Sénégal

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Sénégal
LA GESTION DU PLURALISME EN
PERIODE ELECTORALE :
L’EXPERIENCE DU SENEGAL
AVEC LE CONSEIL NATIONAL DE
REGULATION DE L’AUDIOVISUEL.
1
INTRODUCTION
La régulation de l’audiovisuel a une histoire au
Sénégal. Depuis les indépendances, trois
organes de régulation du secteur de l’audiovisuel
se sont succédés avec pour mission de surveiller,
d’accompagner et d’aider au développement du
secteur. Il s’agit du Haut Conseil de la Radio
Télévision (HCRT en 1991) puis du Haut Conseil
de l’Audiovisuel (HCA en 1998) et actuellement
du Conseil National de Régulation de
l’Audiovisuel (CNRA depuis 2006).
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INTRODUCTION
Créé pour apporter des réponses
pragmatiques face aux défis du nouveau
paysage audiovisuel et pour anticiper sur
l’évolution de notre système audiovisuel,
le Conseil National de Régulation de
l’Audiovisuel, conformément à la loi
n°2006-04 du 4 janvier 2006, a pour
mission, entre autres de veiller:
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INTRODUCTION
-à l’indépendance et à la liberté de l’information et de la
communication dans le secteur de l’audiovisuel ;
-au respect de la loi et à la préservation des identités
culturelles ;
- à l’objectivité et au respect de l’équilibre dans le
traitement de l’information véhiculée par les médias
audiovisuels ;
- au respect de l’accès équitable des partis politiques, des
syndicats et des organisations reconnues de la société civile
aux médias audiovisuels dans les conditions fixées par les
lois et règlements en vigueur.
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INTRODUCTION
En outre, le CNRA exerce une double action lors des
campagnes électorales :
-il doit veiller au respect de l’équité, du pluralisme et de
l’équilibre de l’information qui exigent, en période de
campagne électorale une vigilance toute particulière ;
- il lui appartient, pour les élections donnant lieu à une
campagne officielle radiotélévisée, de fixer les
conditions de production, de programmation et de
diffusion des émissions prévues par les lois et
règlements.
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INTRODUCTION
Depuis sa création, le CNRA qui a pu superviser les
élections présidentielles et législatives de 2007, les
élections sénatoriales de 2008 et les élections
locales de 2009, reste le véritable arbitre de la
campagne électorale au niveau des médias. De la
vigilance et de la pertinence de ses interventions
dépendra en grande partie un bon déroulement de
celle-ci.
Dans le cadre de notre de notre étude, nous allons
adopter le plan suivant :
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I. LES FONDEMENTS DE LA COMPETENCE
DU CNRA
II. LES STRATEGIES DE GESTION DU
PLURALISME EN PERIODE ELECTORALE
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I. FONDEMENTS DE LA COMPETENCE DU CNRA
Une élection constitue un temps fort de la
vie politique d’une nation. C’est un moment
privilégié pendant lequel différents projets
s’affrontent. A cet égard, la presse a une
grande responsabilité qui va au delà des
élections.
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I. FONDEMENTS DE LA COMPETENCE DU CNRA
Au Sénégal et comme dans la plupart des pays
démocratiques, les médias audiovisuels ont été
intégrés par le législateur à l’arsenal mis à la
disposition des partis politiques et des candidats
pour aller à la conquête des suffrages. C’est ainsi
qu’ils deviennent partie intégrante du processus
électoral et sont placés sous la responsabilité du
CNRA.
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I. FONDEMENTS DE LA COMPETENCE DU CNRA
En période électorale, cette compétence du
CNRA, élargie à la presse écrite est prévue par
la loi n°92-16 du 07 février 1992 portant Code
électoral et la loi n° 2006-04 du 4 janvier 2006
portant création du CNRA.
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I.1. Le Code électoral
Le CNRA est le maître d’œuvre de la
campagne électorale dont la couverture
médiatique se fait sous sa supervision et sous
son contrôle conformément aux dispositions
de la loi n°92-16 du 07 février 1992 portant
Code électoral qui distingue la gestion de la
précampagne et celle de la campagne
proprement dite.
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I.1.1. La gestion de la précampagne électorale
La campagne électorale débute, particulièrement
dans les médias audiovisuels, bien avant la date
d’ouverture de la campagne officielle fixée par le
législateur. Durant cette période appelée
précampagne, la mission du Conseil est tout
aussi essentielle pour veiller au respect des règles
d’équité et de pluralisme entre les candidats, les
partis politiques et coalitions de partis politiques
par les différents médias dans le traitement de
l’information.
