditoire, en
tant que consommateur de ces images médiatiques, dans la mesure où cet auditoire a le
pouvoir de sélectionner et d’interpréter ces images. Troisièmement, j’examine la
documentation de plus en plus abondante sur les médias ethniques. Par exemple, la
représentation des groupes ethniques donnée par les médias n’est pas entièrement, ni
aveuglément, acceptée par les auditoires. Ceux que l’on appelle communément les
« lobbies ethniques » sont connus pour leur observation attentive des images diffusées par
les médias. Certains groupes représentant des minorités ethniques se sont dotés de
« cerbères », dont la fonction est de disséquer les nouvelles ou d’observer attentivement
le milieu des médias. Enfin, il existe toute une documentation consacrée aux
professionnels des médias — ceux-là même qui sont à l’origine des images ainsi
véhiculées.
16
A) Origine des capitaux
Dans le secteur de la radiodiffusion, les impératifs économiques menacent
spécifiquement les minorités ethniques et raciales. On a souvent accusé les
radiodiffuseurs de chercher le plus petit dénominateur commun pour augmenter au
maximum… leur part de marché… Cette pratique a… exclu… les minorités de la
programmation télévisée, vu que leur nombre était jugé négligeable
(Thomas, 1992).
Selon Fleras (1994), nombre des travaux de recherche qui ont porté sur les médias et sur
leur couverture des minorités ont sous-estimé l’importance des difficultés que présente une
restructuration des relations médias-minorités. En cherchant à répertorier les résultats
désastreux des images médiatiques, les chercheurs, soutient Fleras, ont minimisé
l’importance de « la logique commerciale » sous-jacente à ces images et ont ignoré les
calculs à la base de la réalité médiatique et des engagements des entreprises. Il
recommande de reconstituer nos sources analytiques en explorant l’idée que les mass
media sont la cible de secteurs qui s’en disputent le contrôle (Fleras, 1994). Les
chercheurs canadiens qui s’intéressent aux médias ont avancé certaines idées à propos
de l’influence des considérations économiques sur les images médiatiques des minorités
ethniques (voir Miller, 1998). Ils ont par exemple suggéré que les mass media sont tout
simplement incapables de représenter équitablement les minorités ethniques, car de telles
initiatives coûtent trop cher dans un milieu où il faut à tout prix faire des bénéfices et où les
compressions sont monnaie courante. Certains chercheurs ont rejeté cette hypothèse et
ont soutenu qu’une représentation équitable des minorités visibles dans les émissions de
nouvelles serait possible si le leadership des organismes médiatiques changeait de
visage — ce qui n’exigerait aucune mise de fonds (Miller, 1998; Comité de la diversité de
l’Association canadienne des journaux 1994). Pour d’autres, sur le plan institutionnel,
l’origine des capitaux des entreprises médiatiques joue un rôle déterminant dans la façon
dont celles-ci représentent les minorités ethniques. Après avoir examiné qui sont les
propriétaires de ces entreprises, quelle est leur idéologie et quelles sont leurs ambitions,
et quel est le rôle de l’influence exercée par la direction, les chercheurs canadiens en
arrivent à la conclusion que les médias sont principalement aux mains d’une élite
appartenant au milieu des grandes entreprises. Dans son livre, Democracy’s Oxygen: How
Corporations Control the News (1997), Winter donne un aperçu de la mesure dans
laquelle, au Canada, la propriété des médias est concentrée entre les mains d’une élite.
Il souligne que « loin d’être l’oxygène de la démocratie […] les médias d’information
sanctionnent actuellement un système qui est fondamentalement antidémocratique. Au lieu
d’informer la population, ils la manipulent pour l’amener à approuver des politiques dont
tirent profit leurs propriétaires : l’élite du milieu des entreprises » (Winter, 1997, p. xv).
Henry (1999) souligne également que les quelques conservateurs (pour la plupart, des
hommes de race blanche, plus âgés) qui détiennent et dirigent les entreprises médiatiques
ont homogénéisé les médias pour en faire un instrument qui renforce les idéologies
conservatrices. Elle ajoute que le Canada est le seul pays du monde industrialisé où il
n’existe aucune loi interdisant la concentration des capitaux dans le secteur de la presse.
La journaliste canadienne Linda McQuaig a déclaré :
17
il faut se rappeler que pratiquement toutes les entreprises médiatiques sont
détenues par les membres d’une élite riche et puissante. Présumer que cela n’a
aucune influence sur les idées qu’elles diffusent serait aussi simpliste que de
présumer que, si tous les médias étaient, par exemple, aux mains de syndicats, de
groupes féministes ou de travailleurs sociaux, cela n’aurait aucun impact sur leur
contenu rédactionnel (McQuaig 1995, p. 12).
Comme le souligne McQuaig, le fait que les médias appartiennent à l’élite a même une
incidence sur le caractère démocratique et équitable de la couverture de l’actualité. Si c’est
l’élite qui contrôle les médias, il devient d’autant plus difficile de donner la parole à ceux qui
ne possèdent ni richesse, ni influence politique (voir Hackett, Gruneau, Gutstein, Gibson
et NewsWatch Canada, 2001). Il devient de moins en moins plausible, par exemple,
d’envisager des reportages plus nombreux et plus diversifiés dénonçant l’injustice à
caractère racial ou présentant les minorités sous un autre jour. Comme Hackett et coll. le
démontrent, ce qui n’est pas rapporté par les médias est aussi significatif que ce qui l’est,
et les raisons sur lesquelles s’appuient ces décisions procèdent en partie de l’influence
dont use le monopole de plus en plus puissant que constituent les propriétaires
d’entreprises médiatiques au Canada.
B) Auditoires
Paradoxalement, l’approche marketing qui incitait le milieu de la radiodiffusion à
exclure les minorités ethniques et raciales est maintenant utilisée par divers groupes
de pression pour convaincre les annonceurs et les radiodiffuseurs que les minorités
représentent un important marché inexploité (Thomas, 1992).
À la fin des années 70, les chercheurs s’intéressant aux médias aux États-Unis et au
Royaume-Uni ont commencé à considérer les moyens grâce auxquels « les groupes les
moins puissants [les auditoires] élaborent leur propre interprétation des produits culturels
et les utilisent à leurs propres fins — en s’en moquant, en les rejetant ou en s’en servant
comme révélateurs de leur propre identité » (During ,1993, p. 7). Ces chercheurs ont ainsi
remis en cause de l’image traditionnelle des auditoires, lesquels étaient présentés comme
des consommateurs qui absorbent sans discernement le produit médiatique. Même s’il est
largement reconnu que les auditoires n’ont pas les moyens d’avoir accès aux médias grand
public, les chercheurs estiment que les consommateurs de mass media, loin d’être passifs,
interprètent, perçoivent et déterminent le sens des images véhiculées par les médias. Les
travaux de recherche en ce domaine ont également porté sur les opinions et les
impressions des auditoires à propos des représentations des minorités ethniques. Tout au
long des années 60 et 70, les plaintes fusèrent de la part des téléspectateurs et auditeurs
à ce sujet. Cette insatisfaction s’est exprimée dans de nombreux mémoires et études et
lors de nombreuses audiences qui ont permis de constater la volonté des minorités de
remettre en question l’image donnée d’elles par les médias, un mouvement en partie
encouragé par la naissance officielle du multiculturalisme au Canada en 1971. La plupart
des plaintes exprimées alors faisaient valoir la persistance de stéréotypes négatifs à
l’endroit des minorités dans les reportages, ou encore le fait que lesdites minorités étaient
ignorées et invisibles. Une des études les plus connues sur le traitement des minorités par
18
les médias canadiens, intitulé le rapport du Comité spécial sur la participation des minorités
visibles dans la société canadienne (L’égalité ça presse!) et publié en 1984, énumérait de
graves chefs d’accusation à l’endroit des médias et de leur couverture des minorités
ethniques au Canada. Accusant les mass media d’entretenir « le mythe [...] selon lequel
le pouvoir et les privilèges sont dévolus aux Blancs », le rapport critiquait l’approche
adoptée par le milieu de la publicité pour qui « le Blanc fait vendre » et concluait :
Le concept du multiculturalisme [dont les immigrants font partie intégrante] est même
contredit fréquemment et de façon flagrante, quoique peut-être involontairement, dans
les produits et les méthodes des institutions que sont les médias (L’égalité ça
presse! 1984, p. 96).
