La lumière au prisme d`Augustin Fresnel entre arts et sciences

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La lumière au prisme d`Augustin Fresnel entre arts et sciences
La lumière au prisme d’Augustin Fresnel entre arts et sciences (1790-1900)
Auditorium du Louvre, 2 novembre 2015
Déroulé avec résumés et biographies
/ 10 h
Introductions
par Gérard Mourou, École polytechnique et Monica Preti, musée du Louvre
Gérard Mourou est professeur au Haut Collège de l’École polytechnique et professeur
émérite à l’University du Michigan Anne-Arbor. Il est le directeur d’IZEST (centre
International Zetta-Exawatt Science and Technology) à l’École polytechnique.
G. Mourou est le co-inventeur de la technique d’amplification laser, appelée Chirped Pulse
Amplification (CPA) utilisée sur tous les lasers de puissance dans le monde. À ce titre, Il est
considéré comme le père du domaine des très hautes intensités. L’invention du CPA, lui
permettra de devenir l’inventeur, de la chirurgie femtoseconde réfractive de l’œil utilisée
sur plus d’un million de patients par an. De plus, il a été le créateur de l’infrastructure
Européenne ELI (Extreme Light Infrastructure) située en République tchèque, Roumanie et
Hongrie, ainsi que le Apollon sur le plateau de Saclay. L’impact de G. Mourou sur le plan
économique est évalué à plus de 10 milliards euros avec la création de plusieurs milliers
d’emplois.
G. Mourou a reçu de nombreux prix internationaux dont le prix C. H. Townes 2009 de
l’Optical Society of America le plus prestigieux de la société. Il est fait Chevalier de la Légion
d'honneur en 2012. Il est membre de plusieurs académies dont celles des USA, Russe,
Autrichienne et Lombarde. Il est docteur Honoris Causa de 4 universités. Il est l’auteur de
plus de 400 articles scientifiques.
Monica Preti est historienne de l’art, docteur en histoire et civilisation de l’Institut
universitaire européen. Ancienne pensionnaire scientifique à l’Institut national d’histoire de
l’art, depuis 2006 elle est responsable de la programmation en histoire de l’art et
archéologie à l’auditorium du musée du Louvre. Ses recherches portent principalement sur
la culture visuelle dans l’Europe moderne : en particulier sur les rapports entre art et
littérature au 16e siècle (Imaginaire de l’Arioste, l’Arioste imaginé, avec M. Jeanneret,
Gourcuff Gradenigo 2009 ; L’Arioste les arts, dir., avec M. Paoli, Officina Libraria 2102) et
sur l’histoire du goût, des collections et des musées aux 18e et 19e siècles (Ferdinando
Marescalchi (1754-1816): un collezionista italiano nella Parigi napoleonica, Minerva
2005 ; Delicious Decadence. The Rediscovery of French Eighteenth-Century Painting in the
Nineteenth Century, dir., avec G. Faroult et C. Vogtherr, Ashgate 2014). Elle a récemment
dirigé deux ouvrages collectifs sur l’iconographie et l’imaginaire des villes détruites :
Wounded Cities: The Representation of Urban Disasters in European Art (14th-20th
Centuries), dir. avec M. Folin, Brill 2015 ; Villes en ruine: images, mémoires,
métamorphoses, dir. avec S. Settis, Éditions du Louvre-Hazan, 2015.
/ 10 h 30
La naissance de la lumière dans le cosmos
par George Smoot, Prix Nobel de Physique, APC Paris / U. Berkeley
George Smoot est spécialiste de la cosmologie et a obtenu, en 2006, avec John C. Mather, le
prix Nobel de physique pour ses travaux sur le fond diffus cosmologique et la découverte
des anisotropies (détection de faibles écarts de température dans le fond cosmologique). Il
est professeur à l’University of California à Berkeley et, depuis 2010, à l’Université Paris
Diderot - Paris 7.
