L`étude CLEOPATRA confirme la prolongation

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L`étude CLEOPATRA confirme la prolongation
RAPPORT SPÉCIAL
Le pertuzumab en cas de cancer du sein métastatique HER2-positif
L’étude CLEOPATRA confirme
la prolongation significative de la survie 3
L’association du pertuzumab (Perjeta®), du trastuzumab (Herceptin®) et d’une chimiothérapie par le docétaxel a prolongé de façon significative la survie globale des patientes atteintes d’un cancer du sein métastatique HER2-positif non préalablement traité, par rapport
à l’association trastuzumab + chimiothérapie + placebo. C’est ce qu’ont montré les résultats
3
de l’étude CLEOPATRA présentée lors du SABCS (San Antonio Breast Cancer Symposium).
Le trastuzumab, anticorps monoclonal humanisé anti-HER2, améliore les résultats des patients atteints de cancer du sein métastatique
HER2-positif. Néanmoins, on observe une progression dans un intervalle de 12 mois pour
environ 50% des cas. Le pertuzumab est un
anticorps monoclonal humanisé qui se lie au
domaine extracellulaire du HER2. Il possède
un mécanisme d’action complémentaire de
celui du trastuzumab. Il inhibe la dimérisation
de HER2-HER3 dépendante d’un ligand et réduit la transmission de signaux par les voies de
signalisation intracellulaires, comme celle de la
phosphatidylinositol-3-kinase (PI3K/AKT). L’association thérapeutique des deux anticorps a
démontré une action très prometteuse et un
profil d’innocuité acceptable dans le cadre de
l’étude de phase II menée chez des patientes
atteintes d’un cancer du sein HER2-positif (1).
Les dernières données de l’étude CLEOPATRA
(CLinical Evaluation Of Pertuzumab And
TRAstuzumab) viennent confirmer et compléter ces résultats (2, 3).
L’étude CLEOPATRA est une étude internationale de phase III, randomisée, menée
en double insu et contrôlée contre placebo.
L’étude a évalué l’efficacité et le profil d’innocuité du pertuzumab associé au trastuzumab et à une chimiothérapie par le docétaxel
par rapport à une association trastuzumab +
chimiothérapie par le docétaxel + placebo chez
808 patientes atteintes d’un cancer du sein
métastatique HER2-positif non préalablement
traité ou récidivant après un traitement préalable en contexte adjuvant ou néo-adjuvant. Le
critère d’évaluation primaire de l’étude était la
survie sans progression (PFS) examinée par
un comité d’évaluation indépendant. Les critères d’évaluation secondaires étaient la survie
globale (OS), la PFS évaluée par les médecins
investigateurs, le profil d’innocuité, le taux de
réponse globale (ORR), la durée de la réponse
et le délai jusqu’à la progression des symptômes. Les données de l’étude CLEOPATRA relatives à la PFS et à l’innocuité ont été publiées
dans le New England Journal of Medicine (2).
Durée supérieure de la survie globale
dans les données de phase III
Les derniers résultats de l’étude de phase III
CLEOPATRA concernant la survie ont récemment été présentés lors du SABCS 2012 (3).
Au moment de cette analyse, la durée médiane du suivi était de 30 mois et 267 décès
avaient eu lieu (69% des événements prévus
pour l’analyse finale). La durée médiane de la
survie globale chez les patientes traitées par
l’association incluant le pertuzumab n’avait
pas encore été atteinte, étant donné que plus
de la moitié des patientes étaient encore en
1 year
100
94%
90
2 years
89%
81%
Overall survival (%)
80
3 years
70
66%
69%
60
HR = 0.66
95% Cl 0.52–0.84
p = 0.0008
50
50%
40
30
20
Ptz + T + D: 133 events; median not reached
Pla + T + D: 154 events; median 37.6 months
10
n at risk
Stopping boundary for concluding statistical significance at
this second interim analysis was p ≤ 0.0138
D: docetaxel; Pla: placebo; Ptz: pertuzumab; T: trastuzumab
0
Time (months)
0
Ptz + T + D 402
Pla + T + D 406
5
10
15
20
25
30
35
40
45
50
55
387
383
371
350
342
324
317
285
230
198
143
128
84
67
33
22
9
4
0
0
0
0
Fig. 1: Estimations selon la méthode de Kaplan-Meier des taux d’OS avec le pertuzumab par
rapport à ceux observés avec un placebo
40
vie. La survie globale médiane chez les patientes recevant le trastuzumab et la chimiothérapie s’élevait à plus de 3 ans (37,6 mois).
Le risque de décès pour les patientes traitées
par le pertuzumab (P), le trastuzumab (T) et le
docétaxel (D) a été diminué de 34 %, par rapport aux patientes recevant le trastuzumab et
la chimiothérapie (HR=0,66; p=0,0008). Ce
résultat est significatif tant sur le plan statistique que sur le plan clinique. La survie sans
progression médiane était de 12,4 mois dans
le groupe témoin, contre 18,5 mois dans le
groupe recevant le pertuzumab (Hazard Ratio pour la progression ou le décès: 0,62;
intervalle de confiance à 95%: 0,51-0,75;
p<0,001).