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I.1.1. La gestion de la précampagne électorale
La précampagne est régie par les dispositions de l’article L.59
du Code électoral. Elle couvre les 30 jours précédant
l’ouverture de la campagne officielle électorale. Durant cette
période, le législateur interdit formellement toute
propagande électorale ayant pour support les médias
nationaux, publics et privés (à l’exclusion des médias
transnationaux).
L’alinéa 2 du même article définit les actes de propagande
électorale déguisée comme toute manifestation ou
déclaration publique de soutien à un candidat ou à un parti
politique ou coalition de partis politiques, faite directement
ou indirectement par une personne ou association ou
groupement de personnes quelle qu’en soit la qualité, nature
ou caractère.
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I.1.1. La gestion de la précampagne électorale
Sont également assimilées à des propagandes ou
campagnes déguisées, les visites ou tournées à caractère
économique, social ou autrement qualifiées, effectuées
par toutes autorités de l’État sur le territoire national et
qui donnent lieu à de telles manifestations ou
déclarations.
Le CNRA est chargé de veiller à l’application stricte de
cette interdiction. Il doit, en cas de contravention,
proposer des formes appropriées de réparation au
bénéfice de tout candidat, parti ou coalition de partis
lésés qui doivent le saisir d’une plainte.
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I.1.1. La gestion de la précampagne électorale
En dehors de la réparation, des sanctions
administratives ou pécuniaires peuvent être
prononcées par l’organe de régulation des
médias conformément à l’article 26 de la loi
2006-04 du 4 janvier 2006 portant création
du CNRA.
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I.1.2. La gestion de la campagne électorale
La campagne électorale est ouverte 21 jours
avant le scrutin. Elle prend fin la veille du jour
du scrutin. C’est une période d’intense
communion politique entre les électeurs et les
candidats qui sollicitent leurs voix. En raison
de sa sensibilité, des dispositions spéciales ont
été adoptées en vue de mieux garantir le
respect des principes d’égalité, d’équité et de
pluralisme des
candidats aux différentes
élections.
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I.1.2. La gestion de la campagne électorale
Conformément à l’article LO.121 du Code
électoral, l’organe de régulation des médias
assure l’égalité entre les candidats à l’élection
présidentielle dans l’utilisation du temps
d’antenne et intervient, le cas échéant, auprès
des autorités compétentes pour que soient
prises toutes mesures susceptibles d’assurer
cette égalité.
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I.1.2. La gestion de la campagne électorale
En outre, et en ce qui concerne les médias privés, le
CNRA veille à l’équité et à l’équilibre dans le traitement
des informations sur les activités des différents
candidats.
L’article LO.125 de ce code modifié par les lois
organiques n°98-13 du 05 mars 1998, n° 97-17 du 08
septembre 1997, n°2000-21 du 07 février 2000 et n°97-16
du 08 septembre 1997 organise la compétence du CNRA
relativement à la production et à la diffusion des
messages des candidats durant l’émission radiotélévisée
dénommée « journal de la campagne ».
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I.1.2. La gestion de la campagne électorale
Concernant les élections législatives, les
dispositions des articles LO.121 à LO.124 du Code
électoral sont applicables.
Toutefois, précise l’article LO.178, le temps
d’antenne mis à la disposition des candidats est
divisé en deux fractions dont la quotité est
déterminée par le CNRA.
Pour le déroulement de la campagne électorale des
autres élections, le Code électoral renvoie aux
dispositions des articles LO.121 relatives au respect
des règles d’équité et de pluralisme.
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I.2. La loi n° 2006-04 du 4 janvier 2006 portant
création du CNRA
La loi n° 2006-04 du 4 janvier 2006 institue le
Conseil National de Régulation de l’Audiovisuel
qui est une « autorité indépendante » (art.1)
dont la juridiction s’étend à tous les médias
audiovisuels quel que soit leur statut juridique.
Conformément à l’article 8 de cette loi, le CNRA
fixe les règles concernant les conditions de
production, de programmation et de diffusion
des émissions réglementées des médias
audiovisuels pendant les campagnes électorales.