Après un doctorat en physique au MIT, le Professeur George F. Smoot a rejoint en 1970
l’Université de Californie à Berkeley et le Lawrence Berkeley National Laboratory. En février
2010, il a été recruté comme professeur à l’Université Paris Diderot. Il est actuellement
titulaire d’une Chaire d’Excellence de l’Université Sorbonne Paris Cité. Il préside le Paris
Centre for Cosmological Physics (PCCP) et le Fonds de Dotation "Physique de l’Univers".
Le Professeur Smoot est l’un des deux co-lauréats du Prix Nobel de Physique 2006 "pour la
découverte des anisotropies du fond cosmologique micro-ondes”. Ce rayonnement est issu
du milieu chaud et dense qui régnait dans l’Univers juste après le Big Bang. En avril 1992,
George Smoot annonça à la communauté scientifique que l’équipe qu’il animait au sein de
la mission COBE (COsmic Background Explorer) de la NASA avait détecté de très légères
fluctuations dans ce fond cosmologique. Ces fluctuations étaient activement recherchées
car elles sont les germes autour desquels la gravité va peu à peu agglomérer la matière des
galaxies. Ces fluctuations sont en quelque sorte des fossiles de la création de l’Univers,
restes d’une époque primordiale qui a donné naissance aux galaxies et aux étoiles que nous
observons aujourd’hui.
/ 11 h
Augustin Fresnel et la théorie ondulatoire de la lumière
par Michèle Leduc, directrice de recherches émérite, CNRS
La « vraie » nature de la lumière s’est révélée progressivement de l’antiquité à nos jours. À la
fin du 17e siècle, Newton travaille sur les phénomènes de la couleur, totalement
inintelligibles à l’époque. Il fournit un modèle hétérogène de la lumière blanche où des
particules constituant les rayons incidents possèdent des vitesses ou des masses différentes
selon les couleurs ; il interprète ainsi la réflexion et de réfraction à travers un milieu
matériel. Pourtant ce modèle mécanique trouve ses limites pour les phénomènes
d’interférence et de diffraction et il faudra, pour les comprendre, attendre l’arrivée des
conceptions ondulatoires de la lumière avec Huygens, suivi par Young puis Augustin
Fresnel.
Augustin Fresnel était un polytechnicien destiné au génie civil. Passionné de physique, il
réussit à fonder l’essentiel de la science de l’optique au début du 19e siècle. Il lui revient
d’avoir expliqué et formalisé le fait que la lumière est une sorte d’ébranlement qui se
propage en cercles dans un milieu étendu, ou éther matériel, à partir de la source de
l’éclairement, par analogie avec la propagation du son dans l’air. La compréhension des
phénomènes d’interférences en découle. Il explique aussi de cette façon la propagation des
rayons lumineux en ligne droite, utilisant le concept de front d’onde perpendiculaire à la
direction de propagation ; il dégage alors le principe célèbre dit « Principe de HuygensFresnel » de l’enveloppe des ondes élémentaires. Ce principe permet la compréhension des
phénomènes de la diffraction de la lumière par les objets. Fresnel en fera la démonstration
devant les académiciens français sceptiques, alors tous adeptes de la théorie corpusculaire
issue de l’autorité de Newton. L’expérience célèbre de Fresnel dite du « point blanc de
Poisson », complétée d’une modélisation mathématique d’une grande rigueur, apporte une
irréfutable preuve de la diffraction des ondes lumineuses par les bords d’un obstacle.
On doit aussi à Augustin Fresnel l’hypothèse de la transversalité des vibrations lumineuses. Il
explique ainsi le mystérieux phénomène de la polarisation lumineuse qui, appliqué à des
lames cristallines, fournit de merveilleuses couleurs. À chaque couleur correspond une
valeur différente de la longueur d’onde. Ces hypothèses géniales sont la base de la théorie de
l’électromagnétisme de Mawell énoncée en 1870. Cette théorie classique parfaite sera à son
tour bouleversée au 20e siècle par l’avènement de la mécanique quantique, avec
l’introduction du concept de photon par Einstein et le retour de l’aspect corpusculaire de la
lumière, complémentaire plutôt qu’en contradiction avec la vision ondulatoire de Fresnel. La
compréhension de la lumière est encore une fois modifiée aujourd’hui par le développement
de l’optique quantique, fondée sur l’intrication des fonctions d’onde. Si la vérité actuelle s’est
bâtie sur un socle d’hypothèses successives et incomplètes, l’apport d’Augustin Fresnel
demeure fondamental.