En dépit de ce rapport, plus d’une décennie plus tard, les auditoires continuent de faire
connaître les préoccupations que leur inspire une représentation des minorités ethniques
qu’ils jugent insatisfaisante. Une étude menée en 1995 auprès de groupes cibles par
Goldfarb Consultants, au nom de l’Association canadienne des journaux, a constaté que
dans six de ces groupes, plus de la moitié des sondés appartenant à des minorités
ethniques ont déclaré avoir l’impression d’être traités comme des étrangers dans les
quotidiens, soulignant particulièrement l’absence d’une couverture diversifiée et équilibrée
de leur communauté. À cela s’ajoutait le fait que les quotidiens canadiens faisaient peu de
cas de l’actualité internationale, particulièrement d’événements s’étant produits dans la
région d’où ils étaient originaires (Goldfarb Consultants, 1995). D’autres études expliquent
pourquoi les minorités ethniques ont le sentiment qu’elles ne sont pas considérées comme
des citoyens à part entière par les médias — par exemple, on peut noter cette observation
faite au Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes (CRTC) :
« Nous sommes ici tout simplement pour faire remarquer que ce que nous voyons sur nos
écrans de télévision […] nous donne l’impression d’être en terre étrangère, et non dans un
pays dont nous sommes citoyens à part entière » (cité par Tator, 1995, p. 3). D’autres
études reflètent les mêmes sentiments. Le rapport intitulé « Racism in the Media » contient
les actes d’une conférence organisée à Toronto, où des représentants de minorités
ethniques ont fait connaître leurs préoccupations à propos de la représentation
insatisfaisante de leurs groupes dans les médias (Racism in the Media, 1995). Il est
intéressant de noter à quel point les résultats de ces recherches menées auprès des
auditoires correspondent étroitement aux résultats des analyses du contenu : les minorités
ethniques et les peuples autochtones sont exclus des feuilletons et de la publicité; dans les
reportages sur l’actualité, on a tendance à peindre une image négative de ces groupes, et
le Canadien typique est présumé blanc. Les Canadiens qui ne sont pas de race blanche
ont dit que cette représentation leur donne l’impression de ne pas être intégrés à la culture
canadienne (Dunn et Mahtani, 2001).
Certains craignent que ces analyses des médias reposent sur l’hypothèse que les
auditoires sont simplement des consommateurs passifs, incapables de participer à une
remise en question des images stéréotypées ou de l’invisibilité des minorités ethniques
dans les médias. Au cours de la dernière décennie, certains chercheurs se sont mis à
explorer les stratégies particulières conçues par des minorités ethniques pour contrer
l’image insatisfaisante que donnaient d’elles les médias — en se faisant les « cerbères »
19
des médias ou en effectuant leurs propres analyses du discours. Goodall et coll. (1994,
p. 174) soulignent que de tels auditoires « participent activement à la création du sens qui
est donné à leur image par les médias et réagissent en engageant avec eux un dialogue
continu (même si, souvent, ces réactions ne sont pas exprimées sur la place publique) ».
C’est ainsi qu’après avoir été exclus et représentés sans aucun discernement pendant des
décennies, les gens de couleur délaissent presque complètement les médias grand public
(Goldfarb Consultants, 1995).
C) Médias ethniques
Au Canada, on désigne souvent les médias ethniques de « tiers médias », une expression
qui comprend une gamme d’entreprises et de produits médiatiques, dont les journaux
ethniques et la programmation qui n’est ni de langue anglaise, ni de langue française
(Fleras et Kunz, 2001; Fleras, 1994). De nombreuses entreprises appartenant aux « tiers
médias » ont été financées dans le cadre de la politique multiculturelle officielle. Cette aide
financière a été accordée par l’intermédiaire du Secrétariat d’État à certains groupes
ethnoculturels pour « contribuer à maintenir et à enrichir leur culture et leur langue
d’origine, les soutenir en tant que communautés et, d’une manière ou d’une autre, réaliser
les objectifs de la politique multiculturelle » (Secrétariat d’État, Ottawa, 1971, p. 28). Fleras
a cumulé une liste exhaustive de la programmation diffusée par les « tiers médias » au
Canada, soulignant que plus de 2 000 heures de programmation en langues autres que
le français et l’anglais sont diffusées par diverses stations multilingues au Canada, et que
CFMT est l’une des rares chaînes de télévision commerciales du monde qui diffusent à
plein temps une programmation multiculturelle (Fleras, 1994). Par ailleurs, CITY-TV, un
télédiffuseur de Toronto, est l’exemple même d’une entreprise qui a réussi à promouvoir
l’image d’un Canada multiculturel et dont les initiatives ont été applaudies à la fois par
l’auditoire et par la critique (Dunn et Mahtani, 2001). Minore et Hill (1990) ont étudié le
Programme d’accès des Autochtones du Nord à la radiotélédiffusion, dont l’objet était de
faciliter la diffusion d’une programmation culturellement pertinente dans le Nord canadien,
et ont souligné à quel point le fait de donner le contrôle de la radiodiffusion aux Premières
nations dans ces régions a contribué à leur apprentissage de l’autonomie. Roth (1993)
examine des questions qui ont trait au contrôle exercé par certains groupes d’intérêt, à la
propriété et à la sensibilisation transculturelle issue du partage, par les Premières nations,
du temps d’antenne et du contenu culturel diffusé par la radio communautaire (voir
également Meadows, 1996; Valaskakis, 1993; Smith et Brigham, 1992; Bredin, 1991,
Lam, 1980).
Les chercheurs canadiens ne partagent pas le même avis à propos du rôle joué par les
médias ethniques dans la remise en question de la représentation insatisfaisante des
minorités. Lawrence Lam (1980) est l’auteur de l’une des principales études sur ce sujet.
Son analyse de la clientèle des médias ethniques lui a permis de constater que ceux-ci ne
sont pas une source importante d’aide et d’informations pour les immigrants. Surlin et
Romanov (1985) estiment que les journaux ethniques fournissent à la clientèle ethnique
un lieu favorisant l’expression culturelle, tout en rendant la transition plus facile aux
immigrants qui viennent d’arriver et qui souhaitent s’adapter à leur nouvel environnement.
20
Black et Leithner (1991; 1987) notent que le taux de participation des minorités ethniques
au processus politique du pays n’a pas baissé, même si la clientèle des médias ethniques
est moins nombreuse. Kim et Kim (1989) reprennent cette affirmation et soulignent que les
journaux à caractère purement ethnique peuvent en fait servir à isoler la communauté
ethnique du reste du Canada. Certains ont suggéré d’examiner le niveau de contenu
canadien dans les médias ethniques et d’explorer la composition des auditoires de ces
médias. Estimant que les études portant sur les médias ethniques sont focalisées sur le
processus d’adaptation des immigrants et non sur l’ajustement des institutions et la
discrimination raciale, Fleras (1994) a mis en lumière certaines limites des travaux portant
sur les médias ethniques. Il souligne en particulier que « d’une manière ou d’une autre, on
a largement refusé de reconnaître leur utilité comme source d’aide ou d’informations à
propos du Canada » (Fleras, 1994, p. 271). Cette opinion reflète le sentiment exprimé par
certains segments de la population et certains critiques à propos de la politique
multiculturelle du Canada, lorsqu’ils font valoir que cette politique, fondée sur une
célébration inauthentique du patrimoine et des traditions, ne peut aboutir à une éradication
du racisme au Canada. Au contraire, l’inégalité des chances et la stratification sociale
basée sur les origines raciales et ethniques continuent d’être tolérées, avalisées et
favorisées par des initiatives financées par le gouvernement dans le but de faire valoir les
traditions culturelles — les journaux ethniques, par exemple — alors qu’en fait, elles
entraînent la « ghettoïsation » des enclaves ethniques (Mahtani, 2000).
D) Les professionnels des médias
Les minorités sont malmenées par les médias, mais ce phénomène est aggravé par
un racisme omniprésent, voilé et poli, institutionnalisé et systémique (Fleras, 1994,
p. 286).
