Les représentations sociales. Quelques éléments de réflexion…
Transcription
Les représentations sociales. Quelques éléments de réflexion…
Les représentations sociales. Quelques éléments de réflexion… Le concept de représentation sociale, l'une des notions fondatrices de la psychologie sociale, mais aussi de la sociologie, désigne une forme de connaissance sociale, la pensée du sens commun, socialement élaborée et partagée par les membres d'un même ensemble social ou culturel. C'est une manière de penser, de s'approprier, d'interpréter notre réalité quotidienne et notre rapport au monde. Les représentations sociales sont des constructions mentales déterminées par des structures à la fois psychiques et socio-culturelles. Ex : Les représentations péjoratives des laïcs français (des politiciens républicains français, du gouvernement, de gauche ou de droite, et d’autres acteurs sociaux aussi …) à l’égard du port du voile islamique à l’école ou de la burqa en ville pour les femmes. Cette représentation est quasiment devenu un stéréotype culturel négatif générateur de conflits d’acculturation (cad une pensée qui insiste, se répète dans cet espace) qui conduit à une interdiction, à une loi afin d’harmoniser représentation majoritaire et réalité sociale. Un stéréotype est une opinion toute faite, figée, réduisant les singularités (Petit Robert) Ex de représentations : - Les représentations que nous nous faisons de la grippe A (tributaires des médias, donc des relais culturels). - Les représentations de la maladie mentale. - Des rôles sociaux des femmes et des hommes dans la société - Forte dimension culturelle des représentations sociales : en Inde par ex une veuve est considérée comme une femme qui porte malheur, aucun homme ne l’épousera plus et elle est marginalisée, mise à l’écart de la vie sociale quel que soit son âge… M.L. Rouquette écrit que « derrière la diversité apparente des préférences et des engagements se situent des règles configurantes d'origine sociale » cad constituantes, structurantes. Selon S.Moscovici, les représentations sociales, culturelles constituent un système symbolique organisé et structuré. C’est un cadre d’interprétation et de catégorisation qui sert d’ancrage pour donner un sens et diriger les conduites humaines. « Les représentations 1 individuelles ou sociales font que le monde soit ce que nous pensons qu’il est ou ( ce que nous pensons qu’il) doit être ». Ainsi les représentations agissent comme des éléments psychiques médiateurs entre le sujet et le monde : des médiations symbolisantes (« ce que nous pensons qu’il est ») car la pensée est de l’ordre du langage et de la symbolisation, doublées de médiations axiologiques et idéologiques comme l’indique l’expression : « doit être », c’est-à-dire que le monde représenté doit être conforme à des valeurs qui expriment les représentations. Valeurs et représentations se confondent en s’inscrivant dans des signifiants, des signes culturalisés. Le monde est ainsi fabriqué et les représentations semblent constituer des obstacles à la réalité de l’ « objet-monde », à la connaissance épistémologique de tout objet du monde, de tout réel. Gaston Bachelard affirmait que toute connaissance vraie s’établit ainsi par correction et réfutation de connaissances préalables erronées. Connaître, c’est connaître contre une connaissance antérieure. La science ne progresse qu’en réfutant ses erreurs, en dépassant des connaissances mal acquises, qui font obstacle à la vérité : « Quand il se présente à la culture scientifique, l’esprit n’est jamais jeune. Il est même très vieux, car il a l’âge de ses préjugés…qui constituent des obstacles épistémologiques » Le sociologue C.Guimelli en 1999 dans La pensée sociale écrit que les représentations sociales « recouvrent l’ensemble des croyances, des connaissances et des opinions qui sont produites et partagées par les individus d’un même groupe, à l’égard d’un objet social donné…leur fonction