Michèle Leduc est physicienne, directrice de recherche émérite au CNRS. Elle dirige l’IFRAF
(Institut Francilien de Recherche sur les Atomes Foids). Elle a été responsable de l’Année
Mondiale la Physique en France en 2005 puis présidente de la Société Française de Physique.
Ses recherches ont porté d’abord sur les propriétés quantiques des gaz à basse température.
Elle a développé de nouveaux lasers infra-rouges pour le pompage optique de l’hélium et
utilisé le gaz ainsi polarisé pour l’imagerie des poumons par résonance magnétique. Enfin
elle a étudié la condensation de Bose-Einstein de l’hélium métastable dans le domaine du
nanoKelvin au Laboratoire Kastler-Brossel à l’École normale supérieure.
/ 11 h 30
Broglie, ville des Lumières
par Philippe-Maurice de Broglie, duc de Broglie et Morgane Martin, École polytechnique
Le monde de la physique connaît un tournant en 1815 ; il voit naître, à travers le premier
mémoire du polytechnicien français Augustin Fresnel, un changement absolu dans la
conception de la lumière. Désormais elle n’est plus corps mais ondes !
Par cette découverte fondamentale, Augustin Fresnel donne suite aux travaux des physiciens
Francesco Maria Grimaldi, Christian Huygens puis Thomas Young et met un terme
provisoire à la théorie de l’émission professée par Isaac Newton en 1672 pour confirmer de
manière définitive la nature ondulatoire et vibratoire de la lumière.
Cette théorie est le fruit d’une curiosité artistique, celle transmise par François Léonor
Mérimée, oncle et tuteur d’Augustin Fresnel et père du célèbre écrivain Prosper Mérimée.
Professeur de dessin à l’École polytechnique et Secrétaire perpétuel à l’École des beaux-arts
de Paris, Léonor Mérimée déjà convaincu de la nécessité de réunir les arts et les sciences
pour favoriser les progrès de l’industrie, pousse son neveu dans certaines de ses
expérimentations autour des matériaux de la peinture et l’initie aux grandes découvertes
scientifiques, le guidant peu à peu vers les problématiques de la lumière.
Ainsi, le génie de Fresnel s’inscrit dans un siècle de progrès et d’instruction et se fait le
parfait témoin d’une époque où le peintre et le scientifique échangent et évoluent ensemble.
Il prouve que les plus beaux travaux scientifiques peuvent naître d’une stimulation
artistique.
Morgane Martin est actuellement responsable du bureau d’étude et directrice de projets de
conservation-restauration de peintures de chevalet et peintures murales pour l’entreprise
MORIMA.
Diplômée d’une Licence en histoire de l’art et d’un Master professionnel en conservation et
restauration des biens culturels en 2013, ses premières années d’expériences ont été
acquises au sein de sa propre entreprise. À ce titre, elle a notamment participé à la
restauration des costumes de scènes du spectacle Coucou Bazar de Jean Dubuffet.
Convaincue de l’apport indispensable de la recherche en connaissance et préservation du
patrimoine, elle a mené en parallèle un Master Recherche en Patrimoine et Conservation
dont elle a été diplômée en juin 2014 et pour lequel elle a entrepris un travail sur l’histoire
de la fabrication et de l’emploi des vernis aux 17e et 18e siècles.
En étroite collaboration avec le physicien et professeur Gérard Mourou et sous l’égide de
l’École polytechnique, elle mène actuellement un projet de recherche sur la peinture des 19e
et 20e siècles, de William Turner aux Impressionnistes, réétudiée sous un nouveau jour, celui
qui voit naître la théorie ondulatoire de la lumière professée par le physicien Augustin
Fresnel.
