Calcul intégral - Anthony Mansuy
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Calcul intégral - Anthony Mansuy
Chapitre 18 Calcul intégral 1 Intégration sur un segment 1.1 Définitions . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1.2 Techniques de calcul d’intégrales . . . . . . . . . . 1.3 Propriétés de l’intégrale . . . . . . . . . . . . . . . 2 Intégrales impropres 2.1 Définitions . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 2.2 Propriétés des intégrales impropres . . . . . . 2.3 Techniques de calcul des intégrales impropres 2.4 Intégrales de référence . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 2 2 6 8 9 9 10 12 15 Introduction Anthony Mansuy - Professeur de Mathématiques en supérieures ECE au Lycée Clemenceau (Reims) [email protected] ECE1 1 Lycée Clemenceau, Reims Intégration sur un segment 1.1 Définitions Surface délimitée par une courbe Définition. Soit f : [a, b] → R une fonction continue et positive sur un intervalle [a, b], avec a < b, et Cf sa courbe représentative dans un repère orthonormé. On note Af la fonction définie par: [a, b] → R x 7→ l’aire de la surface délimitée par Cf et l’axe Af : des abscisses entre les abscisses a et x Cf est la courbe représentée en rouge et Af (x) est l’aire de la surface représentée en grise sur l’exemple ci-contre. Remarque. Comme f une fonction continue et positive sur [a, b], Af est positive et croissante sur [a, b]. Propriété 1 (de la fonction Af ) Soit f : [a, b] → R une fonction continue et positive sur [a, b]. Alors la fonction Af est dérivable sur [a, b] et vérifie : ∀x ∈ [a, b], A0f (x) = f (x). Preuve. Ainsi, la fonction Af vérifie les deux conditions suivantes : • Af (a) = 0, • ∀x ∈ [a, b], A0f (x) = f (x). Ces conditions caractérisent la fonction Af . On dit que Af est la primitive de f qui s’annule en a. 2 ECE1 Lycée Clemenceau, Reims Primitives Définition. Soit f une fonction définie sur un intervalle I de R. On appelle primitive de f sur I toute fonction F : I → R telle que: • F est dérivable sur I. • Pour tout x ∈ I, F 0 (x) = f (x). Exemple. Déterminer une primitive des fonctions suivantes sur l’intervalle I donné: • f1 (x) = 3 et I = R • f2 (x) = 2x − 1 et I = R 1 • f3 (x) = √ et I =]0, +∞[ x • f4 (x) = 1 et I =]0, +∞[ x Théorème 2 (Primitives d’une fonction continue) (1) Toute fonction continue sur un intervalle I admet une primitive F sur I, qui est alors de classe C 1 sur I. (2) Si une fonction f est continue sur un intervalle I et si F est une primitive de f sur I, alors toute primitive de f sur I est de la forme F + k, où k est une constante réelle. Remarque. Ainsi, une fonction continue sur un intervalle I n’admet pas qu’une seule primitive sur I. On ne parle donc jamais de LA primitive mais d’UNE primitive d’une fonction. Propriété 3 (Primitives et opérations) Soient f et g deux fonctions admettant des primitives F et G sur un intervalle I et λ ∈ R. Alors : (1) F + G est une primitive de f + g sur I. (2) λF est une primitive de λf sur I. Remarque. ATTENTION: les primitives d’un produit f g ne sont pas le produit des primitives. En effet, (F G)0 = F 0 G + F G0 = f G + F g 6= f g. Théorème 4 (Primitives d’une composée) Soit f une fonction continue sur un intervalle I et F une primitive de f . Soit u une fonction continue et dérivable à valeurs dans I. Alors: Une primitive de u0 × f (u) est F (u). 