Les estimations selon la méthode de
Kaplan-Meier des taux de survie globale
montrent un bénéfice en termes de survie
avec le pertuzumab à 1, 2 et 3 ans (fig. 1).
Le profil d’innocuité était similaire entre
les deux groupes, sans augmentation d’un
dysfonctionnement systolique du ventricule
gauche. Les taux de neutropénie fébrile et de
diarrhées (grade 3 ou plus) ont été supérieurs
dans le groupe sous pertuzumab par rapport
au groupe témoin.
A la lumière de ces données, les patientes
qui recevaient le trastuzumab et la chimiothérapie dans l’étude CLEOPATRA se sont vu
offrir la possibilité d’être traitées par le pertuzumab. En outre, il n’a été observé aucun
nouveau problème en matière d’innocuité
dans le cadre de l’étude (3).
La majorité des patientes ont reçu un traitement anticancéreux après l’arrêt du traitement à l’étude (64% dans le groupe sous
placebo et 56% dans le groupe sous pertuzumab). Le traitement ultérieur par des agents
ciblant le HER2 (trastuzumab, lapatinib, trastuzumab-emtansine [T-DM1]) était comparable entre les deux groupes de traitement.
Les causes de décès n’ont pas changé depuis la première analyse de l’OS qui avait
mis en évidence la progression de la maladie
comme cause la plus fréquente. Les effets indésirables entraînant le décès ont été rares et
comparables entre les deux groupes de traitement.
Ces résultats montrent que la combinaison d’une inhibition de HER2 et d’une chimiothérapie avec l’ajout du pertuzumab peut être
envisagée en première ligne en tant que traitement de référence pour les patientes atteintes
de cancer du sein métastatique HER2-positif.
02 _ 2013 _ info@onkologie
RAPPORT SPÉCIAL
L’incidence du cancer augmente avec l’âge,
tout comme le risque d’effets indésirables associés au traitement du fait des comorbidités
existantes. Les données concernant l’innocuité et l’efficacité du pertuzumab en fonction des
groupes d’âge ont été évoquées dans le cadre
d’une deuxième présentation des résultats
issus de l’étude CLEOPATRA lors du SABCS (4).
Les patientes ont reçu un traitement par
le pertuzumab ou un placebo et par le trastuzumab jusqu’à la progression de la maladie
ou l’apparition d’une toxicité inacceptable. Au
moins 6 cycles de docétaxel étaient recommandés, même si un nombre inférieur était
autorisé en raison d’une progression de la maladie ou de l’apparition d’une toxicité inacceptable. Le médecin investigateur a également pu
autoriser l’administration de plus de 6 cycles.
Les médicaments à l’étude ont été administrés
par voie intraveineuse toutes les 3 semaines.
Le critère d’évaluation primaire de l’étude
était la PFS évaluée par un comité indépendant. Les critères d’évaluation secondaires
étaient la survie globale, la PFS évaluée par le
médecin investigateur, le taux de réponse objective et l’innocuité du traitement. Les effets
indésirables étaient surveillés en permanence
et leur grade déterminé selon la version 3.0
des critères de toxicité définis dans le National
Cancer Institute (NCI-CTCAE).
L’analyse de la PFS évaluée par un comité
indépendant dans la population ITT a démontré une PFS médiane de 12,5 mois dans
le groupe sous placebo et de 17,2 mois dans
le groupe recevant le pertuzumab (HR=0,65;
IC à 95%: 0,53-0,80; p<0,0001) chez les patientes de moins de 65 ans. Chez celles âgées
de 65 ans ou plus, la PFS médiane était de
10,4 mois dans le groupe sous placebo et de
21,6 mois dans le groupe sous pertuzumab
(HR=0,52; IC à 95%: 0,31-0,86; p=0,0008)
(fig. 2).
L’incidence de diarrhées et de fatigue de
grade  3 chez les patientes âgées de 65 ans
ou plus a été supérieure à celle observée chez
les patientes de moins de 65 ans, et ce, dans
les deux groupes de traitement. En revanche,
les cas de neutropénie, de leucopénie et de
neutropénie fébrile de grade  3 ont été moins
fréquents chez les patientes âgées d’au moins
65 ans. Les cas de neuropathie périphérique
de grade  3 ont été observés avec la même
fréquence dans les deux groupes chez les patientes de moins de 65 ans, alors qu’ils ont été
plus fréquents chez les patientes de 65 ans ou
plus recevant le pertuzumab que chez celles
recevant le placebo. Toutefois, il convient de
noter que le nombre de patientes concernées
était très faible.