Il est de plus en plus largement admis que les pratiques et les procédures des salles de
presse et autres lieux de production culturelle peuvent faire l’objet de recherches
méthodiques (Mahtani, à paraître; Fleras et Kunz, 2001; Greenberg, 2000; Henry et
Tator, 2000; Bredin, 1993). De nombreux travaux ont été consacrés à la sélection, par les
professionnels de l’information, des faits qui, à leurs yeux, méritent d’être signalés dans les
nouvelles. Certains chercheurs ont soutenu que ce qui constitue la valeur d’une nouvelle
est fonction des intérêts de la culture dominante et de schémas d’interprétation
conventionnels qui révèlent les travers institutionnels du milieu (voir Dunn et Mahtani, 2001;
Miller, 1998; Siddiqui, 1993). Les contraintes en matière de ressources et de temps dictent
des décisions à l’emporte-pièce, ne font que rendre plus incontournable le recours à de tels
schémas réducteurs. Les recherches sur la sélection des images utilisées dans les
journaux télévisés révèlent également l’idéologie hégémonique sous-jacente.
Ungerleider (1991) récuse les conventions qui régissent la collecte des informations au
Canada, soulignant que le recours à une structure narrative particulière, la dépendance visà-vis du gouvernement comme source d’information et de nouvelles, ainsi que la nécessité
de susciter la controverse sont autant d’impératifs qui, tous, poussent les médias
d’information à stéréotyper les minorités visibles. Joynt (1995), dans un article intitulé « Too
White », attire l’attention sur le fait que les journalistes appartenant à des minorités visibles
21
sont rares dans les salles de presse et cite des journalistes de couleur canadiens qui se
sont entretenus, au cours d’entrevues, sur le sujet de leur exclusion et de leur
marginalisation au sein même des organismes d’information. La communauté des
chercheurs canadiens a lancé un fervent appel en faveur de l’étude des mécanismes
porteurs de représentations contrefaites et stéréotypées des minorités ethniques (Fleras
et Kunz, 2001; Dunn et Mahtani, 2001). Toutefois, malgré cet appel, peu de chercheurs
fondent leurs analyses sur une étude des changements organisationnels qui surviennent
dans les lieux mêmes de la production médiatique. Nombreux sont ceux, en ce domaine,
qui estiment que l’on devrait explorer les processus sociaux générateurs de ce qui est
considéré comme des « connaissances légitimes » dans les entreprises médiatiques, pour
que les études puissent progresser.
Au cours des années 80 et au début des années 90, on pensait que la sous-représentation
des minorités visibles était en partie attribuable à la composition culturelle des personnels
de l’information. On soulignait que la plupart des journalistes étaient blancs, de classe
moyenne et, jusqu’à ces derniers temps, de sexe masculin (Dunn et Mahtani, 2001;
Miller, 1998; Carter, Branston et Allan, 1998). Selon les chercheurs, ces professionnels
étaient moins aptes et disposés à s’intéresser aux expériences de ceux qui n’appartenaient
pas aux élites de race blanche et de sexe masculin, ni à les comprendre et à les expliquer
(Henry, 1999; Miller, 1998; Roth, 1996). Les journalistes sont assujettis, dans leur milieu
de travail, aux cultures dominantes, lesquelles sont truffées de préjudices sociaux, de
stéréotypes et de points de vue populistes (Chideya, 1999). Même si, dans les années 90,
le nombre des « journalistes de couleur » a lentement augmenté (Mahtani, à paraître), les
chercheurs ont constaté que les professionnels de l’information occupant des postes clés
(rédacteurs, directeurs de l’information, réalisateurs, etc.) demeuraient presque
exclusivement des hommes de race blanche appartenant aux cultures dominantes (Carter,
Branston et Allan, 1998). Ces gardiens de l’information entravent les tentatives des
professionnels des médias qui ne sont pas de race blanche et qui cherchent à refléter des
expériences culturelles diverses (Dunn et Mahtani, 2001). C’est donc d’un cadre de
réflexion restreint que procèdent la définition du « vrai » Canadien et les décisions
concernant quelle « opinion publique » est recueillie et diffusée par les médias
d’information. Par exemple, les journalistes qui interviewent « l’homme de la rue » dans un
centre commercial décident à brûle-pourpoint à qui ils vont s’adresser pour recueillir des
échantillons de l’opinion publique. Ces décisions sont fondées sur une sélection consciente
et inconsciente des personnes qui sont ou ne sont pas considérées comme faisant partie
de la mosaïque nationale. De telles sélections renforcent l’hégémonie de la culture
dominante, en confirmant qui a le droit de donner son opinion à propos d’une communauté
ou d’une société (Dunn et Mahtani, 2001). Plusieurs professionnels de l’information se
disent intéressés à couvrir des faits qui permettraient de démasquer l’injustice raciale, mais
soulignent que cet intérêt n’est pas partagé par les rédacteurs en chef ou qu’ils ne
considèrent pas que ce genre de fait mérite d’être signalé dans les nouvelles. Comme l’a
déclaré un journaliste : « Bien sûr que nos reportages peuvent être racistes. Mais on n’y
peut rien. Peut-être que lorsque nous aurons grimpé quelques échelons, nous pourrons
véritablement faire infiltrer nos idées » (cité par Mahtani, à paraître).
22
De nombreux chercheurs ont rapporté que la plupart des professionnels des médias
sélectionnent les événements et les images selon leur propre conception de la composition
de l’auditoire (Mahtani, à paraître; Joynt 1995; Miller 1998). Les producteurs de
l’information partent du principe que « l’auditoire national » a les mêmes valeurs qu’eux et
qu’ils élaborent une programmation d’intérêt « national », même si cet « auditoire national »
est loin d’être aussi homogène que le pense la haute direction, pour qui les reportages
concernant les groupes ethniques n’ont pas leur place dans une programmation grand
public (Dunn et Mahtani, 2001; Miller, 1998; Ungerleider, 1991). La grande majorité des
professionnels de l’information présument que le « grand public » est de race blanche,
comme eux (Miller, 1998), puisque la plupart de leurs collègues sont des Blancs, même
si le nombre des gens de couleur augmente lentement (Mahtani, à paraître; Henry et
Tator, 2000). Les expériences des minorités ethniques et les événements qui les
concernent sont souvent considérés comme étant trop spécifiques pour être d’intérêt
général, à moins qu’il ne s’agisse de souligner une différence par rapport à la norme
(Henry, 1999). Les chercheurs et les professionnels des médias eux-mêmes ont souligné
qu’il faudrait que les gens de couleur soient davantage représentés dans leur milieu de
travail, parmi les propriétaires d’entreprises médiatiques et parmi les étudiants en
journalisme, pour que ces opinions courantes puissent être récusées (Dunn et
Mahtani, 2001; Chideya, 1995). On a signalé que certains journalistes appartenant à une
minorité ethnique ont déclaré ne pas être à l’aise dans un rôle de porte-parole du groupe
racial auquel ils appartiennent. Certes, on les considère comme des spécialistes, qui
peuvent être consultés lorsque se posent des questions auxquelles certains groupes
ethniques sont particulièrement sensibles; cependant, leurs collègues les soupçonnent
souvent de parti pris ou d’idées préconçues sur des questions qui touchent à leurs propres
origines culturelles (Dunn et Mahtani, 2001; Roth, 1996). Par ailleurs, les employés de
couleur sont eux-mêmes mal à l’aise quant aux perceptions selon lesquelles on
n’embauche ou promeut des gens de couleur que pour plaire à la direction ou satisfaire aux
exigences de la politique d’équité en matière d’emploi (Mahtani, à paraître). D’autres
chercheurs et commentateurs estiment qu’une formation pédagogique anti-racisme
dispensée dans les salles de presse et les écoles de journalisme serait d’une certaine
utilité. Toutefois, même si les journalistes reconnaissent la nécessité de donner une image
plus adéquate des groupes minoritaires, il semble que parmi les personnels de
l’information, beaucoup ne reconnaissent aucun mérite aux généralités auxquelles se
bornent les cours et les séminaires sur la diversité qui font parfois partie des programmes
de formation (Mahtani, à paraître). Dans un rapport sur le racisme dans la presse
canadienne publié par la Fondation canadienne des relations interraciales, Henry et Tator
maintiennent que les journalistes grand public du Canada doivent suivre des cours de
formation sur la diversité culturelle pour éviter de faire preuve de racisme dans leurs
reportages. Ils suggèrent que les entreprises médiatiques devraient recruter plus de
professionnels appartenant à des minorités, afin de dépeindre comme il se doit le
multiculturalisme de leurs collectivités. La problématique du recrutement devra faire l’objet
de recherches plus poussées. On a également recommandé d’entreprendre un examen
systématique des programmes d’études des écoles de journalisme, de renforcer les
mécanismes de contrôle des médias et de responsabiliser davantage les entreprises
médiatiques (Henry et Tator, 2000).
