Dénombrement le retour - Site Personnel de Arnaud de Saint Julien

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Dénombrement le retour - Site Personnel de Arnaud de Saint Julien
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©Arnaud de Saint Julien - MPSI Lycée La Merci 2014-2015
Techniques de «dénombrement»
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Autour du cardinal
1.1
Dénombrer, c’est mettre en bijection avec J1, nK
On appelle cardinal d’un ensemble fini A, le nombre de ses éléments, noté Card A. Dénombrer
un ensemble A, c’est numéroter ses éléments a1 , . . . , an , ce qui revient à écrire une bijection 1 de
J1, nK sur A.
Si A est une partie d’un ensemble fini E, alors A est fini et Card A 6 Card E. Si de plus
Card A = Card E, alors A = E.
Proposition 1 Soit E et F deux ensembles et f : E → F .
• Si f est injective et F est finie, alors E est fini et Card E 6 Card F .
• Si f est surjective et E est finie, alors F est fini et Card E > Card F .
• Il existe une bijection de E dans F ssi Card E = Card F .
Proposition 2 Une application entre deux ensembles de même cardinal est bijective si et seulement si elle est injective, si et seulement si elle est surjective.
1.2
Fonction indicatrice d’un ensemble
Définition 3 Soit A une partie de E. On appelle fonction indicatrice de A, notée notée 1A , la
fonction de A dans {0, 1} définie par 1A (x) = 1 si x ∈ A et 1A (x) = 0 sinon.
Proposition 4 Soit A et B des parties de E. On a
1. 1A = 1 − 1A ,
1A∩B = 1A × 1B
2. 1A∪B = 1A + 1B − 1A∩B .
1.3
Somme de cardinaux
Proposition 5 (Formule du crible) Soit A et B deux parties d’un ensemble fini E. Alors
Card(A ∪ B) = Card A + Card B − Card(A ∩ B).
Si C est une partie de E, on a aussi
Card(A∪B∪C) = Card A+Card B+Card C−Card(A∩B)−Card(A∩C)−Card(B∩C)+Card(A∩B∩C).
Remarque : cette formule se généralise pour des réunions de n ensembles, elle est hors-programme :
Card
n
[
i=1
Ai
!
=
n
X
k=1

(−1)k−1
X
16i1 <i2 <···<ik 6n

Card 
k
\
j=1

Aij 
Exemple : parmi 40 secrétaires, 8 connaissent le russe, 15 l’anglais et 9 l’espagnol. D’autre part,
4 parlent l’anglais et l’espagnol, 5 l’anglais et le russe, 2 parlent le russe et l’espagnol et 2 parlent
les 3 langues.
• Combien de secrétaires ne connaissent aucune de ces 3 langues ? On cherche
Card(A ∩ E ∩ R) = Card(A ∪ E ∪ R) = 40 − Card(A ∪ E ∪ R)
1. L’ensemble J1, nK est ainsi le modèle d’ensemble à n éléments. Sur cette même idée, pour un ensemble infini,
on dira qu’un ensemble est dénombrable s’il est en bijection avec N, qui est notre ensemble infini «étalon». Les
ensembles Z, Q sont dénombrables mais R ne l’est pas. L’infini de R est «beaucoup» plus grand que celui de N.
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• Combien de secrétaires parlent espagnol et anglais mais ne parlent pas le russe ? On cherche
Card(A ∩ E ∩ R) = Card(A ∩ E) − Card(A ∩ E ∩ R).
Lorsque les réunions sont deux à deux disjointes, la formule devient très simple et sera un
précieux outil de dénombrement :
Corollaire 6 (Cas des partitions) Soit E un ensemble fini. Alors
1. Si A1 , . . . , An est une partition de E, c’est-à-dire que si les parties Ai sont deux à deux
disjointes et leur réunion vaut E, alors
Card E = Card A1 + · · · + Card An .
2. Si A est une partie de E, on a
Card E = Card E − Card A
Remarque : si on dispose d’une relation d’équivalence sur un ensemble E, les classes d’équivalence constituent une partition de E.
1.4
Produit de cardinaux
Proposition 7 (L’outil des choix successifs) Soit A et B deux ensembles finis. On a
Card(A × B) = Card(A) × Card(B).
