francesco dellamorte
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francesco dellamorte
100 icônes badass du cinéma Les années 90 • David Brami • FRANCESCO DELLAMORTE Q Interprété par Rupert Everett • Le film : Dellamorte Dellamore (1994). Réalisé par Michele Soavi • uoi de plus chiant que d’être dérangé sous la douche par la sonnerie du téléphone, pour rien qui plus est ? Pire encore, quand vous décrochez le combiné, voici qu’on sonne à la porte. Concernant Francesco Dellamorte (Rupert Everett), la sentence est sans appel : pour qui l’emmerde de la sorte, c’est une balle dans la tête ! Surtout quand l’emmerdeur en question est un mort-vivant. Comédien et ancien assistant réalisateur, entre autres sur certains chefs-d’œuvre de Dario Argento (les classiques Ténèbres, Phenomena et Opera), Michele Soavi assure la relève de tout un pan du cinéma horrifique transalpin en 1987 avec l’inventif Bloody Bird, premier long métrage de fiction dans lequel cet indéniable esthète reprend les codes du giallo en le teintant d’une fantasmagorique réflexion sur le métier d’acteur. Deux films plus tard, et après avoir œuvré en tant que directeur de seconde équipe sur Les aventures du baron de Münchausen (The Adventures of Baron Munchausen, 1988) de Terry Gilliam, il nous offre Dellamorte Dellamore en 1994, version toute personnelle du fumetti Dylan Dog, une série de BD imaginée par Tiziano Sclavi. Œuvre fortement inspirée des classiques de George A. Romero (au point qu’une des cases du premier tome calque l’affiche de Zombie), celle-ci met en scène un détective paranormal partant à la chasse aux nonmorts avec pour seule fortune son flegme, son assistant débile et d’irrésistibles clientes qui passent dans son lit avant de trépasser. Avec un physique à peu près similaire au héros dessiné (ce qui paraît logique vu que Sclavi s’était inspiré en 1986 des traits de l’acteur britannique pour créer ceux de Dylan Dog, ndlr), Rupert Everett, clope au bec et abdos saillants, campe ce personnage devenu croque-mort le temps du métrage, se résignant à envoyer une seconde fois ad patres des défunts qu’il a déjà mis en bière une première fois. Scouts, religieuses, groupe de motards, tout le monde y passe. Même la magnifique Anna Falchi dont il tombera amoureux plus d’une fois, et à qui il donnera la mort plus d’une fois aussi ! La première fois parce qu’il l’a cru morte, la seconde parce qu’elle s’est foutu de sa gueule. Non, Dellamorte, faut pas le faire chier. Surtout qu’avec l’habitude, morts ou pas, avec une balle dans la tête, finalement quelle est la différence ? Délirant, hanté par une ambiance de fin du monde aussi morbide que poétique, Dellamorte Dellamore s’impose comme une œuvre unique à la beauté transcendante. En son centre, Rupert livre sa prestation la plus torturée et la plus subtile, loin des bellâtres classiques et autres poster boys qu’il incarnera par la suite. Pour le coup, on adorerait le revoir endosser sa veste noire et son jean dans la suite du film, à l’origine prévue pour un tournage début 2012. Si seulement Soavi arrêtait de tourner pour la télé, ce n’est pas tous les jours que l’on peut mettre en scène un gars qui, au bout du rouleau, se paie le luxe de discuter en tête-à-tête avec la Mort. Au figuré comme au propre. ¶ 159