Direct Soir : La vision de Linda Blanchet

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Direct Soir : La vision de Linda Blanchet
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Directsoir N° 407 / Mardi 23 septembre 2008
CULTURE
THÉÂTRE
EXPOSITIONS
La vision de Linda Blanchet
Collection privée
Après des études à l’université de Berkeley, où elle a créé «Comédie» et «No exit»
de Samuel Beckett, Linda Blanchet a été assistante sur de nombreux opéras et pièces,
auprès de metteurs en scène tels que Daniel Benoin, Pierre Pradinas ou Alfredo Arias.
«Personne ne voit la vidéo», de Martin Crimp, actuellement à l’affiche du théâtre
de La Criée, est sa première mise en scène en France. Directsoir l’a rencontrée.
I MARSEILLE. La
galerie
Art-cade propose de découvrir
une infime partie
de la collection du Marseillais
Lucien Tirroloni, consacrée à
l’école marseillaise des années
1980, et notamment aux
artistes issus de l’Ecole
des beaux-arts de Luminy.
Des tableaux d’Olivier Debré,
de Gérard Schneider ou
Claude Viallat y croisent
des œuvres rares de Jacinto
Salvado ou Jacques Lagrange.
Mais il ne s’agit là que
d’un prélude : l’exposition
pourrait être bien plus
grande, tant est vaste la
collection de Lucien Tirroloni.
Un collectionneur marseillais,
Lucien Tirroloni, jusqu’au
4 octobre. Du mardi au samedi de
15h à 19h, galerie Art-cade, 35 bis,
rue de la Bibliothèque, Marseille 1er
(04 91 47 87 92).
Sarah Biasini interprétant Liz dans Personne ne voit la vidéo, mise en scène par Linda Blanchet.
Linda Blanchet.
s’identifier aux autres et d’exister dans le
monde. La langue de Martin Crimp est jubilatoire : il s’est inspiré de nos habitudes de
langage pour créer une parole très «rythmique». Comme dans la vie, on a toujours
l’impression que les personnages ne
s’écoutent pas complètement, ou plutôt ne
se comprennent pas. En fait, c’est plus
subtil, ils posent souvent des questions
pour ne pas avoir à y répondre…
Quel est le fil conducteur
de votre mise en scène ?
Les personnages de Martin Crimp se rencontrent presque toujours dans des «nonlieux» – bars, motels, salles de conférences –, c’est-à-dire des lieux qui ne sont ni
identitaires, ni relationnels, ni historiques.
On a donc créé, avec la plasticienne
Lauréline Bergamasco, un espace qui permette de multiplier les moments de transit et de rencontres fugaces, un espace
modulable où chacun serait constamment
contraint de faire et de défaire son environnement. Ce qui explique qu’il y ait
1 200 cartons sur le plateau du théâtre de
La Criée ! J’ai également travaillé avec le
chorégraphe Michael Allibert pour trouver
le corps de ces personnages. Nous sommes partis de la gestuelle personnelle des
comédiens et avons mis en exergue leurs
bégaiements corporels. Sans que l’on
puisse parler de danse, les personnages ont
leur manière de bouger – la nôtre, mais
exacerbée.
Vous êtes également comédienne.
Y a-t-il un rôle de cette pièce
que vous auriez aimé tenir ?
On s’identifie toujours aux personnages
quand on choisit un texte. C’est particulièrement vrai de celui de Liz, joué par Sarah
Biasini. Cette femme bascule malgré elle
dans le monde de l’entreprise et va petit à
petit trouver du sens à sa vie. J’ai connu
cette situation puisqu’avant de faire du
théâtre, j’ai travaillé en entreprise. Lorsque
Liz modifie malgré elle son vocabulaire et
sa manière de voir le monde parce qu’elle
travaille pour un institut de sondage, c’est
une évolution que je comprends, même si
je la questionne aujourd’hui. Martin Crimp
a lui-même été enquêteur dans un institut
de sondage avant d’être dramaturge.
Personne ne voit la vidéo, mise en
scène de Linda Blanchet, avec Sarah
Biasini, Lila Aissaoui, Boris Le Roy,
Maija Heiskanen et Michael Allibert.
Théâtre de La Criée, 30, quai de Rive
Neuve, Marseille 7e (04 91 54 70 54
ou www.theatre-lacriee.com).
© DR
Pourquoi avez-vous choisi d’adapter
cette pièce ?
Je cherchais un texte qui traite du monde
du travail et j’ai découvert, au cours d’un
voyage à Londres, cette pièce non publiée
en France. C’est un texte étonnant, à la fois
extrêmement drôle et très cruel sur notre
quête de sens et nos rêves d’accomplissement. Il parle de l’absence de gratuité dans
nos rapports sociaux – tout est objet
d’échange dans la pièce. Il raconte comment la norme sociale s’inscrit en nous au
travail, dans notre rapport au monde et aux
autres. Ce formatage n’est pas seulement
vécu comme une aliénation, mais aussi
comme un besoin des personnages de
Renaissance
en photos
MARSEILLE. Le photographe
Dominique Larosière a suivi
pas à pas l’exceptionnel
ouvrage des facteurs d’orgues
chargés de la restauration du
majestueux instrument de
l’église Saint-Vincent-de-PaulLes Réformés. Les orgues,
qui datent de 1888 et
sont classées monument
historique, se taisaient depuis
1948. Les très beaux clichés
du photographe rendent
compte de la mise en place
des quatre mille tuyaux
de bois et d’étain, ainsi que
du délicat travail
d’harmonisation permettant
d’en retrouver le son d’origine.
Exposition jusqu’au 29 septembre.
Espace Culture, 42, La Canebière,
Marseille 1er (04 96 11 04 60).
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