info@onkologie _ 02 _ 2013
100
Ptz
Ptz
Pla
Pla
90
Progression-free survival (%)
Les patientes plus âgées profitent
du traitement tout autant que
les plus jeunes
80
+
+
+
+
T
T
T
T
+
+
+
+
D
D
D
D
< 65
≥65
< 65
≥ 65
70
60
50
40
30
20
10
0
0
5
10
15
D: docetaxel; Pla: placebo; Ptz: pertuzumab; T: trastuzumab
20
25
30
35
Time (months)
Fig. 2: Courbe de Kaplan-Meier concernant la PFS évaluée de façon indépendante dans
différents groupes d’âge
Par rapport à l’association trastuzumab +
docétaxel + placebo, le traitement associant
pertuzumab + trastuzumab + docétaxel a entraîné une durée supérieure de la PFS évaluée
par un comité indépendant chez les patientes
âgées de moins de 65 ans, tout comme chez
celles âgées de 65 ans ou plus.
Aucun risque en matière d’innocuité
chez les patientes âgées
La population pour l’analyse d’innocuité comptait 678 patientes de moins de 65 ans (332
dans le groupe sous placebo et 346 dans le
groupe sous pertuzumab) et 126 patientes
de 65 ans ou plus (65 dans le groupe sous
placebo et 61 dans le groupe sous pertuzumab). Chez les patientes plus âgées, les cas
de diarrhées, de fatigue et de troubles du goût
sont apparus plus fréquemment dans les deux
groupes de traitement, alors que les cas de
neutropénie et de neutropénie fébrile ont été
plus rarement signalés. 4,8% (groupe sous
placebo) et 6,6% (groupe sous pertuzumab)
des patientes de moins de 65 ans et 6,2%
(groupe sous placebo) et 14,8% (groupe sous
pertuzumab) des patientes de 65 ans ou plus
ont signalé des diarrhées de grade  3. Dans
le cadre d’une analyse de régression univariée selon le modèle de Cox, il a été établi
qu’il n’y avait pas de corrélation statistiquement significative entre l’âge et le développement d’un dysfonctionnement systolique du
ventricule gauche asymptomatique ou symptomatique. Néanmoins, cette analyse présente
une sensibilité limitée aux différences relatives
au délai jusqu’à l’événement en fonction des
groupes d’âge, du fait du faible nombre total
des cas de dysfonctionnement systolique du
ventricule gauche. Une analyse exploratoire
post-hoc de la PFS évaluée par un comité indépendant dans la population en intention de
traiter (ITT) a démontré une PFS médiane de
12,5 mois dans le groupe sous placebo et de
17,2 mois dans le groupe recevant le pertuzumab (HR=0,65; IC à 95%: 0,53-0,80) chez
les patientes de moins de 65 ans. Chez celles
âgées de 65 ans ou plus, la PFS médiane était
de 10,4 mois dans le groupe sous placebo et
de 21,6 mois dans le groupe sous pertuzumab
(HR=0,52; IC à 95%: 0,31-0,86).
Dans l’ensemble, les données relatives à
l’innocuité issues de l’étude CLEOPATRA suggèrent que l’administration du pertuzumab
n’est pas limitée par l’âge, dans le cas de patientes présentant un bon statut de performance. Le traitement par le protocole P + T
+ D a entraîné une amélioration de l’efficacité chez les patientes, qu’elles soient ou non
âgées de plus de 65 ans.
Références :
1. Baselga J et al. Phase II trial of pertuzumab and
trastuzumab in patients with human epidermal
growth factor receptor 2-positive metastatic breast
cancer that progressed during prior trastuzumab
therapy. J Clin Oncol 2010;28:1138–1144
2. Baselga J, Cortes J, Kim S-B, et al; CLEOPATRA
Study Group. Pertuzumab plus trastuzumab plus
docetaxel for metastatic breast cancer. N Engl J
Med. 2012;366:109–119.
3. Swain S, et al. Confirmatory overall survival analysis
of CLEOPATRA: A randomized, double-blind, placebo-controlled Phase III study with pertuzumab, trastuzumab, and docetaxel in patients with HER2-positive first-line metastatic breast cancer. Poster-Vortrag auf dem CTRC-AACR San Antonio Breast Cancer Symposium 2012. Abstract Nr. P5-18-26.
4. Miles D. et al Pertuzumab (P) in combination with
trastuzumab (T) and docetaxel (D) in elderly patients with HER2-positive metastatic breast cancer
in the CLEOPATRA study. Poster-Vortrag auf dem
CTRC-AACR San Antonio Breast Cancer Symposium 2012. Abstract Nr. P5-18-01
IMPRESSUM
Rapport: Prof. Dr. Dr. h.c. Walter F. Riesen
Rédaction: Christian Heid
Avec le soutien de Roche Pharma (Suisse) SA, Reinach
© Aerzteverlag medinfo AG, Erlenbach
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