Philippe-Maurice de Broglie, duc de Broglie
/ 12 h
Peindre avec la lumière. Les prémices de la photographie couleur au 19e siècle
par Bertrand Lavédrine, Muséum national d’Histoire naturelle
Dès sa divulgation, en 1839, la photographie cristallise autour d’elle une communauté très
bigarrée de photographes, d’artistes, d’écrivains et de savants. À la fois objet d’émotion et de
science dans sa nature et dans ses usages, elle est utilisée, comme l’avait prédit François
Arago, « sous le quadruple rapport de la nouveauté, de l’utilité artistique, de la rapidité
d’exécution, de ressources précieuses que la science lui empruntera ». De fait, au 19e siècle,
les scientifiques investissent le champ de la photographie pour appréhender la lumière et
chemin faisant, ils parviennent à concrétiser le rêve des photographes en fixant directement
les couleurs du spectre solaire décomposé par le prisme. Si John Herschel, puis Edmond
Becquerel réussissent à enregistrer certaines couleurs du spectre, ce sera Gabriel Lippmann
qui proposera une solution élégante en 1891 avec le procédé interférentiel de photographie
couleur. Cette invention illustre de façon incontestable la théorie posée par Augustin Fresnel
et satisfait la communauté scientifique, toutefois elle ne connaîtra quasiment pas
d’application en photographie. La mise au point d’un procédé de photographie couleur
populaire privilégiera une approche pragmatique s’appuyant aussi bien sur les lois de la
physique que sur celles de la physiologie. Le physicien John Joly introduira ainsi une plaque
photographique couleur constituée d’une micro mosaïque colorée trichrome qui préludera
aux plaques autochromes Lumière et aux écrans modernes d’ordinateurs.
Cette présentation retracera le cheminement des travaux – entre le laboratoire du
scientifique et celui du photographe – qui ont abouti à la photographie couleur moderne.
Bertrand Lavédrine est professeur du Muséum national d’Histoire naturelle et directeur
depuis 1998 du Centre de recherche sur la conservation, sous la triple tutelle du CNRS, du
ministère de la Culture et de la Communication et du Muséum national d’Histoire naturelle.
Il a été responsable de formation en conservation-restauration des biens-culturels à
l’université Paris 1 de 2002 à 2007. Il a publié de nombreux travaux sur la conservation du
patrimoine culturel et a coordonné le projet européen POPART sur la préservation de l’art
contemporain.
/ 12 h 30
Voir la lumière dans les couleurs : La Théorie des couleurs de Goethe, un essai scientifique
d’artiste
par Danièle Cohn, université Paris 1 Panthéon-Sorbonne
Préoccupé de la beauté du monde, de l’éclat des phénomènes, Goethe cherche à comprendre
ce que son œil voit. Il propose une théorie, et non une science, qui rende compte des
« actions et passions » de la lumière : telles sont les couleurs, qui selon lui donnent la vie. On
analysera le choix artistique que constitue la Théorie des couleurs de Goethe et l’écho que
lui donneront les peintres.
Philosophe, Danièle Cohn est Professeur des Universités, et enseigne l'esthétique à Paris 1
Panthéon Sorbonne.
Elle a publié récemment Anselm Kiefer, Ateliers, Éditions du Regard, 2012, L'artiste, le vrai et
le juste, Éditions Rue d'Ulm, 2014. Elle a été commissaire de l'exposition De l'Allemagne, de
Friedrich à Beckmann, 1800-1939, au Musée du Louvre, 2013 et dirigé avec Sébastien
Allard le catalogue de cette exposition, Hazan, 2013.