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I.2. La loi n° 2006-04 du 4 janvier 2006 portant
création du CNRA
C’est ainsi que durant les vingt et un jours que dure
la campagne électorale officielle, le CNRA veille à
une répartition égale ou équitable des temps de
parole sur les médias publics grâce à la supervision
d’une émission légale quotidienne appelée « journal
de la campagne » produite et diffusé par la RTS,
organe de l’audiovisuel public.
Cette émission permet à tous les candidats et à tous
les partis de s’exprimer et d’exposer leurs
programmes aux électeurs suivant un temps de
parole qui varie en fonction de l’élection et de la
représentativité à l’Assemblée Nationale.
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I.2. La loi n° 2006-04 du 4 janvier 2006 portant
création du CNRA
En outre, l’article 15 de cette même loi donne
mission au CNRA de superviser une émission
réservée aux partis politiques légalement
constitués et programmée toutes les deux
semaines, séparément à la radio et à la télévision
publiques pour leur permettre d’évoquer les
questions d’actualité nationale et internationale
sous forme de débats contradictoires.
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II. STRATEGIES DE GESTION DU PLURALISME
Les services de la radio et de la télévision
revêtent une place déterminante dans la
communication des partis politiques. Ils ont
l’obligation, lors des campagnes électorales,
d’appliquer strictement les règles du pluralisme
afin de donner à chaque candidat la possibilité
de se faire connaître des électeurs. Ainsi l’accès à
l’antenne des candidats de même que la gestion
de l’actualité électorale sont strictement
réglementés. Cette réglementation peut diverger
en fonction de l’élection mais aussi en fonction
du statut des chaînes de radio et de télévision.
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II. STRATEGIES DE GESTION DU PLURALISME
Les médias audiovisuels assument un rôle
fondamental dans la prise de conscience politique
du citoyen. Ils contribuent à le mobiliser et à
l’inciter à participer aux élections qui représentent
une étape majeure dans la vie démocratique d’une
nation. C’est aussi un mécanisme de participation
politique dans le choix de ses représentants dans la
gestion des affaires publiques.
La gestion de la période électorale dans les médias
audiovisuels exige la mise en place de plusieurs
dispositifs de nature à garantir :
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II. STRATEGIES DE GESTION DU PLURALISME
- d’une part, au citoyen-électeur une information
audiovisuelle libre, pluraliste et honnête, à même de lui
permettre de former, en toute indépendance et
connaissance de cause, sa propre opinion et sa conviction
sur les programmes électoraux en compétition et d’exercer,
de manière démocratique, son droit de vote ;
- et d’autre part, aux partis politiques, participant aux
élections, un accès équitable et régulier en temps d’antenne
et de parole pendant la période électorale.
Parmi ces dispositifs, il en existe qui sont communs à toutes
les élections comme la sensibilisation et la veille, et d’autres
spécifiques à certaines élections pour lesquelles il est prévu
une campagne électorale officielle radiotélévisée.
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II.1. La sensibilisation
La législation sur l’audiovisuel reste mal connue.
Aussi, plusieurs approches ont-elles été
identifiées par l’Assemblée du CNRA pour
amener les différents acteurs des différentes
élections à un niveau d’information appréciable
leur permettant de jouer parfaitement leur rôle.
A cet égard, le CNRA a initié une démarche
fondée sur des rencontres sectorielles, des
tournées, des points de presse et la publication
de communiqués et de recommandations.
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II.1.1. Rencontres sectorielles
Dans le cadre de la mise en œuvre des
stratégies élaborées pour une meilleure gestion
médiatique de la campagne électorale fondée sur
une approche consensuelle, le CNRA a organisé des
concertations sectorielles avec les différents acteurs
de ces élections, notamment la presse nationale, les
partis politiques et la société civile.
Durant ces rencontres, un accent particulier est mis
sur l’obligation faite à tous les acteurs de veiller :
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II.1.1. Rencontres sectorielles
au respect strict des principes d’équilibre, d’équité et de
pluralisme dans le contenu des messages diffusés ou
publiés par les médias à l’occasion de la campagne
électorale ;
au respect des dispositions de la Constitution, du Code
électoral, de la loi n°2006-04 du 4 janvier 2006 portant
création du CNRA, de la loi sur la presse, des cahiers de
charges et conventions régissant le secteur audiovisuel ;
à la nécessité d’éviter les discours violents, injurieux,
ethnicistes ou xénophobes ;
au respect formel de l’interdiction faite à la presse de
diffuser sous quelque forme que ce soit, des éléments de
propagande électorale après la fin de la campagne
prévue la veille du scrutin à zéro heure.