3 ECE1 Lycée Clemenceau, Reims Preuve. Voici le tableau des primitives usuelles à connaı̂tre (que l’on peut déduire du théorème précédent) : Fonction f (x) = ... Primitives F (x) = ... u0 (x)eu(x) eu(x) + k, k ∈ R u0 (x)(u(x))−1 = u0 (x) u(x) u0 (x)(u(x))α (α ∈ R \ {−1}) u0 (x) 1 p (cas particulier où α = ) 2 u(x) ln |u(x)| + k, k ∈ R (u(x))α+1 + k, k ∈ R α+1 2 p u(x) + k, k ∈ R Exemple. Déterminer une primitive des fonctions suivantes sur l’intervalle I donné: 2 • f1 (x) = xe3x et I = R • f2 (x) = 3x − 1 et I = R 3x2 − 2x + 1 • f3 (x) = ln(x) et I = R∗+ x • f4 (x) = √ x x2 −2 et I =]2, +∞[ 4 ECE1 Lycée Clemenceau, Reims Définition de l’intégrale Définition. Soit f une fonction continue sur un intervalle I, F une primitive de f sur I et a, b ∈ I. Z b On appelle intégrale de f entre a et b le réel noté f (x)dx et défini par : a b Z a b f (x)dx = [F (x)]a = F (b) − F (a). Remarques. 1. La notion d’intégrale est indépendante de la primitive choisie: si F et G sont deux primitives de f , alors F = G + k pour un k ∈ R. On a alors: F (b) − F (a) = (G(b) + k) − (G(a) + k) = G(b) − G(a). Z b Z b Z a a b f (u)du... f (t)dt, f (x)dx, 2. La lettre x dans l’intégrale est muette. On notera indifféremment a 3. A partir de la définition de l’intégrale, on obtient immédiatement les formules suivantes: Z b Z 0dx = 0, a Z a a b Z f (x)dx = − f (x)dx = 0, a a f (x)dx. b Z Interprétation graphique. Si f est une fonction continue et positive sur [a, b], avec a ≤ b, alors b f (x)dx a est égale à l’aire de la surface délimitée par la courbe représentative de f et l’axe des abscisses entre les abscisses a et b dans un repère orthonormé. Z b I Pour calculer f (x)dx, on détermine une primitive F de f et on utilise la définition de l’intégrale: a Z a b b f (x)dx = [F (x)]a = F (b) − F (a). Exemple. Calculer les intégrales suivantes: Z 3 • I= (x2 + 3x + 1)dx. 1 • J= Z 1 2 (2x + 1)ex +x−1 dx. 0 5 ECE1 Lycée Clemenceau, Reims • K= Z e 1.2 e2 dx . x ln(x) Techniques de calcul d’intégrales Intégration par parties Théorème 5 (Intégration par parties) Soient u et v deux fonctions de classe C 1 sur [a, b]. Alors: Z a b b u0 (x)v(x)dx = [u(x)v(x)]a − Z b u(x)v 0 (x)dx. a Preuve. Rb Rb I L’intérêt de l’intégration par parties est de passer de l’intégrale a u0 (x)v(x)dx à l’intégrale a u(x)v 0 (x)dx si cette dernière est plus simple à calculer que la première. Pour effectuer une intégration par parties, • on écrit la fonction dont on doit calculer l’intégrale sous la forme d’un produit de deux fonctions. • on décide quelle fonction on dérive et quelle fonction on intègre. • on applique le théorème à ces deux fonctions. Exemple. Calculer les intégrales suivantes: Z 1 • I= xex dx. 0 6 ECE1 Lycée Clemenceau, Reims • J= Z e x ln(x)dx. 1 Changement de variables Théorème 6 (Changement de variables) Soit une fonction f continue sur un intervalle I et ϕ une fonction de classe C 1 sur [a, b], telle que ϕ([a, b]) ⊂ I. Alors: Z b Z ϕ(b) 0 f (ϕ(x))ϕ (x)dx = f (u)du. a ϕ(a) Z b I Pour effectuer un changement de variables dans l’intégrale f (x)dx, a 0 • on pose u = ϕ(x), avec ϕ de classe C 1 sur [a, b] et du = ϕ (x)dx. • on change les bornes de l’intégrale: lorsque x = a, u = ϕ(a) et lorsque x = b, u = ϕ(b). • on exprime f (x) et dx uniquement en fonction de u. • on applique le théorème de changement de variables : Z b 0 Z ϕ(b) f (ϕ(x))ϕ (x)dx = a f (u)du. ϕ(a) Exemple. Calculer les intégrales suivantes en utilisant le changement de variables proposé: Z 1 √ dx √ (poser u = x) • I= 1 + x 0 • J= Z 0 1 ln(1 + ex ) dx (poser u = 1 + ex ) 1 + e−x 7 ECE1 1.3 Lycée Clemenceau, Reims Propriétés de l’intégrale Théorème 7 (Propriétés de l’intégrale) (1) Linéarité de l’intégrale : Soit f et g deux fonctions continues sur un intervalle I et soit a, b ∈ I. Pour tout réel λ, on a: Z b b Z (λf (x) + g(x))dx = λ a b Z f (x)dx + a g(x)dx. a (2) Relation de Chasles : Soit f une fonction continue sur un intervalle I et soit a, b, c ∈ I. Alors: Z b Z f (x)dx = a c Z f (x)dx + a b f (x)dx. c (3) Intégration des inégalités : Soient f et g deux fonctions continues sur un intervalle I telles que, pour tout réel x ∈ I, f (x) ≤ g(x). Z b Z b • Bornes croissantes : Si a, b ∈ I, a ≤ b, alors f (x)dx ≤ g(x)dx. a • Bornes décroissantes : Si a, b ∈ I, a ≥ b, alors a Z b Z f (x)dx ≥ b g(x)dx. a a Remarque. Le point (3) du théorème précédent donne la positivité de l’intégrale : Si une fonction f est Z b continue et positive sur [a, b], avec a < b, alors f (x)dx ≥ 0. a Z Exemple. Soit (un ) la suite définie pour tout entier naturel n par un = 0 1 x dx. xn + 1 1. Montrer que la suite (un ) est croissante. 2. Montrer que la suite (un ) est majorée par 1 . En déduire qu’elle converge. 2 8 ECE1 Lycée Clemenceau, Reims Propriété 8 (Inégalité triangulaire) Si f est une fonction continue sur [a, b], avec a ≤ b, alors on a : Z Z b b |f (x)| dx. f (x)dx ≤ a a 2 Intégrales impropres 2.1 Définitions Définition. Soit f une fonction continue sur [a, +∞[, avec a ∈ R. Z +∞ f (x)dx est impropre ou généralisée en +∞. • On dit que l’intégrale a • L’intégrale impropre vers +∞ et on a alors: Z +∞ Z A f (x)dx converge si a f (x)dx admet une limite finie lorsque A tend a Z +∞ Z f (x)dx = lim A→+∞ a Z Dans le cas contraire, on dit que l’intégrale A f (x)dx. a +∞ f (x)dx diverge. a Remarque. On peut définir de la même façon l’intégrale impropre d’une fonction en −∞ ou en −∞ et +∞. Exemple. Vérifier si les intégrales généralisées suivantes sont convergentes et, le cas échéant, les calculer : Z +∞ dx . • I= x2 1 • J= Z 1 +∞ dx . x 9 ECE1 Lycée Clemenceau, Reims • K= Z +∞ −∞ 2.2 ex dx. (1 + ex )2 Propriétés des intégrales impropres Théorème 9 (Propriétés de l’intégrale) (1) Linéarité de l’intégrale: Soient a ∈ R et f, g : [a, +∞[→ R deux fonctions continues sur Z +∞ Z +∞ [a, +∞[. Si les intégrales f (x)dx et g(x)dx convergent, alors: a a +∞ Z (a) Pour tout réel λ, l’intégrale (λf (x) + g(x))dx converge. a (b) De plus, on a: Z +∞ +∞ Z (λf (x) + g(x))dx = λ Z f (x)dx + a a +∞ g(x)dx. a (2) Relation de Chasles: Soient a ∈ R et f : [a, +∞[→ R une fonction continue sur [a, +∞[. Si Z +∞ l’intégrale f (x)dx