Ainsi par récurrence, on a aussi Card(A1 × · · · × Ak ) = Card(A1 ) × · · · × Card(Ak ).
Dans des situations de choix successifs, donc où il y a un ordre ou une chronologie, on pourra
ainsi multiplier les nombres de choix, cette chronologie pouvant être représentée par un arbre.
Exemples :
• le nombre de couples (garçons,filles) possibles dans la classe est le cardinal de G × F , qui
vaut donc Card(G) × Card(F ).
• combien y-a-t-il d’entiers à 3 chiffres pairs ? On choisit d’abord le premier chiffre qui doit
être non nul, donc 9 possibilités, le deuxième 10 possibilités. Le dernier chiffre doit être pair
donc 5 possiblités. Au total, selon le principe des choix successifs, on a 9 × 10 × 5 possibilités.
• Si Card E = n, alors le nombre de parties de E vaut 2n . En effet si E = {x1 , . . . , xn }, se
donner une partie A de E, revient à se donner n booléens qui témoignent de la présence ou
non dans A des élements x1 , . . . , xn . On note ainsi b1 , . . . , bn les booléens tels que bi = 1 si
xi ∈ A et bi = 0 sinon. Il y a 2 choix possibles pour chaque booléen, donc par principe des
choix successifs, 2n choix possibles pour ces n booléens.
2
Dénombrement de collections, attention à l’ordre
2.1
Un exemple introductif
Combien de tiercés possibles avec 14 chevaux au départ ?
1. Un tiercé dans l’ordre est un podium. Il y a 14 choix possibles pour le premier cheval, 13
pour le second et 12 pour le troisième. Il y a donc 14 × 13 × 12 tiercés dans l’ordre, selon le
principe des choix successifs.
2. Des tiercés dans le désordre, il y en a moins, en fait six fois moins. En effet, à partir de 3
chevaux, et en permutant leur ordre, on fabrique 3 × 2 = 6 tiercés dans l’ordre. Le nombre
14!
= 12!3!
= 14
de tiercés dans le désordre est donc 14×13×12
3 .
3×2
Si on note E l’ensemble des chevaux, on peut modéliser :
• un tiercé dans l’ordre par une liste (a, b, c) d’élements de E deux-à-deux distincts, donc un
élément de E 3 .
• un tiercé dans le désordre par un sous-ensemble {a, b, c} de E, donc un élément de P(E).
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2.2
Notion de liste, l’ordre compte
Définition 8 On appelle p-liste de E un élément de E p , c’est-à-dire une liste de p éléments de
E. Le nombre de p-listes de E est donc Card(E p ) = Card(E)p .
Si E = {a, b, c}, les 2-listes sont : (a, a), (a, b), (a, c), (b, a), (b, b), (b, c), (c, a), (c, b), (c, c).
Une p-liste d’éléments distincts est aussi appelé un p-arrangement. Un tiercé est donc un 3arrangement.
Les 2-arrangements de {a, b, c} sont : (a, b), (a, c), (b, a), (b, c), (c, a), (c, b).
Il est facile de dénombrer les arrangements :
Proposition 9 (Nombre d’arrangements) Soit E un ensemble à n éléments. Le nombre de
p-listes d’éléments distincts de E vaut :
n × (n − 1) × · · · × (n − (p − 1)) =
n!
.
(n − p)!
On en déduit :
Proposition 10 (Dénombrement d’applications) Soit E et F deux ensembles finis avec Card E =
p et Card F = n.
1. Le nombre d’applications de E dans F est np .
2. Le nombre d’applications injectives de E dans F est n × (n − 1) × · · · × (n − (p − 1)).
3. En particulier le nombre de bijections de E dans E est p!. Ces applications sont aussi appelées
des permuations de E.
Remarques :
• L’ensemble des applications de E dans F est parfois noté F E . Cette notation provient de son
cardinal qui vaut Card(F )Card(E) .
• Il est beaucoup plus délicat de dénombrer le nombre d’applications surjectives.
• Trouver les anagrammes du mot «cheval» revient à trouver les permutations de l’ensemble
{c, h, e, v, a, l}. Il y en a donc 6!. Et pour «chacal» ? A découvrir en exercice.
2.3
Notion de combinaison, l’ordre ne compte pas
Comme on l’a vu avec l’exemple du tiercé, si l’on ne s’intéresse à l’ordre des éléments, on
n’utilise pas une liste d’éléménts mais un ensemble d’éléments.