23
Les chercheurs ont commencé à étudier la diversité culturelle dans le contexte des
relations sociales complexes qui se tissent dans une salle de presse, ainsi que dans
d’autres lieux de production médiatique — où le choix des diverses facettes de la réalité
qui est représentée est dicté par des contraintes rigides, imposées par une hiérarchie
stéréotypée sur le plan de la race et, souvent, du sexe (Mahtani, à paraître; Dunn et
Mahtani, 2001). Ungerleider, Miller et Joynt ont examiné la prépondérance de la race
blanche dans les médias d’information. Ungerleider souligne une chose importante : la
plupart des travaux publiés sur l’image des minorités ethniques véhiculée par les médias
sont principalement axés sur l’absence de ces minorités dans les publicités grand public
et en tant que protagonistes de séries dramatiques. Cherchant à donner un autre éclairage
à son analyse, il s’intéresse aux médias d’information canadiens et explique que « la
sous-représentation et la représentation erronée des minorités par les médias d’information
ne sont pas accidentelles […] Elles résultent de deux phénomènes convergents : les
procédés de collecte de l’information et le désir de ceux qui occupent des postes influents
de maintenir leur position privilégiée » (Ungerleider, 1991, p. 6). Suite à un sondage
effectué pour tenter de répondre à la question « Les journaux peuvent-ils se permettre
d’être aussi peu en phase avec leur milieu? », le Comité de la diversité de l’Association des
journaux canadiens a constaté que dans 41 des salles de presse canadiennes contactées,
seuls 2,6 p. 100 des employés appartenaient à des minorités ethniques — c’est-à-dire cinq
fois moins que le pourcentage des minorités dans la population canadienne (AJC, 1994).
Dans ses recommandations, le comité a suggéré qu’il était tout à fait possible de donner
une image juste des minorités ethniques sans pour autant dépenser un sou : tout est une
question de leadership. Le comité a également souligné qu’il existait un lien direct entre la
présence de journalistes appartenant aux minorités dans une salle de presse et la qualité
des reportages sur les collectivités qui les entourent. John Miller, professeur de journalisme
à l’Université Ryerson de Toronto et membre du Comité de la diversité de l’AJC, a décrit
dans une autre publication les facettes de l’exclusion des minorités par les quotidiens
canadiens. Il a également démontré, dans le cadre de deux projets de recherche menés
en 1993, qu’« aussi bien au niveau du personnel qu’ils embauchent que dans la manière
dont ils présentent les minorités, la plupart des quotidiens canadiens sont aussi blancs que
le papier sur lequel ils sont imprimés » (Miller 1994, p. 1; voir également Miller, 1998). Dans
une étude publiée dans The Ryerson Review of Journalism etportant sur la réelle
suprématie des Blancs au sein des médias d’information canadiens, Joynt (1995) souligne
que « le Canada a changé […] mais pas nos principaux quotidiens ». Citant les propos
recueillis lors d’entrevues avec plusieurs journalistes de couleur, elle explique qu’« il est
décourageant de constater que le problème de l’invisibilité est très répandu » (Joynt, 1995).
Se faisant l’écho des déclarations citées par Joynt dans son article, plusieurs journalistes
d’antenne et réalisateurs ont également dit à quel point la prépondérance des Blancs dans
la salle de presse de leur entreprise respective les mettait mal à l’aise. La journaliste de
CITY-TV Irshad Manji, originaire de l’Asie du Sud-Est, a parlé de sa propre expérience
dans le milieu journalistique (1995). Elle a raconté que lorsqu’elle faisait partie du conseil
rédactionnel du Ottawa Citizen, « il y avait peut-être cinq personnes de couleur dans la
salle de presse » (Manji, 1995, p. 2). Elle ajoute que la solution n’est pas simplement
24
d’embaucher plus de représentants des minorités ethniques — mais plutôt des gens qui
comprennent comment on peut lutter contre le racisme et qui « sont décidés à faire valoir
leur opinion » (ibid). Cynthia Reyes, réalisatrice, spécialiste du changement, membre d’une
minorité visible et employée de la Canadian Broadcasting Corporation, a fait les
observations suivantes dans une lettre adressée au magazine Scan : « Les journaux, les
magazines, la télévision et la radio devraient être puissamment inspirés par les
innombrables facettes que présente [la magnifique diversité de ce pays qu’est le Canada].
Le fait que la plupart des médias n’ont pas réussi à exploiter cette occasion qui leur est
présentée sur un plateau peut être qualifié d’échec retentissant. » Signalant la
prédominance des Blancs dans la salle des nouvelles nationales, elle demande : « Où est
la couleur, où sont les accents, où est la diversité d’expériences humaines? »
(Reyes, 2000). Dunn et Mahtani (2001) et Mahtani (à paraître) ont interviewé plusieurs
femmes journalistes, y compris des journalistes de couleur, afin d’explorer leurs points de
vue sur l’image des minorités ethniques dans les médias. La plupart de ces entrevues ont
révélé qu’avant tout, ces femmes estiment qu’il y a vraiment bien trop peu de journalistes
de couleur. Se fondant sur l’observation des pratiques dans les salles de presse, l’étude
a permis d’examiner les contextes changeants de la construction médiatique, les idées que
partagent les réalisateurs d’émissions de nouvelles, les rédacteurs en chef et les
journalistes sur la question raciale, ainsi que l’absence d’employés appartenant à des
minorités ethniques parmi le personnel chargé de la rédaction dans ces salles de
nouvelles, afin de situer les luttes qui sont menées au sein des entreprises médiatiques.
Ce qui précède résume de façon générale la documentation concernant les représentations
des minorités par les médias canadiens. Même si ces études citent et répertorient
minutieusement les types d’images données des minorités, j’estime qu’il s’agit de rapports
largement descriptifs, qui n’examinent pas nécessairement les causes de ces
représentations insatisfaisantes, leur impact sur les différentes manières d’appréhender
l’État-nation, ni les solutions possibles pour remédier à l’absence des minorités ou à
l’image négative et stéréotypée que l’on en donne. Certains spécialistes interviewés à ce
propos ont suggéré que les recherches futures devaient situer les voies de recours dont
disposent les minorités visibles pour combattre de telles images. Plusieurs domaines
présentent un certain potentiel pour les chercheurs. Dans la section qui suit, je soulève
plusieurs questions, lesquelles émergent de cette recension de la documentation existante,
ainsi que d’entrevues avec des professionnels des médias et des universitaires qui s’y
intéressent.