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II.1.2. Les tournées
Elles ont été l’occasion pour la délégation du
CNRA d’aller à la rencontre du Sénégal des
profondeurs pour échanger avec les autorités
administratives, les représentants des partis
politiques, de la société civile et de la presse sur la
couverture médiatique de la campagne électorale.
C’est ainsi que durant ces tournées, des ateliers de
sensibilisation et d’information ont été organisés
pour les acteurs de la campagne électorale se
trouvant dans toutes les régions du Sénégal.
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II.1.3. Points de presse.
Régulièrement, le CNRA a tenu des points de
presse pour faire l’évaluation de la campagne
électorale en cours : ce qui a permis de contrôler
et de réorienter en temps réel les stratégies
précédemment déterminées et mises en œuvre.
Ces points de presse ont permis aussi de rappeler
les dispositions législatives et réglementaires
régissant la campagne électorale tout en mettant
l’accent sur la responsabilité de la presse pour un
bon déroulement de la campagne.
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II.1.4. Publication de communiqués et de
recommandations
L’objectif des communiqués et des recommandations
du CNRA est de préciser le cadre général dans lequel
doit se dérouler la campagne électorale, en
demandant aux organes de presse de veiller à un
traitement équitable entre les candidats, les partis ou
coalitions de partis en présence.
Dans un souci de bonne information, le Conseil
rappelle également dans ses recommandations les
dispositions législatives ou réglementaires qu’il
convient de respecter durant la précampagne et la
campagne proprement dite.
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II.1.4. Publication de communiqués et de
recommandations
A titre d’exemple, durant les dernières élections
locales,
le
Conseil
a
publié
deux
recommandations pour rappeler les dispositions
légales relatives à la couverture médiatique des
élections et aussi pour fixer les règles pour un
traitement de l’information dans le respect des
principes d’équité, de pluralisme et d’équilibre,
notamment :
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II.1.4. Publication de communiqués et de
recommandations
La recommandation No1 du 20 janvier 2009 : elle rappelle les
dispositions légales relatives à la couverture médiatique des
élections, à savoir :
L’article L. 59 du Code électoral qui interdit la campagne déguisée
pendant la période de la précampagne qui s’étend du jeudi 29
janvier 2009 à zéro heure au samedi 28 février2009 à 24 heures ;
L’article L. 212 du Code électoral qui renvoie à l’article LO. 176 du
même Code qui fixe le démarrage officiel de la campagne électorale
au samedi 28 février 2009 à 24 heures ; celle-ci s’achève le vendredi
20 mars 2009 à zéro heure ;
La recommandation No 2 du 2 février 2009 qui fixe les règles
pour un traitement de l’information dans le respect des principes
de pluralisme, d’équité et d’équilibre.
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II.1.4. Publication de communiqués et de
recommandations
En résumé, l’approche du CNRA, axée sur la
sensibilisation et la concertation avec tous les
acteurs impliqués dans le processus électoral,
semble avoir des incidences positives sur les
différents aspects relatifs à la couverture de la
campagne électorale.
C’est ainsi qu’on a pu noter moins de dérives et
de réclamations dans le déroulement des
différentes campagnes électorales que nous
avons supervisées.
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II.2. Dispositif de veille
Il a toujours existé au niveau du CNRA un
dispositif permettant de superviser
les
programmes diffusés par les radios et
télévisions nationales. En période électorale, ce
dispositif est rendu plus performant par :
la mise en place d’un service de veille renforcé;
les délibérations de l’Assemblée du CNRA.
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II.2.1. le service de veille en période électorale
Afin d’organiser l’opération de suivi de la
campagne électorale, le CNRA a mis en place «
une cellule de veille » composée de toutes les
ressources humaines de l’institution renforcée
par des correspondants régionaux recrutés pour
la durée de la campagne électorale. Tout ce
dispositif fonctionne sous la supervision de
l’Assemblée générale du CNRA.
Cette cellule tenait des réunions quotidiennes,
pour examiner les rapports d’écoute et de suivi
des programmes des organes de la presse écrite et
audiovisuelle.