converge, alors: a +∞ Z (a) Pour tout réel c ∈ [a, +∞[, f (x)dx converge. c (b) De plus, on a: Z +∞ Z f (x)dx = a c Z +∞ f (x)dx + a f (x)dx. c (3) Intégration des inégalités : Soient a ∈ R et f, g : [a, +∞[ deux fonctions continues sur [a, +∞[ Z +∞ Z +∞ telles que f (x)dx et g(x)dx convergent. Si ∀ x ∈ [a, +∞[, f (x) ≤ g(x), alors a a Z +∞ Z f (x)dx ≤ a +∞ g(x)dx a Z +∞ Remarque. ATTENTION: il est possible que l’intégrale (λf (x)+g(x))dx converge alors que les intégrales a Z +∞ Z +∞ f (x)dx et g(x)dx divergent. On ne peut donc pas scinder une intégrale en deux sans avoir a a vérifié au préalable que les deux intégrales obtenues convergent. 10 ECE1 Lycée Clemenceau, Reims Exemple. 1. Vérifier que, pour tout x ∈ [1, +∞[, +∞ Z 2. Montrer que 1 Z 3. Les intégrales 1 +∞ 1 1 1 = − . x(x + 1) x x+1 dx converge et déterminer sa valeur. x(x + 1) dx et x Z 1 +∞ dx convergent-elles? A-t-on x+1 Z +∞ 1 dx = x(x + 1) +∞ Z 1 dx − x Z 1 +∞ dx ? x+1 Définition. Z L’intégrale +∞ Z +∞ |f (t)| dt converge. f (x)dx est absolument convergente si l’intégrale impropre a a Théorème 10 (Convergence absolue) Z Soient a ∈ R et f : [a, +∞[→ R une fonction continue sur [a, +∞[ telle que +∞ f (x)dx est a absolument convergente. Alors : Z +∞ (1) L’intégrale impropre f (x)dx est convergente. a En d’autres termes, la convergence absolue implique la convergence. (2) On a l’inégalité triangulaire suivante: Z +∞ Z ≤ f (x)dx a +∞ |f (x)| dx. a 11 ECE1 Lycée Clemenceau, Reims Remarque. Toutes ces propriétés restent valables pour des intégrales de la forme Z b Z +∞ f (x)dx ou −∞ 2.3 f (x)dx. −∞ Techniques de calcul des intégrales impropres I On ne procède pas à une intégration par parties ou à un changement de variables directement sur une intégrale impropre. On se ramène à une intégrale définie sur un segment et on passe ensuite à la limite. Intégration par parties Exemple. • Montrer que l’intégrale Z +∞ xe−x dx converge et donner sa valeur. 0 • Montrer que l’intégrale Z 1 +∞ e1/x dx converge et donner sa valeur. x3 12 ECE1 Lycée Clemenceau, Reims Changement de variables Exemple. • Montrer que l’intégrale variables u = ex . Z 0 +∞ dx converge et donner sa valeur. On pourra effectuer le changement de 1 + ex • Pour tout entier naturel n, on pose In = Z 1 effectuer le changement de variables u = +∞ (x − 1)n dx. Calculer la valeur de l’intégrale In (on pourra xn+2 1 ). En déduire lim In . n→+∞ x 13 ECE1 Lycée Clemenceau, Reims Propriété 11 (Intégrales impropres et parité) Z 0 f (x)dx converge si et seulement (1) Fonctions paires : Si f est une fonction paire sur R alors Z +∞ si f (x)dx converge et on a : −∞ 0 Z 0 Z −∞ +∞ Z f (x)dx f (x)dx = +∞ Z −∞ 0 +∞ f (x)dx. f (x)dx = 2 et 0 Z (2) Fonctions impaires : Si f est une fonction impaire sur R alors Z +∞ seulement si f (x)dx converge et on a : 0 f (x)dx converge si et −∞ 0 Z 0 Z f (x)dx = − −∞ +∞ Z f (x)dx 0 +∞ f (x)dx = 0. et −∞ Preuve. 14 ECE1 2.4 Lycée Clemenceau, Reims Intégrales de référence Théorème 12 (Intégrales de référence) Soit α ∈ R. Z (1) L’intégrale de Riemann 1 Z (2) L’intégrale +∞ dx converge si et seulement si α > 1. xα +∞ e−αx dx converge si et seulement si α > 0. 0 Preuve. 15