4. Questions théoriques et empiriques : de nouveaux horizons pour la recherche
J’ai interviewé, entre janvier et mai 2001, des chercheurs canadiens spécialisés dans le
secteur des médias, afin de repérer les voies où pourraient s’engager de nouvelles
recherches concernant les relations entre les médias et les minorités. Parmi les personnes
que j’ai interviewées se trouvaient des universitaires qui s’intéressaient aux questions
soulevées par la représentation des minorités et qui enseignaient diverses disciplines
comme les communications, la sociologie, la géographie, le journalisme et l’histoire. J’ai
également interviewé des professionnels du milieu des médias — y compris des directeurs
25
des médias dans le secteur de la publicité, ainsi que des réalisateurs et des journalistes
de la télévision et de la radio. Les personnes dont les noms suivent ont eu l’obligeance
d’accepter d’être interviewées et d’être citées : John Miller, école de journalisme de
Ryerson; Prem Gill, CHUM-TV; Melanie Cishecki, MediaWatch; Augie Fleras, Université
de Waterloo; Joshua Greenberg, Université McMaster; Sean Hier, Université Ryerson et
Université McMaster; Carol Tator, Université York; Frances Henry, Université York; et Jean
Kunz, Développement des ressources humaines Canada. J’ai également interviewé
plusieurs réalisateurs de la télévision et de la radio, des rédacteurs en chef, des adjoints
à la production, des régisseurs et des journalistes qui souhaitent que leurs propos restent
confidentiels. Sur la base de ces entrevues et de mon propre examen critique de la
documentation disponible, je suggère des voies où pourraient s’engager les futures
recherches. De manière générale, on souhaite un éclairage nouveau par rapport aux
précédentes études dont les auteurs cherchaient avant tout à répertorier les méfaits
commis par les médias. Sans réduire l’importance de ces précédentes études, on désire
que soit élaborée une série de propositions et de recommandations fondamentales, qui
permettraient de dépasser le stade de la critique des images médiatiques des minorités,
pour parvenir à mieux comprendre les raisons pour lesquelles ces images stéréotypées
sont, en fait, tolérées. En particulier, il semble que l’on souhaite avec plus de force
provoquer des changements au sein des entreprises médiatiques elles-mêmes, en
produisant des études quantitatives et qualitatives où l’on analyserait la représentation des
minorités ethniques dans les médias. Ces recommandations sont les suivantes :
1.
En examinant les travaux portant sur les relations entre les médias et les minorités,
on relève d’importantes lacunes. Parmi les chercheurs et les professionnels de
l’information interviewés, beaucoup ont déclaré clairement qu’ils souhaitaient d’abord
plus d’analyses du contenu. Même s’il est vrai que l’analyse du discours a été le
principal outil méthodologique utilisé dans les rapports publiés jusqu’ici, nous avons
besoin d’études plus détaillées s’appuyant sur cette méthode. « [Nous avons besoin]
d’un plus grand nombre d’études dans lesquelles les auteurs emploieraient une
analyse critique du discours comme principal outil de recherche pour évaluer tous les
textes diffusés par les médias. Par exemple, nous aimerions faire des recherches sur
les médias électroniques, centrées particulièrement sur la programmation récréative
canadienne, c’est-à-dire les dramatiques et les émissions de divertissement
populaires », ont déclaré deux chercheurs spécialistes des médias. Nous pouvons
prendre pour modèle les groupes qui défendent les droits civiques aux États-Unis et
qui collaborent à la préparation d’analyses du contenu détaillées des dramatiques et
des comédies de situation diffusées à la télévision, présentées sous une forme
étudiée pour retenir l’attention de la presse nationale. Par exemple, une coalition
multiethnique regroupant la National Association for the Advancement of Colored
People, le National Latino Media Council, la National Asian Pacific American Media
Coalition, la National Hispanic Media Coalition et un groupe nommé American Indians
in Film collaborent pour produire un « bulletin » où est notée la couverture accordée
aux minorités par les réseaux, soulignant que même si les radiodiffuseurs américains
ont pris des mesures notables pour diversifier la programmation télévisée, les
Américains originaires des pays d’Amérique latine et d’Asie, ainsi que les
26
Autochtones, sont pratiquement absents des comédies de situation et des
dramatiques. Ces groupes font partie d’une coalition nationale qui, en janvier 2001,
a obtenu des quatre principaux réseaux américains (ABC, CBS, NBC et Fox) qu’ils
s’engagent par contrat à diversifier à la fois leur personnel et leur programmation.
Nous devrions envisager de financer des recherches similaires au Canada pour
produire des « bulletins » qui pourraient être utilisés pour inciter les réseaux
canadiens à signer le même type d’entente.
Mise à part la nécessité, signalée à plusieurs reprises, de produire des analyses du
contenu plus détaillées, ciblées sur la programmation récréative canadienne
(comédies de situation, dramatiques et films), pour combler les principales lacunes,
il faudrait réaliser une analyse des médias autochtones (voir Fraser, 1994) et de la
représentation des minorités ethniques par les médias francophones. Un chercheur
a fait remarquer : « Nous comparons rarement les médias anglophones et
francophones sur le plan de la diversité ethnique. » Des travaux supplémentaires
pourraient avoir pour objet de mettre en lumière l’influence d’autres éléments
constitutifs de l’identité comme le sexe, l’orientation sexuelle, le niveau d’aptitude,
l’âge, la situation socioéconomique, la religion et les différences régionales, sur la
consommation et la production d’images stéréotypées. « La problématique hommesfemmes doit être un thème central et primordial de nos analyses », a fait observer une
personne travaillant dans le milieu de l’information. Par exemple, peu d’études ont été
consacrées à l’image des femmes de couleur véhiculée par les médias (voir toutefois
Jiwani, 1995). Enfin, les travaux sur les médias électroniques sont extrêmement rares.
Même si Karim (1998) a effectué d’importantes recherches initiales sur les réseaux
de communication transnationaux établis par les diasporas et sur leur lien avec les
médias électroniques, il faudrait étudier de façon plus approfondie les rapports qui
peuvent exister entre, d’une part, les médias électroniques et, d’autre part, les
diasporas, la façon dont se forge leur identité et les processus de mondialisation.
Comment les minorités font-elles usage des médias électroniques? Ces questions
méritent d’être débattues et examinées plus avant.
2.
Autre centre d’intérêt : une analyse de la manière dont les minorités comprennent et
appréhendent l’image que reflètent d’elles les médias. Autrement dit, non seulement
faudrait-il étudier la réceptivité de l’auditoire en général, mais il serait également utile
de sonder des auditoires plus diversifiés. Comme le démontre un examen de la
documentation disponible, les études portant sur les réactions de l’auditoire sont rares
(voir toutefois Goldfarb, 1995; CAF, 1992; Lam, 1980). Pour de nombreux chercheurs,
il est impératif de chercher à mieux comprendre comment les minorités ethniques
appréhendent leur traitement par les médias. Qu’attendent-elles des mass media?
Comment perçoivent-elles le traitement qui leur est réservé? Quels mécanismes de
contrôle des médias ont-elles mis en place et quel a été leur impact? Que disent les
minorités raciales en tant que groupes (pas seulement les élites)? Adopter cette
perspective est utile pour répertorier les opinions des groupes ethniques à propos de
leur image et pour signaler d’autres points de vue dont la presse pourrait s’inspirer
pour les représenter. Des recherches de ce genre permettraient également de
27
comprendre comment les identités culturelles se forgent et sont reproduites à partir
d’images médiatiques (voir recommandation 3). Certaines des personnes
interviewées ont déclaré qu’il faudrait examiner la consommation des produits
médiatiques sous l’angle de la sexospécificité. Par exemple, en quoi diffère la
consommation de produits médiatiques des hommes et des femmes appartenant à
diverses minorités?
3.
Nous devons nous intéresser à d’autres méthodes pour étudier les relations entre les
médias et les minorités et leur impact sur la formation de l’identité. L’analyse du
contenu a été la technique que nous avons principalement utilisée pour démontrer
que les images stéréotypées ont un effet démoralisant sur les minorités. Toutefois,
parmi ces images, quelles sont celles qui sont les plus démoralisantes, pour quels
groupes et en quoi? Karim (1998) a suggéré que l’impact des médias sur la formation
de l’identité doit être systématiquement examiné. Certains chercheurs ont proposé
d’autres méthodes pour explorer le lien entre les habitudes de consommation des
auditoires, la formation de l’identité et les images qui sont données des minorités. On
peut, par exemple, envisager des consultations thématiques auprès de divers groupes
minoritaires pour discerner leurs interprétations des images véhiculées par les médias
(voir les travaux de Kelly, 1998; et de Bullock et Jafri, 2001). Il faut également
multiplier les entrevues individuelles et les consultations en groupe, pour explorer les
idées et les opinions des minorités à propos de leur représentation dans les médias,
notamment par rapport à la formation de l’identité. Nous ne pouvons pas nous
contenter de nous demander quel est le sentiment des minorités à propos de l’image
que donnent d’elles les médias. Il faut également examiner de façon systématique
comment des images négatives les affectent, sur le plan de l’actualisation et de
l’estime de soi. Comme on le suggère dans la recommandation 2, les interprétations
données par l’auditoire des images médiatiques constituent un important volet de
l’analyse des médias et sont lourdes de conséquences sur le sentiment
d’appartenance. Même si l’on a commencé à examiner ce lien de cause à effet, il
serait utile d’encourager la réalisation d’autres études sur ce thème.