première est d’interpréter la réalité qui nous entoure d’une part en entretenant avec elle des rapports de symbolisation et d’autre part en lui attribuant des significations ». Pour ABRIC en 1988 : « On appelle représentation le produit et le processus d'une activité mentale par laquelle un individu ou un groupe reconstitue le réel auquel il est confronté et lui attribue une signification spécifique". La représentation est donc un ensemble organisé d'opinions, d'attitudes, de croyances et d'informations se référant à un objet ou une situation. Elle est déterminée à la fois par le sujet lui-même (son histoire, son vécu), par le système social 2 dans lequel il est inséré, et par la nature des liens que le sujet entretient avec ce système social.1 » Cette question des "représentations" a partie liée avec la construction de l'identité sociale et la production du sens social, donc la production des IDEOLOGIES. Elle permet l’étude de la relation des discours aux IMAGINAIRES SOCIAUX, plus largement le rapport entre langage et société. Ces images de cet IMAGINAIRE SOCIO-DISCURSIF seraient indispensables à la vie en société car elles permettent de CATEGORISER le REEL en ramenant les êtres et les objets à un TYPE ou à une GENERALITE, notions à rapprocher de la question des énoncés de généralisation. Les linguistes voient dans le stéréotype, une REPRESENTATION simplifiée associée à un mot. On parle d'images collectives figées considérées sous l'angle de la péjoration. On parle alors de « figements » ou de « schématisation ». P.Charaudeau (dans le dictionnaire d’analyse du discours, 2002, Le seuil) cite Grize (1950 : 50) « La notion de schématisation a pour rôle de faire voir quelque chose à quelqu’un ; plus précisément, c’est une représentation discursive orientée vers un destinataire de ce que son auteur conçoit ou imagine d’une certaine réalité. » Il faut lier Représentations, Stéréotypes, Clichés et Préjugés, ce sont des médiations sociales qui construisent la communication sociale quotidienne, qui font la réalité et qui la formatent selon des Pré-Construits-Culturels (PCC). Parfois conscients souvent inconscients car ces discours circulent et se figent et s'imposent malgré la vigilance, un peu à la manière des images subliminales. Les fonctions des représentations sociales · Des fonctions cognitives : Les représentations sociales permettent aux individus d'intégrer des données nouvelles à leurs cadres de pensée, c'est ce que Moscovici a mis en évidence à propos de la psychanalyse. Ces connaissances ou ces idées neuves sont diffusées plus particulièrement par certaines 1 Jean-Claude ABRIC. "L'étude expérimentale des représentations sociales" in Denise JODELET (dir.), Les représentations sociales, Paris : PUF, 1989, p. 188. L'ouvrage cité est Jean-Claude ABRIC, Coopération, compétition et représentations sociales, Cousset : Del Val, 1988. 3 catégories sociales : les journalistes, les politiques, les médecins, les formateurs… · Des fonctions d'interprétation et de construction de la réalité : Elles sont une manière de penser et d'interpréter le monde et la vie quotidienne. Les valeurs et le contexte dans lequel elles s'élaborent ont une incidence sur la construction de la réalité. Il existe toujours une part de création individuelle ou collective dans les représentations. C'est pourquoi elles ne sont pas figées à jamais, même si elles évoluent lentement. · Des fonctions d'orientation des conduites et des comportements : Les représentations sociales sont porteuses de sens, elles créent du lien ; en cela elles ont une fonction sociale. Elles aident les gens à communiquer, à se diriger dans leur environnement et à agir. Elles engendrent donc des attitudes, des opinions et des comportements. La représentation sociale a aussi un aspect prescriptif : " Elle définit ce qui est licite, tolérable ou inacceptable dans un contexte social donné.