/ 14h30
La science au service du réalisme : Jules Jamin et l’exemple du photomètre (1839-1857)
par Pierre Pinchon, université Aix-Marseille
Professeur à l’École polytechnique, Jules Jamin publie en février 1857 un important article
dans la Revue des Deux-Mondes intitulé « L’optique et la peinture ». Alors que la question
du réalisme monopolise les débats artistiques, ce disciple d’Arago entre à son tour dans
l’arène et propose aux peintres le concours de la science. S’adressant directement aux
artistes et plus particulièrement aux paysagistes, Jamin entend faire la promotion du
photomètre afin que la démarche réaliste ne soit plus seulement esthétique mais également
scientifique. Déjà abordées en 1839 dans le Magasin Pittoresque, la mesure de l’intensité
lumineuse et la question de sa mise en application dans le traitement pictural apparaissent
ainsi comme des préoccupations scientifiques qui se développent parallèlement à la
progression de la peinture en plein air et à l’émergence d’une tendance réaliste sur les
cimaises du Salon. Maintenant que les trépieds côtoient les chevalets en forêt de
Fontainebleau et que l’on s’embarque pour l’Orient aussi bien avec sa boîte à couleurs que
son appareil photographique dans les années 1850, cette communication se propose de
revenir sur les relations entre art et sciences entre 1839 et 1857, à l’aune de la tentative de
Jamin de populariser l’usage de la photométrie dans les milieux réalistes et orientalistes de la
peinture contemporaine.
Pierre Pinchon est maître de conférences en histoire de l’art contemporain à l’Université
Aix-Marseille. En 2011, il a publié La lumière dans les arts européens 1800-1900 aux
éditions Hazan, un ouvrage dans lequel l’évolution des arts au 19e siècle est étudiée à l’aune
des découvertes scientifiques sur la lumière et des transferts culturels. Spécialiste de la
période 1870-1914, il a organisé en tant que commissaire les expositions Gustave Moreau /
Théophile Gautier (Musée Gustave Moreau, 2011) et Gustave Moreau / Hélène de Troie. La
beauté en majesté (Musée Gustave Moreau, 2012) et a également collaboré à Odilon Redon.
Prince du rêve (Grand Palais, 2011) et Berthe Morisot (Marmottan, 2012).
/ 15 h
Lumière et couleur au 19e siècle en Angleterre : regards croisés
par Shearer West et Ian Walmsley, University of Oxford
This joint presentation considers the complex relationship between the scientific revolution,
in particular concerning the study of light, and artistic landscape practice in England the
eighteenth and nineteenth century.
The revolution in understanding light that took place in the 18th and 19th centuries
contrasted two kinds of views: first, the physical dichotomy of wave and particle, and second
the philosophical dichotomy of the observer and the thing observed. Newton’s Opticks of
1704, and Goethe’s Farbenlehre of 1810 embodied these two contrasts. The reception of
these ideas was varied in England and France, as well as by different groups of scientists and
artists. When Voltaire visited London in 1726-7, he commented acerbically that everyone
was talking about Newton’s work but hardly anyone understood it. The worldview Newton’s
mechanistic universe implied was reviled by artists like Blake who saw his approach as
confining and restrictive. Nonetheless, the contrast of brightness and darkness and the
nature of color influenced both a deeper understanding of light and its expression in
painting.
This was a period in which scientists – natural philosophers – and humanists, particularly
artists and poets, were in frequent conversation. In England, artists such as Joseph Wright of
Derby, John Constable and J. M. W. Turner both experimented with light and colour and
used colour emotionally and subjectively. At the same time, the conception of light itself took
a more abstract turn, even as optical instrumentation became more advanced, extending
vision and making it possible to acquire images of objects and scenes in new ways and in
color.
This talk will help illuminate how networks of scientists and artists in England laid the
ground for the more radical experiments of French artists such as Monet.
Shearer West is Deputy Vice-Chancellor of the University of Sheffield. She was previously
Professor of Art History and Head (Dean) of the Humanities Division at the University of
Oxford, and before that, Director of Research at the UK Arts and Humanities Research
Council and the Head of the School of Historical Studies at the University of Birmingham.