4.
En traitant les groupes minoritaires comme des entités homogènes, nous ne tenons
pas compte d’autres facettes de leur identité qui influent sur la façon dont ils abordent
les médias en tant que consommateurs. Les personnes qui disent appartenir à un
groupe minoritaire ne sont pas toutes identiques. Par exemple, ce que nous appelons
la « communauté iranienne » est une mosaïque très diversifiée, dont les membres se
distinguent par l’orientation sexuelle, le sexe, la classe sociale et l’âge, pour ne citer
que ces caractéristiques, ce qui n’est pas sans influencer également la façon dont ils
réagissent, en tant que consommateurs, aux images véhiculées par les médias. Autre
exemple : les gens de « race mixte » (dont on dit aussi qu’ils sont biraciaux ou
d’origines ethniques multiples) constituent une communauté manifestement
hétérogène, notamment sur le plan de l’âge. « Alors que les immigrants plus âgés
semblent préférer un contenu s’inscrivant exclusivement dans le cadre de leurs
origines culturelles, les plus jeunes apprécient davantage une plus grande diversité, »
écrit Karim (1998). Les analyses où les minorités sont classées sans distinction dans
28
des catégories figées interdisent d’emblée certaines réflexions et partent du principe
que tous les gens qui se considèrent comme appartenant à un groupe minoritaire
vivent les mêmes expériences, alors qu’en fait, il n’en est rien (voir Mahtani, 2001).
Il faut étudier la relation entre la formation de l’identité, les images données des
minorités et les différences qui existent en leur sein même (voir par exemple les
travaux en cours de McAuliffe, qui analyse l’influence de la couverture médiatique des
questions touchant l’immigration sur la formation de l’identité des enfants d’immigrants
iraniens à Sydney et à Vancouver. Son étude commence à révéler les multiples
facettes des différences qui distinguent les membres de cette communauté). Dans le
contexte de la diversité des groupes minoritaires, il faut également considérer
comment des gens qui disent appartenir à deux groupes minoritaires ou plus
envisagent l’image que donnent d’eux les médias. Karim déclare : « Sous l’angle des
politiques culturelles et multiculturelles et de celles qui concernent la radiodiffusion,
l’hétérogénéité de la production culturelle et le métissage des identités sont lourds de
conséquences, particulièrement dans le contexte de la mondialisation »
(Karim, 1998). Il nous reste encore à sonder les opinions des Canadiens de « race
mixte » sur l’image que présentent d’eux les médias canadiens, ou encore celles des
francophones qui appartiennent également à divers groupes minoritaires, comme les
Grecs francophones ou les francophones originaires de l’Asie du Sud.
5.
Le domaine de recherche dont nous parlons ici est essentiellement pluridisciplinaire.
Même si ce domaine de recherche connaît actuellement une croissance exponentielle
au Canada, il est impératif, pour dégager le sens des études en cours, de rassembler
le groupe extrêmement disparate de chercheurs spécialisés en communications, en
études ethniques, dans l’étude de la condition féminine, en sociologie, en études
canadiennes, en psychologie, en études culturelles et en géographie — pour ne citer
que ces disciplines —, qui participent au débat. À l’heure actuelle, ces recherches
manquent d’homogénéité. Je suggère, pour réunir ces différents courants de pensée
et mettre en commun nos connaissances, une conférence ou la publication d’un livre
(Karim Karim a d’ailleurs lancé ce projet)3. Il faudrait d’ailleurs que de telles initiatives
soient prises non seulement par le projet Metropolis, mais aussi par des organes du
gouvernement comme le CRTC ou le ministère du Patrimoine canadien, ainsi que par
d’autres organismes comme MediaWatch et CHUM-TV, CBC ou la SRC, etc.
6.
Il faut examiner de façon plus précise le rôle que peuvent jouer les médias ethniques
pour combattre les images négatives données des minorités par les médias. En
particulier, quel est leur impact sur la presse grand public? Plusieurs chercheurs ont
déclaré qu’il s’agit là d’une des questions essentielles à explorer dans le cadre de
futures recherches. Fraser (1994) a souligné à quel point il est important d’examiner
les industries culturelles à caractère ethnique qui permettent aux groupes minoritaires
de s’exprimer. On ne sait pas, cependant, si les grandes entreprises médiatiques ont
recours à la production des médias ethniques et si elles la diffusent. Il est rare de voir
3
Multiculturalisme Canada a octroyé les fonds nécessaires pour organiser un atelier international dans le cadre de la
conférence Metropolis organisée à Vancouver en 2000. Voir le site Web : www.canada.metropolis.net pour de plus
amples informations.
29
les reportages publiés dans la presse ethnique repris par les journaux grand public
ou les chaînes de télévision, et cette information est en fait victime d’une politique de
ghettoïsation et de ségrégation. Il faut découvrir des moyens de contrer cette politique
et d’ouvrir à ces reportages les colonnes de grands quotidiens comme The Globe and
Mail et The National Post, ou encore l’antenne de CTV, de CBC ou de la SRC.
Plusieurs des professionnels de l’information que j’ai interviewés ont déclaré qu’ils
avaient rarement recours aux médias ethniques comme source d’information.
Pourquoi la presse ethnique ne les intéresse-t-elle pas? Il serait également utile
d’explorer comment les médias ethniques et leurs « cerbères » perçoivent et
représentent les membres de leurs propres groupes. On a laissé entendre que les
médias ethniques ne donnent pas toujours une image positive du groupe qu’ils
représentent (Mahtani et Mountz, 2001). Ainsi donc, comment devrions-nous juger
les portraits composés par les médias ethniques? Est-ce que des portraits
autogénérés, mais souvent essentialistes, devraient être examinés du même œil
critique que des images médiatiques négatives?
7.
Est-ce que les entreprises médiatiques grand public du Canada continuent à penser
que leur « grand public » est uniquement composé de Blancs ou reconnaissent-elles
qu’il a de multiples visages? Mahtani (à paraître) vient d’explorer la question dans une
étude portant sur des radiodiffuseurs australiens (SBS) et néo-zélandais. Peut-être
certains chercheurs seraient-ils intéressés à faire une étude similaire au Canada.
Comment les médias grand public envisagent-ils leur auditoire? Qui, selon eux,
regarde, écoute et lit leurs produits? Quel est l’impact de la perception des médias de
leur auditoire; ces perceptions résisteraient-elles à la réalité des données
démographiques? Quelles mesures sont prises pour tenir compte de cette diversité?
Si les annonceurs commencent à se rendre compte du pouvoir d’achat croissant des
minorités, nous devrions chercher à déterminer si les autres mass media canadiens
reconnaissent le potentiel des groupes minoritaires en tant que consommateurs.
8.
Les chercheurs ont réussi à mettre en évidence les « méfaits » commis par les
médias. Toutefois, comme le démontre un examen des recherches antérieures dans
ce domaine, il nous reste encore à explorer leurs effets « bienfaisants ». La plupart
de nos analyses du contenu se sont concentrées sur les images négatives que l’on
pouvait relever. Si, toutefois, l’on répertoriait également les images positives, nos
analyses du discours médiatique pourraient fort bien être plus nuancées. Je suggère
que l’on fasse des études de cas et que l’on interviewe des réalisateurs et des
journalistes qui se sont donné pour but de créer des émissions pour un auditoire
diversifié et de donner une image exacte des minorités — ce qu’ont fait des
radiodiffuseurs comme CITY-TV et CHUM-TV. Dans l’optique d’une représentation
plus équitable des minorités, la collaboration et le partage des connaissances sont
sans doute les méthodes les plus appropriées, et des consultations thématiques
auprès de divers groupes minoritaires seraient donc probablement utiles. Les
questions suivantes pourraient être posées : Dans quelles circonstances les médias
reflètent-ils et éclairent-ils le thème de la diversité? Quel est l’impact de ces images
positives sur l’estime de soi et sur la formation de l’identité au sein des minorités?