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II.2.1. le service de veille en période électorale
Sur la base de l’analyse de ces rapports,
l’Assemblée du Conseil a pu prendre des
décisions en temps réel pour sanctionner ou
corriger les dysfonctionnements notés dans la
couverture médiatique de la campagne électorale.
Les performances de ce service de veille qui ont
contribué de manière significative à maintenir le
nombre des plaintes des partis politiques
participant aux élections dans des proportions
raisonnables auraient pu être améliorées encore
si nous avions pu disposer d’un matériel d’écoute
performant.
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II.2.1. le service de veille en période électorale
Un tel matériel nous aurait permis de comptabiliser tous
les temps d’intervention des personnalités politiques
dans les programmes des radios et chaînes de télévision
nationales, notamment :
les temps d’intervention portant sur l’élection avec un
classement par formation politique, par listes ou
candidat suivant la nature de l’élection ;
les temps d’interventions de ces candidats portant sur
des sujets non liés directement aux élections ;
les temps d’antenne dans les journaux télévisés ;
les temps de commentaires ou d’analyses de journalistes
consacrés à chaque candidat, à une formation politique
ou à une liste.
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II.2.1. le service de veille en période électorale
Ce dispositif aurait permis de réduire au
maximum l’écart entre la diffusion des émissions
et leur visionnage, afin de disposer rapidement
d’une comptabilisation des temps de parole ou
d’antenne et permettre aux chaînes, à qui ces
relevés sont régulièrement communiqués, de
procéder en temps réel aux rééquilibrages
nécessaires.
Conscients de ces enjeux, nous avons acquis cette
année une salle de monitoring dont nous
comptons renforcer l’équipement avec le
concours de nos partenaires.
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II.2.2. les délibérations
Habituellement, le Conseil National se réunit tous les
quinze jours conformément à l’article 19 de la loi n°
2006-04 du 4 janvier 2006.
Toutefois, pendant la durée de la campagne
électorale, l’Assemblée se réunissait tous les jours pour
statuer sur les violations des dispositions législatives,
réglementaires ainsi que sur celles des conventions et
cahiers de charges relatives à la campagne électorale.
C’est ainsi que plusieurs dossiers ont été portés à
l’appréciation des Membres qui, après en avoir délibéré,
ont pris différentes mesures ayant donné lieu à des mises
en demeure, des décisions, des communiqués de presse
et des déclarations solennelles. (Voir annexe)
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II.2. Dispositions particulières aux élections donnant
lieu à une campagne officielle radiotélévisée
II.2.1. Les règles spécifiques à l’audiovisuel public
La radio et la télévision publique jouent un rôle très
important dans la formation de l’opinion publique lors
des campagnes électorales. De ce fait, elles doivent
assurer aux électeurs une information libre, équitable
et honnête afin qu’ils puissent exercer leur libre choix.
Pour ce faire, une réglementation spécifique a été mise
en place pour permettre à chaque candidat de
s’exprimer, librement et gratuitement, sur les antennes
du service public de la radio et de la télévision, à travers
le journal de « la campagne électorale ».
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II.2.1. Les règles spécifiques à l’audiovisuel public
Cette réglementation en période de campagne
officielle est stricte pour le secteur public. Les radios et
les télévisions publiques se voient imposer le respect
absolu des principes d’égalité ou d’équité de traitement
des candidats devant la réalisation, la programmation
et la diffusion de leurs émissions. Les organes de presse
de l’audiovisuel public se conforment strictement aux
décisions que prend le CNRA en vu d’organiser cette
propagande.
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II.2.1. Les règles spécifiques à l’audiovisuel public
Par exemple, ils sont tenus de respecter les règles
concernant : la durée des émissions, l’ordre de passage
des candidats, l’heure à laquelle chaque candidat est
programmé. Cette réglementation est stricte parce
que la campagne officielle représente avant tout un
objectif de service public.
Conformément aux dispositions du Code électoral
(articles 125 et suivants ) et de la loi 2006-04 portant
création du CNRA (article 8), le CNRA est chargé de
fixer les conditions de production, de programmation et
de diffusion des émissions relatives aux campagnes
électorales à chaque fois que la loi électorale prévoit
leur diffusion.
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II.2.1.1. Conditions de programmation
Avant l’ouverture de la campagne officielle présidentielle
ou législative, le CNRA soumet à la signature du président
de la République un projet de décret déterminant le
nombre, la durée et les horaires ainsi que les modalités de
leur réalisation (art. LO 125 du Code électoral).