She is the author or editor of nine books on aspects of eighteenth, nineteenth and twentiethcentury art, including Portraiture (OUP) and Italian Culture in Northern Europe in the
Eighteenth Century (CUP). She has been a Visiting Fellow at Yale University twice, is a
Fellow of the Royal Society of Arts, the Royal Historical Society and the Higher Education
Academy.
Ian Walmsley is the Hooke Professor of Experimental Physics at the University of Oxford,
where is also the Pro-Vice-Chancellor for Research and Innovation. From 2011 – 2015 he
was also responsible for the University’s Libraries and Museums. He was educated at
Imperial College, London, and The Institute of Optics, University of Rochester, USA, where
he later became a Professor and Director. His research explores fundamental properties of
light and light-matter interactions, which he has applied to developing new application,
most recently in quantum technologies. He has published more than 250 papers in the areas
of ultrafast, nonlinear and quantum optics. He is a Fellow of the Royal Society, the Optical
Society of America, the American Physical Society and the Institute of Physics.
/ 15 h 30
Expérimentations scientifiques et esthétiques : la vision comme action cognitive selon
Helmholtz et Cézanne
par Michael Zimmermann, Katholische Universität Eichstätt-Ingolstadt
Cézanne parlait de la « réalisation » du motif quand il s’agissait de décrire le processus à
travers lequel l’objet se forme dans la vision, dans « l’œil », mais également dans l’œuvre
d’art, et dans le médium du dessin, de l’aquarelle ou de la peinture à l’huile. En 1907, Rainer
Maria Rilke définit ce qui se passe devant une toile de Cézanne comme « Dingwerdung », ou
« devenir de l’objet ». Cézanne se détournait de l’esthétique des impressionnistes pour
lesquels on ne voyait d’abord sur la rétine – considérée comme une table rase – que des
tâches colorées. Dans des situations d’expérimentation picturale soigneusement arrangées,
Cézanne s’applique à découvrir une autre poétique du visuel, analogue aux découvertes
d’Hermann von Helmholtz publiées, en 1867, dans le Handbuch der physiologischen Optik :
la vision, pour Helmholtz comme pour Cézanne, ne précède pas la saisie des objets, mais elle
y est inclue.
Pour Helmholtz, la vision n’est ni un enregistrement passif des impressions lumineuses sur
la rétine ni un processus se déroulant comme un automatisme, mais un acte
d’interprétation. La confrontation de sa conception empiriste et cognitive avec celles
privilégiant l’inné d’Ewald Hering et d’Ernst Mach permet de comprendre la vision de
manière plus précise, inscrite dans un débat de l’époque. La poétique du visuel chez
Cézanne sera mise en parallèle avec cette approche : dans un même tableau, l’artiste
combine de multiples caractères du visuel : telles des ombres dans deux couleurs
différentes ; des couleurs ne s’insérant pas dans des contours – pourtant multiples ; des
rythmes « syncopés » d’ombres et d’objets, de pommes et d’oranges etc. Ainsi, il oblige le
spectateur non seulement à « lire » le tableau, mais aussi à synthétiser de multiples lectures
émanant d’un seul objet. La vision, chez Helmholtz comme chez Cézanne, n’est donc pas
seulement une affaire de la « aisthesis », de la sensation, mais elle implique la « noesis », la
raison. La conférence expose donc cette vision cognitive, et sur sa découverte aussi bien
scientifique qu’esthétique, dans un discours qui unit l’histoire des sciences expérimentales,
notamment l’optique physiologique et psychologique, et une poétique du visuel conçue
comme une expérimentation avec son médium, le papier ou la toile.
Michael F. Zimmermann – Bibliographie sélective : Seurat and the art theory of his time ,
1991 (aussi en français) ; Industrialisierung der Phantasie. Der Aufbau des modernen Italien
und das Mediensystem der Künste, 1875-1900, 2006; Lovis Corinth, 2008; Die Kunst des
19. Jahrhunderts. Naturalismus – Impressionismus – Symbolismus, 2011. Étapes de sa
carrière : Berlin, Freie Universität ; Florence, Kunsthistorisches Institut ; Munich,
Zentralinstitut für Kunstgeschichte ; Université de Lausanne et actuellement Université
Catholique de Eichstätt-Ingolstadt. Membre de l’Académie des Sciences de la Bavière et de
l’Academia Europaea. Il est en outre auteur d’essais et éditeur d’ouvrages collectifs surtout
sur l’art des 19e et 20e siècles, sur la théorie artistique et l’histoire de sa discipline.