30
Nous pourrions également nous inspirer de « Let’s Do It Better », un atelier sur la race
et l’ethnicité organisé à l’intention des journalistes professionnels à l’Université
Columbia, aux États-Unis : des exemples particulièrement frappants de reportages
à caractère racial et ethnique sont utilisés pour provoquer un débat et inciter les
journalistes des salles de presse américaines à apporter des changements à leurs
programmes (Morgan, 2001). Dans le cadre de ce projet, mis en branle grâce à une
subvention de la Fondation Ford, des journalistes soumettent leurs reportages à un
comité chargé de choisir ceux qui éclairent le mieux le vécu des diverses races qui
constituent la société américaine. Je recommande que l’on envisage un programme
semblable au Canada. Il pourrait intéresser notamment les journalistes qui n’ont pas
une très bonne opinion des cours de formation sur la diversité, mais qui sont tout à
fait disposés à apprendre de leurs collègues comment améliorer la couverture qu’ils
accordent aux communautés ethniques et raciales (Mahtani, à paraître).
9.
Sous quelle forme le nationalisme imprègne-t-il les représentations des minorités
ethniques par les médias? Les chercheurs ont analysé la sous-représentation et la
représentation erronée des groupes minoritaires, mais il nous reste à mettre
pleinement en lumière ce qui dénote un courant de pensée sous-jacent, axé sur la
prédominance des Blancs, le biculturalisme et le nationalisme, qui perpétue ces
représentations. Les études où l’on examine le biculturalisme, le bilinguisme et la
diversité religieuse dans les médias sont très rares. C’est un domaine qui demande
à être exploré de façon plus approfondie et où des recherches pourraient fort bien
être complétées par des études comparatives (comme la recherche que mène
actuellement Hier, qui porte sur la représentation médiatique des « migrants
clandestins », en se fondant sur des données comparatives).
10. Quel a été l’impact structurel du multiculturalisme officiel sur les représentations
médiatiques des minorités? Comment les retombées du multiculturalisme ont-elles
influencé les images données des minorités? Même si l’on présume que ces images
médiatiques sont plus positives dans les sociétés multiculturelles, de nombreux
théoriciens spécialisés en discrimination raciale suggèrent que des formes complexes
de racisme peuvent émerger dans des pays où le multiculturalisme est officialisé par
la loi (Bhabha, 1994). La politique multiculturelle du Canada, en tant que toile de fond
de l’identité canadienne, sert souvent à rendre invisibles certaines formes de racisme
institutionnalisé. Comment cela se manifeste-t-il dans les salles de presse et au sein
des organismes de radiodiffusion du Canada? Un chercheur a recommandé des
études auprès de l’auditoire portant sur l’identité nationale et le contenu médiatique.
Il a notamment suggéré :
Quels types d’interprétation culturelle les nouveaux immigrants (et les
Canadiens non anglophones) donnent-ils du contenu d’une programmation
dont le thème sous-jacent est le nationalisme — par exemple, les sports
olympiques, les référendums constitutionnels, les campagnes politiques
fédérales?
31
Les chercheurs pourraient, par exemple, interviewer des gens qui ont subi les
conséquences néfastes d’une représentation négative des minorités ethniques, afin
de mieux évaluer dans quelle mesure les médias encouragent ou découragent le
respect de la politique multiculturelle. Même s’il existe d’excellentes études
systématiques des médias (voir Greenberg, 2000), de nombreux chercheurs ont
souligné qu’il faudrait s’engager dans d’autres recherches pour déterminer dans quelle
mesure le multiculturalisme entrave ou facilite la diversification du contenu médiatique.
Par exemple, certains chercheurs ont recommandé une analyse critique de l’efficacité
des campagnes d’information publique financées par le gouvernement, dans le but de
promouvoir le multiculturalisme, de lutter contre le racisme et d’influer sur les opinions
des Canadiens à propos des origines raciales et-ou de faire évoluer leur attitude à cet
égard. Les campagnes de sensibilisation du public, les vidéos, les affiches et les
placards publicitaires dénigrant le racisme et la discrimination ont-ils fait chuter le nombre
de crimes motivés par la haine et ont-ils servi à estomper les préjugés? Là encore, quel
est le sentiment des groupes minoritaires à l’égard de ces campagnes?
11. Plusieurs chercheurs soulignent la nécessité d’examiner les courants de pensée
dominants à propos des minorités ethniques qui s’expriment dans les salles de presse
du Canada. Malheureusement, rares sont ceux d’entre nous qui ont eu l’occasion
d’interviewer des gens qui travaillent dans ce milieu, principalement parce qu’il est
difficile d’y pénétrer et également parce que beaucoup de ces professionnels sont
préoccupés par la question de la confidentialité de leurs propos (Mahtani, à paraître).
Il est toutefois jugé essentiel de localiser l’étude de la représentation des minorités
ethniques au moyen d’une analyse des pratiques organisationnelles et des
comportements dans les lieux mêmes de production. Des chercheurs ont suggéré
d’aller directement « à la source » — dans les entreprises médiatiques ellesmêmes — pour mieux comprendre pourquoi ces images négatives prolifèrent. Il faut
élargir l’étendue des études existantes en interviewant des professionnels des
médias — notamment, des journalistes — pour comprendre les mécanismes porteurs
de représentations faussées et stéréotypées. Qui prend les décisions concernant la
représentation médiatique des minorités? Comment se comparent la représentation
des minorités au sein des institutions et la représentation des minorités dans les
médias? Les minorités ethniques participent-elles à la production de ces images? Le
fait qu’il y ait, dans le secteur de la production médiatique, un plus grand nombre
d’employés appartenant à des minorités ethniques, change-t-il quoi que ce soit? Ces
employés sont-ils réellement réduits au silence dans les salles de presse, comme
certains l’ont suggéré? (Mahtani, à paraître; Henry et Tator, 2000; Henry, 1999).
Autrement dit, quel est le vécu des gens de couleur qui travaillent dans le milieu des
médias? Selon un chercheur, on devrait « principalement s’intéresser aux
expériences des professionnels de l’information qui appartiennent à des minorités et
qui travaillent dans des milieux relativement homogènes […] Est-ce que la question
de leur identité ethnique entre davantage en ligne de compte que celle de leurs
collègues blancs? » John Miller a recommandé d’effectuer une étude semblable à
celle qu’il a faite en 1994 sur la représentation des minorités dans les entreprises.
Cette recommandation est appuyée par d’autres chercheurs, qui suggèrent
32
d’entreprendre des analyses quantitatives pour recueillir plus de données statistiques
sur le nombre des employés appartenant à des minorités qui travaillent dans les
coulisses des diverses entreprises médiatiques. Par exemple : « Combien de cadres,
de responsables de la programmation, de réalisateurs, de rédacteurs, etc.
appartiennent à des minorités visibles, ethniques ou religieuses? S’ils sont peu
nombreux, comment s’y prendre pour changer cet état de fait? » Nous pouvons
également nous inspirer de plusieurs études approfondies commandées par le
gouvernement américain, lesquelles ont permis d’examiner la représentation des
minorités dans les médias. Par exemple, le rapport Kerner, commandé par Lyndon
Johnson en 1967 pour étudier les liens entre les médias et les émeutes raciales qui
secouaient les États-Unis à l’époque, s’est révélé très précieux car il a établi qu’une
couverture faussée et inadéquate des relations raciales contribuait largement au
désespoir et à l’aliénation que les Afro-Américains continuaient de ressentir
(Newkirk, 2000). Nous ferions bien d’envisager de semblables études au Canada.