Le temps d’antenne alloué aux candidats à l’élection
présidentielle est égalitaire alors qu’il est
proportionnel
lorsqu’il
s’agit
des
élections
législatives où il est divisé en deux fractions : une
première fondée sur l’égalité arithmétique entre les listes
de candidats et une seconde répartie proportionnellement
à la représentation parlementaire des partis politiques
ayant présenté des listes de candidats.
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II.2.1.1. Conditions de programmation
En sus du « journal de la campagne », le CNRA veille à
ce que les principes d’égalité ou d’équité soient
respectés dans les autres programmes d’information du
service public de la radiotélévision en ce qui concerne la
reproduction et les commentaires des déclarations, des
écrits, des activités des candidats et la présentation de
leur personne (art. LO 127 et 179).
En d’autres termes, la liberté de traitement
professionnel de l’information des journalistes,
conformément à l’éthique et à la déontologie, est
préservée à la seule condition que l’égalité ou l’équité
soient rigoureusement assurées.
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II.2.2. Conditions de production et de diffusion
La campagne en vue de l’élection du Président
de la République est fondée sur le principe général
d’égalité entre les candidats. Celui-ci a été institué
par l’article 32 de la Constitution et reprise par la Loi
organique n°2000-21 du 07 février 2000. Il prévoit
l’obligation, à compter du début de la campagne
officielle, de respecter un traitement égalitaire des
candidats dans leur accès aux médias.
46
II.2.2. Conditions de production et de diffusion
Quant
aux
élections
législatives,
et
conformément à la Loi organique n°97-16 du 8
septembre 1997 relative à la campagne électorale, le
principe d'équité entre les partis politiques est
agencé avec un principe d'équité s'appliquant
comme suit : « le temps d’antenne mis à la
disposition des candidats est divisé en deux
fractions dont la quotité est déterminée par l’organe
de régulation des médias :
47
II.2.2. Conditions de production et de diffusion
une fraction de temps répartie également entre tous
les partis politiques, coalitions de partis politiques
ou personnes indépendantes représentant les listes
des candidats ;
une fraction de temps d’antenne répartie
proportionnellement en tenant compte de la
représentation parlementaire des partis politiques
ayant présenté des listes de candidats.
Le temps et les horaires des émissions ainsi que les
modalités de leur réalisation sont fixés par décret
après avis de l’organe de régulation des médias ».
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II.2.2. Les règles appliquées aux organes de la presse
privée durant les campagnes électorales réglementées
Le secteur privé de la presse se doit simplement, en ce
qui concerne ces campagnes réglementées, de respecter
les recommandations édictées en ces périodes par le
CNRA relatives au respect des règles d’équité, d’équilibre
et de pluralisme.
Ces organes de presse ont moins de contrainte que les
chaînes publiques dans la mesure où ils ne sont pas
soumis à l’obligation de mettre à la disposition des
candidats des créneaux horaires destinés à la
propagande électorale. Cependant, ils sont placés sous le
contrôle du CNRA qui veille quotidiennement au respect
des règles précitées dans le contenu des programmes
consacrés à la campagne électorale.
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II.3. Les campagnes électorales non réglementées
Il s’agit des campagnes électorales des scrutins
référendaires, régionales, municipales et rurales.
Pour la première fois de sa jeune histoire, le
CNRA, créé par la loi 2006-04 du 4 janvier 2006,
avait la lourde tâche de superviser en mars 2009,
au niveau des médias de la presse écrite et
audiovisuelle, une campagne électorale dont les
règles n’ont été que timidement fixées par le
législateur sénégalais qui renvoie à de grands
principes comme l’équité, l’équilibre et le
pluralisme dont les contours restent encore à
préciser.
50
II.3. Les campagnes électorales non réglementées
Pendant ces élections locales, tous les organes de
communication ne sont tenus qu’au respect des
principes d’équité, d’équilibre et de pluralisme sans
aucune disposition réglementant les temps
d’antenne. Tout est laissé à l’appréciation des
organes de presse qui sont libres de programmer
leurs émissions mais dans le respect des règles
évoquées ci-dessus.