Définition 11 Une p-combinaison 2 d’un ensemble E est une partie de E à p éléments.
Exemples :
• les 2-combinaisons de {a, b, c} sont : {a, b}, {a, c}, {b, c}.
• un trinôme (groupe de colle de trois élèves) est une 3-combinaison. En revanche, un podium
n’est pas une 3-combinaison car l’ordre compte.
Proposition 12 (Nombre de p-combinaisons) Soit E un ensemble à n éléments. Le nombre
de parties de E à p éléments vaut
n!
n
.
=
(n − p)!p!
p
Exemples :
• Il y a
37
3
trinômes possibles, mais 37 × 36 × 35 podiums possibles.
2. Attention au vocabulaire : pour un cadenas de vélo à 4 chiffres, on parle souvent de «bonne combinaison»
pour trouver le code d’ouverture qui est par exemple 4237. Du point de vue mathématique, ce code représente une
4-liste de chiffres(l’ordre est primordial) et non pas une 4-combinaison.
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6
grilles de lotos possibles.
• Savoir dire instantanément que n0 = 1,
• Il y a
n
1
= n,
n
n−1
= n,
n
n
= 1.
• On peut aussi redémontrer que Card P(E) = 2Card E . Si Card E = n, on écrit P(E) comme
la réunion disjointe des Ak pour k variant de 0 à n où Ak est l’ensemble
des parties
Pn
Pnde E à k
éléments. On a alors par additivité du cardinal, Card P(E) = k=0 Card Ak = k=0 nk =
2n .
Exercice 1 On désire former un jury composé de 2 scientifiques et 3 littéraires. On peut choisir
les membres du jury parmi 5 scientifiques et 7 littéraires.
• Combien de jury différents peut-on constituer ?
• Et si l’on impose que le scientifique Mr X doit obligatoirement faire partie du jury ?
• Et si deux littéraires donnés ne peuvent pas faire partie du même jury ?
Corrigé :
• On peut modéliser un jury par un couple (s, l) où s est un ensemble de 2 scientifiques à
choisir parmi 5 et l un ensemble
de
3 littéraires à choisir parmi 7. Par principe des choix
successifs, ce nombre vaut 52 × 73 .
• Avec la contrainte de Mr X, le nombre de façons de choisir s est 11 × 41 , donc le nombre
de jury est 11 41 73 .
• On passe par l’évènement contraire. Si ce couple de littéraires est présent dansle jury, il ne
reste plus qu’à choisir un littéraire parmi 5, le nombre de choix de l est donc 22 51 . Ainsi le
nombre de jurys sans ce couple de littéraires est : 52 73 − 52 22 51 .
On rappelle les propriétés des coefficients binomiaux. Elles peuvent être redémontrées par le
dénombrement. Certaines preuves s’en retrouvent même plus faciles et naturelles.
Proposition 13 Soit k et n dans Z. On a :
1. Symétrie :
n
k
=
n
n−k
2. Triangle de Pascal :
.
n−1
k−1
+
n−1
k
=
n
k
.
3. Formule de Vandermonde 3 : pour a, b et n dans N avec n 6 a + b, on a :
n X
a
b
a+b
=
.
k
n−k
n
k=0
2.4
Petit résumé
Dénombrer c’est mettre en bijection. Il est souvent utile de partitionner pour dénombrer des plus
petits paquets (principe d’additivité). Il est parfois plus simple de dénombrer le complémentaire
de l’ensemble. Rappelons enfin les différentes façons de choisir p objets dans une collection qui en
contient n (on prend p 6 n).
type de choix
ordre et répétion
ordre et sans répétion
sans ordre et sans répétion
sans ordre et avec répétion
nombre de
choix
np
n!
p!
n
p
n+p−1
p
modèle usuel
p-liste
p-liste d’éléments distincts
partie à p éléments
d’un ensemble à n éléments
loi des bosons
modélisation par une application
f : J1, pK → J1, nK
f quelconque
f injective
f strictement croissante
f croissante
Le dernier type de choix est hors-programme et à découvrir éventuellement en exercice.
3. Cette formule n’est pas au programme, mais d’utilisation courante en probabilités, et est à découvrir en
exercice.