Enfin, il n’existe aucune ligne directrice ni code définissant, à l’intention des
personnels de l’information, ce que l’on entend par représentation équitable des
minorités. Il serait sans doute souhaitable d’obtenir la collaboration de journalistes et
autres professionnels des médias à la fois réputés, expérimentés, et appartenant à
des minorités, pour élaborer des codes antiracistes qui pourraient être utilisés par
tous les gens qui travaillent dans le milieu des médias. Freedom Form a publié un
manuel intitulé « Best Practices for Television Journalists » qui compte un chapitre sur
l’impartialité et la discrimination raciale (Westin, 2000). Nous pourrions demander à
des journalistes et à des chercheurs canadiens s’intéressant aux médias de collaborer
à la rédaction d’un tel manuel. Je sais que lorsque j’ai effectué mes propres
recherches, des journalistes se sont dits intéressés à ce genre de guide, affirmant
expressément qu’ils ne voulaient pas se servir de manuels américains (Mahtani, à
paraître).
12. Dans la veine de la recommandation précédente, il serait très utile que les chercheurs
spécialistes des médias établissent des contacts plus étroits avec les entreprises
médiatiques. Ce n’est manifestement pas facile étant donné le « sectarisme » qui
règne dans ces diverses institutions. Il faut toutefois que les contacts avec les
personnels de l’information se multiplient si l’on veut les amener à reconnaître que
l’image qu’ils donnent des minorités contribue à entraver le développement de la
citoyenneté culturelle au Canada. Le fait que les professionnels des médias ne se
rendent souvent pas compte que leurs représentations des groupes minoritaires sont
trop rares ou erronées est au cœur du problème (Dunn et Mahtani, 2001; Mahtani, à
paraître). Lorsqu’ils s’en rendent compte, ils optent souvent pour le laisser-faire —
estimant que le problème est trop profondément enraciné dans la structure même de
l’entreprise et qu’il est donc pratiquement impossible de s’y attaquer. Il faut donc que
nous trouvions des moyens de nous faire entendre des professionnels de l’information
et de rendre les résultats de nos recherches plus accessibles — en les publiant
ailleurs que dans des revues universitaires spécialisées — si nous voulons
encourager d’autres types de représentation et proposer une formation sur la diversité
qui leur sera utile. Henry et Tator (1999) ont pris des initiatives particulièrement
33
efficaces en ce sens, en produisant des rapports sommaires et des analyses d’une
page à l’intention de diverses entreprises médiatiques grand public. Là encore, nous
pourrions prendre pour modèle les États-Unis et mettre en place, ici, au Canada, des
programmes de premier plan mettant en lien le milieu universitaire et le milieu des
médias, comme ceux qui ont donné de si bons résultats de l’autre côté de la frontière.
Par exemple, le Western Knight Center for Specialized Journalism (Annenberg School
for Communication, University of Southern California) offre une série de séminaires
donnés par des chargés de cours, qui permettent aux journalistes d’apprendre
comment assurer une couverture équitable des questions concernant l’immigration.
Dans ces séminaires, les journalistes étudient les courants actuels d’immigration,
analysent la politique fédérale sur l’immigration actuellement en vigueur ainsi que les
réformes qui sont envisagées, examinent les données recueillies au cours du
recensement 2000 sur l’immigration légale et clandestine, étudient l’impact de
l’immigration sur les structures sociales et politiques locales, comme les écoles
publiques, et explorent, entre autres, l’intégration culturelle et sociale. Un tel
programme démystifie l’immigration en fournissant des chiffres et des données
exacts, donne aux journalistes la possibilité de comprendre le contexte et le contenu
des politiques, et les incite à débattre, entre eux et avec des universitaires spécialistes
des questions d’immigration, leur conception de la question raciale en Amérique et
la façon dont ils couvrent ce sujet. Rien ne nous empêche de mettre sur pied un tel
programme, en faisant par exemple appel aux spécialistes de Metropolis, en
encourageant une collaboration avec d’autres groupes qui offrent une formation sur
la diversité et en regroupant et en partageant nos connaissances en la matière.
13. Plusieurs des chercheurs que j’ai interviewés ont recommandé de faire plus
d’examens théoriques des médias. Comme on l’a noté ci-dessus, le cadre de la
plupart des documents produits sur les relations entre les minorités et les médias est
dualiste, puisque ceux-ci font principalement état d’une sous-représentation ou d’une
représentation erronée. Un chercheur a suggéré de faire une étude en profondeur des
documents pédagogiques utilisés dans le secteur des communications au Canada :
« Dans quel cadre s’inscrit l’enseignement des communications au Canada? Quelles
problématiques touchant l’étude critique des communications une telle étude mettraitelle au grand jour? Un examen des cours et des manuels portant sur la production
télévisuelle, complété par des entrevues avec des professionnels de l’information
blancs et non blancs faciliterait ce genre d’étude critique. » Sur le plan de la théorie,
comme l’ont signalé plusieurs chercheurs que j’ai interviewés, nous accusons un
retard considérable par rapport aux recherches actuellement en cours aux États-Unis
et au Royaume-Uni.
14. De quelle façon le régime de propriété des médias, de plus en plus monopolistique,
affecte-t-il l’équité des représentations qui sont données des minorités? C’est une
question particulièrement importante dans notre pays, vu les restrictions budgétaires
et les nombreuses compressions de personnel pratiquées dans divers quotidiens d’un
océan à l’autre. Quel effet, donc, la structure de propriété médiatique peut-elle avoir
sur les reportages présentés aux Canadiens sur les minorités ethniques? Quelles en
34
sont les conséquences dans les régions rurales, où les reportages que les gens
peuvent lire dans leur journal local ont pour seule source la presse canadienne grand
public (Mahtani et Mountz, 2001)? Quel est le lien entre la représentation des
minorités et un régime de propriété collectif? (Winter, 1997). On a maintenu que
donner une image exacte des minorités n’entraînait pas des dépenses excessives
(Miller, 1998; Dunn et Mahtani, 2001). On pourrait fort bien examiner la question en
interviewant des gens qui travaillent dans le milieu de l’information au Canada, dans
le cadre d’une étude libre, qualitative et approfondie. Certains chercheurs ont suggéré
d’examiner comment nos produits médiatiques se vendent de l’autre côté de la
frontière et à travers le monde. On a émis l’hypothèse que les produits médiatiques
présentant une plus grande diversité ethnique se vendent mieux à l’étranger. Il
faudrait entreprendre des études pour explorer le lien entre les ventes de produits
médiatiques et la représentation équitable de la diversité ethnique.
5. Conclusion : Comment passer du blâme à l’élaboration de solutions et de
stratégies
Ce document souligne que l’image médiatisée des groupes minoritaires au Canada, ainsi
que les reportages qui les concernent, influence grandement la façon dont la population
perçoit les minorités canadiennes. Une série de recherches pluridisciplinaires démontre
que les minorités sont régulièrement stéréotypées par les mass media. Les images
véhiculées par les médias peuvent promouvoir la tolérance et l’harmonie ou encore la
crainte et une attitude négative. Lorsque les médias représentent sans discernement les
minorités du Canada, c’est le pays au complet qui en subit les conséquences. Notre tâche,
à titre de chercheurs, est peut-être de créer un « front uni » pour lutter contre la
prépondérance de ces images stéréotypées, en perfectionnant nos analyses du discours
et en les complétant d’études menées en collaboration avec les professionnels des médias,
afin de débusquer les causes de la prolifération continue de ces images. Le milieu des
médias doit être amené à envisager et à créer d’autres images des minorités, et c’est peutêtre à nous de collaborer avec les personnels concernés pour les inciter à les produire. Les
chercheurs interviewés dans le cadre du présent rapport ont recommandé des orientations
s’appuyant sur de nouvelles approches méthodologiques. Ces approches pourraient ouvrir
la voie, au Canada, à une représentation médiatique davantage inclusive et équitable des
minorités, lesquelles seraient non plus marginalisées mais au contraire considérées
comme faisant partie intégrante de l’État-nation canadien.
35
Remerciements
J’aimerais remercier les nombreux professionnels des médias et les chercheurs qui ont eu
l’amabilité de me communiquer leurs idées et leurs opinions sur les orientations que
pourraient prendre les recherches futures. Je remercie également les professeurs Jean
Kunz et Karim Karim qui ont eu la gentillesse de commenter une première version de ce
document. Je voudrais enfin saluer bien bas l’apport de John Biles et de Christine Racicot,
qui m’ont tous deux fourni des analyses et suggestions judicieuses.
36
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