L’exécution de la mission de supervision de cette
campagne électorale s’est avérée ardue compte tenu
de la complexité de ces élections, du fait :
51
II.3. Les campagnes électorales non réglementées
du déroulement simultané et d’égale importance de la
campagne électorale sur toute l’étendue du territoire
national sans se focaliser sur les leaders des partis
politiques ;
de la quasi absence de normes juridiques précises
pouvant régir tous les contentieux susceptibles
d’apparaitre à l’occasion de cette campagne électorale ;
de l’inexistence de temps d’antenne organisés pour les
candidats.
Dès lors, et face au manque de moyens, il a fallu
imaginer des stratégies adaptées qui nous ont permis
d’atteindre nos principaux objectifs même si nous
sommes conscients que des améliorations peuvent
encore être apportées.
52
II.3. Les campagnes électorales non réglementées
C’est ainsi que nous avons préféré mettre l’accent sur la
sensibilisation au détriment de la sanction tout en
mettant en place un dispositif de veille. Ce qui nous a
permis de corriger en temps réel quelques
dysfonctionnements relevés durant cette période. (Voir
supra page 4).
Quelque soit la nature de l’élection et le support utilisé, le
CNRA peut, conformément à l’article L.125 du Code
électoral, s’opposer à la diffusion d’une émission de
campagne en cas de contravention aux règles posées par
la Constitution, notamment lorsque les propos du
candidat révèlent un manquement grave aux obligations
qui résultent de la loi fondamentale, singulièrement en ce
qui concerne le respect:
53
II.3. Les campagnes électorales non réglementées
– des caractères de l’État républicain, laïc et démocratique,
– des institutions de la République : statut et compétence,
– de l’indépendance nationale, de l’intégrité du territoire
et de l’unité nationale,
– et des libertés publiques.
L’instance de régulation devra alors saisir la Cour d’appel
de Dakar dans les 24 heures à compter de la réalisation de
l’émission. Cette saisine est suspensive de la diffusion de
l’élément incriminé. Si la Cour n’est pas saisie dans le délai
ou bien saisie ne se prononce pas dans les 48 heures
suivant sa saisine, l’émission doit être immédiatement
diffusée. Le législateur fait ainsi du CNRA un organe
chargé de veiller à la légitimité mais aussi à la moralité du
discours électoral.
54
CONCLUSION
55
Outre la gestion rigoureuse du scrutin sur la base de
l’égalité d’accès des partis politiques en lice aux médias,
et malgré la difficulté de la tâche, le CNRA accomplit sa
mission de supervision des campagnes électorales en
fondant sa démarche sur la concertation, le dialogue et
l’échange en vue de nouer un partenariat dynamique
avec les différents acteurs pour une bonne gestion de la
couverture médiatique des différentes élections, gages
de scrutins apaisés.
Cela a le mérite de dissiper les suspicions qui ont
marqué, tout au moins au départ, la dynamique des
relations entre les instances de régulation existant au
Sénégal, les partis politiques et les médias en général.
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Par cette démarche, et aussi grâce à la neutralité et à
l’impartialité de ses interventions, l’institution s’est forgée
une bonne réputation.
C’est ainsi que la presque totalité de nos décisions ont été
bien accueillies et respectées sans rechigner. A ce jour, une
seule décision du CNRA a fait l’objet d’un recours pour
excès de pouvoir devant le Conseil d’Etat. A titre purement
anecdotique, nous pouvons signaler en passant, que ce
recours a été rejeté par la juridiction administrative.
Mesdames, Messieurs, je vous remercie de votre aimable
attention
El Hadji Malick DIOP, Membre du Conseil National
de Régulation de l’Audiovisuel du Sénégal
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ANNEXES
Loi n° 2006-04 du 4 janvier 2006 portant création du CNRA.
Extraits du code électoral.
Décret n°2007-104 allouant un temps d’antenne à la radio et à la
télévision, aux candidats à l’élection présidentielle.
Décret n°2007-572 fixant la répartition du temps à la radio et à la
télévision, entre les listes et les coalitions de listes de candidats
aux élections législatives du 3 juin 2007 ainsi que les modalités de
production, de programmation et de diffusion de ce temps
d’antenne.
Communiqué n° 12 du 16 avril 2007 portant rappel des obligations
légales en période de précampagne et de campagne électorale.
Communiqué de presse n°14 du 9 mai 2007.
Communiqué de presse n°15 du 26 mai 2007.
Communiqué n°16 du 1 juin 2007.
Recommandation n°1 du 20 janvier 2009.
Recommandation n°2 du 02 février 2009.
Communiqué conjoint n°4 du 18 mars 2009.
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