/ 16 h
L’élégance de l’art et l’éloquence des équations
par Frank Wilczek, Prix Nobel de Physique, MIT, Cambridge (Mass)
Professor Frank Wilczek is one of the most eminent theoretical physicists at work today.
When only 21 years old and a graduate student at Princeton University, in collaboration
with David Gross he discovered the fundamental equations for one of the four basic forces
of nature: the strong force. That work led to a Nobel Prize. He is also known, among other
things, for the development of unified field theories, the invention of axions, and the
discovery and exploitation of new forms of quantum statistics (anyons). Presently he is
working on the expansion of perception, both for practical purposes and for exploration of
the quantum world.
Professor Wilczek has received many honors. Notably, he was among the earliest MacArthur
Fellows (1982-87) and in 2004 he received the Nobel Prize in Physics. He contributes
regularly to Nature and to other scientific forums, explaining topics at the frontiers of
physics to wider scientific audiences, and is much in demand as a public lecturer. His new
book, A Beautiful Question (Penguin), appeared in July 2015.
/ 16 h 30
Projection du film documentaire
Ouessant, l’île des phares
Fr., 2013, 8 min., VOST anglais
Présenté par Vincent Guigueno, Musée national de la Marine
Ingénieur et historien français, Vincent Guigueno est spécialiste de l’histoire de la sécurité
de la navigation et de la conservation du patrimoine des phares. Il a d’abord poursuivi une
carrière administrative et scientifique à l'École des Ponts au sein du laboratoire Techniques,
Territoires et Sociétés, avant de rejoindre en 2009 la Direction des affaires maritimes en tant
que chargé de mission pour le patrimoine des phares.
En 2012, il a assuré le commissariat de l'exposition « Phares » au Musée national de la
Marine, musée dans lequel il est entré comme conservateur en 2015. Il est commissaire de
l’exposition virtuelle « Le phare étoile d’Augustin Fresnel » qui vient d’être mise en ligne
sur le site du musée national de la Marine :
http://mnm.webmuseo.com/ws/musee-national-marine/app/collection/expo/13
/ 17 h 30
Table ronde
Art et science de la lumière : un échange à double sens ?
Modérateur : Sébastien Allard, musée du Louvre
Avec : Gérard Mourou, École polytechnique ; Michel Menu, C2RMF ; Michel Blay, ENS,
Paris ; Danièle Cohn, Paris1 Panthéon-Sorbonne ; Ségolène Le Men, Université Paris Ouest
Nanterre
Ancien élève de l’École normale supérieure et de l’Institut d’études politiques de Paris,
Sébastien Allard, conservateur en chef du patrimoine, est le directeur du département des
Peintures du musée du Louvre. Spécialiste de la peinture française du XIXe siècle, il a été le
commissaire de nombreuses expositions internationales dont Dante et Virgile aux enfers
d’Eugène Delacroix (musée du Louvre, 2004), Portraits publics, portraits privés (17701830) (Paris, Galeries nationales du Grand Palais et Londres, Royal Academy of Arts, 20062007), Babylone (Paris, musée du Louvre ; Berlin, Pergamon Museum et Londres, British
Museum, 2008), Eugène Delacroix. De l’idée à l’expression, (Madrid, Caixa ForumBarcelone Caixa Forum, 2011-2012), De l’Allemagne (musée du Louvre, 2013). Il est aussi
l’auteur de nombreux ouvrages sur l’art de la première moitié du 19e siècle, dont Paris
1820. L’Affirmation de la génération romantique (2005), Le Louvre à l’époque romantique.
Les décors du palais (1815-1835) (2006), Ingres. La Réforme des principes (2006, avec M.