(16) " · Des fonctions identitaires : " les représentations ont aussi pour fonction de situer les individus et les groupes dans le champ social…(elles permettent) l'élaboration d'une identité sociale et personnelle gratifiante, c'est-à-dire compatible avec des systèmes de normes et de valeurs socialement et historiquement déterminés.(17) " Jodelet parle d'affiliation sociale : " Partager une idée, un langage, c'est aussi affirmer un lien social et une identité.(18) " · Des fonctions de justification des pratiques : Elles nous semblent très liées aux fonctions précédentes. Elles concernent particulièrement les relations entre groupes et les représentations que chaque groupe va se faire de l'autre groupe, justifiant a posteriori des prises de position et des comportements. Selon Abric, il s'agit d'un " nouveau rôle des représentations : celui du maintien ou du renforcement de la position sociale du groupe concerné. (19)" Michel-Louis ROUQUETTE et Patrick RATEAU, Introduction à l'étude des représentations sociales, Presses Universitaires de Grenoble, 1998. 4 « La plaisanterie de NIXON » - NIXON : Helen, vous portez encore des pantalons ? ça vous plait vraiment ? chaque fois que je vois une fille en pantalons, ça me rappelle la Chine ! HELEN : mais les chinoises commencent à s’habiller à l’occidentale (discours indirect) NIXON : Ce n’est pas pour vous vexer mais il y a des gens que les pantalons avantagent et d’autres non…Sur vous à mon avis, ça va très bien. Tournez-vous. HELEN : exécute une pirouette à l’intention du président NIXON : est-ce que ça plait à votre mari ? HELEN : Il s’en fiche NIXON : Est-ce que ça coûte moins cher que les jupes ? HELEN : Non NIXON : Alors changez ! Eclats de rire général (journalistes + officiels) Quel PLAN adopter pour analyser cette interaction atypique? ► D’abord quelques ENJEUX à évoquer… Autant de pistes interprétatives des 2 comportements inter-reliés de HT et Nixon, hors normes, non conformes aux attentes : 1) Effet ludique 2) L’aspect de grégarité propre à la situation. Effet de masse avec entrainement aux moqueries et de masculinité car HT est la seule femme, 3) Effet d’identité et de bouc émissaire… le sacrifice de l’une pour l’homogénéité de tous, du groupe d’hommes 4) Effet de proximité relationnelle qui dessert HT car la distance relationnelle protège 5) Effet de démonstration de l’autorité absolue du potentat, du pouvoir d’un président sur son lieu de pouvoir. Puissance pragmatique de la fonction. 6) Effet subjectif de Nixon d’une certaine jouissance (perverse et naïve) de faire faire à HT, d’adopter un rôle inacceptable moralement 7) Effet de franchissement du seuil sémiotique de HT. Violation de sa sphère idéale. Intrusion sur le TS. 8) Effet de stratification de l’expérience, pour toute interaction d’où l’indétermination des positions interactionnelles adoptées 9) … PLAN 1- les incohérences paramétriques de NIXON pr aux normes relationnelles et conventions sociales - une ligne d’action (propos, rires, attitudes …dif P) qui est opposée à son identité d’homme dans un cadre relationnel homme/femme pr au PCC de 5 la société bourgeoise américaine/occidentale ( pr. aux conventions de courtoisie en vigueur) - une ligne d’action qui est opposée à son rôle de président, attendu comme au-dessus de la mêlée pr aux représentations que tout citoyen se fait du devoir de réserve (pr à une norme relationnelle professionnelle) dans un cadre institutionnel. - Un propos ambigu et salace/lubrique discordant avec le lieu solennel 2- La stratégie rhétorique de NIXON qui outrepasse ses prérogatives - une gradation argumentative et conative (tension sur HT) - Argument par association : disqualification du port de pantalon par association avec chine archaïque - stratégie de dévalorisation/humiliation par moquerie/ironie/rires collectifs la grégarité - le MAIS implicite : la figure de DENEGATION - le mode INJONCTIF autoritaire, puis l’ORDRE catégorique - le recours à l’autorité du tiers absent, le mari d’Helen, (qui