Cl. Chaudonneret), L’Art français. Le XIXe siècle (avec H. Loyrette et L. Des Cars) (2006), Le
suicide de Gros. Les peintres de l’Empire et la génération romantique (2010, avec M. Cl.
Chaudonneret), Prix 2011 de l’Essai de l’Académie française.
Michel Blay
Historien et philosophe des sciences, est directeur de recherche émérite au CNRS. Il a été
précédemment directeur du Centre d'archives de philosophie, d'histoire et d'édition des
sciences (CNRS/EHESS/Ecole Normale Supérieure) et auparavant directeur scientifique
adjoint du département des Sciences de l’homme et de la société du CNRS et directeur de la
recherche à l’ENS de Fontenay-Saint-Cloud. Après avoir enseigné la physique, il a soutenu
une thèse de troisième cycle en Histoire et Philosophie des Sciences et une thèse d’Etat ès
Sciences Humaines (philosophie). Ses travaux portent principalement sur l’histoire de la
mathématisation, depuis le XVIIe siècle, des phénomènes du mouvement d’une part, et sur
celle de la lumière et de la couleur d’autre part. Il s’agit de comprendre comment une
science mathématisée s’est constituée et s’est développée jusqu’à nos jours dans les domaines
considérés. Depuis quelques années il poursuit parallèlement à ces travaux une réflexion
sur le statut de la technique au XXe siècle et sur les modalités du développement de la
politique de la Recherche.
Docteur et HDR en physique optique, Michel Menu est Chef du département Recherche du
Centre de Recherche et de Restauration des Musées de France (C2RMF).
Ses recherches portent sur les multiples dimensions de la couleur des œuvres d'art. Parmi les
ouvrages qu’il a écrits ou codirigés : Art et électricité, Les Ulis, 2002 (actes du colloque,
Collège de France, Paris, 15 décembre 2000) ; Au cœur de La Joconde : Léonard de Vinci
décodé, Paris, 2006 ; Lumière, couleur : dialogues entre art et science, [2005], Paris
(catalogue de l’exposition, Cloître des Cordeliers, université Pierre et Marie Curie, Paris,
2005) ; OnLab, le laboratoire d’œuvres nouvelles de Michel Paysant, Paris, 2010 (catalogue
de l’exposition, musée du Louvre, Paris, 2009-2010) ; Leonardo da Vinci’s technical
practice : paintings, drawings and influence, Paris, 2014 (actes du colloque, National
Gallery, Londres, 13-14 janvier 2012).
Membre de l’Institut universitaire de France, Ségolène Le Men est professeur d’histoire de
l’art à l’université de Paris Ouest Nanterre après avoir été chercheur CNRS au musée
d’Orsay puis Directrice des études littéraires à l’École normale supérieure. Elle a été
commissaire de plusieurs expositions, dont Daumier (Paris, Ottawa, 1999-2000) et auteur
de nombreuses publications sur l’art français du 19e siècle. Ses livres ont porté sur la
pédagogie par l’image (Les Abécédaires français illustrés au 19e siècle, Paris, Promodis,
1984), l’illustration et le rapport entre art et littérature, entre beaux-arts et imagerie (Seurat
et Chéret. Le Peintre, le cirque et l’affiche, Paris, CNRS Éd., 1994, rééd. 2003), l’histoire du
regard et de la culture visuelle (La Cathédrale illustrée. De Hugo à Monet, regard
romantique et modernité, Paris, CNRS Éd., 1998, rééd. 2014 chez Hazan ; « Les images
sociales du corps », dans Histoire du corps sous la direction d’Alain Corbin, 2005 ; Courbet,
Citadelles & Mazenod, 2007). Elle est spécialiste de la peinture du 19e siècle et plus
particulièrement de l’impressionnisme (Monet, Paris, Citadelles & Mazenod, 2010 ; La
Bibliothèque de Monet, Paris, Citadelles & Mazenod, 2013).

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