souligne la représentation que NIXON a de la relation verticale H/F, la femme soumise au désir de l’H, la F objet de l’H qui l’habille à sa convenance ; objet de séduction. - … 3- la ligne d’action coopérative d’HELEN. Hypothèses - intention : ne pas perdre la face, donc jouer le jeu sans faire mauvaise figure qui serait un aveu d’échec - coopérer, c’est préserver une relation de complicité avec le président, d’une certaine façon, c’est un privilège de faire rire le président même à ses dépens, c’est le rôle du bouffon du roi. En s’approchant du soleil on se brûle parfois …c’est le prix à payer. Il y a un prix pour chaque chose, rie n’est gratuit - impossibilité de faire autrement car elle a la position basse statutaire et n’est pas sur son TS - dans une perspective interpersonnelle H/F, évoquer ses formes à travers les pantalons, demander à voir ses fesses (retournez-vous !), c’est d’une certaine façon, s’intéresser et valoriser son physique. Gain narcissique et relation de séduction qui s’instaure au prix d’une plaisanterie …car il y a une érotisation du dispositif relationnel entre NIXON et HELEN par le sujet abordé et non rejeté par helen qui est de l’ordre de l’intimité. CONCLUSION : - Axée sur Les rôles atypiques joués par les 2 personnages construisent une relation qui sort des NORMES. Quelles hypothèses faire sur le mode de relation qui se constitue ? parce qu’il y a un avant et un après ce type de séquence interactionnelle 6 - lire p.166 les conclusions de Goffman (Façons de parler) U4DSLY1 : CONSIGNES pour l’épreuve de COMMUNICATION - Longueur du devoir : une copie double maxi en comptant la question de linguistique et/ou d’interculturalité. - Eviter la PARAPHRASE c’est-à-dire la simple reformulation qui raconte ou décrit l’histoire de l’interaction car ce n’est pas une analyse. IL faut théoriser et interpréter. - Théoriser, conceptualiser les actes langagiers interactionnels c’est-à-dire proposer une INTERPRETATION de ces actes, convertir les lexies en PARAMETRES (P = segments discursifs pertinents) sémiologiques qu’il faut NOMMER et en stratégies de communication (micro et macro stratégies). Souligner les paramètres dans votre devoir. - Pas d’ANALYSE LINEAIRE de l’interaction en listant les lexies car il faut montrer la dynamique de la stratégie interactionnelle. - Une stratégie est une configuration de paramètres (P qui convergent vers une visée interactionnelle) portée par une intentionnalité. - Pas de « catalogue » de lexies. Intégrer les lexies dans des stratégies interactionnelles, des configurations de P ( rassembler chaque fois que possible les P ) - PROBLEMATISER c’est déterminer les enjeux de l’interaction et rassembler les P en stratégies et en outils d’analyse et formuler des hypothèses. ( Ex1 outil : L’ Incohérence paramétrique = discordance de 2 ou plusieurs P mobilisés par L1 par rapport au PCC de L2, son cadre d’attente. Ex2 : L’image projetée d’un locuteur est définie par l’ensemble des P mobilisés. Ex3 : Le territoire sémiotique …). - STRUCTURATION très différenciée 7 - Il est impératif d’organiser son devoir : introduction, corps ( parties et sous-parties) et conclusion. Entre ces mouvements, sauter une ligne. - INTRODUCTION - Décrire la situation, les interlocuteurs, expliciter l’intérêt de cette interaction, formuler votre problématique de travail, présenter des hypothèses et proposer un PLAN détaillé. - CONCLUSION - Récapitulatif : synthèse de votre argumentation - Appréciation critique des stratégies de communication des interactants. - LISIBILITE de la copie : - Sauter une ligne entre les mouvements et souligner les titres des parties et sous-parties. - Sous/sur-ligner les paramètres et les stratégies nommés. - Citer les lexies, entre guillemets, qui portent les paramètres - Orthographe - Construction des phrases - Présentation générale - Effort d’écriture (calligraphie) : vous écrivez pour un évaluateur qui doit lire avec facilité votre devoir. 8